« Asia Bibi, une victime expiatoire »
Au Pakistan, la législation sur le blasphème n'a cessé de se durcir
Au Pakistan, la législation sur le blasphème n'a cessé de se durcir
Chaque « accommodement » avec l’islam politique (et même
radical) n’est rien d’autre qu’une manifestation de faiblesse, de lâcheté, de
renoncement à nos traditions laïques, favorisant une communautarisation
progressive de la société française qui tend à se fractionner jusqu’à ne plus «
faire société », jusqu’à entraîner des pertes de souveraineté dans nombre de
territoires et de « quartiers ».
Discours de Gérard Collomb lors de son départ du ministère
de l’intérieur.
Extrait :
« Monsieur le Premier ministre, si j'ai un message à faire
passer - je suis allé dans tous ces quartiers, des quartiers nord de Marseille,
au Mirail à Toulouse, à ceux de la couronne parisienne Corbeil, Aulnay, Sevran
- c'est que la situation est très dégradée et le terme de reconquête
républicaine prend là tout son sens parce qu'aujourd'hui dans ces quartiers
c'est la loi du plus fort qui s'impose, celle des narcotrafiquants et des
islamistes radicaux, qui a pris la place de la République. »
L'arrivée des islamistes remonte aux années 50 , FLN et MNA
se flinguaient dans les rues de Roubaix ( par exemple) , ils se sont installés
maison après maison faisant partir ainsi le habitants de toujours , et ça n'a
jamais arrêté depuis , la seule différence c'est qu'ils arrivent par bateaux
devant les caméras et photographes .
Depuis ce temps là tous ceux qui avaient l 'outrecuidance de
dénoncer cette invasion malfaisante étaient insultés , traités de racistes ,
fachos etc.....alors vos leçons 2018 vous pouvez vous les mettre où je pense .
Eric Fletcher Lautre
• il y a 6 jours
Exact ! J'étais étudiant à Lille en 1960 et j'ai pu voir un
café de Wazemmes fréquenté par des gens du MNA criblé de balles de MAT49 par
leurs coreligionnaires du FLN ! Et pendant ce temps là, on faisait la chasse
aux sympathisants supposés de l'OAS !
4° de couverture de « L’islam à la conquête de l’Occident »
de Jean-Frédéric Poisson. Ed du Rocher, Collection : ROC.DOC.SOCIETE
Extrait :
« Installer à la place de la société occidentale déclinante
une « civilisation de substitution », l'islam, seule religion susceptible de
rendre les hommes heureux : c'est l'ambition affichée par les États musulmans
dans un document stratégique adopté par eux à l'unanimité il y a dix-huit ans,
à l'automne 2000.Ce document décrit dans le détail la manière dont procèdent, aujourd'hui
encore, les États musulmans pour étendre la charia en Europe. Apprentissage de
l'arabe, communautarisme, financement des mosquées, etc. : tout y est décrit.
Cette stratégie montre précisément comment s'engouffrer dans les failles et
faiblesses de la société occidentale, quitte à favoriser ses fractures et
dérives, pour mieux y installer l'islam. Ce document est officiel. »
Jean-Frédéric POISSON est le président du Parti
chrétien-démocrate. Il a présidé la commission d'enquête parlementaire sur les
moyens de Daech et piloté les travaux de la commission des lois sur l'état
d'urgence. Titulaire d'un doctorat de philosophie consacré à la dignité humaine
et à la bioéthique, juriste en droit du travail.
Voir également « La Conquête de l'Occident. Le projet secret
des islamistes » de Sylvain Besson, Ed Le Seuil, 2005. Sylvain Besson né en
1970, est journaliste au Temps, à Genève.
Voir également : "La France Interdite", Enquête
sur un sujet tabou : la disparition d'une nation. De Laurent Obertone, Editeur
Ring, septembre 2018..
« Castaner
fera des accommodements déraisonnables avec l’islamisme soft »
Entretien avec l'essayiste Yves Mamou
Par Daoud
Boughezala
- 23 octobre 2018
2KPARTAGES
Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur. Sipa. Numéro
de reportage : AP22255925_000002.
Dans Le Grand abandon, les élites françaises et
l’islamisme, le journaliste Yves Mamou dresse un constat
implacable : nos élites ont trahi en ouvrant la France à l’immigration
incontrôlée et à l’islamisme. Encore inaudible il y a quinze ans, lors de la
publication des Territoires perdus de la République, ce discours
gagne de plus en plus de terrain. Entretien.
Daoud Boughezala. Sous la direction des journalistes
Gérald Davet et Fabrice Lhomme, Le Monde a dirigé une enquête
d’un an sur l’islamisation de la Seine-Saint-Denis, aujourd’hui objet d’un
livre intitulé Inch’Allah. Par ailleurs, Martine Aubry et Gérard
Collomb ont souligné le risque de guerre de tous contre tous dans les
« territoires perdus de la République ». Après des années de
déni, les élites ouvrent-elles enfin les yeux ?
Yves Mamou. Le déni est une politique d’Etat.
Les prises de conscience – tardives – de certains n’y changeront rien. Cette
politique du déni s’est progressivement installée au fur et à mesure de
l’islamisation d’une frange importante des Français musulmans. Elle se traduit
par exemple, par le fait que le procureur Molins, autrefois chargé de la lutte
antiterroriste, ne caractérisait jamais les tueurs comme des terroristes
islamistes mais comme des « déséquilibrés ». La psychiatrisation de
la violence islamiste est un déni. Et ce déni a eu pour corollaire une
répression de la liberté d’expression. Tout journaliste ou intellectuel qui
tentait de replacer le débat de l’islam ou de l’immigration sur le terrain
politique était taxé de racisme et envoyé devant un juge.
Cela dit, que deux journalistes du Monde regardent
soudain la réalité en face me procure un grand soulagement personnel.
Grâce au Monde, dans les dîners en ville, il
sera possible d’émettre une pensée hérétique sur l’immigration ou l’islam sans
être traité de raciste.
Dans le meilleur des cas, les actions des deux
ministres s’annuleront l’une l’autre.
C’est déjà un progrès ! Pour rester dans l’actualité, que
vous inspire la nomination du tandem Castaner – Nunez au ministère de l’Intérieur ?
L’ancien directeur de la DGSI n’est-il pas un gage d’efficacité dans la lutte
contre le terrorisme ?
Le tandem Castaner – Nunez est l’absurde illustration de ce
déni dont nous parlions. L’ancien directeur de la DGSI luttera contre
l’islamisme hard tandis que Castaner pratiquera des accommodements
déraisonnables avec l’islamisme soft. Gouverner ainsi, c’est refuser de voir
que le terrorisme islamiste et l’entrisme islamiste sont deux volets d’une même
stratégie. Dans le meilleur des cas, les actions des deux ministres
s’annuleront l’une l’autre. Dans le pire des cas, ce « en même temps »
sécuritaire sera générateur de catastrophes.
Une « préférence islamique » a conquis
progressivement toutes les sphères du pouvoir.
Votre ouvrage Le Grand abandon, les élites
françaises et l’islamisme met en cause la politique d’immigration.
Pensez-vous que les attentats de janvier (Charlie, Hyper casher) et
novembre 2015 (Bataclan, Stade de France) ne se seraient pas produits sans
quarante ans d’immigration massive ?
Le Grand abandon part d’une question
simple : comment l’islamisme a-t-il pu générer autant d’idiots utiles en
France ? Le nombre d’intellectuels, d’experts, de femmes et hommes
politiques qui ont trouvé intérêt à relativiser, défendre, voire justifier les
méfaits d’une idéologie politico-religieuse rétrograde, meurtrière,
liberticide, intolérante, misogyne et antisémite m’a interloqué. Après Charlie
Hebdo et l’Hypercacher, j’ai donc entrepris de faire la liste des
« amis » de l’islamisme en France. Au terme de mon inventaire, je me
suis aperçu que j’avais reconstitué le bottin du Pouvoir. Partis politiques,
grands corps de l’Etat, Justice, Université, Experts, Artistes, People, Médias…
tous, en majorité, ânonnent une idéologie victimaire qui fait le jeu des
islamistes. Même la politique droit-de-l’hommiste de l’Eglise catholique fait
le jeu des islamistes.
A l’évidence, une « préférence islamique » a
conquis progressivement toutes les sphères du pouvoir. Cette préférence
islamique a légitimé et accompagné le puissant courant migratoire en provenance
des pays d’Afrique du Nord et d’Afrique sub-saharienne qui a commencé à la fin
de la guerre d’Algérie et qui prévaut encore aujourd’hui. L’hypothèse que je
formule dans Le Grand Abandon est qu’avec la mondialisation, la préférence
islamique et la politique d’immigration se sont progressivement structurés en
choix idéologiques et politiques cohérents. Des chefs d’entreprise ont cherché
à faire baisser le coût du travail de la main d’œuvre nationale et ont demandé
aux partis politique d’ouvrir les frontières ; les politiques ont
rapidement compris que ces millions de travailleurs étrangers pouvaient
représenter un réservoir de voix automatique favorable à leur réélection.
Parallèlement, les associations antiracistes ont été subventionnées pour lutter
contre l’émergence d’une éventuelle « islamophobie ». Quant aux
milieux de la culture, en panne d’idéologie, ils ont adopté sans hésiter le mythe
de la victimisation musulmane… Bref, par emboîtement de logiques différentes,
les tenants de la mondialisation et des droits de l’homme se sont unis pour
encourager une immigration musulmane de masse en France.
L’islamisme ne serait pas un si grand problème si tant
de non-musulmans ne lui tenaient la porte.
Vous liez donc terrorisme et immigration ?
L’émergence d’une contre société islamique, vecteur de
terrorisme, au sein de la communauté des Français musulmans n’était pas
inscrite au programme du mouvement migratoire. Mais il est surprenant de
constater que, malgré la montée du terrorisme et des tensions ethniques,
l’immigration se poursuit et même s’amplifie en France.
Le Grand Abandon développe l’idée que
l’immigration musulmane a été et continue d’être un outil-clé dans la guerre
féroce que les tenants de la mondialisation, ceux que j’appelle les « mobiles »,
livrent aux « enracinés ». Des élites mondialisées qui récusent tout
sentiment d’appartenance nationale ont entrepris d’imposer aux « Gaulois
réfractaires » et aux « fainéants » – termes qu’utilise Emmanuel
Macron pour parler des Français qui tiennent à leur culture, à leur histoire, à
leur langue – un modèle de société multiculturel aux antipodes du modèle laïc
et républicain qui était le leur. J’ai appelé « révolution par le
haut » cette politique qui consiste à transformer une société par la loi
et l’immigration sans demander l’avis du reste de la population. Pour résumer
de manière lapidaire : l’islamisme ne serait pas un si grand problème si
tant de non-musulmans ne lui tenaient la porte.
Vous accusez nos gouvernements successifs de « lutter
(à moitié) contre le terrorisme pour éviter de stigmatiser les différentes
populations musulmanes ». Comment devraient-ils donc combattre le
terrorisme islamiste ? En enfermant à perpétuité les fichés S au
mépris du droit ?
Brandir le « droit » chaque fois qu’il est
question des fichés S n’est rien d’autre qu’une technique d’intimidation de la
parole libre. Un peu comme traiter d’ « islamophobe » toute
personne qui critiquerait l’islam. Accuser l’autre de racisme ou de fascisme
permet de contourner le dilemme immigration-terrorisme.
Lutter contre le terrorisme à moitié, c’est laisser les
écoles et les mosquées salafistes proliférer. Lutter contre le terrorisme à
moitié, c’est durcir le cadre juridique de lutte contre le terrorisme pour TOUS
les Français – comme l’a fait Emmanuel Macron en 2017 avec le vote de la loi
antiterroriste – au lieu d’instaurer des juridictions d’exception et d’étendre
la répression à cette « zone grise » qui loge, finance, endoctrine et
arme les terroristes. Ne pas lutter franchement contre le prêche de haine à la
mosquée ou contre le rap djihadiste qui entend crucifier les laïcards au Golgotha est aussi une façon
surprenante de protéger le terreau du terrorisme.
L’islamisation de la consommation a fait en sorte que
les musulmans ne puissent plus déjeuner avec des non-musulmans
Vous critiquez la généralisation du hallal en France,
laquelle répond à une demande croissante. Aujourd’hui, est-il encore réaliste
et efficace de promouvoir l’assimilation républicaine des populations immigrées
musulmanes ?
Le hallal est devenu un marqueur identitaire
politico-religieux. Je cite dans Le Grand Abandon les travaux de Florence
Bergeaud-Blackler (Le marché halal ou l’invention d’une tradition, Le
Seuil, 2017), anthropologue, qui a montré comment les multinationales de
l’agro-alimentaire ont aidé les fondamentalises chiites et sunnites à
construire des normes de consommation alimentaires pour les musulmans. Avant la
révolution iranienne de 1979, les musulmans pouvaient déjeuner avec des
non-musulmans à condition qu’il n’y ait pas de porc ni d’alcool au menu.
L’islamisation de la consommation a fait en sorte que les musulmans ne puissent
plus déjeuner avec des non-musulmans car le hallal trace une frontière entre le
pur et l’impur. Dans certaines entreprises, on voit des salariés musulmans
réclamer des cantines séparées pour ne pas avoir à toucher des couverts ou des
plats que la présence de non-musulmans rend impurs. En ce sens, le hallal est
un outil de sécession communautariste manipulé par des intégristes et amplifié
par les intérêts d’un capitalisme-charia. Quand les industriels s’ingénient à
tout « hallaliser » – le jouet, les cosmétiques, les vacances,
le mariage… –, l’assimilation des musulmans à un modèle de société laïque et
républicain n’a plus de sens.
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Bolsonaro,
ce président que les médias adorent nazifier - Non, il ne compte pas établir un
Reich sud-américain
par
- 29 octobre 2018
Manifestation anti-Bolsonaro, Paris, octobre 2018. Sipa.
Numéro de reportage : 00881203_000005
Corruption, insécurité, attaques contre la famille : le
Brésil qui a plébiscité Jair Bolsonaro souffre des années de gestion
catastrophique de la gauche. Quoi qu’en dise la presse, aussi injuste avec
Bolsonaro que complaisante vis-à-vis de Lula, malgré ses outrances, le nouveau
président ne compte pas établir un Reich sud-américain.
La presse occidentale, majoritairement pro-Lula, ne dit
presque jamais que le « Parti-Etat PT (Parti des travailleurs) » a
plongé le Brésil dans la pire crise économique depuis cinquante ans :
chômage de masse, paupérisation, insécurité endémique, méga-corruption et chaos
en perspective sur le « modèle » du Venezuela
« bolivariste », référence suprême du PT avec Cuba… « On
ne veut plus jamais de la gauche, car c’est elle qui a coulé le pays, On
est dans la rue parce qu’on souhaite du changement ! », ont crié
ces dernières années, mois et semaines des millions de Brésiliens descendus
manifester dans les rues leur exaspération.
Comme on pouvait s’y attendre, si cette ébullition nationale
anti-PT – qui explique le succès de Bolsonaro – n’a pratiquement pas été
relayée dans la presse occidentale, en revanche, les manifestations bien moins
massives de la gauche antifa et des anti-Bolsonaro ont été surmédiatisées et
commentées positivement. Pourtant, les pancartes et slogans des millions de
manifestants pro-Bolsonaro (souvent deux millions rien qu’à Rio de Janeiro)
auraient pu donner une indication du « printemps brésilien » aux
tonalités « dégagistes » qui allait annoncer la fin du Parti des
Travailleurs et donc l’échec cuisant de son candidat, Fernando Haddad
: « PT fora » (« PT dehors »). Comme l’illustre
bien ce slogan, Bolsonaro incarne moins un « retour de la
dictature militaire » – comme l’a écrit la presse européenne – qu’une
révolte nationale massive visant à mettre fin au règne sans partage du « Parti-Etat
PT » (« Partido-Estado PT »), à sa corruption endémique, à
l’insécurité terrifiante (64 000 assassinats annuels) et à la crise économique
sans précédent. Ce rejet du Parti des Travailleurs s’est manifesté de façon
très nette et massive dès 2014, lorsque des millions de Brésiliens ont exigé la
destitution de Dilma Rousseff et l’emprisonnement d’Ignacio Lula da Silva.
Bolsonaro, un
«militariste-raciste-fasciste-homophobe-misogyne»?
Certes, le « Trump tropical », tel qu’on nomme
souvent Jair Bolsonaro, est coutumier des propos outranciers, notamment
lorsqu’il répond aux attaques de ses adversaires, lorsqu’il appelle à « liquider les
criminels », lorsqu’il affirme qu’un « policier qui ne tue pas
n’est pas un bon flic », lorsqu’il définit le PT comme le « parti
du crime ». En ce sens, il est bien un populiste car ses promesses de
campagne visant à abaisser l’âge de la majorité pénale ; à exempter les
policiers de poursuites judiciaires quand ils utilisent leurs armes de service
et à « dégager les corrompus, complices du
crime », résonnent comme des mesures de salut public pour une majorité
de Brésiliens.
Il est vrai que durant cette campagne, pour laquelle le Net
et les réseaux sociaux ont joué un rôle primordial, au moins autant que pour
l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis, moult fake news et rumeurs violentes
ont été lancées de part et d’autre. Toutefois, les médias occidentaux n’ont
presque évoqué que celles attribuées au camp « populiste » par
le candidat de gauche (PT) Fernando Haddad. Celui-ci a par exemple accusé
Bolsonaro d’être « responsable des agressions racistes » qui
auraient été commises par certains de ses « supporters nazis »
contre des militants de gauche ou LGBT. Or il se trouve que nombre de ces
« infos » étaient en fait des montages. On peut citer pour exemple
l’affaire (7 octobre 2018) de la jeune militante LGBT qui a accusé des
partisans de Jair Bolsonaro de l’avoir agressée avant de lui graver une croix
gammée sur le ventre. La police a beau avoir rapidement démontré que la
« victime » avait inventé de toutes pièces son agression
« nazie » (elle l’a d’ailleurs reconnu), le camp pro-Haddad-PT n’a
cessé de dénoncer l’agression « homophobe-nazie »…
Ce type de guerre des représentations consistant à soumettre
l’autre à la « reductio ad hitlerum » est d’autant plus
stupide en l’espèce que Jair Messias Bolsonaro est connu pour sa judéophilie,
sa défense d’Israël et sa proximité avec les lobbies juifs et évangéliques
brésiliens les plus philo-sionistes. La presse occidentale a également
largement fait état – comme s’il s’agissait d’une évidence – des idées
« racistes-anti-noirs et misogynes » de l’ex-capitaine, sans jamais donner
la version du camp accusé, et par exemple en omettant soigneusement de rappeler
que le candidat le mieux élu à Rio, le célèbre député noir Hélio Fernando
Barbosa Lopes, alias « Hélio Negão », qui le soutient corps et âmes
et est son ami depuis vingt-trois ans, n’a cessé de réaliser des clips de
campagne avec lui et a vivement dénoncé les accusations de racisme visant
Bolsonaro.
La fabrique du « dérapage »
On ne rappelle jamais non plus que les deux femmes les mieux
élues aux élections législatives de début octobre (en même temps que la
présidentielle) sont également membres de son parti : Janaina Pascual, la
professeur de droit qui initia la procédure de destitution contre Dilma
Rousseff, et Joyce Hasselmann, l’animatrice de la chaîne web politique la plus
consultée du pays. Certes, on peut répondre que tout cela ne « prouve
rien », et qu’au contraire, la « preuve » de la haine du « capitao »
envers les femmes aurait été administrée, vidéo à l’appui, en 2003, lorsqu’il
lança à une députée de gauche anti-répression, Maria do Rosario : «
Je ne vous violerais jamais car vous ne le méritez pas »… Or,
Bolsonaro a dit ces mots malheureux juste après un débat de fond très vif au
Parlement, lorsque, en réaction à un terrible viol suivi du meurtre d’une femme
par un délinquant mineur, il accusa la gauche et le parti de Mme do Rosario
d’être « complices » du crime et des violeurs par leur laxisme
judiciaire. Loin d’être favorable au viol des femmes « non moches »,
l’ex-officier s’en était en fait vivement pris la députée et au PT en raison de
leur hostilité à l’abaissement de la majorité pénale et aux doublements de
peine (mesures phares de son programme de lutte contre l’insécurité). Et afin
de tendre un piège à Bolsonaro, Maria do Rosario l’attendit dans les couloirs
du Parlement en l’accusant « d’attiser les violences » par ses
mesures répressives, puis d’être lui-même un « violeur », ce à quoi
il répondit, hors de lui, la phrase choquante précitée.
