Syrie :
l'étau se resserre sur la Ghouta (07.03.2018)
Violences faites
aux femmes : l'onde de choc (07.03.2018)
En Île-de-France,
une brigade patrouille pour traquer les «frotteurs» dans les transports
(07.03.2018)
Les trois mesures
phares de la future loi contre les violences faites aux femmes (07.03.2018)
Éric Zemmour:
«Leçons israéliennes» (07.03.2018)
Faut-il
démanteler Google et Facebook ? (07.03.2018)
Luc Ferry: «Le
spinozisme, sagesse ou folie ?» (07.03.2018)
Agir enfin contre
les pratiques de concurrence déloyale de Google (07.03.2018)
Anne-Sophie Letac
: «Jeunesse tentée par les régimes autoritaires: le cri de Mounk» (07.03.2018)
En Égypte, des travaux
pharaoniques pour bâtir une nouvelle capitale (07.03.2018)
À Los Angeles, le
combat d'un homme pour les sans-abri (07.03.2018)
Syrie : l'envoi
de renforts kurdes à Afrine complique la donne
Italie :
Berlusconi prêt à aider Salvini à former un gouvernement (07.03.2018)
Rémy Rioux :
«Au Sahel, le pilier développement a été sous-calibré» (07.03.2018)
Le Sri Lanka
déstabilisé par les extrémistes bouddhistes (07.03.2018)
Mineurs
étrangers : l'État va ajuster son aide (07.03.2018)
La cité perdue
des pharaons noirs (06.03.2018)
Pourquoi la
France est toujours la championne des dépenses publiques… et risque de le
rester (07.03.2018)
Olivier
Delacroix : «Bernard de La Villardière tient parfois des propos dangereux»
(07.03.2018)
Quand la révolte
des peuples occidentaux menace l'Europe de Bruxelles… (09.03.2018)
Ivan Rioufol :
«S'ouvre le procès de l'Union européenne…» (08.03.2018)
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Italie : la défaite de Bruxelles (06.03.2018)
François d'Orcival:
«L'instinct maternel face à la théorie du genre» (09.03.2018)
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«fake news» aux portes de l'Europe (08.03.2018)
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«Les réseaux sociaux ne se soucient pas de ce que nous partageons» (08.03.2018)
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sentences de l'inquisiteur Bernard Gui: la véritable figure de l'Inquisition (08.03.2018)
Macron au Crif :
l'antisémitisme est «le déshonneur de la France» (07.03.2018)
Syrie : le régime accentue son emprise sur la Ghouta, privée
d'aide humanitaire (08.03.2018)
Malgré une trêve de 30 jours
décrétée fin février par l'ONU, le régime de Bachar el-Assad a poursuivi son
offensive lui permettant de reconquérir la moitié de l'enclave rebelle en proie
à une grave crise humanitaire. Au total, plus de 900 civils auraient été tués
dans des bombardements.
Le régime syrien a accentué son
emprise sur le fief rebelle dans la Ghouta orientale, cible depuis trois
semaines d'un déluge de feu d'une rare violence, les autorités empêchant ce
jeudi l'entrée d'un convoi d'aides vital pour une population en proie à une
grave crise humanitaire. Appuyé
par l'indéfectible allié russe, le pouvoir de Bachar el-Assad a reconquis plus
de la moitié de l'enclave rebelle, après avoir lancé le 18 février une
offensive de grande ampleur qui, selon l'Observatoire syrien des droits de
l'Homme (OSDH), a tué plus de 900 civils dans ce dernier bastion insurgé aux
portes de la capitale.
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Les forces du régime poursuivent
sans répit leur offensive terrestre et leur pilonnage meurtrier, malgré les
appels d'une communauté internationale impuissante face au bain de sang. Selon
l'Observatoire, le régime cherche à scinder l'enclave pour affaiblir les deux
forces principales du fief rebelle, Jaich al-Islam, au Nord, et Faylaq
al-Rahmane, au Sud. Des combats entre rebelles et forces du régime se déroulent
au cœur même de l'enclave, en périphérie de Douma mais aussi des localités de
Hammouriyé et Jisrine, plus au sud, cibles de raids aériens, d'après la même
source. Un responsable militaire a indiqué à des journalistes que les autorités
syriennes ont mis en place un nouveau couloir humanitaire, reliant la
périphérie de la capitale au sud de l'enclave, pour permettre la sortie des
civils.
La livraison d'aide
humanitaire ajournée
Un bombardement à la Ghouta, ce
jeudi. - Crédits photo : AMMAR SULEIMAN/AFP
Les quelque 400.000 habitants de
l'enclave, assiégés depuis 2013, subissent au quotidien pénuries de nourriture
et de médicaments, et vivent désormais terrés dans les sous-sols pour échapper
au déluge de feu. Des aides médicales et de la nourriture devaient y être
distribuées ce jeudi mais l'ONU et des ONG ont annoncé que la livraison avait
été ajournée. La situation «sur le terrain (...) ne nous permet pas de mener
l'opération» à bien, a indiqué Ingy Sedky, une porte-parole du Comité
international de la Croix-Rouge (CICR). «Aujourd'hui, l'ONU et ses partenaires
n'ont pas pu retourner à Douma (...) car le mouvement du convoi n'a pas été
autorisé par les autorités syriennes pour des raisons de sécurité», a indiqué
Jens Laerke, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires
de l'ONU (Ocha), à Genève.
» LIRE AUSSI - Syrie:
qui sont les rebelles dans la Ghouta orientale?
Fin
février, le Conseil de sécurité avait adopté une résolution réclamant un
cessez-le-feu de trente jours dans toute la Syrie, ravagée depuis
2011 par une guerre qui a fait plus de 340.000 morts. Par la suite, la Russie a
décrété une «pause humanitaire» quotidienne de cinq heures dans l'enclave
rebelle mais, mercredi, les bombardements ont encore tué 91 civils, selon
l'OSDH.
De nouvelles allégations
d'attaques chimiques
«En raison d'une attaque au gaz
de chlore (...), des patients souffrent de difficultés respiratoires sévères»
Société médicale syro-américaine
Par ailleurs, au moins 60
personnes ont souffert mercredi soir de difficultés respiratoires à Saqba et
Hammouriyé après des frappes aériennes, a indiqué l'OSDH. Des cas de
suffocation similaires ont déjà été rapportés à deux reprises ces derniers
jours, selon l'Observatoire. «En raison d'une attaque au gaz de chlore (...),
des patients souffrent de difficultés respiratoires sévères», a indiqué la
Société médicale syro-américaine (SAMS), une ONG qui soutient des centres
médicaux en Syrie. À Hammouriyé, un correspondant de l'AFP a pu voir des
dizaines de personnes, femmes et enfants, quitter des sous-sols et s'installer
sur un toit dans l'espoir de pouvoir mieux respirer.
Les parents ont déshabillé les
enfants qui toussaient sans cesse pour les laver à grande eau, et tenter
d'éliminer une possible présence de gaz toxique sur leur corps. «Je vais
suffoquer», hurlaient deux enfants, alors que des secouristes les portaient
pour les emmener se faire soigner. Le régime, qui a plusieurs fois démenti
utiliser des armes chimiques, a été dénoncé ces dernières semaines à la suite
d'attaques présumées au gaz de chlore. Ces accusations, «irréalistes» selon
Bachar el-Assad, ont provoqué un tollé sur la scène internationale, Washington
et Paris brandissant la menace de frappes en Syrie.
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Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian,
quitte le Parti socialiste (08.03.2018)
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Sur
CNews jeudi, le ministre des Affaires étrangères a expliqué «prendre acte» de
la décision du PS, qui l'avait exclu «de fait» après son entrée dans le
gouvernement d'Emmanuel Macron.
Membre du gouvernement d'Emmanuel
Macron et, en même temps, membre du Parti socialiste? Impossible avait répondu
le coordinateur national du PS Rachid Temal. Le chef par intérim du parti a
toujours affirmé que les socialistes qui avaient rejoint Emmanuel Macron
s'étaient exclus «de fait». Pourtant, le ministre des Affaires étrangères a
longtemps laissé planer l'ambiguïté, continuant
à se revendiquer du PS. Jean-Yves Le Drian a finalement levé le voile
jeudi sur CNews en annonçant qu'il «prenait acte» de la décision et qu'il
quittait le Parti socialiste.
De la «fierté» mais aussi de
la «déception»
«Je me retire du Parti
socialiste, avec beaucoup d'émotion après 44 ans, beaucoup de fierté parce que
j'ai participé à des combats sous François Mitterand, sous Lionel Jospin, sous
François Hollande avec qui j'ai toujours une forte amitié mais je me retire
aussi avec déception», a souligné Jean-Yves Le Drian.
Le ministre des Affaires
étrangères regrette notamment que le PS se range, selon lui, «dans une
opposition sectaire et puérile» plutôt que dans une démarche constructive avec
la majorité. «J'estime aujourd'hui que la manière d'avancer vers l'Europe, la
manière de transformer notre pays, c'est auprès d'Emmanuel Macron qu'il faut le
faire. Je regrette que le Parti socialiste se replie sur des convictions à mon
sens dépassées», a-t-il déploré. Jean-Yves Le Drian refuse en revanche de
rejoindre La République en marche, préférant simplement se revendiquer «de la
majorité présidentielle.»
La prise de position de Jean-Yves
Le Drian intervient une journée après un article de Mediapart, épinglant le ministre. Il est soupçonné
d'avoir obtenu un passe-droit pour inscrire ses deux petits-enfants au lycée
français de Barcelone. Le proviseur de l'établissement comme le ministre ont
démenti.
«Ça a dû lui faire mal»
Une décision «cohérente» saluée
par les socialistes, à commencer par Stéphane Le Foll. «On ne peut pas être au
gouvernement, soutenu par une majorité, et être dans un parti d'opposition. Ça
ne pouvait pas continuer, à un moment soit il faut quitter le gouvernement,
soit quitter le Parti socialiste. C'était une clarification qui était
extrêmement nécessaire», a déclaré jeudi sur Public Sénat son
ancien collègue ministre sous François Hollande, aujourd'hui candidat au poste
de Premier secrétaire du PS. «Jean-Yves Le Drian a une longue histoire avec le
Parti socialiste: ça a dû lui faire mal mais je pense qu'il a fait ce choix il
y a déjà quelques temps, en soutenant Emmanuel Macron», a avancé de son côté le
commissaire européen et socialiste Pierre Moscovici sur BFM TV.
«Il n'est plus membre du PS
depuis son entrée au gouvernement»
Rachid Temal, coordinateur
national du Parti socialiste
Le coordinateur national du Parti
socialiste Rachid Temal, le premier à avoir annoncé que Jean-Yves Le Drian ne
faisait plus partie du PS, s'est quant à lui montré plus sévère. «Certains
s'intéressent - au lendemain du débat réussi - à celles et ceux qui ont quitté
le PS pour rejoindre une autre formation politique ou le gouvernement d'Édouard
Philippe. Moi je m'intéresse aux militants et élus qui sont au Parti socialiste
au nom de nos valeurs et préparent l'avenir», a-t-il commenté sur sa page
Facebook. «Il n'est plus membre du PS depuis son entrée au gouvernement»,
a-t-il d'ailleurs souligné auprès du Figaro.
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Empilement des dettes : se souvenir de la crise grecque
(08.03.2018)
FIGAROVOX/TRIBUNE - Bruno Le
Maire a dit son opposition à tout effacement de la dette de pays en crise. Il a
tort, selon l'économiste Charles Wyplosz, qui explique comment il vaudrait
mieux décourager les prêteurs légers ou cyniques.
- Crédits photo : Clairefond
Tirant les leçons de la crise
précédente, les pays membres de la zone euro envisagent de créer un Fonds
monétaire européen. Un aspect crucial, mais technique, de ce projet pose un
problème à la France. Il s'agit, en préalable à tout prêt à un pays en crise,
d'exiger qu'une partie de sa dette existante soit purement et simplement
annulée. Bruno Le Maire a indiqué qu'il y était opposé, et pourtant c'est une
idée très saine, contrairement aux apparences. Ce qu'il a présenté comme une
ligne rouge est une bien mauvaise idée qui rappelle des mauvais souvenirs.
Lorsque la Grèce s'est retrouvée
en crise au début de 2010, la question d'un effacement partiel de sa dette
publique s'est posée. Emmenés par le président de la BCE, Jean-Claude Trichet,
les pays de la zone euro ont tracé la même ligne rouge que Bruno Le Maire
aujourd'hui. Or c'est cette posture qui a conduit à la catastrophe en Grèce, à
la contagion vers d'autres pays et au risque d'éclatement de la zone euro. À
l'époque, un effacement de la dette grecque aurait affecté, entre autres,les
banques allemandes et françaises, déjà secouées par la crise financière.
