L'immigration subie n'est pas le seul problème : ce qui nous pose autant de difficultés, c'est le couple immigration subie / intégration ratée. Une partie importante des populations immigrées n'est pas intégrée, ni économiquement (elle dépend fortement du système social), ni culturellement, ce qui est encore plus grave: elles vivent selon des systèmes de valeurs qui sont parfois incompatibles avec nos lois, notre histoire et nos traditions.
En Belgique, 70 % des musulmans considèrent que les lois religieuses sont supérieures aux lois du pays.
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Alain Destexhe : «Voici comment on manipule les chiffres de l'immigration en Belgique»
- Par Alain Destexhe
- Publié le 29/01/2018 à 11:50
FIGAROVOX/TRIBUNE - En Belgique, un million d'immigrés sont arrivés en à peine dix ans, sans qu'un débat démocratique ait réellement lieu. Selon Alain Destexhe, la réalité de l'immigration est systématiquement atténuée.
Alain Destexhe est un sénateur belge (Mouvement réformateur).
Dans cet article, je montrerai comment les statistiques de l'immigration sont manipulées et instrumentalisées en Belgique par les tenants de l'idéologie multiculturaliste, qui exerce une domination quasi totale dans les universités, les ONG, les institutions publiques et les médias.
Ce texte a cependant une portée plus générale car les mécanismes décrits sont aussi appliqués ailleurs en Europe. Ainsi, dès les premières lignes de son dernier rapport sur la migration, Eurostat mélange allègrement chiffres et idéologie: «la migration à elle seule ne pourra certainement pas inverser l'actuelle tendance au vieillissement de la population observée dans de nombreuses régions de l'Union».
En 30 ans, comme la France, la Belgique s'est transformée en profondeur. Sans débat public, elle est devenue un pays d'immigration massive accueillant plus d'un million de personnes en dix ans dans un pays de 10 millions d'habitants. De 2000 à 2010, le solde migratoire y a été neuf fois plus important que celui des Pays Bas, quatre fois plus important que celui de la France ou de l'Allemagne et même plus important que celui des États-Unis, un pays historiquement plus ouvert à l'immigration.
Sans débat public, la Belgique est devenue un pays d'immigration massive accueillant plus d'un million de personnes en dix ans dans un pays de 10 millions d'habitants.
Pourtant, cette réalité statistique a été cachée à la population. Les élites qui décident de ce dont on peut parler se sont bien gardées de mettre en évidence des chiffres qui n'auraient pu qu'alarmer une population dont on exige maintenant qu'elle s'adapte hic et nunc à cette nouvelle donne. Il ne faut y voir ni grand complot, ni l'œuvre d'un Big Brother, mais, au mieux, une adhésion enthousiaste de ceux qui prétendent forger l'opinion au grand rêve multiculturaliste ou, au pire, à la mise en œuvre de puissants mécanismes de défense relevant de la psychologie, comme la sublimation (de la diversité), le déni (de la réalité) ou le refoulement (de ce qui dérange).
Présenter l'immigration sous forme de flux et non de stock
Les statistiques migratoires sont en général présentées sous forme de flux annuels: tant de personnes sont entrées ou sorties telle année ; tant de réfugiés ont été accueillis. Si le nombre diminue par rapport à l'année précédente, on insistera lourdement sur ce point, beaucoup moins s'il augmente. En revanche, une statistique sur 10 ou 20 ans ne sera guère reprise, en supposant qu'on puisse la trouver sans faire les calculs soi-même. À l'échelle d'un pays, les chiffres d'un flux annuel sont rarement inquiétants ; sur une décennie, ils deviennent alarmants. On parlera par exemple de 40 000 naturalisations en une année (le flux) mais on ne rappellera pas qu'il y en eut 200 000 en trois ans et un demi-million en 10 ans (le stock): 5% de la population! De même, on n'écrira pas que plus d'un million d'immigrés sont arrivés en quelques années.
Les Européens repartent, les autres restent
En Belgique, petit pays très ouvert sur ses voisins et hébergeant la capitale de l'Europe avec son cortège de fonctionnaires et de lobbyistes, les immigrations d'Européens sont, en termes de flux, toujours supérieures à celles émanant des autres continents. Français et Néerlandais arrivent assez logiquement en tête. Ce fait rassurant sera toujours très lourdement souligné. Jamais cependant l'analyse ne sera faite sur 10 ou 20 ans. On constaterait alors qu'un grand nombre d'Européens retournent dans leur pays, que les Belges eux-mêmes quittent davantage leur royaume plutôt qu'ils n'y reviennent (leur solde migratoire est toujours négatif) mais que les Marocains, Algériens, Turcs, et presque toutes les autres nationalités, sauf les Américains, ont une incontestable tendance à s'établir définitivement en Belgique.
Les projections démographiques ne sont pas reliées à l'immigration
Régulièrement, reprenant des projections officielles, les médias constatent que la population du royaume augmente et que cette tendance va continuer, mais cette augmentation n'est jamais liée à l'immigration alors que, depuis les années 2000 au moins, elle est entièrement explicable par l'immigration. En quinze ans à peine, la Belgique gagne un million d'habitants, passant de 10,2 millions en 2000 à 11,3 millions en 2015, une hausse de 10 % sur une très courte période. Et au cours des prochaines décennies, le pays devrait encore gagner un ou deux millions d'habitants alors qu'il est déjà un des plus denses au monde, confronté à de nombreux problèmes liés à cette densité (habitat, transport, environnement, …)
Jamais cette augmentation ne sera mise en relation avec le nombre de musulmans qui va doubler (1 250 000, soit 11,1 % de la population) ou tripler (2 580 000, soit 18,2 %!) en 2050 selon les flux migratoires et d'après les projections du très sérieux Pew Research Center. Le titre honnête d'un article sur les projections démographiques devrait être «Nous serons bientôt un million de plus, en majorité des musulmans», ce qui ne pourrait manquer de créer un débat utile sur la démographie, la densité de population ou l'intégration de ces musulmans. Dans Le Soir, l'universitaire de service Corinne Torrekens balaye cependant la sérieuse enquête du Pew: «Il y a un côté boule de cristal (…). On se demande d'ailleurs d'où vient cette nécessité de compter» (sic). «Sinon pour alimenter le fantasme que l'islamisation se dresse tel un rempart alors que nous sommes dans une dynamique de pluralisation de l'appartenance». La novlangue a de beaux jours devant elle!
