Du traité constitutionnel à
Syriza : l'Europe contre les peuples http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2015/02/02/31001-20150202ARTFIG00405-du-traite-constitutionnel-a-syriza-l-europe-contre-les-peuples.php
L'injustice
faite à la Pologne, un déni de démocratie
http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2017/12/21/31002-20171221ARTFIG00266-l-injustice-faite-a-la-pologne-un-deni-de-democratie.php
http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2017/12/21/31002-20171221ARTFIG00266-l-injustice-faite-a-la-pologne-un-deni-de-democratie.php
Pour un commissaire européen,
l’immigration est « la nouvelle norme » (30.12.2017)
Du traité constitutionnel à Syriza : l'Europe contre les
peuples (02.02.2015)
- Par Coralie Delaume
- Publié le 02/02/2015 à 20:10
FIGAROVOX/OPINION - Pour
Jean-Claude Juncker, «il ne peut y avoir de choix démocratique contre les
traités européens déjà ratifiés». Coralie Delaume rappelle qu'il n'y a pas non
plus de choix qui permette qu'un traité européen ne soit pas ratifié ...
Coralie Delaume est
journaliste. Elle a notamment publié «Europe. Les Etats désunis» (Michalon,
2014). Découvrez ses chroniques sur son blog.
L'Union européenne est décidément
une étrange construction. Il est impératif d'être une démocratie pour y entrer.
C'est même l'unique critère. Les élargissements hâtifs et désordonnés aux PECO
(pays d'Europe centrale et orientale) opérés en 2004 et 2007 en furent une
illustration. En revanche, une fois admis dans le club, requérir à son profit
le respect des règles élémentaires de la démocratie est jugé avec sévérité, et
donne le plus souvent lieu à des procès en «populisme».
Les menues imperfections
antidémocratiques de l'édifice communautaire sont connues de tous les
observateurs sincères. En revanche, jamais jusque-là un dirigeant européen
n'avait eu le culot de les reconnaître. Jean-Claude Junker vient de s'en
charger, sous le coup de la forte émotion qui s'est emparé des tous les
défenseurs de l'Union lisbonno-mastrichienne après la large victoire de Syriza
en Grèce le 25 janvier.
«Dire que tout va changer
parce qu'il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c'est prendre ses désirs
pour des réalités (…) Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les
traités européens ...»
Jean-Claude Juncker
Certains ont eu de la fièvre et
des suées. D'autres se sont mis à dire sans précaution tout ce qu'ils avaient
vraiment dans la tête, à l'instar du président de la Commission européenne. Ce
dernier est entré directement à la première place du «Top10» des propos les
plus invraisemblables proférés la semaine dernière avec cette sortie: «dire que
tout va changer parce qu'il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c'est
prendre ses désirs pour des réalités (…) Il ne peut y avoir de choix
démocratique contre les traités européens»
Pas de choix démocratique contre
les traités européens…: pour un aveu, il est de taille! C'est d'ailleurs un
authentique progrès pour un Jean-Claude Juncker dont on peut penser qu'il est
en phase de rémission. Tous les psys le disent: pour expurger une névrose, il
faut ver-ba-li-ser. Il serait donc très encourageant que le Luxembourgeois
poursuive cette opération vérité. Et qu'il pousse l'audace jusqu'à concéder
ceci: il n'y a pas vraiment de choix démocratique non plus pour les traités
européens.
Cette réalité, encore
faudrait-t-il que Junker accepte de la regarder en face. Peut-être peut-on l'y
aider? Rappelons-lui dès à présent quelques faits saillants ayant pris place
dans un passé récent.
Au début des années 2000, l'Union
européenne veut se doter du traité de Nice. L'Irlande, en vertu de ses
institutions, doit convoquer ses électeurs aux urnes pour une ratification
référendaire. Le référendum a lieu en juin 2001 et... 54% des votants irlandais
rejettent le texte. On laisse alors passer un peu de temps Les peuples, c'est
connu, sont oublieux. Un an et demi plus tard, le corps électoral irlandais est
à nouveau mobilisé et, cette fois, il vote en faveur du traité de Nice. Du
coup, puisque l'entourloupe a réussi une fois, pourquoi ne pas en abuser? Ce
sera chose faite avec le traité de Lisbonne. En 2008, les Irlandais sont appelés
à se prononcer sur celui-ci et répondent par la négative à 53% Un vote qui sera
«corrigé» l'année d'après par un re-vote, afin que le «oui» l'emporte enfin.
