samedi 4 mai 2019

Algérie : le putsch des généraux a fait trembler de Gaulle… mais a échoué

Le putsch des généraux le 21 avril 1961 à Alger ébranle le pouvoir gaulliste. Les dirigeants politiques font croire aux Français que les fascistes sont aux portes de la capitale avec l’intention de les égorger. Avec des trémolos dans la gorge, ils leur demandent de bloquer les routes avec leur voiture depuis Orly jusqu’à Paris. 
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Dans les usines, les bureaux, et les ateliers, les responsables CGT réunissent le personnel et leur annoncent qu’ils devront faire échouer l’insurrection par n’importe quel moyen. Charles de Gaulle, président de la République apparaît à la télévision en uniforme militaire, le visage empreint de gravité, il lance avec des accents déchirants que n’aurait pas désavoué le grand tragédien Talma de la Comédie Française « Aidez-moi ! ».
Ce qui suit est le scénario des événements. Il est vrai que dans la nuit du 21 avril 1961 à Alger, des généraux ont pris le pouvoir. Ils contrôlent entièrement la ville. Après la semaine des barricades, voilà une nouvelle action qui défie le pouvoir gaulliste en affirmant la volonté des plus hauts responsables militaires de conserver la province africaine dans le giron de la France.











































L’affaire trouve son origine dans l’allocution que le chef de l’État a prononcée le 4 septembre 1960, au cours de laquelle il a évoqué une Algérie algérienne. La déception est immense parmi ceux, qui le 13 mai 1958, ont favorisé son retour au pouvoir en étant persuadés qu’il n’emprunterait jamais la voie du désengagement.
À compter de janvier 1961, deux groupes se sont formés. L’un est animé par le général Maurice Challe, autour duquel se trouve Georges Bidault, Jacques Soustelle (l’ancien gouverneur général), le député Marc Lauriol ainsi que les généraux Zeller et Vailly. Les réunions ont lieu à Fontainebleau. L’autre groupe est mené par Godard, lequel fut très actif pendant le 13 mai, avec Lacheroy, Vaudrey, Gardes, Blignières et le général Faure. Ils se rassemblent une fois par semaine à l’École militaire. Dans les deux groupes, l’avenir de l’Algérie est le sujet central des conversations. Pour tous les généraux et officiers supérieurs qui ont été mutés en métropole après les barricades, l’urgence est de renouer avec l’esprit du 13 mai 1958, en suscitant un soulèvement qui, légitimé par le peuple, permettrait d’éliminer de Gaulle du pouvoir.
Tous sont conscients qu’un tel soulèvement ne s’improvise pas. Une personnalité doit en prendre le commandement. « Quels sont les patrons de l’armée qui seraient capables d’assumer des responsabilités à la tête du grand coup, se demandent-ils, et quels sont les régiments qui suivront, faisant basculer l’armée tout entière dans le camp révolutionnaire ? » On avance des noms. Raoul Salan ? Il accepterait, ne serait-ce qu’au nom de son anti-gaullisme. Mais comme il est peu apprécié des officiers, l’armée risquerait de ne pas le suivre. Jacques Massu ? « Je suis d’accord, avait-il répondu, s’il s’agit d’un baroud d’honneur. Mais si c’est pour prendre le pouvoir, je n’y crois pas. Je n’en suis pas et je n’en serai jamais. » Le héros de la bataille d’Alger reste fidèle à de Gaulle. Le vieux maréchal Juin ? Pour sauvegarder l’unité de l’armée il serait capable de se jeter à l’eau, mais pour l’action mieux vaut ne pas y penser. Un seul nom fait alors l’unanimité, celui de Maurice Challe.