Le titre honnête d'un article sur les projections démographiques devrait être « Nous serons bientôt un million de plus, en majorité des musulmans »
L'augmentation continue de la population de Bruxelles (1 % par an en moyenne, taux exceptionnel pour une ville européenne) est qualifiée de choc démographique voire de bombe démographique mais jamais de choc ou bombe migratoire. L'immigration et la fécondité plus grande des femmes d'origine immigrée expliquent pourtant entièrement cette augmentation, malgré le départ continu de «Belges de souche» ou d'immigrés plus anciens vers la Flandre et la Wallonie. Les problèmes sociaux (90 % des allocataires sociaux à Bruxelles sont d'origine immigrée), la tension sur les services publics (administration, hôpitaux, transports publics avec le doublement du nombre de voyages en 15 ans), le besoin de nouvelles places dans les écoles - 40 000 en dix ans - son coût évidemment considérable ne seront, soit pas abordés du tout (et donc jamais débattus), soit présentés comme s'ils étaient totalement étrangers à la problématique migratoire.
Le mépris envers les inquiétudes de la population
Un des moyens les plus sûrs pour disqualifier l'inquiétude légitime de la population consiste à la faire passer pour ignorante. Ainsi, on fera un sondage pour demander quel est le pourcentage d'immigrés ou de musulmans dans le pays et, à chaque fois, on se gaussera de constater que la perception est toujours supérieure à la réalité. Autrement dit si les Belges (ou les Européens) étaient mieux informés ou moins stupides, leurs angoisses s'évanouiraient et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ce genre d'enquêtes ou de sondages n'est cependant pratiqué que pour les chiffres migratoires, jamais pour le taux de chômage, le taux d'analphabétisme ou la croissance du PIB. Dans ce domaine, l'immigration bénéficie de l'exclusivité. On pourrait évidemment retourner l'argument. Si la perception est telle, c'est précisément parce que la situation est déjà très alarmante. À lieu de la tourner en dérision, l'inquiétude devrait être prise en considération.
L'effet boule de neige du regroupement familial
En Belgique, environ 50 % de l'immigration est liée au regroupement familial. C'est beaucoup plus que chez nos voisins et dans la plupart des pays européens, mais tous sont touchés par ses conséquences. Ce type d'immigration est, par définition, exponentiel et, littéralement, sans fin, à travers la reconnaissance des réfugiés, les mariages blancs ou gris, le caractère endogame de la majorité des mariages des Turcs et de Marocains, les fraudes massives, etc. Les conséquences quasi mécaniques du regroupement familial sur la démographie ne sont jamais expliquées.
Sauf s'il y a une prise de conscience, par la magie du regroupement familial et les arrivées à travers la Méditerranée, l'immigration de masse va continuer. Ces mécanismes d'occultation de l'importance de l'immigration sont partout à l'œuvre en Europe. Si on veut la contrôler et la freiner, selon le souhait de la grande majorité des Européens, encore faut-il que ces derniers puissent d'abord prendre connaissance de la gravité de la situation à travers une présentation honnête des statistiques et de leurs conséquences!
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Alain Destexhe : « En Belgique, l'immigration est subie et l'intégration, ratée »
- Par Paul Sugy
- Publié le 18/01/2019 à 20:52
FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - Le sénateur du parti de centre-droit belge publie un état des lieux de l'immigration en Belgique, pays le plus massivement concerné par l'immigration en Europe. Il s'inquiète de l'absence de débat sur les conséquences au long terme d'une immigration qui échappe au contrôle de l'administration.
Alain Destexhe, médecin, ex-Secrétaire général de Médecins Sans Frontières et sénateur depuis 1995 (Mouvement réformateur), vient de publier Immigration et intégration: avant qu'il ne soit trop tard… (Dynamedia, décembre 2018).
FIGAROVOX.- Vous proposez dans votre livre de passer d'une «immigration subie» à une «immigration choisie»: la Belgique aurait, selon vous, perdu le contrôle de son immigration?
Alain DESTEXHE.- En effet! Et pas seulement la Belgique d'ailleurs, car les problématiques sont identiques en France. À peu près les trois quarts de l'immigration, en Belgique comme en France, échappent au contrôle des autorités administratives du pays. Cette immigration sur laquelle nous n'avons quasiment aucun contrôle arrive soit par le regroupement familial, soit grâce à une demande d'asile, soit clandestinement. Autrement dit, tous les pays européens sont confrontés à des vagues migratoires, et la Belgique plus encore que les autres. Cette immigration a des conséquences démographiques importantes (la population belge a augmenté de 10 % en une vingtaine d'années), sans qu'on ne tienne compte de la volonté des peuples de ce pays. C'est en cela que je parle d'une immigration subie. Et elle n'est pas le seul problème: ce qui nous pose autant de difficultés, c'est le couple immigration subie / intégration ratée. Une partie importante des populations immigrées n'est pas intégrée, ni économiquement (elle dépend fortement du système social), ni culturellement, ce qui est encore plus grave: elles vivent selon des systèmes de valeurs qui sont parfois incompatibles avec nos lois, notre histoire et nos traditions.
Pourquoi, et depuis quand, l'intégration est-elle «ratée»?
En Belgique, le tournant se situe aux alentours de l'an 2000: jusqu'alors, beaucoup d'immigrés cherchaient vraiment à s'intégrer. Trois décisions ont été prises à ce moment-là qui ont eu des effets à long terme: on a tout d'abord voté l'élargissement du regroupement familial, qui est devenu extrêmement facile et qui a eu pour première conséquence d'augmenter massivement l'immigration (il représente encore 50 % de l'immigration totale en Belgique, alors que la moyenne européenne est environ de 30 %). Le regroupement familial entraîne de nombreux abus, des effets de «cascade». Jusqu'en 2011, des ascendants qui n'ont jamais cotisé dans le système de sécurité sociale, … C'est exponentiel, ça ne s'arrête jamais. Il y a fort à parier que dans quelques années, tous les pays européens auront à accueillir les familles des Syriens qui ont été acceptés depuis la crise de 2015.