Les Néerlandais avait répondu
« contre » à plus de 61% en 2005. Trois ans plus tard, leur Parlement votait
sans moufter le même texte, rebaptisé pour faire bien « traité de Lisbonne ».
En France, nous eûmes la chance d'avoir les mêmes gros malins, pour nous écrire
le même scénario.
Au Pays-Bas, on est moins
téméraire. On ne sollicite pas deux fois les mal-votants car c'est dangereux:
le peuple étant stupide, il arrive qu'il persiste dans la déviance. Là, quand
les citoyens votent de travers, on recourt donc à leurs «représentants», qui
acceptent de se transformer de bonne grâce en censeurs de leurs propres
mandants. Ainsi, à la question «Êtes-vous pour ou contre l'approbation par les
Pays-Bas du traité établissant une constitution pour l'Europe?», les
Néerlandais avait répondu «contre» à plus de 61% en 2005. Trois ans plus tard,
leur Parlement votait sans moufter le même texte, rebaptisé pour faire bien
«traité de Lisbonne».
En France, nous eûmes la chance
d'avoir les mêmes gros malins, pour nous écrire le même scénario. Ainsi, alors
que le référendum sur le projet de traité constitutionnel organisé en mai 2005
avait placé le «non» à plus de 54 %, le Parlement adopta Lisbonne dans la joie
et la bonne humeur dès 2008. Pour l'occasion, les parlementaires du Parti
socialiste apportèrent un soutien touchant à leurs collègues de l'UMP, puisque
142 d'entre eux décidèrent de s'abstenir. N'écoutant que leur enthousiasme,
trente environ allèrent jusqu'à voter pour. Un coup de pouce bien sympathique,
qui permit à Nicolas Sarkozy d'obtenir la majorité des trois cinquièmes au
Congrès dont il avait besoin pour nous glisser le traité. Après ça, il se
trouve encore de braves ingénus pour s'étonner, des larmes plein les yeux, des
scores mirobolants du Front national....
Bref, comme le dit Jean-Claude
Junker, il n'y a pas de choix démocratique possible contre les traités européens
déjà ratifiés. Mais, on vient de le voir, il n'y a pas non plus de choix qui
permette qu'un traité européen ne soit pas ratifié. Or... s'il n'y a pas de
choix possible quant à des textes de valeur quasi-constitutionnelle qui
encadrent, dans de très nombreux domaines, la conduite des politiques
nationales, peut-on nous dire ce qu'il reste, exactement, de la démocratie?
L'injustice faite à la Pologne, un déni de démocratie
(21.12.2017)
FIGAROVOX/OPINION - L'Union
européenne a déclenché l'article 7 du traité de Lisbonne contre la Pologne dont
le gouvernement est soupçonné de vouloir violer l'état de droit. Pour Patrick
Edery, il s'agit d'une décision arbitraire et qui plus est inutile.
Patrick Edery est Président
directeur général de Partenaire Europe, un cabinet de conseil originaire
d'Europe centrale.
Depuis près de deux ans, la
Pologne est devenue, au sein de l'Union Européenne, le symbole du mal absolu.
On utilise à son égard des éléments de langage particulièrement outranciers et
guerriers: l'exemple en date le plus frappant fut la menace d'engager, contre
elle, l'article 7 du Traité sur l'UE qualifié d'«arme nucléaire». Ce mercredi
20 décembre 2017, la Commission européenne a finalement décidé de mettre à
exécution cette menace du fait «d'un risque clair de violation grave de l'État
de droit en Pologne». Mais alors pourquoi cette
Des élus polonais auraient-ils
été arrêtés ou des manifestations réappréhendées avec une force
disproportionnée ? Non, cela s'est déroulé en Espagne.
décision à quelques jours de
Noël, et alors qu'un nouveau premier ministre polonais venait d'être nommé?
