dimanche 4 novembre 2018

Islamisme et politique 04.11.2018




perubu | 04/11/2018

Mehdi Derfoufi, chercheur associé à l’université Sorbonne-Nouvelle (Paris-III), « spécialiste des questions post-coloniales au cinéma et dans les jeux vidéo », né à Rabat (Maroc), revient sur le jeu vidéo, sa représentation de la conquête de l’Ouest et la place marginale accordée aux minorités. Il a répondu durant trois heures le mardi 30 octobre aux […]
perubu | 04/11/2018

Le non à l’indépendance l’a emporté dimanche en Nouvelle-Calédonie avec 56,4% des voix contre 43,6% pour le oui lors d’un référendum d’autodétermination historique, a indiqué le Haut-Commissariat. Le score du non se situe cependant très en deçà de ce que les sondages prévoyaient. La participation a été massive, avec 80,63% de votants. Le Figaro
Koba | 04/11/2018

Ces dernières années, trouver la réponse adéquate au déclin démographique de l’Europe est devenu l’une des principales sources de désaccord entre des politiques européens et la Hongrie. Alors que les bureaucrates bruxellois et les libéraux européens considèrent l’immigration comme la solution nécessaire et inévitable, le gouvernement hongrois s’est engagé à augmenter le taux de natalité […]
perubu | 04/11/2018

04/11/18 Le mari d’Asia Bibi, Ashiq Masih, réclame, dans une vidéo, l’asile pour sa famille aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou au Canada alors que le sort de la Pakistanaise, acquittée cette semaine après avoir été condamnée à mort pour blasphème, demeure incertain dans son pays. « Ces pays ont les plus grandes communautés de chrétiens pakistanais » […]

Sebastien de Lyon | 04/11/2018

Le nombre de viols commis par des demandeurs d’asile est en augmentation. Six jeunes Afghans auraient violé une étudiante de 15 ans à Munich. Tout comme le viol collectif commis par au moins huit hommes à Fribourg, dont sept Syriens, l’incident de Munich n’est connu que maintenant, après plusieurs semaines. Mais pourquoi si tard? Est-ce […]
lionel | 04/11/2018

Trois millions de volontaires ont été soumis à des dilemmes auxquels pourraient avoir à faire face les futurs véhicules autonomes, dessinant un véritable portrait moral de l’humanité. « Je me souviens avoir reçu un e-mail d’un monsieur très en colère: la première question qui lui avait été posée était: “Préférez-vous tuer un sans-abri ou deux […]
Sebastien de Lyon | 04/11/2018

La police a fait évacuer, hier à Tours, les locaux dans lesquels des migrants avaient trouvé refuge. La question de leur avenir se pose bruyamment. Les regards sont stupéfaits. L’image des larmes et des cris de colère contrastent face à la froideur des forces de l’ordre. Hier, à Tours, une trentaine de policiers ont évacué […]
Sebastien de Lyon | 04/11/2018

Faux mineurs à Metz : l’un relaxé, pas l’autre Partis d’Afrique avec le même espoir, Damien et Mamadou suivent deux parcours différents pour arriver en France mais échouent devant le même TGI. Respectivement nés à Conakry (Guinée) et à Douala (Cameroun), Mamadou et Damien ne sont pas d’accord avec la justice sur leur âge. Elle les […]

perubu | 04/11/2018

Soupçonnée d’avoir vandalisé une boucherie, un restaurant et une poissonnerie à Lille, Manon -son prénom a été modifié-, antispéciste, sera jugée en décembre pour « dégradation ». Avec Léna, elle milite pour que des « droits fondamentaux » soient accordés aux animaux. Les deux jeunes activistes sont devenues vegans à « l’été 2016 » après avoir visionné des vidéos de maltraitance […]
9h37
perubu | 04/11/2018

L’Espagne est devenue la principale porte d’entrée en Europe pour des personnes originaires d’Afrique de l’Ouest qui tentent de gagner la France. En 2018, l’Espagne est devenue la principale porte d’entrée en Europe. Quelque 50 000 personnes migrantes sont arrivées sur les côtes andalouses depuis le début de l’année, en provenance du Maroc, ce qui […]
9h32
Sebastien de Lyon | 04/11/2018

Comment un tribunal fait le tri entre terrorisme et délinquance ordinaire Les lois antiterroristes peuvent-elles réellement toutes trouver une traduction devant les tribunaux, ou existe-il des difficultés d’application pour certaines d’entre elles, trop larges ou trop floues ? La seizième chambre du tribunal correctionnel de Paris a dû se prononcer le 14 septembre dernier dans […]
Non, l’école française n’est pas la pire du monde
« La Catalogne a été économiquement favorisée par l’Etat espagnol »
Juifs, chrétiens et musulmans: l’Espagne médiévale ne fut pas l’éden multiculturel qu’on croit


Hongrie : + 42% de mariages en 8 ans, « Les bureaucrates bruxellois et les libéraux européens considèrent l’immigration comme la solution nécessaire et inévitable, nous préférons le soutien aux familles »
Par Koba le 04/11/2018
Ces dernières années, trouver la réponse adéquate au déclin démographique de l’Europe est devenu l’une des principales sources de désaccord entre des politiques européens et la Hongrie. Alors que les bureaucrates bruxellois et les libéraux européens considèrent l’immigration comme la solution nécessaire et inévitable, le gouvernement hongrois s’est engagé à augmenter le taux de natalité par des mesures plus efficaces de soutien aux familles.
La prochaine consultation nationale vise à recueillir l’avis des citoyens sur les fondements d’un puissant programme de soutien aux familles, dans l’espoir d’envoyer un message clair : l’Europe ne peut pas être relancée sans renforcer les familles.
Depuis 2010, date à laquelle le gouvernement du Premier ministre Orbán a pris ses fonctions, la politique familiale hongroise a donné des résultats concrets : en 2017, le nombre d’avortements ont chuté de plus d’un tiers, passant de 40 449 à 28 500, les divorces ont nettement diminué (de 23 873 en 2010 à 18 600 en 2017) et le nombre des mariages ont augmenté de 42 %.
Lors d’une conférence de presse, la secrétaire d’État, Csaba Dömötör, a déclaré que dans le questionnaire, les sujets abordés seront les mesures possibles pour soutenir les jeunes couples mariés, les incitations supplémentaires pour élever plus d’enfants et offrir aux femmes qui élèvent des enfants des possibilités d’emploi plus flexibles. M. Dömötör a réitéré que d’ici 2019, les dépenses publiques consacrées aux programmes de politique familiale seront doublées par rapport au montant alloué à des fins similaires en 2010.


Suède : un étudiant d’origine syrienne a violé sa prof dans une salle de classe et a menacé de la kidnapper
Par Koba le 04/11/2018
19h37


Suède – Un étudiant syrien de 19 ans est accusé d’avoir violé une enseignante dans un établissement scolaire de Småland, dans le sud de la Suède.
Le jeune migrant a été arrêté le mois dernier pour avoir attaqué et menacé une enseignante de l’école de Nässjö.
Selon l’agence de presse TT, il aurait fermé la porte de la salle de classe, retenu l’enseignante et a commis des « actes sexuels équivalents à un viol ».
L’élève est également accusé d’abus sexuel et d’avoir menacé via Snapchat de kidnapper l’enseignante et de la forcer à avoir des rapports sexuels.
Il reste en détention en attendant le procès.
Le violeur présumé avait obtenu la nationalité suédoise.

Allemagne: Des experts évoquent « la hausse du nombre de viols » commis par des demandeurs d’asile et l’origine « arabe » des auteurs de viols collectifs
Par Sebastien de Lyon le 04/11/2018
Le nombre de viols commis par des demandeurs d’asile est en augmentation.
Six jeunes Afghans auraient violé une étudiante de 15 ans à Munich. Tout comme le viol collectif commis par au moins huit hommes à Fribourg, dont sept Syriens, l’incident de Munich n’est connu que maintenant, après plusieurs semaines.
Mais pourquoi si tard?
Est-ce que quelque chose doit rester secret? 
Les enquêtes s’avèrent fastidieuses à cause des difficultés linguistiques.
Cinq Afghans présumés, âgés de 20 à 25 ans sont actuellement en détention. Un sixième encore recherché, selon la police de Munich.
Il y a environ quatre semaines, des demandeurs d’asile reconnus auraient agressé sexuellement des jeunes de 15 ans,  sur plusieurs jours et dans plusieurs appartements. Mais pourquoi at-il fallu si longtemps pour que l’affaire soit rendue publique?
Le journaliste de RTL, Kyrill Ring, a interviewé le criminologue Christian Pfeiffer. Et que dit l’expert?
« Toutes les infractions liées aux gangs nécessitent beaucoup plus d’efforts, en particulier lorsqu’il s’agit de suspects étrangers pour lesquels vous ne comprenez pas la langue immédiatement, pour lesquels vous avez besoin d’interprètes, pour lesquels vous devez également explorer les réseaux, lorsque vous soupçonnez que quelque chose est délibérément dissimulé. »
 » faux, la politique n’interfère pas « , a déclaré Pfeiffer.
(NOTA: En réf. à l’allusion « Est-ce que quelque chose doit rester secret? »)
Pour ce qui est du viol de masse à Fribourg, il a fallu deux semaines, jusqu’à ce que les faits soient rendus publics.
Les experts notent que le phénomène du viol collectif par des demandeurs d’asile en Allemagne est en augmentation.
Viols collectifs:
Arnold Plickert, expert en matière de sécurité: « Nous ne connaissions pas ces crimes de groupe avant 2015, qui sont arrivés ici avec la vague de réfugiés et en grande partie, perpétrés ici, par des hommes arabes, de par leur culture »
Dans le cas de Munich, les faits évoqués sont encore minces, même des semaines plus tard. C’est une déclaration contre une déclaration. Le principal responsable affirme que le sexe était consensuel.












































































































































































