L'argument officiel était que l'on ne pouvait pas prendre le risque d'une
nouvelle crise bancaire. Peut-être, mais il s'agissait avant tout de protéger
les banques. Une grande part de l'argent public prêté aux Grecs a été consacrée
à rembourser des banques privées. Il faudra maintenant aux Grecs deuxou trois
générations pour rembourser les généreux prêts qu'on les a obligés d'accepter.
En
2010, la dette publique grecque représentait 130 % du PIB. C'était
déraisonnable, comme l'histoire l'a prouvé, mais à qui la faute? Aux
gouvernements grecs successifs qui ont dépensé sans compter, bien sûr, mais pas
seulement. Il faut être deux pour un prêt. Le prêteur se doit de mesurer les
risques qu'il prend, car un prêt est toujours risqué. Ceux qui ont prêté à la
Grèce dans les années qui ont précédé 2010 ont soit choisi d'ignorer les
risques qu'ils prenaient, soit imaginé que la Grèce serait «sauvée» par
l'argent des contribuables des autres pays de la zone euro. Ignorer les risques
est une bien mauvaise idée. Compter sur les contribuables est éminemment
cynique.
Une des leçons de la crise
grecque est qu'il ne faut plus se retrouver dans cette situation. La réforme du
Pacte de stabilité et de croissance vise à accentuer la pression sur les
gouvernements pour qu'ils tiennent leurs budgets. Même si cette réforme a peu
de chances de réussir, l'objectif est primordial et il faudra persévérer. La
réflexion sur cette question est en cours.
«Officiellement, les dettes
publiques sont considérées comme sans risque, donc sans exigence de précaution.
Or c'est une fiction».
Pour autant, il est tout aussi
important de décourager les prêteurs irréfléchis ou cyniques, pour leur propre
intérêt et pour celui des contribuables européens. Plusieurs possibilités
existent. La première est la réglementation bancaire. Les banques doivent
constituer un matelas en proportion des risques qu'elles prennent, ce qui les
amène à modérer la prise de risque et permet d'espérer qu'elles seront mieux
équipées pour faire face au prochain coup dur. Mais, officiellement, les dettes
publiques sont considérées comme sans risque, donc sans exigence de précaution.
Or c'est une fiction. Les dettes publiques de l'Italie et du Portugal s'élèvent
aujourd'hui à quelque 130 % de leurs PIB, plus que la Grèce en 2010! Mais
aucun gouvernement ne veut ouvrir cette boîte de Pandore. On maintient donc la
fiction que les dettes publiques n'entrent pas dans la catégorie des dettes à
risque.
La deuxième possibilité pour
décourager les prêteurs légers ou cyniques est de leur envoyer un message
clair: il n'y aura plus d'aide publique aux pays de la zone euroen difficulté.
Le Traité de Maastricht a institué cette règle, mais elle a volé en éclat
lorsque des prêts ont été accordés à la Grèce, puis aux autres pays en crise,
sur la base d'une obscure clause du traité. Les discussions en cours sur la
création d'un Fonds monétaire européen, destiné à renflouer les pays de la zone
euro en cas de besoin montrent que cette clause du traité reste caduque et que
les gouvernements n'ont aucune intention d'adopter cette option. Le message
adressé au marché est donc funeste: prêtez, prêtez, chères banques, le
contribuable vous aidera.
La troisième possibilité est
d'associer les aides à un effacement partiel de la dette. C'est ici que la
ligne rouge de Bruno Le Maire intervient. La proposition qu'il rejette rendrait
obligatoire que toute aide collective à un pays en crise soit accompagnée par
un effacement partiel de sa dette publique. Comme les dettes publiques sont
largement détenues par des institutions financières, ceci permettrait de
protéger les contribuables, désormais engagés, mais aussi de limiter les coûts
qu'ils auraient à subir.
«Il est désormais plus facile
d'effacer les dettes publiques.»
De plus, la dette du pays en
crise serait moins élevée au sortir de l'épisode, contrairement à la Grèce dont
la dette atteint 180 % du PIB aujourd'hui, ce qui signifie qu'elle est
loin d'être sortie d'affaire après dix ans d'intense austérité (et malgré,
finalement, une remise de dette bâclée de l'ordre de 50 % du PIB en 2012).
Enfin, et surtout, cela enverrait un message plus sain aux prêteurs, désormais
avertis qu'ils devraient mettre la main au portefeuille.
Il est désormais plus facile
d'effacer les dettes publiques. En 2012, dans le cadre du traité qui a établi
le Mécanisme européen de stabilité (qui aide les pays en crise), il a été
décidé que les dettes publiques de plus d'un an émises par les pays de la zone
euro à partir du 1er janvier 2013 doivent inclure une clause dite d'action
collective.
Cette clause vise à empêcher
qu'une minorité de détenteurs de dette ne bloquent un accord d'effacement avec
le gouvernement en question. Le principe auquel s'attaque Bruno Le Maire est
donc implicitement acquis, sinon à quoi pourrait bien servir la clause d'action
collective? Les raisons de ce raidissement sont bien mystérieuses. A-t-il peur
que la France soit, un jour, obligée à effacer sa dette? Si c'est le cas, la
solution est de ne plus faire de déficits.
Si le gouvernement français
réussit à faire échouer l'accord en cours d'élaboration, l'on n'aura pas
progressé. Les contribuables européens des pays en crise devront supporter
toujours plus de dettes publiques et leurs homologues des pays prêteurs seront
toujours obligés de garantir ces prêts pour voler au secours des banques
privées. La morale de l'affaire est claire: contribuables de tous les pays,
unissez-vous!
* Professeur d'économie
internationale à l'Institut de hautes études internationales et du
développement (IHEID) à Genève, Charles Wyplosz est directeur du Centre
international d'études monétaireset bancaires.
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Le Sri Lanka déstabilisé par les extrémistes bouddhistes
(07.03.2018)
INFOGRAPHIE - Le
gouvernement a décrété l'état d'urgence pour contenir les violences contre les
minorités religieuses, en particulier musulmanes.
À New Delhi
Le Sri Lanka a connu mercredi une
nouvelle journée de tensions alors que des
émeutes secouent les districts de Kandy et d'Ampara, au centre et à l'est de
l'île, depuis fin février. Mercredi, des commerces ont été brûlés à
Kandy, poussant les autorités à bloquer partiellement l'accès aux réseaux
sociaux, et ce alors que l'état d'urgence a été décrété pour dix jours dans
tout le pays. Les violences ont fait au moins un mort pour l'instant.
D'après la version livrée par le
premier ministre Ranil Wickremesinghe devant le Parlement mardi, tout a
commencé le 22 février. Un chauffeur de l'ethnie cinghalaise est agressé
par quatre musulmans lors d'un incident de la circulation à Kandy. Blessée, la
victime est transportée à l'hôpital où elle succombe à ses blessures le
3 mars. Le lendemain soir, deux commerces tenus par des musulmans sont
incendiés à Kandy. Le 5 mars, les attaques prennent de l'ampleur. Des
boutiques ainsi que des mosquées sont prises pour cible. Un jeune musulman de
27 ans périt dans l'incendie de sa maison à Digana. Des moines cinghalais de
confession bouddhiste participent aux émeutes, mobilisant leurs partisans grâce
aux réseaux sociaux, sans que la police ne les interpelle.
Moines radicalisés
Ces événements sont les derniers
d'une série d'attaques qui se multiplient depuis 2012 contre les minorités
religieuses, en particulier musulmanes. La plupart du temps, ces agressions
sont encouragées par les bouddhistes radicaux du Bodu Bala Sena (BBS). Si les
bouddhistes de l'ethnie cinghalaise sont majoritaires au Sri Lanka,
représentant 70 % de la population, le BBS martèle que la croissance
démographique des musulmans menacerait leur statut social. Il reproche aux
minorités religieuses de multiplier les conversions, dont il prône la
pénalisation, réclame l'interdiction de l'abattage halal, des manifestations religieuses
musulmanes et chrétiennes,
ainsi que l'abolition du droit privé musulman.
L'an dernier, le BBS a trouvé un
nouveau cheval de bataille avec l'arrivée des
Rohingyas, de confession musulmane, ayant fui la répression de l'armée birmane.
Le chef du BBS, Gnanasara Thero, avait affirmé en mai 2017 lors d'une
conférence de presse que ces réfugiés étaient venus envahir le Sri Lanka.
Le premier ministre s'est dit
décidé à contenir les violences: «le gouvernement condamne les actes violents
et racistes. L'état d'urgence a été proclamé et nous n'hésiterons pas à prendre
d'autres mesures si nécessaire», a-t-il déclaré. Mais pour Alan Keenan,
chercheur à l'International Crisis Group, le chef du gouvernement a peu de
marges de manœuvre. «Les moines bouddhistes jouissent d'un statut social très
particulier et les interpeller serait perçu comme un manque de respect envers
le clergé.» Autre problème: l'ancien président Mahinda Rajapakse, opposant au
premier ministre, ne cache pas ses sympathies pour les extrémistes. Or Rajapakse
garde de nombreux soutiens dans les forces de sécurité et certains observateurs
pensent que l'armée et la police, qui lui seraient fidèles, laissent faire les
émeutiers.
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Armes chimiques : Paris menace Damas de «riposte»
(08.03.2018)
VIDÉO - Dans la Ghouta, des ONG
accusent le régime d'avoir frappé au chlore les rebelles, mais les preuves
manquent encore.
Jean-Yves Le Drian a promis jeudi
une «riposte française» en cas d'utilisation avérée d'armes chimiques dans le
conflit syrien. Cette nouvelle menace française intervient deux jours après la
publication d'un rapport par la commission d'enquête de l'ONU sur les crimes de
guerre, accusant Damas d'avoir eu recours à des armes chimiques, notamment dans
la Ghouta orientale, la dernière enclave rebelle autour de la capitale,
bombardée depuis près de trois semaines.
«Il y a aujourd'hui des faisceaux
de convergence, des faisceaux d'indications qui laissent à penser que l'arme
chimique peut être utilisée ou a déjà été utilisée», a déclaré le ministre des
Affaires étrangères sur CNews. Jean-Yves Le Drian a toutefois reconnu que
«nous n'av(i)ons pas les preuves» d'une telle utilisation d'armes chimiques par
le régime syrien contre les rebelles assiégés dans la Ghouta, où 900 civils
ont péri en trois semaines et où un convoi humanitaire n'a pu venir secourir
jeudi la population dans le besoin.
La «ligne rouge» française
Citant des médecins sur place,
une ONG internationale, l'Union des organisateurs de secours et soins médicaux,
affirme qu'une attaque au chlore s'est produite vers 21 heures mercredi
dans les villes de Saqba et Hamouria. D'après les secouristes des Casques
blancs, une cinquantaine de personnes ont été affectées. Elles souffraient de
difficultés respiratoires après des frappes aériennes. Des accusations jugées
«irréalistes» par Damas. Ces dernières semaines, le régime a été, à plusieurs
reprises, montré du doigt pour des attaques présumées au chlore. «Si d'aventure
l'usage d'armes chimiques était constaté, vérifié, attribué, et que l'usage de
l'arme chimique (….) faisait des morts, alors la riposte française serait au
rendez-vous», a détaillé Jean-Yves Le Drian.
Mais les spécialistes s'accordent
à reconnaître que l'établissement de telles preuves est un exercice très
délicat. Bref, alors que les rebelles syriens reculent dans la Ghouta
- que les pro-Assad sont parvenus à couper en deux et à reconquérir à plus
de 50 % en quelques jours -, Jean-Yves Le Drian rappelle la
«ligne rouge» française, établie par Emmanuel Macron, peu après son élection à
la présidence de la République. Mais, à l'Élysée, on soulignait en début de
semaine que «ce n'(était) pas une action militaire que la France (menait) en
Syrie».
«Il n'y a pas de changement dans
nos priorités en Syrie, la priorité numéro un reste la lutte antiterroriste»,
confiait un proche du chef de l'État, tout en rappelant que, si des
preuves de l'utilisation d'armes chimiques par Damas étaient
établies, Paris prendrait ses responsabilités. La riposte serait aussi
américaine, a précisé Jean-Yves Le Drian. Ce qui laisse supposer une
coopération dans des frappes contre des sites - connus - de stockages
d'armes chimiques par Damas.
En 2013, François Hollande avait
voulu «punir» par des bombardements Bachar el-Assad, déjà accusé d'avoir
utilisé des armes chimiques dans la Ghouta (plus de 1000 morts). Mais, au
dernier moment, Barack Obama avait renoncé à recourir à la force contre le
régime syrien.
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Immigration illégale : la Californie se rebelle contre
Washington (08.03.2018)
Cet «État sanctuaire» se mobilise
après que le ministère de la Justice a porté plainte contre des lois protégeant
les clandestins.
