Terrorisme: la police craint des déraillements de trains (16.09.2017)
Mis à jour le 16/09/2017 à 19h07 | Publié le 16/09/2017 à 18h16
Les djihadistes prôneraient ces derniers temps le
déraillement de train comme mode opératoire, s'inquiète la police nationale
dans une note que l'AFP a pu consulter samedi.
"En raison d'une incitation récente de la propagande
djihadiste à planifier un déraillement de train, une attention toute
particulière doit être accordée à toute remontée d'information relative à une
intrusion ou tentative de sabotage dans les emprises destinées à la circulation
des trains", peut-on lire dans ce télégramme de la Direction générale de
la police nationale (DGPN), émis début septembre et révélé par Le
Parisien.
"Il est important de souligner les appels récents des
organisations terroristes ciblant les 'loups solitaires' et incitant à
provoquer, en Europe, des déraillements de trains, des incendies de forêt ou
des empoisonnements de nourriture", indique également le document.
Les transports "présentent de nombreuses vulnérabilités
structurelles" et "constituent une cible privilégiée", notamment
dans les gares, où la visibilité des forces de sécurité et autres unités
spécialisées de la SNCF et de la RATP doit être accrue pour renforcer "le
caractère dissuasif du dispositif", pointe le texte.
Les sites touristiques et culturels, parce qu'ils permettent
"un bilan humain potentiellement lourd" et "des conséquences
importantes sur l'activité touristique" en cas d'attaque, doivent aussi
faire l'objet d'une "vigilance", souligne la note.
Face
à la multiplication d'attaques au véhicule bélier, la note appelle
également "les gestionnaires de parcs de véhicules, les responsables du
personnel et les conducteurs" à "signaler, sans délai, tout vol de
véhicule ou comportement suspect".
Des "mesures appropriées" doivent aussi être
prises pour les civils et militaires portant un uniforme, "cibles
privilégiées" des jihadistes.
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Libye: un millier de migrants interceptés (16.09.2017)
Mis à jour le 16/09/2017 à 19h23 | Publié le 16/09/2017 à 19h05
Des navires de la garde-côtes libyenne ont intercepté samedi
une dizaine d'embarcations transportant au total un millier de migrants lors
d'une série d'opérations au large de Tripoli.
Les traversées pour rejoindre l'Italie ont
fortement diminué depuis juillet, ce qui s'expliquerait par l'action de
groupes armés empêchant les départs autour des ports de Sabratha et Zaouïa,
plaques tournantes des passeurs. Mais certains bateaux, souvent de fragiles
canots gonflables, parviennent toujours à prendre la mer.
Samedi matin, "les gardes-côtes de la raffinerie de
Zaouïa ont secouru 1074 migrants clandestins" à bord d'une dizaine de
canots, a déclaré Ayoub Kassem, porte-parole de la garde-côtes. Zaouïa est
située à 45 km à l'ouest de Tripoli.
Quelque 600.000 migrants et réfugiés ont franchi la
Méditerranée centrale pour rejoindre l'Italie depuis 2014. L'Union européenne
et l'Italie fournissent une aide à la garde-côtes libyenne afin qu'elle
intercepte plus de migrants, mais cette stratégie est critiquée par les
associations humanitaires, qui soutiennent que ces migrants ne devraient pas être
renvoyés en Libye, car ils y subissent de nombreux abus.
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Le Hamas
prêt à se réconcilier avec le Fatah (17.09.2017)
Mis à jour le 17/09/2017 à 11h27 | Publié le 17/09/2017 à 08h18
Le Hamas est prêt à discuter de la formation d'un
gouvernement de réconciliation avec ses rivaux du Fatah et à organiser des
élections générales, annonce dimanche le mouvement islamiste palestinien dans
un communiqué. Le Hamas précise qu'il restituera le pouvoir dans la bande Gaza
au gouvernement d'union et que l'administration qu'il y a mise en place sera
dissoute.
» Lire aussi - Mahmoud Abbas, président sans
autorité des Palestiniens
Le mouvement islamiste dirige la bande de Gaza depuis qu'il
en a chassé l'Autorité palestinienne, contrôlée par le Fatah du président
palestinien Mahmoud Abbas, en 2007. Toutes les initiatives visant à réconcilier
les deux groupes rivaux et à former un gouvernement d'union nationale ont
échoué jusqu'à présent.
Attentat
de Londres : un 2e homme arrêté (17.09.2017)
Mis à jour le 17/09/2017 à 11h21 | Publié le 17/09/2017 à 09h32
Un deuxième suspect dans l'attaque dans le métro londonien a
été arrêté samedi soir, a annoncé dimanche la police britannique.
L'homme âgé de 21 ans a été arrêté dans la banlieue de
Londres, à Hounslow, aux alentours de 23h50, a précisé la police dans un
communiqué. Elle avait également arrêté la veille un homme de 18 ans à Douvres.
Dimanche matin, très peu d'informations ont été communiquées
par les autorités britanniques.
Attentat de Londres : la police arrête un homme à Douvres
(16.09.2017)
Par Le
figaro.fr
Mis à jour le 16/09/2017 à 18h23 | Publié le 16/09/2017 à 12h31
EN BREF
- Un
homme de 18 ans a été interpellé samedi matin par la police du Kent après
l'attentat à la bombe artisanale survenu la veille dans une station de
métro de la capitale.
- Une
perquisition était en cours samedi en début d'après-midi dans un logement
de Sunbury-on-Thames, à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest de
Londres.
- Le
degré d'alerte est maintenu à «critique», le niveau maximal, ce qui
signifie qu'un nouvel attentat est peut-être imminent.
La police britannique a annoncé avoir arrêté samedi matin un
jeune homme de 18 ans dans la région de Douvres, dans le cadre de l'enquête sur
l'attentat qui a visé un train de banlieue vendredi matin à Londres et fait 29
blessés. La police évoque une arrestation «importante», effectuée dans le cadre
de la législation antiterroriste. «Nous avons procédé à une importante
arrestation dans le cadre de notre enquête, ce matin», a annoncé Neil Basu,
coordinateur des services antiterroristes britanniques. «Si nous sommes ravis
des progrès enregistrés, l'enquête n'en continue pas moins et le degré d'alerte
à la sécurité est maintenu au niveau critique», a-t-il continué. Le suspect
était maintenu en garde à vue dans un poste de police local avant son transfert
à Londres. En début d'après-midi, une perquisition était en cours dans un
logement de Sunbury-on-Thames, près de Londres. La police a fait évacuer les
habitations alentour, dont un club de rugby, et établi un cordon de sécurité de
100 mètres.
Le patron de l'antiterrorisme britannique, Mark Rowley,
avait la veille au soir déjà déclaré que l'enquête progressait bien. «Nous
traquons des suspects», assurait-il. «Des centaines d'agents poursuivent
plusieurs pistes d'enquête, en épluchant des heures d'enregistrement de
vidéosurveillance et en interrogeant les témoins.» Des militaires ont été
déployés dans les sites jugés stratégiques dans le but de libérer des policiers
pour mener les recherches. «La population va voir davantage de policiers armés
dans le réseau des transports et dans nos rues (...), ce sera une mesure
proportionnée qui rassurera un peu plus et permettra d'assurer une meilleure
protection, le temps que l'enquête fasse son chemin», avait justifié la premier
ministre Theresa May.
«L'engin explosif était destiné à faire d'énormes
dégâts.»
La première ministre Theresa May
Vendredi à l'heure de pointe du matin, 30 personnes ont été
blessées par une bombe dans un train de banlieue de Londres. L'attentat a été
revendiqué par l'organisation djihadiste État islamique. La détonation s'est
produite vers 8h20 à la gare de Parsons Green, dans le sud-ouest de la
capitale. Les blessés souffrent principalement de brûlures, aucun n'est dans un
état grave. Seuls trois d'entre eux étaient encore hospitalisés. Selon Theresa
May, «l'engin explosif était destiné à faire d'énormes dégâts.» Mais le
retardateur de la bombe n'aurait pas fonctionné, assurent plusieurs médias
britanniques. Des photos diffusées sur les réseaux sociaux montraient un seau
blanc en train de brûler dans un sac de congélation de supermarché dont
sortaient des fils électriques.
Le Royaume-Uni a déjà connu depuis le début de l'année
quatre attaques traitées par la police comme des actes terroristes. Elles ont
fait 36 morts au total, sans compter les assaillants.
(Avec agences)
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Discipline, dérives islamistes : et si l'école
changeait enfin ?
Par Judith
Waintraub
Mis à jour le 15/09/2017 à 16h52 | Publié le 15/09/2017 à 09h00
ENQUÊTE - Rien ne va plus, et depuis longtemps, dans le
système scolaire français. Le nouveau ministre de l'Éducation s'est lancé dans
une contre-révolution qui ne dit pas son nom, avec la bénédiction d'Emmanuel
mais aussi de Brigitte Macron.
En 1968, quand Edgar Faure avait été nommé ministre de
l'Éducation nationale avec mission d'y ramener la paix, il avait trouvé une
idée lumineuse pour empêcher les importuns de pénétrer dans son bureau:
inverser le sens de la poignée de la porte, de telle sorte qu'aucun visiteur ne
puisse entrer à l'improviste. Près de cinquante ans plus tard, Jean-Michel
Blanquer doit déployer une stratégie beaucoup plus élaborée pour atteindre son
objectif: liquider l'héritage des soixante-huitards et son cortège de
«bourdieuseries», du nom du sociologue Pierre Bourdieu, pour qui le système
scolaire n'était qu'un instrument de reproduction des élites. Selon cette icône
des «pédagogistes», l'égalité devait primer sur la recherche de
l'excellence. Najat
Vallaud-Belkacem, malgré son jeune âge, en fut une fidèle disciple, et la
réforme des collèges, la meilleure illustration de ses théories égalitaristes.
C'est aussi le premier vestige du quinquennat Hollande auquel Jean-Michel
Blanquer s'est attaqué, en rétablissant les classes bilangues et l'enseignement
du grec et du latin. Et ce n'est qu'un début.
La charge de Jean-Michel Blanquer contre la méthode
globale d'apprentissage de la lecture et le «pédagogisme», en août, ont donné
le signal d'une mobilisation syndicale qui dure
Le ministre a lancé une révolution, ou une
contre-révolution, qui ne dit pas son nom. Instruit par les échecs de Claude
Allègre, écrasé en quelques mois par le «mammouth», de François Fillon, qui dut
renoncer à réformer le bac sous la pression de la rue, de Gilles
de Robien, qui ne parvint pas à réhabiliter la méthode syllabique, ou
encore de Xavier Darcos avec les internats d'excellence, le ministre ne
marquera pas son passage Rue de Grenelle par une grande«loi Blanquer». Comme il
l'a confié au Figaro Magazine, ce «pragmatique»,
tel qu'il se définit, est convaincu que «ce qui a rendu les choses difficiles»
pour les mieux intentionnés de ses prédécesseurs, «c'est le marquage politique
d'options qui auraient dû être d'intérêt général». «Je cherche une forme
d'unité nationale, assure-t-il. Il n'y a pas de fatalité à être dans
d'éternelles querelles politiques et syndicales. La situation n'est pas
binaire, pour peu que l'on sorte des postures médiatiques.»
Ce qui n'est pas gagné. La charge de Jean-Michel Blanquer
contre la méthode globale d'apprentissage de la lecture et le «pédagogisme», en
août, ont donné le signal d'une mobilisation syndicale qui dure, même si le
ministre a précisé depuis qu'il visait la méthode mixte - globale au démarrage
et syllabique ensuite. «Il a voulu plaire à l'électorat conservateur!» accuse
Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-Fsu, majoritaire dans le
primaire. «Ceux qui donnent des interprétations politiques de ce que je fais
dévoilent leurs arrière-pensées politiques plutôt que les miennes», rétorque
l'intéressé. Sa position sur la méthode mixte ne variera pas: «Je n'ai jamais
vu que mélanger ce qui marche et ce qui ne marche pas permette de réussir,
ironise-t-il. Qui aurait l'idée de mélanger du vin et du vinaigre?»
La méthode syllabique, autrement dit le b. a.-ba, c'est
celle qu'utilise ce garçon de 6 ans pour apprendre à lire. -
Crédits photo : Michel GAILLARD/REA
Le ministre refuse également d'étaler à l'infini cet
apprentissage. Selon lui, «il y a une fausse bienveillance à vouloir diluer
dans le temps l'acquisition des savoirs». D'où les évaluations qu'il a
instituées dès cette année scolaire en CP (cours préparatoire) et en sixième.
Ah, l'évaluation! C'est le mot qui fâche. Pour Stéphane Crochet, secrétaire
général du SE- Unsa, ce serait un«facteur de stress». «Si l'évaluation ne se
traduit pas par un surcroît de travail pour les enseignants, pourquoi pas?
nuance Frédérique Rolet, secrétaire générale adjointe du SNES, à condition que
ça ne donne pas lieu à une comparaison entre les établissements qui seraient
“bons” et les autres, et que ça ne stigmatise pas les élèves.»
Jean-Michel Blanquer, lui, estime qu'il y a urgence à
arrêter la dégringolade: dans
le dernier classement Pisa (Programme international pour le suivi des acquis
des élèves), établi en 2016, la France était au 19e rang des pays de
l'OCDE pour la lecture et au 26e rang pour les maths et pour les sciences.
L'enquête Timss (Trends in International Mathematics and Science Study)
réalisée en 2015 montre même que les petits Français en CM1 sont derniers de
toute l'Europe en mathématiques. La faute aux maths modernes, bête noire du
ministre qui se rappelle, enfant, avoir vécu leur avènement «comme un skieur
voit l'avalanche arriver dans son dos»? Les syndicats enseignants contestent. À
les entendre, les maths modernes, comme la méthode globale, c'est à peine si ça
a existé…
Dans le primaire comme dans le secondaire, que le ministre
veut réformer dans un deuxième temps, Il n'y aura donc pas de «loi Blanquer»,
pas de réforme pédagogique en tant que telle, et pas de manuel«officiel».
Jean-Michel Blanquer s'y refuse, misant tout sur la formation des enseignants
et sur l'évaluation. Il veut laisser une plus grande autonomie aux acteurs de
l'éducation et souhaite que les chefs d'établissement puissent, «à terme»,
choisir leur équipe pédagogique. Comme dans le privé, son modèle à bien des
égards.
«À l'Éducation nationale, vous avez une flopée de
prescriptions mais personne ne contrôle rien. Si les profs ne sont pas en grève
et que les élèves ne sont pas dans la rue, c'est “pas de nouvelle, bonne
nouvelle !”»
Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN-Unsa
L'autonomie a longtemps été combattue par les syndicats
enseignants, au nom de leurs principes égalitaristes. Mais selon Philippe
Tournier, secrétaire général du SNPDEN-Unsa, le syndicat des personnels de
direction de l'Éducation nationale, «les profs commencent à se rendre compte
que c'est l'État central qui constitue une menace et que l'autonomie est
protectrice». Proviseur de Victor-Duruy, dans le VIIe, depuis 2012, il a eu
l'occasion de vérifier avec la réforme des collèges de Najat Vallaud-Belkacem
que le blocage «culturel» persistait davantage Rue de Grenelle que dans les
mentalités enseignantes. «La réforme laissait les chefs d'établissement disposer
librement d'un contingent d'heures de classe, mais dès que le décret est passé,
le ministère a sorti une circulaire d'une dizaine de pages pour nous dire ce
qu'on devait faire de ce temps», raconte-t-il, en précisant: «La nouveauté,
c'est que les chefs d'établissement n'en ont tenu aucun compte.» Et qu'a fait
le ministère? Il n'a pas réagi. «À l'Éducation nationale, vous avez une flopée
de prescriptions mais personne ne contrôle rien, déplore Philippe Tournier. Si
les profs ne sont pas en grève et que les élèves ne sont pas dans la rue, c'est
“pas de nouvelle, bonne nouvelle!”»
Si cette indifférence compense, au moins partiellement, le
dogmatisme de l'institution académique en matière de pédagogie, elle a des
conséquences dévastatrices sur la bonne marche des établissements. En termes
d'organisation aussi, tout est à revoir! Cette
année, la rentrée scolaire s'est faite en musique pour les élèves,
conformément au vœu de Jean-Michel Blanquer, mais aussi en fanfare pour
certains de leurs profs et de leurs proviseurs, qui ont publié des livres de
témoignage plus accablants les uns que les autres sur le délabrement de
l'école.
Anne-Sophie Nogaret, professeur de philosophie, raconte dansDu
mammouth au Titanic la guérilla incessante qu'elle a dû mener pour
tenter, simplement, d'exercer son métier. Elle revient pour Le Figaro
Magazine sur la démission progressive de l'institution face à la
«mentalité des cités» Isabelle Dignocourt (1), professeur de latin et autrefois
de grec, et qui a vu passer treize ministres Rue de Grenelle, analyse comment
l'Éducation nationale est devenue une «machine à broyer». Jean-Noël Robert (2),
désormais retraité de l'Éducation nationale, raconte dans Témoin de la
déséducation nationale, entre autres scènes saisissantes, la visite guidée
très particulière qu'il a organisée pour des parents d'élèves du grand lycée de
Corbeil-Essonnes, juste en face de la cité des Tarterêts. Il a profité de
la«demi-journée banalisée» pour leur montrer le bâtiment dans lequel leurs
enfants pouvaient se procurer des drogues dures, des drogues douces, l'étage où
trouver des préservatifs, celui où les utiliser…
«Tout a été judiciarisé de façon outrancière, et par
l'institution elle-même. Après, il ne faut pas se plaindre qu'il n'y ait pas
d'autorité !»
Philippe Tournier, secrétaire général des personnels de
direction (SNPDEN) à l'Unsa
On imagine que les parents ont dû sortir de la visite
passablement traumatisés. Mais la contribution parentale au fonctionnement du
système éducatif ne va pas toujours dans le sens de l'intérêt de l'enfant, pour
utiliser un euphémisme. Patrice Romain (3), qui a tiré des best-sellers de ses
quarante ans de carrière dans l'Éducation nationale, vient de publier une
édifiante compilation de ses réponses à des lettres de parents dans Quand
un proviseur se lâche!une mère se plaint de la punition infligée à son
rejeton, qui a insulté un professeur? «Nous aurions dû faire preuve de
bienveillance plutôt que de sévir bêtement, lui écrit-il. “Fils de pute”, c'est
plutôt gentil, non? “Bâtard”, presque amical?» Il ne dit pas si la destinataire
a apprécié le second degré.