Deuxième cause, la régularisation des clandestins a eu comme conséquence un effet d'appel d'air: beaucoup de gens se sont dit qu'il serait facile d'obtenir des papiers en Belgique, et qu'en plus les avantages y sont nombreux.
Enfin, troisième erreur, le changement de la loi sur la nationalité a permis en quelques années de naturaliser des centaines de milliers de personnes, sans aucune condition, au bout de trois ans de résidence dans le pays, et seulement deux pour les réfugiés politiques reconnus. La loi belge est devenue la plus laxiste au monde: aucun autre pays n'accordait aussi facilement que nous la nationalité! La loi a été changée en 2012, mais, à Bruxelles, un tiers des Belges sont désormais des «nouveaux Belges». Je crois que c'est un record mondial.
Ces lois ont eu des effets immédiats et d'autres à plus long terme. Nous avons peu à peu perdu la maîtrise du nombre: n'importe qui peut comprendre que dans une classe de vingt élèves, si seuls quelques-uns sont en difficulté, on peut les aider à rattraper le niveau ; mais lorsque dans une classe tous les enfants ont une langue étrangère pour langue maternelle, comme c'est parfois le cas dans des milieux en outre assez défavorisés, alors ça devient beaucoup plus compliqué.
Vous soulignez qu'il est difficile d'obtenir des chiffres clairs sur l'immigration. Pourquoi? Et d'où tenez-vous les vôtres?
La source des statistiques est la même pour tout le monde: mes données proviennent de Statbel, l'office belge de statistiques. Mais la façon dont elles sont présentées par les organismes militants est souvent malhonnête. Ces chiffres sont utilisés pour minimiser l'impact de l'immigration, en regardant les variations d'une année à l'autre et pas sur dix ou vingt ans. Ainsi l'on voit que chaque année, les Européens de l'Ouest (en particulier les Français et les Néerlandais) sont toujours parmi les groupes les plus importants d'immigrés. Mais en réalité, les Français ou les Néerlandais vont et viennent, pour des raisons professionnelles… ou fiscales, mais ils repartent la plupart du temps. Et ils n'ont pas de difficulté à s'intégrer. En revanche, les Guinéens, les Marocains, les Turcs… par exemple, viennent et s'installent définitivement: ce n'est pas un flux mais un stock, une immigration de peuplement. 90 % des Guinéens qui arrivent en Belgique n'en repartent jamais, tandis que seuls 1 % des Américains qui arrivent en Belgique s'y installent pour toujours. Pour rassurer, on n'exploite donc pas toutes les données disponibles. Cela empêche d'avoir un vrai débat sur l'immigration.
Pourquoi souhaite-t-on éviter un tel débat?
Parce que l'ensemble des «élites» (politiques, médias, ONGs…) sont acquises à la cause immigrationniste, et nous ne sommes pas lucides sur les problèmes que cela pose. La Belgique, selon les calculs du think tank Itinera Institute, a accueilli entre 2000 et 2010 une immigration neuf fois plus importante que les Pays-Bas et quatre fois plus importante que la France ou l'Allemagne, rapportée à la taille de la population. On est même au-dessus des pays d'immigration traditionnelle, comme le Canada ou les États-Unis. Et pendant très longtemps, il y eut un consensus politique et médiatique sur cette question. Le débat politique était donc presque inexistant, mais les choses changent, lentement.
Nous commençons tout juste à nous réveiller de notre aveuglement, notamment après les attentats qui ont mis en partie fin au déni, mais la prise de conscience n'est pas complète. À Bruxelles, le modèle multiculturel l'a emporté, et pas le modèle classique d'intégration dans la société d'accueil. On peut même se demander, à Bruxelles, jusqu'à quel point on peut encore parler de culture commune!
Votre livre aborde aussi la question du droit d'asile: selon vous, celui-ci est détourné de ses fins?
Oui, c'est un nouvel eldorado: lorsque vous venez d'un pays où le revenu par habitant est de 100, 200 ou 300 € par an, et que vous obtenez le droit d'asile en Belgique où vous bénéficiez d'un revenu minimum d'environ 1 000 € accompagné de divers avantages sociaux, vous devez garder à l'esprit que c'est une chance. En Belgique, vous disposez d'un système de soins gratuits, d'une éducation gratuite, d'un revenu garanti par la société, d'une police et d'une justice efficaces: j'assume le mot d'eldorado.
Plus fondamentalement, j'aimerais dire un mot sur la crise de 2015: Angela Merkel en porte l'entière responsabilité, car elle a pris la décision toute seule, elle n'a consulté ni le Bundestag ni ses partenaires européens. Et elle a imposé à l'ensemble de l'Europe une décision extrêmement lourde de conséquences. Or pendant la crise des réfugiés, j'ai fait un voyage en Iran et au Kurdistan irakien: la vie des réfugiés n'y était pas menacée! Ils vivaient dans des conditions difficiles, c'est vrai, mais ils n'étaient pas en danger. Tous ces gens se sont précipités vers l'Europe lorsque Mme Merkel a ouvert les portes, alors que la plupart d'entre eux avaient fui la Syrie pour se réfugier dans des pays (Liban, Jordanie, Turquie, Kurdistan irakien…) qui n'étaient pas en guerre. Dire qu'il fallait les accueillir car leur vie était menacée était une forme de manipulation. On devait les aider, c'est une certitude! Mais il fallait le faire sur place, nous n'étions pas obligés de les laisser venir en Europe. D'ailleurs, même au plus fort de la crise, le nombre de Syriens n'a jamais excédé les 40 %: beaucoup de personnes de nombreux pays se sont mises en marche, et parmi elles d'ailleurs les auteurs des attentats de Paris et Bruxelles à l'exception d'Abdeslam.
Je vous raconte une autre anecdote: lorsque j'ai visité l'Iran, je suis allé dans une école d'enfants d'anciens réfugiés afghans qui sont là depuis plus de vingt ans. La plupart travaillent, ont des revenus fixes; or un patron d'entreprise me racontait que sa société a failli un moment mettre la clé sous la porte, car les deux tiers de ses employés ont quitté l'entreprise du jour au lendemain! Il y avait à l'époque deux bus par jour qui quittaient le pays en direction de l'Europe. Ces gens étaient pourtant intégrés, ils n'étaient pas du tout menacés! J'ajoute enfin qu'on a incité des dizaines de milliers de personnes à tout vendre et tout quitter pour venir tenter leur chance en Europe, et que beaucoup sont arrivés trop tard: après l'Accord avec la Turquie en mars 2016, quand la porte s'est refermée, et ces gens ont tout perdu pour finalement ne même pas arriver en Europe. Tout cela est la responsabilité d'Angela Merkel. Sans même parler des divisions politiques qui ont déchiré nos pays ensuite, et qui ont même conduit au Brexit.