Des élus polonais auraient-ils
été arrêtés ou des manifestations réappréhendées avec une force
disproportionnée? Non, cela s'est déroulé en Espagne. Peut-être alors parce
qu'une journaliste, qui accusait nommément l'épouse d'un premier ministre
d'avoir un compte au Panama pour y abriter des pots-de-vin, a été assassinée
dans l'explosion de son véhicule? Non, cela s'est passé à Malte, transformée en
«île mafia», selon les dires des fils de la victime. Des ministres d'extrême droite
auraient-ils été nommés à des portefeuilles régaliens? Cela s'est déroulé en
Autriche. Peut-être la Pologne a-t-elle décidé de mettre en place une politique
énergétique qui risque de mettre en péril la sécurité de toute l'Europe
centrale, et qui est en infraction avec la législation définie par Bruxelles?
Non plus, c'est l'Allemagne. Peut-être qu'elle ne respecte pas les critères de
Maastricht depuis des années et, en 2018, battra son record d'emprunts, le plus
important de l'UE? Non, cette fois, c'est nous.
Pour la première fois de son
histoire, la Commission européenne a déclenché l'article 7. Aussi, au regard
des actes avérés des autres membres, le «risque» polonais d'infraction doit
être particulièrement grave.
Les 5 commandements de
Bruxelles à Varsovie
Selon la Commission: «À la suite
des réformes judiciaires menées en Pologne, l'appareil judiciaire du pays est à
présent sous le contrôle politique de la majorité au pouvoir.» Dans la
recommandation qu'elle a adoptée, mercredi, la Commission définit une série de
5 mesures que les autorités polonaises doivent prendre pour apaiser ses
inquiétudes. Remarquez bien que la Commission parle de risques et
d'inquiétudes. Il n'y aurait donc pas de constatation factuelle de la part de
la Commission de violation de l'État de droit? Poursuivons, les autorités
polonaises sont invitées par Bruxelles à:
Première mesure: «Modifier
la loi sur la Cour suprême, afin de ne pas réduire l'âge de départ à la
retraite des juges actuellement en fonction, de supprimer le pouvoir
discrétionnaire dont dispose le président quant à la prolongation du mandat des
juges de la Cour suprême et de supprimer la procédure de recours
extraordinaire, qui prévoit la possibilité de remettre en cause des jugements
définitifs rendus plusieurs années auparavant».
La Cour suprême y est
l'équivalent de la Cour de cassation en France. La nouvelle loi polonaise
prévoit que les juges de plus de 65 ans seront mis d'office à la retraite. Ce
qui implique que les juges nés dans les années 50 et qui étaient magistrats
sous le régime communiste et notamment pendant l'état de siège vont être
ciblés. Cette loi permet également à des citoyens s'estimant victime d'un
procès injuste, exceptionnellement pour ces 20 dernières années, d'en demander
la révision. L'objectif affiché ici est double: décommuniser le dernier pouvoir
polonais qui ne l'avait pas été lors la chute du mur, et renouveler un pouvoir
judiciaire considéré comme népotique.
Seconde mesure :
«Modifier la loi sur le Conseil national de la magistrature, de manière à ne
pas mettre fin au mandat des juges membres et à veiller à ce que le nouveau
système de nomination continue de garantir l'élection des juges membres par
leurs pairs.»
Jusqu'à présent, sur les 25 juges
membres que compte le Conseil National de la Magistrature, 15 étaient désignés
par d'autres magistrats, sans contrôle aucun des citoyens. Désormais, ces 15
magistrats seront désignés par les députés. Chaque groupe parlementaire ne
pourra proposer plus de 9 juges, et chaque groupe devra pouvoir en désigner au
moins un. Et la liste de ces 15 juges devra recevoir les 3/5 des suffrages de
l'Assemblée nationale.