Quand le respect des règles est une notion inconnue à la
maison, l'école peut d'autant moins y remédier qu'elle a été systématiquement
désarmée. «Sanctionner un élève est quasiment impossible, même pour des
vétilles, affirme Philippe Tournier. Quand un élève perturbe la classe avec son
portable, par exemple, vous ne pouvez pas agir si vous appliquez les textes
réglementaires: il faut recevoir les parents et l'enfant, puis leur notifier
qu'on va le sanctionner, puis attendre trois jours ouvrables pour envoyer une
sanction, le troisième jour exactement… C'est un tel pataquès qu'on renonce.»
«Tout a été judiciarisé de façon outrancière, et par l'institution elle-même,
explique-t-il. Après, il ne faut pas se plaindre qu'il n'y ait pas d'autorité!»
Selon lui, «ces nuisances de faible intensité sont bien plus répandues que les
violences ou les dérives fondamentalistes».
Marginales, les dérives fondamentalistes? Ce n'est pas
l'avis de Bernard Ravet (4), auteur de Principal de collège ou imam de
la République. Ce retraité - depuis 2013 - de l'Éducation nationale a vu
grandir l'emprise islamiste sur les établissements marseillais qu'il a dirigés
et dénonce l'impuissance publique, voire le déni, face au phénomène. Il relate
ses mésaventures avec un surveillant«très efficace» dont il découvre qu'il
distribue un livret «qui promeut la charia et détaille les crimes des
“mécréants”». Le rectorat, auquel il transmet des informations détaillées sur
le livret, publié en Arabie saoudite et interdit en France, lui répond: «Ce
monsieur a signé un contrat pour six ans, on ne peut rien faire.»Les RG
(renseignements généraux), que le principal contacte, surveillent l'individu
depuis six mois, mais rien n'est fait pour l'empêcher de nuire. «Méfiant, le
surveillant a fini par partir de lui-même», explique Bernard Ravet.
Ikrame retire son voile avant d'entrer au lycée Paul-Gauguin
d'Orléans, où elle est scolarisée, mais affirme être victime de «harcèlement» à
cause de sa jupe longue. - Crédits photo : Eric MALOT/REPUBLIQUE DU
CENTRE/MAXPPP
Dès 2002, Les Territoires perdus de la République-
ouvrage collectif sous la direction de Georges Bensoussan (5) - avaient sonné
l'alerte, en vain. En 2004, un rapport d'un inspecteur général de l'Éducation
nationale, Jean-Pierre Obin, recensait les multiples atteintes à la laïcité
constatées sur le terrain. Comprenant enfin que cette bataille culturelle était
décisive, mais ne sachant comment la mener sans être accusés de «stigmatiser»
l'islam, les parlementaires votèrent la loi d'«interdiction du port de signes
religieux ostentatoires» à l'école.
Les syndicats enseignants ne peuvent plus prétendre que
les maux de l'école sont imaginaires
La victoire fut de courte durée. Dans Témoin de la
déséducation nationale, qui vient de sortir, Jean-Noël Robert cite le cas
d'un collège près de Toulon dont le principal«a dû lutter contre le
représentant des parents d'élèves, un musulman qui, au vu de la fréquentation
de l'établissement, réclamait l'instauration de pratiques islamiques». D'après
l'auteur, 25 élèves seulement sur environ 500 n'y font pas le ramadan. «Nous
sommes seuls, accuse Bernard Ravet. Seuls à encaisser l'irrupton du religieux
dans la sphère publique […] Seuls à devoir bidouiller des réponses au
quotidien.»
Jean-Michel Blanquer se réfère volontiers à la loi de 2004,
qu'il juge «très bonne». Quand il invoque la devise républicaine, il rajoute
«laïcité» après«liberté, égalité, fraternité». Il a demandé aux chefs
d'établissement, qu'il a rencontrés avant la rentrée, de lui «faire remonter
les problèmes», en leur promettant qu'ils pourraient compter sur le soutien de
leur hiérarchie. Son credo : «La République est forte, il faut la faire
respecter!»
Y parviendra-t-il? Paradoxalement, sur ce sujet comme sur
d'autres, l'évidence du délabrement de l'Éducation nationale devrait l'y aider.
Les syndicats enseignants ne peuvent plus prétendre que les maux de l'école
sont imaginaires.
Jean-Pierre Chevènement, qui marqua son passage Rue de
Grenelle, de 1984 à 1986, en promouvant l'«élitisme républicain»contre
l'égalitarisme, tient son lointain successeur, dont il a lu les livres, en
haute estime. «Jean-Michel Blanquerpeut être le Jules Ferry ou le Paul Bert du
XXIe siècle, assure-t-il, en énumérant ses atouts: Il a les idées claires,
des chances raisonnables de durer dans son ministère, c'est un très bon
connaisseur du système éducatif et il bénéficie du soutien d'un président de la
République qui s'intéresse à l'Education.»
«Brigitte Macron doit y être pour quelque chose, ajoute
Jean-Pierre Chevènement, car elle avait la réputation d'être un professeur de
qualité.»Bien vu, même si officiellement, l'épouse du Président n'a eu qu'un
vrai contact avec le ministre de l'Éducation, lors d'un déjeuner en tête à
tête, avant l'été. Mais elle a joué un rôle dans sa nomination: «Elle avait lu
les ouvrages de Jean-Michel Blanquer, elle en a parlé à Emmanuel Macron, qui a
déjeuné avec lui pendant la campagne, au moment des vacances de Noël», raconte
un membre de l'entourage du ministre.
Ex-professeur de lettres classiques à «Franklin», le
prestigieux lycée privé jésuite parisien, Brigitte Macron n'est pas pour
rien dans la nomination de Jean-Michel Blanquer. - Crédits photo :
Pierre Perusseau / Bestimage
Le père d'un garçon que Brigitte Macron a eu comme élève
quand elle enseignait à «Franklin», du nom de la rue du
XVIe arrondissement où se trouve le lycée privé jésuite
Saint-Louis-de-Gonzague, voit très bien «quelles peuvent être les convergences»
entre le ministre et l'ancienne prof de son fils. Il en fait une description
enthousiaste: «Elle est aux antipodes de la gauche bien-pensante et
égalitariste, elle tirait les enfants vers le haut en exigeant d'eux beaucoup
d'efforts et de travail. Elle tenait aussi énormément à leur donner l'esprit de
synthèse: par exemple, elle demandait à un enfant de résumer le cours, après
l'avoir prévenu au début de l'heure qu'elle le ferait.»
Certains des élèves de Brigitte Macron-Hauzy, comme elle
s'appelait encore à l'époque, ont eu la chance qu'elle les emmène à Bercy,
quand son mari était ministre de l'Économie, pour assister à un échange entre
lui et Fabrice Luchini sur la littérature. Les enfants en gardent évidemment un
souvenir ébloui. «Je me rappelle que Brigitte Macron nous avait dit “vos
enfants sont à Franklin, ce serait impardonnable qu'ils n'aient pas lu les grands
classiques”», raconte aussi le père de son ancien élève.
Des propos que ne désavouerait certainement pas le ministre
qui a offert Les Fables de La Fontaine à tous les élèves de
France… «On ne transmet bien que ce à quoi on croit», disait Hannah Arendt. Ne
reste plus à Jean-Michel Blanquer qu'à redonner la foi au corps enseignant.
(1) L'Éducation nationale, une machine à broyer,
Editions du Rocher.
(2)Témoin de la déséducation nationale, Les Belles
Lettres.
(3)Quand un proviseur se lâche!, Editions du
Cherche-Midi.
(4)Principal de collège ou imam de la République?,
Kero.
(5) Les Territoires perdus de la République,
Mille et une nuits.
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Blanquer: pas de «loi» mais «une méthode»
Anne-Sophie Nogaret: «La mentalité de cité se répand à
l'école»
Par Judith
Waintraub
Mis à jour le 15/09/2017 à 10h13 | Publié le 15/09/2017 à 09h00
INTERVIEW - Professeur de philosophie à Rouen, Anne-Sophie
Nogaret raconte le naufrage de l'Éducation nationale tel qu'elle l'a vécu de
l'intérieur de l'institution. Ravages du pédagogisme, renoncement à
l'autorité : son bilan est sans concession.
LE FIGARO MAGAZINE. - Selon vous, quelles sont les causes
du naufrage de l'Éducation nationale?
Anne-Sophie NOGARET. - La succession des
réformes pédagogiques est lourdement responsable. Prenez les grilles de
correction qu'on demande aux profs de français d'appliquer en première: ils
doivent vérifier que l'élève a bien mentionné le titre d'un ouvrage, ou qu'il a
su repérer une métaphore. On ne leur demande pas d'évaluer le degré de
compréhension du texte. D'ailleurs, les élèves n'appellent pas ça un texte,
mais un«document». Moi, je n'ai pas appliqué ces grilles et des
parents m'en ont félicitée! Mais ce n'est pas forcément le discours des
fédérations de parents d'élèves. Depuis des années, sous leur pression, on a
accordé aux parents un poids complètement délirant.
En avez-vous été victime?
Souvent. J'ai par exemple été convoquée par ma direction parce
que les parents d'une petite à laquelle j'avais mis un avis défavorable
n'étaient pas contents. Elle venait quand elle voulait, en raison de «problèmes
médicaux». Elle était très mignonne, elle s'était mis l'infirmière dans la
poche, donc je n'avais accès à aucune explication sur ces mystérieux problèmes
qui la faisaient venir à 10 heures presque chaque matin au lieu de
8 heures, ou manquer la classe à chaque fois qu'elle devait rendre un
devoir. Elle utilisait toutes les failles du système! J'ai dit à ma hiérarchie
qu'elle était libre de changer mon appréciation mais que je ne le ferais pas
moi-même.
Jean-Michel Blanquer parle d'une école de la
«bienveillance», un mot qui vous fait bondir. Pourquoi?
Je ne sais pas ce qu'entend par là le nouveau ministre, mais
la «bienveillance», telle qu'on la prêche depuis des années à l'Éducation
nationale, est l'antonyme de la sanction, comme si les deux étaient
incompatibles. C'est de l'idéologie pure et dure et ça n'aide pas les élèves.
On m'a souvent demandé d'émettre des avis favorables pour le bac concernant des
élèves qui n'avaient pas la moyenne, par «bienveillance». Comme si les
examinateurs allaient être dupes!
«J'ai vu se répandre la “mentalité de cité” qui n'est
rien d'autre qu'une forme de caïdat»
L'école a-t-elle renoncé à la discipline?
D'après mon expérience, oui. La sanction est maintenue sur
le papier, elle donne même lieu à une inflation de procédures complexes,
diluées dans le temps, ce qui lui ôte toute chance d'être efficace au cas où
par extraordinaire elle serait appliquée. Et les enfants, bien sûr, le
comprennent très vite! Quand un conseil de discipline finit par avoir lieu et
décide d'une sanction, le rectorat peut la casser, alors qu'il y a eu un vote.
Un collègue normand m'a raconté que deux élèves, exclus pour avoir bousculé un
prof, ont été réintégrés parce que leurs copains étaient allés dire au recteur
que le prof mentait.
Vous pointez aussi un «racisme inversé». Comment se
manifeste-t-il?
L'institution et les professeurs ont la hantise de passer
pour racistes, islamophobes, etc. Je ne dis pas que tous les élèves
descendants d'immigrés ou qui viennent des cités posent problème, évidemment,
mais quand ces élèves-là sont en cause, la discipline est rarement appliquée et
ce sont au final les enfants qui sont les victimes de cette démission. J'ai vu
se répandre la«mentalité de cité», qui n'est rien d'autre qu'une forme de
caïdat. La pratique de l'intimidation, voire la menace, est courante, comme le
mépris affiché pour les femmes, l'homophobie et l'antisémitisme.
Vous dites comprendre que beaucoup d'élèves n'adhèrent
pas au «Je suis Charlie» né après les attentats islamistes de 2015. Pourquoi?
Je n'accepte pas le comportement de ces jeunes, mais je
comprends qu'ils soient gavés de la bien-pensance qu'on leur inflige à longueur
de temps. Pour faire court, en 2015, on a eu deux formes d'imbécillité face à
face. L'élève complotiste de base, tous milieux sociaux confondus, qui passe sa
vie sur internet, pas forcément méchant, juste ignare, et le prof structurellement
de gauche, bloqué dans le catéchisme du politiquement correct. En général,
c'est un écologiste farouche! J'ai vu des profs entrer comme des furieux dans
ma salle de classe pour engueuler un élève qui avait jeté un papier une heure
avant. Curieusement, ils sont moins allants contre l'homophobie,
l'homosexualité n'étant pas très bien vue dans certains milieux! Pour Charlie,
beaucoup ont renoncé à parler à leurs élèves.
Du Mammouth au Titanic, le livre d'Anne-Sophie
Nogaret. - Crédits photo : _ISA
L'enseignement de la laïcité peut-il être un antidote à
l'islamisme?
De quoi parle-t-on? Je connais de nombreux profs toujours
contents de faire moins d'heures de cours et qui proposent des ateliers
type «laïcité et citoyenneté». En ZEP, ça plaît, mais je ne suis
pas sûre que le résultat soit à la hauteur. C'est encore du catéchisme! Le seul
antidote, c'est la connaissance, historique, littéraire, bref, tout ce qui
manque à tant d'élèves.
Le système des «devoirs faits»instauré
par Jean-Michel Blanquer peut-il permettre aux élèves qui en ont besoin de
rattraper leur retard?
Sur le papier c'est une bonne idée, à condition que
l'encadrement soit compétent. J'ai vu des petits caïds des cités, envoyés par
la mission locale qui essayait de les réinsérer, faire du soutien scolaire en
maternelle et en primaire. C'est très bien pour apprendre aux gamins des morceaux
de rap, mais pour le reste…
Vous semblez très pessimiste. L'Éducation nationale
est-elle vouée à sombrer?
Il n'y aura pas d'issue tant qu'on ne renoncera pas d'abord
à l'idée que tout le monde est fait pour l'enseignement général et qu'on ne
réhabilitera pas l'enseignement professionnel et technique. J'ai eu
régulièrement des élèves qui végétaient en terminale parce que des profs les
avaient découragés d'aller dans le technique en fin de troisième, alors qu'ils
étaient demandeurs.
Avez-vous l'intention de continuer l'enseignement?
J'aime enseigner! On peut avoir des relations
extraordinaires avec des classes ou des élèves, et d'autres désastreuses, mais
c'est la minorité. C'est un métier que j'adore, mais dans les conditions
actuelles, il faut avoir une mentalité de combattante. Aujourd'hui, je
rencontre beaucoup de jeunes, en général femmes, qui disent vouloir enseigner
mais qui se voient en fait animatrices, assistantes sociales ou psychologues.
Elles ne rêvent que de«dialoguer» avec les élèves. Les critères de recrutement
doivent absolument changer, comme les méthodes d'enseignement et les
programmes. Le respect de la discipline doit être restauré. Tout est imbriqué.
Ça prendra du temps et on ne pourra pas tout faire en même temps. Il faudra
hiérarchiser les priorités et ça, Jean-Michel Blanquer, qui connaît la machine,
semble l'avoir bien compris.
Du mammouth au Titanic, d'Anne-Sophie Nogaret,
L'Artilleur, 323 p., 18 €.
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Finkielkraut: «Le mal totalitaire découle de la
certitude d'appartenir au camp du Bien» (15.09.2017)
Mis à jour le 15/09/2017 à 11h02 | Publié le 15/09/2017 à 09h00
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Ils se disputent, mais de manière
civilisée. Dans le livre En terrain miné(Stock), Élisabeth de
Fontenay et Alain Finkielkraut, amis de longue date, exposent leurs accords et
désaccords par lettres interposées. Un échange épistolaire passionnant qui
permet aussi de redécouvrir l'auteur du Nouveau Désordre amoureux et
de La Défaite de la pensée.
«En terrain miné», d'Élisabeth de Fontenay et Alain
Finkielkraut. Stock, 270 p., 19,50€. - Crédits photo : ,
C'est un débat comme on n'en fait plus: vigoureux, mais
loyal. Une querelle féconde qui permet d'aller au-delà de la surface des
choses. Les philosophes et amis Alain Finkielkraut et Élisabeth de Fontenay ont
choisi la forme épistolaire pour aborder tous les sujets qui fâchent: la
gauche, la droite, le progrès, l'islam, le féminisme. L'auteur du Silence
des bêtes a poussé l'académicien dans ses retranchements. Elle a bien
fait car elle lui a ainsi permis de tirer le meilleur de lui-même. Alain
Finkielkraut y laisse apparaître une pensée mesurée très éloignée des
caricatures médiatiques. Sa sensibilité affleure à chaque page.
Pour Le Figaro Magazine, il poursuit son
introspection et dresse son autoportrait philosophique et politique. «C'est le
philosophe de la mesure, de la limite. L'homme révolté est aussi l'homme qui
s'empêche, l'homme qui se résiste», disait Finkielkraut à propos d'Albert
Camus. Dans ce livre, il s'approche comme jamais de son modèle.
LE FIGARO MAGAZINE. - En terrain miné est
un livre d'échanges épistolaires entre la philosophe Élisabeth de Fontenay et
vous-même, mais il ressemble aussi parfois à un dialogue entre l'intellectuel
que vous êtes devenu et le jeune homme insouciant que vous étiez. On a
l'impression qu'une immense inquiétude vous sépare de celui-ci. Le Finkielkraut
de L'Identité malheureuse a-t-il définitivement rompu avec le
soixante-huitard que vous avez été brièvement?
Alain FINKIELKRAUT. - En mai 68, j'avais
19 ans et j'ai été porté par la vague. J'ai vécu comme la plupart des gens
de ma génération, un grand moment de lyrisme grégaire. Je me révoltais contre
ce que nous appelions «le système» en suivant le mouvement. Et puis, mon
expérience naissante de la vie s'est progressivement sentie à l'étroit dans
l'idée que tout est politique. Je me suis rendu compte notamment que le
discours de la libération sexuelle simplifiait la réalité du désir et celle de
l'amour. C'est cette discordance avec l'esprit du temps qui nous a poussés,
Pascal Bruckner et moi, à écrire Le Nouveau Désordre amoureux.
Enfin, la découverte du devenir totalitaire des révolutions m'a amené à jeter
sur nos belles manifs un regard moins complaisant et à m'approprier cette
maxime d'Henri Michaux: «Qui chante en groupe, mettra, quand on le lui
demandera, son frère en prison.» Je ne renie pas 68, mais j'ai commencé il y a
longtemps à changer de regard.