Pour vous, la création d'un «islam européen» est un mythe. Pourquoi un tel pessimisme?
Cela reflète l'évolution de ma pensée et de ma réflexion. J'espère me tromper. Il y a quelques années, je prônais encore un islam belge et européen. Mais à présent, je crois de plus en plus qu'il s'agit d'une utopie et qu'il y a une incompatibilité entre l'islam et les valeurs européennes. J'ai relu Huntington, «Le choc des civilisations», livre tant décrié à l'époque et qui pourtant a prédit tout ce qui arrive aujourd'hui! En tant que tel, l'islam est une religion respectable mais qui promeut des valeurs différentes des nôtres. Les principaux points de crispation sont l'égalité homme-femme, le droit de blasphémer, mais aussi la liberté de changer de religion, qu'il ne reconnaît pas. Un musulman, s'il veut devenir européen, doit accepter cette liberté, comme celle de caricaturer. Je suis aussi inquiet du développement de l'antisémitisme: une étude de Mark Elchardus, sociologue à la Vrije Universiteit Brussel, montre que la moitié des élèves musulmans bruxellois sont antisémites! Il y a dans le monde un regain de fondamentalisme musulman, et l'Europe ne fait pas exception. Penser que nous pourrons influencer l'islam suffisamment pour inverser cette tendance me semble bien prétentieux. L' «islam des lumières» ne concerne qu'une minorité. Et nous devons veiller scrupuleusement à ce que ceux à qui nous accordons la nationalité belge (ou française!) adhèrent à nos valeurs fondamentales. L'intégration d'un musulman dans nos sociétés européennes est évidemment parfaitement possible (il y a des millions d'exemples), mais il doit alors renoncer à une partie de sa culture d'origine.
Comment rendre à nouveau opérant le modèle d'intégration?
Il faut d'abord s'attaquer au regroupement familial. Il faut à tout prix restreindre ce droit, ne l'autoriser qu'une seule fois pour éviter les cascades dont je parlais tout à l'heure.
Il faut aussi revoir la Convention de Genève, ou du moins revenir à l'esprit initial, celui de 1951. On pensait à l'époque en signant cette Convention avant tout aux réfugiés politiques d'Europe de l'Est, persécutés du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, ou des leurs opinions politiques. Il faut pouvoir traiter les demandes d'asile en dehors de l'Europe.
Enfin, il faut ouvrir un vrai débat sur la compatibilité entre l'islam fondamentaliste et nos valeurs. Mais la langue de bois empêche cela: le problème n'est pas tant le terrorisme, qui est une question sécuritaire avant tout. Le vrai problème est le fondamentalisme, qui est le plus souvent non-violent, mais a pour conséquence que des personnes vivent dans nos pays en marge de la société selon des règles qui ne sont pas les nôtres. En Belgique, 70 % des musulmans considèrent que les lois religieuses sont supérieures aux lois du pays. Comprenez que mon livre n'est pas dirigé contre les immigrés qui cherchent à améliorer leur vie, mais contre les élites qui empêchent le débat alors que celui-ci est plus que jamais nécessaire.
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L'immigration massive, cause ou symptôme du malaise français ?
Par Stéphane Perrier Mis à jour le 04/09/2017 à 19:18 Publié le 04/09/2017 à 17:58
L'immigration massive, cause ou symptôme du malaise français ?
EXTRAITS EXCLUSIFS - Son nom est pour l'instant inconnu. Il ne va pas le rester longtemps. Stéphane Perrier, jeune cadre dans l'industrie de 34 ans publie son premier livre «La France au miroir de l'immigration» chez Gallimard, dans la prestigieuse collection «Débat» dirigée par Marcel Gauchet.
Droit du sol
Un dernier point doit être mentionné. Il concerne la procédure d'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France, improprement nommée «droit du sol». Cette procédure n'est évidemment pas neuve - elle a été créée par une loi de 1889 -, mais trois évolutions en ont modifié la portée. Les deux premières ont déjà été évoquées: le changement de nature de l'immigration a entraîné une forte augmentation du pourcentage d'enfants d'immigrés culturellement distants de la population historique ; l'école a vu sa mission d'intégration nationale abandonnée, et sa mission d'instruction civique et morale, amputée. La troisième évolution a autant d'importance: autrefois, l'acquisition de la nationalité française à la majorité était assortie, pour les hommes, de l'obligation d'effectuer un long service militaire et d'un risque élevé de faire la guerre pour sa nouvelle patrie à un moment ou à un autre de son existence - le but essentiel de la loi de 1889 était ...
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2017/09/04/31003-20170904ARTFIG00212-l-immigration-massivecause-ou-symptome-du-malaise-francais.php
«Chaos migratoire» : l'analyse sans concession d'un groupe de hauts fonctionnaires
- Par Groupe Plessis
- Publié le 14/10/2015 à 19:35
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FIGAROVOX/TRIBUNE - Le groupe de hauts fonctionnaires Plessis propose des solutions concrètes à la crise des migrants.
Plessis est le pseudonyme d'un groupe de hauts fonctionnaires.
La crise migratoire qui se déroule sous nos yeux, pour spectaculaire qu'elle soit, n'est que la manifestation renouvelée de l'incapacité de nos gouvernants à mettre en œuvre et assumer des politiques de maîtrise durable des flux de population qui franchissent nos frontières. Pourtant, il n'y a pas de fatalité en la matière.