Comme l’explique José Carlos Sepúlveda de Fonseca, qui
représente l’aile catholique-conservatrice du camp Bolsonaro, lui aussi
partisan de peines renforcées en cas de viol, « dans cette élection, on
a assisté à des stratégies d’inversions des réalités qui dépassent
l’entendement, ceci dans le but d’empêcher le candidat de droite d’arriver au
pouvoir afin de maintenir coûte que coûte la mafia du PT au pouvoir, mais le
peuple brésilien ne tombe plus dans le piège et aura le dernier mot sur
l’oligarchie »…
Mutations d’un démocrate-chrétien
On sait que les antifascistes de profession inventent
des nazis quand ils n’en ont pas sous la main, ou quand, heureusement, il
n’y en a plus. Toutefois, Bolsonaro, certes, « populiste » et récemment
« droitisé », n’a rien d’un SS. Celui qui a quitté depuis 30 ans
l’armée en raison de désaccords avec la hiérarchie, a en effet été
successivement élu sous les couleurs du Parti démocrate-chrétien, du Parti
progressiste réformateur, du Parti progressiste, puis, finalement, du Parti
Social-libéral (PSL). Pour ce qui est de sa « nostalgie de la
dictature », elle se limite à des propos à l’emporte-pièce, très courants
au Brésil, au Chili ou en Argentine, qui consistent à déclarer que sous les
militaires, « les gens n’avaient pas peur de rentrer du travail ou
d’aller au cinéma le soir ». Ce qui est loin d’être un appel au
putsch, d’autant que Bolsonaro n’a cessé de rappeler que toutes ses réformes
passeraient par le Parlement afin de restaurer une démocratie confisquée.
Par ailleurs, si les appels à « liquider les
criminels » et à « faire le ménage » peuvent
choquer, les médias ont bien moins dénoncé le péril, bien réel celui-là, de
l’insécurité et de la corruption incroyables qui ont ruiné le pays et en ont
fait l’un des plus violents au monde : homicides, braquages collectifs
(« arrastào »), viols, kidnappings, etc. Pour prendre
conscience du niveau apocalyptique de la violence et de l’insécurité qui
traumatisent les Brésiliens quotidiennement, citons les chiffres du rapport
« Atlas 2018 de la violence » publié par le Forum brésilien
de sécurité publique (FBSP) : 300 000 victimes de meurtres entre 2011 et
2015… soit 160 par jour ; 553 000 assassinats entre 2006 et 2016
(dont 10 % du fait de la police) ; 64 000 homicides rien qu’en 2017… soit
plus qu’en Syrie sur une période comparable ! Enfin, à ceux qui estiment
que les méthodes radicales prônées par Bolsonaro pour lutter contre ces
terribles fléaux sont la marque de fabrique du « fascisme », il faut
demander pourquoi n’ont-ils jamais qualifié de « fascistes-nazis » les
Castro, les Chavez, les Maduro, Ortega, etc. ?
Par ailleurs, pour comprendre l’indignation de millions de
Brésiliens qui pensent que l’insécurité est la conséquence directe du laxisme
judiciaire, rappelons seulement qu’au Brésil, les sentences des juges sont
dérisoires pour les agressions physiques ; que les mineurs ne sont pas
condamnables, ce qui a donné des idées aux syndicats du crime (recruter des
tueurs non-majeurs), et que les détenus des prisons reçoivent de l’Etat chaque
mois un pécule plus élevé que le salaire minimum brésilien autorisé !
Populisme d’extrême droite ou révolution
conservatrice ?
Ceux qui ne connaissent du Brésil que l’image exotique des
plages d’Ipanema, du Carnaval de Rio de Janeiro, de la lambada ou de la samba,
avec ses corps sensuels et dénudés, ne peuvent comprendre « l’autre
Brésil », une société à la fois très conservatrice, foncièrement
chrétienne et très européenne, notamment au Sud, peuplée de nombreux Italiens,
comme les ancêtres de Jair Bolsonaro, de Gallegos, d’Espagnols ; de
Portugais, de Juifs ashkénazes, de Syro-libanais chrétiens (comme le candidat
Haddad) et de germaniques, dont nombre de protestants fort austères. Or, depuis
trente ans d’hégémonie politique, intellectuelle et médiatique du parti des
Travailleurs de Lula da Silva et Dilma Rousseff – qui ont promu le mariage gay,
défendu la généralisation du droit à l’avortement (aujourd’hui très restreint),
les théories du genre, le Brésil traditionnel a décidé de réagir par une sorte
de « printemps conservateur-chrétien ».
Aussi, les très puissantes églises
protestantes-évangéliques, qui ont converti ces dernières décennies 35 % de
Brésiliens, notamment au sein des milieux modestes, ont joué un rôle majeur
dans cette « révolution conservatrice » contre « l’Etat-Parti PT ».
La vraie face pro-totalitaire du PT et du tandem
Lula-Roussef
Emprisonné pour corruption mais présenté comme une victime
en Occident du fait de son inéligibilité durant la campagne face à Bolsonaro,
l’ex-président brésilien Ignacio Lula da Silva, bien moins unanimement aimé au
Brésil qu’en Europe, est souvent dépeint comme un « gentil »
représentant d’une gauche « réformiste ». Il est généralement crédité
du « décollage » du Brésil, élément prometteur des pays émergents dans les
années 1990-2000. Toutefois, pour une majorité de Brésiliens scandalisés par la
corruption du PT et notamment de Lula, puis traumatisés par l’insécurité, ce
« parti-Etat » incarne plutôt une extrême gauche subversive adepte
d’un projet révolutionnaire et qui aurait soutenu les pires régimes rouges du
Continent. Dilma Rousseff fit elle-même partie dans sa jeunesse d’une
organisation terroriste marxiste : le Grupo Vanguardia, qui rêvait de
répandre par la force le modèle castriste. Elle s’est certes repentie par la
suite et a été présentée comme une victime de la dictature qui a sévèrement
réprimé les terroristes d’extrême gauche et l’aurait torturé, mais elle n’est
pas plus « modérée » au départ que les dictateurs droitistes qu’elle
a combattus au nom d’un modèle totalitaire rouge.
A lire aussi: Jair Bolsonaro au Brésil: l’ordre, c’est le progrès?
Les partisans du nouveau président brésilien rappellent
d’ailleurs que le PT a soutenu, depuis les années 1990, l’ensemble des partis
et régimes révolutionnaires violents d’Amérique latine : du Vénézuéla
« bolivariste » de Chavez et Maduro, au régime cubain de Castro, sans
des formations pro-terroristes liées au crime organisé comme PrimerComando de Capital
ou Comando Vermelho. C’est dans ce contexte « révolutionnaire » que
la fameuse Banque brésilienne BNDES créée au départ pour financer les petites
et moyennes entreprises, fut détournée de ses buts par le PT afin d’investir
des milliards non pas au profit des contribuables brésiliens mais pour financer
des projets d’infrastructures dans les pays marxistes « amis » comme
Cuba ou le Vénézuéla… Les entrepreneurs brésiliens qui ont dû subir une
terrible crise économique sans recevoir d’aide de la part de l’Etat, s’en sont
souvenus.
Ordre et progrès ?
On peut comprendre bien sûr que les emportements verbaux de
l’ex-capitaine – qui promet aux lobbies de l’agro-business que l’on pourra
« couper un arbre mort sans attendre dix ans l’autorisation »,
affirme que « les Indiens n’ont pas besoin de terres mais
de dignité », et que les « droits de l’homme sont une
invention des communistes et de l’ONU » – choquent les adeptes de la
démocratie libérale ouest-européenne. Son slogan de campagne, qui fait écho au
modèle des démocraties illibérales à la Orban : « Le Brésil
au-dessus de tout, Dieu au-dessus de tous », horrifie les
anticléricaux et les anti-nationalistes. Et son autre slogan : « Moins
de Brasilia, plus de Brésil », fait quant à lui trembler
l’administration centrale qu’il entend dégrossir. Il n’en demeure pas moins
que, pour les électeurs du « capitao », la promesse de mettre « dehors » l’omnipotent
Parti des travailleurs, d’en finir avec la corruption, la détermination à
combattre l’insécurité délirante et l’impunité des criminels, puis la défense
des valeurs nationales d’Ordre et de Progrès gravées sur le drapeau
national expliquent le succès de Bolsonaro.
Certes, rien n’assure que la promesse « d’éradiquer
la corruption » sera tenue par le candidat
« populiste » ou sera même seulement possible, étant donné que 40 %
des députés est sous enquête et risque la prison ! Seul l’avenir
confirmera si cet ex-officier, député depuis 30 ans, qui n’a aucune casserole
de corruption, et qui annonce un « gouvernement de techniciens compétents »,
sera un meilleur président que ses prédécesseurs. Mais le pire n’est pas
certain. Il suffit d’observer aux Etats-Unis les succès du
« populiste » avant l’heure qu’était Ronald Reagan, puis plus
récemment ceux, de Donald Trump. On est d’ailleurs habitué à être rendus
« inquiets » dès qu’un « droitiste » émerge, alors que des
gouvernements communistes (chinois, chiliens, vénézuéliens, cubains, etc.) sont
de coutume traités avec sympathie ou extrême indulgence. Bolsonaro sera-t-il plus
raisonnable qu’on le craint, notamment grâce à son conseiller et futur ministre
de l’Economie et des Finances, Paulo Guedes et aux milieux d’affaire en
général, qui l’ont soutenu eux aussi pour en finir avec la politique économique
désastreuse du PT ? Nul ne le sait, mais les Brésiliens sont déterminés à
« essayer » Bolsonaro, convaincus qu’ils sont d’avoir touché le fond
avec Lula, Rousseff et même avec le président sortant, Michel Temer, lui aussi
sous menace de condamnation pénale pour corruption.
Le rap
français, cette parodie de la négritude
Rap et jazz, discours de haine contre discours universel
par
- 10 octobre 2018
Nick Conrad, auteur d'un clip anti-blancs
La récente polémique autour du rappeur
« anti-blancs » Nick Conrad n’est que la dernière d’une longue
liste. Le rap a souvent véhiculé un discours de haine, contrairement au
jazz et à son discours universel.
Dans le champ social où le moindre « dérapage » est l’objet
d’une couverture médiatique dépendant largement du positionnement idéologique
des « coupables », la liberté d’expression est devenue un enjeu remarquable,
chacun considérant volontiers qu’il faudrait interdire à ses adversaires la
parole publique. Si l’art est fréquemment considéré comme exempté des mêmes
devoirs que la parole ordinaire, l’effet de scandale resurgit cependant à
intervalles réguliers.
« La France est une garce, n’oublie pas de la baiser »
Récemment, le clip « Pendez un blanc » du rappeur Nick
Conrad a fait un peu parler des excès verbaux du rap. Il ne s’agit pas d’un
épiphénomène mais d’une véritable formation discursive dont l’agressivité
envers la France et « les blancs » est un topos récurrent. Quand un certain
Monsieur R affirme : « La France est une garce, n’oublie pas de la
baiser jusqu’à l’épuiser, comme une salope il faut la traiter, mec! » —
prolongé avec esprit par le Ministère A.M.E.R. : « J’aimerais voir
brûler Panam au napalm comme au Vietnam […] j’ai envie de dégainer sur des
faces de craie » — il s’agit de thèmes constituant l’épine dorsale du
discours politique du rap.
De fait, ce discours prônant rébellion contre l’autorité,
guerre civile et guerre raciale, est d’une violence permanente illustrée par de
nombreux cas de poursuites pénales. On remarque que le discours ainsi véhiculé
par le rap, fondé sur des préjugés haineux — volontiers anti-français,
racistes, sexistes, homophobes, violents — semble validé idéologiquement par
les médias et même la justice. C’est ainsi que Gilles-William Goldnadel,
dans un récent article, parlait avec clairvoyance d’une «
indulgence judiciaire idéologisée ». En témoigne un édifiant article d’un avocat, rappelant les limites
et les usages juridiques de la liberté d’expression en matière de rap, qui
constate que la liberté d’expression y connaît « une tolérance élargie
». On y apprend entre autres que la cour d’appel de Rouen considère que le
rap est « un genre musical enraciné dans la culture populaire trouvant
ses origines dans la misère et la souffrance, le rejet et le ressentiment (…)
qui exprime la désolation et le mal de vivre des jeunes en banlieue, leur refus
de se résigner face à des situations vécues comme injustes et perçues comme un
rejet et de formuler leur aspiration à un mode de vie autre que celui qui les
exclut et les marginalise».
Pardonnez-leur, ils savent ce qu’ils font
On découvre ainsi qu’une cour d’appel, avec une morgue et
une hauteur d’une condescendance extrême, s’autorise à des jugements
esthétiques, historiques, sociologiques et culturels sur lesquels elle se fonde
pour dire le droit. Il en ressort une essentialisation radicale de la banlieue
qui semble indiquer qu’une origine et un mode d’expression ouvrent des droits à
l’appel à la haine et au meurtre. En effet, ce même jugement conclut, fort
hypocritement, que les seules paroles ne suffisent pas à faire « présumer
chez l’auteur de la chanson et ses interprètes une volonté de créer dans le
public un état d’esprit favorable à la réalisation d’une atteinte volontaire à
la vie ou à l’intégrité physique d’autrui ». En français non jargonnant,
cela signifie qu’on décide de faire semblant de ne pas entendre la réalité des
intentions qui s’expriment dans le rap. Comme s’il ne s’agissait que d’un jeu
esthétique sans effet social — ce qui est pourtant contradictoire avec le
constat d’une origine sociale vivant dans « le ressentiment ». Sans
parler de la réalité émeutière des banlieues, qui semble montrer de manière
relativement évidente un état d’esprit favorable à la réalisation de cette
fameuse atteinte volontaire à tout ce qui passe à portée de cocktail Molotov.
Le pouvoir de promulgation, de définition et de dénomination
de la justice s’accompagne d’une valeur jurisprudentielle dont les effets sont
durables. Ils incarnent en effet ce qui devient une norme juridique et,
partant, culturelle. À partir du moment où on sait qu’on ne sera pas condamné
pour certains faits, on peut les reproduire en se fondant sur cette
jurisprudence.
Dans ce genre de jugement, il est donc considéré comme
définitoire que le rap exprime une forme de haine et, par conséquent — et c’est
ce lien logique qui relève du parti pris — qu’il doit être exempté de sanctions
pour ses propos, y compris quand ils relèvent de l’incitation à la haine, au
désordre public, à la violence, au meurtre, etc.
Le mot « poésie » excuse tout
C’est une position qui peut se défendre dans la perspective
d’une liberté d’expression conçue avec une latitude extensive. Le problème est
dans le deux-poids, deux mesures. Un non rappeur se verra harcelé pour des
propos beaucoup moins virulents. L’exemple type étant celui de Georges
Bensoussan, accusé d’incitation à la haine pour avoir dénoncé l’antisémitisme
musulman. Ne comptons plus les procès similaires qui pleuvent sur Alain
Finkielkraut, Eric Zemmour, etc. qui tendent à criminaliser des opinions.
Selon son origine, selon son type de discours, on sera ou
non poursuivi et, éventuellement, condamné. Ce contraste entre ce que l’on
tolère chez l’un et pas chez l’autre est constitutif d’un arbitraire de la loi.
Cela signifie que la justice exprime des préférences idéologiques et politiques
: le citoyen constate, de manière aveuglante, une injustice concernant
l’exercice de la liberté d’expression.
On a dès lors l’impression que le mot « poésie » excuse tout
: si c’est de l’art, c’est permis. Cette exception est étrange : on peut donc
exprimer ce que l’on veut si c’est sur une trame rythmique, si l’on met quelques
rimes, ou que l’on se déhanche avec une casquette à l’envers. Le contenu
discursif devient acceptable socialement, même s’il s’agit d’appel au meurtre.
Pour des propos nettement moins incendiaires, le citoyen qui ne slamme pas
risque la poursuite. Il suffirait donc de chantonner ou d’habiter Saint-Denis
pour que la loi s’applique différemment.
Le jazz, l’anti-rap
Contrairement aux apparences, ce raisonnement qui se veut
rempli de bienveillance ne repose pas sur les spécificités de la musique du
rap. Il se fonde en effet uniquement sur une origine sociale présumée,
c’est-à-dire essentialisée, caricaturée (l’auteur de ces lignes n’est pas moins
originaire de banlieue que les rappeurs, mais étant universitaire, je doute que
la mansuétude juridique s’applique à mon cas si je venais à slammer des
insanités…). L’arrêt que nous avons cité considère qu’une origine sociale peut
impliquer une application de la loi différenciée : c’est une indulgence qui
confine à la ségrégation car cette pratique fonde une inégalité de traitement.
Le raisonnement de la cour d’appel de Rouen est de nature socio-esthétique et
non juridique. Il consiste en une interprétation tendancieuse des faits sociaux
qui ressemble à une excuse et non à une appréciation objective.
À titre de comparaison historique, le jazz nous fournit un
exemple de discours radicalement différent. La ségrégation raciale affectant la
communauté afro-américaine (principale mais non seule actrice du développement
du jazz) fut d’une dureté sans commune mesure avec les simples inégalités
sociales. Pourtant, le jazz n’a jamais cédé à un discours de violence ou de
haine. L’élévation artistique, politique et spirituelle, l’humour et la
créativité ont été les armes d’une communauté éprouvée par sa situation sociale
pour la transformer. Comme l’a rappelé le saxophoniste Johnny Griffin, «
Jazz is the music of people who have chosen to feel good inspite of the
conditions » (« Le jazz, c’est la musique de ceux qui ont décidé de ne
pas se laisser abattre par leur situation »).
Le jazz, critique et revendique sans jamais pleurnicher
Critiquant la célébration de la violence, de la misogynie et
de la falsification historique, le trompettiste Wynton Marsalis (qui s’est
beaucoup exprimé sur la nocivité du rap) écrit ainsi un superbe « Love and
Broken Hearts » (2007, From the Plantation to the Penitentiary) qui
assimile la rhétorique du rap à une parodie de négritude :
“All you
con men can hang up your scheme
Pimps
and hustlers put up the Vaseline.
I ain’t
your bitch I ain’t your ho.
And
public niggerin’ has got to go.
Oh
safari seekers and thug life coons.
You
modern day minstrels and your Songless tunes.
Don’t
take me down your memory lane
I got my
own memories just the same…”
Le discours du jazz, critique et revendicateur mais créatif
et jamais pleurnichard, provient d’une « culture populaire » qui n’a jamais
causé de ressentiment agressif. S’il fallait comparer avec les créateurs du
jazz, la situation sociale des rappeurs en France est assez éloignée. Ces
derniers profitent, au même titre que n’importe quel citoyen, d’un système de
protection, d’aide sociale et de scolarisation gratuite dont la communauté
afro-américaine n’a jamais bénéficié avant les années 1960.
L’exception bienveillante
Pourtant, cette communauté en a tiré la force de créer le
jazz, forme artistique d’une ampleur formidable. Le rap en est le descendant
abâtardi, idéologisé, appauvri. Aux Etats-Unis, le jazz a été le moteur du
changement social en procurant une parole publique, une dignité artistique et
une visibilité sociale qui ont permis aux Afro-Américains de prendre une place
qui n’avait rien d’acquis. Si le jazz s’est universalisé et n’est pas resté un
folklore fermé à ceux qui n’appartenaient pas à sa communauté d’origine, c’est
précisément parce que le jazz (dont les racines sont multiples) n’a jamais
montré de haine ou revendiqué d’identité close. Il est vrai que la communauté
afro-américaine, jusqu’à récemment, s’est massivement assise sur des références
bibliques et toraïques.
Le rap, à cet égard, est d’une pauvreté de discours qui
s’auto-caricature dans une posture qui est celle de la minstrelsy (les minstrel
shows sont les spectacles du XIXe siècle où les noirs « jouaient aux noirs »
avec grosses lèvres rouges et queue de pie). C’est ce que Wynton Marsalis
appelle « the ever fonky low down », c’est-à-dire la
revendication d’un abaissement auto-parodique. C’est d’autant plus ridicule
quand on vit en France dans une société qui n’a pas la même histoire que celle
où est né le rap.