Vous confessez que dans vos belles années, vous ne
compreniez pas que l'on pût se dire de droite. «N'être le salaud de personne:
telle était mon obsession», écrivez-vous. Qu'est-ce qui vous a fait changer
d'avis?
Ce sont les écrivains d'Europe centrale qui m'ont fait
comprendre que le mal totalitaire découlait de la certitude d'appartenir au
camp du Bien. Je leur dois d'avoir rompu avec la conception robespierriste de
la politique comme la guerre de l'humanité contre ses ennemis. Grâce à eux, je
suis devenu modeste.
La matrice de tous vos combats est-elle
l'antitotalitarisme?
Quand s'est dévoilée l'imposture totalitaire, j'ai pris
conscience du patrimoine commun à la droite et à la gauche. L'antitotalitarisme
ne m'a pas pour autant conduit à fétichiser la démocratie. Je chéris l'égalité,
c'est-à-dire l'universalisation du sentiment du semblable, mais je n'en conclus
ni que tous se valent, ni que tout se vaut. Et je reprends à mon compte cet
avertissement de Simon Leys: «La démocratie est le seul système politique
acceptable, mais précisément car elle n'a d'application qu'en politique. Hors de
son domaine propre, elle est synonyme de mort car la vérité n'est pas
démocratique, ni l'intelligence, ni la beauté, ni l'amour (…). Une éducation
vraiment démocratique est une éducation qui forme des hommes capables de
défendre et de maintenir la démocratie en politique ; mais dans son ordre
à elle, qui est celui de la culture, elle est implacablement aristocratique et
élitiste.» J'atténue simplement le propos en disant que la République doit
s'efforcer d'assurer la promotion de tous, mais sans jamais sacrifier
l'exigence, ni l'excellence.
Vous aviez annoncé que l'antiracisme menaçait de devenir
le communisme du XXIe siècle. Est-ce déjà le cas?
En effet, il ne reste plus rien de ce grand principe moral
que la pratique systématique du déni et la persécution des indociles. Voir ce
que l'on voit, c'est désormais s'exposer à l'accusation de racisme. Et après
Georges Bensoussan ou Pascal Bruckner, tous ceux qui s'efforcent d'ouvrir les
yeux sur l'antisémitisme et sur la francophobie qui sévissent dans les «quartiers
populaires» risquent d'être poursuivis et de comparaître devant la XVIIe
chambre pour incitation à la haine raciale.
«La droite et la gauche mettent la politique au service
de l'économie, c'est désolant»
Dans sa première lettre, Élisabeth de Fontenay vous
accuse de tenir certaines positions d'«ultra-droite». Vous lui répondez que
votre défense acharnée de la laïcité ou de l'école républicaine ne fait pas de
vous un homme de droite. Où vous situez-vous par rapport au clivage
droite/gauche?
La gauche n'a que le mot «changement» à la bouche alors
qu'il s'agit de sauver les meubles. Mais je ne suis pas de droite pour autant
car la gauche, la droite et le centre parlent d'une seule voix: la voix de
l'économie. Qu'il s'agisse des ravages du néotourisme ou de la démesure du
football, nos représentants raisonnent exclusivement en termes de rentabilité:
«Cela rapporte, donc, c'est bien!» La droite et la gauche mettent la politique
au service de l'économie, c'est désolant. Plus que jamais, la politique doit
changer de maître et, tout en œuvrant au bien-être des citoyens, servir la
civilisation.
Pensez-vous, comme Emmanuel Macron, que celui-ci est
dépassé et qu'on peut lui substituer le clivage «progressiste/conservateur»?
Vous situez-vous résolument dans le camp des conservateurs?
N'étant pas moi-même un héritier, je n'ai aucune raison de
plaider pour le maintien des privilèges et je ne souhaite nullement figer
l'ordre social. Si je suis conservateur, c'est au sens écologique, mais cette
écologie, ce principe de sauvegarde, ne doit pas se limiter à la terre, il doit
englober la culture, la langue et aussi la douceur des manières. Le regretté
Paul Yonnet cite quelque part cette belle phrase d'André Thérive: «Ce que nous
voulons poser par simple prudence, c'est donc le mécanisme du frein. La pente
n'a pas besoin de défenseurs.»
Peut-on être à la fois socialiste, conservateur, libéral,
comme le suggère Leszek Kolakowski?
Dans son célèbre Credo publié pour la
première fois en 1978ž Kolakowski rappelle que pour le conservateur, il
n'y a pas de happy end, pas de solution définitive sur le problème humain. Et
aussi qu'il y a un prix à payer pour tous les progrès que nous accomplissons.
Pour le libéral, ajoute Kolakowski, «les communautés humaines sont menacées de
stagnation, mais encore de régression lorsqu'elles se trouvent organisées de
telle manière qu'il n'y a plus de place pour l'initiative individuelle et la
faculté de création». Pour le socialiste enfin, les sociétés où la recherche du
profit est le seul facteur de régulation du système de production sont menacées
de catastrophes terribles. Les trois grandes sensibilités distinguées par
Kolakowski peuvent être différemment dosées, mais j'assume comme lui ce triple
héritage.
Élisabeth de Fontenay vous accuse d'avoir abandonné
l'idéal des Lumières. Quel est votre rapport à cette époque et ce mouvement
philosophique? Votre préférence semble plutôt aller à la Renaissance…
Ce qui caractérise les temps modernes, c'est l'humanisme.
Dieu s'absente, l'homme prend sa place: tel est le scénario. Mais cet humanisme
n'est pas d'un seul tenant. Il y a l'humanisme issu de la Renaissance qui
définit la culture comme l'acheminement vers notre œuvre personnelle à travers
le trésor des œuvres d'autrui, l'humanisme des Lumières qui veut que l'homme se
serve de sa raison pour être libre et pour étendre son empire sur le monde,
l'humanisme romantique, enfin, qui rappelle que nous ne sommes pas capables de
nous autofonder, de nous autoengendrer et qui dessine l'image d'un irréductible
enracinement de l'homme. La tension entre ces humanismes est féconde: aucun ne
doit être négligé. Je suis donc un défenseur résolu des Lumières contre leurs
adversaires et contre leur tentation d'occuper toute la place.
On a le sentiment que votre conservatisme est aussi
esthétique que politique, que votre principal moteur est votre attachement à la
beauté du monde et notamment celle du passé…
Si je suis un esthète, c'est au sens de ce paysan de l'Oise
qui, dans un documentaire sur France 5, disait que jamais l'objectif de
rentabilité ne le ferait consentir à choisir la voie de l'élevage industriel.
Car, lorsqu'au printemps, il sort enfin ses vaches de l'étable, celles-ci
gambadent comme des petites filles dans le pré. Et cette «danse des vaches,
disait M. Delargillière, n'a pas de prix».
L'un des principaux sujets de discorde avec Élisabeth de
Fontenay est la question des femmes. Êtes-vous féministe?
Ma mère était une femme au foyer et je ferais preuve d'une
atroce ingratitude si je ne reconnaissais pas tout ce que je dois à son
dévouement. Il reste que les femmes ont aujourd'hui un autre destin: elles sont
présentes dans la sphère publique, elles accèdent à tous les métiers. Je me
réjouis sans la moindre réserve de cette grande émancipation. Ce qui m'agace,
c'est d'entendre certaines néoféministes dénoncer, comme si de rien n'était, la
perpétuation de la domination masculine. Le mauvais joueur traditionnel ne
reconnaît pas sa défaite. Ces mauvaises joueuses d'un nouveau type ne
reconnaissent pas leur victoire. Elles veulent aussi en finir, une fois pour
toutes, avec la différence des sexes par la déconstruction de ce qu'on appelle
désormais le «genre». Je ne vois aucun progrès dans cette marche forcée vers
l'indifférenciation.
«Les listes noires ont fait leur sinistre réapparition
dans une partie de la presse et dans les milieux universitaires»
Élisabeth de Fontenay vous reproche également votre
amitié pour Renaud Camus. Vous écrivez que le XXe siècle est celui des
amitiés brisées. On a le sentiment que, pour vous, l'amitié est plus importante
que l'idéologie?
J'ai de profonds désaccords avec Renaud Camus, mais ceux qui
me somment de rompre avec lui pour réintégrer le cercle des gens respectables
ont une chose en commun: ils n'ont jamais ouvert aucun de ses livres. Je me
déshonorerais si je cédais à leur injonction. Je constate d'une manière plus
générale que depuis la parution du libelle commandé à Daniel Lindenberg par
Pierre Rosanvallon, et dont le titre, Le Rappel à l'ordre, sonne
comme un aveu, les listes noires ont fait leur sinistre réapparition dans une
partie de la presse et dans les milieux universitaires. On est «fasciste»
aujourd'hui quand on ose prononcer les mots «identité nationale». On est
islamophobe quand on constate avec Elisabeth Badinter qu'«une seconde société
tente de s'imposer au sein de notre République, tournant le dos à celle-ci,
visant explicitement le séparatisme, voire la sécession». Et on est
réactionnaire quand on pense que cours magistral est un pléonasme, et que le
rôle de l'école n'est pas d'adapter les enfants aux nouvelles technologies (ils
n'ont pas besoin des adultes pour ça), ni de leur inculquer le bien vivre
ensemble, l'interculturalité et les vertus du développement durable, mais de
les soustraire au battage de l'esprit du temps et de les introduire dans un
monde plus vieux qu'eux pour leur permettre d'innover et d'être tout ce qu'ils
peuvent être. Cette intimidation et cette disqualification pourrissent la vie
intellectuelle. J'essaie de tenir bon.
En terrain miné est un véritable débat
intellectuel comme on n'en fait plus, mais débouche sur une impasse. Chacun
reste sur ses positions et Élisabeth de Fontenay avoue qu'elle pourrait être
ostracisée par une partie de ses amis pour ce livre. Que cela révèle-t-il?
Est-il impossible de débattre aujourd'hui en France?
Nous avons discuté, et grâce sans doute à la forme
épistolaire que nous avons choisie pour ces échanges, notre amitié a résisté
aux orages. Tout n'est pas perdu.
Pour la 18e Rencontre du Figaro, Alexis Brézet
et Vincent Trémolet de Villers recevront Elisabeth de Fontenay et Alain
Finkielkraut. À cette occasion, Le Figaro vous invite à
partager ce moment unique aux côtés de ces deux philosophes et amis qui
parleront de leur essai épistolaire En terrain miné(Stock). Une
dédicace de leur livre suivra cette conférence qui se déroulera lundi 25
septembre, à 20 h, Salle Gaveau, 45-47, rue La Boétie, Paris VIIIe.
Informations au 01.70.37.31.70. Réservez vos places
sur www.lefigaro.fr/rencontres ;
25 €, placement libre.
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d'appartenir au camp du Bien»
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enfants de M. Séguin
Ran Halévi : «Histoire mondiale ou histoire
alternative de la France ?»
Par Ran
Halévi
Publié le 15/09/2017 à 17h33
TRIBUNE - L‘historien revient sur le best-seller
« Histoire mondiale de la France ». Il y voit une histoire à la
carte, empreinte d'idéologie malgré l'exigence de scientificité.
Parue en pleine saison électorale, L'Histoire
mondiale de la Francede Patrick Boucheron a connu un beau succès et suscité
de vives polémiques. Il est toujours temps de revenir, avec le recul, sur son
ambition affichée de produire une «histoire autre» et ce qu'elle révèle de
notre époque.
Qu'est-ce qu'une «histoire mondiale»? Elle peut renvoyer à
des événements politiques, scientifiques, culturels, dont le caractère
extra-national aura marqué le cours de notre passé - l'indépendance américaine,
la révolution industrielle, les guerres mondiales, le phénomène totalitaire…
Mais elle dénote également des moments de notre histoire, et
des réalisations, qui ont résonné par-delà nos frontières. Voyez le règne de
Louis XIV dont l'ambition «mondiale» a été de jeter les bases politiques et
culturelles d'une prééminence française, d'un exceptionnalisme national à
caractère universel. Ou la publication deL'Esprit des lois, qui allait
irriguer l'esprit des institutions en Europe et en Amérique. Ou la Déclaration
des droits de 1789, promesse d'émancipation universelle, dont le retentissement
a remué l'Europe et traversé les océans. Et, plus généralement, la Révolution
française dont l'ombre devait hanter les contemporains et, plus tard, la
révolution bolchévique. Ou Tocqueville qui fera découvrir au monde les ressorts
du phénomène démocratique. Et cet autre événement de portée mondiale qu'a été
la séparation de l'Église et de l'État en 1905.
Mais voilà, aucun de ces moments - il en est d'autres — ne
figure dans le corpulent florilège qui compose cette Histoire mondiale(800
pages et 146 dates présentées par de courts essais). Son maître d'œuvre,
Patrick Boucheron, dans une «ouverture» qui ne se veut pas une introduction et
ne l'est pas en effet, se montre peu prolixe sur ce qu'il entend par ce titre
alléchant, censé pourtant faire la nouveauté du livre. «Expliquer la France par
le monde, écrire l'histoire d'une France qui s'explique avec le monde»: ces
formules nébuleuses autorisent à mettre sous le label «mondial» tout et son
contraire. Dans la presse, M. Boucheron va jusqu'à confier avoir choisi
cette épithète «par une sorte provocation joyeuse», ce qui n'offre pas
davantage une garantie d'intelligibilité.
L'auteur, un dévot de l'historiographie jacobine, en
recycle ici les poncifs délabrés qui visent à banaliser cet épisode lugubre.
Ailleurs, il précise son ambition: réconcilier «l'art du
récit et l'exigence critique», la rigueur de méthode et «le principe de
plaisir», proposer des «narrations entraînantes», des «promenades
buissonnières», bref produire une histoire «joyeusement polyphonique». Le gai
savoir en somme. Seulement, faute de circonscrire son objet, l'ouvrage
ressemble par moments à un marché aux puces peuplé d'objets trouvés, où toutes
les dates se valent.
Pour ajouter à la confusion, M. Boucheron invoque
Braudel selon qui la France «se nomme diversité» (mais sans préciser laquelle…)
; il dit aussi son attachement à une identité «composite et multiculturelle».
On comprend mal, du coup, pourquoi il met son entreprise sous les auspices de
Michelet, ennemi furieux de toute espèce de diversité ; et des fondateurs des
Annales, dans un livre fait de dates et d'événements, le genre même qu'ils
vouaient aux gémonies.
Cette histoire mondiale par intermittences, dont M.
Boucheron veut «neutraliser la question des origines», s'étire en amont
jusqu'au 34.000 avant J.-C., à l'homme de Cro-Magnon, «notre ancêtre direct —
un métis par vocation». Se succèdent alors des dates et des entrées, certaines
excellentes - sur la fondation de Marseille, la traduction du Coran à
l'initiative de Pierre le Vénérable (mais coiffée d'un «chapeau» qui «lepénise»
toute l'entreprise), la Peste noire, la révocation de l'édit de Nantes,
l'affaire Dreyfus, le début du tourisme de masse… Mais dès qu'on aborde
certains jalons canoniques de notre passé mondial, le «principe de plaisir»
fait place à un parti moins joyeux.
Ainsi le règne de Louis XIV, dont le Code noir constituerait
l'un des «caractères essentiels», les autres étant tout aussi pendables:
«Croisade contre l'Islam en Méditerranée, purification religieuse, conversions
et expulsions, ambition coloniale, organisation d'un esclavage de masse,
idéologie suprématiste.» De là à réclamer qu'on abatte la statue du Roi-Soleil…
On n'est guère mieux loti avec le traité de 1763, qui
conclut la guerre de Sept Ans, dépouille la France de ses possessions en
Amérique et bouleverse durablement l'ordre mondial. L'auteur y voit surtout la
monarchie abandonner «l'idée impériale pour choisir de préserver le système
colonial esclavagiste», cependant que le royaume est ramené à «un ordre
national qui procède d'une puissante matrice coloniale et sexuelle». On ne
saurait mieux dire.
Criminalisation du passé d'un côté, disculpation de
l'autre.
Mais le pompon revient à l'article sur la Terreur
révolutionnaire. L'auteur, un dévot de l'historiographie jacobine, en recycle
ici les poncifs délabrés qui visent à banaliser cet épisode lugubre. Et qu'il
enrichit d'autres ficelles. Il dénonce la diabolisation posthume de
Robespierre, pour mieux taire son féroce magistère à l'époque. La Terreur? Un
«cliché», assure-t-il benoîtement (et pourquoi pas un détail de l'histoire?).
Elle serait un «outil de répression couramment utilisé» alors à travers
l'Europe, manière de la «mondialiser» pour mieux la rendre digestible. Je ne
vois nulle part en Europe ériger le terrorisme d'État en système de
gouvernement. Ou expédier à la guillotine des dizaines de milliers de victimes
pour délit supposé d'opinion, sur simple dénonciation, sans autre forme de
procédure. Et encore moins décimer le quart de la population d'une région, la
Vendée, autre «détail» oublié dans cette notice extravagante.
Criminalisation du passé d'un côté, disculpation de l'autre.
Le caractère idéologique de cette entreprise ne tient pas tant à l'évocation de
l'esclavage ou de l'histoire coloniale («l'agression coloniale», dixit
Boucheron) qu'à l'intention d'y réduire l'intelligence du passé en y projetant
rétrospectivement les passions et les valeurs du présent. Idéologique aussi par
cette exclusion des moments où notre histoire parut mondiale, de sorte que les
dates retenues prennent forcément une résonance biaisée qui déteint sur
l'ensemble.
En fuyant la définition d'un principe interprétatif, cet
ouvrage empile sans hiérarchie événements majeurs et épisodes accessoires sous
l'emballage artificieux de l'exigence scientifique. Il en ressort un objet
déconcertant, composé «à la carte», une histoire proprement alternative, par ce
qu'elle omet et ce qu'elle suggère.
M. Boucheron a conçu cette «polyphonie enjouée» contre les
«conteurs peu scrupuleux» que plébiscite le public et contre «le rétrécissement
identitaire» qui afflige le pays. Je me demande combien de lecteurs se sont
précipités sur cette histoire mondiale en quête précisément de ce que lui
prétend combattre: un éperdu besoin identitaire.
*Directeur de recherche au CNRS, Professeur au Centre de
recherches politiques Raymond-Aron
Turquie: Erdogan tourne-t-il le dos à l'Otan ?
(15.09.2017)
Par Delphine
Minoui
Publié le 15/09/2017 à 19h18
ANALYSE - L'achat par la Turquie de missiles
russes s'inscrit dans un contexte de tensions avec ses interlocuteurs
occidentaux et révèle une volonté du président turc de diversifier ses
partenaires.