La guerre larvée opposant
l'Administration de Donald
Trump à la Californieest entrée mardi dans une nouvelle phase,
juridique cette fois, et pourrait bien se terminer devant la Cour suprême.
L'objet de la dispute, qui n'est pas nouvelle mais vient d'atteindre un
paroxysme, est l'immigration illégale et le statut d'«État sanctuaire» de la
Californie, déclaré en octobre par son gouverneur démocrate Jerry
Brown. Le président américain désire tenir sa promesse électorale
d'expulser le plus grand nombre de clandestins possibles.
«La Californie utilise tous
les pouvoirs qu'elle a - et parfois qu'elle n'a pas - pour contrecarrer
l'application de la loi fédérale, vous pouvez être sûrs que je vais utiliser
tous mes pouvoirs pour l'arrêter.»
Jeff Sessions, ministre américain
de la Justice
De leur côté, les leaders
californiens ont juré de les protéger grâce à trois lois récentes considérées
comme radicales par l'Administration Trump. La première, AB 450, interdit
aux entreprises non seulement de partager sciemment des renseignements
concernant leurs employés avec des agents de l'immigration, mais les contraint
de plus à les alerter en cas d'inspection par les autorités fédérales. La deuxième,
AB 103, impose des inspections des centres de détention fédéraux de
clandestins, réputés iniques. La dernière, SB 54, interdit aux forces de
l'ordre locales d'informer les mêmes autorités fédérales lorsque des
clandestins potentiellement sujets à l'expulsion sont sur le point d'être
libérés de prison.
Un événement a fini d'attiser le
ressentiment de Washington contre la Californie rebelle: fin février, Libby
Schaaf, la mairesse d'Oakland - une banlieue de San Francisco - a
envoyé un e-mail aux résidents de sa ville pour les prévenir que la police de
l'immigration préparait une rafle anticlandestins. Piqué au vif par une telle
insolence, le ministère de la Justice vient de contre-attaquer en déposant une
plainte contre l'État doré. Jeff Sessions l'accuse de «faire obstruction à la
capacité des États-Unis d'appliquer les lois votées au Congrès ou d'agir selon
la Constitution. La Californie utilise tous les pouvoirs qu'elle a - et parfois
qu'elle n'a pas - pour contrecarrer l'application de la loi fédérale, vous
pouvez être sûrs que je vais utiliser tous mes pouvoirs pour l'arrêter».
«Refuser d'appréhender et de déporter les clandestins, en particulier les
éléments criminels, va en effet à l'encontre de toutes les lois sur
l'immigration (…) et privilégie un système de frontières ouvertes. L'ouverture
des frontières est une idée extrémiste, irrationnelle que nous ne
pouvons pas accepter», a-t-il affirmé mercredi lors d'un discours devant des
responsables des forces de l'ordre à Sacramento, la capitale de l'État, tandis
que des centaines de manifestants étaient venus contester sa présence.
Donald Trump voudrait forcer
les forces de l'ordre de l'État à coopérer avec l'ICE, chargée des expulsions.
Il accuse la Californie de protéger les clandestins criminels et de mettre
ainsi ses citoyens en danger.
La riposte des leaders
californiens ne s'est pas fait attendre. Le gouverneur Jerry Brown a qualifié
la plainte d'un «coup de pub» doublé d'une «déclaration de guerre». «Dans une
période de tourmente politique sans précédent, Jeff Sessions est arrivé en
Californie pour diviser et polariser l'Amérique. Regardons les choses en face,
la Maison-Blanche est en état de siège. De toute évidence, Jeff Sessions a un
mal fou à se comporter en ministre de la Justice normal. Il se trouve pris au
piège du trumpisme et vient de commencer un règne de la terreur», a ajouté le
leader démocrate.
Donald Trump voudrait forcer les
forces de l'ordre de l'État à coopérer avec l'Immigration and Customs
Enforcement (ICE), chargée des expulsions. Il accuse la Californie de protéger
les clandestins criminels et de mettre ainsi ses citoyens en danger. Les
leaders du «Golden State» rétorquent qu'au contraire, si les clandestins
venaient à craindre les dénonciations de la police, ils cesseraient de signaler
les activités criminelles de leurs quartiers par peur d'être arrêtés et
priveraient ainsi la police de témoignages cruciaux pour ses enquêtes.
Loin de paraître intimidés par
les provocations du président, qui a menacé de faire sortir tous les agents
fédéraux de Californie pour lui donner une leçon et la plonger ainsi dans le
crime sans bouclier, les responsables politiques californiens ont durci leur
position. Le président du Sénat Kevin de Leon, un fils d'immigrés, accuse Jeff
Sessions d'avoir une idéologie basée sur le «suprémacisme et le nationalisme
blancs». Quant au ministre californien de la Justice, Xavier Becerra, lui aussi
fils d'immigrés, il a déclaré que «notre tâche, c'est la sécurité de la
population, pas les expulsions».
Le bras de fer s'annonce d'autant
plus féroce que défier l'Administration
Trump est presque devenu un devoir en Californie: les habitants se
veulent l'antithèse de ce qu'il représente, que ce soit en matière d'immigration,
de lutte contre le réchauffement climatique ou de légalisation du cannabis. Un
quart environ des 11 millions de clandestins vivent dans cet État le plus
peuplé d'Amérique. Leur sort sera défendu par l'ex-ministre de la Justice de
Barack Obama, Eric Holder, que la Californie a embauché.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 09/03/2018. Accédez à sa version
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Laszlo Trocsanyi : «La Hongrie entend défendre ses
frontières» (08.03.2018)
INTERVIEW - Immigration,
multiculturalisme... Le ministre de la Justice hongrois, qui fut ambassadeur à
Bruxelles et à Paris, évoque ces sujets sensibles en Europe centrale.
Le ministre hongrois de la
Justice, Laszlo Trocsanyi, vient de passer plusieurs jours à Paris pour y
défendre la position de la Hongrie, alors que le premier ministre Viktor
Orban a engagé un bras de fer avec Bruxelles sur la question de
l'immigration. Il a rencontré Le Figaro.
LE FIGARO. - La Hongrie est
accusée de dériver vers une démocratie autoritaire, qui porte atteinte à
l'indépendance de la justice et de la presse notamment. Que répondez-vous à ces
critiques?
Laszlo TROCSANYI. - Je
m'inscris en faux contre ces accusations et je ne dis pas cela à la légère,
étant moi-même professeur de droit constitutionnel et grand connaisseur du
système européen de contre-pouvoirs et notamment de celui de la France. J'ai
d'ailleurs profité de ma visite pour parfaire mes connaissances sur la question
de la nomination des juges administratifs français et des garanties
d'indépendance de la justice. Le pouvoir exécutif n'a aucune influence sur
l'activité de la justice en Hongrie. Nous avons adopté une loi nouvelle sur le
contentieux administratif et élargi la compétence des juges. C'est certes le
président qui nomme les juges, mais il n'y a pas de contreseing du premier
ministre, et c'est le Conseil de la magistrature, exclusivement constitué de
juges, qui propose les candidats.
C'est vrai qu'en 2011 il y a eu
des bagarres autour du pouvoir judiciaire quand le gouvernement a voulu mettre
à la retraite les juges dès l'âge de 65 ans, pour qu'ils tombent sous le
même régime que les autres professions. La Cour de justice européenne a alors
décidé que notre décision violait les traités et nous avons corrigé notre
copie, acceptant que les juges demeurent jusqu'à 70 ans. Le dossier est
clos depuis huit ans! Mais on continue de parler d'atteintes à l'indépendance
de la justice, sans fondement! La réalité, c'est qu'une bataille se joue autour
de la Hongrie pour d'autres raisons. Nous recevons des mauvaises notes parce
que nous avons un point de vue différent sur la question de la migration et de
la défense des frontières.
Que voulez-vous dire?
Depuis la vague de réfugiés de
2015, on fait le procès à la Hongrie d'avoir voulu contrôler sa frontière, qui
est aussi la frontière extérieure de l'UE. Ce qui est en débat, c'est l'idée de
la «société ouverte», ce modèle politique qui prône le multiculturalisme et les
frontières ouvertes et met la défense de l'individu au-dessus de tout le reste.
Nous sommes attachés aux libertés individuelles, mais nous pensons que d'autres
éléments doivent peser: l'intérêt général, l'ordre public, la souveraineté
nationale, l'identité culturelle. Nous avons en Europe centrale une vision
différente de celle d'Europe occidentale, due à notre histoire. Nous n'avons
pas connu le phénomène des colonies ni eu l'expérience d'une immigration de
masse.
«Pour nous, les racines
chrétiennes sont importantes, or nous voyons aujourd'hui qu'à cause du
multiculturalisme, l'Europe veut cacher sous le tapis ses racines, au prétexte
que cela peut léser certains.»
Laszlo Trocsanyi
Est-ce l'islam qui fait peur à
la Hongrie?
Le multiculturalisme en Europe
centrale suscite une vraie réticence, d'autant que nous observons que cela ne
marche pas si bien que ça en Europe occidentale. Cela ne veut pas dire que nous
sommes contre la solidarité. Nous avons accueilli énormément d'Ukrainiens
depuis l'annexion de la Crimée et énormément de réfugiés des Balkans. Mais nous
voulons contrôler notre frontière et ne comprenons pas que cela ne soit pas
compris. C'est notre obligation dans le cadre de Schengen. Nous voyons aussi
que d'autres pays, comme l'Espagne, ont construit des clôtures et que cela a
été accepté. Alors pourquoi certains murs seraient-ils bons et d'autres
mauvais? Pour nous, la question de la migration est clé, car elle touche à la
composition de la population du pays, et donc du type de société dans lequel
nous allons vivre, pas seulement aujourd'hui mais dans vingt ans. Est-il
possible de forcer les États à accueillir des populations étrangères s'ils ne
le veulent pas? C'est tout le débat que nous avons avec Bruxelles. Pour nous,
ce sujet touche à la souveraineté nationale et à l'identité constitutionnelle
de notre pays. Cela nous amène à votre question sur l'islam. Nous avons du
respect pour cette grande religion, pas d'hostilité. Mais la question se pose
de savoir comment le christianisme et l'islam peuvent vivre ensemble. Nous
avons certaines craintes et, pour nous, les racines chrétiennes sont
importantes, or nous voyons aujourd'hui qu'à cause du multiculturalisme,
l'Europe veut cacher sous le tapis ses racines, au prétexte que cela peut léser
certains. Mais comme le disait notre ancien premier ministre Jozsef Antall, il
ne faut pas oublier qu'en Europe, même les athées sont chrétiens, car c'est
notre culture. Il faut la préserver.
La Hongrie a néanmoins signé
les conventions de Genève sur le droit d'asile.
Bien sûr, il y a les conventions
de Genève. Mais les règles de droit d'asile sont une compétence partagée entre
les États et l'UE. Va-t-on priver les États de cette compétence? Nous voyons se
développer à Bruxelles une tendance au fédéralisme, qui donne de plus en plus
de pouvoir aux institutions européennes sur ce sujet et porte atteinte à la
souveraineté nationale. Regardez les déclarations du premier ministre belge,
qui a affirmé que l'on doit décider, avec une majorité qualifiée, de forcer les
États à accepter les quotas de migrants.
L'UE peut-elle vous forcer la
main sur les quotas? Certains appellent à couper les fonds régionaux qui ont
fait votre prospérité.
Théoriquement, en effet, on
pourrait court-circuiter le Conseil des chefs d'État et forcer la main des pays
d'Europe centrale, au niveau du Conseil des ministres de l'intérieur. Mais
est-ce sage? Vouloir nous punir sur la question des fonds structurels serait
inapproprié car ces fonds sont destinés à pallier les différences entre régions
et n'ont rien à voir avec la question migratoire.
Mais l'UE pense que l'Europe
centrale, après avoir bénéficié du principe de solidarité, pourrait l'endosser
à son tour…
Il y a un clivage entre les
quatre pays du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et
Slovaquie, NDLR)et les autres sur la migration. Aujourd'hui, les pays d'Europe
occidentale et les institutions européennes veulent appliquer un système basé
sur la solidarité. Mais nous mettons en avant le principe de sécurité. L'Europe
doit être une enceinte de négociation et de compromis. Nous pensons qu'il est
indispensable de créer des centres de transit à l'extérieur de l'UE, afin de ne
pas avoir à gérer les migrants qui se retrouvent déboutés du droit d'asile mais
sont très difficilement expulsables, comme on le voit aujourd'hui en Allemagne.
Dans quelle Europe voulons-nous vivre? Une Europe fédérale ou une Europe forte
avec des États forts? L'Europe de «la société ouverte», c'est l'Europe forte
avec des États faibles. Nous n'en voulons pas.
«La Hongrie et les pays de
Visegrád ont une approche concrète de l'immigration et ont toujours été prêts à
discuter avec tous leurs partenaires européens dans le plus grand respect.»