L’idéologie victimaire des intellectuels et magistrats qui
s’exprime avec un dédain paternaliste en commentant le rap oublie au passage
que tous les soi-disant opprimés ne sont pas nécessairement des violents en
puissance qu’il faudrait excuser par une auto-flagellation complaisante. Le
jazz, en tant qu’expression collective, n’a jamais tenu de discours destructeur
ou meurtrier. Le rap, visiblement, relève d’une autre logique, celle du confort
victimaire comme fondement du succès commercial, de la célébration médiatique,
de l’immunité légale et de la sanctuarisation idéologique. Traitement de faveur
qui n’est pas sans une certaine condescendance néo-coloniale, comme si une
exception bienveillante devait s’exercer sur une population d’avance considérée
comme irresponsable. A moins qu’il ne s’agisse que d’une fascination exotique
des juges pour l’encanaillement socio-musical…
Retrouvez les articles de Jean Szlamowicz sur son blog
Quand
Collomb faisait le lien entre immigration et insécurité
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Selon des propos rapportés
par Valeurs Actuelles, l'ancien ministre de l'Intérieur dressait en
février 2018 un bilan très pessimiste sur la situation sécuritaire en France.
Lorsqu'il était encore à l'Intérieur, Gérard Collomb n'avait
rien laissé transparaître. Ses propos alarmistes tenus au moment de son départ
du gouvernement avaient alors surpris. Lors de la
passation de pouvoir avec Edouard Philippe le 4 octobre dernier,
il avait regretté sur le perron de Beauvau «une situation très dégradée» dans
certains quartiers. «Aujourd'hui, on vit côte à côte, je crains que demain on
puisse vivre face à face», avait-il notamment déclaré presque défaitiste.
«Cinq, six ans pour éviter le pire...»
L'ancien ministre de l'Intérieur avait en réalité établi ce
constat bien avant sa démission. Selon des propos rapportés par Valeurs Actuelles datant
du 13 février 2018, Gérard Collomb se voulait encore plus pessimiste. «Les
rapports entre les gens sont très durs, les gens ne veulent pas vivre
ensemble...», déplorait-il à l'époque, estimant que la responsabilité de
l'immigration était «énorme» dans la situation sécuritaire. «C'est pour ça
qu'avec Emmanuel Macron nous avons voulu faire changer la loi», indiquait
Gérard Collomb. Adoptée le 1er août dernier, la
loi asile et immigration garant une réduction du délai de
traitement des demandes d'asile et facilite les reconduites à la frontière pour
les déboutés. Jugé trop «répressif» par la gauche, le texte avait au contraire
été considéré «inutile» par la droite.
«Des comités en France s'affrontent de plus en plus et ça
devient très violent...», estimait également l'ancien ministre, prévenant qu'il
ne restait que «peu de temps» pour améliorer la situation. «C'est difficile à
estimer mais je dirais que, d'ici à cinq ans, la situation pourrait devenir
irréversible. Oui, on a cinq, six ans pour éviter le pire. Après...»,
avertissait-il. Par ailleurs, à la question: «Pensez-vous qu'on n'a plus besoin
d'immigration en France?», Gérard Collomb livrait selon Valeurs
Actuelles une réponse sans appel: «oui, absolument».
Passation
de pouvoir: Gérard Collomb a attendu 20 minutes sur le perron du ministère -
Regarder sur Figaro Live
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Une
passation de pouvoir expédiée entre Édouard Philippe et Gérard Collomb
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉOS - Emmanuel Macron a accepté dans la
nuit la démission de son ministre de l'Intérieur et a demandé à son premier
ministre d'assurer l'intérim. La passation de pouvoir entre les deux hommes a
eu lieu ce matin.
Une passation de pouvoir expédiée qui semblait à la fois
improvisée et plutôt tendue entre deux hommes qui ne s'appréciaient plus guère
depuis des mois. Édouard Philippe a commencé par faire attendre pendant 20
longues minutes son ministre de l'Intérieur qui, bras croisés, sans ciller,
posait patiemment sur le perron du ministère, paradoxalement filmé en direct
par les caméras de la place Beauvau car à ce moment de la journée les
journalistes n'étaient pas encore autorisés à franchir les grilles du ministères.
Puis Gérard Collomb a fini par prendre longuement la parole
pour dire «combien il avait aimé son ministère et travaillé avec des agents
motivés». Il a défendu son bilan, l'augmentation du budget du ministère - 3,4%
contre 0,4 pour le budget de l'État - et l'engagement de son action de
reconquête républicaine dans les quartiers difficiles. «Quand des quartiers se
paupérisent, se ghettoïsent, a-t-il dit, il ne peut y avoir que des
difficultés. Je crois vraiment que dans la périphérie parisienne, on ne peut
plus continuer à travailler commune par commune. Il faut une vision d'ensemble
pour créer de la mixité».
Pour lui, «la situation est très dégradée et le terme de
reconquête républicaine prend dans ces quartiers tout son sens. Aujourd'hui,
c'est plutôt la loi du plus fort qui s'impose, des narcotrafiquants, des
islamistes radicaux, qui a pris la place de la République.» Avant de lâcher un
terrible: «Aujourd'hui, on vit côte à côte, je crains que demain on puisse
vivre face à face».
Gérard Collomb a enfin dit combien il avait apprécié sa
mission: «Je quitte avec regret ce ministère ; j'ai profondément aimé les
femmes et les hommes qui le composent. Nous sommes ici dans un ministère de
l'affectif. Les policiers, les gendarmes, souhaitent pouvoir être aimés, si on
veut qu'ils puissent remplir des tâches difficiles, il faut qu'ils sachent».
Un discours plaidoyer
Un discours en forme de bilan plaidoyer, tant il semblait
conscient que l'éloge du premier ministre serait bref. Il le fut sans conteste.
Édouard Philippe, le visage fermé, a remercié son ministre «pour les 16 mois de
travail passés ensemble». «Le ministère de l'Intérieur, a-t-il dit, c'est d'une
certaine façon la permanence de l'État, de la puissance qui doit toujours
revenir à la loi, de la présence de l'ensemble des forces de sécurité des
Français. Pour tout ce que vous avez fait ici, M. le ministre d'État, soyez
remercié. Le premier ministre ayant vocation à aller partout sur le territoire
national, il pourra arriver qu'il se rende à Lyon. Et il en sera
particulièrement heureux.» Après une poignée de main sans chaleur, Édouard
Philippe a ensuite traversé la route pour se rendre au Conseil des ministres,
laissant un homme seul de 71 ans, qui était le numéro 2 du gouvernement, fidèle
de la première heure, retourner sur ses terres lyonnaises.
» LIRE AUSSI - Les noms qui circulent pour succéder à Gérard Collomb
Ce matin, le Conseil des ministres s'est donc tenu sans
Gérard Collomb. Dans la nuit de mardi à mercredi, Emmanuel Macron avait fini
par accepter la
démission révélée, dans un entretien exclusif sur notre site, de
son ministre de l'Intérieur. Gérard Collomb, l'un de ses alliés
historiques, piaffait
d'impatience depuis des semaines de quitter le gouvernement pour
se lancer dans la reconquête de la capitale des Gaules qu'il a administrée
pendant 16 ans. Le président a demandé à son premier ministre, Édouard Philippe,
«d'assurer son intérim dans l'attente de la nomination de son successeur». Dans
la foulée, celui-ci a été contraint d'annuler son déplacement en Afrique du Sud
prévu jeudi et vendredi, difficilement compatible à l'heure où
il va falloir choisir un nouveau ministre de l'Intérieur.
Plus question de perdre du temps. Surpris mardi après-midi
en pleine séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale par
cette annonce, Édouard Philippe, après avoir rendu un vibrant hommage à Manuel
Valls lui-même démissionnaire, avait répondu qu'il prendrait «les décisions qui
s'imposent».
Qui
succédera à Gérard Collomb ? - Regarder sur Figaro Live
Une colère froide
Les parlementaires ont surtout vu un premier ministre pris
de court par la démission de son ministre. Répondant en tout début de séance à
une question du député Éric Ciotti, Édouard Philippe avait dans un premier
temps assuré que «chaque ministre de son gouvernement était à sa tâche» et que
la démission de son ministre relevait «d'une petite polémique».
Manifestement, Édouard Philippe a appris dans l'hémicycle la
démission du ministre de l'Intérieur. Ce mercredi matin sur France Inter, Christian Jacob ironisait
sur cet épisode inédit: «Le premier ministre n'était pas dans la
boucle. On lui lisait les dépêches dans l'hémicycle», a-t-il ironisé, évoquant
«une crise de l'exécutif». Les proches du chef du gouvernement ont
effectivement évoqué «une colère froide» de celui-ci à l'issue des questions au
gouvernement.
Interrogé ensuite sur le sujet, Édouard Philippe a dans un
second temps souligné qu'«il revient au premier ministre de proposer au
président de la République la nomination ou la fin de fonction de ministres. Je
prendrai mes responsabilités et j'aurai l'occasion de faire au président les
propositions que les dispositions constitutionnelles prévoient et réservent au
premier ministre».
Reste que la chaise vide au Conseil des ministres ce matin
fera désordre. Après la démission de Nicolas Hulot à la fin du mois d'août,
elle relance un jeu des chaises musicales au sein du gouvernement qui vient,
phénomène peu banal, de subir deux démissions de ministre d'État en un peu plus
d'un mois. Elle atteste surtout de la fragilité d'un exécutif en pleine
opération reconquête de l'opinion, à huit mois des élections européennes. Et,
comme les problèmes se succèdent à la vitesse grand V, Édouard Philippe est ce
matin épinglé par la cour régionale des comptes sur sa gestion de
la ville du Havre entre 2012 et 2017. Les finances de la ville
seraient proches d'un seuil d'alerte, notamment dans la progression de
l'endettement de la commune.
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Démission,
Macron, Lyon : Collomb s'explique en exclusivité dans Le Figaro
Par Marcelo
Wesfreid et Jean-Marc
LeclercMis à jour le 03/10/2018 à 07h41 | Publié le 02/10/2018 à 20h48
INTERVIEW EXCLUSIVE - Le ministre de l'Intérieur, qui a reçu
Le Figaro place Beauvau, livre les raisons de son départ du
gouvernement.
Dans le bureau mythique de la place Beauvau, qui accueillit
Piere Joxe, Charles Pasqua ou Nicolas Sarkozy, Gérard Collomb reçoit le Figaro.
Mais pas seul. Il est accompagné de Georges Képénékian, l'actuel maire de Lyon,
qui répond parfois aux questions du Figaro en même temps que
Gérard Collomb. Georges Képénékian a pris les rênes de la cité après l'entrée
de Gérard Collomb au gouvernement. Et
s'apprête à les lui rendre. Le ministre de l'Intérieur considère que
son «contrat est rempli» et qu'il
peut désormais se consacrer à Lyon pleinement.
LE FIGARO. - Le
refus par Emmanuel Macron d'accepter votre démission, lundi soir,
n'a-t-elle pas créé un psychodrame au sein de l'exécutif?
Gérard COLLOMB. - Pas du tout. Le fait que je
vous réponde ce mardi en compagnie du maire de Lyon, assis à mes côtés dans mon
bureau, montre bien une volonté commune de préparer ensemble les futures
échéances. Aujourd'hui, comme vous le savez, une polémique s'est élevée car je
me suis exprimé sur ce que je ferai dans un an et demi. Je pense préférable
toujours d'annoncer les choses de manière transparente. Et nous le faisons ici
conjointement.
Georges KEPENEKIAN. - Nous avions un contrat
moral, un engagement entre nous pour mener campagne. Gérard Collomb a fait ce
travail très important de métamorphose de la ville, il a acquis une expérience.
Il est bon que tous ensemble nous puissions imaginer le projet suivant, qu'on
puisse préparer les futures échéances.
Gérard COLLOMB. - Dans les temps qui viennent,
nous avons convenu depuis longtemps que je reviendrai à la tête de la Mairie
pour préparer les échéances futures, comme il vient de vous le dire.
Vous aviez annoncé, Gérard Collomb, un premier calendrier
pour quitter le gouvernement. C'était après les européennes. Pourquoi
accélérer?
J'ai vu le président, lundi. Je lui ai fait part de ma
volonté de lui donner ma démission pour une raison simple: je ne veux pas que
des échéances locales puissent venir troubler la vie politique nationale. Je
souhaite servir le président de la République, notre pays et je veux faire en
sorte que ce ministère soit toujours le ministère le plus performant possible.
Nous sommes à un tournant. J'ai impulsé beaucoup de réformes, mais aujourd'hui,
compte tenu des rumeurs et de la pression qu'il peut y avoir, je ne veux pas
qu'une candidature demain puisse troubler la marche du ministère de
l'Intérieur. Il faut une clarté vis-à-vis de nos concitoyens et une clarté
vis-à-vis à des Lyonnais. Je maintiens donc ma proposition de démission.
«Nous avons parlé longuement avec le président et je veux
continuer à l'aider. Au poste que j'occupe, je peux être demain une gêne pour
lui et le premier ministre. Et ce n'est pas ce que je souhaite»
Gérard Collomb
Donc vous démissionnez malgré le refus du président de la
République?
Nous avons parlé longuement avec le président et je veux
continuer à l'aider. Au poste que j'occupe, je peux être demain une gêne pour
lui et le premier ministre. Et ce n'est pas ce que je souhaite.
Comment jugez-vous votre bilan?
J'ai d'abord fait en sorte que la police et la gendarmerie
puissent avoir des crédits en forte augmentation. Et c'est grâce à la confiance
du président de la République. Alors que le budget de l'État observera une
croissance de 0,8%, le budget du ministère de l'Intérieur progressera de 3,4%.
C'est la concrétisation de l'engagement présidentiel de faire de la sécurité de
nos concitoyens une priorité. Cela va nous permettre d'accroitre nos forces
dans tous les domaines.
Ne partez-vous pas trop précocement par rapport à votre
cahier des charges?
Un cap est désormais fixé dans tous les domaines pour tout
le quinquennat. Sur les collectivités locales par exemple, je pense que nous
pouvons porter un discours de confiance: si on regarde par rapport aux années
antérieures, elles bénéficient de davantage de marges de manœuvre et peuvent
accroitre leurs investissements. Leurs dotations sont stabilisées là où elles
baissaient, d'année en année.
Au niveau européen, nous avons lancé beaucoup d'initiatives,
de coopérations entre les différentes forces, et notamment en matière de
sécurité civile. J'ai en particulier indiqué la voie à suivre pour que demain
nous ayons encore davantage de sapeur-pompiers volontaires.
S'agissant du cadre législatif national, nous avons fait adopter
des lois essentielles: la loi sécurité intérieure et lutte contre le
terrorisme, la loi Warsmann sur le dispositif «Dublin», la loi asile,
immigration et intégration. Je tiens à remercier tous les parlementaires pour
la qualité des débats que nous avons eus. Nous avons par ailleurs avancé sur la
question des grandes métropoles européennes. Le contrat pour moi est rempli,
les grandes orientations fixées. D'autres pourront ouvrir de nouvelles pages.
Où en est votre relation avec Emmanuel Macron?
C'est une relation qui sera toujours de confiance. Là où je
serai, je serai un soutien actif pour lui comme pour le Premier ministre. Je
soutiendrai leur politique que je trouve adaptée aux enjeux qui sont ceux de la
France.
«Ce ministère, on ne peut que le quitter avec regret, parce
que c'est un beau ministère où travaillent des gens extraordinaires: policiers,
gendarmes, sapeurs-pompiers, tous les fonctionnaires de l'État, civils ou
militaires», confie Gérard Collomb. - Crédits photo : SEBASTIEN SORIANO/Le
Figaro
Vous
aviez pointé le manque «d'humilité» du pouvoir. Vos critiques ont-elles été
entendues?
Ce que j'ai constaté, c'est que, lors de son séjour aux
Antilles, Emmanuel Macron a montré quelle empathie il pouvait avoir avec nos
concitoyens. Sur les retraites, il a lui-même annoncé qu'il fallait veiller aux
retraités les plus modestes. Sur les collectivités locales, il a toujours pensé
que leur action était complémentaire de celle de l'État. Et sur ce sujet, s'il
y a eu des incompréhensions, je pense qu'il les dissipera dans les prochains
temps.
Concrètement, que va-t-il se passer à compter de maintenant,
pour vous, pour le ministère?
Comme vous avez pu le constater, je continue à remplir mes
fonctions de ministre de l'Intérieur. Et je le ferai autant que le président et
le premier ministre le jugeront nécessaire.
Mais vous avez conscience que votre décision crée une
nécessité, vu l'urgence des dossiers, à ce qu'un remplaçant arrive vite?
J'ai une conscience aiguë des enjeux.
Surtout s'il se passe quelque chose…
Comme vous le savez, au ministère de l'intérieur perdure une
continuité de l'action. Ce mardi matin, nos forces de l'ordre ont mené une
opération importante à Grande Synthe. Nous avions ce mardi une réunion de tous
les grands directeurs du renseignement territorial, de ceux de la police aux
frontières. Il y a toujours une permanence de l'État. La maison continue à
fonctionner et je la ferai fonctionner jusqu'au bout, comptez sur moi.
À votre avis, quel est le profil pour être un bon
ministre de l'Intérieur?
Il peut être de ceux qui ont contribué au projet d'Emmanuel
Macron en matière de sécurité. Il doit avoir la confiance du président. Je sais
que le chef de l'État et le premier ministre feront le choix le plus pertinent.
Certains ont-ils commencé à manœuvrer, sans attendre
votre décision?
Il y a pu y avoir un certain nombre de difficultés. Peu importe
ma personne, ce qui compte, c'est l'institution. Je n'ai qu'une préoccupation:
le service de l'État. Je veux qu'il fonctionne et qu'il assure le maximum de
protection aux Français. Lundi, j'étais à Marseille. Je participais à la
cérémonie d'hommage en mémoire de Laura et de Mauranne, victimes de l'attentat
du 1er octobre 2017 sur le parvis de la gare Saint-Charles. Croyez-moi, sont
des moments graves où, oui, vous avez conscience que vos responsabilités sont
immenses. Et qu'elles vous obligent.
«Il y a pu y avoir un certain nombre de difficultés. Peu
importe ma personne, ce qui compte, c'est l'institution»
Gérard Collomb
Est-ce que dans votre décision intervient aussi le fait
qu'on
a essayé de vous faire porter le chapeau dans l'affaire Benalla?
Pour moi, c'est une affaire ancienne. Je ne veux pas revenir
sur ce fait. D'ailleurs, le président de la République l'a redit lui-même: il
n'y a jamais eu une intention de mettre en cause quiconque au ministère de
l'Intérieur.
Vous l'avez évidemment informé de votre décision ultime
de partir. Que vous a dit le président?
Je n'ai pas pour habitude de revenir sur les conversations
privées que j'ai avec le Président.
Mais vous ne partez pas un peu le cœur serré, quand même?
Ce ministère, on ne peut que le quitter avec regret, parce
que c'est un beau ministère où travaillent des gens extraordinaires: policiers,
gendarmes, sapeurs-pompiers, tous les fonctionnaires de l'État, civils ou
militaires, quels que soient leur grade ou leur fonction.
J'ai vu dans l'ensemble de nos territoires, l'engagement
total et exemplaire de nos préfets, leur indéfectible sens de l'État. J'ai eu
énormément de plaisir et de fierté à être à la tête de ce ministère. J'en connais
désormais tous les rouages et partout côtoyé des hommes et des femmes
admirables, totalement consacrés à la protection et au service des Français. Je
veux remercier chacune et chacun d'entre eux. Je suis certain qu'ils
continueront à œuvrer avec le même enthousiasme et le même dynamisme que celui
que je leur connais aujourd'hui et qu'ils continueront à s'impliquer pleinement
demain dans les réformes que j'ai pu impulser.
Est-ce que vous avez des regrets?
Je ne suis pas un homme de regrets, je regarde toujours
l'avenir. Je sais aussi que construire l'avenir, c'est la première ambition du
Président et du Gouvernement. On peut penser toujours que, sur tel ou tel
point, qu'on aurait peut-être pu mieux faire. Mais je suis convaincu que les
mesures prises par le Gouvernement vont porter leurs fruits demain.