De notre correspondante à Istanbul
Faut-il s'inquiéter du rapprochement turco-russe? Finalisé
ce mercredi, le contrat d'achat de systèmes de défense antiaérienne S400 russes
par Ankara n'est pas passé inaperçu. À Washington, le Pentagone a
rappelé sans détour qu'«il est généralement plus judicieux pour les Alliés
d'acheter du matériel interopérable de l'Otan». Derrière cette réaction se
cachent de vives préoccupations politiques à l'heure où la Turquie, un des
piliers de l'Alliance atlantique, entretient des relations de plus en plus
tendues avec les États-Unis et l'Europe. Fidèle à ses diatribes enflammées, le
président turc défend ses choix. «Ils sont devenus fous à cause de l'accord sur
les S400. Qu'aurions-nous dû faire: vous attendre? Nous prenons toutes les
mesures nécessaires sur le front de la sécurité», a ainsi tranché Recep Tayyip
Erdogan lors d'un discours à Ankara.
Le pied de nez à l'Occident est évident. De
nombreux différends opposent Ankara à ses interlocuteurs occidentaux. À
commencer par la question du soutien de Washington aux rebelles kurdes syriens
des Unités de protection du peuple (YPG), qu'Ankara considère comme une
extension du PKK. Ou encore l'épineux dossier des violations des droits de
l'homme depuis le début de la vague de purge amorcée après le coup d'État raté
du 15 juillet 2016. Quant au processus d'adhésion à l'UE, il semble
de plus en plus compromis par une Allemagne remontée contre l'incarcération de
certains de ses ressortissants en Turquie et l'ingérence d'Ankara dans sa
campagne électorale.
Mais ce «deal» militaire turco-russe relève aussi de
considérations stratégiques. Pour ces deux pays, c'est un moyen d'enterrer leur
grave crise diplomatique, deux ans après l'abattement par la chasse turque d'un
bombardier russe en mission dans le nord-ouest de la Syrie. À l'époque, l'incident
avait provoqué l'ire de Moscou et débouché sur des sanctions économiques,
douloureuses pour la Turquie. D'aucuns rappellent également les préoccupations
sécuritaires qui ont motivé le choix d'Ankara. «Au vu de l'insécurité qui
prévaut au Moyen-Orient et des menaces environnantes, dont celle du PKK, la
Turquie a jugé qu'il était urgent de s'équiper au plus vite d'un système de
défense. Or les autres pays concertés n'ont pas été en mesure de faire une
offre à la hauteur de celle de Moscou», estime Murat Yesiltas, expert en
questions sécuritaires.
«Une volonté de diversification plus qu'une envie de se
couper de l'Occident»
Entamées à la fin des années 1990, les prospections
d'Ankara pour l'acquisition d'un système de défense antiaérienne se sont
accélérées depuis 2006. Après avoir consulté des compagnies américaines,
européenne et également chinoise, Ankara a fini par se tourner vers la Russie.
Après de longues négociations, la Turquie vient de verser son premier acompte
et Moscou se prépare aux livraisons. «Les motivations sont avant-tout
techniques et économiques», précise Murat Yesiltas. Balayant d'un revers de la
main les craintes d'un éloignement de l'Otan, il y voit «une volonté de
diversification plus qu'une envie de se couper de l'Occident». Une analyse
à laquelle la France semble vouloir adhérer. «L'achat de ces équipements
militaires par la Turquie relève d'un choix souverain qu'il n'appartient pas
aux membres de l'Alliance atlantique de commenter», a ainsi déclaré un
représentant du ministère français des Affaires étrangères.
C'est que, du point de vue de la diplomatie française, la
Turquie demeure un partenaire, certes compliqué, mais incontournable dans la
région. Interviewé le 7 septembre par un quotidien grec, le président
Emmanuel Macron a signifié qu'il voulait «éviter les ruptures» avec la
République turque, «un partenaire essentiel dans de nombreuses crises que nous
affrontons ensemble, je pense au défi migratoire ou à la menace terroriste,
notamment», tout en condamnant les «dérives
préoccupantes» du
pays. La visite, ces jeudi et vendredi, du ministre français des Affaires
étrangères, Jean-Yves Le Drian, à Ankara confirme cette approche
pragmatique. Si le dossier syrien, la lutte contre le terrorisme et la
libération du jeune journaliste français Loup Bureau, emprisonné en Turquie,
ont fait partie des sujets chauds, la question d'un partenariat turco-européen
sur un projet de système de défense antiaérien devait également être évoquée.
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Natacha Polony : «Réflexions non autorisées sur la PMA
pour toutes» (16.09.2017)
Par Natacha
Polony
Mis à jour le 16/09/2017 à 13h50 | Publié le 15/09/2017 à 15h53
FIGAROVOX/CHRONIQUE - Avoir un enfant est-il un droit ?
Il semble aujourd'hui impossible d'exprimer des interrogations légitimes sur le
sujet sans que ne ressurgissent la violence, les prises à partie et les procès
d'intention.
C'est un sentiment de profonde lassitude. Il a suffi que la
secrétaire d'État à l'Égalité «entre les femmes et les hommes», un jour de
manifestation contre la loi travail, n'allume un contre-feu en
déclarant que la procréation médicalement assistée serait légalisée pour toutes
les femmes en 2018pour que ressurgissent la violence, les prises à partie
et les procès d'intention. Sur les réseaux sociaux, des tordus insultent les
homosexuels, des excités proclament qu'il faut «protéger nos enfants». De
l'autre côté, des militants LGBT traitent d'«homophobe» quiconque ne partage
pas l'ensemble de leurs vues, considèrent qu'on ne saurait être légitime pour
réfléchir à ces questions si l'on n'est pas homosexuel, et se lancent dans des
analogies effarantes: «Bientôt, on interdira aux chômeurs d'avoir des enfants…»
(rappelons que personne «n'interdit» aux lesbiennes d'avoir des enfants, elles
le peuvent).
Aussi, pour éviter tout énervement inutile, sans doute
faut-il poser quelques prémisses: nul ne reviendra sur le mariage pour tous, ni
sur la PMA, qui sera bien évidemment étendue aux couples de femmes
homosexuelles. De sorte que les réflexions qui suivent relèvent seulement d'une
analyse de la notion de droit dans les sociétés libérales, sans que des groupes
activistes ne puissent s'en prévaloir pour insulter qui que ce soit.
Avoir un enfant est-il un droit? Telle est finalement la
question que se pose quiconque se penche sans a priori sur le sujet. Jusqu'à
une époque récente, avoir un enfant était un fait, l'enfant était une
conséquence naturelle du couple (hétérosexuel, fatalement), que celui-ci dure
dix minutes ou une vie entière. Et tout enfant était issu du croisement d'un
principe masculin et d'un principe féminin, que ce père et cette mère soient
des modèles ou des repoussoirs. La médecine ayant progressé, il a été peu à peu
proposé aux couples stériles de les aider en compensant les problèmes physiologiques
qui les empêchaient de concevoir. Le premier problème se présente à partir du
moment où, ne pouvant soigner l'infertilité, on propose à la place de remplacer
les gamètes défectueux par d'autres que celles du couple parent. Problème
éthique puisque des gamètes, porteurs des caractéristiques génétiques et de
toute l'histoire biologique d'un individu, sont traités comme un matériau pour
fabriquer un enfant. Pour autant, on reste bien dans le cadre médical: il
s'agit de traiter l'infertilité. Un traitement qui n'est en rien un droit. Il
n'est d'ailleurs pas accessible non plus aux femmes de plus de 43 ans,
puisqu'il est censé compenser ce que devrait permettre la nature mais qu'elle
ne permet pas. Tel est, du moins, le droit français.
«Il n'est pas question de permettre aux lesbiennes
d'avoir des enfants (...) mais bien de transformer l'État en fournisseur
d'enfants pour tous ceux qui ne veulent pas en passer par la reproduction
naturelle»
Les sociétés libérales telles que le sont les sociétés
anglo-saxonnes et telles que tend à le devenir la société française considèrent
que les présupposés éthiques qui régissent nos lois bioéthiques (ce précepte
issu des Lumières, et notamment de la morale kantienne, selon lequel on ne doit
en aucun cas instrumentaliser l'humain, l'utiliser comme un moyen) sont
inutiles et infondés, car le principe qui doit régir une société démocratique
est la régulation par le droit et le marché. Est autorisé tout ce qui ne limite
pas les libertés d'autrui en tant qu'individu. Il n'y a donc aucune raison
objective, dans cette conception des rapports sociaux, pour ne pas étendre les
droits individuels, suivant la logique selon laquelle tout ce qui est possible
doit être permis. Mais le problème se complique, concernant la PMA pour les
couples homosexuels. Car il ne s'agit pas d'étendre un droit mais de réclamer
que l'État et la collectivité prennent en charge la procédure qui permettra à
des femmes de fabriquer des enfants sans avoir à s'embarrasser d'un père.
«Fabriquer», dans la mesure où la conception devient volontairement un
processus technique. Il s'agit donc bien, non pas d'étendre une liberté au nom
de l'égalité mais de considérer qu'avoir un enfant est un droit pour lequel la
collectivité doit payer (puisqu'il s'agit de la faire payer par la Sécurité
sociale, ce qui signifie également que la «Sécu» n'est plus une assurance
solidaire contre les risques). Il n'est pas question de permettre aux
lesbiennes d'avoir des enfants alors qu'on les en aurait privées jusqu'à
présent, mais bien de transformer l'État en fournisseur d'enfants pour tous
ceux qui, quelle qu'en soit la raison, ne veulent pas en passer par la
reproduction naturelle (des couples hétérosexuels, là où c'est autorisé,
trouvent désormais plus confortable d'avoir recours à la PMA, ce qui implique,
dans certaines cliniques, de sélectionner un embryon non porteur de certains
facteurs génétiques prédisposant à des maladies). La fabrique des êtres humains
avance par bien des moyens, la PMA pour toutes en est un parmi d'autres.
Balayer d'un revers de main ces réflexions au nom du désir
d'enfant, ou plutôt du désir d'enfant sans père, de certaines femmes, relève du
déni. Traiter ceux qui s'y livrent d'homophobes relève du terrorisme
intellectuel. L'idéologie du progrès qui prévaut dans nos sociétés libérales
nous impose d'estimer que c'est la marche de l'histoire. Sommes-nous obligés,
en plus, de nous interdire toute pensée?
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Pékin soutient l'offensive de l'armée birmane dans l'État
d'Arakan (15.09.2017)
Par Cyrille
Pluyette
Mis à jour le 15/09/2017 à 20h33 | Publié le 15/09/2017 à 18h46
Au moment où la situation humanitaire ne cesse de se
dégrader au Bangladesh, qu'on rejoint près de 400.000 Rohingyas, le
gouvernement chinois semble se focaliser sur la menace représentée par les
rebelles de cette minorité.
De notre correspondant à Pékin
Alors que la pression internationale s'accroît sur Rangoun
face aux cohortes de Rohingyas
fuyant les violences de l'armée birmane, une voix dissonante s'est
clairement fait entendre, celle de Pékin. Le ministère chinois des Affaires
étrangères, «soutient les efforts» de la Birmanie pour «maintenir la paix et la
stabilité dans l'État Rakhine (d'Arakan, NDLR)», a déclaré son porte-parole
cette semaine, à l'heure où l'ONU dénonce un «nettoyage ethnique» de la minorité
musulmane du pays dans cette région.
Au moment où la situation humanitaire ne cesse de se
dégrader au Bangladesh, qu'on rejoint près de 400.000 personnes, le
gouvernement chinois semble se focaliser sur la menace représentée par les
rebelles de cette minorité. «La riposte des forces birmanes contre les
extrémistes terroristes et les mesures gouvernementales d'aide à la population
sont chaleureusement approuvées», a réagi cette semaine l'ambassadeur de Chine
en Birmanie, Hong Liang, dont les propos ont été cités par un journal local
dépendant des autorités. L'attaque, revendiquée par l'Armée du salut des
Rohingyas de l'Arakan (Asra) d'une trentaine de commissariats à la fin du mois
dernier, a déclenché une nouvelle réaction violente de l'armée birmane à
l'encontre de l'ensemble de la population musulmane de la région.
Dans un éditorial récent, le Global Times,
journal nationaliste affilié au Parti communiste chinois, s'insurge contre
la condamnation
internationale dont fait l'objet Aung San Suu Kyi, la dirigeante birmane,
également prix Nobel de la paix. Doit-on «la blâmer pour la violence?» dans
l'État d'Arakan, s'interroge le quotidien, pour qui «éviter un tel désastre est
en réalité plus difficile que ce que pensent les voix critiques occidentales».
Car dans les pays en voie de développement, «une fois que des conflits
ethniques à grande échelle se déclenchent», ils peuvent facilement devenir
«hors de contrôle» et mener au «massacre» de minorités et à des exodes massifs,
poursuit l'éditorial.
Bien que l'ethnie birmane soit largement majoritaire dans la
population, ce pays «compte plus de 130 groupes ethniques dont beaucoup sont
armés», argumente le Global Times, ce qui pose, selon cet organe, «depuis
longtemps un défi à la stabilité sociale de la Birmanie et à son unité».
Justifiant le choix de l'ancienne icône de la démocratie aujourd'hui au pouvoir
de ne pas condamner un «génocide», le journal chinois, estime qu'Aung San Suu
Kyi a «peu d'espace» pour prendre la défense des Rohingyas, tant l'opinion
publique se montre «nationaliste» dans ce conflit.
«La riposte des forces birmanes contre les extrémistes
terroristes et les mesures gouvernementales d'aide à la population sont
chaleureusement approuvées»
Hong Liang, ambassadeur de Chine en Birmanie
L'article établit implicitement un parallèle avec la Chine,
un pays aux 56 ethnies, où les Hans sont archi-majoritaires. Obsédé par la
stabilité, le gouvernement chinois, au nom des menaces «terroristes»
croissantes représentée par des extrémistes ouïgours dans le Xinjiang et du
risque «séparatiste», a accru sa répression sur l'ensemble de cette communauté
musulmane, observent plusieurs experts.
La Chine n'est toutefois pas la seule à se montrer
compréhensive envers l'offensive des forces birmanes. Lors d'une récente visite
en Birmanie, le premier ministre indien, Narendra Modi, a déclaré qu'il
partageait l'inquiétude de Rangoun concernant «la violence extrémiste» qui a
frappé les forces de sécurité dans l'État d'Arakan. Le dirigeant nationaliste
hindou, a lui aussi appelé à «l'unité et à l'intégrité territoriale» de la
Birmanie.
Pendant ce temps, «les
preuves irréfutables»
des persécutions subies par les Rohingyas - la plus grande communauté
apatride du monde - s'accumulent, selon Amnesty International. «Les forces de
sécurité mettent le nord de l'État d'Arakan à feu et à sang dans le cadre d'une
campagne ciblée visant à faire partir les Rohingyas», a dénoncé Tirana Hassan,
directrice du programme Réaction aux crises au sein de l'ONG.
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Il y a 35 ans, le massacre de Sabra et Chatila au Liban
(15.09.2017)
Publié le 15/09/2017 à 19h20
LES ARCHIVES DU FIGARO - Du 16 au 18 septembre 1982 des
réfugiés palestiniens étaient massacrés par des milices chrétiennes dans la
banlieue de Beyrouth. Voici le récit du correspondant spécial duFigaro découvrant
le camp de Sabra après la tuerie.
Tout commence par un assassinat. Le 14 septembre 1982 le
président nouvellement élu, Bachir Gemayel -chef des Forces libanaises, milices
chrétiennes-, est tué dans un attentat. Deux jours après, par vengeance, débute
le massacre de civils palestiniens dans deux camps de réfugiés -Sabra et
Chatila- dans la banlieue de Beyrouth. Il est perpétré par des miliciens
chrétiens (les Phalangistes) et se poursuit jusqu'au 18 septembre au matin.
Mais ce n'est que le 19 septembre que le monde apprend l'affreuse tuerie
-méthodique, qui n'a épargné personne: hommes, femmes, enfants, animaux.
Dès le 17 septembre au matin des femmes palestiniennes -qui
ont pu fuir les camps- alertent sur le drame en cours, dans les rues de Beyrouth-Ouest.
De nombreux journalistes, qui couvrent la guerre civile au Liban, sont présents dans la capitale.
Certains d'entre-eux commencent à enquêter et tentent d'entrer dans les camps
de réfugiés. Mais ils sont bloqués par les troupes israéliennes qui encerclent
les camps et contrôlent leur accès. Et ce n'est que le lendemain, quelques
heures après la fin du carnage, que les premiers journalistes peuvent enfin pénétrer
dans les camps de Sabra et Chatila. En France c'est le quotidien Libération qui
annonce le massacre dans son édition du 19 septembre 1982. La première dépêche
de l'AFP tombe quant à elle dans l'après-midi, ce même jour. Avec l'arrivée des
photographes et médias internationaux à Sabra et Chatila, l'horreur fait le
tour du monde, provoquant stupeur et indignation. En 1983 l'enquête officielle
libanaise conclut à «l'entière responsabilité» des forces israéliennes. Et, en
1991, une loi d'amnistie générale est décrétée.
Voici l'intégralité du récit du correspondant spécial
du Figaro de l'époque, Jean-Jacques Leblond.
Article paru dans Le Figaro du 20 septembre 1982.
Un spectacle insoutenable
Beyrouth vient de toucher le fonds de l'horreur. Plusieurs
centaines de civils palestiniens, qui vivaient encore dans ce qui tenait debout
dans les camps du sud de la capitale, ont été tués dans d'atroces et odieuses
conditions. Atroces parce que les auteurs ont frappé indistinctement femmes et
enfants; odieuses, parce qu'ils s'en sont pris à une population
désarmée et désemparée. Des enfants ont été tués du seul fait qu'ils
étaient Palestiniens et que plus tard, selon la déclaration des exécutants de
la tuerie, «ils grandiraient et deviendraient des terroristes».
Carte localisant les camps de réfugiés palestinniens de
Sabra et Chatila parue dans Le Figaro du 20 septembre1982. - Crédits photo
: Le Figaro
Je reviens de Sabra. Je traîne encore derrière moi
l'odeur du charnier, la puanteur de la mort. Partout des cadavres déjà
noircis par le soleil et raidis. Des nuages de mouches leur servent de
linceuls. Ici, la mort n'est pas silencieuse. Des pleurs, des gémissements, des
hurlements poussés par des femmes résonnent à nos oreilles. Dans cet univers
dément et éclaté, chaque coin de ruelle est un drame. Des femmes vous
entraînent dans les pires recoins où se gonflent des cadavres enchevêtrés et
distordus. Chœur gémissant et autoritaire, elles nous tirent par le bras
vers des carnages: autour d'une table, pas encore desservie, une famille gît en
rond. Ailleurs, deux adolescents, dont l'un tient encore un fusil.