Cette impuissance, assortie d'un discours médiatique moralisateur, est en décalage croissant avec les aspirations de la population qui, en butte aux désordres causés par une immigration incontrôlée depuis plusieurs décennies et inquiète des menaces terroristes, recherche protection et sécurité. Il est d'ailleurs frappant de constater que le formidable battage médiatique actuel, qui confine au harcèlement, ne convainc plus guère les Français
L'accueil des migrants: un irresponsable appel d'air
Le phénomène migratoire, qui s'est accéléré avec l'effondrement des Etats libyen et syrien, va encore s'amplifier à la suite du formidable appel d'air que constitue l'accueil, nolens volens, de centaines de milliers de nouveaux migrants en Europe occidentale. Les déclarations du gouvernement, qui évoque l'accueil «provisoire» de seulement 24 000 «réfugiés» alors même qu'aucun contrôle transfrontalier des flux n'est possible et que les retours sont bien improbables, n'ont pour seul mérite que de confirmer l'adage selon lequel, lorsque les événements vous échappent, il faut feindre d'en être l'organisateur. En l'état actuel des choses, il est bien évident que le Gouvernement n'a ni la volonté, ni surtout les moyens, de contrôler efficacement nos 3 000 km de frontières terrestres métropolitaines, sans parler des frontières maritimes.
Une générosité de façade
On vide les pays du Sud de leurs éléments les plus qualifiés et les plus dynamiques. Avec bonne conscience, les dirigeants européens se livrent à une véritable spoliation de l'avenir de ces pays, tout en imposant à leurs propres peuples de se perdre dans une bien aventureuse « dilution dans l'universel »
La générosité affichée par nos dirigeants, et par nombre de dirigeants européens, n'est que le masque de l'impuissance. Derrière cette façade, on enrichit des trafiquants impitoyables (la traite des êtres humains rapporterait désormais plus que le trafic de drogue), on pousse des malheureux à prendre des risques insensés sur des embarcations de fortune ; on valide la stratégie de Daech de purification ethnico-religieuse, sans parler de la déstabilisation sans doute volontaire de l'Occident par l'arrivée en masse de populations de culture musulmane, sans même parler des probabilités d'infiltration d'éléments terroristes. Ajoutons que l'on vide les pays du Sud de leurs éléments les plus qualifiés et les plus dynamiques. Avec bonne conscience, les dirigeants européens se livrent à une véritable spoliation de l'avenir de ces pays, tout en imposant à leurs propres peuples de se perdre dans une bien aventureuse «dilution dans l'universel», pour reprendre l'expression d'Aimé Césaire.
«Rien n'est meurtrier comme la lâcheté ; rien n'est humain comme la fermeté.» écrivait Charles Péguy. Face aux menaces actuelles qui engagent notre responsabilité collective vis-à-vis des générations futures, il est temps d'être humains et fermes.
Une action ferme pour résoudre la crise de l'asile
Résoudre la crise de l'asile, c'est d'abord s'attaquer aux causes et définir une stratégie claire au Proche-Orient, conforme à nos intérêts: un rapprochement avec l'Iran, une concertation avec la Russie, une politique plus pragmatique à l'égard du régime de Damas.
S'agissant de populations déplacées par la guerre, la priorité est d'aider matériellement ces populations au plus près de leur pays d'origine, les pays d'accueil, en particulier le Liban, et les organisations humanitaires. Au moment même où les migrants syriens sont au cœur de l'actualité, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et le Programme alimentaire mondial (PAM) ne disposent pas des moyens nécessaires pour héberger et nourrir les déplacés. Il est aussi inacceptable que des pays proches, qui ne sont pas pour rien dans la guerre civile syrienne, et qui ne manquent pas d'abondantes liquidités, le Qatar ou l'Arabie saoudite, se montrent si peu accueillants. On s'étonnera aussi du rôle joué par la Turquie qui n'aide guère l'Europe .
Lutter contre les réseaux de passeurs et délocaliser la demande d'asile
La deuxième priorité est de s'attaquer à l'économie même des passeurs. A cet égard, l'exemple australien est éloquent: aucune arrivée illégale par bateau n'est tolérée, les bateaux sont raccompagnés soit vers leur lieu de départ, soit vers des centres de rétention extraterritoriaux, mis à disposition par des pays riverains et où les demandes d'asiles sont traitées. Le résultat est sans appel: aucun mort en mer à déplorer depuis 18 mois.
S'agissant des demandes d'asile déposées en France, le dispositif actuel, largement détourné au profit d'une immigration économique ou sociale et dévoyé par des manœuvres dilatoires et des fraudes de toutes sortes, doit impérativement être revu au profit d'une procédure extrêmement rapide.
Il est parfaitement envisageable, pour l'Europe ou, à défaut, pour la France seule, de reproduire ce dispositif en concluant des accords (assortis d'une aide financière) avec des pays du Sud de la Méditerranée pour la création de ces centres. L'action de la Marine serait alors réorientée vers le raccompagnement des embarcations et de leurs passagers en direction de ces centres et vers la traque des passeurs qui est désormais un enjeu de sécurité nationale. Un dispositif européen similaire pourrait également être envisagé pour les demandeurs d'asile empruntant la route terrestre des Balkans. Ne seraient alors admises en France que les personnes s'étant effectivement vues octroyer le statut de réfugié au sens de la Convention de Genève ou de la Constitution. Ce système aurait donc le mérite d'éviter d'introduire en France des demandeurs d'asile dont fort peu répondent aux critères (70 % de déboutés malgré une procédure très favorable aux demandeurs) mais qu'il est ensuite extrêmement difficile d'éloigner (moins de 5% des déboutés).
Recentrer l'asile au profit des rares authentiques réfugiés
S'agissant des demandes d'asile déposées en France, le dispositif actuel, largement détourné au profit d'une immigration économique ou sociale et dévoyé par des manœuvres dilatoires et des fraudes de toutes sortes, doit impérativement être revu au profit d'une procédure extrêmement rapide, non créatrice de droit, sous contrôle étroit des autorités et suivie d'une expulsion rapide des déboutés, sans possibilité de solliciter, sinon dans le pays d'origine, un autre titre de séjour.
Un discours de vérité sur l'immigration
Cette crise d'une ampleur exceptionnelle appelle un retournement de paradigme qui passe par un changement de discours sur l'immigration. Il est temps d'admettre que, contrairement à certaines idées reçues, la France n'a pas besoin d'une immigration supplémentaire. Et si les beaux esprits le contestent, il n'est que de demander son avis au peuple de France par référendum. Notre taux de chômage élevé, l'immense besoin en formation de nos jeunes inactifs peu qualifiés montrent bien que le pays n'a aucunement besoin d'un apport extérieur de main-d'œuvre, à l'exception de quelques travailleurs particulièrement qualifiés.