Mardi, Gérard Collomb a convié son successeur à la mairie de
Lyon, Georges Képénékian, à son cabinet, place Beauvau. Ils ont reçu ensemble
Le Figaro pour annoncer la démission du ministre et la mise en retrait du maire
par intérim. - Crédits photo : SEBASTIEN SORIANO/Le Figaro
Avez-vous le sentiment que votre rôle de ministre a nui à
votre image au plan local?
Non. J'ai le sentiment que beaucoup de Lyonnais sont
satisfaits de l'action que j'ai pu porter et de ce que nous avons accompli avec
le gouvernement.
Georges KEPENEKIAN. - Je pense qu'à Lyon, en
tout cas, clairement, c'est plutôt une fierté d'avoir eu un ministre numéro
deux du gouvernement.
Mais vous auriez pu être, M. le Ministre, le nouvel
Edouard Herriot…
Le nouvel Herriot, je ne sais pas, mais il a eu lui-aussi
une vie municipale, puis une vie nationale, puis à nouveau une vie municipale.
Il a été président du Conseil puis il est revenu dans sa ville parce que, comme
moi, il en avait la passion.
Si vous êtes élu en 2020, choisirez-vous la mairie ou la
métropole?
Je mènerai partout des listes. Mais comme vous le savez, ce
sera d'abord le choix des habitants de la Métropole de Lyon. Le moment venu,
avec celles et ceux qui auront été élus, nous déciderons ensemble. Ce qui
m'importe, c'est qu'il y ait une unité de pensée entre la Métropole et la Ville
de Lyon, car c'est comme cela qu'au cours de ces dernières années nous avons
construit une agglomération où dynamique économique, sociale et environnementale
se conjuguent.
Il y a ceux qui vous diront que quatre mandats, c'est
trop. Quel leur répondez-vous?
Je sais quel est le temps d'une ville. C'est celui du temps
long. Ce n'est que dans la durée qu'on parvient à métamorphoser nos grandes
villes.
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Damien Le
Guay : «Ces jours où les Français se recueillent»
TRIBUNE - Les Français continuent à honorer leurs morts le
2 novembre, mais le choix de leurs propres obsèques les divise désormais,
explique le philosophe*.
La Toussaint est, dans l'année, le moment privilégié des
morts ou plutôt le moment collectif des retrouvailles entre les vivants et les
morts. Pendant quelques jours, les citoyens des cimetières sont massivement
honorés, comme si, à cette occasion, les familles s'agrandissaient pour y
inclure ses membres absents. Lors de ces visites au cimetière, avec ces moments
de recueillement, de dialogue silencieux ou de prières, nous faisons vivre
cette «démocratie des vivants et des morts» qui dilate les cœurs et élargit le
cercle intime. Enfin, les morts ont voix au chapitre dans les familles!
Que dire de tous ces passagers clandestins de notre
mémoire, présents dans notre cœur et absents de nos maisons ?
Que dire de tous ces passagers clandestins de notre mémoire,
présents dans notre cœur et absents de nos maisons? Ils nous ont introduits
dans le monde, nous ont appris à parler et à aimer et, avant de s'éloigner,
nous ont donné la responsabilité du monde. Que dire de cet échange mystérieux
avec ce peuple invisible qui dort dans les cimetières - car les cimetières
sont, étymologiquement, des «lieux pour dormir», des «dortoirs»? Les Français
le jugent essentiel. Pendant ces quelques jours, la moitié d'entre eux (soit
35 millions de Français) va se déplacer pour visiter les maisons des
morts. Et 25 millions de pots de fleurs ou de bouquets vont venir colorer
les tombes des retraités d'éternité.
En allant rendre hommage à leurs défunts, les Français font
vivre cet ancien «droit à la continuité historique» - évoqué par Ortegay
Gasset. Ainsi, les familles d'aujourd'hui prolongent le passé, anticipent le
futur et consacrent, ainsi, un sens familial de la durée. Contre l'idée moderne
des générations spontanées - comme si nous naissions tout seuls, suspendus en
l'air -, l'hommage rendu à ses ancêtres relève d'une belle civilité culturelle.
Il y a là un effet de civilisation.
«Contre l'idée moderne des générations spontanées,
l'hommage rendu à ses ancêtres relève d'une belle civilité culturelle. Il y a
là un effet de civilisation.»
Mais les attentes changent. Une enquête Ipsos du
4 octobre 2018 confirme une préférence pour la crémation - envisagée
aujourd'hui par 63 % des Français. Qu'en est-il de leur motivation?
42 % des personnes interrogées opteraient pour la crémation afin de ne pas
«laisser de traces aprèsla mort» alors que 42 % de ceux qui choisissent
l'inhumation le font pour souhaiter que leurs «proches puissent venir se
recueillir sur une tombe». Deux choix honorables, mais nous sommes bien là dans
un conflit culturel majeur.
D'un côté ceux qui pensent que les familles se prolongent
au-delà de la mort et de l'autre ceux qui considèrent que nous sommes des
individus isolés qui, avec la mort, disparaîtront corps et âme. Conflit entre
ceux qui s'inscrivent dans une durée et ceux qui croient que tout s'arrête dans
l'instant de la mort. Conflit entre les adeptes d'une tradition et les
partisans du rien-à-laisser-derrière-soi. Conflit entre une société plus forte
que la mort et, d'autre part, un agglomérat d'individus friables sans grands
atomes crochus. Conflit entre une société solide qui respecte les corps et les
accompagne jusqu'au dortoir des morts et, d'autre part, une «société liquide»
qui croit que tout s'évanouit avec la mort, que les corps encombrent et qu'il
faut les réduire en cendres au plus vite. Conflit entre ceux qui pensent
ensemble l'âme et le corps et ceux qui jugent que le corps embarrasse.
Ces conflits, précisons-le, ne sont pas motivés par des
raisons religieuses. Ils opposent deux manières de faire société. Sommes-nous,
tous ensemble, en train de prolonger une histoire, de nouer des intrigues qui
sont plus puissantes que nous et nous survivent ou, au contraire, sommes-nous
enfermés dans notre petite bulle individuelle qui, quand elle éclatera, ne
laissera pas plus de trace que des cendres? Thomas Laqueur, dans Le
Travail des morts, livre magistral qui vient de sortir, le souligne: ce
«travail des morts» est «le plus grand et mystérieux triomphe de la culture».
Laquelle? Tout est là. La culture qui lutte contre la volatilité ou celle qui
la renforce.
L'enquête d'Ipsos insiste sur une forte demande de l'opinion
(à hauteur de 71 %) pour l'organisation indispensable de cérémonies lors
des obsèques. Certes, cette demande est plus grande pour les partisans de
l'inhumation (86 %), mais elle est puissante, aussi, pour les partisans
d'une crémation (63 %). Insistons sur ce besoin de cérémonies. Il mérite
toute notre attention, alors même que le goût du symbolique s'affaiblit et que
celui du religieux s'affaisse. La mort sans cérémonies semble indigne. Elle
l'est. Et cette dignité des adieux est, pour 45 % des sondés, une demande
de «cérémonie religieuse». Collectivement, nous n'avons pas assez réfléchi à
cette demande alors même que globalement la religion ne joue plus ce rôle
d'organisation sociale du funéraire.
«Une éducation au symbolique, au religieux funéraire et à
la mort devrait être développée pour éviter l'actuelle montée des frustrations
cérémonielles.»
Ce besoin de cérémonies est aujourd'hui confronté à une
triple difficulté. D'une part, les opérateurs funéraires sont assez démunis
face à cette demande de symboles et de rites et de pompes et ne savent pas bien
comment y répondre. Ils deviennent aussi des régisseurs symboliques mais ne
veulent pas trop assumer ce rôle. D'autre part, hors des lieux stricto sensu
religieux, l'exigence de professionnalisme pousse les corps-morts vers des
«lieux techniques» (pour la thanatopraxie ou la crémation) qui ne prévoient pas
toujours des lieux de cérémonie. Il est indispensable de prévoir ces lieux-là,
surtout quand nous sommes confrontés à des demandes insistantes et légitimes
des musulmans, en particulier, pour les derniers rites. Enfin, les demandes de
cérémonies faites par les familles sont un peu désordonnées, commesi la
grammaire symbolique faisait défaut. Une éducation au symbolique, au religieux
funéraire et à la mort devrait être développée pour éviter l'actuelle montée
des frustrations cérémonielles.
Souhaitons que le temps de la Toussaint nous permette, tous
ensemble, de reconsidérer la place des morts et les demandes de cérémonies des
vivants.
* Vice-président du Comité national d'éthique du
funéraire, Damien Le Guay a publié, notamment, «Le Fin mot de la vie» (Éditions
du Cerf, 2014) et «La Mort en cendres» (Éditions du Cerf, 2012).
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
01/11/2018.
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Pierre
Vermeren : «La plupart des fêtes catholiques sont dénaturées par le marché»
TRIBUNE - Les fêtes chrétiennes qui scandent l'année ont
changé de sens pour une partie de nos contemporains,
Le silence qui entoure les fêtes chrétiennes - on n'ose
dire catholiques - dans les médias audiovisuels est si fort que le droit à
l'information sur l'actualité religieuse s'est envolé. Subrepticement, on a
appris, à l'occasion des assassinats de Trèbes, que la messe des «Rameaux» a
été célébrée en la mémoire des victimes, mais qui comprend encore ce
mot? ; ou que les Frères musulmans ont organisé leur grand rassemblement
le week-end «pascal», mais qui sait encore ce que cela signifie? L'évocation
des fêtes religieuses n'est plus dicible que pour les fêtes islamiques, quand
bien même elles ne concernent qu'une petite partie de la population, qu'elles
ne donnent lieu à aucun jour férié, et qu'elles n'ont pas de sens pour
90 % de la population. À cette aune, d'ailleurs, pourquoi ne jamais
mentionner les fêtes juives ou hindoues?
Cette situation est le fruit d'histoires connues dont les
fils s'entrecroisent: la longue lutte laïque en France contre la religion
catholique et les ingérences sociales et politiques du clergé ; la culpabilité
postcoloniale qui pousse l'altruisme et l'inconscient chrétien des Français
vers les autres ; et l'orgueil d'une société qui, se pensant comme
optimale, enrage d'échouer en partie l'intégration de ses récents hôtes, au
point de se flageller face à un djihad pourtant inventé en Égypte et dans le
Golfe, et qui poursuit ses buts millénaristes pour échapperà la sécularisation
promise.
Pâques, fête de la résurrection et principal signifiant
de la chrétienté, est devenue… la « fête du chocolat ». Qu'est-ce qui a pu
présider à une telle chute ?
Par-delà ces raisons (sans évoquer le fait que les élites
médiatiques qui fabriquent l'information sont très éloignées dela sociologie
française), il est permis de s'interroger sur les raisons profondes de cette amnésie
organisée. Il ne faut pas remonter loin dans l'histoire, comme le savent ceux
qui ont vécu dans les années 1970, pour savoir que la fête de Pâques
- depuis des centaines d'années - était l'apothéose de l'année, plus
encore que Noël ou le 15 août. Pourtant, si Noël demeure célébrée, au
point que les «athées chrétiens» et les pratiquants des autres religions le
font aussi, Pâques, fête de la résurrection et principal signifiant de la
chrétienté, est devenue… la «fête du chocolat». Qu'est-ce qui a pu présider à
une telle chute?
Il est à craindre que les raisons soient principalement
mercantiles. Depuis l'unification du pays par la télévision, le critère
principal dans la sélection, par les médias, des événements religieux et non
religieux est affaire de commerce. La tragédie du lieutenant-colonel Beltrame,
et son sacrifice chevaleresque, a d'autant plus surpris nos concitoyens qu'elle
rappelle des valeurs totalement oubliées et disqualifiées. La révolution
marchande et l'avènement du capitalisme libéral, considérés comme diaboliques
par l'Église du XIXe siècle, ont pulvérisé l'ancien système de valeurs
hérité de la chrétienté médiévale et moderne. Une des premières grandes mesures
de la Révolution française a été la loi Le Chapelier qui visait à
libéraliser l'économie, le commerce et la production, faisant fi de toutesles
normes et restrictions antérieures. Nous y sommes.
Les Français sont devenus des Anglais comme les autres.
Napoléon Bonaparte appelait les Anglais «une nation de
boutiquiers», ce que nos ancêtres reprochèrent si longtemps avec condescendance
aux Britanniques. Or, au fil de ces deux siècles, les Français sont devenus des
Anglais comme les autres. La résistance à cette évolution a été longue, puisque
les valeurs de gratuité, d'espérance et le panache ont encore animé une partie
du XXe siècle. Les Algériens avaient bien perçu l'enjeu dès le
XIXe siècle: lorsqu'en 1871, le Bachaga Moqrani, le patron de la Kabylie
sous le second Empire, eut à faire ses adieux aux officiers français des
bureaux arabes, révoqués par la IIIe République naissante, dans l'attente
des administrateurs civils, il déclara à peu près ceci: «Nous voulons bien
obéir à des officiers, mais à des marchands, c'est exclu!» Ce fut le prélude à
la plus violente insurrection algérienne anti-française jusqu'à la guerre
d'Algérie.
Mais les Français d'aujourd'hui sont devenus des boutiquiers
et des marchands enfiévrés qu'aucune entorse au «doux commerce» ne peut
entraver. Le rentable, le «bancable», le prudentiel, l'assurantiel, le pratico-pratique,
le sécurisé, le bénéficiaire et le bénéfice sont devenus les valeurs dominantes
de notre société, dont les élites de l'audiovisuel sont à la fois le produit,
le visage et la tête pensante.
Dès lors, indépendamment de toutes considérations idéologiques,
même si elles sont présentes, le seul étalon est le commerce: Noël a cessé
d'être la nativité pour devenir l'apothéose de la fête marchande et
consumériste, et les «fêtes de fin d'année» une bénédiction économique que l'on
veut universelle. Derrière ce navire amiral, le reste est une somme de niches:
la chandeleur est une petite niche pour supermarché et crêpiers ; la
Saint-Valentin - le seul saint ayant résisté au tsunami marchand - a
l'avantage de marier commerce des corps et des objets, et de la
restauration ; Pâques est la fête des chocolatiers ; les ponts de
mai, Ascension et Pentecôte en tête, doivent leur salut aux hôteliers et aux
stations balnéaires ; le 15 août est noyé dans l'autocélébration
festive estivale ; la Toussaint est, comme la Fête des mères, un grand
moment pour les fleuristes. En outre, des fêtes païennes sont venues améliorer
l'ordinaire: Fête des pères pour les cravates, Fête de la musique pour l'alcool,
Halloween pour doper les loisirs en cette triste période d'automne. À cette
aune, le ramadan est une niche pour les supermarchés, qui peuvent ouvrir un
rayon ad hoc, et pour les entrepreneurs du halal.
La promotion de l'abstinence et de la retenue est la pire
catastrophe qui puisse arriver dans une société marchande.
En revanche, tout ce qui n'est pas «bancable» a disparu. Le
pire étant le carême, dont on n'a retenu que le carnaval dans certaines villes,
mais dont le mot est tabou. La promotion de l'abstinence et de la retenue
(alimentaire et consumériste) est la pire catastrophe qui puisse arriver dans
une société marchande. À tel point que le mardi gras a été enterré pour ne pas
réactiver ce spectre. D'où l'usage de Halloween, afin que les enfants aient
leur petit substitut. Autre catastrophe, Pâques, censée nous arracher aux contingences
d'ici-bas. En revanche, l'aspect festif et exotique du ramadan, tel qu'il est
pratiqué au Maghreb, occasionnant moult ripailles nocturnes, est une coutume
appréciée de nos dirigeants, d'autant plus qu'ils ne jeûnent pas!
De sorte que tout ce qui fait ventre est chanté, quand tout
ce qui élève est moqué voire banni. La «nouvelle civilisation» promue jadis par
Martine Aubry n'est pas très difficile à déchiffrer.
* Ancien élève de l'École normale supérieure, Pierre
Vermeren est agrégé et docteur en histoire. À récemment coécrit «Dissidents du
Maghreb depuis les indépendances» (Belin, octobre 2018).
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
01/11/2018.
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la nostalgie»
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Les
Kurdes de Syrie dénoncent le refus des pays de l'UE de reprendre leurs
djihadistes
Les autorités semi-autonomes kurdes de Syrie ont dénoncé
aujourd'hui à Bruxelles le
refus des pays européens de reprendre leurs ressortissants membres du groupe
Etat islamique détenus par leurs forces.
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France envisage le rapatriement d'enfants de djihadistes français signalés en
Syrie
Les combattants étrangers capturés et leurs familles sont
originaires de 46 pays, a annoncé Abdul Karim Omar, en charge des affaires
étrangères au sein de l'administration kurde lors d'une conférence de presse à
Bruxelles. 790 hommes sont détenus par les forces spéciales kurdes dans une
prison. 584 femmes et 1250
enfants ont été placés dans deux camps, a-t-il précisé. "Tous les
pays de l'UE sont concernés, mais aucun ne nous a demandé l'extradition de ses
ressortissants. Il refusent de prendre leurs responsabilités et nous laissent
supporter ce fardeau", a-t-il déploré. "Ces détenus sont dangereux et
certains ont commis des massacres de civils. Nous ne pouvons pas gérer seuls ce
problème en raison de l'instabilité de notre région", a-t-il assuré.
"Une faille dans la sécurité pourrait leur permettre de s'échapper",
a-t-il averti. Le représentant kurde a refusé de préciser le nombre de
ressortissants des pays de l'UE détenus. "Ce n'est pas important",
a-t-il déclaré. Le représentant kurde a précisé que la Belgique avait accepté
de reprendre
seulement les enfants des ressortissants belges. "Nous sommes
convaincus que les mères et leurs enfants ne doivent pas être séparés et aucune
famille n'a été réclamée par son pays d'origine", a-t-il expliqué.
Guillaume
Perrault : «Mort d'un ancien traducteur afghan de l'armée française»
FIGAROVOX/ANALYSE - Un ancien traducteur afghan de l'armée
française, qui avait sollicité en vain un visa pour la France pour lui et sa
famille, a été tué dans un attentat-suicide à Kaboul. De pénibles souvenirs de
notre histoire reviennent en mémoire.
- Crédits photo : Figaro
Guillaume Perrault est rédacteur en chef du service
Débats du Figaro & FigaroVox. Maître de conférences à Sciences Po, il
enseigne l'histoire politique française et les institutions politiques. Son
dernier ouvrage, «Conservateurs, soyez fiers!», est paru chez Plon en 2017.
«Plus honteuse que notre défaite est la trahison à laquelle
nous allons nous livrer. Nous avons résisté aussi longtemps dans ce delta
pourri parce que deux cent mille Vietnamiens ont été nos soldats et qu'un
million d'hommes et de femmes nous ont aidés. Notre paix les condamne.»
Dans La Guerre d'Indochine, le grand Lucien Bodard dépeint les tourments
d'un capitaine de l'armée française au moment de quitter le Tonkin, l'été 1954,
après Diên Biên Phu et les accords de Genève. Des Vietnamiens catholiques dont
le village a résisté au Viet-minh, terrorisés, entourent l'officier. «Le
capitaine promet à tous ces gens que les Français les transporteront vers le
sud, en Cochinchine».
De fait, en quelques mois, près d'un million de Tonkinois,
grâce à l'armée française et à la marine de guerre américaine, réussissent à
échapper au régime d'Hô Chi Minh. Tous n'ont pas leur chance. Dans l'atmosphère
de panique et de chaos de l'époque, certains navires de la Royale, saturés de
Vietnamiens, doivent refouler ceux qui se présentent trop tard, les abandonnant
ainsi à la vengeance du vainqueur.
On le sait, huit ans plus tard, en Algérie, ce fut bien
pire. Selon les estimations les plus prudentes, outre les civils musulmans
loyalistes abandonnés et massacrés, 60 000 à
80 000 harkis désarmés auraient été lynchés. Seuls
45 000 auraient réussi à gagner l'Hexagone grâce aux officiers qui
désobéirent aux ordres.
Ces souvenirs de honte, comment ne pas y songer en
apprenant le meurtre d'un ancien traducteur afghan de l'armée française, qui
s'était vu refuser le visa pour la France qu'il avait sollicité ?