«Nous n'avons rien compris ensuite. Les autres ont tiré
et tué.Ça a duré tout le lendemain, c'était horrible»
Réfugiés palestiniens.
Nous allons de cadavres en cadavres et l'on essaie de nous
raconter la genèse du drame: «C'est jeudi que nous avons vu arriver des
soldats. Parmi, nous, un franc-tireur a ouvert le feu et les autres ont
riposté. Nous avons eu peur et beaucoup sont partis avec des drapeaux
blancs vers l'est. D'autres se sont dirigés vers les lignes israéliennes.
Nous n'avons rien compris ensuite. Les autres ont tiré et tué. Nous, nous avons
pu nous cacher sous des maisons démolies. Ça a duré tout le lendemain, c'était
horrible.»
Je donne ici, en raccourci, la traduction des témoignages
que j'ai recueillis. Ils se ressemblent tous et tous sont pitoyables. Nous
retenons au bord des lèvres des nausées irrépressibles qui mouillent nos
mouchoirs. Les ambulanciers, visages masqués, brancardent des masses
informes, dissimulées sous des couvertures. On parle de mille morts: mille
morts, ce fut, si je m'en souviens bien, le bilan d'un autre massacre perpétré
au Liban. Celui de Damour, cette ville proche de Beyrouth, que les
Palestiniens, un soir de janvier exterminèrent.
Des familles ont été surprises alors qu'elles dormaient
sur des nattes. Des bébés semblent encore dormir sur leur couche.
Dans l'une des rues du camp, où l'on relève des traces de
bulldozers qui ont défoncé les murs des habitations, des morts sont allongés
sur les trottoirs. Personne n'a été épargné, ni les hommes ni les
animaux. Couchés dans une courette, près de huit corps humains, deux
cadavres de chevaux dressent leurs jambes en l'air. Un peu plus loin, des
poulets et des chats ont été abattus par des rafales d'armes automatiques. Le
sol est jonché de douilles. À l'intérieur des maisons, on découvre le drame
tout entier. Des familles ont été surprises alors qu'elles dormaient sur des
nattes. Des bébés semblent encore dormir sur leur couche. Dans les cours
traînent encore des jouets qui ont été précipitamment abandonnés. «En
massacrant des innocents, c'est la paix au Liban qu'on a assassinée», me dit un
Libanais, qui, comme nous tous, est horrifié.
Extrait de la Une du Figaro du 20 septembre 1982. - Crédits
photo : Le Figaro
Pourtant, samedi, juste avant que nous prenions connaissance
des premières rumeurs concernant ce massacre, la situation allait en se
normalisant. Perquisitions en série, vérifications à la chaîne et récupération
massive des matériels de tous calibres. L'armée israélienne achevait de
prendre possession de Beyrouth-Ouest. Elle venait de passer à la
deuxième phase de son opération éclair: le quadrillage de la capitale. Elle s'y
était installée massivement. Samedi, elle avait renforcé sa présence et des
colonnes de blindés avaient boudé tous les points chauds. Des chars Merkava et
des transports de troupes M 113 quadrillaient tous les secteurs et tenaient les
principaux axes.
Dans bien des cas, les combattants progressistes du
mouvement mourabitoune avaient préféré céder leurs positions et déposer leurs
armes. Tout allait vers le calme. Les Israéliens avaient
occupé les principaux sièges des organisations adverses. Ceux des nassériens et
du Parti populaire de Walid Joumblat. Ils atteignaient dans la foulée les
locaux du bureau central de l'O.LP. à Mazraa, et, dans le même temps, ils
installaient leurs différents services dans plusieurs grands hôtels après
avoir coupé toutes les communications de Beyrouth avec le monde extérieur.
La chasse aux suspects
Et la chasse aux suspects avait commencé dans les rues et
les immeubles. Des petits commandos légers de Land-Rovers, montées par des
équipes de quatre hommes portant des gilets pare-balles, s'étaient mis à
circuler à toute allure. Il était apparu que cette course répondait à un plan
méthodiquement préparé: la mise en place d'un dispositif policier bien informé.
Cartes détaillées, photos aériennes commentées et documents
divers en mains, les groupes spéciaux israéliens avaient fait leur entrée. Ils
s'étaient immédiatement dirigés vers les caches secrètes de l'O.L.P. et de ses
alliés. Dans un bâtiment proche de l'ambassade de France, dans un sous-sol
parfaitement aménagé et profondément enterré, ils avaient découvert un
important stock d'armes et de munitions. Peu après, plusieurs camions lourds,
escortés de blindes, transportaient un chargement dé caisses scellées vers le
port.
Une femme palestinienne pleure le 20 septembre 1982
au-dessus des corps de ses proches tués, le 17 septembre 1982 dans le camp de
réfugié à Beyrouth. - Crédits photo : SANA/AFP
La purge de Beyrouth commençait en même temps que les
rafles. Avenue de Paris, sur le front de mer, des centaines d'hommes
avaient été rassemblés sur la chaussée, attendant que leur situation soit éclaircie.
Comme dans les territoires du Sud, les Israéliens disposaient ici de réseaux de
renseignements solidement implantés. Et les «taupes», infiltrées dans les rangs
de l'adversaire, réapparaissaient au grand jour. Certains habitants affirmeront
même avoir reconnu sous les traits d'un officier israélien un ancien
responsable palestinien bien connu d'eux. Toujours est-il que, convaincant ou
pas, ce témoignage collectif conforte l'idée que le Mossad en savait long sur
l'infrastructure adverse. Il avait repéré un bon nombre de dépôts clandestins
de l'O.L.P. qu'il n‘a aujourd'hui aucune difficulté à découvrir. On racontait
même que les services secrets israéliens avaient «marqué» à l'aide de pastilles
électroniques certains des refuges les plus secrets des dirigeants
palestiniens.
«Que les hommes se rendent pour protéger leurs familles.
Il ne leur sera fait aucun mal.»
On récupère aussi, dans les rues, des armes qui ont été
précipitamment abandonnées et des paquets d'explosifs. Si donc Tsahal campe
aujourd'hui dans les jardins de Beyrouth, ce n'est que samedi matin qu'elle
avait achevé l'investissement de la zone des camps palestiniens depuis la
corniche Mazraa. Les unités israéliennes avaient avancé en tenaille. Elles
avaient fait précéder leur progression par des appels au mégaphone: «Que les
hommes se rendent pour protéger leurs familles. Il ne leur sera fait aucun mal.» En
fin de matinée, quelque 1 500 réfugiés palestiniens s'étaient rendus aux
patrouilles. En colonnes anxieuses, ils avaient été conduits vers la
«cité sportive» et le stade municipal de Fakhani où commençaient les
formalités de tri. Dans les ruines de la cité sportive, deux cents suspects,
assis sous la carcasse effondrée de la tribune, attendaient encore dans
l'après-midi. Une foule de femmes en pleurs interrogeaient un gradé sur
le sort qui serait réservé aux captifs: «S'ils n'ont rien à se reprocher
ils vous seront rendus», leur répondit-il.
Traces de massacres
Mais la neutralisation des redoutes ruinées de l'O.L.P.
aurait pu passer pour une simple opération de contrôle si une information
n'était venue lui donner un tour tragique. Dans certains secteurs de Sabra et
de Chatila, on venait de découvrir des traces de massacre perpétré contre la
population civile. Selon certaines sources contradictoires et
impossibles à vérifier, on aurait retrouvé plusieurs centaines de victimes:
hommes, femmes et enfants confondus, sommairement exécutés. On apprenait
également que plusieurs habitations avaient été détruites à la dynamite ou
défoncées par les bulldozers. On découvrit dans les maisons des corps figés
dans le sommeil et, plus loin ceux de deux vieillards tombés à proximité de
leur éventaire de primeurs.
Le général chrétien libanais Saad Haddad en 1979. -
Crédits photo : IPPA/AFP
Une première enquête révéla que, dès jeudi soir, des
éléments armés, revêtus de treillis vert olive, ne portant, aucun signe
distinctif, s'étalent introduits dans les camps. Un communiqué de la télévision
libanaise laissait entendre, dans la soirée de samedi, qu'il s'agissait
des milices chrétiennes de l'Armée de libération du Sud opérant sous
les ordres du major Saad Haddad. Celui-ci, ancien officier, avait fait
dissidence en 1976. Avec deux mille hommes, il s'était taillé un petit fief
autour de Marjayoum, dans le Sud, et il en avait fait un État tampon entre les
lignes de l'O.L.P. et la frontière d'Israël. Il s'était fait connaître
par ses méthodes expéditives à l'époque ou, jusqu'en juin dernier, les
Palestiniens occupaient toute la partie méridionale du Liban. Allié des Israéliens,
il n'avait toutefois que symboliquement participé à leurs interventions. Il
avait été chargé du maintien de l'ordre dans les zones libérées. Bien que
chrétien, le major Haddad n'entretenait aucune relation de caractère politique
ou militaire avec l'organisation «kataïeb» de Bechir Gemayel. On n'avait
jamais, d'autre part, signalé la présence de cette milice sudiste dans la
région de Beyrouth jusqu'à samedi matin. Les effectifs de deux compagnies en
uniformes non identifiables ont été vues en effet en train de manœuvrer à
proximité de l'aéroport international.
La tuerie remonterait à jeudi soir et à vendredi matin.
On se pose bien évidemment des questions sur
l'identification des véritables responsables de ces exécutions sommaires, et,
surtout, on s'interroge sur les conséquences politiques immédiates de
ces massacres. Selon certains témoins d'origine européenne, qui
travaillaient à l'hôpital d'Acca (Saint Jean-d'Acre), au sud de la capitale,
non loin des camps de Sabra et Chatila, la tuerie remonterait à jeudi soir et à
vendredi matin. Elle aurait suivi les violents accrochages qui avaient
opposé les derniers combattants progressistes aux forces israéliennes. Ces
combats, qui avaient débuté mercredi à midi, s'étaient achevés vendredi à
l'aube. Mais à aucun moment le contingent militaire israélien n'avait pénétré
dans les camps, se contentant de les encercler et de se diriger vers le centre
de la capitale.
Les corps des réfugiés palestiniens tués dans le camp de
Sabra au Liban en septembre 1982. - Crédits photo : STF/AFP
Plusieurs des médecins et infirmiers, servant au titre du
Croissant-Rouge palestinien et qui ont depuis été évacués vers leurs ambassades
respectives, nous ont déclaré: «Des militaires sont arrivés jeudi à l'hôpital
et nous ont accostés, ils paraissaient très nerveux et excités. Ils se
sont ensuite calmés et nous ont offert des cigarettes. Après, nous
avons été interrogés en français, en anglais et en arabe, selon nos
nationalités; ils nous ont dit: «Allez voir les autorités israéliennes qui sont
là-bas. Vous vous arrangerez avec elles.»
«Celles-ci ont vérifiés nos passeports après nous avoir fait
baisser les bras et ils nous ont dit de rejoindre l'hôpital où nous avions des
enfants à soigner.» Deux délégués de la Croix-Rouge internationale sont ensuite
venus vérifier nos identités avant de nous envoyer plusieurs véhicules qui nous
ont ramenés à Beyrouth. Au moment où nous partions, l'un des nôtres nous a
affirmé que les soldats qui occupaient l'hôpital étaient bien des gens
d'Haddad, et qu'ils avaient égorgé deux infirmières de nationalité libanaise.
Mais nous n'avons pas été témoins de cet acte.» À Sabra, où j'ai passé une
partie de la matinée, les civils palestiniens nous ont également affirmé que
les tueurs étalent des miliciens sudistes. «Venez avec nous, nous allons encore
vous montrer des choses horribles.»
II est bien difficile de mener une enquête dans un pays
où la mort est devenue banale à force d'être quotidienne.
Et dans le dédale des ruelles à moitié démolies, nous sommes
allés de maison en maison. Encore des cadavres, partout des cadavres. À un
endroit, j'en ai compté huit, alignés au bas d'un mur qui portait des traces de
balles. Il est bien difficile de mener une enquête dans un pays où la mort est
devenue banale à force d'être quotidienne et où les atrocités, depuis huit ans,
sont monnaie courante.
Toutefois, il est certain que des civils de tous les
sexes et de tous âges ont été exécutés dans des conditions que plus rien ne
justifie aujourd'hui. Et surtout pas la vengeance à l'heure où le Liban ne
peut rétablir son unité qu'à travers la réconciliation de toutes ses
communautés. Or c'est mardi que l'État libanais doit se donner un nouveau
président de la République en remplacement de celui qui, élu il y a moins d'un
mois, est mort dans la violence avant même d'être investi de son autorité
suprême.
Hier, en fin de matinée, on vit arriver les premières
colonnes motorisées de l'armée libanaise. Lorsqu'elles entrèrent dans le camp,
leurs chefs se virent encerclés par des femmes en furie. «Pourquoi
n'êtes-vous pas venus plus tôt? Si vous aviez été là, tout cela ne serait pas
arrivé...» En fait les forces libanaises occupaient hier soir le
terrain et le général Raphael Eytan, le commandant israélien, déclarait à midi
à Baabda: «Nous sommes prêts à nous retirer immédiatement si l'armée libanaise
est prête à nous relever.»
Hier soir, l'entrée des camps était interdite. Des
barrages ont été posés, gardés par des Libanais, en même temps, je pouvais
constater un certain allégement, des forces israéliennes dans Beyrouth même.
Toutefois, la circulation entre les deux secteurs de la capitale était soumise
à un strict contrôle et à l'ouest un couvre-feu a été décrété de 17 heures à 6
heures du matin.
Par Jean-Jacques Leblond
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Les
tribunaux français débordés par l'afflux de clandestins (16.09.2017)
Par Paule
Gonzalès
Mis à jour le 16/09/2017 à 17h16 | Publié le 15/09/2017 à 17h51
VIDÉO - Réseaux de passeurs, délinquance… les contentieux
liés à la recrudescence du flux migratoire submergent les parquets.
Le procureur de Nice, Jean-Michel Prêtre, a les yeux braqués
sur la date du 13 novembre 2017. Ce jour-là, c'en sera fini de la
fermeture des frontières, décidée deux ans auparavant alors que l'Europe se
réveillait sous le choc des attentats de Paris. Une fermeture des frontières
qui a
permis à l'administration et au parquet de Nice d'endiguer à 97 % le flot
de 31.000 migrants qui, sur les huit premiers mois de l'année,
ont été interpellés à la frontière italienne. «Sur ces 31.000 personnes, 28.000
n'ont pas été admises sur le territoire français, 1600 ont été interpellées,
1600 ont été réadmises en Italie, et 315 ont été reconduites, détaille Jean-Michel
Prêtre. Quand les frontières seront rouvertes, nous allons changer de braquet.
Les renvois en Italie, sans vérification d'identité ou sans avoir à prouver
qu'ils en viennent, seront impossibles.»
« Une petite filière de 3-4 passeurs peut faire passer
entre 15 et 20 migrants tous les jours. À raison de 3000 à 4000 euros par
migrant, vous imaginez le chiffre d'affaires »
Julien Gentile, chef de l'Ocriest
Cette recrudescence du flux migratoire sera d'autant plus
difficile à maîtriser pour les parquets frontaliers - du Nord ou ceux de la
frontière italienne - que tous témoignent d'un changement d'origine nationale.
Jusqu'à la fin de l'année 2016, il s'agissait de personnes venant de pays en
guerre, zone irako-syrienne, Corne de l'Afrique ou encore Afghanistan. Un flux
en décrue alors qu'explose désormais une immigration économique en provenance
de l'Afrique de l'Ouest francophone. À 95 %, ces populations prennent la
route de la Libye et utilisent les mêmes réseaux de passeurs que les victimes
des conflits. Des
réseaux de plus en plus structurés, générant un chiffre d'affaires tel
qu'il s'impose désormais comme le plus lucratif après les trafics de
stupéfiants et d'armes.
«Une petite filière de 3-4 passeurs, qui travaillent toutes
les nuits, peut faire passer entre 15 et 20 migrants tous les jours. À
raison de 3000 à 4000 euros par migrant, vous imaginez le chiffre d'affaires»,
a rappelé Julien Gentile, chef de l'Office central pour la répression de
l'immigration irrégulière et l'emploi d'étrangers sans titre (Ocriest), lors
d'un séminaire sur la lutte contre l'immigration illégale. Des tarifs qui
peuvent monter jusqu'à 15 000 euros quand le passage est assuré
depuis le pays d'origine jusqu'au pays de destination.
À cette occasion, la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, a
clairement annoncé vouloir «conduire une politique assumée de lutte contre
l'immigration irrégulière». «La pression migratoire est telle qu'elle justifie
la poursuite et l'amélioration des dispositifs mis en place, a-t-elle lancé à
l'intention des procureurs. Pour demeurer à la hauteur des enjeux, il convient
d'amplifier vos efforts.»
Les « chauffeurs » peuvent écoper de peines allant de 8 à
24 mois, les « lieutenants » des réseaux de passeurs encourant jusqu'à six ans
de prison
À Nice, depuis le début de l'année, 183 passeurs ont
été interpellés et le procureur avoue entre 4 et 10 défèrements par
semaine donnant lieu à autant de comparutions immédiates et entraînant des
retards de 8 mois à un an des audiences correctionnelles. Dans le Nord, de cinq
à huit dossiers par semaine font l'objet d'une audience au tribunal de
Boulogne-sur-Mer. Selon une procédure bien huilée, ne passent en comparution
immédiate que les passeurs qui ont mis en jeu la vie des migrants. Les
«chauffeurs» peuvent écoper de peines allant de 8 à 24 mois, les «lieutenants»
des réseaux de passeurs encourant jusqu'à six ans de prison. «Nous travaillons
avec les procureurs pour définir ce qu'ils attendent en termes de preuves
menant sur la voie de la condamnation», affirme Julien Gentile. La question des
saisies d'avoirs criminels est compliquée, car peu d'argent liquide transite et
les transferts se font à travers des chambres de compensation dans les pays
mêmes.