Ai-je le droit de blasphémer Dieu ?
On a coutume de dire que dimanche est le jour du seigneur, et voilà que ce matin l’ami Roland Perez, notre chroniqueur droit, pose la question de savoir si, usant de la liberté d’expression dévolue à tout un chacun, du moins dans les pays démocratiques comme en Europe, on a le droit de blasphémer Dieu ? Et on va voir que la réponse est surprenante !
Jeudi 25 octobre, la cour européenne des droits de l’homme a confirmé la condamnation d’une Autrichienne qui l’avait saisie, alors que dans son pays, la justice l’avait condamnée pour avoir qualifié Mahomet de pédophile ! Ça mérite, je vous l’accorde, quelques explications.
Oui Roland vous allez nous les donner. Mais tout d’abord arrêtez-moi si je me trompe, le délit de blasphème n’existe pas dans notre droit français et dans la plupart des pays européen ? Et d’ailleurs rappelez-nous ce qu’est exactement le délit de blasphème.
C’est littéralement une injure faite à Dieu. Les trois grandes religions répriment évidemment toutes formes d’injures et de critiques, le Coran l’étend même au Prophète si ce n’est qu’en fait seuls les croyants devraient être concernés. Mais ensuite le blasphème a été vu comme une menace potentielle pour toutes les sociétés d’où la création en droit public de ce délit et il a fallu attendre la loi sur la presse en 1881 en France, pour bannir de notre droit ce délit.
Mais en Europe, plusieurs pays considèrent encore l’offense à une religion comme un délit, preuve en est l’Allemagne qui sanctionne l’insulte aux croyances religieuses, en Pologne et en Italie, l’outrage aux divinités est également réprimé et dans une partie de notre France l’Alsace Moselle jusqu’à il y a encore deux ans ce délit était prévu dans le droit local sans être appliqué.
Et vous nous dites ce matin Roland, que la Cour européenne des droits de l’homme vient de rendre une décision consacrant en quelque sorte de nouveau, l’existence du délit de blasphème ?
Oui, je vous donne les faits de cette affaire, : en Autriche lors d’une conférence autour de la connaissance élémentaire de l’Islam, la conférencière s’exprimant à propos du mariage du prophète Mahomet avec une fillette de 6 ans, elle poursuit et je cite les propos : « sa consommation sexuelle à l’âge de 9 ans, comment appelons-nous cela, si ce n’est de la pédophilie ? ». Condamnée pour ses propos jugés injurieux dans son pays, les faits remontent à 2012, elle attendait de la cour européenne qu’elle condamne l’Autriche pour avoir jugée ainsi.
Et donc cette décision de la cour européenne est une très mauvaise surprise pour cette Autrichienne. Mais quels sont justement les motifs avancés pour faire ressurgir ce délit de blasphème ?
Préserver la paix religieuse et la tolérance mutuelle sont les arguments avancés par la cour avec à la clé cette idée que tous les pays d’Europe auraient l’obligation d’assurer la coexistence pacifique de toutes les religions et de ceux n’appartenant à aucune religion en garantissant la tolérance mutuelle. Dans le cas de la conférencière, il lui a été reproché un jugement de valeur, car elle n’aurait pas restitué dans leur contexte historique les faits, et rappelé par exemple que le prophète avait été également marié avec une épouse bien plus âgée que lui.
Quoiqu’il en soit la liberté de penser en matière religieuse devrait être au centre de l’appel de cette décision devant la grande chambre de la cour européenne.


Non, l’école française n’est pas la pire du monde
Par Frédéric Constant  - 2 novembre 2018

QI, handicap culturel, fossé social : l’institution scolaire ne peut corriger toutes les inégalités de départ. Pourtant, certains lui demandent l’impossible. Mise au point.

On connaît la chanson : les inégalités scolaires s’accroissent ; l’école française accroît les inégalités scolaires, étant plus inégale que les autres. De ces trois constats, souvent éplorés, parfois révoltés, seul le premier est à peu près vérifié. Quels que soient l’âge et la matière – mathématiques ou maîtrise de l’écrit -, les écarts entre les meilleurs et les plus faibles se creusent sans que les meilleurs progressent pour autant ; cela dépend et c’est aussi bien l’amélioration de l’efficacité du système (en permettant à tous de donner le meilleur d’eux-mêmes les élèves favorisés apprennent plus) que sa détérioration (en étant moins performante l’école va laisser plus de poids aux transmissions familiales) ou qu’un effet de composition (l’évolution des flux migratoires notamment) qui pourraient en être la cause.

L’école face aux inégalités de QI
En revanche, alors que la scolarité s’accompagne d’un accroissement des écarts, il est aberrant d’en imputer la responsabilité au système éducatif. Prétend-on vraiment que s’il n’y avait pas de scolarisation les écarts diminueraient ? Le QI et les résultats scolaires sont pour une large part génétiques et héréditaires (entre 30 % et 70 % selon les sources) et le capital socio-culturel se transmet aussi bien que le capital économique. Ces deux puissants facteurs continuent de produire leurs effets tout au long d’une scolarité qui ne peut que partiellement les compenser.
L’objectif d’une disparition de ces inégalités est donc une chimère. Elle est de surcroît une chimère pernicieuse pour deux raisons : d’une part, parce qu’en insinuant qu’il serait possible de les annihiler, on véhicule aussi l’idée que le système est biaisé en faveur des possédants, ce qui nourrit les ressentiments qu’on constate tous les jours . D’autre part, parce qu’inférer de la seule constatation des inégalités d’arrivée la preuve d’une discrimination c’est inciter à des politiques alternatives non seulement coûteuses mais inefficaces voire néfastes : Les méthodes idéovisuelles d’apprentissage de la lecture, les expérimentations et les innovations incontrôlées ont souvent pour premières victimes les enfants des milieux défavorisés.
Mais dès lors qu’il subsistera toujours des écarts, quels objectifs fixer et comment paramétrer les efforts de promotion des élèves défavorisés ? Les comparaisons internationales peuvent fournir des éléments de parangonnage. Encore faut-il ne pas leur faire dire n’importe quoi…Et les discours tenus autour des évaluations PISA sont à cet égard inquiétants : la France depuis au moins les trois dernières livraisons serait le pays des inégalités. Il est très curieux que l’Allemagne qui scolarise les enfants tardivement et met en œuvre des filières précoces d’orientation en ressorte plus égalitaire avec il est vrai un profil migratoire différent.
Ce que dit l’OCDE
Quand on y va voir d’un peu plus près, c’est une autre histoire. A l’appui de cette condamnation sans équivoque, on nous sert, en effet, la plus défavorable des corrélations et indicateurs calculés. Cette corrélation emblématique fait bon marché du caractère multifactoriel des apprentissages et attribue aux seules différences de statut économique, social et culturel (SESC) la production des inégalités en ignorant notamment les facteurs ethniques.
Or la France se caractérise à la fois par l’importance de ses flux migratoires et par leurs origines : les immigrés d’Afrique ont des résultats scolaires inférieurs aux autres immigrés et à la population majoritaire après prise en compte du statut socio-économique.
On confond donc potentiellement effet de rendement de l’école et effet de composition de ses publics. Et lorsque l’OCDE intègre l’ensemble des facteurs explicatifs et les met en relation avec les inégalités de résultats, le poids du SESC n’est pas très différent en France de la moyenne et significativement plus faible…qu’en Finlande qui nous était encore il y a peu donnée en exemple pour la pertinence de ses méthodes pédagogiques. Il est extrêmement troublant que ces données ne soient pas publiées mais seulement accessibles.
Pour ce qui concerne les immigrés, les données OCDE montrent une autre réalité : si les immigrés de première génération ont des performances inférieures en France, cet écart s’y réduit beaucoup plus fortement qu’ailleurs pour ceux de seconde génération, si bien qu’il n’est pas exclu que l’école républicaine parvienne tout de même à certains résultats !

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Violences : l’école n’est que le reflet de la société
Il ne sert à rien de réformer l'école sans réformer la société
 - 30 octobre 2018
Violences du 1er mai 2018 à Paris. SIPA. 00857010_000013

Les violences dont sont victimes profs et élèves à l’école ne sont pas le fait de l’école, mais celui d’une société qui transpire la brutalité.