Laszlo Trocsanyi
Les pays de Visegrad sont-ils
aujourd'hui totalement isolés ou sentez-vous un changement dans l'approche de
l'Europe occidentale, vu le débat qui s'y développe sur la question des
frontières et des résultats mitigés du multiculturalisme ?
Nous voyons bien qu'il y a débat
à l'ouest de l'Europe entre les gouvernants et les peuples. Est-il possible de
faire une politique contre l'avis des citoyens? C'est une grande question, qui
ne se pose pas seulement chez nous. Regardez l'Allemagne, dont l'équilibre
politique est remis en question à cause de la politique migratoire de Merkel.
Peut-être, à cause de cette réalité, percevons-nous un changement d'approche
récent, notamment en France. L'actuel gouvernement a une vraie volonté
d'écouter ce que nous avons à dire. Le président Macron envisage d'ailleurs de
venir bientôt en Hongrie même si la date n'est pas fixée.
Quelle est votre réaction au
résultat des élections italiennes? La nouvelle donne en Italie va-t-elle vous
fournir des alliés?
Il est indéniable que les
questions relatives à l'immigration ont été au cœur de la campagne électorale
en Italie, et que le gouvernement qui va émerger prendra cet élément en
considération. La Hongrie et les pays de Visegrád ont une approche concrète de
l'immigration et ont toujours été prêts à discuter avec tous leurs partenaires
européens dans le plus grand respect. Mais le possible changement de la
position italienne est clairement de nature à rapprocher les points de vue de
notre groupe et ceux de l'Italie.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 09/03/2018. Accédez à sa version
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Armes chimiques : Paris menace Damas de «riposte»
(08.03.2018)
VIDÉO - Dans la Ghouta, des ONG
accusent le régime d'avoir frappé au chlore les rebelles, mais les preuves
manquent encore.
Jean-Yves Le Drian a promis jeudi
une «riposte française» en cas d'utilisation avérée d'armes chimiques dans le
conflit syrien. Cette nouvelle menace française intervient deux jours après la
publication d'un rapport par la commission d'enquête de l'ONU sur les crimes de
guerre, accusant Damas d'avoir eu recours à des armes chimiques, notamment dans
la Ghouta orientale, la dernière enclave rebelle autour de la capitale,
bombardée depuis près de trois semaines.
«Il y a aujourd'hui des faisceaux
de convergence, des faisceaux d'indications qui laissent à penser que l'arme
chimique peut être utilisée ou a déjà été utilisée», a déclaré le ministre des
Affaires étrangères sur CNews. Jean-Yves Le Drian a toutefois reconnu que
«nous n'av(i)ons pas les preuves» d'une telle utilisation d'armes chimiques par
le régime syrien contre les rebelles assiégés dans la Ghouta, où
900 civils ont péri en trois semaines et où un convoi humanitaire
n'a pu venir secourir jeudi la population dans le besoin.
La «ligne rouge» française
Citant des médecins sur place,
une ONG internationale, l'Union des organisateurs de secours et soins médicaux,
affirme qu'une attaque au chlore s'est produite vers 21 heures mercredi
dans les villes de Saqba et Hamouria. D'après les secouristes des Casques
blancs, une cinquantaine de personnes ont été affectées. Elles souffraient de
difficultés respiratoires après des frappes aériennes. Des accusations jugées
«irréalistes» par Damas. Ces dernières semaines, le régime a été, à plusieurs
reprises, montré du doigt pour des attaques présumées au chlore. «Si d'aventure
l'usage d'armes chimiques était constaté, vérifié, attribué, et que l'usage de l'arme
chimique (….) faisait des morts, alors la riposte française serait au
rendez-vous», a détaillé Jean-Yves Le Drian.
Mais les spécialistes s'accordent
à reconnaître que l'établissement de telles preuves est un exercice très
délicat. Bref, alors que les rebelles syriens reculent dans la Ghouta
- que les pro-Assad sont parvenus à couper en deux et à reconquérir à plus
de 50 % en quelques jours -, Jean-Yves Le Drian rappelle la
«ligne rouge» française, établie par Emmanuel Macron, peu après son élection à
la présidence de la République. Mais, à l'Élysée, on soulignait en début de
semaine que «ce n'(était) pas une action militaire que la France (menait) en
Syrie».
«Il n'y a pas de changement dans
nos priorités en Syrie, la priorité numéro un reste la lutte antiterroriste»,
confiait un proche du chef de l'État, tout en rappelant que, si des
preuves de l'utilisation d'armes chimiques par Damas étaient
établies, Paris prendrait ses responsabilités. La riposte serait aussi
américaine, a précisé Jean-Yves Le Drian. Ce qui laisse supposer une
coopération dans des frappes contre des sites - connus - de stockages
d'armes chimiques par Damas.
En 2013, François Hollande avait
voulu «punir» par des bombardements Bachar el-Assad, déjà accusé d'avoir
utilisé des armes chimiques dans la Ghouta (plus de 1000 morts). Mais, au
dernier moment, Barack Obama avait renoncé à recourir à la force contre le
régime syrien.
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L'Ulster otage du Brexit (09.03.2018)
Les négociations sur le Brexit
font craindre, outre-Manche, le rétablissement d'une frontière entre l'Eire et
l'Irlande du Nord.
La frontière extérieure de
l'Union européenne passera-t-elle demain au milieu de la mer d'Irlande entre
les deux îles britanniques? Au cœur des âpres négociations sur le Brexit, le
gouvernement de Theresa May et la Commission européenne achoppent
notamment sur le futur statut de l'Ulster. En théorie, l'Irlande du
Nord, qui appartient au Royaume-Uni, devrait rompre les amarres avec l'UE en
mars 2019 dans les mêmes termes que la Grande-Bretagne. Pourtant, Michel
Barnier, qui mène les négociations du divorce au nom de l'UE, a expliqué que
l'Irlande tout entière, Eire et province de l'Ulster associées, constituerait
demain une seule et même «aire réglementaire commune». Donc, ipso facto,
l'Irlande du Nord demeurerait dans l'Union européenne tandis que le reste du
Royaume-Uni lui tournerait le dos.
L'audace
du négociateur en chef européen a provoqué une réponse cinglante
du Premier ministre britannique: pas question de toucher à «l'intégrité
constitutionnelle du Royaume-Uni», a tempêté Theresa May. Et vendredi
2 mars, lors
d'un long discours consacré aux perspectives de
l'après-Brexit, elle est revenue sur le sujet. «En tant que Premier
ministre de l'ensemble du Royaume-Uni, a-t-elle déclaré, je ne veux pas que
notre départ de l'Union européenne remette en cause les progrès historiques
obtenus en Irlande du Nord ; et je n'autoriserai rien non plus qui puisse
porter atteinte à notre précieuse Union.» Tout le dilemme du gouvernement
britannique se trouve dans cette phrase.
30.000 personnes passent
quotidiennement de l'Eire à l'Ulster
Dans l'accord du Vendredi saint
signé en avril 1998, qui mit fin à trente ans d'attentats et d'assassinats
causant près de 3500 morts en Ulster et en Grande-Bretagne, la question de
la frontière avec la République d'Irlande avait été réglée en l'ouvrant et en
laissant une libre circulation totale. Depuis lors, quelque
30.000 personnes, salariés et étudiants, passent quotidiennement d'un pays
à l'autre - surtout dans le sens Eire-Ulster car le salaire moyen est plus
élevé au nord qu'au sud.
«Au sud comme au nord, on sait
que les deux économies ont beaucoup à perdre d'un Brexit mal négocié»
Tout rétablissement des contrôles
à la frontière aurait donc un double effet négatif. Politiquement, il pourrait
rouvrir la plaie nord-irlandaise et le conflit entre les protestants unionistes
attachés à la Grande-Bretagne - et partenaires dans la majorité de Theresa May
- et les catholiques du Sinn Fein partisans d'une unification irlandaise.
Economiquement, il mettrait en difficulté des dizaines de milliers de
travailleurs frontaliers, dont de nombreux enseignants, et causerait un grave
problème aux sociétés et aux écoles qui les emploient. La branche
nord-irlandaise du FSB, la fédération des petites entreprises, a déjà exprimé
publiquement ses inquiétudes sur un éventuel «durcissement» de la frontière.
De son côté, Michel Barnier s'est
défendu d'avoir voulu provoquer Londres. Pour lui, sa proposition n'était que
la conséquence des discussions de décembre dernier, où la partie britannique
avait souligné son intention de ne pas rétablir une frontière en bonne et due
forme. Malicieux, le négociateur européen s'est étonné que Londres n'ait
toujours pas formulé de solution viable, hormis quelques suggestions purement
technologiques, du type portiques électroniques, tout à fait insuffisantes pour
fonder un règlement définitif.
Cet épineux dossier est scruté de
près par une troisième partie: la République d'Irlande. A
Dublin, on s'inquiète des prises de position souvent contradictoires des
leaders conservateurs britanniques. Boris Johnson, ministre des
Affaires étrangères, n'a-t-il pas prédit la semaine dernière une frontière
«dure» entre les deux Irlandes avec des contrôles renforcés? Theresa May a
rectifié en parlant d'une frontière «soft». Mais la cacophonie demeure. Et, au
sud comme au nord, on sait que les deux économies ont beaucoup à perdre d'un
Brexit mal négocié.
Journaliste
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Radioscopie de l'affaire Halimi (09.03.2018)
Dans son livre L'Affaire
Sarah Halimi, Noémie Halioua enquête sur les «défaillances» qui ont abouti
au meurtre de Sarah Halimi et expliquent ce long mutisme sur son caractère
antisémite.
Près d'un an: c'est le temps
qu'il aura fallu à la justice pour reconnaître
le caractère antisémite du meurtre de Sarah Halimi, cette Française
juive de 67 ans torturée aux cris d'«Allah akbar!» dans son appartement
parisien de Belleville, puis défenestrée, dans la nuit du 3 au 4 avril
2017. Près d'un an de bataille pour la famille de la victime. La juge
d'instruction Anne Ihuellou, qui avait mis son bourreau Kobili Traoré en examen
le 10 juillet pour meurtre, n'a retenu l'antisémitisme de ce Franco-Malien
de 28 ans comme circonstance aggravante que la semaine dernière. Dès
juillet, lors de la commémoration des 75 ans de la rafle du Vél' d'Hiv,
Emmanuel Macron avait pourtant demandé à la justice de faire «toute la clarté»
sur ce meurtre, «malgré les dénégations du meurtrier». Au risque de se voir
reprocher d'enfreindre la séparation des pouvoirs.
- Crédits photo : _ISA
Dans L'Affaire Sarah
Halimi, Noémie Halioua, responsable des pages «Culture» du magazine
Actualité juive, enquête sur les «nombreuses défaillances» qui ont abouti au
meurtre de Sarah Halimi et expliquent ce long mutisme sur son caractère
antisémite.
Sur les pas de William Attal, le
frère de la victime, elle nous emmène d'abord dans cette HLM du
XIe arrondissement de Paris où Sarah Halimi vivait depuis une trentaine
d'années. C'est peu dire que les locataires, immigrés du Maghreb ou d'Afrique
noire en majorité, n'accueillent pas le tandem à bras ouverts. Personne,
sauf épisodiquement ses voisins de palier, ne fréquentait cette Juive orthodoxe
portant jupe longue et perruque. Un monde sépare ce côté du boulevard
de Belleville de La Bellevilloise, où la gauche branchée aime célébrer la
«diversité».
Dans l'immeuble de Sarah Halimi,
une seule femme accepte de raconter à la journaliste, sous couvert d'anonymat,
«l'islamisation de la population maghrébine de Belleville qui s'est
intensifiée, surtout chez les jeunes».
Kobili Traoré est l'archétype de
ce phénomène. Après avoir quitté l'école en troisième, il vivote grâce au RSA
et au deal. Incarcéré quatre fois, il compte quatre condamnations pour vol, six
pour violences - dont une pour avoir brûlé un individu afin de le détrousser -,
huit pour usage ou trafic de stupéfiants, deux pour outrage, un pour port
d'armes… La liste n'est pas exhaustive.
«Le soir du meurtre, la
connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les
policiers présents»
Noémie Halioua
Noémie Halioua a reconstitué son
emploi du temps le jour du meurtre. Il s'est rendu deux fois à la mosquée Omar,
rue Morand, qu'un témoin qualifie de «fabrique de tueurs». Puis il a «zoné»
dans le quartier avec ses copains et est rentré se coucher. Une journée
habituelle, sauf que lorsqu'il se réveille, vers 3 h 30 du matin, il
va chez la famille Diarra, dont l'appartement permet l'accès à celui de Sarah
Halimi. C'est un membre de la famille Diarra qui va alerter la police, un peu
plus tard, en entendant les vociférations et les appels à l'aide chez la
voisine. Pourquoi, alors que trois agents de la BAC sont arrivés sur place à
4 h 25 du matin, Traoré n'a-t-il été interpellé qu'à
5 h 35, après avoir défenestré sa victime? Pour le savoir, Me Gilles-William
Goldnadel, avocat de la sœur de Sarah Halimi, a déposé plainte pour
«non-assistance à personne en danger». Les parties civiles ont demandé une
reconstitution, refusée par la juge en raison de l'état mental du prévenu.