Rugissant d’impatience d’en découdre avec le locataire de l’Élysée, Jouhaud coince Challe au mariage d’un ami, et lui met le marché entre les mains. « Il faut que tu partes pour l’Algérie ce soir, je vais me débrouiller pour te trouver un avion. Le 1errégiment étranger de parachutistes rentre d’opération, tu vas te mettre à sa tête pour sauver l’Algérie française. » Challe se montre réticent. Son expérience de militaire lui commande de mieux connaître les forces avec lesquelles il va devoir compter. « Je ne marche, répondit-il. Le 1er REP, c’est bien joli, mais pas suffisant. Je veux savoir de quels moyens je peux disposer. » Sentant qu’il ne peut aller plus loin, Jouhaud lui propose un rendez-vous dans trois jours à Paris. Lors de cette nouvelle rencontre, il montre à son camarade une liste impressionnante de colonels qui se déclarent prêts à participer à l’aventure. « Malgré toutes ces assurances, écrit le journaliste Yves Courrière, il décide d’attendre la prochaine allocution de Charles de Gaulle. Il doit parler de l’Algérie. »
Le 11 avril 1961 à 15 h 15, le chef de l’État évoque l’Algérie future dans ces termes : « Cet État sera ce que les Algériens voudront. Pour ma part, je suis certain qu’il sera souverain au-dedans et au dehors. Et encore une fois la France n’y fait aucun obstacle. » Plus que jamais, et définitivement, le Général s’engage dans la voie de l’indépendance. Le 12 avril ; Challe annonce à ses camarades et amis : « Je suis d’accord pour me mettre à la tête du mouvement, puisque de Gaulle jette l’Algérie par-dessus les moulins, on ne peut se laisser étriper. »
Le coup s’organise très vite, mais Challe s’inquiète : deux mille hommes pour faire une révolution, c’est tout de même un peu maigrelet. Heureusement, Denoix de Saint-Marc, patron par intérim du 1er REP, débarque dans son bureau. Il est au courant du putsch depuis plusieurs jours, il est de ceux qui ont une confiance aveugle en Challe et qui se méfient des « politicaillons » et des Européens excités ».
Les deux hommes mettent au point la philosophie de l’entreprise. Faire un putsch, prendre le pouvoir en Algérie, gagner la guerre rapidement puis, entouré d’un commandement exceptionnel dont Saint-Marc sera l’un des fleurons, se tourner vers la métropole et lui dire : « Alors cette fois, pas d’objection ? On reste ! » L’heure H est fixée dans la nuit du vendredi 21 avril à 2 heures du matin. Les parachutistes devront se rendre maîtres de dix-neuf objectifs algérois.
Et les civils ? S’inquiète Saint-Marc.
– Recrutés par Godard, Robin et Bayt, répond Challe, ils serviront de guides à vos camions pour vous mener aux pieds des dix-neuf objectifs.
Cette fois aucun doute n’est permis, l’affaire doit marcher. On se retrouve qu’entre militaires. Entre gens de confiance. Entre gens d’honneur. Et ils sont si nombreux à avoir donné leur accord et l’affaire est si bien préparée que rien ne peut désormais arrêter la machine. En effet, à 3 heures du matin, le régiment de parachutistes contrôle les dix-neuf points stratégiques de la ville. À l’aube, les Algérois s’aperçoivent que le pouvoir a changé de main et retrouvent avec plaisir les paras, leurs enfants chéris. Pour Maurice Challe, cependant, les déceptions commencent. Des généraux et des officiers qui l’avaient assuré de leur participation reculent. Le général Gouraud, commandant le Constantinois – la région où sont stationnées les troupes d’élite – est le premier de la liste. En Kabylie, le général Simon refuse d’appuyer le mouvement rebelle. Il précise à Challe.
Je vous obéirai opérationnellement, mon général, mais administrativement je continuerai à dépendre de Paris.
Mais enfin, s’insurge Challe, ce n’est pas logique ! Ou vous êtes avec moi ou vous êtes contre moi.
Simon sera totalement contre lui. D’heure en heure, le plan qui semblait des semaines auparavant si solide se délite et se trouve sur le point de sombrer. Car il est quelque chose que ces généraux factieux n’ont pas pris en compte dans l’analyse de l’opération, c’est l’aspect humain. La plupart des officiers sont mariés et, quoi qu’on en dise, font une carrière. Or les épouses retiennent les maris avec des objections simples : « Dans quelle aventure te lances-tu ? Qu’est-ce que tu vas devenir ? Et nous ? Pense à ta femme, à tes enfants, à ta carrière ! » Ni les uns ni les autres n’ont envie de mettre en péril une situation bien souvent obtenue au prix de mille sacrifices. S’ajoutent à cela les actions désordonnées de l’Organisation armée secrète (OAS) naissante. Ses membres parcourent la ville et pillent les commissariats, se conduisent en milicien et arrêtent le premier venu pour peu qu’il soit jugé libéral ou, pire encore, gaulliste.