Ces souvenirs de honte, comment ne pas y songer en apprenant
le meurtre d'un ancien traducteur afghan de l'armée française, qui s'était vu
refuser le visa pour la France qu'il avait sollicité pour lui, sa femme et leurs
deux enfants? Qader Daoudzai, âgé de 33 ans, a été tué le 20 octobre lors
d'une attaque suicide dans un bureau de vote à Kaboul.
Ils sont des centaines à être ainsi menacés de mort par les
talibans pour avoir travaillé avec l'armée française jusqu'à son retrait
d'Afghanistan en 2013 et qui vivent aujourd'hui la peur au ventre. Huit cents
Afghans, tous métiers confondus (traducteurs, cuisiniers, infirmiers), auraient
servi la France. La quasi-totalité semblent avoir déposé une demande de visa
pour eux et leurs familles. Seule une petite partie d'entre eux l'a obtenu.
Voilà déjà plus de cinq ans (nos éditions du 30 mai 2013), Le
Figaro avait consacré une pleine page d'enquête à leur tragique
situation. Notre journal évaluait alors à 160, familles comprises, les Afghans
ayant œuvré aux côtés de nos soldats et accueillis en France. Le ministère de
la Défense a plaidé en faveur d'un très large accueil de ces Afghans lors des
réunions interministérielles consacrées au sujet, mais l'Hôtel de Brienne n'est
qu'une administration parmi d'autres et les visas ne sont pas de son ressort.
Londres n'a pas manifesté un sens de l'honneur plus vif, il est vrai, répugnant
à accueillir les anciens traducteurs afghans de l'armée britannique avant de
céder devant le succès d'une pétition en leur faveur et d'annoncer 600 visas.
Comment expliquer ce qu'on est en droit de qualifier
d'infamie? Il n'a pas été institué une procédure spéciale visant à accorder un
visa de plein droit aux Afghans ayant servi notre pays.
Conduire une politique, c'est nécessairement assumer que
A et B sont différents et appellent un traitement distinct.
La situation des intéressés n'est pas appréhendée, comme il
aurait été naturel, en termes politiques (des alliés ayant risqué leur vie à
nos côtés et envers qui la France a des devoirs) mais en termes juridiques (des
demandeurs d'asile parmi des centaines de milliers d'autres, dont il faut
apprécier s'ils répondent ou non aux critères fixés par le droit international
pour obtenir le statut de réfugié). En somme, l'État n'a pas voulu choisir de
leur accorder une préférence, de les privilégier.
Or mener une politique, c'est nécessairement assumer que A
et B sont différents et appellent un traitement distinct. Mais ce qui allait de
soi jusqu'à peu est devenu indicible. L'évolution du verbe «discriminer» en
témoigne. D'après Littré, il signifie discerner, distinguer, démêler ce qui est
embrouillé, bref différencier ce qui mérite de l'être. Rien que de louable et
de nécessaire. «Tâchons de procéder à une discrimination des divers problèmes»,
écrit Raymond Aron en 1977. Puis le sens du mot s'est inversé. Il signifie
désormais imposer une différence de traitement en vertu d'un motif interdit par
la loi et réprouvé par la morale. Or, pour éviter d'être accusé de discriminer
au sens négatif, l'État finit par ne plus assumer aucun choix, puisque tous
sont suspects. Et l'on retrouve, hélas, l'intuition de Lucien Bodard à propos
de la guerre d'Indochine: «La machine républicaine et gouvernementale se révèle
d'un poids effrayant ; c'est quelque chose de grippé, d'impossible à
remuer, le colosse de l'inertie, le monde du néant.»
Retrouvez Guillaume Perrault sur Twitter: https://twitter.com/GuilPerrault
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Zemmour : «Scènes de la vie future»
CHRONIQUE - Dans un livre très documenté, Géraldine Smith
offre une description apocalyptique du progressisme américain qui transforme le
pays en enfer. Et qui a déjà contaminé la France.
Le livre s'intitulait Scènes de la vie future.
Georges Duhamel décrivait l'Amérique qu'il avait visitée en 1929 ; une
société rongée par le matérialisme, le consumérisme, le puritanisme (en pleine
prohibition). Il s'effrayait de l'influence américaine sur une France qui ne
demandait qu'à être contaminée par les virus venus d'outre-Atlantique. L'ouvrage
publié en 1930 connut un immense succès. Sans le savoir, Duhamel avait inventé
un genre éditorial en soi: le vu en Amérique, bientôt en France.
Géraldine Smith n'a ni l'élégance littéraire, ni la vaste
culture, ni la hauteur de vue de son lointain prédécesseur. Son style
journalistique est sans goût ni saveur, mais il a le mérite d'être concret et
pédagogique. Ses analyses sont pauvres mais ses descriptions sont riches. Comme
dans son précédent ouvrage, qui racontait l'échec du «vivre ensemble» dans le
XIe arrondissement de Paris, notre observatrice s'avère une bobo contrariée par
le réel, mais qui a le mérite, contrairement à la plupart de ses pairs, de ne
pas refuser de voir ce qu'elle voit. On peut lui reprocher ses illusions, pas
son honnêteté intellectuelle. Bien sûr, elle ne décèle dans ce qu'elle dénonce
que «des effets pervers» d'idées justes, puisque provenant du fonds idéaliste
de gauche, sans comprendre - ou admettre - que c'est son idéalisme de
gauche qui est pervers. Géraldine Smith est une des innombrables incarnations
contemporaines de la fameuse phrase de Bossuet: «Dieu rit de ceux qui déplorent
les effets dont ils chérissent les causes.»
«Notre société a décidé que modifier l'environnement de
l'enfant coûterait trop cher. Nous avons donc décidé de modifier l'enfant»
Un médecin
Pourtant, à part Dieu, personne n'a envie de rire après
avoir lu ce qu'elle raconte. Installée depuis dix ans en Caroline du Nord, elle
nous montre une Amérique toujours plus riche avec toujours plus de
pauvres ; avec moins de chômeurs que jamais, mais toujours moins de
protection sociale aussi. Le travail du dimanche désagrège une vie de famille
déjà minée par le divorce de masse ; le règne du «cool» dans les vêtements
fait songer à la célèbre phrase d'Einstein sur «l'Amérique passée directement
de la barbarie à la décadence». Un Américain sur quatre va quotidiennement au
fast-food ; et les autres se nourrissent de pizzas ou de sushis avalés
n'importe comment, n'importe où, à n'importe quelle heure. Bien la peine de
dépenser des milliards de dollars dans des campagnes contre l'obésité!
Le chapitre sur les enfants traités par amphétamines pour
obtenir de meilleurs résultats scolaires fait froid dans le dos. Un médecin
explique: «Notre société a décidé que modifier l'environnement de l'enfant
coûterait trop cher. Nous avons donc décidé de modifier l'enfant.» Un
professeur de psychiatrie analyse les conséquences du laxisme des parents et
des profs: «À l'école, on punissait les enfants qui ne restaient pas assis.
Aujourd'hui, on les envoie en thérapie et on les drogue.» Pas étonnant que
l'Amérique soit aussi le pays où des millions de malades sont devenus de véritables
«drogués» après qu'on les eut soignés avec des dérivés de l'opium pour
atténuer les effets de la douleur. Le pays également où des parents conduisent
leurs enfants de 10 ans chez des médecins afin que ceux-ci bloquent par
des traitements chimiques leur puberté, parce que leur fille ne se sent pas à
l'aise dans son identité de genre.
Mais c'est à l'université, sur les campus que le monde
entier leur envie, que l'Amérique fabrique son avenir. Et le nôtre. Un avenir
paradoxal, à la fois hyperprotecteur et hyperconflictuel. La protection de tous
ceux qui ne peuvent supporter les «micro-agressions» concernant leur sexe, leur
genre, leur couleur de peau, leurs origines. Ceux-là ont le droit à des
«trigger warnings» (déclencheurs d'alerte) et des «lecteurs de sensibilité»
pour éviter tout ce qui pourrait les choquer: «Les livres ne sont pas le lieu
où un lecteur doit faire face à une représentation nocive ou stéréotypée de ce
qu'il est.»
L'Amérique qui sort de ce tableau édifiant est à rebours
des idéaux de ceux qui l'ont forgée : les féministes et les militants noirs
organisent leur propre ségrégation. Les existentialistes les plus fanatiques
inventent l'essentialisme des races et des genres le plus implacable
En clair, les femmes ne doivent plus lire Madame
Bovary, les Juifs ne s'aventureront plus dans la lecture de Rebatet ou de Barrès,
ou même de Balzac ou Voltaire ; les homosexuels ne chanteront plus du
Brassens ou du Brel et les hétérosexuels ne liront pas Jean Genet. Chacun chez
soi et les vaches seront bien gardées, disait le dicton populaire d'antan.
C'est exactement ce que nous montre Géraldine Smith, lorsqu'elle nous relate la
mésaventure de son fils et d'un de ses amis noirs, à qui la «fraternité noire» (sorte
de confrérie étudiante, NDLR) interdit de s'installer ensemble dans le campus.
Ou ces femmes noires qui refusent la promiscuité avec les femmes blanches
accusées d'être des «privilégiées». Ou ces filles qui s'écrient: «Stop! You are
making me really unconfortable!» dès qu'elles ont un désaccord avec un garçon.
Ou cet étudiant sanctionné par l'université pour une «danse sexuellement
agressive».
L'Amérique qui sort de ce tableau édifiant est à rebours des
idéaux de ceux qui l'ont forgée: les féministes et les militants noirs
organisent leur propre ségrégation. Les existentialistes les plus fanatiques
inventent l'essentialisme des races et des genres le plus implacable.
Ressuscitent le vieux principe de l'apartheid: «séparé mais égal». Comme le
reconnaît, effarée, Géraldine Smith: «Les parents noirs cherchaient à se fondre
dans l'Amérique blanche ; leurs enfants les accusent de white
washing ; les premiers luttaient pour le droit de s'asseoir à la même
table, les seconds veulent qu'on leur dresse une table de même taille, mais
séparée.»
Vu en Amérique Bientôt en France. Géraldine Smith.
Stock. 257 P., 19,50 €.
Elle voit juste: tout ce qu'elle décrit viendra en France -
y est déjà. Nous allons vivre une nouvelle vague d'américanisation: après celle
des années 30 (décrite par Georges Duhamel), celle de l'après-guerre (le yé-yé
et la société de consommation), celle des années 80 (McDonald's et
antiracisme multiculturel), nous subirons celle qui vient: séparation de plus
en plus conflictuelle des races et des sexes. Comme si, contrairement à tous
les lieux communs progressistes, c'était le patriarcat blanc, assis sur la
civilisation occidentale, qui s'avérait en dépit de ses limites et de ses
crimes le plus «inclusif», car porteur d'une raison universaliste, héritée de
l'Antiquité grecque, romaine et chrétienne. Georges Duhamel l'aurait volontiers
expliqué à Géraldine Smith, qui ne l'aurait sans doute pas cru.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
01/11/2018.
La rédaction vous conseille :
« Asia
Bibi, une victime expiatoire »
FIGAROVOX/TRIBUNE - Asia Bibi a été libérée. Cette chrétienne
avait été condamnée à mort au Pakistan pour blasphème. Tout en se réjouissant de
cette décision, Marc Fromager espère que l'épreuve endurée par la jeune femme
améliorera le sort des chrétiens pakistanais.
Marc Fromager est directeur de l'AED (Aide à l'Église en
Détresse), qui soutient les chrétiens en danger partout dans le monde.
Comment ne pas se réjouir de la libération d'Asia Bibi, pour
laquelle nous étions mobilisés depuis le départ, depuis neuf ans. L'AED (Aide à
l'Eglise en Détresse) avait d'abord lancé une pétition en 2009 avec plus de 11
000 signatures, apportées au Quai d'Orsay. Une large mobilisation avait sans
doute sauvé Asia Bibi dans un premier temps mais avait ensuite compliqué sa
libération. Entre-temps, elle était devenue une icône, voire une victime
expiatoire.
C'est la raison pour laquelle nous avons plus tard cessé de
la médiatiser, sur les conseils de l'Église au Pakistan qui souhaitait la faire
oublier. Nous n'avons pas cessé de la soutenir pour autant, notamment à travers
la Commission Justice et Paix de la Conférence épiscopale pakistanaise qui
prenait en charge des frais d'avocat et de soutien financier de la famille.
Pour revenir à sa libération, nous ne pouvons que nous en
réjouir. J'étais moi-même il y a deux semaines à Londres avec le mari et une
des filles d'Asia Bibi. Ils avaient l'air assez confiants mais évidemment, il
fallait attendre que la décision finale soit rendue publique.
A ce stade, il est important de saluer le courage des juges
pakistanais. On sait que le gouvernement pakistanais souhaitait la libération
d'Asia Bibi depuis assez longtemps, pour des raisons d'image internationale,
mais la menace de désordre majeur a fait traîner ce cas toutes ces années.
Il faut dire que de nombreuses personnes ont été assassinées
ces dernières années pour avoir publiquement pris position contre la loi
anti-blasphème. Je pense notamment à Salman Taseer, gouverneur musulman du
Punjab qui a été assassiné en 2011 par son garde du corps pour avoir défendu
Asia Bibi. Nous ne les oublions pas en ce jour de sa libération.
On peut imaginer qu'au-delà de la Cour Suprême, le
gouvernement pakistanais a donné son feu vert pour l'acquittement et nous l'en
félicitons. Il va maintenant falloir faire face, alors que des émeutes ont déjà
éclaté dans le pays. Les groupes islamistes mettent à exécution les menaces
proférées en amont du jugement. Ils souhaitent, là comme ailleurs, imposer leur
loi.
Il est important de saluer le courage des juges
pakistanais.
Au cours des prochains jours, nous serons particulièrement
attentifs au sort des communautés chrétiennes, des cibles faciles pour les
représailles des groupes extrémistes musulmans.
Au-delà de la libération d'Asia Bibi, on ne peut que
déplorer le sort des minorités religieuses au Pakistan, en particulier les
chrétiens, qui représentent à peu près 3% de la population, souvent
marginalisés, discriminés, au plus bas de l'échelle sociale, et qui font
régulièrement l'objet d'attentats, surtout au moment des grandes fêtes
chrétiennes.
Pour conclure, nous pouvons espérer que cet acquittement
fera jurisprudence et que, dorénavant, la justice pakistanaise surveillera de
plus près toute éventuelle accusation de blasphème. À terme, nous espérons que
très rapidement, la loi anti-blasphème soit supprimée. Il n'est pas question
d'encourager le blasphème mais de supprimer une loi inepte qui est le plus
souvent instrumentalisée pour simplement régler des problèmes de voisinage.
Si les chrétiens au Pakistan pouvaient dorénavant être un
peu plus respectés, la dramatique épreuve d'Asia Bibi n'aura pas été vaine.
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La leçon
de courage d'Asia Bibi, acquittée au Pakistan après 9 ans de prison pour
blasphème
RÉCIT - Cette mère de famille pakistanaise, accusée d'avoir
blasphémé Mahomet, avait été condamnée à mort en 2010.
Asia Bibi - Crédits photo : BIBI FAMILY / HANDOUT/EPA/MAXPPP
À New Delhi
C'est l'épilogue d'un marathon judiciaire de neuf ans. Neuf
longues années qui ont mobilisé une partie de la communauté internationale, ému
les catholiques du monde entier et profondément divisé le Pakistan. Neuf
longues années durant lesquelles Asia
Bibi, une mère de famille catholique, a
croupi en prison par la faute d'une querelle qui a éclaté le 14 juin 2009 autour
d'un verre d'eau avec ses voisines musulmanes dans un village de l'est du pays.
Ce jour-là, Asia Bibi leur avait proposé à boire et s'était vu rétorquer
qu'elle était impure parce que chrétienne. Elle aurait alors insulté le prophète
Mahomet, un blasphème passible
de la peine de mort au titre de l'article 295-C du Code pénal.
Condamnée
par un tribunal de première instance en novembre 2010, Asia Bibi
avait perdu en appel devant la Haute Cour de Lahore en octobre 2014. La
Cour suprême était la dernière étape du parcours judiciaire.
On ne saura jamais le détail de l'altercation par laquelle
tout a commencé. Et pour les juges de la Cour suprême, c'est bien là le
problème. Dans cette affaire, les témoins de l'accusation se sont contredits
sur plusieurs points, si bien que la plus haute instance judiciaire du Pakistan
ne pouvait pas faire autrement que d'acquitter Asia Bibi faute de preuves
tangibles. La conclusion du juge Asif Saeed Khan Khosa est sans ambages: «Elle
est acquittée des charges qui pèsent contre elle au bénéfice du doute»,
écrit-il en conclusion de son arrêt.
Dans les 56 pages de son jugement, la Cour suprême évoque la
possibilité d'une vengeance qui aurait motivé la plainte. Certes, les juges
n'en ont pas la preuve. Mais les incohérences de l'accusation les ont
perturbés. Comment expliquer que la plainte ait été déposée cinq jours après
les faits alors que le poste de police n'est qu'à 11 km du village? Et que
dire de cette confession qu'Asia Bibi aurait faite devant les habitants du
village le 19 juin 2009? Elle y aurait reconnu avoir blasphémé Mahomet.
Des témoins de l'accusation ont affirmé que plus de 200 personnes, ou plus de
1000, ou plus de 2000 personnes, étaient présentes. Problème: la taille de la
maison où aurait eu lieu la confession a été estimée à… 126 mètres carrés
environ. Pas facile d'accueillir une telle foule dans un si petit espace. Plus
étrange encore, l'arrêt relève que 25 à 30 femmes étaient présentes quand la
dispute a éclaté. Mais l'accusation n'a produit que deux témoins directs.
«Il faut envoyer un message clair et faire en sorte que
la loi du blasphème ne soit plus utilisée pour persécuter les minorités les
plus vulnérables»
Omar Waraich, directeur adjoint d'Amnesty International en
Asie du Sud
Les islamistes n'ont pas voulu tendre l'oreille à ces
subtilités juridiques. Mercredi, ils ont multiplié les manifestations à travers
le pays. Karachi, Islamabad, Lahore… Aucune grande ville n'a échappé à la
colère du Tehreek-e-Labbaik, un parti politique d'obédience barelwie, en pointe
pour exiger la pendaison d'Asia Bibi. D'après le quotidien Dawn,
son leader, Khadim Hussain Rizvi, a exhorté ses partisans à s'en prendre à
l'armée et aux juges lors d'un discours à Lahore. Dans la province du Sind,
dans le Sud, le gouvernement a interdit les manifestations. Enfin, dans la
capitale Islamabad, des troupes paramilitaires ont été déployées et les
autorités ont placé des conteneurs pour bloquer l'accès à la zone rouge, le
quartier qui abrite la Cour suprême et l'enclave diplomatique avec la plupart
des ambassades étrangères.
«Asia Bibi devra fuir le Pakistan»
Tous les Pakistanais ne partagent pas la réaction de la
droite religieuse. L'arrêt de la Cour a semblé libérer la parole de ceux qui
plaident pour que la loi du blasphème soit réformée afin de prévenir les abus.
«La Cour suprême a rendu un jugement historique en acquittant Asia Bibi. L'État
doit maintenant protéger ceux qui ont œuvré pour l'État de droit et la
justice», a déclaré Sherry Rehman, ancienne députée qui avait déposé un projet
d'amendement pour réformer la procédure en 2010. La sécurité des juges de la
Cour suprême a d'ailleurs été renforcée. «Il faut envoyer un message clair et
faire en sorte que la loi du blasphème ne soit plus utilisée pour persécuter
les minorités les plus vulnérables», a exhorté Omar Waraich, directeur adjoint
d'Amnesty International en Asie du Sud.
Dans son arrêt, la Cour suprême, si elle défend la nécessité
d'une législation pour punir l'insulte envers Mahomet, souligne néanmoins que
«parfois, la loi est détournée par des individus qui lancent de fausses
accusations de blasphème». En vigueur depuis 1986, l'article 295-C est souvent
détourné pour des règlements de comptes et des lynchages. Depuis 1990, 62
personnes accusées de blasphème ont été assassinées avant même d'avoir été
jugées.