Certains secteurs d'activité emploient massivement une main-d'œuvre étrangère, souvent illégale (BTP, restauration …). Mais est-ce à la collectivité d'assumer cette charge pour que ces entreprises emploient à moindres frais ?
Certains secteurs d'activité emploient massivement une main-d'œuvre étrangère, souvent illégale (BTP, restauration …). Mais est-ce à la collectivité d'assumer cette charge pour que ces entreprises emploient à moindres frais? L'immigration a d'ailleurs un coût: poids croissant sur le système de santé, sur la protection sociale, sur la politique de logement, sur les établissements scolaires, sans parler des déséquilibres sociaux, ethniques et culturels qu'elle provoque sur de nombreux territoires. Mais le coût principal de cette immigration non choisie est probablement la défiance qu'elle fait naître entre un peuple de France inquiet pour son identité et ses dirigeants qui y semblent indifférents.
La France peut bien sûr accueillir des personnes par souci d'humanité ou parce qu'elles manifestent un attachement sincère à notre pays, mais il s'agit bien là d'une faveur et non d'un droit, d'un choix et non d'une obligation.
Une politique migratoire souveraine
- Pour un contrôle démocratique sur la politique d'immigration: remettre au cœur de nos politiques la souveraineté nationale devrait conduire à fixer un quota annuel, voté par le Parlement, en fonction des besoins et des capacités d'accueil du pays. Le principe d'un tel vote devra être solennellement inscrit dans la Constitution, par voie de référendum. Sa mise en œuvre impliquerait un changement radical dans les pratiques de l'administration qui devrait, sous contrainte, mener une politique active de sélection et de priorisation des candidats.
- Simplifier le droit des étrangers: le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devrait être considérablement simplifié (plus de 1 000 pages en édition courante!), les délais et nombre de recours drastiquement réduits.
- Inciter au départ les étrangers inactifs légalement présents dont il faut rappeler qu'ils n'ont pas nécessairement vocation à rester sur notre territoire. Ainsi les allocations auxquelles ils ont droit (chômage notamment) pourraient-elles leur être versées dans leur pays: une chance de réinsertion leur serait ainsi donnée ; le poids sur nos services sociaux en serait allégé et ces fonds contribueraient au développement des pays d'origine.
- Faciliter l'éloignement forcé: en 2014, les vrais éloignements, c'est-à-dire les éloignements forcés hors de l'espace Schengen, n'ont concerné que 6 500 étrangers, chiffre dérisoire au regard des enjeux de l'immigration clandestine. Une simplification drastique des procédures et des recours est nécessaire. De même, tout statut doit être refusé aux étrangers en situation irrégulière. Cela passe par la suppression de l'AME et du droit à une scolarisation en milieu ordinaire: les enfants, qui ont d'ailleurs le plus souvent besoin d'un parcours spécifique, seraient pris en charge dans des structures ad hoc, dans l'attente d'un éloignement. Cela passe aussi par un enregistrement sérieux des entrées et des sorties des étrangers afin de rechercher, pour contrôle et expulsion, ceux restant illégalement sur le territoire.
Sans doute faut-il fixer un principe : franchir illégalement les frontières de l'Union ne crée aucun droit.
- Réviser en profondeur l'accord de Schengen afin de permettre un contrôle réel de l'immigration irrégulière aux frontières nationales: le contrôle aux frontières de l'espace Schengen est un leurre. Sans doute faut-il fixer un principe: franchir illégalement les frontières de l'Union ne crée aucun droit. Sans doute aussi faut-il passer à un système à deux niveaux, c'est-à-dire tout à la fois revenir à un contrôle ciblé mais durable des frontières nationales, qui passe par la constitution d'un véritable corps de garde-frontières, et qui permettra également de faire face aux vastes mouvements de populations intra-communautaires en provenance de Roumanie et de Bulgarie, et commencer à construire un véritable dispositif collectif de contrôle des frontières extérieures. Dans cette attente, doivent être envisagées par la France une mise en œuvre des clauses de sauvegarde prévues par la convention, et sans doute une sortie temporaire du système. Contrairement à ce qui est parfois affirmé, l'expérience hongroise montre que le contrôle des frontières nationales, lorsqu'il est au service d'une politique volontaire, reste un moyen très efficace pour enrayer les flux migratoires clandestins.
- Sortir de l'angélisme dans la coopération avec les pays d'origine: il n'est pas de contrôle efficace de l'immigration à moyen terme sans une coopération bien comprise avec les pays d'origine que l'on doit inciter à s'engager contre les filières de trafic d'êtres humains, engagement auquel devraient être strictement conditionnées les aides bilatérales et européennes. L'immigration est aussi un drame du désespoir et du déracinement. Il est de la responsabilité des nations européennes d'aider aussi ces pays à trouver la voie d'un développement économique et social qui permettent à leurs populations d'envisager un avenir sur place.
-Enfin, briser l'outil d'encouragement aux migrations non maîtrisées que représente l'espoir de régularisation. D'exceptionnelles, les régularisations sont devenues, notamment sous la pression d'associations, une modalité banale d'admission au séjour en France et constituent un puissant incitatif à l'entrée et au séjour irréguliers. Dès lors, pourquoi ne pas inscrire dans la Constitution, via un référendum, que les régularisations d'étrangers en situation irrégulière sont interdites?
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http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2015/10/14/31002-20151014ARTFIG00360-chaos-migratoire-l-analyse-sans-concession-d-un-groupe-de-hauts-fonctionnaires.php
Loi sur l'immigration : le grand décryptage de la démographe Michèle Tribalat
- Mis à jour le 21/01/2018 à 12:47
- Publié le 19/01/2018 à 18:08
FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN -
Michèle Tribalat a mené des recherches sur les questions de l'immigration en France, entendue au sens large, et aux problèmes liés à l'intégration et à l'assimilation des immigrés et de leurs enfants. Elle est notamment l'auteur de Statistiques ethniques, une querelle bien française (éd. L'Artilleur, 2016).