Réseaux de passeurs albanais
Mais cette population pénale pose problème. Lors du
séminaire, le procureur général de Chambéry, Brice Robin, a rappelé que les
trois établissements pénitentiaires de son ressort accueillaient «plusieurs
réseaux de passeurs albanais qui continuent leur activité depuis la prison avec
des sommes directement versées en Albanie». Dans le Nord, les magistrats
rappellent que ces personnes incarcérées, pour lesquelles aucun travail de
réinsertion ne peut être envisagé, encombrent les établissements pénitentiaires
et représentent un coût de 100 euros par jour.
À cette question des passeurs s'ajoute aussi le poids d'une
autre délinquance qui pèse sur les parquets du fait de leur complexité, comme
la fraude documentaire, le montage de situation légale permettant l'obtention
de vrais passeports, titres de séjour ou de nationalité française. À une
organisation en réseau succèdent des nébuleuses complexes à appréhender et
impliquant des enquêtes difficiles qui débouchent sur des informations
judiciaires longues.
Enfin, les parquets - spécialement ceux qui opèrent depuis
la frontière suisse jusqu'à la région lyonnaise - sont aussi confrontés à une
délinquance du quotidien. Commise soit par des populations venues d'Europe de
l'Est et organisées en gangs de cambriolage, soit, plus récemment, par des
sans-domicile fixe venus d'Afrique du Nord. De quoi mettre les parquets sous
pression.
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Les
mineurs isolés, véritable casse-tête pour les tribunaux (15.09.2017)
Par Paule
Gonzalès
Mis à jour le 15/09/2017 à 22h23 | Publié le 15/09/2017 à 19h41
La première mission des parquets est déjà d'évaluer la
réalité de cette minorité.
Une préoccupation doublée d'une bombe à retardement contre
lesquels tous les parquets mettent en garde les pouvoirs publics. La question
des mineurs
isolés est devenue le cauchemar des conseils généraux mais aussi des
parquets qui doivent gérer ce flux en concertation avec la Protection
judiciaire de la jeunesse (PJJ) ou bien dans le cadre de la lutte contre la
délinquance. «La question des mineurs isolés représente une part importante de
l'activité du parquet mineur», concède-t-on du bout des lèvres au parquet de
Paris. À Bobigny, ce n'est pas moins de 170 cas en trois mois qui ont dû être
traités. Le parquet de Nice, lui, avoue ne pas pouvoir toujours respecter le
délai de cinq jours dans lequel est insérée l'évaluation de la minorité. Car
tous ne sont pas mineurs. La première mission est donc d'évaluer la réalité de
cette minorité, notamment par la Croix-Rouge. Selon les chiffres rapportés par
les parquets, 50 % le seraient réellement. «Avec tous les aléas que ça
représente et les complications judiciaires…, déplore Fabienne
Klein-Donati, procureur de Seine-Saint-Denis. Nous arrivons à des
situations ubuesques où il est difficile de juger un individu parce qu'il n'est
considéré ni majeur ni mineur. Cela frise parfois le déni de justice.»
Il existe désormais des filières de passeurs spécialisés,
mais difficiles à circonvenir parce qu'elles acheminent ces mineurs jusqu'aux
frontières et les laissent livrés à eux-mêmes ensuite
Dans la région Rhône-Alpes, les procureurs s'inquiètent de
la montée d'une délinquance du quotidien commise par des populations mineures,
sans domicile fixe, en provenance essentiellement d'Afrique du Nord. Dans un
rapport de physionomie, début septembre, il apparaît que trois cas sur huit
relèvent de cette typologie.
Entre 2015 et 2017, le nombre de mineurs isolés
arrivés en France a augmenté de 100 %. Ils sont actuellement 18.000
recensés sur le territoire national. Pour le seul parquet de Bobigny, 398
mineurs ont été pris en charge depuis le début de l'année 2017. Et la procureur
du TGI, Fabienne Klein-Donati, estime qu'«à la fin de l'année nous pourrions
atteindre le chiffre de 600 mineurs pour notre seul parquet». Sans compter ceux
qui se situent dans la zone d'attente de Roissy. Des mineurs qui sont signalés
et interpellés par les forces de police à la suite d'infractions mais qui, par
eux-mêmes aussi, viennent frapper à la porte du tribunal. «Nous avons en effet
une vingtaine d'enfants en moyenne par mois qui viennent spontanément
solliciter l'assistance de la justice», affirme la procureur de Bobigny.
Selon Julien Gentile, le directeur de l'Office central pour
la répression de l'immigration irrégulière et l'emploi d'étrangers sans titre
(Ocriest), il existe désormais des filières de passeurs spécialisés, mais
difficiles à circonvenir parce qu'elles acheminent ces mineurs jusqu'aux
frontières et les laissent livrés à eux-mêmes ensuite. «Beaucoup sont munis
d'un duvet et d'un téléphone portable, pour entrer ou retrouver leurs proches
sur le territoire», note le procureur de Nice. Il évalue ces enfants qui
arrivent et quittent les structures
d'accueil à plusieurs milliers par an, car «90 % des mineurs
accueillis repartent
sur les routes», note le magistrat. Cela n'empêche pas la saturation des
structures d'accueil. Comme tous ses collègues, il doit décider du placement
judiciaire de cette population dans le cadre de l'accueil d'urgence et de
l'enfance en danger. De quoi faire exploser les foyers de placement. Au point
que, depuis 2015, la PJJ a mis en place une plateforme nationale pour tenter de
répartir au plan national cet afflux de mineurs. «Mais les départements
freinent des quatre fers: seuls 46 de nos mineurs ont été placés hors de notre
département», note Fabienne Klein-Donati.
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Sondage :
les Français jugent sévèrement l'immigration (15.09.2017)
Mis à jour le 15/09/2017 à 19h13 | Publié le 15/09/2017
à 18h51
SONDAGE - Selon les résultats d'un sondage au niveau
mondial, réalisé par l'institut Ipsos dans 25 pays, la perception de
l'immigration reste globalement négative. En France, 53% des personnes
interrogées estiment que le nombre d'immigrés est trop élevé.
La perception de l'immigration reste globalement négative
dans le monde. C'est ce qui ressort d'un sondage réalisé par l'institut Ipsos,
dans 25 pays, auprès de 17.903 personnes, entre le 24 juin et le 8 juillet
dernier. Une étude menée, année après année, depuis 2011.
En 2017, les trois quarts des personnes interrogées pensent
que le nombre de migrants a augmenté dans leur pays sur les cinq dernières
années. Mais elles étaient 82 % en octobre 2015, puis 78 % en juillet
2016.
Parmi les pays où l'on considère que l'augmentation a été
importante, il n'est guère étonnant de trouver en tête la Turquie, soumise à
forte pression pour 78 % des sondés. Suivent l'Italie (74 %), la
Suède (66 %) et l'Allemagne (65 %). En France, 58 % estiment que
l'immigration a beaucoup augmenté.
Dans la plupart des pays, très peu de sondés considèrent que
l'immigration a un impact positif: 21 % en moyenne. Les personnes
interrogées en France ne sont que 14 % à le penser. C'est mieux qu'en 2016
où seulement 11 % étaient enclines à «positiver». Et l'Allemagne?
L'opinion n'a peut-être pas le même allant que ses dirigeants lorsqu'il s'agit
d'ouvrir les portes du pays, car seulement 18 % des sondés outre-Rhin
jugent positivement les effets de l'immigration.
Ce tableau mondial brille aussi par l'optimisme de la
Grande-Bretagne où 40 % des sondés voient un effet positif dans
l'immigration. Ils sont 38 % au Canada, 35 % aux États-Unis.
Trop d'immigrés en France? La réponse est oui pour 53 %
des personnes. Un Allemand sur deux pense la même chose.
Un autre point interpelle: en France, en une année, ils sont
6 % de plus à considérer qu'il faut fermer les frontières. Et, comme dans
la plupart des pays, une majorité de Français (64 %) est encore «tout à
fait d'accord» ou «plutôt d'accord» avec l'idée qu'il y a dans leur pays «des
terroristes qui prétendent être réfugiés». Et 53 % doutent que les
réfugiés soient vraiment des réfugiés.
«Les mineurs étrangers coûtent 1 milliard d'euros
par an aux départements» (17.09.2017)
Par Emmanuel
Galiero
Mis à jour le 17/09/2017 à 15h10 | Publié le 15/09/2017 à 19h51
INTERVIEW -Dominique Bussereau est président LR de
l'Assemblée des départements de France (ADF) et président du conseil
départemental de Charente-Maritime. Il tire la sonnette d'alarme car, selon
lui, le nombre de prises en charge des mineurs étrangers isolés explose partout
en France et les structures sont en voie de saturation.
LE FIGARO. - Quelle est l'ampleur du problème des mineurs
étrangers non accompagnés?
Dominique BUSSEREAU. - Nous sommes confrontés à
des difficultés croissantes dans la prise en charge des mineurs
étrangers non accompagnés. C'est une situation d'urgence. Le chiffre de
13.000 mineurs en 2016 a presque doublé en un an. Au niveau national, cela
représente une hausse de 30 % à 40 %. Dans mon seul département de
Charente-Maritime, nous sommes passés de 12 cas en 2012 à 240 aujourd'hui.
Ce chiffre progresse au rythme de dix accueils par semaine. Sans compter les
jeunes majeurs que nous prenons en charge parce que nous sommes parfois dans
l'impossibilité de prouver qu'ils sont mineurs.
En fin d'année, les départements auront probablement atteint
le cap de 20.000 accueils de mineurs, auxquels il faut ajouter environ
5.000 jeunes majeurs. Cela représente un coût global annuel
d'un milliard d'euros, sachant que certaines prises en charge sont
prolongées durant trois ans.
Nous avons noté que ces jeunes arrivent en France via des
réseaux de passeurs. Ils se présentent avec des fiches plastifiées déjà prêtes,
contenant les noms et les numéros de téléphone de nos travailleurs sociaux.
Combien de départements sont touchés?
La quasi-totalité. Si ceux de la petite couronne, en région
parisienne, sont extrêmement impactés, les départements ruraux le sont aussi.
Il existe des pics dans les grandes agglomérations et à proximité des
frontières. Le Nord est, évidemment, le symbole de cette explosion des
demandes. Mais beaucoup d'autres départements sont fortement touchés comme les
Hautes-Alpes, le Maine-et-Loire, la Somme, la Mayenne, le Val-de-Marne, les
Deux-Sèvres, l'Essonne, le Var… Nous recevons des alertes venant de partout.
«Nos structures sociales sont saturées. Elles ne sont pas
toujours adaptées face à des situations relevant plutôt de la politique
migratoire»
Dominique Bussereau
Quel est le périmètre d'une prise en charge départementale?
Les mineurs étrangers isolés sont hébergés en foyers,
internats, hôtels ou via des familles
volontaires, plutôt rares. Ils sont également nourris, habillés, soignés et
éduqués. En vérité, puisqu'ils n'ont rien, leur existence est totalement prise
en charge. Pour
chaque département, cela représente environ 50.000 euros par an et par
individu en moyenne. Les situations auxquelles nous sommes confrontés
compliquent l'accueil des autres enfants français, que nous avons l'habitude de
prendre en charge suite à des difficultés familiales ou sociales. Ces enfants
se retrouvent au contact de jeunes plus âgés, venant d'Afrique, du
Moyen-Orient, d'Afghanistan… La coexistence n'est pas toujours simple et nos
équipes ne sont pas forcément formées. Par ailleurs, nos structures sociales
sont saturées. Elles ne sont pas toujours adaptées face à des situations
relevant plutôt de la politique migratoire. Nous pensons que cette compétence
régalienne doit être assumée par l'État.
Quelle est la contribution financière de l'État?
L'État rembourse cinq journées sur la totalité d'un séjour
qui dure trois ans, en moyenne. Cela représente environ 1 250 euros
d'aide par individu. Début juillet, nous avons rencontré le président de la
République. Il s'est voulu très clair sur ce sujet: il considère que cette
prise en charge ne relève pas des départements ni de l'aide sociale à
l'enfance. Il a demandé aux ministères de la Justice, de la Solidarité, de la
Santé et de l'Intérieur de lui proposer des solutions d'ici la fin de l'année.
Il envisage de revoir complètement la gestion de cet
accompagnement mais les départements souhaitent que cet engagement présidentiel
se traduise en actes concrets, le plus vite possible. Ce problème doit être
complètement réglé l'année prochaine. Nous aurons une audience ministérielle
avec Nicole Belloubet, garde des Sceaux, le 4 octobre.
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Éric
Zemmour: «Ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001…»
Par Eric
Zemmour
Publié le 15/09/2017 à 09h00
CHRONIQUE - Plutôt qu'être le départ d'une
nouvelle ère plus conflictuelle entre l'lslam et l'Occident, les attentats du
11 septembre ont marqué la fin de l'hyperpuissance américaine.
Dès
le 11 septembre 2001, on a compris que la date resterait dans l'Histoire,
mais pas pour les raisons d'abord avancées. Le 11 septembre 2001 n'est
pas, comme l'ont cru nombre d'observateurs, le départ d'une nouvelle ère plus
conflictuelle entre l'lslam et l'Occident. La guerre des civilisations avait
commencé avant. Ben Laden, le «héros» de cette journée pour les masses arabes
et tous les ennemis de l'Amérique, a été exécuté depuis par les forces
spéciales de l'US Army.
Le président George Bush et les intellectuels
néo-conservateurs qui le conseillaient ont cru que cet attentat pourrait servir
de prétexte pour permettre à la puissance américaine de remodeler tout le
Moyen-Orient autour des valeurs démocratiques et de la sécurité d'Israël. L'échec
est total ; à la place des dictateurs laïques, on a eu les islamistes du
califat ; et l'Iran a amené ses troupes à la frontière nord d'Israël.
Alors? Le grand historien français Fernand Braudel, mort
bien avant 2001, avait sans doute donné la clé d'interprétation la plus
pertinente. Il expliquait que ce qu'il appelait «l'économie-monde» s'organisait
toujours autour d'un centre et de cercles concentriques. Le centre était le
lieu le plus dynamique, et donc hégémonique. Il s'était successivement appelé
Gênes, Venise, Amsterdam, Londres. Le centre de l'économie-monde était
imprenable par les armées ennemies. Amsterdam avait échappé aux armées de Louis
XIV ; Londres resta hors de portée de la Grande Armée de Napoléon. Quand
la ville était conquise, c'était le signe infaillible qu'elle n'était plus le centre
hégémonique. Amsterdam pris par les soldats de la Révolution française ;
Londres bombardé par Hitler. New York fut le centre de l'économie-monde du
XXe siècle. Pendant les deux guerres mondiales, l' Amérique était restée
inviolée.
Les vainqueurs de la mondialisation n'ont plus de valeurs
en commun avec les perdants
Le coup d'audace de Ben Laden a mis un terme à cette
inviolabilité. New York n'était plus le centre de l'économie-monde, qui était
passé sur le Pacifique, entre Los Angeles (les fameux Gafa) et la Chine
(atelier du monde.)
Pour les Etats-Unis, ce basculement est historique. Le
11 Septembre a sonné la fin de l'hyperpuissance mais seul Obama
l'avait compris. L'Amérique n'a subi depuis lors que des échecs: en Irak, en
Afghanistan, où les talibans sont revenus, en Syrie, où la Russie lui a
résisté. Même le tyran de Corée du Nord la nargue avec ses missiles
nucléaires. La Chine devient partout son rival du XXIe siècle,
économiquement et militairement. A l'intérieur de la nation-continent, ce
basculement économique a des conséquences politiques: la Californie, soutenue
par les médias bien-pensants de la côte Est, ne reconnaît pas la légitimité de
l'élection de Donald Trump. Les vainqueurs de la mondialisation n'ont plus de
valeurs en commun avec les perdants. La gauche radicale ramène la guerre
raciale sur le devant de la scène. Le spectre de la désagrégation et de la
guerre civile, prophétisé par Samuel Huntington dans Qui sommes-nous?,
paraît soudain moins utopique. Le 11 septembre 2001, il n'y a pas que les
deux tours du World Trade Center qui se sont effondrées.
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Attentat de Londres: le niveau d'alerte passe de «sévère»
à «critique»
Mis à jour le 16/09/2017 à 10h26 | Publié le 15/09/2017 à 21h20
VIDÉO - La première ministre britannique, Theresa May, a
décidé de relever le niveau d'alerte, signifiant que les services de sécurité
considèrent qu'une attaque est hautement probable. Le groupe Etat islamique a
revendiqué l'attaque de vendredi matin dans le métro londonien qui a fait une
trentaine de blessés.
De notre correspondant à Londres
Le pire a sans doute été évité. La rame bondée de la
District Line venant de Wimbledon à destination du centre de Londres, à l'heure
de pointe, vendredi matin, venait d'entrer dans la station de Parsons Green,
quand une
détonation a retenti dans le dernier wagon. Les témoins évoquent une
boule de feu traversant l'habitacle. Aussitôt, c'est la panique. Les passagers
prennent la fuite dans cette station du Tube à ciel ouvert du sud-ouest de
Londres, entraînant une vaste bousculade. Appelés à 8 h 20, les secours
sont sur place en moins de cinq minutes. Au total, 29 blessés sont admis à
l'hôpital - aucun dans un état grave - en majorité pour des brûlures au visage
ou aux membres. Un périmètre de sécurité de 50 mètres autour de la gare est
évacué par précaution.
Rapidement, la police retrouve un «engin explosif artisanal»
assez rudimentaire abandonné sur le sol du wagon, visiblement pas endommagé.
Des photos prises par des voyageurs montrent un large seau blanc en flammes
dans un sac en plastique Lidl, dont sortent des câbles. Une odeur de produits
chimiques a été ressentie. Selon les premières pistes, un minuteur n'aurait pas
fonctionné et la bombe, destinée à faire un maximum de dégâts, n'a pas explosé
comme prévu.
Ce qui pourrait expliquer la détonation dans cette station
du quartier résidentiel de Fulham. «Si c'était une attaque terroriste, elle a
visiblement raté», estimait Lauren, une passagère du wagon, interrogée par la
BBC. «Ce n'est pas Oxford Street, ici, c'est Parsons Green, comme un village
dans Londres, où il ne se passe rien», renchérissait son compagnon, Charlie. Un
quartier prisé des familles d'expatriés français pour son école francophone.
« L'engin explosif était clairement destiné à faire
beaucoup de mal »
Theresa May, première ministre britannique
Dans la soirée, l'État islamique a revendiqué l'attentat via
l'agence de propagande Amaq, avant d' indiquer que «plusieurs charges
explosives ont été posées dans le métro de Londres, dont une qui a fonctionné».