N'est-il pas plus démocratique
que les «juges des juges», au lieu de se coopter (désignés entre eux), soient
nommés par les représentants élus du peuple? Certes, les juges sont des
experts, mais leur laisser cette prise de décision n'est-ce pas basculer vers
la technocratie?
Troisième mesure :
«Modifier ou abroger la loi sur l'organisation des juridictions de droit
commun, notamment pour supprimer le nouveau régime de retraite applicable aux
juges, y compris le pouvoir discrétionnaire dont dispose le ministre de la
justice pour ce qui est de prolonger le mandat des juges et de nommer et de
révoquer les présidents des tribunaux.»
Il s'agit ici de mesures purement
administratives. La réforme de la loi prévoit que les affaires soient
attribuées aux juges par tirage au sort, aussi les présidents de tribunaux
deviennent essentiellement des «directeurs administratifs».
Quatrième mesure: «Restaurer
l'indépendance et la légitimité du Tribunal constitutionnel, en veillant à ce
que ses juges, son président et son vice-président soient élus légalement et à
ce que tous ses jugements soient publiés et pleinement mis en œuvre ; Les plus
hautes instances juridiques polonaises.»
La Commission européenne et
l'opposition polonaise ont contesté, ensemble, la validité de l'élection de
certains juges du Tribunal constitutionnel (équivalent français du Conseil
constitutionnel) et, par ricochet, la validité de l'élection de son Président
et Vice-Président. Toutefois la Commission et l'opposition sont constituées de
hauts-fonctionnaires et de politiques et non de magistrats. Outre le Tribunal
Constitutionnel, les équivalents de nos Cours de cassation (Cour suprême) et du
Conseil d'État en Pologne ont, de par leurs jugements, validé la légalité de
ces élections. Or la «Cour de Cassation polonaise», la Cour suprême, ne peut
être accusée de penchants pour le parti au pouvoir en Pologne. Outre qu'une
bonne partie des réformes concernent ses magistrats, elle s'oppose
régulièrement, par communiqués, au parti au pouvoir en Pologne. Sa présidente a
même participé et pris la parole à au moins une manifestation organisée par
l'opposition.
Cinquième mesure: «S'abstenir
d'actes et de déclarations publiques susceptibles de saper davantage encore la
légitimité du pouvoir judiciaire.»
Ici la Commission impose comme
condition, pour suspendre les poursuites, que des personnes légalement et
légitimement élues dans un pays membre n'abordent pas tous les sujets de leur
choix de la manière qu'ils l'entendent. Autrement dit, un élu polonais, s'il
estime que le pouvoir judiciaire est corrompu, n'a pas le droit de le dire,
s'il veut que son pays ne soit pas sanctionné par l'UE.
Chacun jugera en son âme et
conscience ces 5 mesures. Et pour ce faire, il serait bon d'avoir à l'esprit
certains
M. Timmermans, 1er
vice-président de la Commission, en charge du « dossier polonais » au sein de
la Commission est nommé et non élu
faits.
M. Timmermans un commissaire
politique?
Le premier est que M. Timmermans,
1er vice-président de la Commission, en charge du «dossier polonais» au sein de
la Commission est nommé et non élu. Certes, c'est un ancien député
social-libéral, mais son parti ne représente plus que 5,7% des électeurs aux
Pays-Bas.
Depuis l'arrivée au pouvoir du
PiS en Pologne, M. Timmermans répète quasiment mot pour mot l'argumentaire des
partis politiques libéraux qui s'opposent au gouvernement en place à Varsovie.
Rappelons aussi que la «caution polonaise» de M. Timmermans est le président du
Conseil européen, libéral, M. Tusk. Ce dernier est le fondateur du principal
parti politique d'opposition au gouvernement en Pologne. Il est de surcroît
encore en âge de revenir aux affaires dans son pays. Si M. Timmermans arrivait
à ses fins et disqualifiait le parti au pouvoir à Varsovie, M. Tusk serait le
premier bénéficiaire de ce changement. Il faut bien comprendre que M.
Timmermans qui condamne, sans procès, depuis deux ans, le gouvernement polonais
n'a qu'un pouvoir d'investigation.