Noémie Halioua dénonce une «inertie policière» et explique ce refus par le
souci de dissimuler «le grave dysfonctionnement des forces de l'ordre ce
soir-là».
C'est en faisant appel de cette
décision que le parquet et les parties civiles ont enfin obtenu la
reconnaissance du caractère antisémite du crime. La juge a préféré anticiper une possible «évocation» - c'est le terme juridique - du fond du dossier par la cour d'appel. Mais que de temps perdu! «Le soir du meurtre, affirme Noémie Halioua, la connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les policiers présents.»
reconnaissance du caractère antisémite du crime. La juge a préféré anticiper une possible «évocation» - c'est le terme juridique - du fond du dossier par la cour d'appel. Mais que de temps perdu! «Le soir du meurtre, affirme Noémie Halioua, la connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les policiers présents.»
La responsabilté des médias
Police, justice, mais aussi
médias: L'Affaire Sarah Halimi pointe les responsabilités de
tous ses acteurs, chacun à leur niveau. La «vulgate journalistique» qui qualifie
de «déséquilibrés» des islamistes pourtant revendiqués, les journaux qui ont
choisi de «différer la publication de l'information pour “ne pas faire le jeu
de Marine Le Pen”», parce que Sarah Halimi a été tuée en pleine campagne
présidentielle, ont joué eux aussi un rôle dans ce drame.
Dès
le 1er juin 2017,
17 intellectuels, dont Elisabeth Badinter, Alain Finkielkraut, Marcel
Gauchet, Jacques Julliard et Michel Onfray avaient publié une tribune
dans Le
Figaro pour
demander que «toute
la vérité soit établie sur le meurtre de Sarah Halimi», mais
aussi que «toute la vérité soit dite sur la profondeur des fractures
françaises». Le livre de Noémie Halioua y contribue.
L'Affaire Sarah Halimi, de
Noémie Halioua, Cerf, 140 p., 16 €. En librairie le 16 mars.
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Halim
Tariq Ramadan visé par une troisième plainte pour «viols»
(07.03.2018)
Une femme a déposé plainte, ce
mercredi, auprès du parquet de Paris, contre l'islamologue. Elle affirme avoir
subi des actes sexuels violents et dégradants lors d'une dizaine de rendez-vous
entre février 2013 et juin 2014.
Une troisième femme a porté
plainte pour viols, ce mercredi à Paris, contre Tariq Ramadan. L'islamologue
suisse controversé est déjà inculpé et incarcéré depuis un mois pour des faits
similaires. Cette Française d'une quarantaine d'années - qui souhaite garder l'anonymat
- affirme avoir été sous l'emprise du théologien et avoir subi de multiples
viols entre 2013 et 2014 en France, à Bruxelles et à Londres, selon une source
proche du dossier citant la plainte.
» LIRE AUSSI - Tariq
Ramadan: double discours et double personnalité?
Cette femme musulmane, qui a
choisi le pseudonyme «Marie», affirme avoir subi des actes sexuels
particulièrement violents et dégradants lors d'une dizaine de rendez-vous entre
février 2013 et juin 2014, le plus souvent dans des hôtels en marge des
conférences à succès de l'islamologue de 55 ans. Sur cette période, «Marie
tentait en vain d'échapper à l'emprise de M. Ramadan qui ne cessait de la
menacer», selon la source proche du dossier.
La radio Europe 1 précise, de son
côté, que la plaignante avait confié à Tariq Ramadan «son passé d'escort girl»
et avoir fait «partie des femmes rémunérées pour avoir eu des relations
sexuelles avec Dominique Strauss-Kahn», ancien ministre français et directeur
général du FMI, au coeur de plusieurs scandales sexuels qui lui ont coûté sa
carrière politique. Des éléments dont l'intellectuel se serait servi pour la
menacer, affirme la radio qui a consulté des SMS reçus par la plaignante et que
cette dernière attribue à Tariq Ramadan.
Vif émoi dans une partie des
rangs musulmans
Le théologien a été inculpé le 2
février pour viols, dont l'un sur personne vulnérable, après
les plaintes de deux femmes, fin octobre, qui ont débouché sur une
enquête confiée à trois juges d'instruction. Tariq Ramadan, qui conteste ces
accusations, a été écroué en banlieue parisienne, la justice craignant une
possible fuite, des pressions sur les plaignantes ou une réitération des faits.
La détention de ce petit-fils du
fondateur de la confrérie islamiste des Frères musulmans a suscité un vif émoi
dans une partie des rangs musulmans, certains dénonçant un «deux poids, deux
mesures», voire un «complot» contre une des rares figures médiatiques de
l'islam européen.
Tariq
Ramadan avait invoqué son état de santé pour contester cette
détention, qui a été confirmé par la cour d'appel de Paris fin février sur la
base d'une première expertise médicale. Cette dernière avait remis en question
les deux maladies, une sclérose en plaques et une neuropathie, dont le
théologien dit souffrir, jugeant leur diagnostic «incertain». Une expertise
médicale complète a été ordonnée par les juges et doit être rendu d'ici la fin
mars.
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Tariq Ramadan reste en détention
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Ramadan, poursuivi pour viols, est maintenu en détention
Syrie : l'étau se resserre sur la Ghouta (07.03.2018)
INFOGRAPHIE - Damas déploie 700
renforts autour des principaux bastions des rebelles qui devraient être bientôt
encerclés.
Inexorablement, quitte à recourir
à un déluge de feu, les forces pro-Assad se rapprochent de leur objectif:
isoler chacun des groupes rebelles à l'intérieur de leur fief de la Ghouta,
dernière enclave contrôlée par les insurgés dans la banlieue de Damas.
Mercredi, alors que des
loyalistes progressaient vers Douma, la plus grande ville de la Ghouta,
d'autres forces ont lancé l'assaut contre deux localités tenues par les
insurgés à Mesraba et Beit Sawa, dans la partie ouest de l'enclave. Une enclave
reprise en quelques jours à 40 % par l'armée syrienne et ses alliés, où
les bombardements se poursuivent en dépit d'une trêve quotidienne de cinq heures, décrétée par la Russie,
principal soutien de Damas dans cette offensive lancée le 18 février qui a
coûté la vie à plus de 800 civils.
«L'aviation russe a accru sa
présence dans l'espace aérien»
L'Organisation syrienne des
droits de l'homme
La veille au soir, 700 hommes étaient venus en renfort d'Alep,
des miliciens syro-palestiniens pour la plupart, issus du groupe Liwa al-Qods,
armés par Moscou. Des renforts aussitôt déployés sur les fronts d'al-Rihane,
dans le nord-est de la Ghouta, et de Harasta, dans l'ouest. En même temps que
l'étau se resserre sur les rebelles, «l'aviation russe a accru sa présence dans
l'espace aérien», a constaté l'Organisation syrienne des droits de l'homme.
Mercredi, trois civils, dont un enfant, ont été tués dans des frappes aériennes
sur Jisrine, vers laquelle convergent des pro-Assad.
Capturer Mesraba permettrait à
Damas de séparer en deux la Ghouta, et surtout d'isoler Douma, où se concentre
la majorité des 400.000 civils de l'enclave. Mais au-delà, explique un expert
militaire occidental, «Damas cherche à découper la Ghouta en trois blocs autour
de Douma, de Harasta et d'Arbine, qui sont le siège des trois principaux
groupes rebelles». Il s'agit de l'Armée de l'islam à Douma (10.000 salafistes),
d'Ahrar al-Cham à Harasta (2000 islamistes) et de Faylaq al-Rahmane (8000
Frères musulmans) à Arbine et Zamalka. D'ici quelques jours, les QG de chacun
de ces groupes pourraient être isolés les uns des autres.
Après avoir conquis des villages
et des hameaux dans la campagne alentour, les pro-Assad ne sont plus qu'à 2
kilomètres de Douma. Leur avancée, plus rapide que prévu, a été facilitée par
le fait que les factions rebelles ne coopéraient pas entre elles -
s'affrontaient même parfois - chaque groupe ayant voulu se tailler un repaire
dans cette région périphérique de Damas, la citadelle des Assad.
Selon l'expert militaire, «leur
ligne de défense que ces groupes avaient patiemment édifiée, à partir d'un
vaste réseau de tunnels et de bunkers construits souvent par des prisonniers
alaouites prorégime, a été défoncée par un déluge de feu sur ces souterrains
qui conduisaient jusqu'aux anciens quartiers rebelles de Barzeh et Qaboun dans
la proche banlieue de Damas, quartiers de tous les trafics, où les insurgés ont
finalement accepté sous la contrainte la réconciliation imposée par le régime».
Ni les Iraniens ni le
Hezbollah libanais ne participent activement aux combats, pour des raisons qui
tiennent à une volonté russe de garder la main
Dans la Ghouta, c'est une guerre
essentiellement syro-russe, menée par le général Suhail al-Hassan, proche de
Moscou, à la tête de plusieurs dizaines de milliers d'hommes des Forces de
défense nationale. Ni les Iraniens, autres soutiens de Damas, ni le Hezbollah
libanais, ne participent activement aux combats, pour des raisons qui tiennent
à une volonté russe de garder la main.
Moscou dit avoir proposé aux rebelles un sauf-conduit pour
quitter l'enclave avec leurs familles et leurs armes. Mais les insurgés
refusent, jurant de défendre leur bastion, et affirment qu'aucune négociation
n'est en cours avec la Russie pour sortir de la Ghouta.
«Ils assiégeront Douma,
Harasta et Arbine, puis les Russes négocieront avec les rebelles via leurs
parrains turc, qatarien et saoudien comme lors du siège d'Alep-est fin 2016»
Un expert militaire occidental
Le 24 février, le Conseil de
sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité une résolution réclamant un
cessez-le-feu de 30 jours «sur l'ensemble du territoire syrien». Mais ni Damas
ni Moscou n'ont suspendu leurs attaques, arguant que l'offensive sur la Ghouta
est nécessaire pour stopper les bombardements rebelles sur la capitale. «Les
insurgés et leurs parrains occidentaux veulent empêcher une victoire militaire
de la Russie avant l'élection présidentielle du 18 mars à Moscou», relève
un diplomate onusien qui suit le dossier.
Pour échapper au déluge de feu,
les habitants vivent terrés dans des sous-sols. Ils cherchent à se rassembler
dans les centres urbains, comme Douma, Arbine, Saqba, sachant que l'armée
syrienne et ses alliés ne devraient pas prendre le risque d'y pénétrer. «Ils
assiégeront Douma, Harasta et Arbine, puis les Russes négocieront avec les
rebelles via leurs parrains turc, qatarien et saoudien comme lors du siège
d'Alep-est fin 2016», pronostique l'expert militaire. Mais à la différence
d'Alep-Est, qui ne comptait plus beaucoup de civils à la fin des frappes, la
Ghouta en abrite encore près de 400.000.
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Violences faites aux femmes : l'onde de choc
(07.03.2018)
Cinq mois après l'affaire
Weinstein et le lancement du mouvement #MeToo, la Journée des droits des femmes
prend un sens particulier. Au-delà de l'indignation, reste à faire reculer
contrètement ce fléau.
Une journée des droits des femmes
pas comme les autres. Cinq mois après l'affaire
Weinstein et la libération mondiale de la parole des femmes portée
par les réseaux sociaux, la question des violences sexuelles n'a jamais eu
autant d'écho que ce 8 mars 2018. Quelles suites donner à cette vague de
dénonciation sans précédent des violences faites aux femmes? Passer du
témoignage à l'action, c'est aujourd'hui le principal enjeu pour les
associations qui militent pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Comme
pour le gouvernement, qui en a fait sa grande cause du quinquennat. En
attendant la présentation du projet de loi contre les violences sexistes et
sexuelles, le 21 mars, Marlène Schiappa, la
remuante secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes, défend
aujourd'hui une cinquantaine de mesures allant de la nomination d'un «référent
égalité» dans chaque établissement scolaire à la rentrée 2019 au développement
d'une plateforme de géolocalisation des centres d'hébergement à destination des
professionnels pour les femmes victimes.
Dans le milieu du cinéma, une
centaine de personnalités ont appelé à l'instauration de quotas dans le
financement des projets pour lutter contre le sexisme, dans une tribune parue dans Le Monde .