Pour Maurice Challe, l’arrivée d’Espagne de Raoul Salan, flanqué de Jean-Jacques Susini, le dialecticien de l’OAS, n’arrange rien. Il craint qu’il ne fasse basculer l’équilibre désormais précaire de l’opération par des déclarations intempestives. Les deux hommes se saluent sans effusion.
Les défections des officiers continuent, le gros des unités ne suit pas. Jusqu’au bout, ce sont les légionnaires à béret vert, les « étrangers » qui seront le fer de lance et le service d’ordre du putsch. Et puis de Gaulle parle : « Un quarteron de généraux en retraite… Un groupe d’officiers partisans, ambitieux et fanatiques… » La troupe, c’est-à-dire les appelés du contingent, ne suit pas non plus.
Toute cette agitation ne concerne pas la jeunesse de France que l’on a contrainte à participer à une guerre pour laquelle elle ne sent pas la moindre motivation. Challe constate par lui-même la mauvaise volonté des appelés. Qu’ils soient intellectuels, techniciens ou gradés ; il lui faut en effet un temps infini pour obtenir la plus petite information dactylographiée, la moindre note de service. Alors, la mort dans l’âme, il réunit les chefs qui lui sont restés fidèles.
« Messieurs, rentrez dans vos garnisons avec vos unités. L’affaire est finie. Nous avons échoué. Il faut maintenant en tirer les conséquences. Je ne vous laisserai pas payer tout seuls, rassurez-vous, ce n’est pas mon genre » Après le départ pour la clandestinité des uns et des autres, Challe se tourne vers Saint-Marc et lui dit :
Vous êtes jeune, Saint-Marc, on va payer cher. Laissez-moi me livrer seul. Qu’il y en ait un de plus ne servira à rien.
Hélie de Saint-Marc se raidit.
Mon général, vous n’avez pas voulu abandonner vos troupes et les laisser payer pour vous, permettez que j’en fasse autant avec les miennes.
Cette fois, le putsch est fini. Il a duré quatre jours et cinq nuits. L’armée d’Algérie en sort à jamais brisée. Désormais, il y a ceux qui ont été pour le putsch, ils sont éliminés, et puis les autres : la majorité. Pour ceux-là, tout ce qui peut leur arriver n’a plus d’importance, vraiment plus aucune importance, l’Algérie sera indépendante sous peu.
Raphaël Delpard
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beretvert
Honneur à ces militaires qui ont défié de Gaulle le félon et les français étaient déjà les veaux que nous avons aujourd’hui la France a abandonné l’algerie et devient une colonie de celle ci
Finalement c’est logique hélas
Bombastus
Un putsch en gants blancs, ç’aurait été un peu trop beau. Les tièdes, on les met à l’ombre, voire au frais…
. Dupond 1
. Cest l’époque ou a 20h mon grand pere allume la TSF pour écouter « françaises français de dunkerque a tamanraset  » mais chez nous personne n’avait peur de l’OAS ou des fellouzz ….l’unique soucis pour les miens qui avaient travaillé dur toute leur vie pour seulement manger etait de voir revenir le petit frere de mon pere appellé du contingent partit avec d’autres jeunes du canton défendre une terre ou leur acceuil n’a pas été des plus chaleureux . L’Algérie une énorme déchirure pour les PN de petites conditions et un drame pour les familles des appellés du contingent égorgés par les parents de ceux que nous soignons maintenant gratos dans nos hopiteaux
Viktor
La honte c’est qu’après cet échec, des p’tits gars du Contingent ont continué à se faire tuer dans des embuscades, sans oublier le massacre des harkis restés fidèles à la France mais aussi le bain de sang du 5 juillet 1962 à Oran sous « le contrôle » d’un certain général Katz, alors que le cessez le feu était en vigueur depuis 3 mois ! C’était hier sur l’autre rive de la Grande bleue ! 58 ans plus tard, dans une France envahie, occupée par ceux là même qui nous ont chassé, que faut-il attendre de nos généraux, tétanisée par l’échec du 21 avril 1961 ? Notre armée préfèrera livrer la France à l’envahisseur sans combattre voire à participer activement à l’élimination des « derniers mohicans » qui voudraient résister.
Chassaing Jacques
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