C'est une cinquième attaque terroriste mortelle cette année
sur le sol britannique qui semble avoir été évitée de justesse, après celles de
Westminster, London Bridge, Finsbury Park et Manchester, qui ont fait 36 morts.
«L'engin explosif était clairement destiné à faire beaucoup
de mal», a confirmé la première ministre, Theresa May, à l'issue d'une réunion
de crise des services de sécurité nationaux. Le dispositif d'alerte terroriste
- «sévère» - a été relevé d'un cran, passant à «critique», signifiant qu'un
nouvel attentatest hautement probable. La présence policière a été renforcée
dans la capitale, en particulier dans les transports.
Le Royaume-Uni va également déployer des militaires sur
certaines sites. Le maire de Londres, Sadiq Khan, a appelé les Londoniens à
être «vigilants» tout en restant «calmes».
Le commandement antiterroriste de la Metropolitan Police a
pris les rênes de l'enquête, avec l'appui du renseignement intérieur MI5. Un
suspect aurait été identifié grâce aux caméras de surveillance du métro, selon
Sky News. Vendredi soir, le patron de l'antiterrorisme britannique, Mark
Rowley, a déclaré que l'enquêtait progressait bien. «Des centaines d'agents
poursuivent plusieurs pistes d'enquête, en épluchant des heures d'enregistrement
de vidéo-surveillance et en interrogeant les témoins», a-t-il expliqué. Le
journal Birmingham Mail a par ailleurs
annoncé vendredi l'arrestation dans l'après-midi d'un homme armé d'un couteau
près d'une gare ferroviaire de Birmingham, dans le centre de l'Angleterre.
Donald Trump a soulevé une controverse en vilipendant sur
Twitter, peu après les événements, des «terroristes ratés qui étaient dans la
ligne de mire de Scotland Yard». Theresa May a critiqué des «spéculations
inutiles».
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
16/09/2017. Accédez
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Femme enceinte tuée: un suspect interpellé (17.09.2017)
Mis à jour le 17/09/2017 à 15h31 | Publié le 17/09/2017 à 15h26
Un homme a été arrêté dimanche à Boucau
(Pyrénées-Atlantique). Il est soupçonné du meurtre de la femme enceinte de
huit mois retrouvée morte asphyxiée sur son lit, ligotée, nue et les yeux
bandés, à Ustaritz, près de Bayonne.
Le suspect, sans domicile fixe, a été interpellé entre midi
et 13 heures après une course-poursuite avec les gendarmes. Il a été placé en
garde à vue.
C'est le compagnon de la victime qui avait prévenu les
secours mercredi soir lorsqu'il avait trouvé le corps nu et sans vie de la
jeune femme de 23 ans dans l'appartement qu'elle occupait à Ustaritz, au Pays
Basque.
L'autopsie pratiquée sur le corps de la victime a établi
qu'elle avait été asphyxiée par le bâillon qu'elle avait dans la bouche. Elle a
également mis en évidence des lésions traumatiques du visage, notamment une
fracture du nez. Vendredi, l'autopsie n'avait pas encore déterminé si la
victime avait subi des violences sexuelles.
Le procureur de la République de Bayonne tiendra une
conférence de presse à 17h30.
Le multirécidiviste, le policier et l'«infra-djihadisme»
(17.09.2017)
Par Jean
Chichizola
Mis à jour le 17/09/2017 à 20h53 | Publié le 17/09/2017 à 19h54
Un enquêteur de la sûreté urbaine du commissariat de
Mantes-la-Jolie doit être jugé par le tribunal correctionnel de Versailles pour
«violences par personne dépositaire de l'autorité».
C'est un rendez-vous judiciaire que suivent avec attention
les policiers de Mantes-la-Jolie, des Yvelines et au-delà. Ce lundi, un
enquêteur de la sûreté urbaine du commissariat de Mantes-la-Jolie doit être
jugé par le tribunal correctionnel de Versailles pour «violences par personne
dépositaire de l'autorité». Et les circonstances de l'affaire, qui illustrent
les difficultés croissantes des forces de police et de gendarmerie face à ce
qu'on pourrait baptiser «d'infra-djihadisme» au quotidien, émeuvent la base
policière dans un département où deux
fonctionnaires ont été assassinés par un islamiste radical le 13 juin 2016 à
Magnanville.
Âgé de 41 ans et de nationalité algérienne, il a plus de
soixante infractions relevées au fichier des antécédents judiciaires. La
première infraction remonte à 1994 et la dernière à 2016.
Tout commence le 8 mars 2017 avec une garde à vue de
routine. Le groupe flagrants délits de la brigade de sûreté urbaine en est à sa
dix-septième depuis le début de la semaine. Le policier concerné, en présence
d'un de ses collègues, commence l'interrogatoire d'un suspect visé par une
plainte pour violences contre sa mère, qu'il est soupçonné d'avoir frappé pour
lui soutirer une somme d'argent. L'homme est menotté, mains devant lui, en
vertu des consignes données pour les individus particulièrement dangereux
(l'article 803 du Code de procédure pénale prévoit que les menottes peuvent
être utilisées si le suspect «est considéré comme dangereux pour autrui ou pour
lui-même»). Âgé de 41 ans et de nationalité algérienne, il a en effet des
antécédents: plus de soixante infractions relevées au fichier des antécédents
judiciaires (vols à main armée, violences, outrages sur personne dépositaire de
l'autorité publique, menaces de mort…). La première infraction remonte à 1994
et la dernière à 2016. Au total, l'homme a écopé d'une trentaine de
condamnations pour 17 années de détention. Détail important, il n'est en
revanche a priori pas connu pour une quelconque adhésion aux thèses de l'islam
radical.
« Je suis un soldat de Daech, Daech va vous fumer… »
Le suspect
Ce 8 mars, il se montre très agressif dès le début de
la garde à vue. Il refuse de répondre à l'enquêteur, qui continue toutefois à
poser ses questions. Soudain, le suspect se lance dans une diatribe en arabe.
Puis il passe au français pour menacer de mort le policier après un «Allah
akbar» retentissant. Il affirme qu'il le suivra jusque chez lui, qu'il y mettra
le temps qu'il faut, qu'il ne le ratera pas, qu'il l'égorgera… Les hurlements
s'entendent dans les bureaux voisins. L'enquêteur décide de mettre un terme à
l'audition et se lève. Selon le policier, témoignage corroboré par le collègue
à ses côtés, le suspect se jette alors sur lui, ses mains menottées au niveau
du visage de l'enquêteur dans l'intention manifeste de le frapper. Le policier
lui décoche un coup de poing au visage. Avec l'aide de son collègue, il
maîtrise l'homme à terre qui est ramené en cellule de garde à vue. Il hurle de
plus belle: «Je
suis un soldat de Daech, Daech va vous fumer…» avec menaces d'attentat
à la clé.
Le policier-prévenu encourt, en théorie, plusieurs années
de prison
Par la suite, deux autres policiers ne parviendront pas à
l'entendre dans des conditions satisfaisantes, l'un d'eux devant le maîtriser.
Dans les semaines qui suivent, l'homme écope de deux nouvelles condamnations:
un an ferme pour les violences sur sa mère et deux ans ferme pour les menaces
de mort et l'agression contre le policier. Après cette dernière condamnation,
il lance au juge: «Dieu te jugera, Dieu te jugera, Dieu te jugera…» Pour sa
part, le policier est donc poursuivi pour violences.
Dès après l'incident, il a en effet téléphoné à un substitut
du procureur pour lui signifier qu'il voulait porter plainte. La magistrate a
semblé surprise, pensant visiblement à un cas de violence policière, et demandé
immédiatement une expertise sur le suspect (un médecin notera des
«excoriations» à la main avec un jour d'ITT). L'enquêteur, visé par un blâme en
2016 dans une autre affaire, a ensuite appris qu'il était visé par une enquête
pour violences. En arrêt maladie, soutenu par sa hiérarchie et ses collègues,
dont plus d'une trentaine ont pris la plume pour décrire les faits et prendre
sa défense, l'enquêteur, défendu par Me Laurent-Franck Liénard, attend d'être
fixé sur son sort. Il a refusé de payer une amende de 1000 euros et
demandé à être jugé. Reporté une première fois le 19 juin, le procès est
donc prévu ce lundi. Le policier-prévenu encourt, en théorie, plusieurs années
de prison et des dizaines de milliers d'euros d'amende.
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Bagdad
menace de recourir à la force contre les Kurdes (17.09.2017)
Mis à jour le 17/09/2017 à 21h14 | Publié le 17/09/2017 à 20h34
Le pouvoir irakien veut empêcher la tenue d'un référendum
sur l'indépendance dans les trois provinces autonomes kurdes.
À peine la menace djihadiste recule-t-elle en Irak qu'un
autre danger affleure: lundi prochain, les
Kurdes des trois provinces autonomes du nord du pays ont prévu de tenir un
référendum sur leur indépendance. La plupart de leurs leaders répètent
qu'ils n'ont pas «d'autre choix» pour garantir les droits des Kurdes
- entre 15 et 20 % de la population irakienne -, durement
réprimés par le régime de Saddam Hussein, jusqu'à sa chute en 2003. Même s'il
ne s'agit que d'une étape en vue d'une lointaine indépendance, la consultation
menace l'unité d'un pays déjà fragmenté.
Conforté par l'opposition de la communauté internationale à
ce référendum, le gouvernement central de Bagdad est vent debout et se fait
menaçant. «Quand j'ai parlé aux ambassadeurs européens de cette question,
affirme au Figaro Hadi al-Ameri, le tout-puissant chef de la Mobilisation
populaire, qui participe à la guerre contre Daech, je leur ai dit que si on ne
peut pas empêcher Massoud
Barzani (le président du Parlement autonome kurde, NDLR) de tenir le
référendum, la confrontation sera certaine. On ne pourra pas éviter la guerre.»
Alors que le Parlement kurde - qui ne s'était pas réuni
depuis deux ans - a ratifié le référendum (par 65 voix sur 68
présents, 43 députés étant absents), le Parlement central à Bagdad l'a
rejeté, son président, Salem Jabouri, demandant au premier ministre Haidar
al-Abadi de «prendre toutes les mesures pour protéger l'unité de l'Irak».
Samedi, al-Abadi, à son tour, a froncé les sourcils, déclarant que «si la
population irakienne était menacée par l'usage de la force en dehors de la loi,
nous interviendrons militairement» contre les Kurdes.
«Les Kurdes agissent en contradiction avec la
Constitution irakienne»
Hadi al-Ameri, ancien chef de la milice chiite Badr
Ces derniers prévoient de tenir la consultation dans leurs
trois provinces autonomes, mais aussi à la périphérie de celles-ci dans des
«zones disputées» avec Bagdad que les Kurdes contrôlent, depuis le blanc-seing
donné par les Américains en 2003. Et c'est là que réside le principal danger de
confrontation, notamment dans la riche province pétrolière de Kirkouk, que les Kurdes
ont encore conquise lors de l'avancée de Daech en juin 2014, sans
laquelle leur rêve d'indépendance n'est pas viable. «Tenir le référendum dans
les zones disputées est particulièrement provocateur et déstabilisant», a
averti vendredi la Maison-Blanche, qui appelle Massoud Barzani à renoncer au
référendum et à entrer en négociations avec Bagdad. «Un référendum à Kirkouk et
dans toutes les zones disputées est une ligne rouge», gronde Hadi al-Ameri.
Selon l'ancien chef de la milice chiite Badr, entraînée et formée en Iran
jusqu'à la chute de Saddam Hussein, «les Kurdes agissent en contradiction avec
la Constitution irakienne. Les habitants des zones disputées sont désarmés. Des
Turkmènes, des Yazidis, des Arabes et des Shabaks refusent le référendum.»
Éviter que la guerre des mots ne dégénère en
affrontements
La semaine dernière, le Parlement irakien a démis de ses
fonctions le gouverneur kurde de Kirkouk, qui a rejeté cette décision. Le
danger de confrontation est accru par la présence dans ces zones, non loin des
combattants kurdes, de miliciens chiites déployés à la faveur de la guerre
contre Daech. Massoud Barzani exige, depuis des mois, leur départ. «Pas
question», répond Hadi al-Ameri, arguant que le combat antidjihadiste n'est pas
terminé. «Face à la décision prise par Barzani de déployer les pechmergas dans
ces zones, le gouvernement irakien entrera en confrontation avec les Kurdes,
c'est inévitable», prévient Hadi al-Ameri.
La province de tous les dangers
Pour éviter que la guerre des mots ne dégénère en
affrontements, Américains, Britanniques, Français, mais aussi Iraniens et Turcs
ont multiplié les pressions sur Barzani. Pour Washington, l'initiative kurde
remet en cause la guerre, bien avancée contre Daech, après les victoires à
Mossoul et Tal Afar, alors que le prochain front sera précisément dans cette
province disputée de Kirkouk, à Hawija, à 70 km plus à l'est. Mais alors
que les forces irakiennes ont pris position non loin de Hawija, al-Abadi a
d'ores et déjà demandé aux Kurdes de ne pas s'en approcher. En riposte, des
renforts de pechmergas se seraient déployés dans d'autres secteurs de cette
province de tous les dangers.
De leur côté, les voisins turcs et iraniens des Kurdes
redoutent que ce référendum attise les appétits séparatistes de leurs propres
minorités kurdes. Téhéran dispose de relais au sein des Kurdes irakiens,
divisés sur cette initiative jugée dangereuse par certains, compte tenu de leur
isolement. «Les Kurdes vont quand même trop loin», regrette Hamid, un Irakien.
Le premier ministre espère encore que le dialogue évitera la
confrontation avec Massoud Barzani, qui compte utiliser le oui attendu au
référendum pour consolider sa position dans des négociations avec Bagdad sur un
divorce. Mais Haidar al-Abadi est sous pression. «Jusqu'à maintenant, nous
avons réfréné la Mobilisation populaire d'attaquer, mais ça ne durera pas
toujours», aurait confié l'Iranien Qassem Soulaimani, tout-puissant patron de
la Force al-Qods, à un responsable kurde irakien.
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Pyrénées-Atlantiques : un SDF, soupçonné d'avoir tué une
femme enceinte, interpellé (17.09.2017)
Par Le
figaro.fr
Mis à jour le 17/09/2017 à 20h32 | Publié le 17/09/2017 à 17h23
La jeune femme de 23 ans a été retrouvée morte asphyxiée
mercredi soir sur son lit, ligotée, nue et les yeux bandés, à Ustaritz, près de
Bayonne.
Un homme, soupçonné
d'avoir tué une femme enceinte près de Bayonne, a été interpellé
ce dimanche, en début d'après-midi, après une course poursuite avec les
gendarmes. Alors qu'il se trouvait à bord d'un
véhicule utilitaire volé, il a fini sa course en s'encastrant dans un
garage, rapporte
France bleu. Identifié grâce à son ADN relevé sur la scène de crime, ce
sans domicile fixe de 38 ans a été placé en garde à vue. Selon le procureur de
Bayonne, qui a donné une conférence de presse ce dimanche, le suspect avait des
antécédents psychiatriques et était connu des services de police. Sa dernière
condamnation remonte au mois d'août dernier, à 3 mois de prison avec sursis et
une obligation de soins psychiatriques pour des faits de vols et dégradations.
Originaire de Haute-Savoie et vivant à Bayonne depuis huit ans, il n'avait a priori
aucun lien avec les proches de la victime.
Le corps de Mélodie, 23 ans, a été retrouvé mercredi soir à
Ustaritz, au Pays basque. C'est son
compagnon, candidat de télé-réalité, qui a fait la macabre découverte
et prévenu les secours vers 22h30. La jeune femme, enceinte de huit mois,
gisait nue sur le lit de la chambre à coucher, les poignets et chevilles
ligotés, les yeux bandés et bâillonnée avec des torchons. Dès jeudi, le
procureur de la République a évoqué un «acte criminel particulièrement
violent». Elle se trouvait dans un appartement qui appartient à sa mère,
absente au moment des faits.
Selon les premiers éléments de l'enquête, aucune trace
d'effraction ou «vitre brisée» n'a été retrouvée sur les lieux du crime. En
revanche, les enquêteurs ont relevé plusieurs marques de coups sur le visage de
la victime, notamment une fracture du nez. L'autopsie a
établi qu'elle avait été asphyxiée par le bâillon qu'elle avait dans la bouche,
a précisé le parquet vendredi. Dimanche soir, le procureur de Bayonne a
annoncé que la victime avait «été violée». Le suspect n'avait néanmoins «aucun
antécédent en matière sexuelle», a-t-il précisé. Il a par ailleurs annoncé que
«des objets avaient disparu au domicile de la victime».
Son compagnon sous le choc
Une enquête de flagrance a été ouverte sur cet «acte
criminel particulièrement violent sur une personne vulnérable», car à un stade
avancée de sa grossesse, a indiqué le parquet. Au total, une cinquantaine de
gendarmes travaillent sur cette affaire, selon le colonel Laurent Lesaffre, de
la Section de Recherches de la gendarmerie de Pau.
La jeune femme, originaire de Béziers, était élève
infirmière à Bordeaux et avait décidé de venir à Ustaritz pour y passer les
dernières semaines de sa grossesse avec sa mère. Son compagnon, intermittent du
spectacle et par ailleurs étudiant en sophrologie à Bordeaux, ne résidait pas
avec elle à Ustaritz, a indiqué le procureur de la République de Bayonne,
Samuel Vuelta Simon. Choqué, il avait été pris en charge par le Samu après la
découverte du crime.
Une information judiciaire devrait être ouverte à l'issue de
la garde à vue du suspect.
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Farhad Khosrokhavar : « Des femmes djihadistes
bientôt renvoyées en France »
Mis à jour le 17/09/2017 à 18h39 | Publié le 17/09/2017 à 18h14
INTERVIEW - Pour ce spécialiste de la radicalisation, ces
Européennes, souvent très jeunes, qui ont rejoint Daech, adhèrent largement à
son idéologie mortifère.
Elles sont environ 500 femmes sur 5000 Européens à avoir
rejoint Daech. Pourquoi un tel phénomène? Farhad Khosrokhavar, sociologue
franco-iranien, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences
sociales et spécialiste de la radicalisation, vient d'écrire avec Fethi
Benslama, psychanalyste et membre de l'Académie tunisienne, un ouvrage
intitulé Le Djihadisme des femmes.
Pourquoi ont-elles choisi Daech? (Seuil, 14 septembre
2017).
LE FIGARO. - Comment expliquer la présence de femmes au
sein de Daech?