Ces 3 derniers siècles la
Pologne a survécu aux empires et dictatures qui voulaient la soumettre. Il en
sera sûrement de même de cette nouvelle technocratie libérale. Pourrons-nous en
dire autant ?
Pourquoi martyriser la
Pologne?
Au-delà même de la question du
bien-fondé de cette action, pourquoi Bruxelles menace la Pologne d'une procédure
que tout le monde sait vouée à l'échec? En effet pour aller au bout de cette
procédure il faut l'unanimité des États et la Hongrie a déjà annoncé qu'elle
s'y opposerait. Pourquoi ne pas traduire Varsovie devant la Cour de Justice de
l'Union Européenne (CJUE)? Elle ne nécessite pas l'assentiment des États
membres mais rend par contre des décisions juridiques et non politiques. Est-ce
à dire que l'infraction n'est pas constatée? Qu'il existe uniquement un
«risque»? Certes la Commission a saisi la CJUE, mais pour sic: «la
discrimination fondée sur le sexe en raison de l'introduction d'un âge de
départ à la retraite différent pour les femmes juges (60 ans) et les hommes
juges (65 ans)».
Pour le bien de l'Europe la
Pologne ne doit pas se soumettre.
Nombre de dirigeants des partis
libéraux accusent la Pologne de tous les maux de l'Europe, mais est-ce le PiS
qui est au pouvoir depuis 20 ans? Cette affaire «polonaise» ne serait-elle pas
l'illustration de l'évolution de plus en plus inquiétante de l'Europe? Certains,
comme le Président de la République française, proposent de refonder l'U.E.
Mais pour la remplacer par quoi? Nul ne le sait réellement. Symboliquement ses
fondations avaient déjà été ébranlées par le traitement dégradant imposé au
peuple grec contre sa volonté. Nous ne parlerons pas de l'acronyme désignant
les pays latins contestataires: PIGS (cochons en anglais). S'agit-il désormais
de faire de même avec la Pologne, incarnation vivante de ce ciment chrétien? Il
ne restera alors plus qu'à transformer l'UE en une chappe de plomb remplaçant
fondations, murs et toit. In fine quel est l'objectif? Créer un nouvel Européen
hors sol, sans attache, sans limite dans ses droits? D'affaiblir les états et
nous priver de nos identités?
Ces 3 derniers siècles la Pologne
a survécu aux empires et dictatures qui voulaient la soumettre. Il en sera
sûrement de même de cette nouvelle technocratie libérale. Pourrons-nous en dire
autant?
Par Alain Destexhe
Dimitris Avramopoulos,
commissaire européen, novembre 2017. SIPA. AP22129285_000002
Comme cadeau de Noël, le
commissaire européen aux migrations, le Grec Dimitris Avramopoulos s’est fendu d’un article dans PoliticoEurope, un média
qui joue un rôle croissant dans les cercles européens (« Europe’s
migrants are here to stay », Politico, 18 décembre).
Sa tribune illustre, hélas, tout ce qui est reproché à la Commission
européenne, un mélange d’arrogance bureaucratique, de croyances reposant sur
des dogmes plutôt que sur des faits et un mépris pour le débat démocratique.
« Nous ne pouvons et
ne pourrons jamais stopper les migrations »
« Il est temps de
regarder la vérité en face […] le seul [je souligne]moyen
de faire de nos politiques migratoires des politiques d’avenir est de changer
collectivement notre façon de penser », écrit le commissaire. Stupides
citoyens, surtout ne vous ennuyez plus à penser par vous-mêmes ! Comme
Zeus – un autre Grec – de son mont Olympe, la vérité descend désormais vers les
peuples européens et irradie depuis le dernier étage du Berlaymont, le siège de
la Commission à Bruxelles. Avis aux péquenots : écoutez, taisez-vous et
soumettez-vous car « nous ne pouvons et ne pourrons jamais stopper
les migrations » ! Point final.