«Je suis très heureux. Mais je n'ai plus aucun avenir au
Pakistan. Je subis une pression terrible, je vis sous escorte policière, le
danger est bien là»
Saif Ul Malook, l'avocat d'Asia Bibi
Reste à savoir si tout cela sera suffisant pour ouvrir un
débat. Pas sûr. Lorsque l'on demande à l'avocat d'Asia Bibi, Saif Ul Malook,
quel est son état d'esprit après le verdict, sa voix résonne de tristesse et de
peur: «je suis très heureux. Mais je n'ai plus aucun avenir au Pakistan. Je
subis une pression terrible, je vis sous escorte policière, le danger est bien
là», confie-t-il au Figaro avant d'ajouter, comme pour
exprimer sa confiance dans le système judiciaire de son pays: «Je m'attendais à
ce qu'elle soit innocentée. J'ai travaillé pendant trois ans sur ce dossier et
durant l'audience (du 8 octobre, NDLR), les juges ont fait savoir qu'ils
avaient des doutes. Il n'y avait pas assez de preuves dans le dossier
d'accusation.»
Interrogée par téléphone depuis sa cellule par l'AFP, Asia
Bibi était incrédule à l'annonce du verdict: «Je n'arrive pas à y croire.
Vais-je sortir? Vont-ils vraiment me libérer?» Bien qu'innocentée, elle n'était
pas encore libre mercredi soir. Son avocat doit maintenant contacter la Haute
Cour de Lahore pour qu'elle envoie un ordre de libération à la prison où elle
est incarcérée. Combien de temps avant qu'elle sorte? Saif Ul Malook reste
évasif: «Deux ou trois jours». Et Joseph Nadeem, qui dirige une ONG locale et a
épaulé la famille d'Asia Bibi dans le labyrinthe judiciaire fait la même
réponse, avant d'ajouter: «Asia Bibi devra fuir le Pakistan. Mais je ne veux
pas dire le nom du pays où elle se rendra.»
Donner une date pour sa libération et dire aux médias où
elle partira ne ferait que la mettre en danger. Et Joseph Nadeem aussi a peur
des islamistes. «Nous allons essayer de nous sauver nous-mêmes», souffle-t-il
avant de lâcher: «Just keep praying.»
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
01/11/2018.
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Le Canada
veut expulser davantage de migrants illégaux
Confronté à un afflux de demandeurs d'asile venant des
États-Unis, le Canada a décidé d'augmenter drastiquement les expulsions de
migrants illégaux, avec 10.000 renvois par an, rapporte aujourd'hui la
télévision publique Radio-Canada. Cela constitue une augmentation de 25 à
35% des renvois du Canada par rapport à la dernière année, selon un courriel
récent d'un haut responsable de l'Agence des services frontaliers du Canada
(ASFC, douanes et police des frontière), obtenu par Radio-Canada.
Dans ce document confidentiel, Brad Wozny, directeur de la
division des opérations et du renseignement de l'ASFC, explique avoir
"participé à plusieurs discussions, tant au niveau régional que national,
sur la décision du gouvernement du Canada d'accroître substantiellement les
efforts de renvoi". Il y annonce ces nouvelles cibles fixées par le
gouvernement fédéral de Justin Trudeau: "En vertu des discussions
initiales, l'Agence se dirige vers une cible de 10.000 renvois par an. Cela
signifierait une augmentation allant de 25 à 35% par rapport à ce qui prévalait
ces dernières années", dit ce haut fonctionnaire.
Selon des chiffres obtenus par Radio-Canada, qui dit avoir
eu confirmation de l'ASFC, le nombre d'étrangers expulsés du Canada est passé
de 18.987 en 2012, alors que le Canada était dirigé par un gouvernement
conservateur, à 8472 en 2017. Contactée par l'AFP, l'ASFC ne souhaitait
pas commenter ces informations dans l'immédiat. Sans confirmer ni démentir
les chiffres de Radio-Canada, le Premier ministre Justin Trudeau a reconnu
aujourd'hui à son arrivée au Parlement que son gouvernement était "en
train de regarder comment améliorer le système d'immigration pour pouvoir avoir
plus de rapidité dans le traitement des dossiers".
LIRE AUSSI :
Le Figaro.fr avec AFP
Philippe
de Villiers : «Nous vivons peut-être la fin d'une civilisation, la nôtre»
Par Alexandre
Devecchio et Eléonore
de NoüelMis à jour le 31/10/2018 à 08h53 | Publié le 30/10/2018 à
19h03
ENTRETIEN - Livre après livre, il explore le passé pour
mieux éclairer le présent. Dans son nouvel ouvrage, Le Mystère Clovis (Albin
Michel), Philippe de Villiers veut voir des correspondances entre le monde
troublé de Clovis et l'Europe contemporaine, elle aussi en proie à une crise
civilisationnelle profonde.
LE FIGARO. - Pourquoi consacrer un livre à Clovis
aujourd'hui?
Philippe de VILLIERS. - Nous sommes dans des temps
de grand trouble. Quand on ne sait plus où on habite, le plus sage est de
rebrousser chemin pour savoir d'où l'on vient. Clovis est le premier mur
porteur sur lequel on peut poser la main. Il soutient la poutre maîtresse de la
petite demeure invisible des filiations françaises. Aujourd'hui, nous sommes le
seul pays au monde où la France n'est plus célébrée. Le seul où l'on a oublié
que cette vieille nation, qui n'est pas une start-up nation, est riche d'une
histoire que l'on devrait choyer car elle est glorieuse ; d'un art de
vivre que l'on devrait protéger parce qu'il est fragile ; et d'une langue
que l'on devrait déposer dans le sanctuaire des cœurs d'enfants plutôt que de
développer l'apprentissage de l'arabe à l'école, comme l'a suggéré
M. Blanquer, ou encore d'imposer l'anglais dans toutes les grandes
réunions scientifiques comme l'ont fait les présidents de la République depuis
Giscard l'atlantiste. Clovis, c'est le roi fondateur pour deux raisons: c'est
lui qui a dessiné la première combinaison de la France en rassemblant des
territoires, des peuples, des royaumes, par ses victoires ; en convertissant
au christianisme les Goths aryens. Sans Clovis, la Gothia aurait succédé à la
Romania. La deuxième raison, c'est qu'il est le continuateur de la romanitas.
Quand il a vaincu les Wisigoths à Vouillé, il s'est vu remettre devant le
tombeau de saint Martin - l'apôtre des Gaules - le titre de consul, la chlamyde
de pourpre et le diadème du Princeps. Autrement dit, il est devenu le
continuateur de Rome. Le conquérant se laisse conquérir par sa conquête. Il se
civilise, il aspire à devenir un barbare romanisé: quelle leçon!
Clovis arrive à la chute de l'Empire romain. Vivons-nous
aujourd'hui une période analogue à cette chute?
Il y a des correspondances étranges. Mon livre est à double
lecture. Nous vivons peut-être la fin d'une civilisation, la nôtre. C'était la civilisation
romaine. Il se trouve que l'Empire romain a chuté en 476, cinq ans avant que
Clovis ne soit hissé sur le pavois. Il y a deux points communs entre la déliquescence
de l'Empire romain et notre propre décrépitude. À un moment donné, la noblesse
sénatoriale romaine, qui ne pense plus qu'à ajouter une couche de porphyre à
ses baignoires, ne considère plus le limes, la frontière de l'Empire, comme une
urgence à sécuriser. À partir de cet instant, il n'y a plus de différence entre
les citoyens et les étrangers. En perdant le limes, Rome va perdre sa fierté,
et affaiblir sa capacité à se défendre. Quand il n'y a plus de frontière,
l'identité se dilue. Le deuxième point commun désigne la paresse qui abandonne
les terres aux Barbares. Le refus du service militaire encourage les Romains de
l'otium à confier leur propre sécurité à des Goths ou des Vandales, ce qui
reviendrait à laisser travailler des fichés S à l'aéroport de Roissy. En
outre, à l'époque, on installe les Barbares partout dans l'Empire romain, dans
des enclaves, et on les appelle des «colons». Le mot a une résonance édifiante.
«L'Empire romain a mis cinq siècles à s'effondrer ; nous,
à partir de Mai 68, on aura été plus performants, on n'aura mis que
cinquante ans.
Les migrants, aujourd'hui, viennent pour survivre, pas
pour nous coloniser!
Vous parlez comme les sénateurs romains qui disaient des
Barbares: «Ils sont doux et pacifiques.» Si l'on décrypte les deux traits
essentiels de la décadence romaine - la submersion extérieure et la
décomposition intérieure -, on retrouve quelques-uns des symptômes de
l'époque actuelle. Notre classe politique ne semble toujours pas comprendre la
nécessité de la frontière. On installe, avec leurs mœurs et leur religion, les
nouveaux «barbares» sur des portions du territoire français, au risque de
préparer ce que François Hollande avait appelé «la partition». Et ce que Gérard
Collomb a décrit comme le «côte-à-côte» avant le «face-à-face». La physionomie
de la France d'aujourd'hui, où des Français du commun renoncent à aller et
venir dans certains coins de France par prudence, parce que ces zones, je cite
Gérard Collomb, «sont soumises à la loi du plus fort, qui n'est plus la nôtre»,
est désormais celle d'une marqueterie de frontières qui ont migré à l'intérieur
alors que des espaces d'extraterritorialité islamique se multiplient, où la
charia est une tentation. Ce que je décris là, c'est aussi la situation romaine
de la fin de l'Empire. Une différence notable toutefois: ils ont mis cinq
siècles à s'effondrer ; nous, à partir de Mai 68, on aura été plus
performants, plus «progressistes», on n'aura mis que cinquante ans.
«On trouve des parentés entre le droit communautaire et
l'époque mérovingienne. La directive des travailleurs détachés applique le
droit du peuple d'origine. Un droit non plus territorial mais personnel, comme
sous Clovis.»
La comparaison paraît tout de même tirée par les cheveux!
Le contexte n'est pas le même aujourd'hui…
Il est bien pire. Car la grande différence que je
sous-entends dans mon livre, entre l'orbis de Clovis et le monde actuel, relève
de la démographie: du fait que les Barbares étaient peu nombreux, ils ont été
assimilés par la romanitas. Alors qu'aujourd'hui, on est plutôt dans le cas
inverse, avec des «Gaulois» livrés à la défrancisation ou qui se barbarisent,
sous l'influence de l'«American way of life» ou de l'islam radical. D'après
Michel Rouche et Jacques Dupaquier, respectivement historien et démographe, la
proportion des Barbares, au moment des grandes invasions, culmine entre
2 % et 5 % de la population autochtone. Il est possible d'assimiler
des minorités, surtout quand il s'agit de petites tribus qui n'ont pas de
prétention à imposer leur vision de l'avenir parce qu'ils portent sur le monde
un regard fruste. Alors qu'à notre époque se croisent sur notre sol des errants
désorbités qui ne savent plus où ils habitent face à des migrants qui ne l'ont
jamais su. Pour la première fois dans l'histoire de l'Europe, au nom du
principe de non-discrimination, on tente de nous soumettre à l'épreuve
mortifère de deux bouleversements de civilisation: le premier qui met fin à la frontière
physique consiste en l'installation d'une société multiculturelle, donc multiconflictuelle
et multidéculturée où nous avons vocation à devenir minoritaires ; et le
second, qui met fin à la frontière anthropologique, c'est-à-dire la frontière
entre les sexes, entre la vie et la mort, entre l'animal et l'homme. Nous
tentons une double expérience de dissociété diversitaire et de désaffiliation.
Nous proposons aux citoyens de vivre sans nation, sans famille et sans mémoire.
C'est la fabrique de l'homme de sable.
Concernant les frontières, nous faisons face à un
paradoxe: effacement des frontières traditionnelles mais apparition de
nouvelles microfrontières comme les péages à l'entrée des grandes villes.
Est-ce le retour à la féodalité?
Oui, il y a même un double retour à la féodalité. D'abord
celui que vous évoquez: les frontières intérieures pour les riches. Des
barrières que ne peuvent se payer que les nantis, dans le but de protéger des
sanctuaires de bourgeois-bohèmes, ghettoïsés à côté des garages à vélos. Ces
cercles de sécurité mercantile permettent pour l'instant aux riches de
continuer à survivre comme des riches. Comme dans le film LeDocteur Jivago (1965),
ils trouvent distrayant de regarder, depuis leurs belvédères à double vitrage,
les rixes des bandes dans la rue. Ils ne manquent pas de faire venir des
Africains pas chers afin de faire baisser le prix des courses de sushis.
N'oublions pas qu'à Rome les porteurs d'eau et portefaix étaient des Barbares,
que les sénateurs romains attiraient à eux pour diminuer le coût de la
main-d'œuvre. Ainsi, la frontière s'est déplacée de l'extérieur vers
l'intérieur, protégeant des havres réservés aux riches. Conjointement, on
trouve des parentés entre le droit communautaire et l'époque mérovingienne.
L'Europe de la directive des travailleurs détachés applique aujourd'hui le
droit du peuple d'origine. Il s'agit d'un droit non plus territorial mais
personnel, comme c'était le cas à l'époque de Clovis.
«Nos élites désignent les peuples comme un véritable
danger à redouter.»
À vous entendre, cette chute est en partie liée à la
construction européenne?
La construction européenne est, à la vérité, une
déconstruction de l'Europe. Elle est à l'Europe ce que Le Corbusier est au
Mont-Saint-Michel, une grimace hideuse de «cité radieuse». Nous sommes devant
une prétention inouïe: une gouvernance acéphale qui vise à se débarrasser des
nations millénaires, des souverainetés, des États, des ferveurs et des peuples.
D'ailleurs, quand un peuple a le malheur de s'exprimer dans les urnes et de
crier qu'il ne veut pas mourir, on hurle au populisme. C'est éloquent. Nos
élites désignent les peuples comme un véritable danger à redouter. À cause de
l'extension indéfinie du système européiste et mondialiste. Après la chute du
mur de Berlin, on a élevé le mur de Maastricht. C'est un mur érigé sur quelques
pierres branlantes de la postmodernité globale: on a cru à la fin de
l'histoire, à l'émergence des fraternités cosmiques, au marché planétaire de
masse qui devait dissoudre les identités récalcitrantes comme de simples
calculs rénaux. On transforme le citoyen en consommateur compulsif. On
marchande ses rêves et on lui vend de nouvelles pulsions que le divin marché
exauce. Enfin, après la chute du Mur, on a cru à la fin des idées et des religions,
au nom d'un syncrétisme consumériste post-laïque. Aujourd'hui, nous réalisons
que cette projection futuriste était une illusion mais nous en payons le prix
fort.
Pourquoi avoir soutenu Emmanuel Macron, européen déclaré?
Je n'ai soutenu personne. Emmanuel et Brigitte Macron sont
venus au Puy du Fou le 19 août 2016. Je leur en suis reconnaissant, vu que
les autres allaient promener leurs Ray-Ban à Disneyland. Durant nos
conversations, nous avons abordé les sujets de fond. Ce qui m'avait frappé à
l'époque, c'est que nous portions le même regard sur la fonction présidentielle
symbolique, la sacralité régalienne, la posture du mystère au sens gaullien du
terme, le danger de désagrégation, le choc identitaire, la nécessité de
combattre l'islamisme et de ne pas installer l'Islam en France. Lorsque j'ai
suivi ses premiers pas au Louvre, puis vu Trump sur les Champs-Élysées, Poutine
à Versailles, je me suis dit: «Il a compris, il pratique la verticalité
régalienne.» Et tout à coup, patatras. La Fête de la musique avec les rappeurs
en résille à l'Élysée, le doigt d'honneur à Saint-Martin et enfin les anathèmes
contre les peuples eurosceptiques, qu'il qualifie de «lèpre populiste». Le
choix est simple: ou bien Emmanuel Macron comprend le choc identitaire et se décide
à démanteler la contre-société où des populations entières sont déjà en sécession,
en imposant la France, en l'imposant physiquement dans les quartiers, en
l'imposant moralement, mentalement, culturellement. Ou bien il continue à jouer
le fondé de pouvoir de Bruxelles et il sera balayé.
«L'avenir, c'est la postmondialisation, le retour aux
valeurs simples, aux ancrages, aux terroirs, aux voisinages affectifs, aux
retrouvailles avec le temps long, à la transcendance.»
Que peut nous enseigner Clovis au XXIe siècle?
L'histoire est imprévisible. Cinq ans avant que Clovis
n'accède au pouvoir, toutes les élites sont absolument désespérées. La rumeur
partagée est partout la même dans les hypocaustes (thermes, NDLR) : «C'est
la fin de la civilisation!» L'empereur disparaît. L'Empire se délite. On n'a
pas idée de la violence du phénomène. Et tout à coup surgit Clovis. Un pur
produit du Barbaricum, sur lequel les évêques vont miser. Ils ont préféré un
Franc païen à un Goth aryen. En d'autres termes, personne n'a rien vu venir.
Pour un tel sursaut, il faut deux conditions: un mouvement d'idées et un petit
reste d'élites visionnaires. Il faut Clovis plus Remi. Le mouvement d'idées est
là, mais les élites visionnaires manquent à l'appel. L'avenir, c'est la
postmondialisation, le retour aux valeurs simples, aux ancrages, aux terroirs,
aux voisinages affectifs, aux retrouvailles avec le temps long, à la
transcendance. Le «nouveau monde» de Macron est devenu l'ancien monde. Nous
allons vivre la fin de la politique du tout calcul-statistique, et le retour de
la politique des hiérarchies distinctives. Depuis Giscard, la vie politique
française se décline et se dégrade en une vision économétrique. On n'a plus de
visionnaires mais les mécaniciens pullulent. Ils augmentent les impôts en
arguant qu'ils vont les baisser. Leurs mensonges sont toujours chiffrés et
leurs chiffres sont toujours faux. La politique, ce n'est pas cela,
Soljenitsyne me l'avait dit au cours de notre dernier échange: «L'Occident
croit que la politique se confond avec l'économie. La politique, c'est la
civilisation.» Voilà le langage que les peuples veulent entendre. La prédiction
de Soljenitsyne, «les dissidents étaient à l'Est, ils vont passer à l'Ouest»,
se vérifie, car chaque jour, les résistants aux pesanteurs du système sont de
plus en plus nombreux. Qu'est-ce qu'un dissident? C'est un indépendant
d'esprit. Qui échappe, par une pensée personnelle, à la chape de plomb.
- Crédits photo : Albin Michel
«Le Mystère Clovis»; de Philippe de Villiers, Éditions
Albin Michel, 432 pages, 22 euros.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
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CHRONIQUE - Il faut donner aux enfants une chance de réussir
quelque chose, et c'est en ouvrant plus tôt la voie professionnelle, sans pour
autant renoncer à l'enseignement général, qu'on y arrivera.
Comme tout le monde, j'ai vu les images de ce gamin braquant
une enseignante avec un pistolet à billes, et comme d'habitude, j'ai entendu
les mêmes remarques désabusées ou colériques. Le ministre Blanquer et son
collègue Castaner annoncent un renforcement de la présence policière dans
certains établissements.
Pourquoi pas? Mais je le leur dis en toute amitié: il n'y a,
si l'on ne veut pas se contenter de mesures aussi peu efficaces que dans les
quartiers, qu'une seule et unique solution, à savoir les classes en alternance
et une refonte complète de la voie professionnelle. Car surveiller et punir,
c'est s'attaquer aux effets, pas aux causes du mal, et il est clair que cela ne
suffit plus. J'entends pour la millième fois certains professeurs, et des
journalistes avec eux, clamer que le problème vient d'une absence de soutien de
la «hiérarchie». Les enseignants vont se plaindre au chef d'établissement et ce
dernier les renvoie dans leurs classes sans rien faire. Soit. Mais au lieu de
penser que le proviseur est un monstre d'indifférence et de lâcheté, on ferait
mieux de comprendre que dans l'état actuel de nos législations, il ne peut
strictement rien faire. L'enseignement est obligatoire jusqu'à 16 ans de
sorte que l'administration, hors cas exceptionnels, n'a tout simplement aucun
pouvoir réel contre un élève insupportable. On le renvoie trois jours, c'est
bien joli, mais pour lui, ce n'est pas une punition, c'est un cadeau. Il en
prendrait volontiers quinze de plus! Alors que faire? Bien sûr, responsabiliser
les familles, et si l'on ne veut pas se payer de mots, cela signifie qu'il faut
les mettre financièrement à l'amende. Mais cela ne règle pas tout non plus, loin
de là.