Mais, pour l'instant, l'effet concret du phénomène du mouvement #MeToo et
#Balancetonporc se mesure avant tout dans l'envol du nombre de plaintes pour
viols et agressions sexuelles (+ 31,5 % au quatrième trimestre 2017 par
rapport à l'année précédente selon les dernières statistiques du ministère de
l'Intérieur). Cette tendance va-t-elle se poursuivre, alors qu'elle apparaît en
partie liée à la révélation de faits anciens? Fin février, François Molins,
procureur de la République de Paris, a indiqué au Parisien que
l'augmentation des affaires de harcèlement et d'agression sexuelle à l'automne
était en train de retomber. «Sur les mois de janvier et février, nous restons
sur la même dynamique qu'en fin d'année dernière en zone gendarmerie, souligne
cependant le lieutenant-colonel Karine Lejeune, porte-parole de la gendarmerie
nationale. Nous constatons toujours une forte présence des plaintes pour
violences sexuelles et conjugales.»
Par ailleurs, cette vague ne
semble pas avoir touché l'ensemble du territoire avec la même force. «Dans
notre commissariat, il n'y a pas eu d'évolution importante du nombre de
plaintes, rapporte Fabienne Azalbert, chef du commissariat de l'agglomération
de Sarcelles. Il y a encore beaucoup de victimes qui n'osent pas faire cette
démarche en raison de pressions familiales, des traditions. Sur nos
territoires, nous n'arrivons pas encore à toucher toutes les communautés.» Et
le psychologue et l'assistante sociale attachés depuis cinq ans au commissariat
pour accueillir les victimes d'arpenter les maisons de quartier, les collèges
et les associations de femmes étrangères «pour détecter le plus de cas possible
ou amener à une prise de conscience».
«Avant, nous recevions environ
3 nouvelles saisines par semaine contre 5 à 10 par jour ces derniers mois»
Une juriste de l'AVFT
Chez les associations d'aide aux
victimes, les standards ont en tout cas explosé. Le mois dernier, face à un afflux
d'appels devenus impossible à gérer pour ses cinq juristes, l'AVFT, seule
association spécialisée dans la lutte contre le harcèlement
sexuel au travail, s'est vu contrainte de fermer son accueil
téléphonique. «Avant, nous recevions environ 3 nouvelles saisines par semaine
contre 5 à 10 par jour ces derniers mois», décrit une de ses juristes, Clémence
Joz. Sans augmentation de subventions, l'AVFT vient donc de lancer une campagne
sur GoFundMe afin de renforcer son équipe et d'agrandir ses locaux. «Il n'y a
pas un avant et après affaire Weinstein dans le traitement des plaintes. Cela
demande de mieux former policiers et magistrats», tacle Clémence Joz.
Même tendance chez la plateforme
Viols femmes information qui espère des moyens financiers supplémentaires du
gouvernement. Pour les soutenir, la Fondation des femmes vient de lancer une
campagne d'appel aux dons sous le slogan «Maintenant on agit». Objectif:
récolter 1 million d'euros d'ici à mai. «Il y a eu une prise de
conscience. Maintenant, il faut des résultats concrets en justice, faire enfin
bouger le chiffre de 1 à 2 % des viols qui aboutissent à une condamnation
des auteurs en cour d'assises. Pour ce, les femmes ont besoin d'être
accompagnées, épaulées. C'est de cette manière que l'on peut mettre fin à
l'impunité, que les comportements changeront vraiment», plaide sa
présidente, Anne-Cécile
Mailfert. Côté Chancellerie, on remarque que «si le contexte médiatique
a pu avoir un impact sur les dépôts de plainte, les parquets ne sont pas encore
en mesure d'en constater les effets». La hausse ne serait pas «homogène sur le
territoire et ne concerne pas toutes les infractions de nature sexuelle». Il
est probable que les parquets ressentiront les effets de cette augmentation
dans le courant du premier semestre 2018.
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En Île-de-France, une brigade patrouille pour traquer les
«frotteurs» dans les transports (07.03.2018)
REPORTAGE - Quatre-vingts
policiers se mêlent chaque jour aux voyageurs et parcourent les lignes du métro
parisien dans le but d'appréhender ces hommes qui profitent de la forte
affluence pour agresser sexuellement des passagères.
C'est un soir d'hiver ordinaire.
Il est un peu plus de 17 heures et sur la ligne 5 du métro parisien, qui
file vers le nord, les wagons sont bondés. Un trentenaire, casquette noire
enfoncée jusqu'aux yeux, se colle derrière une fillette d'une douzaine
d'années. Accroché, comme elle, à la barre centrale, il se laisse balancer, le
bassin en avant, au gré des mouvements de freinage et d'accélération. Un «frotteur»? Pas
évident, pour les policiers, de surprendre ces hommes qui profitent de la forte
affluence pour agresser sexuellement des passagères. Et pourtant, dans le
métro, des «prédateurs», il y en a…
Selon deux enquêtes récentes, en
Île-de-France, 43 % des faits de violences graves contre les femmes ont
lieu dans les transports, et, en France, 87 % des voyageuses déclarent y
avoir déjà été victimes de harcèlement sexuel. Pour «libérer la parole des
femmes», sensibiliser les témoins, généralement passifs, et punir les auteurs,
une campagne d'information et un numéro d'alerte unique pour tous les
transports en commun d'Île-de-France ont été lancés ce lundi.
31 interpellations en 2017
Quatre-vingts policiers
travaillent à la brigade de lutte contre les atteintes à la sécurité des
transports (Blast). Tous les jours, par groupes de deux ou trois, en civil, ils
se mêlent aux voyageurs et parcourent les lignes en tous sens. À la recherche
du flagrant délit. «La principale problématique, jusqu'à il y a peu, c'était
les vols à la tire, détaille le commandant Nicolas Monrepos, chef du service de
sécurisation à la brigade des réseaux franciliens. Désormais, on voit pas mal
de vols avec violences. Quant aux frotteurs, ils représentent 1 % de
l'activité de la Blast: 31 interpellations en 2017, un chiffre stable.»
«On passe la journée à
observer les gens, leur regard, les mains, le tour de la ceinture, à surveiller
les comportements incohérents. Dès qu'on en trouve un bizarre, on va le
filocher»
Maxime, un des policiers du Blast
Sur le quai, on peut déjà
détecter les agresseurs potentiels: «Ils se positionnent en retrait, dos au
mur, pour mieux repérer leur victime, décrypte Maxime, l'un des policiers. Ils
peuvent laisser passer deux ou trois rames, pour soudain rentrer, ressortir, monter
dans le wagon suivant… puis faire demi-tour et prendre le métro en sens
inverse. Ces hommes vont rester debout, là où il y a le plus de monde, le
regard dirigé vers le bas. On passe la journée à observer les gens, leur
regard, les mains, le tour de la ceinture, à surveiller les comportements
incohérents. Dès qu'on en trouve un bizarre, on va le filocher (le suivre,
NDLR). Avant, ces prédateurs ne se doutaient pas que des policiers pouvaient
être sur eux ; aujourd'hui, ils savent.»
Leurs profils? «Tous âges - 12 à
86 ans -, tous milieux socioprofessionnels, toutes nationalités.» Costumes
cravates comme joggings, mais «souvent les poches décousues, pour se caresser».
Ils sont concentrés sur le nord du réseau RATP, les lignes 2, 4 et 13. «Elles
traversent les secteurs les plus criminogènes de Paris et sont empruntées par
pas mal de touristes, commente Fabien, coéquipier de Maxime. Même s'il y a eu
des Européens et aussi un Chinois, depuis plus de dix ans que je fais ce
métier, les auteurs que j'ai interpellés sont pour une très très grosse
majorité d'origine maghrébine.» Quant aux victimes, ce sont des ados comme des
retraitées. Et des hommes aussi, de plus en plus.
Retour sur la ligne 5, à la
station République, où le «frotteur» présumé se tient toujours derrière la
fillette. Fabien tire le signal d'alarme. Le suspect descend immédiatement,
discrètement suivi par Maxime. «Le monsieur derrière toi… tu as senti quelque
chose?», demande Fabien à la jeune fille. Mais elle n'a rien remarqué ;
inutile de la perturber davantage. Entre-temps, l'homme à la casquette «est
déjà sur une autre victime», dans une autre rame, prévient Maxime par SMS. Sauf
que cette jeune femme non plus ne s'est aperçue de rien… «On n'interpelle pas
sans l'accord de la victime, soulignent les policiers. Certaines ne veulent pas
porter plainte: pas le temps, honte, peur de recroiser cet homme un jour… Alors
on essaie de les convaincre: la prochaine fois, l'auteur s'en prendra peut-être
à une gamine… Tandis qu'une plainte nous permet de prendre son ADN, et il sera
fiché.»
«On n'interpelle pas sans
l'accord de la victime. Certaines ne veulent pas porter plainte: pas le temps,
honte, peur de recroiser cet homme un jour…»
Les policiers de la Blast
La filature est finalement
abandonnée: le suspect a rencontré un ami. Mais soudain, dans le wagon bondé,
une voix d'homme s'élève. «Eh oh, qu'est-ce qui vous prend?, s'énerve un
passager. Vous avez fini de me toucher, là?» Dans le reflet de la vitre, Fabien
a tout vu: un sexagénaire, la main sur la braguette d'un jeune homme. «Par
fierté», lui non plus ne déposera pas plainte. «Ce que je ne veux pas, c'est
qu'il me tripote!, lâche-t-il. J'ai réglé mon cas tout seul.» Quant à l'auteur,
il plonge le nez sous son écharpe et disparaît sans demander son reste.
Numéros d'alerte
«Il faut en terminer avec ce
tabou!», s'exclame la commissaire Amandine Matricon-Charlot, à la tête de la
Sûreté régionale des transports (SRT). «Des femmes pensent, à tort, qu'il n'y
aura pas de suites, poursuit-elle. Pour beaucoup, ce n'est qu'une incivilité.
Or c'est bien une agression sexuelle! La moins violente, peut-être, mais
parfois la plus traumatisante: fréquemment, quand il y a eu éjaculation, la
victime déménage, change ses habitudes. Quant aux auteurs, souvent ils
récidivent ; il est donc essentiel qu'ils sachent qu'ils risquent 5 ans de
prison et 75.000 euros d'amende.»
«C'est bien une agression
sexuelle ! La moins violente, peut-être, mais parfois la plus traumatisante:
fréquemment, quand il y a eu éjaculation, la victime déménage, change ses
habitudes»
La commissaire Amandine
Matricon-Charlot, à la tête de la Sûreté régionale des transports
C'est au commissariat de la rue
de l'Évangile, dans le XVIIIe arrondissement, que l'on conduit les victimes.
Elles y sont accueillies par les enquêteurs spécialisés du groupe des
infractions à caractère sexuel (GICS), créé en 2015. L'an dernier, le GICS a
travaillé sur 218 plaintes d'agressions sexuelles - dans toute l'Île-de-France
-, 128 auteurs ont été placés en garde à vue et 41 ont écopé de peines de
prison. «Voilà qui montre que ce n'est pas vain de porter plainte!, insiste la commissaire.
Et s'il n'y a pas de policier dans les parages, on peut toujours appuyer sur le
bouton d'alarme, dans les wagons ou sur les quais. Les images de
vidéosurveillance de la RATP sont conservées 72 heures.» Des numéros
d'alerte - 3117 par téléphone, 31177 par SMS et l'application 3117 - permettent
désormais de géolocaliser la victime et de déclencher une intervention des
agents, 24 heures sur 24.
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Les trois mesures phares de la future loi contre les
violences faites aux femmes (07.03.2018)
Le 21 mars sera présenté en
Conseil des ministres le texte porté par Marlène Schiappa, qui a déjà suscité
plusieurs polémiques.
Les annonces sur le futur projet
de loi contre les violences sexistes et sexuelles n'ont pas cessé de faire
l'actualité depuis l'affaire Weinstein. Ce texte, porté par la secrétaire
d'État en charge de l'Égalité femmes-hommes et par la ministre de la Justice,
dont les contours se sont précisés au fil des semaines, a déjà suscité
plusieurs polémiques. Il doit désormais être présenté en Conseil des ministres,
le 21 mars.
• Pénaliser le harcèlement de
rue
Une
amende pour «outrage sexiste» dans l'espace public en 2018? Ce
principe défendu dès le mois de mai dernier par Marlène Schiappa a bien été retenu
par le gouvernement. Fin février, un rapport parlementaire préconisait la mise
en place d'une amende de 4e classe, soit de 90 à 750 euros, pour pénaliser
les gestes déplacés, sifflements et remarques obscènes visant les femmes dans
l'espace public. L'infraction d'outrage sexiste devra être constatée «en
flagrance» par les agents de la police de sécurité du quotidien (PSQ).