FIGAROVOX.- La politique d'immigration d'Emmanuel Macron a suscité la colère d'une partie de la gauche. On se souvient notamment de la une du Nouvel Obs avec des barbelés, et ce titre: «Bienvenue au pays des droits de l'homme». De nombreux politiques accusent Macron de mener une politique plus sévère que celle de Nicolas Sarkozy. Est-ce vraiment le cas?
Michèle TRIBALAT.- La comparaison pourra vraiment être faite lorsqu'on connaîtra le texte de loi. Il y a beaucoup d'excitation pour un texte qui n'est pas encore complètement fini, et dont on ne connaît que certaines orientations grâce au document présenté aux associations.
Deux sujets ont retenu l'attention médiatique, la réforme de l'asile pour accélérer les procédures et les mesures envisagées pour «resserrer les boulons» dans les procédures d'éloignement. D'ailleurs, ce deuxième volet est bizarrement titré «Renforcer l'efficacité et la crédibilité de la lutte contre l'immigration irrégulière». Il faudrait plutôt parler de séjour irrégulier. Le gouvernement cherche à faire un peu mieux pour expulser ceux qui sont déjà sur le territoire sans en avoir le droit. Quant à l'accélération des procédures d'asile, on ne peut à la fois se plaindre de leur lenteur et se lamenter sur la tentative de faire plus vite. Plus elles traînent, plus le séjour des demandeurs d'asile se prolonge et plus les lieux d'accueil sont engorgés. C'est d'autant plus vrai que leur nombre a fortement augmenté. Le projet prévoit d'ailleurs la création de 7 500 places d'accueil supplémentaire en 2018-2019.
On voit bien comment les deux volets s'articulent. La demande d'asile, au-delà de sa vocation traditionnelle, est devenue le moyen de tenter de régulariser sa situation quand on n'a aucun autre motif à faire valoir. C'est un peu la solution de la dernière chance pour obtenir un statut. Dans l'esprit du gouvernement, il faut donc que ces procédures ne traînent pas si l'on veut qu'elles soient suivies, en cas d'échec, d'une procédure d'éloignement qui ait un peu plus de chances d'être exécutée.
Macron s'inscrit-il dans la continuité de ses prédécesseurs ou peut-on parler de rupture?
En dehors de ces deux volets motivés par le développement de l'immigration irrégulière ces dernières années - filtrage par la procédure d'asile et éloignements des déboutés - rien, dans le projet, n'indique une volonté de limiter l'immigration étrangère en France, comme c'était le cas de Nicolas Sarkozy par exemple. Certaines dispositions, présentées dans la partie intitulée «Améliorer les conditions d'accueil et d'intégration des étrangers en situation régulière» ou dans celle traitant de la protection humanitaire, élargissent, au contraire, le champ des possibilités.
Pour la première, ces ouvertures se font en direction des plus qualifiés avec une extension du passeport-talent et une transposition de la directive «étudiants-chercheurs» (qui devait de toute façon se faire) en vue de faciliter leur installation en France. Pour la seconde, il s'agit, par exemple, de substituer un premier titre de séjour de quatre ans à un titre d'un an pour les étrangers qui bénéficient d'une protection subsidiaire ou qui sont apatrides, et d'étendre le regroupement familial auprès des réfugiés mineurs, au-delà des ascendants directs, aux frères et sœurs. Cette dernière mesure, quand on sait le développement exponentiel des arrivées spontanées de mineurs (qui ne sont d'ailleurs pas tous mineurs et sont plutôt des garçons proches de leur majorité) en Europe ces dernières années, recèle un potentiel d'entrées non négligeable. Elle crédibilise le projet de familles qui envoient leur grand garçon, en éclaireur, essayer de trouver un avenir meilleur en Europe.
Le débat sur l'immigration se focalise sur la question des réfugiés. Doit-il se limiter à cela?
Le débat se focalise, comme toujours, sur ce qui apparaît le plus pressant et ce sont les arrivées irrégulières massives en Europe d'un grand nombre d'étrangers en 2015-2016 qui ont absorbé toute l'attention des médias.
Pour beaucoup, le nombre de personnes en situation irrégulière sur le territoire est incompressible. Est-ce vraiment le cas?
On ne sait évidemment pas combien d'étrangers sont actuellement en situation irrégulière en France, mais il se trouve donc des gens pour juger leur nombre «incompressible»! Je suppose que ce que l'on entend par là c'est qu'on ne peut rien contre les décisions prises ailleurs de venir en France, et plus largement en Europe. Comme on ne peut (veut?) pas renvoyer ces étrangers, on doit faire avec. C'est une manière de naturaliser l'immigration. Cette dernière serait un phénomène naturel au même titre que les tempêtes qui viennent de toucher le nord de l'Europe. L'immigration est absolument dépolitisée, au vrai sens du terme, et non au sens politicien des prises de bec sur les plateaux de télévision.
La question de l'immigration régulière est éludée. Pourtant, elle augmente ces dernières années… Comment expliquez-vous cette progression? Est-ce lié au regroupement familial?
On ne retient généralement que les deux dernières années pour commenter l'évolution de l'immigration étrangère en France et on en parle dans la presse lorsque le ministère de l'Intérieur met en ligne, en janvier, son estimation des nouveaux premiers titres de séjour délivrés aux étrangers en provenance de pays tiers (à l'Espace économique européen et à la Suisse) dans l'année qui vient de se terminer.
Le nombre de premiers titres délivrés augmente, quasiment sans interruption depuis 1997.
Or, si l'on suit ces données depuis suffisamment longtemps, on se rend compte que le nombre de premiers titres délivrés augmente, quasiment sans interruption, depuis le début de la série rendue publique par le ministère de l'Intérieur. En vingt ans, de 1997 à 2017, ce nombre est passé d'un peu moins de 120 000 à un peu plus de 260 000. En un an, un peu plus de 30 000 titres supplémentaires ont été délivrés, principalement pour raison humanitaire (asile…), pour motif économique et pour des venues d'étudiants. Les estimations de l'Insee sur une période plus courte (2006-2015), montrent aussi une augmentation des entrées d'immigrés en France.
Une enquête à l'Ifop concernant le rapport des Français au «complotisme» (sic) a montré que près de 50 % d'entre eux croient à la théorie du «grand remplacement». Comment expliquez-vous cette perception?