On ne peut pas laisser des mineurs à l'abandon,
fussent-ils insupportables.
On ne peut pas laisser des mineurs à l'abandon, fussent-ils
insupportables. Il faut les sortir de là. Et le seul et unique moyen, j'y
reviens, ce sont ces classes en alternance que j'avais mises en place en même
temps que les dédoublements de cours préparatoires (CP) en 2003. L'ensemble
donnait des résultats extraordinaires. De quoi s'agissait-il? C'est en fait
assez simple, si l'on veut bien cesser de mépriser l'enseignement
professionnel: avec ces classes en alternance, les élèves violents et en échec
restaient dans l'enseignement général, mais trois après-midi par semaine, ils
allaient découvrir des métiers dans des entreprises ou des lycées
professionnels. Nous en avons d'excellents: dans l'automobile, l'hôtellerie, la
restauration, l'ébénisterie, l'électricité, la navigation fluviale, etc.
Il faut mettre en place ces classes en alternance très tôt, dès la cinquième
- à ne surtout pas confondre avec l'apprentissage, encore moins avec ces
fichues quatrième et troisième «techno» ou «prépro» qui ne font qu'enkyster
l'échec. On sort alors les élèves de la violence, car ils apprennent enfin
quelque chose, qui plus est dans un milieu autrement plus structurant que celui
de l'enseignement général. En parallèle, il est indispensable de créer dans la
voie professionnelle l'équivalent de nos grandes écoles, en commençant par les
secteurs où nous sommes en pointe industriellement: la construction navale,
l'automobile, la cuisine, le vêtement, l'informatique, etc.
Tant que la voie professionnelle ne se dotera pas de
filières d'excellence, jamais les familles ne la choisiront autrement que par
défaut
Il faut que les élèves qui entrent dans un lycée des métiers
comprennent qu'on peut aller loin, qu'on ne se moque pas d'eux, qu'ils pourront
un jour tenir un restaurant, devenir chef d'entreprise, gagner de l'argent…
Ouvrons de grandes écoles professionnelles et nous aurons des candidats qui les
choisiront positivement et non par relégation. Tant que la voie professionnelle
ne se dotera pas de filières d'excellence, jamais les familles ne la choisiront
autrement que par défaut, parce que leurs enfants ont échoué dans la voie
générale. On se demande pourquoi certains élèves sont à la fois violents et en
échec. Quelle est la cause, quel est l'effet? La vérité est qu'ils sont
violents parce qu'ils viennent socialement de loin, qu'ils sont en échec depuis
l'école primaire et qu'à force de tout rater, ils deviennent impossibles. Il
faut leur donner une chance de réussir quelque chose, et c'est en ouvrant plus
tôt la voie professionnelle, sans pour autant renoncer à l'enseignement
général, qu'on y arrivera. Or c'est exactement ce que permettaient les classes
en alternance que j'avais créées en 2003 pour 35 000 élèves. Elles
donnaient des résultats exceptionnels tant sur le plan scolaire qu'en termes de
civilité. Elles furent supprimées par pur aveuglement. Il est urgent de les
réinstaller en même temps que les dédoublements de CP.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
01/11/2018.
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«Purge»
contre les policiers: l'auteur présumé jugé le 28 novembre
VIDÉO - À Sarcelles, un autre adolescent de 16 ans a été
présenté à un juge des enfants en vue d'une mise en examen pour avoir relayé
les règles violentes de la «purge» qui doit avoir lieu pendant Halloween.
Il avait décidé de se dénoncer, estimant que la rumeur de
purge contre les policiers avait pris «une trop grande ampleur». Après avoir
été placé en garde à vue à la suite de son démenti public, le jeune homme de 19
ans a été remis en liberté. Il sera jugé le 28 novembre devant le tribunal
correctionnel de Grenoble.
Depuis le week-end dernier, des appels à la «purge» des
policiers prévue ce 31 octobre, soirée d'Halloween, circulent en masse sur les
réseaux sociaux. Des «règles» avaient été instaurées à l'instar du film American
Nitghtmare pour s'en prendre aux forces de l'ordre. Les
auteurs ou les personnes qui relayaient le message conseillaient de s'habiller
«en noir avec masque si possible». «Toutes les armes sont autorisées (...)
Brûlez tout ce que vous voyez: voitures, poubelles etc», est-il précisé avant
d'ordonner que «les forces de l'ordre [soient] attaquées au mortier, feux
d'artifices, pétards et pierres». Dans le texte, les auteurs annoncent que la
purge «commencera dans tous les quartiers à partir de 20h00» le mercredi 31
octobre.
Les messages qui ont le plus été partagés appellent à se
saisir de «toutes les armes» pour «attaquer les forces de l'ordre». -
Crédits photo : Captures d'écran Snapchat et Twitter
Divulgué sur Snapchat, l'appel a déferlé dans toute la
France de Grenoble à Paris, en passant par Corbeil-Essonnes ou encore Lyon et
Toulouse. Après la montée de la rumeur à Corbeil-Essonnes, le syndicat de
Police Unité SGT avait saisi le ministère de l'Intérieur. Christophe Castaner
a, dès lundi, porté plainte et a confirmé que l'auteur a bel et bien été
identifié. «Il prétend que c'est ‘une mauvaise blague', il sera poursuivi, a
réagi le ministre de l'Intérieur sur Twitter. Appeler à la ‘purge' contre nos
policiers, c'est appeler au meurtre».
Dans sa vidéo, le jeune homme a déclaré qu'il s'agissait
d'une «une invention de (sa) part». «C'était une blague! Il n'y aura ni purge à
Grenoble, Paris, Genève, Lyon etc...»
Olivier Michelet, lui, ne veut pas «entendre parler de
blague». Le représentant d'Unité SGP Essonne estime qu'«à 19 ans, on est majeur
et on a conscience de la gravité de ses paroles et de ses actes». Le policier
insiste: «Il a porté atteinte aux valeurs de la République et nous souhaitons qu'il
y ait une réponse pénale forte pour dissuader d'autres jeunes de tenir de
pareils propos sur les réseaux sociaux.» De son côté, le directeur de la police
en Essonne, Jean-François Papineau, a pour sa part porté plainte contre X
lundi, a-t-il indiqué, précisant qu'aucun incident sortant de l'ordinaire
n'était pour l'heure à signaler.
Un adolescent de 16 ans présenté à un juge des enfants
Mardi matin un jeune de 16 ans a été interpellé à son domicile
de Sarcelles. Sa garde à vue s'est terminée dans l'après-midi. D'après nos
informations, il a été présenté à un juge des enfants ce mercredi à 15 heures
en vue d'une mise en examen.
L'adolescent a été entendu pour «provocation à commettre un
crime ou un délit par voie électronique» et pour «provocation à s'armer contre
l'État ou la population et détention d'arme» après avoir relayé sur Facebook
l'appel à la purge.
Lors de sa garde à vue, le jeune homme s'est justifié en
disant qu'il avait «simplement relayé un message déjà très médiatisé», explique
une source proche du dossier. Dans son message, l'adolescent aurait ajouté des
règles. Il inciterait notamment à s'en prendre aux femmes. Les cyberenquêteurs
de la Sûreté départementale du Val-d'Oise ont examiné son ordinateur. «Ils ont
juste trouvé un petit accès au dark web mais rien qui puisse emplifier son
geste», précise cette source. Dans un clip vidéo le jeune homme s'affiche en
possession d'une arme qui n'a pu être identifée comme réelle ou factice. L'adolescent
est connu des services de police pour des affaires de vols.
Alors que la nuit d'Halloween approche, les forces de
l'ordre restent sur le qui-vive. «Cela a sûrement incité d'autres jeunes à
mettre en pratique ces menaces», s'inquiète Olivier Michelet dans l'Essonne.
«Les festivités comme Halloween sont souvent propices aux exactions mais ce
genre d'appel n'est pas anodin et nous devons rester sur nos gardes», affirme
Pierre Tholy, secrétaire départemental du syndicat Alliance en Isère qui
déplore, comme son confrère de l'Essonne, un manque d'effectif pour «assurer sereinement
la mission de sécurité publique».
Essonne
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«Purge»
contre les policiers: 200 forces de l'ordre mobilisés en renfort dans le
Val-d'Oise
VIDÉO - Après un appel à la purge lancé sur les réseaux
sociaux, un jeune de 19 ans s'est dénoncé et doit être jugé à Grenoble le 28
novembre et un adolescent a été mis en examen dans le Val-d'Oise. Même si
l'auteur présumé prétend qu'il s'agit d'une «blague», les forces de l'ordre ont
choisi de rester très vigilantes.
Venu constater les résultats de la police de sécurité du
quotidien (PSQ) à Garges-Lès-Gonesse, le ministre de l'Intérieur, Christophe
Castaner, a annoncé un renfort de 200 policiers dans le Val-d'Oise (95) pour la
nuit d'Halloween ce mercredi soir. «J'ai demandé une attention particulière à
tous les préfets partout en France, parce qu'il y a eu des appels extrêmement
violents qui menacent nos forces de sécurité», a indiqué le ministre de
l'Intérieur au micro de franceinfo.
Depuis le week-end dernier, un appel à la purge à l'encontre
des policiers est massivement partagé par les internautes. Des règles ont été
divulguées pour s'en prendre aux forces de l'ordre. Dans le Val-d'Oise, un
jeune de 16 ans a été interpellé à son domicile. Placé en garde à vue mardi, il
a été présenté à un juge des enfants ce mercredi à 15 heures et a été mis en
examen pour avoir relayé le message de violence sur Facebook. L'adolescent ne
se serait pas contenté de partager, il aurait également ajouté quelques règles
qui lui sont propres en incitant notamment à s'en prendre aux femmes. Chargée
de l'enquête, la Sûreté départementale du Val-d'Oise a examiné l'ordinateur du
jeune homme mais, hormi quelques passages sur le «dark web», rien de suspect
n'a été trouvé. Il est déjà connu des services de police pour quelques vols.
Corbeil-Essonnes, Paris, Lyon, Toulouse... Cet appel a pris
une ampleur nationale et les policiers se préparent à être «très vigilants»
pendant la soirée d'Halloween. «Les festivités comme Halloween sont souvent
propices aux exactions mais ce genre d'appel n'est pas anodin et nous devons
rester sur nos gardes», affirme Pierre Tholy, secrétaire départemental du
syndicat Alliance en Isère. «Cela a sûrement incité d'autres jeunes à mettre en
pratique ces menaces», complète, inquiet, Olivier Michelet, représentant
d'Unité SGP Essonne (91).
De son côté, le ministre de l'Intérieur considère que «quand
on menace de tuer des policiers et des gendarmes, ce n'est pas une blague. Ce
sont de faits extrêmement graves». Christophe Castaner a porté plainte lundi et
a annoncé que l'auteur de cet appel à la purge avait été identifié. Il
s'agirait d'un jeune homme de Grenoble âgé de 19 ans. Estimant que la rumeur
avait pris «une trop grande ampleur», il s'est dénoncé dans une vidéo et a
déclaré qu'il était l'auteur de ce qu'il juge être une «blague». Il doit être
jugé par le tribunal correctionnel de Grenoble le 28 novembre.
Pour le moment, rien ne laisse penser qu'il est l'unique
instigateur de cet appel à la violence. «C'est l'effet pervers des réseaux
sociaux. On peut voir une publication à l'instant T et la relayer ou la
recopier immédiatement», déplore Pierre Tholy.
Essonne
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Europe,
immigration, islamisme... Sarkozy livre ses vérités
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Dans un long entretien accordé à
l'hebdomadaire Le Point, l'ancien président de la République livre
sa vision du monde et de ses principaux dirigeants. L'ex-chef de l'État met
aussi en garde contre les crises à venir dans le monde et en Europe. Extraits
de ses principales déclarations.
Europe: «Nous n'avons encore rien vu de la crise qui
s'annonce. Nous sommes en train de perdre la deuxième économie d'Europe, le
Royaume-Uni, et nous ne nous intéressons qu'à une seule chose: les conditions
du divorce, sans nous demander si ce divorce est évitable. Or j'ai la
conviction qu'il l'est. Les Britanniques ont exprimé leur insatisfaction à
l'égard de l'Europe telle qu'elle se présente aujourd'hui».
Élections européennes de 2019: «Une seule priorité:
mettre un nouveau traité sur la table pour définir l'Europe de l'avenir et
changer profondément les règles du jeu. Cela permettra également de dire aux
Britanniques: «Vous avez refusé de continuer avec la vieille Europe,
construisons ensemble celle de demain.» Avec des compétences moins nombreuses
mais plus lisibles».
Crise démocratique: «Nous avons une mauvaise
conception du mot égalité, qui conduit à l'égalitarisme et au nivellement, et
qui fait qu'aujourd'hui le principe même du leadership est contesté, voire
illégitime. Or, pour conduire un pays, il faut une vision, donc un leader qui
l'incarne, et du temps. Nos sociétés démocratiques ne donnent plus de temps et
ne tolèrent plus le leadership, qui devient illégitime au regard de la vision
déformée de l'égalitarisme».
Crise des migrants: «Nous n'avons encore rien vu de
la crise migratoire qui s'annonce (...) La question migratoire ne peut plus
être gérée par un commissaire inconnu et sans légitimité politique. Elle doit
l'être par un gouvernement européen composé des ministres de l'Intérieur, qui
éliront en leur sein un président, rendront des comptes démocratiquement et à
qui on devra rattacher Frontex».
Islamisme radical: «On ne discute pas avec
l'extrémisme islamiste, on le combat. On ne peut pas accepter la lapidation de
la femme, le refus de s'intégrer, la violation de ce que nous avons de plus
cher. Nous sommes encore trop naïfs et trop faibles».
Recomposition politique : «Quand VGE succède à
Pompidou, c'est un nouveau monde qui s'installe. Et, quand Mitterrand arrive,
ce n'est pas un changement? Quand je succède à Chirac, vous ne trouvez pas que
la pratique du pouvoir évolue? La rupture en politique, c'est un peu ce que
vous appelez un marronnier, non? On est toujours l'archaïque de quelqu'un et le
moderne d'un autre».
Emmanuel Macron: «Je sais combien il est difficile de
satisfaire toutes les attentes nées d'une élection. Je m'abstiendrai donc de le
critiquer. J'observe d'ailleurs qu'en matière de critiques il semble servi… Et
c'est si facile de détruire. Donnons-lui le temps. Les Français s'exprimeront
lors des prochaines échéances électorales».
Donald Trump: «Il voit l'exercice du pouvoir comme
une succession de deals. C'est bon pour lui ou ce n'est pas bon pour lui. Il
gère les États-Unis sans principes, sans doctrines, sans limite, sans mémoire.
C'est du jamais-vu, pour le meilleur - la baisse des impôts - comme pour le
pire - ses provocations. Espérons… sans trop nous illusionner».
Angela Merkel: «Je l'admire beaucoup. Qu'elle ait
géré le pouvoir très efficacement, c'est un fait que je ne contesterai pas.
Qu'elle ait été capable de remporter les élections à quatre reprises consécutivement,
c'est remarquable. Pour autant, elle ne s'est elle-même jamais posée en
visionnaire».
Viktor Orban: «Il a remporté trois fois les
élections. Personne n'a dit qu'elles avaient été truquées. Savez-vous qui est
son principal adversaire politique? L'extrême droite. Faire de Viktor Orban un
dictateur et un leader de l'extrême droite ne correspond pas à la réalité».
Matteo Salvini: «Il est dangereux de s'inscrire en
donneurs de leçons (...) Le seul chemin acceptable est d'arrêter de parler de
populisme et de comprendre la colère ou les frustrations des peuples pour les
transformer en énergie positive, pour construire l'avenir de notre continent.
Aujourd'hui, le vrai risque que représente l'Italie pour l'Europe est qu'elle
dépense plus que ce que ses finances lui permettent. Personne ne doit douter
qu'une crise financière en Italie aurait des répercussions majeures en Europe».
Jair Bolsonaro: «Je crois pouvoir dire que l'immense
majorité des Brésiliens qui ont voté Bolsonaro n'a pas voulu élire un dictateur
et que, s'il lui arrivait malgré tout de l'oublier, une majorité plus grande encore
saurait le lui rappeler. Ma conviction est que la démocratie brésilienne est
plus forte que ce que l'on dit».
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Journaliste
Le
journaliste Jamal Khashoggi a été «étranglé» et «démembré», selon Istanbul
Par Le
figaro.fr et AFP agenceMis à jour le 31/10/2018 à 19h28 | Publié le
31/10/2018 à 16h57
VIDÉO - Ces éléments confirment l'aspect prémédité du
meurtre de l'éditorialiste saoudien dans le consulat de son pays, le 2 octobre
dernier, a assuré mercredi le procureur stambouliote.
Des détails terribles. Lorsque le journaliste Jamal
Khashoggi s'est rendu, le 2 octobre dernier, au consulat d'Arabie saoudite à
Istanbul, il
a été étranglé à mort dès son entrée dans le bâtiment, a révélé
mercredi le procureur en chef de la ville, Irfan Fidan. Son corps a ensuite été
«démembré», a-t-il ajouté. Selon le magistrat, les agresseurs du célèbre
éditorialiste se sont ensuite débarrassés de son corps. Dans un communiqué, le
magistrat turc a indiqué que ces éléments attestaient le caractère «prémédité»
de ce meurtre. «Qui a donné l'ordre? Il ne s'agit pas là d'une action
qui aurait pu être menée sans des instructions de haut niveau», a renchéri Omer
Celik, le porte-parole de l'AKP, le porte-parole du parti au pouvoir, lors
d'une conférence de presse à Ankara. «Le meurtre, l'assassinat de Jamal
Khashoggi dans le consulat en Turquie viole les règles du droit international.
Cela est très, très clairement le cas», s'est insurgé le secrétaire d'État
américain, Mike Pompeo.
» LIRE AUSSI - Jamal
Khashoggi: l'ami des princes, devenu trop dangereux
Ces déclarations interviennent alors que le procureur
saoudien, en charge de l'enquête, a achevé mercredi ses inspections à Istanbul.
Pendant trois jours, Saoud Al Modjeb s'est entretenu avec des responsables
turcs, dont le procureur stambouliote, et des représentants des services du
renseignement. Il s'est également rendu au consulat général d'Arabie saoudite,
lieu du meurtre de Khashoggi. Pour autant, cette visite n'a «pas donné de
résultat concret», a déploré Irfan Fidan.
L'extradition des suspects demandée
Les autorités turques ont exigé de savoir où se trouvait
le corps de Khashoggi : celui-ci n'a toujours pas été retrouvé, quatre semaines
après les faits
Dix-huit personnes ont été arrêtées par l'Arabie saoudite dans
le cadre de l'enquête. Selon le communiqué du procureur, les autorités turques
ont à nouveau demandé au procureur saoudien et la délégation l'accompagnant
l'extradition des suspects. Elles ont également exigé de savoir où se trouvait le
corps de Khashoggi: celui-ci n'a toujours pas été retrouvé, quatre
semaines après les faits.
Les Turcs veulent aussi connaître l'identité du
«collaborateur local» mentionné par Ryad et si des éléments confirmant le
caractère prémédité du meurtre avaient été mis au jour par l'Arabie saoudite.
En guise de réponse, le procureur d'Istanbul a été invité à se rendre à Ryad
avec les éléments de l'enquête en sa possession, lequel n'a pas confirmé s'il
donnerait suite à cette invitation. L'Arabie saoudite a estimé que seule une
enquête conjointe entre les deux pays pourra permettre de déterminer ce qu'il
est advenu du corps de Khashoggi et si son meurtre a été prémédité, précise le
communiqué.
» LIRE AUSSI - Disparition
de Jamal Khashoggi: l'onde de choc
Sous la pression internationale, l'Arabie
saoudite a fini par reconnaître, après plusieurs jours de dénégations,
le meurtre du Khashoggi, mais a avancé plusieurs versions contradictoires qui
ont suscité le scepticisme. De nombreux responsables et médias turcs ont
directement incriminé
le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman, dit MBS. De son côté,
Ryad s'efforce de le dédouaner en insistant sur le caractère «non autorisé» de
l'opération.