Magistrats et syndicats de policiers ont pourtant averti de la difficulté à
caractériser les faits et critiqué la création d'une «infraction incantatoire».
• Fixer un âge du consentement
sexuel
Après le tollé provoqué par deux
affaires de relations sexuelles entre une enfant de 11 ans et un adulte, où la
qualification de «viol» n'avait pas été retenue dans un premier temps, le
gouvernement a annoncé son intention de légiférer sur une présomption de
non-consentement à l'acte sexuel en deçà d'un certain âge. 13 ans ou 15 ans? Le
choix de ce seuil a suscité de nombreux désaccords. Le 5 mars, le
gouvernement a tranché pour l'âge
de 15 ans. Un choix soutenu par les associations de lutte contre les
violences faites aux enfants. A contrario, la ministre de la Justice et le
procureur de la République de Paris avaient indiqué qu'ils auraient préféré
fixer ce seuil à 13 ans.
• Allonger les délais de
prescription pour les viols sur mineurs
La prescription concernant les
viols sur mineurs, fixée à 20 ans après la majorité, devrait être portée à 30
ans. La victime pourrait donc porter plainte jusqu'à l'âge de 48 ans. Une
préconisation qui figurait déjà dans le rapport de la
présentatrice Flavie Flament et du magistrat Jacques Calmettes,
remis en avril dernier à l'ex-ministre des Droits des femmes, Laurence
Rossignol.
Collomb lance un tchat dédié
Par Jean-Marc Leclerc
«La révolution numérique» pour
«libérer la parole». Gérard Collomb y croit dur comme fer. Il vient d'annoncer
le lancement imminent au sein du ministère de l'Intérieur d'une «plateforme de
signalement des violences sexuelles». D'emblée, il précise: «Il ne s'agira pas
d'un portail Internet de dépôt de plainte.» Dans son esprit, cet outil prendra
la forme d'un «tchat» - une messagerie instantanée ou forum de discussion - qui
permettra aux victimes d'entrer en relation avec des professionnels
spécialement formés. Leur mission: informer le public sur les démarches à
suivre et, le cas échéant, bénéficier d'un rendez-vous dans un commissariat ou
une gendarmerie. Une variante en somme de la fameuse «brigade numérique» lancée
récemment pour renforcer le lien entre la maréchaussée et la population.
La démarche prônée par l'hôte de
Beauvau se veut globale. En amont, il veut impliquer le réseau des 3 000
policiers et gendarmes qui interviennent en établissement scolaire pour mettre
en garde les jeunes contre le harcèlement et les agressions sexuelles, mais
aussi les alerter sur le «cyberharcèlement» qui, selon lui, se développe
dangereusement.
Gérard Collomb ajoute, concernant
les victimes dont l'état nécessite un déplacement aux urgences: «Nous devons
être capables de prendre systématiquement leur plainte dès l'hôpital pour leur
éviter des déplacements supplémentaires.» Enfin, il désire un cadre plus
«adapté» pour les plaignants dans les commissariats et les gendarmeries. Avec
«des horaires dédiés, des lieux dédiés, des personnels formés, un lien plus
étroit avec les associations d'aide aux victimes.» Bref, un accueil «sur
mesure».
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Île-de-France, une brigade patrouille pour traquer les «frot
Éric Zemmour: «Leçons israéliennes» (07.03.2018)
FIGAROVOX/CHRONIQUE - Un
essai iconoclaste, critique et critiquable sur la création de l'État d'Israël.
La thèse que défend Philippe Simonnot fera réagir. À juger sur pièces.
Israël est un de ces sujets qui
rendent fou. Follement énamouré ou follement haineux. Israël est soit cette
nation admirable qui a fait pousser des oranges dans le désert, soit ce peuple
de criminels qui a colonisé une terre en persécutant et en chassant ses
habitants légitimes. Israël est un de ces sujets qui rendent manichéen, où
l'Histoire est prise en otage par les passions, où la raison est sans cesse
dévoyée par l'émotion, où les esprits les plus subtils et les plus iconoclastes
s'abîment dans la moraline et le compassionnel.
Dans son Siècle Balfour,
Philippe Simonnot montre que cette loi d'airain touche les meilleurs: remontant
l'histoire du sionisme par sa source, à partir de la
fameuse lettre de 1917 du ministre anglais lord Balfour se prononçant en faveur
d'un «foyer
national juif», il ose les analyses les plus transgressives, mais ne
peut s'empêcher de verser dans le martyrologue convenu (en France surtout) au
sujet des Palestiniens.
- Crédits photo : PG de Roux
Le manichéisme de Simonnot est
simple et efficace: la création de l'État d'Israël a été une catastrophe pour
le monde, et surtout pour les Juifs. Il a l'audace et l'intelligence de faire
servir son argumentaire par les Juifs eux-mêmes. C'est le meilleur de son
livre. Des Juifs de la fin du XIXe siècle qui combattirent avec véhémence
les revendications des premiers sionistes, héritiers de Théodor Herzl, ce
journaliste autrichien traumatisé par l'affaire Dreyfus. Des Juifs dont les
écrits scandaliseraient leurs descendants d'aujourd'hui.
Des Juifs qui étaient à l'époque
largement majoritaires. En tout cas, dans les riches et puissants pays
occidentaux. Le sionisme est en vérité un mouvement nationaliste de Juifs
polonais et russes qui vivaient dans des villages où, souvent majoritaires, ils
imposaient à tous leurs us et coutumes ; et qui n'ont eu de cesse que de
recréer «un ghetto géant pour tous les Juifs du monde». C'est ce que leur
lançaient leurs contradicteurs qui avaient, dès la fin du XIXe siècle,
tout compris: soit, leur disaient-ils, vous devrez chasser les populations qui
vivent déjà sur la «terre promise», et vous leur ferez subir les exactions que
les Juifs subissent ; soit vous leur donnerez les mêmes droits qu'aux
Juifs, et vous serez de nouveau une minorité au sein d'un nouvel État. Les plus
fins avertissaient que ce nationalisme juif déstabiliserait les communautés
juives dans le monde arabe, et même en Europe, réveillant les accusations de
«double allégeance», voire de «trahison».
Paradoxalement, les sionistes
trouveront leurs meilleurs alliés parmi ces dirigeants chrétiens, souvent
protestants, comme l'Anglais Balfour, ou l'Américain Wilson, qui, élevés depuis
leur enfance avec la Bible comme livre de chevet, seront flattés de permettre
le retour du «peuple élu» sur sa «terre promise». Ou qui, à l'instar des
dirigeants français d'après-guerre, régleront grâce à leurs alliés sionistes
leurs comptes de grande puissance.
«La déclaration Balfour n'est
pas un succès du lobby juif mais un échec. C'est la déclaration Balfour qui a
fait du sionisme un authentique mouvement politique du fait que la plus grande
puissance politique de l'époque validait son projet.
Philippe Simonnot
Simonnot en tire une conclusion
étonnante: «La
déclaration Balfour n'est pas un succès du lobby juif mais un
échec. C'est la déclaration Balfour qui a fait du sionisme un authentique
mouvement politique du fait que la plus grande puissance politique de l'époque
validait son projet.»
Conclusion qui choquera les
sionistes et les antisémites. Cette prétendue alliance objective entre les deux
ennemis est l'autre fil rouge de cette histoire. Le sionisme veut arracher le
Juif à sa condition de minorité errante. Lui donner une terre et des racines.
Le «régénérer» par le travail et la guerre. C'est un nationalisme imité des
nationalismes ethnocentristes de la fin du XIXe siècle, imprégnés
d'antisémitisme, car le Juif incarnait la modernité urbaine, du banquier ou de
l'intellectuel, cosmopolite et apatride. Cette paradoxale alliance objective
sera théorisée dès l'origine par Théodor Herzl: «Les antisémites deviendront
nos plus sûrs amis, les pays antisémites, nos alliés.» C'était le monde de
1900. Avant les guerres industrielles et l'ébranlement tragique du
XXe siècle. Avant l'accession de Hitler au pouvoir, les lois mortifères de
Nuremberg, la Seconde Guerre mondiale, la Shoah…
En
1947, l'État d'Israël devient une réalité politique. Avec lui apparaît
aussi la cause palestinienne. Notre auteur s'offusque de la formule célèbre qui
a longtemps résumé le bréviaire des dirigeants sionistes: «Une terre sans
peuple pour un peuple sans terre.»
Simonnot plaque une
sensibilité moderne sur des gens qui, justement, veulent s'arracher à la
modernité pour fonder un État et une nation
Simonnot fait semblant de ne pas
comprendre la distinction entre une population et un peuple. En 1947, les
habitants musulmans de la Palestine ne sont pas un peuple, car ils n'ont pas
une conscience de peuple.
Simonnot s'émeut avec raison des
exactions et des massacres commis par les Israéliens, et les accuse de
«nettoyage ethnique». Mais il reconnaît que ce concept est anachronique, et
qu'à l'époque les transferts de populations - Allemands expulsés d'Europe
centrale ou échanges entre musulmans et hindous, lors de la naissance du Pakistan -
étaient monnaie courante.
En fait, il plaque une
sensibilité moderne sur des gens qui, justement, veulent s'arracher à la
modernité pour fonder un État et une nation, et qui regardent comment les
autres - les Américains avec la conquête de l'Ouest, les Allemands avec
les guerres de Bismarck - ont fait dans un passé plus ou moins lointain. Le
sionisme a été une école d'initiation pour des Juifs qui n'avaient pas eu
d'État depuis deux mille ans ; initiation aux exigences de la realpolitik,
fort loin des illusions souvent chimériques de leurs penseurs les plus
progressistes et de leurs réflexes de minorité. Rude école, dont les cours ne
sont pas terminés.
Le siècle Balfour. 1917-2017,
de Philippe Simonnot. Éditions Pierre Guillaume de Roux, 193 pages, 24,50 euros.
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Faut-il démanteler Google et Facebook ? (07.03.2018)
ANALYSE - Il faut évaluer la
capacité intrinsèque de ces nouveaux géants à anéantir la compétition, à tuer
le match de la concurrence.
Les plus belles réussites du
capitalisme moderne, les
fameux «Gafa» (Google, Apple, Facebook et Amazon), sont-elles en passe
de devenir son pire ennemi? Ces entreprises sont-elles devenues les créatures
monstrueuses, car monopolistiques, d'une économie de marché atteinte du
syndrome de Frankenstein? La question est sur la table. Et un peu plus, en
France, depuis que mardi l'Autorité de la concurrence a fait le constat de la
«position écrasante» de Google et Facebook sur le marché de la publicité en
ligne.
À eux quatre, les Gafa pèsent
3000 milliards de dollars en Bourse. Leurs profits agrégés dépassent 100
milliards. Leur stock de cash approche 500 milliards… La puissance de ces
entreprises n'est plus à démontrer. Leur qualité de monopole, qui justifierait
une action publique de régulation, voire de démantèlement, est en revanche
débattue.
Les précédents historiques
existent pour justifier le débat. Au début du XXe siècle, l'Amérique de
Theodore Roosevelt a découpé la compagnie pétrolière Standard Oil en 34
entreprises. Au début des années 1980, c'est l'Administration Reagan qui a
éparpillé AT&T en sept opérateurs de télécoms. Aujourd'hui, Google et
Facebook surtout affichent des parts de marché considérables. Le moteur Google
est utilisé pour 94 % des recherches sur mobile aux États-Unis. En France,
Google et Facebook détiennent 90 % du marché de la publicité en ligne.
Ces chiffres ne sont pas en
eux-mêmes répréhensibles. Ils résultent de formidables succès d'entreprises.
Mais ils fournissent un beau casse-tête aux autorités de la concurrence.
Ces chiffres ne sont pas en
eux-mêmes répréhensibles. Ils résultent de formidables succès d'entreprises.
Mais ils fournissent un beau casse-tête aux autorités de la concurrence, dont
la grille de lecture traditionnelle - l'effet des positions de marché sur les
prix - est rendue inopérante par des modèles économiques fondés sur la
gratuité.
Aux États-Unis et en Europe, la
réflexion évolue donc pour tester la puissance de ces béhémoths modernes à
l'aune d'autres critères. L'effet sur le consommateur ne peut se résumer à
celui sur les prix. Le droit de la concurrence parle d'ailleurs de la
protection de son bien-être.
Surtout, il faut évaluer la
capacité intrinsèque de ces nouveaux géants à anéantir la compétition, à tuer
le match de la concurrence. Dans l'économie numérique, les effets de taille et
les effets de réseau sont démultipliés par rapport à l'économie traditionnelle,
et vont encore augmenter de façon exponentielle avec l'explosion de la valeur
des données accumulées. «Winner takes all», dit-on dans la Silicon Valley… À
cela s'ajoute enfin la force de frappe financière, qui permet l'acquisition,
parfois hors de prix, de jeunes sociétés. D'où le questionnement, paradoxal, de
l'effet de la puissance des Gafa sur l'innovation.