Dans le domaine éducatif, chacun sait qu’il faut s’y prendre le plus tôt possible, et avec une ferme autorité, pour ancrer dans l’esprit et les pratiques des enfants les habitudes et les réflexes les plus sains et les plus indispensables à la vie commune – familiale, amicale, sociale. Qu’il faille dans le même mouvement respecter la nature singulière de chaque enfant, et ne rien faire qui puisse entraver son adaptation au monde nouveau qui l’attend, est une évidence morale, même si pour les adultes la synthèse relève d’une quasi aporie. Ce défi devient crucial lorsque les enfants prennent le dessus sur les adultes, mais le principe reste déterminant. C’est pourquoi, de toute la profondeur de sa compréhension, Hannah Arendt pouvait porter, dans Reflections on Little Rock, ces jugements objectifs, tranchés et assez cruels :
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« L’éducation progressiste, […] en abolissant l’autorité des adultes, nie implicitement leur responsabilité à l’égard du monde dans lequel ils ont fait naître leurs enfants, et refuse le devoir de les guider dans ce monde. »
Et dans La Crise de la culture :
« Avec la conception et la naissance, les parents n’ont pas seulement donné la vie à leurs enfants ; ils les ont en même temps introduits dans un monde. En les éduquant, ils assument la responsabilité de la vie et du développement de l’enfant, mais aussi celle de la continuité du monde. Ces deux responsabilités ne coïncident aucunement et peuvent même entrer en conflit. En un certain sens, cette responsabilité du développement de l’enfant va contre le monde : l’enfant a besoin d’être tout particulièrement protégé et soigné pour éviter que le monde puisse le détruire. Mais ce monde aussi a besoin d’une protection qui l’empêche d’être dévasté et détruit par la vague des nouveaux venus qui déferle sur lui à chaque nouvelle génération. » « L’école n’est en aucune façon le monde », mais « l’institution qui s’intercale entre le monde et le domaine privé que constitue le foyer pour permettre la transition entre la famille et le monde ». « Vis-à-vis des jeunes, les éducateurs font figure de représentants d’un monde dont […] ils doivent assumer la responsabilité, même si, secrètement ou ouvertement, ils le souhaitent différent de ce qu’il est. Cette responsabilité n’est pas imposée arbitrairement aux éducateurs ; elle est implicite du fait que les jeunes sont introduits par les adultes dans un monde en perpétuel changement. Qui refuse d’assumer cette responsabilité du monde ne devrait ni avoir d’enfant, ni avoir le droit de prendre part à leur éducation. »
L’école crève de ses lâchetés…
Durant les quarante-deux années qu’a duré ma carrière professionnelle, j’ai exercé successivement les fonctions de professeur de lettres, de proviseur de cités scolaires, d’inspecteur général, de conseiller de ministre. J’ai beaucoup publié, notamment sur la pratique éthique et professionnelle du chef d’établissement scolaire. J’ai donc eu l’occasion de témoigner de la qualité, de l’écoute et du courage de belles personnalités de notre système éducatif, auxquelles je dois beaucoup, – mais surtout qui ont permis à notre école de résister aux coups de boutoir et aux lâchetés qui ont jalonné son existence, et qui hypothèquent lourdement son avenir. Il s’agit, en particulier, de la dévalorisation et du désinvestissement de la pratique des sanctions, sinon même des obstacles fréquemment mis à leur application par la hiérarchie supérieure, « pour des raisons politiques », comme on me l’a souvent signifié, parfois de façon risible.
Je n’en fournirai ici que deux brèves illustrations, concernant la conduite inadmissible, en l’occurrence, d’adultes en charge d’élèves (l’équivalent se retrouve naturellement quant au comportement d’élèves dans les textes et structures officiels, comme dans les instructions circonstancielles émanant des autorités supérieures).
L’intendant d’un des lycées que j’ai dirigés, homme d’une haute valeur professionnelle et morale, excédé par l’incompétence, la mauvaise volonté et le comportement asocial d’un personnel pourtant essentiel à la bonne marche de son service, rédige à son sujet un rapport parfaitement objectif et circonstancié. Il le signe. J’y ajoute, manuscrite, la mention suivante : « En accord total avec l’ensemble des termes de ce rapport », je contresigne le document et l’adresse à mon supérieur hiérarchique. Ce dernier, quelques jours plus tard, me joint au téléphone et me pose immédiatement la question suivante : « Dites-moi : il est comment, votre intendant ? »
Je résume le deuxième épisode. Pour me faire enfin céder à sa demande de suppression d’un rapport très sévère que j’avais rédigé sur un personnel « protégé » par sa fonction syndicale, mon supérieur hiérarchique me convoque toutes affaires cessantes dans son bureau. Devant mon refus d’obtempérer à son injonction répétée, et faute d’arguments recevables, il me lance tout à coup : « Je sais que vous êtes un proviseur reconnu, mais on me dit que les résultats de votre lycée sont en baisse ! » (ce qui, en l’occurrence, n’était pas le cas)
…qui sont celles de la société
Ce type de comportement, assez induré, peut en partie expliquer l’état de déréliction croissante où se trouve notre système éducatif, quant à son niveau de qualité et de réussite : les comparaisons internationales en fournissent, chaque année davantage, une preuve indiscutable. Mais c’est aussi le cas des questions de sécurité, morale comme physique, et de discipline : la comptabilité officielle des incidents journaliers, par hypothèse incomplète, en atteste amplement. – Et cependant, le fond de la question n’est plus du tout celui-là.
En réalité, dans la période si troublée et désaxée que nous connaissons aujourd’hui, il est proprement impossible, impensable même, que notre école puisse se rétablir par elle-même : cette crise s’inscrit dans un contexte bien plus large. J’aimerais pouvoir dire qu’il y suffirait que n’y soient nommés que des responsables académiques et départementaux, mais d’abord nationaux, hyper déterminés à la redresser, dotés du courage et de l’énergie nécessaires, et surtout soutenus par leur ministre. Ce n’est hélas plus du tout la question ! En effet, l’Education nationale, aujourd’hui, ne constitue plus un domaine séparé, comme par miracle, du reste de la communauté nationale, et de toutes les autres responsabilités de l’Etat ! Si elle l’a jamais été, l’école n’est plus ce lieu quasi sacré, où n’entrent ni les disputes ni la violence de la vie sociale et politique : chaque jour qui passe montre désormais, sur quasiment tous les plans, y compris les plus triviaux, que notre vie sociale et politique et la réalité de notre institution scolaire sont étroitement imbriquées. Et que donc leur destinée même sera conjointe, dans notre pays, pour le pire ou pour le meilleur.
De ce fait fondamental découle une évidence aveuglante. La priorité politique absolue est que l’Etat, sous toutes ses formes et par toutes ses forces, se fasse enfin respecter, sur la totalité des territoires de notre pays, dans tous les domaines de la vie civile et sociale, et y assure l’ordre républicain et la sécurité, matrices de toutes les libertés publiques et privées. Pour nos dirigeants, faire mine d’essayer, ou même essayer loyalement de rétablir, dans la seule éducation, l’ordre et la sécurité nécessaires aux études, comme si cela pouvait s’effectuer indépendamment de ses autres fonctions régaliennes, s’avèrera pour l’école comme pour le pays tout entier d’une parfaite et coûteuse inutilité – temps et énergie gaspillés en pure perte, voire pire. Tant que des voitures seront brûlées sur un terrain vague ou sur un parking en banlieue, que de modestes habitants des cités seront forcés pour rentrer chez eux de montrer patte blanche à des trafiquants de stupéfiants, que la police, les pompiers ou des soignants ne pourront pas pénétrer en sécurité dans ces zones perdues de la République, que le voile féminin intégral sera de facto toléré sur certaines parties du territoire, il serait absolument inutile, et parfaitement ridicule, vaste et vain gaspillage des deniers de l’Etat, comme de la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics, que l’Etat tente, fût-ce à grands frais, de remettre notre école sur la bonne voie : ce serait cataplasme sur jambe de bois.
« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »
Sur ce champ crucial, déterminant, je veux citer ces propos de Raymond Aron, comme si souvent d’une clairvoyance et d’une honnêteté intellectuelle hors de pair. Ils pourraient s’appliquer à la très grave situation où se trouvent actuellement la France et notre pauvre Europe :
« Si des pères, des maîtres, des supérieurs hiérarchiques, des prêtres n’inspirent plus de respect, il ne subsiste que la puissance nue ou l’anarchie. »1
« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »2
Et peut-être surtout ce dur constat, si actuel :
« Pendant ces années de décadence3, […] quel gouvernement pouvait sortir de la compétition entre des partis qui se perdaient dans des intrigues parlementaires et qui refusaient d’ouvrir les yeux ? Baisse de la natalité, baisse de la production, effondrement de la volonté nationale : il m’est arrivé par instants de penser, peut-être de dire tout haut : s’il faut un régime autoritaire pour sauver la France, soit, acceptons-le tout en le détestant. »4
Pour qu’un esprit tel que Raymond Aron, si affectivement et intellectuellement attaché aux libertés publiques et privées, en vienne à se résoudre, certes douloureusement, à leur réduction, il fallait que la menace fût exceptionnellement grave et imminente. Et elle l’était ! C’est à nous aujourd’hui qu’il incombe de prendre la mesure des dangers que traversent la France et l’Europe, pour les affronter, avec la lucidité, la détermination et les moyens nécessaires.

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Au secours, les années 30 reviennent… dans la bouche de Macron
La ficelle est grosse et inefficace
Par Anne-Sophie Chazaud  - 2 novembre 2018

Dans un entretien au quotidien Ouest France, le président de la République a comparé l’époque actuelle avec la montée du péril fasciste des années 1930. On ne saurait dire ce qui de la naïveté (pour rester respectueux) ou de la grossière manipulation l’emporte. Question subsidiaire : qui peut encore être dupe de ce procédé, sinon quelques malheureux castors égarés en plein champ ?


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« Je suis frappé par la ressemblance entre le moment que nous vivons et celui de l’entre-deux-guerres » a donc déclaré Emmanuel Macron. Et le voilà amalgamer dans un même fourre-tout anachronique la désormais célèbre « lèpre nationaliste » et le spectre fictionnel d’une perte de « souveraineté » de l’Europe. Jusqu’ici, on ignorait que cette souveraineté eût jamais existé et encore moins qu’elle avait été désintégrée dans les années 30.
L’imposture du front républicain
Fustigeant le « repli nationaliste » (ne jamais, au Dictionnaire des idées reçues, oublier d’accoler les deux termes), le chef de l’Etat ne manque pas d’évoquer les fameuses peurs qui agiteraient les nations, dans un propos qui serait pour le coup lui-même effrayant et vaguement apocalyptique s’il n’était pas drôle, et qui permet de se demander qui des peuples européens ou de certaines de leurs élites déconnectées se plaisent à agiter les peurs. Une technique usée jusqu’à la corde qui a permis aux actuelles élites de se maintenir au pouvoir  grâce au « barrage » dit « républicain »
On ne pensait pas que quiconque d’un peu réfléchi oserait encore pratiquer la fameuse comparaison entre tel ou tel climat socio-politique et les années 30, leurs heures sombres et autres effrayants bruits de bottes tant cette figure rhétorique de l’antifascisme post-moderne est éculée..
Or, le problème avec les analogies historiques qui font bondir à juste titre n’importe quel historien scrupuleux, c’est que, comme l’indiquait Paul Valéry « L’histoire justifie ce que l’on veut. Elle n’enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout et donne des exemples de tout ». Outre les approximations contenues dans le propos du président, le piège analogique se referme sur son émetteur, puisque, si l’on commence à entrer dans le détail desdites années 1930, la comparaison tant exploitée pourrait bien se retourner dans le sens contraire de celui souhaité.
On peut faire dire n’importe quoi au passé
Si l’on considère par exemple le fait majeur de la sinistre période, à savoir la persécution antisémite, et qu’on la reporte à l’époque actuelle, on pourrait alors se demander ce qui est véritablement mis en place pour lutter contre les promoteurs contemporains, principalement islamistes, de cet antisémitisme. Où est, par exemple, le fameux discours sur la laïcité, républicain et ferme, tant attendu depuis des mois ? S’est-il perdu dans les brumes accommodantes du dialogue qu’en d’autres époques on qualifiait de collaboration?
On le voit, chacun peut faire dire ce qu’il veut à n’importe quoi au grand jeu de la manipulation des interprétations.  Pareillement, le peuple supposé nationaliste et replié sur lui-même avait voté en 1936 en faveur du Front Populaire, dont de nombreuses conquêtes en matière de droit social et de droit du travail sont des obstacles clairs face au néo-libéralisme actuellement au pouvoir et  à la conduite des affaires européennes. La haute finance, les grands entrepreneurs ne se sont pas distingués par leur esprit de résistance, c’est le moins qu’on puisse dire, quand le peuple fumant des cibiches et roulant probablement déjà à l’essence polluante permettait, lui, l’accession au pouvoir d’un Juif en la personne de Léon Blum, alors même que beaucoup d’élites n’hésitaient pas à scander « plutôt Hitler que le Front populaire ». Pour être juste, ajoutons que c’est la chambre du Front populaire qui votera les pleins pouvoirs à Pétain en 1940. Une énième preuve que l’histoire est complexe.
D’une Allemagne l’autre
D’autres pourraient se demander où est le Churchill contemporain, celui qui avait compris que sans résistance on n’évitait ni le déshonneur ni la guerre, face à la déferlante totalitaire et obscurantiste qui recouvre de son voile noir des pans croissants de la planète. Par quelles actions les élites européennes luttent-elles contre cette blitzkrieg contemporaine ? Comment par ailleurs comparer une époque où l’Allemagne avait été diminuée et humiliée avec une période où au contraire elle est en situation hégémonique au point d’étouffer ses partenaires européens ?
Enfin, si Emmanuel Macron est fasciné par les ressemblances hypothétiques avec les années 1930, d’autres pourraient vouloir pareillement, au gré de leurs convictions idéologiques personnelles et de leurs petites lubies subjectives, vouloir comparer la période actuelle avec celle de la chute de l’Empire romain, ou encore avec les invasions barbares, la Grande Inquisition, ou l’entrisme guerrier d’Al-Andalus
Passéistes vs progressistes, la grande mystification
On le voit, toutes ces comparaisons ne sont pas raison, ou alors il faudrait les accepter toutes au même niveau de légitimité, ce qui bien sûr est inenvisageable puisque le but ici est de livrer une vision binaire et manichéenne de la situation actuelle afin de criminaliser toute critique de l’Union européenne et de l’ouverture des frontières qui la caractérise.
Par-delà la grossière manipulation visant à faire passer les résistants d’aujourd’hui pour de dangereux passéistes et les accommodants d’aujourd’hui pour d’éminents progressistes, il est enfin une curieuse et naïve croyance qui voudrait que l’on tire de quelconques leçons de l’Histoire. Outre que c’est un sujet régulièrement traité depuis des décennies dans les dissertations du bac, on rappellera donc, avec Louis-Ferdinand Céline, que « l’histoire ne repasse pas les plats ».