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Khashoggi : "C'est un horrible incident" indique Mohammed Ben Salman -
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Ockrent:«Ben Salman aurait proposé un marché à Khashoggi»
Famine au
Yémen : Facebook bloque le partage d'une photo publiée par le New York Times
Facebook a temporairement bloqué le partage d'une
photographie réalisée par Tyler Hicks, pour le New York Times,
jugeant celle-ci contraire aux normes du réseau social. Cette démarche a été critiquée
par les internautes bloqués et par des journalistes.
Pendant plusieurs heures, des dizaines d'internautes n'ont
pas pu partager la nouvelle publication du New York Times, postée
sur Facebook vendredi dernier, a remarqué Le
Mondece mercredi matin. Il s'agit là d'une photographie dans
laquelle figure une enfant souffrant de malnutrition, immortalisée dans le
cadre d'un reportage du journal américain intitulé «The
Tragedy of Saudi Arabia's War».
D'après le New
York Times , des dizaines de milliers de lecteurs ont partagé
l'article sur Facebook. Mais, certains d'entre eux ont reçu un message leur
indiquant que l'image allait à l'encontre de ses normes. C'est le cas de
Jarjieh Fang, un étudiant en mastère de Santé publique. «Je pensais que
[l'article] valait le coup d'être partagé, afin de secouer les gens pour qu'ils
puissent prêter attention à ce qu'il se passe au Yémen», a-t-il expliqué au
quotidien new-yorkais.
Le jeune homme a révélé le message en question sur Twitter:
«Sur Facebook, nous n'autorisons pas les offres de services sexuels, la sollicitation
de matériel sexuel, les menaces ou représentations de violence sexuelle, les
menaces poussant à partager des images intimes ou du contenu à caractère sexuel
impliquant des mineurs.»
Le New York Times ne possède pas le nombre
exact des utilisateurs concernés par ces blocages. De nombreux postes n'ont pas
été supprimés, y compris celui du journal.
Pourquoi ces posts ont été bloqués?
Facebook se sert d'un ensemble d'algorithmes et/ou d'alertes
envoyées par les utilisateurs pour repérer les contenus à risque. Ici, les
différents blocages effectués par le réseau social ne sont pas dus à la
violence du cliché mais entre dans la catégorie de «diffusion d'images
d'enfants nus».
«C'est incroyablement décevant de penser que cette histoire
ait été bloquée car elle était en violation de leur politique. Le métier de
journaliste est de témoigner et de donner une voix à ceux qui ne sont pas
entendus», a indiqué Eileen Murphy, une porte-parole du journal américain. Mark
Coughlan, journaliste pour RTÉ News, a même qualifié Facebook de «bourbier de
désinformation et de clickbait» sur Twitter.
«Nous savons que c'est une image importante, a expliqué
vendredi soir Facebook à travers une déclaration transmise par courriel, nous
sommes en train de restaurer les posts que nous avons supprimés.» En 2016, un
phénomène similaire s'était produit. Facebook avait retiré de manière
temporaire un post accompagné de la photo d'une fille âgée de 9 ans fuyant les
bombardements au napalm durant la guerre du Vietnam. Le cliché avait été
réalisé dans les années 1970 par l'Américain Nick Ut. En 2011, le réseau social
s'en était pris à
un enseignant ayant publié une reproduction du tableau de Gustave Coubert, L'Origine
du monde.
«Ils risquent leur vie afin de rapporter ces images»
Le reportage, réalisé par le journaliste Declan Walsh et le
photographe Tyler Hicks, met en lumière la souffrance des civils yéménites face
à une guerre opposant les rebelles houthistes à la coalition menée par l'Arabie
Saoudite. Alors qu'il est mis en ligne vendredi dernier, le New York
Times publie une
tribune justifiant la présence de ces photographies glaçantes. «Nos
éditeurs ne prennent pas la décision de publier des images de morts ou de
mourants à la légère», écrivent le journaliste Eric Nagourney et le rédacteur
en chef Michael Slackman. «L'histoire du Yémen et de toute sa souffrance doit
être racontée, et aussi puissante que l'écriture de Declan soit, elle ne peut
pas être relatée qu'avec des mots», poursuivent-ils.
La tribune évoque également les paroles de David Furst,
chargé de l'édition photo à l'internationale: «Les journalistes travaillant
dans des zones de guerre, dont notre photographe, Tyler Hicks, risquent leur
vie afin de rapporter des images qui peuvent parfois être difficiles à
regarder. Mais nous trouvons que ce ne serait pas rendre service aux victimes
de cette guerre de publier des images aseptisées qui ne reflètent pas
totalement leur souffrance.»
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PETIT
GUIDE À L’USAGE DES RAPPEURS : POUR QUE LE HIP-HOP FRANÇAIS REPOSE (ENFIN)
EN PAIX !
3187 lectures
Par David Marais, Avocat.
- JEUDI 27 SEPTEMBRE 2018
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Le clip « Pendez un blanc » du rappeur de Nick
Conrad, impose de rappeler les droits et les limites du rap, bref les
« règles de l’art rapalistique ». Voici un petit guide à l’usage des
rappeurs : "pour que le hip-hop français repose (enfin) en
paix !" [1]
Dernière mise à jour : 28 septembre 2018
1. Rappel des affaires jugées.
Le Rap a subi les foudres de nombreuses poursuites pénales.
Certaines aboutissant à une relaxe :
- Youssoupha
a été relaxé des chefs de diffamation et injure pour ses paroles sur Eric
Zemmour. (CA Paris, pôle 2, 7e ch., 28 juin 2012, n° 11/9903)
- Hamé
de « La Rumeur » a été relaxé de la poursuite en diffamation
menée suite à sa dénonciation des bavures policières (Ass. Plein. 25 juin
2010, n°08-86.891) ;
- Le
groupe « SNIPER », qui voulait « exterminer les fachos »
dans « La France » a été relaxé de la poursuite pour
injure publique et provocation à la violence que menait contre eux le
Ministère de l’intérieur (qui a ainsi de son propre chef étrangement pensé
que le terme en question ne pouvait viser que les fonctionnaires de police…)
(CA Rouen, ch. corr., 14 déc. 2005, n° 2005-297833) ;
- Monsieur
R, relaxé de la poursuite pour injure raciale après avoir vivement
critiqué la politique coloniale française dans « FranSSe »
(TGI Paris 17eme, 25 avril 2007, CA Paris, 11eme ch. 2 juill. 2008, Crim.
3 fev. 2009, 08-85220) ;
- Orelsan
relaxé deux fois pour injure et provocation à la haine, à la
discrimination et à la violence par la Cour d’appel de Versailles (pour
huit chansons…CA Versailles, 8e ch., 28 févr. 2016, n° 15/02687 ) et
pour une précédente chanson (Sale P..) par le TGI de Paris le 12 juin
2012 ;
D’autres, plus rares, à des condamnations :
- NTM
pour outrage (CA Aix en Provence, 23 juin 1997) ;
- Jo
le phéno pour incitation à la violence après avoir appelé au meurtre de
policiers (TGI Paris, 8 dec. 2017, Légipresse, n°359) ;
- Abdul
X pour la même infraction (TGI, 17e ch., 16 juin 2011).
De l’analyse de ces décisions se dégagent les contours de ce
qui est permis ou pas au rappeur (contours plus larges que ce que certains
pensent) et qui forme ce que nous appelons "les règles de l’art
rapalistique".
2. Les droits du rappeur : liberté d’expression et
tolérance particulière donnée au rap.
Lorsque l’on analyse l’ensemble des décisions de relaxe, il
apparaît que non seulement les rappeurs sont, comme tout artiste, protégés par
la liberté d’expression (reconnue par : article 11 de DDHC, 10 de la CEDH
et 11 de la CDFUE), mais que le rap bénéficie en réalité d’une tolérance
élargie.
La motivation de la plupart de ces décisions est
intéressante en ce qu’elles estiment que le Rap est un mode d’expression
artistique particulier : issu des classes défavorisées victimes de la
violence sociale il est par nature agressif, reflet de la violence sociale
subie, qui justifie sans doute une licence plus grande ; idée exprimée
très clairement par les arrêts de la Cour d’appel de Rouen, dans le dossier
SNIPER et de Versailles dans le dossier « Orelsan ».
Ainsi la Cour d’appel de Rouen définissait le rap
comme : « un genre musical enraciné dans la culture populaire
trouvant ses origines dans la misère et la souffrance, le rejet et le
ressentiment (…) qui exprime la désolation et le mal de vivre des jeunes en
banlieue, leur refus de se résigner face à des situations vécues comme injustes
et perçues comme un rejet et formuler leur aspiration à un mode de vie autre
que celui qui les exclut et les marginalise".
Et en concluait pour relaxer les prévenus du chef de
provocation à la violence que : « Même si on peut très
légitimement ne pas approuver ce mode d’expression ni souscrire à l’utilisation
d’un vocabulaire à dessein volontairement agressif et outrageant, il n’en
demeure pas moins que, sauf à refuser et interdire au rap toute existence, les
paroles de la chanson intitulée « La France » et en particulier
celles incriminées ne peuvent être interprétées et comprises, comme bon nombre
de chansons exprimées sur ce genre musical, qu’en tenant compte du caractère
volontairement provocateur du langage utilisé par les rappeurs et que la seule
utilisation d’un texte par sa forme agressif, injurieux et violent, en
l’absence de tout élément de preuve ou indice faisant présumer chez l’auteur de
la chanson et ses interprètes une volonté de créer dans le public un état
d’esprit favorable à la réalisation d’une atteinte volontaire à la vie ou à
l’intégrité physique d’autrui, ne peut être suffisante pour caractériser
l’élément intentionnel du délit ».
Poursuivi pour injure et provocation à la haine, à la
discrimination et à la violence par diverses associations féministes pour ses
paroles relatives aux femmes, la Cour d’appel de Versailles relaxait Orelsan -
après avoir rappelé que « le domaine de la création artistique, parce
qu’il est le fruit de l’imaginaire du créateur, est soumis à un régime de
liberté renforcé afin de ne pas investir le juge d’un pouvoir de censure qui
s’exercerait au nom d’une morale nécessairement subjective de nature à
interdire des modes d’expression, souvent minoritaires, mais qui sont aussi le
reflet d’une société vivante et qui ont leur place dans une démocratie » -,
aux motifs que :
« Ce régime de liberté renforcé doit tenir compte du style de création artistique en cause, le rap pouvant être ressenti par certains comme étant un mode d’expression par nature brutal, provocateur, vulgaire voire violent puisqu’il se veut le reflet d’une génération désabusée et révoltée » et que « le sanctionner au titre des délits d’injures publiques à raison du sexe ou de provocation à la violence, à la haine et à la discrimination envers les femmes, reviendrait à censurer toute forme de création artistique inspirée du mal-être, du désarroi et du sentiment d’abandon d’une génération, en violation du principe de la liberté d’expression ».
« Ce régime de liberté renforcé doit tenir compte du style de création artistique en cause, le rap pouvant être ressenti par certains comme étant un mode d’expression par nature brutal, provocateur, vulgaire voire violent puisqu’il se veut le reflet d’une génération désabusée et révoltée » et que « le sanctionner au titre des délits d’injures publiques à raison du sexe ou de provocation à la violence, à la haine et à la discrimination envers les femmes, reviendrait à censurer toute forme de création artistique inspirée du mal-être, du désarroi et du sentiment d’abandon d’une génération, en violation du principe de la liberté d’expression ».
De manière générale, le rap a donc - du fait de son origine
et de sa nature de "cri" - non seulement le droit à la liberté
d’expression mais à une expression même « violente, agressive, vulgaire ou
provocatrice ».
Mais cette liberté d’expression, même élargie, n’est pas
absolue.
L’étude de cet arrêt, complété par les autres cas cités,
donne donc une sorte de « méthode » permettant
d’analyser si un artiste dépasse la limite, pourtant large, de ce qui est
acceptable même d’un courant musical par nature reflet d’une violence sociale
réelle ou s’il reste dans les « règles de l’art ».
Fondent ainsi les relaxes :
i) le recours à la distanciation , à la « narration », à l’utilisation de « personnages imaginaires » (décision Orelsan 2016) ;
i) le recours à la distanciation , à la « narration », à l’utilisation de « personnages imaginaires » (décision Orelsan 2016) ;
ii) ou au « jeu de rôles » (Décision
Orelsan 2012) montrant une « œuvre fictionnelle » ;
iii) mais également l’admission que le message ressort de la
« critique politique » même « violente »
(décisions sur le dossier Monsieur R ou celui d’Hamé)
iv) voire de l’utilité du rap à poser ou discuter des
questions « d’intérêt général » (décision Youssoupha ct.
Zemmour).
Ces éléments seraient donc les limites de l’acceptabilité du
ton par nature "agressif" voire violent du rap : il doit rester
une œuvre fictionnelle, une analyse sociologique, un exercice journalistique,
ou une polémique politique pour être dans les "règles de l’art" et
accepté comme tel : un art.
Ce mélange, ce croisement de poésie, de la littérature et de
dénonciation politique ou sociologique étant d’ailleurs sans doute la
définition même de ce qu’est le rap.
3. Les limites à l’expression "rapalistique".
A l’inverse, il ressort des décisions de condamnation que si
l’opinion exprimée montre :
i) une absence de « distance » ;
ii) ou « de polémique politique » (Décision Jo le
Pheno) entre le propos violent et la pensée de l’auteur et donc une simple
expression de haine ou d’une volonté de nuire (appel au meurtre, injures,
diffamation) ;
iii) voire montre clairement une envie de pousser au passage
à l’acte (Décision Abdul X) ;
Alors l’abus de la liberté d’expression est caractérisé et
peut donc être sanctionné.
A cet égard, les décisions rendues sur les propos tenus par
les groupes « Ministère Amer » ou NTM sont parfaitement
éclairantes : non sanctionnés pour leur appel au « sacrifice de
poulets » dans leur chanson narrant une émeute à travers les yeux d’un
émeutier (Ministère Amer) ou à « foutre le feu » à
« l’Elysée » (« Mais qu’est ce qu’on attend », NTM)
ou leur chanson présentant les membres de la police sous un jour peu flatteur
(« Police », NTM), mais condamnation lorsque les mêmes propos
anti-policiers étaient tenus par les artistes dans des interviews (Ministère
Amer) ou lors de discours sur scène (NTM) relatant leurs pensées propres au
premier degré.
En conclusion.
Voilà de quoi rassurer la rappeuse Casey qui, lors d’un
entretien dans le cadre d’un séminaire qui était consacré à ses textes à l’ENS,
avait estimé « qu’on n’accorde pas aux rappeurs le droit au second
degré ». [2]
En effet, si ces décisions sont parfois classiquement
fondées sur le caractère « d’œuvre » et la liberté artistique,
parfois sur le droit à la « polémique politique » ou « l’intérêt
général », elles semblent en réalité aller au-delà de ces catégories
connues pour créer une catégorie spécifique et montrent ainsi une vraie
compréhension de ce qu’est ce courant musical particulier qu’est le rap, au
croisement de la poésie, de la littérature et du discours politique et/ou
sociologique, si bien résumé par une phrase d’un autre artiste : il est
« le bitume avec une plume » (Booba).
Vous êtes
raciste et vous ne le savez pas
Il y a toujours une bonne raison d'être accusé de racisme
par
- 20 septembre 2018
394PARTAGES
Jean Dujardin dans "OSS 117, Le Caire nid
d'espions" (2006). SIPA. 00542933_000004
Au Québec comme en France, n’importe qui est susceptible
d’être accusé de racisme pour n’importe quoi. Désormais, on est tous le raciste
d’un autre.
Les temps sont durs pour les sceptiques, pour ceux qui
n’adhèrent pas aux nouvelles thèses sur le racisme systémique. Aujourd’hui,
douter de l’emprise du racisme, c’est comme douter autrefois de l’existence de
Dieu. Les mécréants de la race, les universalistes à la française, doivent confesser
leurs péchés. Pour se montrer progressiste, il faut voir des races partout,
partout, partout. Et du racisme partout, partout, partout.
Il est partout
Les promoteurs de ces théories fumeuses sont eux-mêmes
victimes du climat de suspicion généralisé qu’ils ont instauré. Ce qui est
plutôt amusant, il faut l’avouer. Au Québec, des gens de l’establishment ont
commencé à goûter à leur propre médecine, pour ne pas dire à leur propre
morale. Il y a d’abord eu la controverse autour du spectacle Släv de
Robert Lepage. On s’en souvient : des opposants au spectacle ont
réussi à le faire annuler pour cause « d’appropriation culturelle ».
A lire aussi: Au Québec, l’ogre antiraciste dévore ses propres enfants
Le spectacle Släv visait à promouvoir la
culture noire, mais le problème était qu’un blanc en soit le metteur en scène.
Pour plusieurs, la culture est maintenant quelque chose de viscéral, de
biologique, une réalité indissociable de la race… ce qui donne une bonne idée
de leur idéologie. La controverse a créé un schisme au sein de la gauche
inclusive. D’un côté, il y avait les
antiracistes « classiques », et de l’autre, les antiracistes
pro-ségrégation. Un tournant majeur dans la radicalisation du multiculturalisme
au Québec.
Et personne n’est à l’abri
Mais plus récemment, c’est le parti de gauche Québec
solidaire (QS) qui a réussi à être accusé de racisme, ce qui relève carrément
de l’exploit. Pour la petite histoire, Québec solidaire est l’un des deux
partis les plus multiculturalistes au Québec, même si ses représentants aiment
parfois s’en défendre. Dans les dernières années, des « solidaires »
se sont opposés à la laïcité française et ont associé leurs adversaires du
Parti québécois à l’extrême droite. Paradoxalement, QS est un parti
souverainiste, mais anti-nationaliste.
Québec solidaire est le premier parti à présenter une
candidate voilée à une élection provinciale québécoise. Une candidate qui se
présente dans une circonscription à Montréal, Ève Torres, que certains
soupçonnent d’avoir des liens avec les réseaux islamistes. Québec solidaire a
aussi des accents socialistes, pour ne pas dire islamo-gauchistes. Une formation
politique qui n’a rien à envier aux Indigènes de la République en termes de
culpabilisation de la société.
Malgré ce pedigree impressionnant, un article publié sur le
site de la chaîne CBC est venu semer le doute dans les esprits. Dans un texte
intitulé « Is this Post Election Racist », le journaliste
Steve Rukavina se demande si une affiche promotionnelle du parti ne serait
pas… raciste. Une affiche qui fait la promotion de soins dentaires gratuits et
sur laquelle figure une personne noire. L’artiste de l’œuvre, une dénommée
Dimani Mathieu Cassendo, devra préciser qu’il s’agit d’un autoportrait.
Le journaliste souligne que des noirs montréalais trouvent
l’affiche inappropriée. Mais qu’est-ce qui choque tant dans cette
représentation ? C’est qu’elle pourrait laisser entendre que les personnes
noires sont moins fortunées que les personnes blanches ; elles pourraient avoir
davantage besoin de ces soins gratuits. Accentué par l’artiste, le contraste
entre les dents blanches et la peau noire serait aussi une représentation
clichée à connotation raciste. L’artiste l’ignore, mais elle ferait dans l’art
colonial. Inconsciemment, elle aurait intégré les stéréotypes des méchants
blancs.
Mises en examen
Combe de l’ironie, le célèbre militant montréalais d’extrême
gauche, Jaggi Singh, accusait récemment Québec solidaire d’encourager la
xénophobie au Québec. Sur les réseaux sociaux, Singh a accusé les solidaires de
souffler sur les braises de l’intolérance en ne proposant pas d’augmenter les
seuils d’immigration (deux grands partis proposent une baisse substantielle).
Précisons que le Québec reçoit environ 50 000 immigrés par année pour une
population de 8,2 millions de personnes.
Peu importe qui vous êtes et ce que vous faites, vous serez
vu comme raciste par les zélateurs du système anti-système. Les rapports entre
les races font l’objet d’une enquête obsessionnelle. Une enquête dont les
conclusions sont évidemment tirées d’avance. Vous êtes un homme blanc en couple
avec une blanche ? Vous êtes raciste, vous voulez préserver la race. Vous êtes
un homme blanc en couple avec une noire ? Vous êtes raciste, vous profitez
d’elle. Mieux, c’est du « sexclavagisme » comme on l’a vu après le mariage de Vincent Cassel. Ne cherchez surtout pas
à plaire, vous êtes déjà piégé.
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