Etudes après études,
Eurobaromètre après Eurobaromètre, élections après élections, il est pourtant
clair qu’une majeure partie des citoyens européens est non seulement inquiète
de l’immigration mais souhaite aussi – sinon l’arrêter – au moins la réduire
drastiquement et regagner le contrôle perdu de nos frontières. Mais cette
tendance de fond et ces signaux sont balayés en quelques mots : « l’immigration
est un sujet émotionnel, sensible […] influencé par la montée
du nationalisme, du populisme et de la xénophobie ». Ainsi, toute
velléité de réduire l’immigration est cataloguée comme raciste et ce label
infâme permet de disqualifier toute personne cherchant à s’opposer au
futur Meilleur des mondes rêvé par la Commission Juncker. Fin
du débat.
« Ce n’est pas
seulement un impératif moral mais aussi un impératif économique et
social »
Selon notre Commissaire, ces
approches quasi racistes ont « limité nos possibilités de mettre
en place des politiques intelligentes d’avenir », politiques qui
seront pensées et mises en œuvre par… devinez ? Les institutions
européennes, dans leur grande sagesse, évidemment, bien éloignée de ce
populisme délétère.
Dans un processus démocratique
normal, chaque pays devrait être capable de choisir sa politique migratoire à
travers son Parlement national. Au niveau européen, la volonté clairement
exprimée d’une majorité de la population devrait être prise en compte. Mais
Avramopoulos s’en moque. Selon ce commissaire non élu, « nous tous [je
souligne] avons besoin d’accepter l’immigration, la mobilité et la
diversité comme la nouvelle norme ». Une nouvelle norme, comme la
taille des pommes ou la courbe des concombres, qui serait déterminée par la
Commission. L’immigration ne sera donc pas une question ouverte au débat ;
ce sera une « norme ».
Ainsi, nous devons accepter les
migrants et les réfugiés. « Ce n’est pas seulement un impératif
moral mais aussi un impératif économique et social pour notre continent
vieillissant ». Voici un autre cliché que la Commission essaye, non
sans succès, d’imposer depuis des années sans débat au sein de l’Union
européenne. Combien de fois ai-je lu ou entendu ce poncif ! Dans son
livre Exodus, How migration is changing the world (hélas non
traduit en français), le professeur Paul Collier de l’Université
d’Oxford, s’est replongé dans la littérature scientifique soutenant cette
affirmation. Selon lui, presque tous ces articles reposent sur de nombreux
biais idéologiques plutôt que sur des preuves scientifiquement irréfutables.
Dimitris Avramopoulos est un
homme de droite
Et qu’en est-il des quatre
millions de jeunes Européens, souvent diplômés mais sans emploi ? Ces
dernières années, le taux de chômage des jeunes dans l’Union européenne a
oscillé entre 15 et 20%. N’avons-nous pas, en tant que politiques, un « impératif
moral », pour reprendre les termes d’Avramopoulos, de leur
trouver un emploi et de leur proposer un futur décent avant d’accepter
davantage de nouveaux arrivants ? D’ailleurs en Grèce, ce taux n’est
pas de 17% (la moyenne européenne actuelle) mais explose à plus de 40% !
La plupart des jeunes Grecs ne voient aucun avenir en Grèce et souhaitent
s’expatrier. Faut-il les remplacer par des migrants ou bien accepter cette
migration intra-européenne quasi forcée comme une fatalité ? En Grèce, au
Portugal, en Espagne, en Italie,… nous sommes témoin d’une génération perdue.
Peut-être l’aspect le plus triste
de cet article est que M. Avramopoulos n’est pas un homme de gauche. Il
vient du Parti de la Nouvelle Démocratie, formation de droite. Il est la preuve
vivante que la gauche en est venue à dominer le paysage intellectuel des
institutions européennes et a imposé sa façon de penser. Avec des politiciens
de droite comme ce commissaire ou Angela Merkel, rien de surprenant à la montée
du « populisme » qu’ils sont pourtant les premiers à dénoncer.
Quand les politiques de droite et
du centre abandonnent leurs valeurs et se conforment au mode de pensée de
gauche, trahissant ainsi leurs électeurs, ne jouons pas les étonnés si ces
derniers se réfugient du côté des extrêmes.