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Juifs, chrétiens et musulmans: l’Espagne médiévale ne fut pas l’éden multiculturel qu’on croit
Entretien avec l'historien espagnol Serafín Fanjul (2/2)
Par Daoud Boughezala  - 15 novembre 2017
Averroès faisant amende honorable devant la mosquée de Fès, vers 1195. AFP. COLL. PRIVÉE / LEEMAGE.

Professeur de littérature arabe et historien, Serafin Fanjul vient de publier une somme magistrale, Al-Andalus. L’invention d’un mythe (L’Artilleur, 2017). En développant une réflexion poussée sur l’identité nationale espagnole, il bat en brèche le mythe d’un paradis multiculturel mis en place par les huit siècles de domination musulmane. Loin d’une symbiose entre chrétiens, juifs et musulmans, Al-Andalus formait une société foncièrement inégalitaire, guerroyant contre les royaumes chrétiens du Nord, soumettant les minorités en son sein. Entretien (2/2)


Causeur. Dans votre essai Al-Andalus. L’invention d’un mythe (L’Artilleur, 2017), vous déconstruisez l’image idyllique de l’Espagne musulmane que certains intellectuels espagnols ont construite a posteriori. En comparant certaines périodes d’Al-Andalus à l’Afrique du Sud sous l’Apartheid, ne commettez-vous pas un anachronisme ?
Serafin Fanjul. Je n’établis pas un parallèle entre al-Andalus et l’apartheid sud-africain, je dis seulement qu’il y a une certaine similitude entre les deux. Et en vérité, cette similitude existe en raison de la séparation des communautés religieuses et raciales, des droits très supérieurs accordés aux musulmans et au-contraire des statuts inférieurs qu’avaient les membres des deux autres communautés. Il y avait aussi entre les musulmans des différences de degré de noblesse et de prééminence selon leur appartenance au groupe des berbères, des muladis (les chrétiens d’origine hispanique convertis à l’islam), des arabes « baladis » (les premiers à avoir pénétré dans la péninsule, en 711) et des arabes commandés par Baldj, arrivés en 740.
Dans al-Andalus, les personnes n’avaient de valeur et n’étaient des sujets de droit qu’en tant que membres d’une communauté et non pas en tant qu’individus. La pierre de touche était évidemment les mariages mixtes. Il était impossible pour une musulmane de se marier avec un chrétien ou un juif, et il était même difficile pour une femme « arabe  d’origine » de se marier avec un muladi (un chrétien converti à l’islam) en vertu du concept de Kafa’a (proportionnalité), et dans la mesure ou celle-ci était considérée comme ayant un sang de niveau supérieur. Quand la domination politique et militaire a été inversée et que les musulmans sont devenus minoritaires, la situation a été maintenue mais cette fois au détriment de ces derniers.
Les textes écrits dans al-Andalus abondent en allusions discriminatoires et insultantes contre les chrétiens et les juifs. Ces derniers se sont matérialisées, pour ne citer que quelques exemples,  par la persécution antichrétienne du IXe siècle à Cordoue, par le pogrom de 1066 à Grenade, par les déportations de juifs au Maroc au XIIe siècle, ou par les fuites massives de chrétiens et de juifs vers l’Espagne chrétienne dès le IXe siècle.
Vous décrivez un choc des civilisations et d’un état de guerre quasi-permanents entre chrétiens, juifs et musulmans…
La première fois que j’ai lu l’expression « choc des civilisations » ce n’est pas sous la plume d’Huntington, mais dans l’œuvre majeure de Fernand Braudel La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II, dont la publication remonte à 1949. Je crois interpréter correctement Braudel en affirmant pour ma part, en accord avec lui, que la langue nous égare en suggérant derrière le syntagme « choc des civilisations » l’idée de grandes confrontations guerrières. Il ne s’agit pas du tout de cela, mais plutôt de confrontations quotidiennes à petite échelle, réitératives, dans la vie courante, entre des cosmogonies différentes, des notions de base, des conceptions du monde dissemblables, des morales civiques ou sexuelles, des concepts politiques élémentaires, mais qui sont déterminants dans la relation des êtres humains avec le pouvoir : la soumission totale ou l’exercice de droits et la conscience de posséder des droits. Et cela sans entrer dans des questions plus concrètes comme la position de la femme ou celle des minorités religieuses, qui heureusement ont été depuis longtemps dépassées en Europe, alors que dans les pays musulmans elles demeurent intactes ou suscitent des convulsions graves lorsqu’elles sont débattues.
Je n’ai jamais écrit qu’il y avait un état de guerre permanent dans la péninsule ibérique médiévale entre deux blocs antagoniques et irréductibles. Et cela parce que je sais parfaitement que cela n’a pas été le cas jusqu’à ce que la Reconquête se consolide comme grand projet national au XIIe et XIIIe siècles. Je sais aussi, bien sûr, qu’il y a encore eu par la suite des alliances croisées avec des royaumes de taïfas musulmans, des interventions de troupes chrétiennes (même franques) ou musulmanes contre des princes chrétiens comme cela avait été le cas depuis le IXe siècle.
Le monde d’Averroès et Maimonide était-il si apocalyptique ?
Je ne crois pas qu’il soit très heureux de citer Averroès et Maïmonide comme deux exemples de liberté de pensée et de confraternité des communautés dans al-Andalus. Averroès était un néoplatonicien qui a été persécuté en tant que libre penseur par les Almohades. Quant au juif Maïmonide, il a été obligé de s’islamiser. Exilé au Maroc avec sa famille, il est allé ensuite en Égypte où il est retourné au judaïsme. Découvert et dénoncé par un habitant d’al-Andalus, il a été accusé d’apostasie et n’a pu finalement sauver sa vie que grâce à l’intervention du cadi Ayyad. Maïmonide expose bien sa position et son état d’esprit à l’égard des chrétiens et des musulmans dans son  Épitre au Yémen.
Comment en arrivez-vous à justifier politiquement l’expulsion des juifs et des morisques (maures convertis au christianisme) de l’Espagne chrétienne ?
J’essaie seulement d’expliquer ces événements. Nous ne pouvons pas nous limiter à voir les événements du passé comme bons ou mauvais, alors qu’ils sont tout simplement irréversibles. La seule chose que nous puissions faire, c’est de nous en rapprocher le plus honnêtement possible pour essayer de les comprendre. Et dans le cas ou notre bonne foi et notre volonté régénératrice sont sincères, il nous faut essayer de ne pas les répéter.
C’est malheureusement toute l’Europe médiévale qui s’est appliquée à marginaliser et persécuter les juifs, avec de fréquents massacres et des mises à sac de quartiers juifs. Dans l’Espagne chrétienne, ce mouvement s’est produit plus tard. Si en 1212 les troupes castillanes d’Alphonse VIII ont protégé les juifs de Tolède contre les francs venus à cette occasion, en revanche, en 1348 et 1391, la situation était radicalement différente. Il y a eu alors une grande quantité de morts, d’exactions et de conversions forcées. Les juifs convertis au christianisme et ceux qui avaient maintenu leur foi, après les tentatives de conversion massive des années 1408-1415, ont cependant coexisté tout au long du XVe siècle. Au début, les Rois catholiques ont essayé de faire en sorte que les juifs et les mudéjares (musulmans) demeurent sur les lieux où ils vivaient et conservent leurs fonctions. Ils dépendaient directement du roi, payaient un impôt spécial de capitation et recevaient en échange une protection face a la société, mais toujours avec l’idée qu’à long terme on parviendrait à les convertir. Au XIIe et XIIIe siècles les communautés juives de l’Espagne chrétienne avaient augmenté considérablement alors que celles d’al-Andalus en étaient venues à disparaitre en raison de l’action des Almohades. A la même époque, la persécution des juifs redoublait en Europe. Cette attitude générale a fini par atteindre l’Espagne, stimulée par le fait que quelques juifs se livraient à l’usure et participaient au recouvrement des impôts, motifs qui irritaient les populations exploitées les plus pauvres et les incitaient à des réactions aussi brutales que totalement injustes. Jean Ier, en 1390, et Isabelle Ière, en 1477, avaient dû freiner les ardeurs belliqueuses des membres les plus exaltés du clergé.
Quelle était la situation des sujets juifs du royaume catholique de Castille ?
À  la veille de l’expulsion de 1492, il y avait  environ cent mille juifs dans la couronne de Castille et une vingtaine de mille en Aragon. Une minorité était riche, mais la majorité ne l’était pas (il s’agissait d’agriculteurs, d’éleveurs, d’horticulteurs, d’artisans du textile, du cuir et des métaux). La protection dans les terres des seigneurs de la noblesse était plus directe et plus efficace que celle du domaine royal. Les juifs y exerçaient des professions libérales comme la médecine en dépit des interdits. Parmi les juifs proches des Rois catholiques il y avait notamment Abraham Seneor, grand rabbin de Castille, Mayr Melamed, Isaac Abravanel, Abraham et Vidal Bienveniste. L’attitude des Rois catholiques n’était pas antijuive mais elle ne contribua pas non plus à éliminer l’hostilité populaire ni à contredire les arguments doctrinaux contre les juifs. Le plus grand connaisseur actuel de l’Espagne des Rois catholiques, Miguel Ángel Ladero Quesada, écarte les motifs économiques pour expliquer l’expulsion (qui était en fait plutôt préjudiciable pour les revenus de la Couronne). Il  l’attribue plutôt à la volonté de résoudre le problème des convertis judaïsant, problème qui avait déjà justifié l’établissement de la nouvelle inquisition en 1478. On croyait alors que les juifs, par leur seule présence et en raison des liens familiaux qui les unissaient avec de nombreux convertis, contribuaient à empêcher l’assimilation ou l’absorption. D’autre part, comme les juifs n’étaient pas chrétiens, ils ne pouvaient pas faire l’objet d’enquêtes de la part de l’Inquisition. Le climat d’euphorie de la chrétienté triomphante après la prise de Grenade en 1492, aida les inquisiteurs à convaincre les Rois catholiques de la nécessité de l’expulsion. D’autant qu’à cette époque de plein affermissement du pouvoir royal, une idée se répandait de plus en plus: celle selon laquelle seule l’homogénéité de la foi pouvait garantir la cohésion du corps social, indispensable au bon fonctionnement de la monarchie. Nous savons aujourd’hui que ces idées étaient injustes et erronées, mais elles avaient alors cours dans toute l’Europe. Pour s’en convaincre, il suffit de rappeler l’antisémitisme féroce de Luther, la persécution des huguenots, des protestants en Espagne, en Italie et en France, ou des catholiques dans les différents pays d’Europe du nord au cours des siècles suivants.
Quant aux musulmans, je crois savoir qu’ils n’ont pas été épargnés par l’Espagne catholique…
La politique de la Couronne envers les musulmans a été erratique et souvent contradictoire. Les mudéjares (musulmans sous la domination des chrétiens) avaient subsisté depuis le XIIIe siècle bien qu’en nombre décroissant. L’expulsion comme châtiment pour rébellion (1264) à Niebla et Murcie, l’exil volontaire pour ne pas être soumis au pouvoir chrétien et l’attraction qu’exerçait le royaume de Grenade, avaient finalement vidé l’Andalousie occidentale de ses musulmans. Après la prise de Grenade, les mudéjares ont été autorisés à émigrer ou à rester en conservant leur religion, mais en 1498 les pressions pour qu’ils se convertissent ont été tellement fortes qu’elles ont provoqué la rébellion des Alpujarras (1499-1502) avec pour conséquence le décret de baptême forcé ou l’expulsion. La fuite volontaire et clandestine de morisques s’est ensuite accrue en raison des fatwas et des exhortations des jurisconsultes musulmans (al-Wansharisi, ibn Yuma’a) qui condamnaient la permanence en territoire chrétien pour ne pas s’exposer au danger de perdre la foi et de finir christianisé. En 1526, une nouvelle rébellion de morisques (crypto-musulmans officiellement chrétiens) a éclaté dans la Sierra d’Espadan et l’explosion finale, le grand soulèvement de Grenade, Almeria et Malaga, s’est produit en 1568. Dès le début du XVIe siècle, il a été interdit aux morisques de quitter l’Espagne en raison des effets négatifs que cela pouvait avoir sur les caisses de la Couronne. Il leur a été également interdit de s’approcher des côtes à moins de dix kilomètres pour éviter leur fuite ou les empêcher de collaborer activement avec les pirates barbaresques et turcs qui dévastaient le littoral espagnol.
Et la population catholique, était-elle aussi hostile que la Couronne aux ex-musulmans devenus morisques ?
L’hostilité de la population chrétienne à l’égard des morisques n’a fait qu’augmenter au cours des événements. Elle a culminé avec la prise de conscience de leur refus de s’intégrer dans la société majoritaire. A nouveau, le peuple et le bas clergé ont exacerbé leur antipathie pour les morisques, ce qui en retour a renforcé la haine et le rejet par ces derniers de la majorité dominante, un cercle vicieux qui ne pouvait être rompu que par le maillon le plus faible, en dépit des opinions contraires des autorités politiques les plus hautes, de la noblesse de certaines régions (qui avait des travailleurs morisques comme en Aragon et à Valence), voire du roi lui-même. Entre 1609 et 1614, environ trois cent mille morisques qui ont quitté l’Espagne surtout en direction du nord de l’Afrique.

