Des hommes sont contrôlés à la frontière franco-italienne, octobre 2018. SIPA. AP22261755_000002
Une tribune du think tank, Le
Milliénaire
Une tribune du think tank, Le
Millénaire, qui travaille à la refondation du projet politique des
Républicains.
L’immigration est un sujet trop
essentiel pour ne pas le traiter de manière factuelle, sans hystérie et sans
caricature. Le dernier remaniement, avec l’abaissement protocolaire du ministre
de l’Intérieur de la 2ème à la 11ème place,
démontre pourtant qu’il ne s’agit pas d’une priorité pour Emmanuel Macron,
alors même que les questions d’immigration et de sécurité sont redevenues dans
les derniers sondages les premières préoccupations des Français.
La France et, plus largement,
l’Union européenne (UE) sont mises à l’épreuve d’une pression migratoire sans
précédent. L’UE chiffre le nombre de migrants arrivés entre 2015 et 2017 sur
son territoire, et qui ne peuvent prétendre à l’asile, à 1,5 million. En France, le nombre de demandeurs d’asile a
augmenté de 17% pour la seule année 2017, dépassant ainsi la barre
des 100 000. En parallèle, la primo-délivrance des titres de séjour bondit de
13,7 % en 2017, avec 262 000 titres de séjour délivrés, ce qui peut s’expliquer
notamment par une forte augmentation des premiers titres de réfugiés et
bénéficiaires de la protection subsidiaire (35 825 titres, +56,5% par rapport à
2016). A l’inverse, le nombre d’étrangers reconduits est de 26 000 pour 2017, et le nombre de mesures
d’éloignement exécutées était de 18% en 2016. 75 587 étrangers sont donc restés sur
notre territoire malgré la mesure d’éloignement prononcée à leur encontre.
A cet égard, force est de
constater que les dispositions de la loi asile et immigration votée en août
sont totalement insuffisantes. Les ténors de La République en marche ont beau
claironner leur « fermeté », nous nous demandons où elle se trouve au
milieu de dispositions favorables aux migrants (notamment l’augmentation de la
durée de titre de séjour des bénéficiaires de la protection subsidiaire), de
mesures proprement hallucinantes (comme l’octroi automatique de l’asile aux
frères et sœurs des mineurs réfugiés) et de mesures essentiellement techniques
et procédurales (la réduction du délai de traitement de l’asile). Quant à
l’augmentation de la durée de séjour en Centre de rétention administrative,
l’extension des pouvoirs d’investigation ou le raccourcissement des délais de
dépôt des demandes… ce ne sont, très honnêtement, que des rustines sur une
jambe de bois. En effet, ces dispositions n’interviennent qu’a posteriori, une
fois que le migrant illégal est déjà sur notre territoire. Or, tant qu’il sera
possible d’y pénétrer illégalement, et de commencer à s’y installer,
l’immigration illégale ne fera que croître, et les morts en mer sur le chemin
de l’UE également.
Pour faire face à un enjeu
migratoire d’une ampleur sans précédent, ne sont donc à la hauteur ni les
ajustements paramétriques et normatifs votés par la majorité, ni l’immigration
zéro dont rêve le Front national. En effet, le zéro immigration (y compris
qualifiée) nous serait extrêmement dommageable économiquement, et romprait avec
notre ADN de pays accueillant envers les étrangers partageant nos valeurs
républicaines.
Au contraire, nous estimons
nécessaire rien de moins qu’une révolution copernicienne en matière migratoire,
traduite dans les faits par une action ferme et résolue aux niveaux nationaux
et européens.
La priorité absolue doit être la
lutte sans merci contre l’immigration illégale. Il est urgent de rétablir le
délit de séjour irrégulier en France, supprimé sans explication par le
quinquennat précédent. De même, le respect de nos lois est un principe non
négociable : le placement en centre de rétention administrative des étrangers
en situation irrégulière, puis leur expulsion, doit redevenir la règle et non
l’exception. Malgré ce que nous dit le gouvernement, ce n’est pas du tout sa
priorité, et cela le sera encore moins avec M. Castaner à l’Intérieur :
l’allongement de la durée maximale de rétention et l’augmentation du taux
d’occupation (qui avoisine les 100%) n’ont pas été pris en compte dans le
budget 2018. Le budget des Centres de rétention administrative est de 45,8
millions d’euros pour 2018 alors que le budget exécuté en 2016 était de 61,3
millions d’euros pour le placement en rétention de 44 086 personnes. Comment
veut-on exécuter cette politique si l’on n’y alloue même pas les moyens
budgétaires nécessaires ?