48 % sont d'accord avec l'opinion proposée par l'IFOP selon laquelle l'immigration, «c'est un projet politique de remplacement d'une civilisation par une autre, organisé délibérément par nos élites politiques, intellectuelles et médiatiques et auquel il convient de mettre fin en renvoyant ces populations d'où elles viennent».
L'idée de grand remplacement lancée par Renaud Camus doit son succès plus à son pouvoir d'évocation de l'effondrement de l'univers familier ressenti par une partie de la population française, qu'à une vérification empirique convaincante. Ajoutons à cela qu'il s'est trouvé des amateurs pour faire quelques calculs de coin de table ayant l'air de confirmer l'imminence de la chose.
Mais je crois que l'idée selon laquelle il y a un projet derrière tout cela provient du fait que les gens n'aiment pas croire que ça pourrait se produire sans avoir été soigneusement planifié. Les gens préfèrent penser qu'un phénomène a toujours une cause bien identifiée. Ça a un côté rassurant parce que cela laisse supposer qu'il suffirait d'une planification différente pour y mettre un terme. Pour le psychologue belge Albert Michotte, cité par Daniel Kahneman dans son livre Système1/système2: les deux vitesses de la pensée, nous avons une propension à voir des causalités aussi directement que nous voyons les couleurs.
Cependant je trouve que la deuxième partie de l'énoncé de l'opinion proposée par l'IFOP est ambigüe. De quelles populations s'agit-il? Des migrants qui arrivent ou de ceux qui sont là depuis longtemps? C'est déjà problématique de proposer les deux énoncés en même temps, mais laisser planer le doute sur ceux qui pourraient être renvoyés ouvre la porte à toutes sortes d'interprétations qui ne reflètent pas forcément l'opinion réelle des gens qui sont interrogés.
Selon une étude du Pew Research Center, il y aura 18% de musulmans en France en 2050. Cette étude est-elle fiable?
Les projections ne sont pas un exercice de divination.
Le Pew ne dit pas vraiment cela: j'ai traité ce sujet dans un article sur mon blog. Il dit que, si l'on suit les hypothèses qu'il énonce, la proportion de musulmans en France pourrait atteindre 18 % en 2050. Ce cas correspond à un régime migratoire qui ressemblerait à celui connu entre mi-2014 et fin 2016. On a fait beaucoup de reproches au Pew, inspirés soit par une grande mauvaise foi soit par une ignorance de ce qu'il avait vraiment fait. Contrairement à ce qui a été dit, le Pew introduit une fécondité musulmane déclinant au fil de temps. Il ne suppose pas non plus qu'on naisse musulman parce que ses parents le sont… Par ailleurs, le Pew ne prétend pas que c'est ce qui va se passer. Les projections ne sont pas un exercice de divination. Elles sont conditionnées par les hypothèses et par la connaissance que l'on a du phénomène projeté en début de période. C'est vrai de tous les exercices de projections et pas seulement ceux du Pew. C'est particulièrement vrai, par exemple, des projections démographiques des Nations unies qui incluent des pays pour lesquels on ne sait pas grand-chose.
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«Zones de non-France» : Marine Le Pen fustige les conséquences de l'«immigration délirante»
- Avec AFP
© Clément Mahoudeau
Marine Le Pen, le 19 janvier 2019 au Thors, près d'Avignon.
A l'approche des européennes, la patronne du Rassemblement national – s'exprimant notamment aux côtés de Thierry Mariani, récemment rallié – a, dans son premier discours de campagne, critiqué «des zones où l'on se sent étranger dans son propre pays».
Lors d'un meeting au Thor (Vaucluse) le 19 janvier, la présidente du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a centré sur l'immigration son premier discours de campagne en vue des élections européennes.«La mondialisation, avec l'ouverture des frontières irraisonnée, a livré nos rues, nos quartiers, nos villes, nos villages, à une immigration délirante qui transforme certains endroits en zones de non-France», a-t-elle martelé, s'exprimant aux côtés de l'ex-ministre Thierry Mariani et de la tête de liste du parti, Jordan Bardella.
Ce sont «des zones où l'on se sent étranger dans son propre pays, des zones où les lois de la République ne sont plus appliquées, des zones où trouvent à s'imposer d'autres lois que celles de la République, celle du caïd ou celle des islamistes», a ajouté l'ancienne candidate à l’élection présidentielle. «Il est temps de faire cesser ce scandale, et de rappeler à tous qu'ici on est en France, et qu'en France on applique la loi française», a-t-elle poursuivi.Des zones où les lois de la République ne sont plus appliquées, des zones où trouvent à s'imposer d'autres lois que celles de la République, celle du caïd ou celle des islamistes
Marine Le Pen a également critiqué le Pacte mondial sur les migrations des Nations unies, signé à Marrakech, «illustration» du «projet» d'Emmanuel Macron pour l'Europe, «un projet qui fait disparaître le peuple français par la dilution migratoire qu'il organise, un projet qui entérine la sortie de la France de l'histoire».
Une main tendue aux Gilets jaunes
Auparavant, Thierry Mariani avait mentionné la problématique identitaire pour justifier son ralliement à la liste RN : «C'est vrai qu'on n'est pas d'accord sur les politiques économiques, mais [...] un taux de CSG ça peut se changer en un décret», tandis qu'«on ne change pas une population, un territoire, une culture en 24 heures : quand c'est trop tard, c'est trop tard, et aujourd'hui il faut se rassembler».En ouverture du meeting, la jeune tête de liste Jordan Bardella a, de son côté, tendu la main aux Gilets jaunes : «A tous ces Français qui lancent des appels de détresse depuis un certain nombre de semaines sur les ronds-points, qui nous disent "Et nous ?", nous leur répondons simplement : "Vous d'abord".»Les 480 000 clandestins présents sur notre sol ne devraient pas vivre dans l'attente de leur régularisation, mais plutôt dans l'attente de leur expulsion
«Les 480 000 clandestins présents sur notre sol ne devraient pas vivre dans l'attente de leur régularisation, mais plutôt dans l'attente de leur expulsion», a-t-il enfin tonné, car «l'immigration a un coût pour la France, un coût financier et budgétaire, sécuritaire, culturel».
Lire aussi : La France deuxième pays de demande d'asile en Europe, avec une hausse de 22%
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