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« La Catalogne a été économiquement favorisée par l’Etat espagnol »
Entretien avec l'historien espagnol Serafín Fanjul (1/2)
Par Daoud Boughezala  - 12 novembre 2017
Manifestation en faveur de l'unité espagnole. Sipa. Numéro de reportage : AP22122660_000013.

Professeur de littérature arabe et historien, Serafin Fanjul vient de publier un essai magistral, Al-Andalus. L’invention d’un mythe (L’Artilleur, 2017). En développant une réflexion poussée sur l’identité nationale espagnole, il bat en brèche le mythe d’un paradis multiculturel mis en place par les huit siècles de domination musulmane. En écho à l’actualité, il réagit ici aux arguments économiques et identitaires des indépendantistes catalans, pour lesquels Madrid et Barcelone sont irréconciliables. Entretien (1/2).

Daoud Boughezala. Depuis bientôt un siècle, l’ombre d’une sécession basque et catalane plane au-dessus de l’Espagne. Ces tensions ne sont-elles pas consubstantielles à la nation espagnole moderne ?
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Serafín Fanjul. Il n’y a pas de séparatisme « consubstantiel » à une nation. Le séparatisme est toujours le résultat, d’une part, de facteurs sociaux, politiques et économiques et, d’autre part, d’interprétations idéologiques qui le promeuvent à long terme avec plus ou moins de succès. Tous les États européens dont la composition est hétérogène connaissent ce problème.
Au XIXe siècle, ce sont les Basques et les Catalans qui ont été les plus fermes défenseurs de la devise « Dieu, la patrie  le et roi » (à laquelle ils ajoutaient les « Vieilles lois » c’est-à-dire les « Fueros », les fors français). Au cours des trois guerres carlistes, ils ont lutté en faveur du prétendant traditionaliste, don Carlos, et de ses successeurs, en revendiquant les Fueros que les libéraux de la nation avaient éliminés pour que l’ensemble de la population de l’Espagne ait les mêmes droits et devoirs, suivant en cela le modèle français qui représentait alors la modernité. À la fin du XIXe siècle, le fondateur du nationalisme basque, Sabino Arana, a défendu un ethnocentrisme basque. Il a crée un corpus idéologique et une armature politique sur lesquels se sont construits et développés au XXe siècle le Parti nationaliste basque et tout un mouvement indépendantiste. À l’origine, les composants idéologiques du nationalisme basque étaient ultra-catholiques, réactionnaires dans le domaine économique et expressément  hostiles (pour ne pas dire méprisants et insultants) envers les « métèques », les émigrants des autres régions d’Espagne qui venaient travailler au Pays basque en raison d’une industrialisation rapide, surtout dans la province de Bizcaye.
Aujourd’hui, le régime économique spécial du Pays basque est de nos jours la source de graves tensions avec Bruxelles en raison de la « discrimination positive » qu’il établit en matière d’impôts, d’aide aux investissements, de franchises, etc.
Quid de la Catalogne ? Depuis quelques années, la région autonome semble se détacher irrémédiablement du royaume d’Espagne…
Rappelons que lors du référendum pour l’approbation de la Constitution espagnole, en 1978, le pourcentage des votes favorables en Catalogne était supérieur à celui de Madrid. Le Premier ministre Adolfo Suárez, a offert en 1978 au mouvement Convergencia y Unio, parti nationaliste catalan alors majoritaire, la possibilité d’adopter le même système que le pays basque. Mais les catalans l’ont longtemps refusé car ils jugeaient qu’il n’était pas suffisamment avantageux pour eux. Ce n’est qu’à la fin des années 2000, sous Zapatero, qu’ils ont commencé à le réclamer, alors que les conditions générales avaient changé et qu’il était devenu très difficile d’imposer aux régions les plus pauvres une nouvelle norme discriminatoire.
Le nationalisme catalan ne s’est-il donc pas toujours construit contre Madrid ?
Le mouvement politique catalaniste est né à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, avec des cadres tels que Prat de la Riba, Cambó et Maciá. Il n’était pas à l’origine indépendantiste mais autonomiste. Très présent dans le milieu de la bourgeoisie catalane, il était rejeté par la gauche (socialiste et anarchiste) qui  n’y voyait qu’une création du patronat et des propriétaires. Le catalanisme politique s’est affirmé juste après que l’Espagne a perdu Cuba (1898), lorsque les commerçants catalans ont été privés de leurs monopoles et privilèges économiques sur l’île, lesquels étaient à l’origine du malaise d’une partie de la population cubaine et ce qui d’ailleurs poussait cette dernière à réclamer l’indépendance. Un détail est révélateur de l’état d’esprit de l’époque : la nuit où le président américain McKinley a déclaré la guerre à l’Espagne, le Grand théâtre du Lycée de Barcelone a interrompu sa séance et la foule a écouté et applaudi, pendant deux heures, les discours et les proclamations enflammées en faveur de l’Espagne et contre les Yankees agresseurs.
D’ailleurs, durant un siècle et demi, la Catalogne a bénéficié d’un traitement économique spécial qui protégeait les produits catalans à l’intérieur du marché espagnol par des droits de douane élevés semblables à ceux en vigueur pour l’Angleterre et la France (surtout dans le cas des textiles). Ce traitement de faveur a canalisé les investissements de l’État espagnol majoritairement vers la Catalogne en provoquant la décapitalisation d’autres régions comme la Galice, l’Andalousie et l’Estrémadure.  En réalité, même sous le franquisme, 70% des investissements de l’Institut national de l’industrie sont allés en Catalogne !
Dans ce cas, pourquoi l’Espagne peine-t-elle tant à rassembler son peuple sous la bannière d’un grand récit national ?
Depuis la Constitution de 1978, il n’y a plus de grand « récit » ou de « roman national », mais plutôt des versions distinctes d’événements semblables, notamment dans les livres d’histoire et de géographie  de chaque communauté autonome.
Au XIXe siècle, tous les pays d’Europe qui ont identifié l’État et la nation ont développé des facteurs qui pouvaient favoriser l’unité et la cohésion en se référant à des éléments historiques communs, des coutumes, des droits consensuels, des langues et des intérêts économiques et spirituels. Ils l’ont fait tantôt à partir de modèles centralisés (France), tantôt à partir d’agrégations ou d’unifications (Italie, Allemagne). Dans certains cas, cela n’a pas été sans conséquences négatives pour les langues locales les moins répandues ou sans projections extérieures. L’Espagne ne s’est pas distinguée dans cet effort, bien que le poids économique du castillan ait porté préjudice à la langue basque, mais sans qu’il y ait eu pour autant de directives politiques édictées contre elle.
Cela n’a pas été le cas pour le catalan.  Quant au galicien, bien qu’alors majoritairement utilisé par la population, il s’est vu reléguer à un plan  secondaire en raison du prestige social attaché au castillan.
Comment le castillan, communément appelé espagnol, cohabite-t-il avec les langues régionales à l’école ?
Cela varie suivant les régions. Dans les écoles Catalogne, il est quasiment impossible de retrouver l’espagnol, une langue qui compte pourtant 550 millions de locuteurs à travers le monde… Au Pays basque, le castillan coexiste avec le basque. En Galice, dans la communauté valencienne et aux Baléares, il a de sérieuses difficultés. Je me demande d’ailleurs si on pourrait, de la même façon, écarter l’italien en Sicile, l’allemand en Bavière, le français en Corse ou l’anglais en Irlande du nord ! A Madrid, il n’y a pas le moindre ressentiment contre les catalans en tant que groupe humain parce que nous savons parfaitement tout ce que nous avons en commun.
Avec un tel niveau de défiance, craignez-vous une explosion de l’Espagne ?
Je ne crois pas. Il existe bien quelques autres exemples de nationalismes dans d’autre régions d’Espagne, notamment le nationalisme galicien, mais à court et à moyen terme ils ont bien peu de chance de s’affirmer comme des forces hégémoniques.
Au fond, à quand remonte l’idée d’une identité nationale et d’une conscience de soi espagnoles que le franquisme a ensuite essentialisée ?
Jusqu’aux XIIe et XIIIe siècles, il n’y a pas eu à proprement parler d’Espagnols, même au sens le plus large, bien que l’on puisse alléguer l’existence de textes antérieurs qui parlent de « toute l’Espagne ». En fait, le mot même « espagnol » est une création française qui reflète la manière dont, depuis la France, on percevait des traits communs aux gens de l’autre côté des Pyrénées.
Depuis l’arrivée des Romains (218 av. J.-C.) jusqu’à celle des musulmans en 711, il y a presque neuf siècles de romanisation (les wisigoths sont demeurés pour l’essentiel dans l’espace culturel latino-chrétien), mais il m’a toujours semblé abusif de considérer « espagnols », à partir de la seule géographie, les romains nés en Hispanie, comme les Goths du royaume de Tolède ou les musulmans d’al-Andalus qui, dans leur majorité ignoraient l’idée selon laquelle il y aurait plus tard, « sur la même terre », un pays appelé Espagne, avec une langue, une culture, des institutions politiques, juridiques et religieuses complètement différentes, sinon antagoniques.
L’idée essentialiste de l’Espagne, comme continuum historique, provient du XIXe siècle et il faut en chercher l’origine chez des penseurs et des historiens conservateurs et nationalistes bien antérieurs à Franco (par exemple Javier Simonet, Menéndez Pelayo, Vázquez de Mella, Ramiro de Maeztu ou Menéndez Pidal). Le principal représentant de l’idéologie essentialiste est l’historien Claudio Sánchez Albornoz, qui a été Président de la République en exil jusqu’à la mort de Franco, ce qui semble indiquer qu’il ne devait pas être très franquiste. Son œuvre est par ailleurs très vaste et techniquement digne de respect bien que je sois en désaccord avec son fil conducteur qu’il prolonge jusqu’à la nuit des temps. Mes désaccords avec Albornoz touchent un point crucial : sa vision idéaliste de l’Histoire le conduisait à considérer « espagnols » les musulmans habitants de l’ensemble qu’on appelle Al-Andalus.
à suivre…