Cependant, la simple application
des lois existantes est loin de suffire. Nous devons changer de paradigme. Au
lieu de continuer à favoriser l’immigration illégale (en n’expulsant pas les
clandestins et en continuant d’offrir des services comme l’Aide médicale
d’Etat) au détriment de l’immigration légale (qui nécessite de faire des queues
scandaleuses dans nos préfectures pour l’obtention de titres de séjour légal),
nous devons faire l’inverse. Trois mesures s’imposent.
Premièrement, les demandeurs
d’asile provenant de pays dits « sûrs », comme l’Albanie, ne doivent
plus pouvoir déposer leur demande d’asile dans notre pays, mais dans leur pays,
au consulat français le plus proche de chez eux. De la même manière, nous
devons installer des centres offshore de traitement des demandes d’asile, non
seulement dans les camps de réfugiés du Haut Commissariat aux Réfugiés de
l’ONU, mais aussi et surtout dans les pays d’origine et de transit, de telle
sorte que les migrants, d’où qu’ils viennent, n’aient pas besoin de poser le
pied sur le territoire européen pour y déposer leur demande d’asile : il
ne doit plus y avoir d’excuse à l’entrée de manière illégale sur notre
territoire. Les migrants entrant illégalement dans l’UE par bateau ou voie
terrestre pourront alors être interceptés et transférés vers ces centres
offshore.
Deuxièmement, nous devons nous
doter d’un système de gestion de l’immigration légale à la fois simple,
efficace, et surtout fiable, à l’instar de l’ensemble des pays développés ayant
une politique migratoire où la loi est appliquée. En effet, nous devons bien
mieux distinguer entre immigration légale et illégale. Pour cela, il est
impératif de créer enfin un véritable statut de résident, avec des cartes de
résident à la durée de validité égale à la durée du contrat de travail (ou des
études) de l’étranger. De même, il convient de créer un statut de résident
permanent, qui pourra être octroyé aux étrangers les plus qualifiés (ex :
expatriés de multinationales, scientifiques ou artistes reconnus), qui dispensera
l’étranger de devoir renouveler sans cesse son titre de séjour et lui évitera
la tentation de demander la nationalité pour de simples questions de droit au
séjour. Ce système, amplement prouvé dans des pays comme le Canada ou le Japon,
permettra de désengorger les préfectures de manière drastique et permettra à
ces dernières de se focaliser sur la répression de l’immigration illégale.
Enfin, nous devons pouvoir
éloigner l’intégralité des étrangers en situation irrégulière. En effet, tous
les efforts investis dans les politiques des visas, des frontières et de
l’asile sont réduits à néant si les déboutés et les migrants ayant
pénétré illégalement sur notre territoire ne sont qu’une petite minorité à être
éloignés. Il n’y a pas de gestion possible de l’immigration sans politique de
retour efficace pour les illégaux. Le problème est bien connu : les pays
d’origine de l’immigration ne délivrent pas suffisamment de laissez-passer
consulaires, documents aujourd’hui indispensables à l’éloignement. Face à ce problème
ancien, la vieille solution du conditionnement de l’aide au développement de la
France à cette délivrance de documents ne sera jamais qu’une solution partielle
et peu applicable. Nous devons donc aussi signer des accords avec des pays
tiers afin que tous les clandestins ressortissants de pays récalcitrants à leur
retour puissent être acheminés vers des centres de rétention construits dans le
pays tiers, sur le modèle de l’Australie avec le camp de rétention à Nauru.
C’est une solution gagnant-gagnant pour la France (le migrant illégal est
expulsé) et pour le pays tiers (le centre de rétention fournit de l’emploi et
est assorti d’aides financières), et qui permet de court-circuiter
l’assentiment du pays dont l’étranger est ressortissant. De plus, l’éloignement
se fait vers un endroit où le migrant sera en parfaite sûreté, nous protégeant
ainsi des décisions idéologiques de la CEDH. Cette politique étant fortement
dissuasive (comme démontré par l’Australie, première à avoir appliqué cette
politique, où le nombre de traversées illégales, et donc le nombre de morts en
mer, ont largement baissé), l’effort budgétaire (certes conséquent) ne sera que
temporaire, car une fois le système en place, plus personne ne cherchera à
venir illégalement sur notre territoire.
Ces trois mesures mettront un
terme définitif à l’immigration illégale tout en permettant toujours un accueil
des véritables réfugiés (et ce dans de bien meilleures conditions
qu’aujourd’hui), et faciliteront grandement la vie des étrangers résidant légalement
en France, leur permettant ainsi de mieux s’intégrer.
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