Farhad KHOSROKHAVAR. - Al-Qaida privilégiait les
hommes majeurs et sans problèmes mentaux. Daech s'est montré moins regardant.
Dès le début, le mouvement a embauché toutes les catégories sociales,
psychopathes compris, et aussi des
femmes, plutôt jeunes, susceptibles de mettre au monde des «lionceaux». Le
nombre d'adolescentes peut représenter jusqu'à 20 % des recrues de Daech
dans certains pays européens.
«Certaines affirment avoir été violentées dans leur
enfance par un homme de la famille. S'il y a là une part de vérité, il semble
qu'il y ait aussi beaucoup d'imaginaire»
Farhad Khosrokhavar
Quels sont les profils psychologiques de ces femmes?
Certaines affirment avoir été violentées dans leur enfance
par un homme de la famille. S'il y a là une part de vérité, il semble qu'il y
ait aussi beaucoup d'imaginaire. D'autres souffrent de cet entre-deux que représente
l'adolescence. Cette période, qui durait quatre à cinq ans auparavant, s'étend
désormais sur quinze à vingt ans. Celle-ci est souvent synonyme de manque
d'autonomie, lié à l'absence de travail, sur fond d'éclatement familial. En
rejoignant Daech, les jeunes femmes - dont des converties - vont
pouvoir vite se marier et avoir un enfant. Cette expatriation est une sorte de
rite de passage à la vie adulte. Une manière d'occulter un malaise, un
traumatisme, pour une bonne partie d'entre elles. Un tiers environ a des
problèmes d'ordre mental. Les autres sont animées d'une volonté d'affirmation
de soi.
En quoi les motivations des femmes se différencient-elles
de celles des hommes?
Les filles, souvent bonnes élèves, sont en quête d'altérité
dans un monde nouveau. Elles intègrent une structure patriarcale forte avec des
maris successifs qui meurent en «martyrs» et des enfants promis eux aussi au
combat. En quelque sorte, une famille sacralisée qui perpétue l'oumma, la
communauté arabe. Chez les hommes, souvent déscolarisés, il y a l'affirmation
d'une virilité qui n'a pas l'occasion de s'exercer dans la société moderne.
Là-bas, ils deviennent des chevaliers de la foi, des héros qui roulent en
4 × 4, portant mitraillette en bandoulière et Ray-Ban.
«L'idéologie de Daech se veut un contre-pied à tous les
idéaux de Mai 68 que sont l'occultation de la violence et de la mort, la
promulgation d'une société ouverte et antipatriarcale»
Farhad Khosrokhavar
En Occident, cette recherche d'une société patriarcale
explique-t-elle le port du voile?
Le port du voile ne doit pas être réduit à une soumission à
l'homme. Il y a aussi une ultime provocation envers une société sécularisée. En
France, la plupart des femmes - notamment des converties - qui
portent la burqa l'ont fait depuis la promulgation de la
loi interdisant le voile intégral dans les lieux publics.
Le rejet de notre mode de vie occidental suffit-il à
comprendre l'idéologie mortifère de Daech?
L'idéologie de Daech se veut un contre-pied à tous les
idéaux de Mai 68 que sont l'occultation de la violence et de la mort, la
promulgation d'une société ouverte et antipatriarcale. Elle est aussi une façon
de cristalliser la haine de soi… et du coup des autres.
Pourquoi associer violence et religion?
Le besoin de sacré est toujours présent dans nos sociétés.
Mais plus personne ne propose le paradis sur terre. Tant le christianisme
depuis le XVIIe siècle que les utopies de nos sociétés contemporaines que
sont la République, les socialisme, communisme ou nationalisme. La force de
Daech est d'avoir eu l'idée de proposer une version mythifiée de la religion.
Le paradoxe est que des femmes et des hommes puissent y croire. La «chance» de
Daech est d'avoir bénéficié de la conjugaison de ceux, en Occident, qui
recherchent une nouvelle sacralité et de ceux, en Orient, qui veulent en
découdre avec l'impérialisme occidental.
«L'islamisme est une machine à tuer. Il tue à 95 % dans
le monde musulman et relativement peu en Occident »
Farhad Khosrokhavar
Comment la société occidentale peut-elle réagir?
L'islamisme est
une machine à tuer. Il tue à 95 % dans le monde musulman et relativement peu
en Occident. Chez nous, s'il ne remet pas en cause le système politique et
économique, il touche aux fondements symboliques du «vivre ensemble». Il
instille une forme de violence, revendiquée au nom d'une sacralité religieuse.
Ce retour de sacralité déstabilise énormément la population.
Que deviennent les femmes djihadistes?
Environ 5 % d'entre elles rejoignent la brigade
al-Khamsa, où elles apprennent à manier les armes. Les autres, visiblement
déçues, cherchent à partir. Mais elles sont souvent violentées ou périssent
dans des bombardements. Certaines, récupérées actuellement par les Kurdes, vont
être renvoyées en France.
Peut-on encore parler de déradicalisation?
Même l'Angleterre, qui travaille depuis 2007 sur un système
de déradicalisation, enregistre des résultats contrastés. Les cas des repentis,
qui doivent apprendre à se réinsérer, et des endurcis, rejoindre la prison,
sont relativement simples. Reste les indécis, qu'il faut entourer de
psychologues, sociologues, imams modérés… Il faut tâcher de les convaincre de
l'impasse de la violence. Il nous reste à inventer des formes de cure pour y
arriver.
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Philippe d'Iribarne : «Penser l'islam, l'héritage des
Lumières face à une contradiction»
Publié le 17/09/2017 à 18h34
TRIBUNE - Lorsqu'il s'agit d'appréhender l'islam, le
principe d'égalité et le principe de libre examen, marques de la civilisation
européenne, entrent en conflit, argumente le sociologue*.
Pourquoi les Français, comme les Européens dans leur
ensemble, ont-ils
une opinion aussi négative de l'islam? Est-ce l'islam lui-même qui
fait problème? Ou plutôt les mauvais sentiments d'une société raciste? Le débat
n'est pas près de se clore. C'est qu'il est nourri par une opposition radicale
entre deux manières de regarder l'islam, associées à deux cadres de pensée -
solidement ancrés l'un et l'autre dans les idéaux des Lumières. Le premier de
ces cadres de pensée privilégie l'exigence d'égalité et le second le libre
examen.
Égalité des religions, égalité des droits entre leurs
fidèles, refus de toute attitude discriminatoire qui conduirait, sous quelque
prétexte que ce soit, à traiter différemment les uns des autres, l'idéal
politique des Lumières l'exige.Citoyens,
égaux à tout autre citoyen, les musulmans ont droit, comme chacun, à voir leur
religion pleinement respectée. Dans cette perspective, prêter attention à
ce qui fait de l'islam une réalité sociale singulière, marquée par des manières
spécifiques d'être et d'agir, n'est pas acceptable. En effet, une telle
attention conduit inévitablement à un désir de traiter de manière également
spécifique, donc discriminatoire, ce que l'on scrute ainsi.
L'hétérogénéité du monde musulman
L'absence de liberté de conscience dans les pays où l'islam
règne en maître, le statut problématique des femmes, l'association fondatrice
entre l'islam et la guerre, les imprécations du Coran contre les infidèles,
l'idéal de libre examen des Lumières exige cependant d'y prêter attention,
aussi nobles que soient les raisons que l'on puisse invoquer pour s'en
dispenser. Cet idéal implique d'être lucide sur l'existence d'une menace envers
nos sociétés démocratiques et d'éviter de baisser la garde, serait-ce au nom de
l'égalité.
Comment faire, si c'est l'égalité que l'on révère, pour se
dispenser de regarder la réalité en face? L'imagination n'a pas manqué. Le
moyen le plus expédient, sans doute, est de construire un mur face aux réalités
gênantes en disqualifiant ceux qui les évoquent. La logique sous-jacente est
simple: ceux qui mettent en avant des éléments peu favorables à l'islam
montrent par ce fait même qu'ils sont animés de mauvais sentiments à son égard,
c'est-à-dire «islamophobes».
Pour traiter la question du voile islamique à l'école, la
loi a déclaré viser les ‘signes religieux' toutes religions confondues, en
taisant le fait que c'est l'islam qui était réellement visé
Étrangers donc à l'idéal d'égalité, ils n'ont pas droit au
chapitre dans une société démocratique, ce qui interdit de prêter attention à
ce dont ils font état. Un autre moyen consiste à mettre l'accent sur
l'hétérogénéité du monde musulman pour détourner l'attention de ce qui fait son
unité, ce qui permet de déclarer que «l'islam n'existe pas» comme entité ayant
quelque consistance, donc qu'en parler n'a pas de sens. On peut encore affirmer
que ce qui, telle l'absence de liberté de conscience, inquiète relève de purs
choix politiques qui n'ont «rien à voir avec l'islam», que c'est un pur effet
du hasard si on le retrouve dans l'ensemble des pays musulmans. Des citations
tronquées du Coran à destination de ceux qui ne l'ont jamais lu peuvent
également servir.
Réciproquement, quand c'est le libre examen que l'on
privilégie et que, du coup, on entend lutter contre l'emprise de l'islam sur la
société, comment se mettre à l'abri des exigences de l'idéal d'égalité? Là
encore, l'imagination n'a pas manqué pour se mettre formellement en règle. On
peut faire semblant d'agir envers les religions en général quand c'est en fait
le seul islam qui est visé. Ainsi, pour traiter la
question du voile islamique à l'école, la loi a déclaré viser les
«signes religieux», toutes religions confondues, en taisant le fait que c'est
l'islam qui était réellement visé. Plus largement, maint aspect de ce qui est
présenté comme une
défense de la laïcité, comme ce qui touche à la tenue des mères dans les
sorties scolaires, a en fait l'islam pour cible. Ou encore, quand il s'est agi
d'interdire la burqa, la loi n'a fait aucune référence à l'islam, même si
c'était bien celui-ci seul qui était visé. Il n'a été question que de
«dissimulation du visage dans l'espace public». Il est parfois fait appel, avec
plus ou moins de succès, comme cela a été le cas dans l'affaire du burkini, à
la notion générale de «trouble de l'ordre public». La référence aux traditions
culturelles peut aussi faire l'affaire pour résister à l'islamisation de la
société, en réservant un traitement particulier à l'islam, comme c'est le cas
pour autoriser la sonnerie des cloches et refuser l'appel du muezzin.
Un avenir plus raisonnable
Est-on condamné à vivre ainsi indéfiniment de faux-semblants
frustrants pour tous, l'idéal d'égalité comme celui de libre examen étant tous
deux constamment bafoués? Dans l'immédiat, le droit y pousse, avec l'ensemble
des institutions qui s'y rattachent, jusqu'à la Cour européenne des droits de
l'homme. Le droit ne veut connaître que l'égalité des religions et ne veut rien
savoir des spécificités de l'islam. Il ignore superbement tout ce qui contribue
à la construction d'une contre-société islamique, terreau d'entreprises
politiques: pression sociale qui, à coup d'intimidations, incite les
«musulmans» à s'y rallier ; pression sur les enseignants pour qu'ils
«respectent l'islam», c'est-à-dire sa vision du monde ; pressions sur les
entreprises. Quand il s'agit de combattre l'emprise de l'islam, le droit oblige
à ruser en faisant semblant de ne pas le viser spécifiquement. À court terme,
on ne voit pas comment mieux faire. Mais on peut tenter de préparer un avenir
plus raisonnable.
Les affrontements au sein des pays musulmans entre les
partisans et les adversaires d'évolutions démocratiques sont, en la matière,
riches d'enseignements
Un point central est sans doute qu'il faut réfléchir plus
avant sur la notion de «religion». Le mot a-t-il vraiment le même sens quand on
évoque l'égalité des «religions» et quand on qualifie l'islam de «religion»? Il
faudra bien finir par prendre en compte la dimension sociale et politique de
l'islam, tout ce par quoi il ne s'agit pas seulement pour lui de convertir les
cœurs mais de contraindre les corps. Il faudra bien distinguer, dans ses
manifestations, ce qui relève réellement de l'expression de la liberté de
conscience ou, au contraire, d'un projet politique conquérant. Les
affrontements au sein des pays musulmans entre les partisans et les adversaires
d'évolutions démocratiques sont, en la matière, riches d'enseignements. Ainsi,
la «tenue islamique» s'y montre un enjeu politique, imposée par les adversaires
de la démocratie, rejetée par ses défenseurs. Dans ces conditions ne serait-il
pas raisonnable d'y voir un signe politique, un étendard, à juger dans ce
registre et non dans celui de la liberté de religion? Plus largement, toute une
démarche de discernement est nécessaire.
Il est douloureux, sans doute, de constater qu'il n'existe
pas d'harmonie préétablie, au sein des Lumières, entre l'idéal d'égalité et
celui de libre examen. Mais où est donc leur cœur? Peut-on vraiment invoquer
les Lumières pour refuser de regarder la réalité?
*Ancien élève de l'École polytechnique. Directeur de
recherche au CNRS, Philippe d'Iribarne est l'auteur de plusieurs ouvrages devenus
des classiques, tels La Logique de l'honneur. Gestion des entreprises
et traditions nationales (1989) et L'Étrangeté française (2006).
Dernier livre paru: Chrétien et moderne (Gallimard, 2016).
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Nicolas Baverez : «Après Irma, tirons des leçons pour la
sécurité nationale» (17.09.2017)
Par Nicolas
Baverez
Publié le 17/09/2017 à 21h31
ANALYSE - Les risques auxquels sont confrontés la France et
les Français ne vont cesser de croître. La réaction tardive ainsi que le manque
d'anticipation des pouvoirs publics pour la tempête qui a dévasté Saint-Martin
ne laissent rien présager de bon.
L'ouragan Irma marque un tournant dans l'histoire des
cyclones par sa violence comme par ses dommages. Des vents de 396 km/h ont été
enregistrés qui rendent caduque l'échelle de mesure Saffir-Simpson dont le
niveau maximum de 5 reposait sur des vitesses comprises entre 250 et un
peu plus de 300 km/h. Le taux de destruction de 95 % des bâtiments et
des activités à Saint-Martin n'a que très peu de précédents. Enfin, la
simultanéité avec
l'ouragan Harvey qui a dévasté le Texas témoigne du changement de
nature et d'intensité des catastrophes naturelles.
La violence extrême de la tempête ne suffit cependant pas à
expliquer
la faillite des pouvoirs publics français. Car le cataclysme était
parfaitement prévu dans sa trajectoire comme dans sa nature hors norme. Mais
rien n'a été fait pour l'anticiper en pré-positionnant eau potable, groupes
électrogènes, moyens du génie et forces de sécurité - alors même que la Légion
étrangère est implantée en Guyane. Pis, la réaction n'est intervenue qu'avec un
retard de près de 48 heures, dans une improvisation totale dont témoigne
le recours au centre de crise du Quai d'Orsay pour gérer une situation
d'urgence sur le territoire national, faute pour le ministère de l'Intérieur de
pouvoir traiter les appels. Enfin, une nouvelle fois a été mise en lumière la
pénurie tragique de moyens aériens qui compromet l'action des armées comme des
forces de sécurité intérieure.
L'incurie des pouvoirs publics français
La défaillance des autorités françaises est soulignée par
l'action des autres pays développés. La partie néerlandaise de Saint-Martin a
vu la situation humanitaire maîtrisée et n'a pas connu de pillages en raison du
déploiement avant l'ouragan des troupes de marine et du stockage de biens de
première nécessité. En Floride, les leçons de Katrina ont été tirées avec
l'évacuation de 6,5 millions de personnes et la surveillance stricte de
leurs habitations par la police et la garde nationale, ce qui a limité les
pertes humaines et interdit tout vol.
On peut aussi se rassurer à bon compte en saluant la
mobilisation et l'héroïsme réels de nombre d'agents publics
La tentation est forte, face à l'incurie des pouvoirs
publics français, de mettre en cause l'inexpérience des dirigeants et leur
méconnaissance de l'État régalien. De fait, l'alerte n'a été lancée que par
Jean-Yves Le Drian, qui est le seul membre du gouvernement à maîtriser la
gestion de crise. On peut aussi se rassurer à bon compte en saluant la
mobilisation et l'héroïsme réels de nombre d'agents publics qui ont donné le meilleur
d'eux-mêmes et fait preuve d'une ingéniosité stupéfiante pour suppléer
l'absence de stratégie et d'organisation de l'État.
Le problème fondamental ne réside ni dans la légèreté des
gouvernants, ni dans l'insuffisance des moyens publics. Il provient de
l'archaïsme des structures, de l'organisation et de la culture du ministère de
l'Intérieur, qui est devenu, comme il a été mis en évidence depuis les
attentats de 2015, le maillon faible de la sécurité du territoire. Au nom de la
proximité et de la réactivité, il refuse toute forme de programmation et de
planification, ce qui le condamne à subir les événements au lieu de les
anticiper. Au nom de l'absolue priorité donnée aux moyens humains, les dépenses
de fonctionnement générées par les quelque 150.000 policiers et 100.000
gendarmes atteignent 17,5 milliards d'euros et cannibalisent le budget
d'investissement limité à 450 millions d'euros. Au nom du monopole des forces
de police en matière de sécurité du territoire, la coopération avec les armées
comme avec les entreprises spécialisées dans le secteur demeure lacunaire.
Une cible privilégiée
Le déni doit cesser. Les risques auxquels sont confrontés la
France et les Français ne vont cesser de croître en fréquence, en intensité et
en diversité: terrorisme, attaques cybernétiques, catastrophes naturelles
(épisodes cycloniques, inondations, sécheresse), pandémies. La France est une
cible privilégiée pour les groupes djihadistes comme pour les «démocratures»
hostiles aux démocraties et à l'Europe, notamment dans la perspective
d'événements comme les Jeux olympiques
de 2024. Les calamités se multiplient et pourraient prendre un tour
catastrophique en cas de séisme à Nice, où la majorité des bâtiments publics ne
bénéficient d'aucune protection antisismique.
La sécurité du territoire et des Français doit redevenir une
priorité de premier rang. Elle passe par la reconfiguration de l'État autour de
sa fonction de gestion des risques. La prévention et la résilience aux chocs
ont vocation à former le cœur des politiques publiques. Une modernisation
radicale du ministère de l'Intérieur mérite d'être engagée autour de la
création d'un centre permanent de commandement dont les missions seront d'anticiper
les risques, de planifier et de coordonner les opérations sur le territoire
national. Enfin, à l'inverse des coupes budgétaires dévastatrices de l'été, il
faut réinvestir dans l'État régalien.
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