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Père Pedro : «Les recettes de la fraternité n'ont pas de nationalité»
Par Delphine de Mallevoüe
Mis à jour le 04/11/2018 à 20h40 | Publié le 04/11/2018 à 17h43
INTERVIEW - Akamasoa, la cité malgache que le prêtre a fondée sur une décharge pour lutter contre la pauvreté, se veut un modèle duplicable, à la portée de tous les États.
À70 ans, Pedro Opeka, figure charismatique de la lutte contre la misère à Madagascardepuis près de trente années - affectueusement appelé «père Pedro» -, fait l'objet d'un hommage à travers La Cité d'espérance du père Pedro , une galerie de portraits signée Pierre Lunel aux Éditions du Rocher. Des personnes rencontrées à Akamasoa, cette ville-association fondée par le prêtre qui reloge et fait travailler 25.000 familles de la célèbre décharge d'Andralanitra, près de Tananarive.
LE FIGARO.- Akamasoa serait-elle un «business model» de la lutte contre la pauvreté, puisque vous appelez tous les États à dupliquer votre action?
Père PEDRO.- Les gens n'imaginent pas ce qu'on a fait avec Akamasoa… Une œuvre concrète, à portée de main, modélisable et exportable. C'est ça, mon ambition: la faire connaître pour que les gouvernants du monde entier puissent la dupliquer sur leur sol. Les recettes de la fraternité n'ont pas de nationalité. Je veux leur montrer, preuves en main avec le travail de mon association, qu'il n'y a pas de fatalité, seulement une mobilisation, une énergie pour repenser les systèmes, pour trouver des solutions et les mettre en œuvre. Que des actes, en somme. À la portée de tous les États.
«Le travail, l'école et la discipline : voilà les trois piliers pour vaincre la pauvreté. Aider sans assister. Car assister, c'est encore dominer et laisser vulnérable»
Père Pedro
Ce travail accompli à Madagascar, quels en sont les fruits aujourd'hui?
En vingt-huit ans, 500.000 personnes sont passées par Akamasoa. Cette association, aujourd'hui, c'est une ville de 25.000 habitants qui résident dans 18 villages, à 8 km de Tananarive, sur le lieu même de l'immense décharge de la capitale. Et ce sont 30.000 autres personnes qui passent chaque année pour demander une aide ponctuelle, de la nourriture, des médicaments, un logement. Les pauvres construisent eux-mêmes leur ville, avec notre aide, tous ensemble. Des chiffonniers de la décharge sont aujourd'hui des maçons, des menuisiers, des plombiers et des électriciens. 14.000 enfants sont scolarisés, depuis la crèche jusqu'à l'école supérieure bac +2. Sur ces terres que nous avons majoritairement rachetées, nous exploitons une carrière de granit, nous avons des hôpitaux, des stades capables d'accueillir 30.000 personnes, des maisons, des maternités… Akamasoa est même dans le Guide du routard et le Lonely Planet pour sa messe dominicale, en malgache et en français, qui attire 7000 à 10.000 personnes!
Quelles sont les clefs de réussite de ce pari contre la misère?
La base, c'est le travail, l'école et la discipline. Voilà les trois piliers pour vaincre la pauvreté. Aider sans assister. Car assister, c'est encore dominer et laisser vulnérable. On vous aime trop pour vous assister, conduire vers l'autonomie, c'est cela aimer, c'est cela aider. À Madagascar, quand un pauvre m'interpelle dans la rue, aucun ne me dit jamais «donne-moi de l'argent!» mais «donne-moi un travail!». Bien sûr, c'est très engageant: avec tous les enseignants et les éducateurs qui sont à mes côtés pour faire vivre cette communauté, on travaille sept jours sur sept, même la nuit. Mais notre force et notre folie, c'est de croire qu'un pauvre peut se mettre debout, qu'il ne faut jamais baisser les bras, que la fraternité accomplit de grandes choses. Et si le monde peut sembler sourd, il n'est pas aveugle: il voit ce que l'on fait, que le peuple m'a suivi, qu'il m'a fait confiance. Quand on se fait confiance, on peut tout faire, même un miracle.
Une confiance mise à rude épreuve avec les hostilités de ce monde…
Nous devons la regagner. Le réveil des consciences n'est rien s'il n'est pas suivi de cette reconquête-là, profonde. Vous savez, dans la décharge de rue là-bas, ils ont mis dix ans à y croire, à me suivre. Mais voilà, avec de la détermination et du travail c'est possible! Le monde, qui surabonde de misère, est trop lent à entendre et à agir, cela m'exaspère. Quand on est malade, qu'on est pauvre, on n'a pas le temps d'en perdre: on ne dit pas attend, on fait!
«Vous savez, dans la décharge de rue là-bas, ils ont mis dix ans à y croire, à me suivre. Mais voilà, avec de la détermination et du travail c'est possible !»
Père Pedro
Trois mois par an, vous sillonnez la planète à la recherche de fonds…
Pour que le miracle se poursuive! Nous ne sommes pas une ONG internationale, nous avons besoin d'une aide financière. Alors, une fois par an, je quitte mes frères et mon quotidien pour prendre mon bâton de pèlerin et venir en Europe, en Amérique… où j'assiste à des conférences et où je rencontre des gens. Je ne rentre jamais les mains vides: chaque fois je rapporte de quoi faire 10 à 15 maisons.
Quel regard portez-vous sur la politique européenne vis-à-vis des migrants?
L'Europe a trop tardé à régler ce problème, elle a créé un mirage pour ces pays pauvres. Si on laisse perdurer la corruption de l'Afrique, avec le consentement de l'Europe, si les jeunes n'ont pas de travail en Afrique et que l'Europe n'agit pas pour la croissance là-bas, alors l'invasion sera plus grande encore. Personne ne l'ignore pourtant.
On parle de vos «saintes colères», quelles sont-elles?
La lenteur face à l'urgence, l'indifférence, le mensonge, les apparences, les systèmes et les politiques qui veulent compliquer l'être humain. Celui qui est intelligent, dont le bon sens vient du cœur et qui trouve la route la plus courte pour aider les pauvres gens. Il sait aller tout droit, et plus tôt. Moi, Dieu m'a aidé à simplifier les choses. À l'école de la décharge on fait ça, le chemin le plus court pour servir ses frères humains, et ça rend heureux. Ne jamais se lasser d'aider, car tout ce qui est fait avec amour ne périt jamais.

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Jacques Julliard : «Démocratie et liberté ne vont plus nécessairement de pair»
Par Jacques Julliard
Publié le 04/11/2018 à 19h25
CHRONIQUE - L'historien et essayiste* analyse les ressorts de la popularité des régimes autoritaires et, dans les pays occidentaux, de la demande d'ordre qu'exprime le vote populiste.
Corruption, immigration, insécurité: le triptyque du vote populiste
Pourquoi la démocratie, après avoir progressé à la fin du siècle dernier au point de paraître alors sans rivale, est-elle aujourd'hui partout en recul à travers le monde? Les économistes connaissent les cycles Kondratiev, du nom de leur inventeur, c'est-à-dire l'alternance, en régime capitaliste, de phases de croissance et de phases de dépression sur une durée d'une cinquantaine d'années. Y aurait-il des Kondratiev de la démocratie? Un rapide tour de la planète suffit en tout cas à se persuader de l'ampleur du phénomène.
En Russie tout d'abord, où après les espoirs suscités par l'ère Gorbatchev, le règne sans partage de Vladimir Poutine ressemble fort à une régression historique. C'est le tsarisme plus l'informatique!
En Chine ensuite, où le règne qui promet d'être long, de Xi Jinping, semble s'inscrire dans la suite des dynasties Ming et Qing: c'est l'empire du Milieu plus les routes de la soie!
En Amérique latine encore, où la vague qui vient de porter Jair Bolsonaro au pouvoirmarque une inversion de la courbe qui allait de l'abandon des régimes militaires à la démocratie occidentale: c'est la dictature des généraux plus la misogynie! Cette Amérique latine où les régimes issus de la gauche marxiste, Cuba, Venezuela, Nicaragua, ne sont porteurs que d'autoritarisme et de misère: c'est la répression aggravée par l'anarchie!
Aux États-Unis derechef, où Donald Trump, cet ovni du système politique américain, réussit l'exploit de combiner l'isolationnisme intérieur avec l'aventurisme extérieur: c'est le populisme du docteur Folamour!
Quant à notre chère et vieille Europe, elle est sans doute le dernier endroit de la terre où la démocratie semble posséder un avenir
Dans le monde arabo-musulman enfin où les illusions engendrées par les «printemps arabes» (sic) se sont vite effondrées pour céder la place à la guerre, aux massacres, au despotisme. Il n'y a pour le moment que des intellectuels occidentaux pour avoir cru qu'Erdogan était un nouveau Robert Schuman et que l'islam était compatible avec la démocratie libérale: c'est l'obscurantisme tempéré par le pétrole!
Quant à notre chère et vieille Europe, elle est sans doute le dernier endroit de la terre où la démocratie semble posséder un avenir. Certes, elle n'est pas exempte du phénomène de désaffection à son égard, comme en témoigne le surgissement partout de partis d'extrême droite portés par un populisme passe-partout, à l'instar de sa partie orientale où des gouvernements «illibéraux», en Hongrie, en Pologne, apparaissent de moins en moins compatibles avec les canons de la démocratie à l'occidentale. Et comment ne pas évoquer le cas troublant de notre voisine et amie l'Italie, où s'est instituée comme par surprise une étrange coalition du clientélisme du Sud et du nouvel anti-européisme du Nord. Certes, Matteo Salvini est loin d'avoir, de l'autre côté des Alpes, le visage d'extrême droite et même fascisant qu'on lui prête chez nous. Reste que voici l'un des six pays fondateurs de l'Europe qui se trouve désormais sur une ligne souverainiste et anti-européenne.
Faisceau de doléances
Mais d'autres signes montrent une plus grande résistance aux courants antidémocratiques qui déferlent sur la planète. Contrairement aux prédictions, ce n'est pas le parti d'extrême droite AfD qui a bénéficié d'un certain désamour de la Bavière à l'égard de la CSU, mais les écologistes. Même chose en Hesse au détriment de la CDU.
Peut-on, pour autant, dégager des traits communs aux situations très diverses que nous venons de passer en revue? Il n'est pas très difficile, quand on examine les motivations des acteurs telles qu'ils les expriment, de repérer un peu partout la présence d'un faisceau de doléances, selon des dosages variables, d'un triptyque qui a nom: corruption, immigration, insécurité. Il s'agit donc moins de revendications que de craintes, moins d'aspiration à des changements que l'on appelle de ses vœux que de peurs devant ceux que l'on voit surgir. Les élites mondialistes n'ont pas assez de mots pour exalter les bouleversements que connaît notre époque. Les classes populaires, pas assez de voix pour en dénoncer la malfaisance. Cette rupture de l'alliance du peuple et du progrès qui a longtemps fondé le pacte constitutif de la gauche est un des traits marquants d'une époque pessimiste, en rupture complète avec l'optimisme de la précédente.
Sur quoi repose, en dernière analyse, une société ? Sur la confiance que chacun nourrit dans les autres ; la certitude qu'il existe un bien commun au-delà des égoïsmes individuels
Passons vite sur la corruption que l'on ne cesse de rencontrer sur notre route, comme signe du divorce entre les élites et les masses à l'époque présente. Mais les prolétaires de Sao Paulo ont en commun avec les fermiers du Middle West et les classes moyennes du Haut Adige un violent grief contre les élites gouvernementales de leur pays, accusées d'accaparer l'argent public et de s'enrichir au détriment des plus pauvres. C'est la confiance dans la fonction redistributive de l'État, qui a été longtemps comme la pierre d'attente du socialisme en régime capitaliste, qui se trouve remise en cause et, avec elle, la possibilité d'un avenir démocratique commun à toutes les classes de la société. Sur quoi repose, en dernière analyse, une société? Sur la confiance que chacun nourrit dans les autres ; la certitude qu'il existe un bien commun au-delà des égoïsmes individuels. Une société qui proclame le primat absolu de l'individu sur les valeurs communes s'autodétruit et fait de chaque cas de corruption une balafre indélébile sur le pacte social.
Question de survie
C'est pourquoi l'immigration est vécue, à l'égal de la corruption, comme une atteinte à ce pacte. Les gagnants de la mondialisation n'ont pas besoin de la solidarité de leurs semblables, parce que leur destin individuel leur tient lieu de garantie pour l'avenir. Mais ceux qui ont vu leur statut matériel et moral stagner, voire régresser, ont besoin de croire à l'existence de la société et de l'État comme des garanties pour leur avenir. Une société qui fait de la mobilité et du cosmopolitisme sa valeur suprême ne peut être qu'une société d'individus. Elle n'est fondée que sur le mouvement et l'avenir. Elle n'a rien à promettre ou à faire espérer à la partie immobile de ses membres. Ceux-ci ont besoin que la société soit quelque chose d'organique, fondé sur un passé, une culture, une structure interne. Voilà pourquoi les classes dominées sont de nos jours intrinsèquement conservatrices, et défiantes à l'égard de nouveaux arrivants faisant irruption de l'extérieur. Ce n'est pas seulement qu'il faut accroître le nombre de parts dans le gâteau ; on veut au moins être assuré que c'est bien d'un même gâteau qu'il est question. Ainsi les gens modestes sont culturellement conservateurs dans la société d'aujourd'hui pour les mêmes raisons que les aristocrates l'étaient dans celle d'hier: c'est pour eux une question d'existence et de survie.
L'immigré, à l'inverse, est comme le nanti, mais pour des raisons différentes, porteur d'individualisme. Quand les classes dominantes, ainsi que leur alliée l'intelligentsia gauchiste, sont favorables à l'immigration, elles ne réalisent pas, non seulement qu'elles introduisent des concurrents dans les couches salariées, mais aussi avec eux des ferments de diversité sociale et culturelle, quand les plus pauvres ont besoin de cohésion culturelle et sociale pour être rassurés sur leur avenir.
Les classes populaires admettent à la rigueur en leur sein des populations immigrées si celles-ci acceptent de s'intégrer ou sont invitées à le faire, mais elles ne peuvent accepter le communautarisme. Or l'intelligentsia gauchiste a fait de la diversité la forme sociale du bien et de l'identité la forme sociale du mal. Étonnez-vous après cela que les prolétaires par nature, qui, à la différence des prolétaires par procuration ne servent pas de prolétariat de rechange aux gagnants de la mondialisation, préfèrent aux chantres bourgeois de la diversité les démagogues populistes de l'identité.
L'insécurité enfin. Les mêmes qui redoutent l'arrivée de nouveaux migrants ont tendance à attribuer à ces derniers l'augmentation de l'insécurité dans nos villes. La question n'est pas de savoir s'ils ont raison, ni même de savoir si cette augmentation est réelle ou non, mais de prendre acte de cette perception. Ici comme en météo, ce qui compte, c'est le «ressenti»
Au passage, on notera qu'elle est étrange, cette obsession des sociologues académiques qui se prétendent de gauche, à dénoncer chez les petites gens des peurs et des souffrances imaginaires: si Marx avait raisonné comme eux, il n'aurait pas écrit «Le Capital», c'est-à-dire une étude scientifique de la plus-value, mais un essai pour démontrer que le prélèvement du capital sur le travail était une illusion propre aux salariés, un «ressenti» du prolétariat.
Mais le point essentiel est ailleurs. Il est dans le sentiment d'incertitude engendré par les formes modernes de l'insécurité. Des sociologues de la violence, beaucoup plus sérieux ceux-là, ont montré que la violence ancienne et la violence moderne ne se différenciaient pas nécessairement par leur degré, mais par leur nature. La violence ancienne était souvent prévisible ; on en connaissait les auteurs, par exemple dans les rixes de cabaret. Ce qui rend la violence moderne insupportable, c'est son imprévisibilité. Elle est partout, souvent où on ne l'attend pas, de la part d'inconnus.
Ajoutez à cela qu'elle a atteint dans certaines parties des villes un niveau insupportable, comme dans les favelas brésiliennes ou même dans certains territoires, perdus de la République, où l'état de droit n'est plus qu'une formule sans contenu.
Quand démocratie et liberté se dissocient
Arrivés à ce point, une remarque s'impose. Nous avons jusqu'ici, pour la clarté de l'exposé, parlé de façon générale du déclin de la démocratie. Mais c'est en réalité du déclin de la liberté qu'il faudrait parler. Comme l'a récemment montré Yascha Mounk dans son essai Le Peuple contre la démocratie (L'Observatoire), démocratie et liberté vont de moins en moins souvent de pair dans le monde d'aujourd'hui. Car, en rigueur de termes, la démocratie, c'est-à-dire la désignation des gouvernants par le peuple, grâce au suffrage universel, reste partout respectée, même en Arabie saoudite, même en Corée du Nord. Tous les citoyens de la planète sont des électeurs, lors même que les modalités du vote en minimisent la portée (candidats uniques, persécution des oppositions, manipulation du scrutin, absence de liberté de la presse). Mais c'est essentiellement en termes de libertés réelles que le déficit du temps présent est impressionnant. En dehors de l'Europe, de l'Amérique du Nord, de l'Australie, du Japon, la plupart des régimes politiques issus du suffrage universel sont en même temps des dictatures et des régimes policiers. C'est pour désigner ce combiné du suffrage et de la dictature que l'on a forgé récemment le terme de démocratures. Quant aux pays libéraux à l'occidentale, qui bénéficient à la fois du suffrage universel et d'un régime de libertés publiques, ils réagissent à la triple menace de la corruption, de l'immigration et de l'insécurité par le populisme.
À quelles conditions la France peut-elle à la fois conserver sa liberté et assurer sa sécurité ? La solution souverainiste, qui consisterait à faire de nous une grande Suisse, n'est pas envisageable
La conséquence de cette situation, on le voit avec le recul, c'est un monde infiniment plus dangereux que celui que l'on a connu du temps de la guerre froide. La parenthèse des deux dernières décennies du XXe siècle, au cours desquelles le monde a joui de plus de libertés, sans risque majeur pour la paix, cette parenthèse est aujourd'hui terminée. Le monde d'aujourd'hui est redevenu une menace. Et il ne fait aucun doute que celui de demain, quand l'affrontement qui se prépare entre les États-Unis et la Chine, avec l'arbitrage de la Russie, aura lieu, le sera encore davantage.
S'il en est ainsi, à quelles conditions la France peut-elle à la fois conserver sa liberté et assurer sa sécurité? La solution souverainiste, qui consisterait à faire de nous une grande Suisse, n'est pas envisageable. Nous sommes un trop grand pays pour essayer de nous faire oublier quand les grandes puissances en viendront aux mains et bien trop petit pour mener la lutte à notre propre compte. De Gaulle, qui est la référence de tous les souverainistes, s'est montré, dans toutes les grandes circonstances (Berlin, Cuba), l'allié le plus fidèle des États-Unis. Il n'est pas si facile que cela de sortir de l'Histoire, quand on a dans son passé la trace de Louis XIV, de Napoléon et de Clemenceau.
Le couple franco-allemand, plus que jamais
D'un autre côté, l'Union européenne, même débarrassée du boulet anglais, a démontré à l'occasion de la crise des migrants, mais aussi de la guerre de Syrie, son irrésolution et son impuissance. On ne fera pas à court et moyen terme de l'Europe des 27 une puissance diplomatique, politique et militaire. Il faut donc reprendre la construction européenne sur des bases solides. Celles-ci ne peuvent être autres que le couple franco-allemand.
Comme l'a très bien dit à son propos François Hollande, à la lumière de son expérience, dans une interview au Point (18 octobre 2018):
«Ce n'est pas seulement un couple, un moteur, c'est une union qui doit désormais prendre ses responsabilités sur la défense, la sécurité, l'écologie, les industries d'avenir. (….) Il faut agréger hors traité quelques pays autour de l'union franco-allemande et remettre de l'émotion et des sentiments.»
Le lecteur attentif aura peut-être remarqué que je ne disais pas autre chose dans Le Figaro du 1er octobre dernier. (1) Je ne doute guère qu'Emmanuel Macron ne pense la même chose et ne le dise le moment venu. On dira que la situation actuelle n'est pas favorable. Ce n'est pas si sûr. Concernant le couple franco-allemand, Angela Merkel, sur le déclin et peut-être sur le départ, s'était contentée d'un service minimum. On peut raisonnablement attendre davantage de son successeur. La bataille qui s'annonce pour les européennes du printemps prochain sera donc capitale pour notre avenir. Le classique affrontement gauche-droite y cédera nécessairement la place à la confrontation entre partisans d'une Europe revivifiée, renforcée et partisans du repli national. Je suis persuadé que le pays qui a toujours été fidèle à sa double mission, nationale et internationale, en un mot que la patrie de Victor Hugo, de Jean Jaurès et de Charles de Gaulle choisira, sagement et fermement, la voie de l'avenir.
Un hosanna sans fin
Tel est le titre du dernier ouvrage de Jean d'Ormesson publié par sa fille aux éditions Héloïse d'Ormesson. Du Jean d'O à l'état pur, le dernier état de son incessant dialogue avec la vie et la mort, le monde et Dieu. Je lui fis un jour remarquer qu'il avait une religion du père, tandis que j'avais une religion du fils. C'est pourquoi j'ai été ému de son dernier mot, celui sur lequel il nous a quittés:
«Il est permis de l'admirer et de l'aimer sans se poser trop de questions sur sa réalité. Si quelqu'un a laissé une trace éclatante dans l'esprit des hommes, c'est bien le Christ Jésus.»
Nous voilà d'accord, mon cher Jean.
(1) «Pour sauver l'Europe, osons la Françallemagne!»
* Éditorialiste de l'hebdomadaire «Marianne».

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Les Romains exaspérés par le délabrement de leur ville

Par Richard Heuzé
Publié le 04/11/2018 à 16h47
Les critiques se multiplient contre la maire issue du Mouvement 5 étoiles, dont la Ligue brigue ouvertement la succession.
Rome
«Basta», «dégage», «démission»: quelque 10.000 Romains se sont récemment réunis sous les balcons de la maire de Rome, Virginia Raggi, pour exprimer leur colère devant sa gestion «désastreuse». «Vingt-huit mois, cela suffit», a scandé la foule. La belle place du Capitole dessinée par Michel-Ange offrait un spectacle plutôt insolite. Luisa, un professeur de yoga exaspéré par «cette décadence», brandissait un balai de jardinier. «Objet très utile, peut-être inconnu à Rome», proclamait un panonceau accroché au manche.
Transports publics défaillants, autobus qui brûlent dans le centre-ville (21 depuis le début de l'année), immondices jonchant les rues, sangliers surpris près des poubelles dans les quartiers périphériques, nids-de-poule mortels pour les deux-roues, passages piétons mal signalés, trafic chaotique, banlieues dégradées, espaces verts à l'abandon, arbres qui s'abattent sur les voitures à la moindre rafale: les griefs s'accumulent contre l'avocate de 40 ans élue maire, le 20 juin 2016, par 67 % des Romains. Son parti, le Mouvement 5 étoiles, promettait de transformer la capitale en vitrine de leur capacité à administrer le pays.
Six femmes sont à l'origine de cette protestation. Six amies unies par le slogan «Rome dit assez», qu'elles affichent sur leur T-shirt blanc. Toutes engagées dans la vie active, elles veulent faire réagir leurs concitoyens. Elles sont suivies par 24.000 internautes sur Facebook et se proclament «sans appartenance politique». Virginia Raggi les accuse d'être des émanations du Parti démocrate. Elles s'en défendent avec vigueur.
83 morts
«Nous avons décidé de former un comité après la mort d'Elena Aubry», disent-elles. Elena, une jeune fille de 26 ans, a perdu le contrôle de son scooter en mai dernier sur la Via Cristoforo Colombo, l'une des grandes artères de Rome, des racines d'arbres ayant soulevé la chaussée. Un mois plus tard, une autre jeune fille de 21 ans se tuait en Vespa sur l'asphalte dégradé. On compte 83 morts depuis le début de l'année. La mairie a débloqué 17 millions pour recouvrir de bitume quelque 50.000 cratères. «Insuffisant. Il faudrait au moins 350 millions», proclame l'organisation de consommateurs Codacons, pour qui 93 % des rues nécessitent une intervention urgente. Soit 5580 km sur les quelque 6000 que compte la capitale.
«Cette ville est maltraitée. Il est temps de réagir »
Valeria Grilli, cheffe de file de «Rome dit assez»
La sécurité n'est qu'un des aspects de la dégradation des conditions de vie à Rome. Les six protestataires s'indignent devant «l'analphabétisme en procédure» de l'administration communale. «Elle ne sait plus faire les appels d'offres. Exemple édifiant: les écoles publiques risquent de ne plus avoir de cantine en janvier parce qu'aucun marché n'a été lancé. Des subventions européennes pour l'efficacité énergétique des transports publics ont été perdues parce que la mairie n'a pas été en mesure de dire en quel état se trouvait son parc d'autobus. Quand il a fallu isoler les fenêtres des écoles, la mairie a découvert que de nombreuses salles n'étaient pas recensées au cadastre. Cette ville est maltraitée. Il est temps de réagir», lance leur cheffe de file, Valeria Grilli.
Cette bouffée de colère ne fait que renforcer le malaise général. Le 10 novembre, Virginia Raggi devra rendre des comptes à la justice. Elle est mise en examen pour avoir menti à la Commission anticorruption dans une affaire de conflit d'intérêts lors de l'embauche à la tête de la commission municipale du tourisme du frère d'un proche. Si elle était condamnée, le code éthique des «5 Étoiles» la contraindrait à démissionner.
Une aubaine pour Matteo Salvini qui n'attend que cela pour s'emparer de la mairie. Le leader de la Ligue et ministre de l'Intérieur critique sévèrement Virginia Raggi: «Elle aurait pu faire davantage. La capitale aurait pu être plus propre, plus belle, plus ordonnée», lançait-il fin septembre au congrès des jeunes fascistes, dont il était l'invité d'honneur.
Mercredi dernier, le ministre a été conspué lors d'une visite à San Lorenzo, quartier étudiant et populaire du nord de la capitale. Il voulait se rendre dans un immeuble désaffecté où avait été retrouvé la veille le corps de Désirée, une adolescente de 16 ans, morte après avoir été droguée et violée en groupe par une bande de zonards. Des manifestants d'extrême gauche l'en ont empêché. «Je reviendrai avec le bulldozer», a-t-il affirmé, promettant de faire évacuer cent immeubles occupés par des squatters. Matteo Salvini veut rétablir l'ordre et la sécurité dans la capitale. Son prochain objectif: après le Frioul-Vénétie Julienne et le Trentin-Haut-Adige, que le Capitole bascule dans son escarcelle. Il met les siens en ordre de bataille: «Après Virginia Raggi, Rome aura un maire de la Ligue», affirme-t-il. Pratiquement une déclaration de guerre à son allié 5 étoiles.

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