Ces facteurs font-ils des Gafa des
leaders inexpugnables? Il faut se méfier de l'apparence inéluctable de leur
croissance. Après tout, l'économie d'Internet est jonchée des cadavres de
monopoles éphémères, comme Yahoo!, AOL, ou MySpace.
Les voix qui s'élèvent pour
demander que les Gafa soient bridées émanent de plusieurs écoles.
Les voix qui s'élèvent pour
demander que les Gafa soient bridées émanent de plusieurs écoles. Aux
États-Unis, des universitaires ont donné naissance à un «new Brandeis movement»
du nom de Louis Brandeis, juge à la Cour suprême dans les années 1920 et 1930.
Pour ceux-là, les autorités de la concurrence doivent s'extraire de la doctrine
de l'école de Chicago des années 1970 et 1980, fondée sur la seule analyse des
bénéfices pour les consommateurs. Les libéraux se font aussi entendre, dont le
très influent magazine The Economist qui qualifie les Gafa de
«sorciers («wizards») du high-tech».
Les gendarmes de la concurrence
avancent à pas comptés. Aux États-Unis, la FTC (Federal Trade Commission) n'a
pas fait son aggiornamento. En Europe, la commissaire Margrethe Vestager est
beaucoup plus volontariste, et a dégainé plusieurs procédures.
Partout, le sous-jacent politique
du débat est déterminant, ce qui a toujours le cas en matière de concurrence.
La Standard Oil a été démantelée au nom de la liberté d'entreprendre, mais
aussi pour préserver l'organisation de la société d'une trop forte
concentration des pouvoirs. Les craintes actuelles de voir émerger des
superpuissances économiques supranationales et hors d'atteinte de l'action
publique font écho à ces débats, vieux comme la démocratie. Les inquiétudes sur
la protection des données, le respect de la vie privée, la diffusion des
fausses informations, l'apatridie fiscale s'ajoutent à la controverse, au
risque de la brouiller. Carl Shapiro, professeur à Berkeley, mettait en garde
son auditoire à l'automne dernier: «il ne faut pas attendre de la politique de
la concurrence qu'elle résolve tous les problèmes plus larges, politiques et
sociaux» de nos sociétés modernes. Le politique aussi aura son rôle à jouer.
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(07.03.2018)
CHRONIQUE - La notion
de responsabilité est toujours liée à celle du libre-arbitre, qui nous rend
comptable de nos actes. En découlent selon le philosophe de nombreux sentiments
négatifs qui nous gâchent la vie. Faut-il pour autant s'en affranchir ?
«Dans la nature, il n'existe rien
de contingent, car tout est déterminé par la nécessité.» Ainsi parlait Spinoza,
dans l'Éthique. Croire au libre-arbitre relèverait donc selon lui du
«délire», en quoi il n'y aurait ni bien, ni mal moral, ni blâmes ni louanges à
décerner, ni culpabilité, ni hontes, ni remords à avoir. La notion de
responsabilité suppose en effet celle de libre-arbitre, comme le montre assez
la façon dont on recherche encore aujourd'hui dans nos tribunaux les
circonstances dites «atténuantes». Ainsi, le fou ne sera pas tenu pour
responsable parce qu'on lui dénie la capacité de choisir librement entre des
possibles. Mais pourquoi en irait-il autrement de l'homme dit «normal»?
La notion de responsabilité est
toujours liée à l'idée, folle et «délirante» selon Spinoza, qu'on «aurait pu
faire autrement», qu'on avait le choix, en quoi on serait comptable de ses
actes. De nombreux sentiments sont liés à cette illusion: la honte, la
culpabilité, les remords, mais aussi l'indignation ou la colère. Spinoza les
appelle des «passions tristes», car elles nous gâchent la vie. La sagesse
consisterait donc selon lui à se placer «autant qu'il est possible» (sic!) du
point de vue de Dieu, c'est-à-dire d'un point de vue où les notions de
libre-arbitre et de responsabilité auraient disparu au profit de la conscience
de la nécessité, comme l'explique de manière limpide André Comte-Sponville dans
l'article du Dictionnaire de philosophie morale (aux PUF)
qu'il consacre à Spinoza: «On ne juge que ce qu'on ne comprend pas. Qui condamnerait
moralement une éclipse ou un tremblement de terre? Et pourquoi faudrait-il
condamner davantage un meurtre ou une guerre? Parce que les hommes sont
responsables? Disons plutôt qu'ils en sont causes, mais eux-mêmes déterminés
par d'autres causes, qui le sont à leur tour par d'autres, et ainsi à l'infini.
Il n'y a rien de contingent dans la nature (Éthique, I, 29), ni donc
rien de libre dans la volonté (Éthique, I, 32). Les hommes ne se croient
libres de vouloir que parce qu'ils ignorent les causes de leurs volitions. La
croyance au libre-arbitre n'est qu'une illusion et c'est pourquoi toute morale,
si l'on entend par là ce qui autorise à blâmer ou à louer absolument un être
humain, est illusoire aussi.» Comme l'écrit Deleuze dans le même sens, «il suffit
de ne pas comprendre pour moraliser», la réciproque étant tout aussi vraie: il
suffit de comprendre pour cesser de juger.
Le sage selon Spinoza serait
donc celui qui, comprenant qu'il n'y a aucune alternative au réel, cesserait de
juger moralement
Le
sage selon Spinoza serait donc celui qui, comprenant qu'il n'y a aucune
alternative au réel, cesserait de juger moralement. Saisir les causes
d'un événement que l'ignorant croit «immoral» et qui suscite en lui de
l'indignation parce qu'il s'imagine qu'on aurait pu l'empêcher, cerner, par
exemple, les causes du nazisme, c'est le déclarer nécessaire, donc, si l'on se
place du point de vue, non de tel ou tel groupe humain persécuté, mais au
regard du cours global de l'histoire, c'est le déclarer inévitable et, comme
tel, moralement neutre, l'intelligence de la nécessité nous conduisant à
suspendre tout jugement moral.
Cet exemple, je le précise, n'a
rien de fictif: il fut au cœur de la querelle qui opposa dans les années
quatre-vingt les plus grands historiens allemands, les libéraux accusant leurs
collègues déterministes de justifier le nazisme à force d'en exhiber les
causes. Le sage devrait donc se débarrasser d'un même mouvement du
libre-arbitre, de la morale et des passions tristes, comme y insistent encore
ces lignes de Spinoza: «L'amour, la haine, la colère, l'envie, l'orgueil, la
pitié et les autres mouvements de l'âme sont à considérer, non comme des vices,
mais comme des propriétés de la nature humaine, des manières d'être qui lui
appartiennent comme le chaud et le froid, la tempête, le tonnerre et tous les
météores appartiennent à la nature de l'air. Quels que soient les désagréments
que puissent avoir pour nous ces intempéries, elles sont nécessaires car elles
ont des causes déterminées.»
Ayant quelque peine à me mettre à
la place d'un Dieu omniscient, n'ayant donc jamais pu me persuader que les
mauvaises actions des hommes s'apparentaient à des intempéries, ni un
assassinat à une mauvaise pluie, les «passions tristes» me paraissent
inhérentes à la condition humaine. Vouloir s'en affranchir n'est pas à mes yeux
sagesse, mais pure folie, c'est nier notre essence même, en quoi la prétendue
sagesse de Spinoza me semble délirante et ce qu'il tient pour du délire être au
contraire un premier pas vers la conscience de soi et la lucidité. CQFD!
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Agir enfin contre les pratiques de concurrence déloyale de
Google (07.03.2018)
TRIBUNE - Le président du cabinet
Médiation & Arguments*, Léonidas Kalogeropoulos, estime que le géant du
numérique piétine les fondements du droit de propriété.
Malgré une
récente amende record pour abus de position dominante, Google
poursuit sans contrainte sa politique visant à offrir directement aux
utilisateurs d'Internet des contenus qui appartiennent à autrui, sans se
soucier de l'accord ou de la rétribution des propriétaires de ces contenus.
Partout ailleurs dans le monde physique, s'approprier les biens d'un concurrent
afin de les offrir gratuitement à ses propres clients s'apparente à du vol. Il
n'y a aucune raison pour qu'un tel comportement soit qualifié différemment dans
le monde numérique.
Les initiatives de Google
consistant à copier ses rivaux ne datent pas d'hier. Par exemple, dans le
secteur des comparateurs de prix, Google a copié les modèles économiques des
sociétés leaders pour développer son propre service de comparaison de prix
appelé Froogle. Quand Froogle peinait à décoller, Google a rebaptisé son
service Google Shopping et l'a simplement placé en tête des résultats de
recherche des utilisateurs, tout en reléguant les services concurrents en bas
de page ; en quelques mois, ces derniers ont été décimés et le
service de Google est devenu le nouveau numéro un mondial.
«Compte tenu de la stratégie
de Google (...), l'Europe n'a rien d'autre à lui opposer que des années de
procédures»
Cette pratique flagrante de
concurrence déloyale a été instruite durant sept ans par la Commission
européenne. Finalement, et sous le leadership de Margrethe
Vestager, la Commission européenne a infligé une amende de
2,3 milliards d'euros à Google et a demandé la mise en place de remèdes
pour corriger ces pratiques déloyales. Outre le fait qu'aucune victime n'a à ce
jour bénéficié de la moindre réparation des préjudices dévastateurs qui ont été
subis, Google a mis en place un prétendu «remède» qui continue à lui permettre
d'être en première position dans 99 % des requêtes. De surcroît, et sans
surprise, Google
a fait appel de la décision de la Commission européenne devant la Cour de justice
européenne.
Compte tenu de la stratégie de
Google consistant à envoyer des milliers de téraoctets d'argumentaires pour
asseoir sa stratégie de défense, l'Europe n'a rien d'autre à lui opposer que
des années de procédures, pendant lesquelles ses pratiques déloyales continuent
de dévaster des marchés entiers, les uns après les autres. Comme, du point de
vue de Google, tout va bien, pourquoi donc s'arrêter en si bon chemin?
Ainsi, concernant les photos en
ligne, Google offre gratuitement sous Google Images des photos aux
utilisateurs, téléchargeables en un seul clic. Malgré la signature d'un récent
partenariat avec la plus grande banque d'images mondiale, une large majorité
des photos indexées sont puisées sur des sites des agences photos, des
photographes ou éditeurs, ainsi que sur les sites de leurs clients sans
tatouage numérique. Ceux qui aspiraient à commercialiser ces images sur
Internet voient ainsi leur audience confisquée. Certains prétendent que cette
gratuité serait bonne pour le consommateur. Si cet argument était valable,
pourquoi ne pas ouvrir une caisse Google dans les supermarchés qui
distribuerait toutes les marchandises gratuitement… pour «le bien du
consommateur»? C'est pourtant bien ce que subissent désormais les producteurs
de photo, qui voient leurs images utilisées allégrement sur Internet sans
aucune forme de compensation ou de mécanisme d'autorisation.
Autre exemple, celui des marques
d'établissements touristiques. Depuis longtemps, Google vend à Booking.com et à
Expedia.com les noms des hôtels et restaurants qui ne parviennent plus à
apparaître avec leurs propres sites dans les résultats de recherches des
internautes. C'est Google qui encaisse les milliards de revenus de ces ventes,
pas ceux qui détiennent les marques vendues. Comment appelle-t-on le fait de
commercialiser les biens d'autrui sans son consentement?
«(Google) capte (les
utilisateurs) et leur offre directement des contenus produits par d'autres, les
dépossédant de tous leurs droits»
Que dire du fait que Google
fournit aux utilisateurs des condensés d'articles de presse (les «snippets»)
qui résument l'essentiel des informations contenues dans ces articles et qu'il
devient donc inutile de consulter sur le site de l'éditeur? Par exemple, plutôt
que de diriger un utilisateur vers les sites des éditeurs de presse pour
comprendre comment fonctionnent les aides personnalisées au logement (APL),
Google va vous livrer l'essentiel de l'analyse réalisée par les meilleurs
experts, enrichie des «questions fréquemment posées» permettant d'obtenir des
détails supplémentaires… toujours sans se rendre sur les sites qui contiennent
les informations utilisées… et qui ont rémunéré les experts en question.
540 milliards de dollats de
capitalisation boursière
Google garde ainsi les
internautes chez lui, et ne joue plus le rôle d'intermédiaire pour diriger les
utilisateurs vers toute la richesse des sites accessibles sur Internet. Il
les capte et leur offre directement des contenus produits par d'autres, les
dépossédant de tous leurs droits, notamment de leurs droits d'auteur. Grâce
à Google
Home, Google sera même en mesure de lire n'importe quelle réponse à une
requête d'un utilisateur à voix haute dans son salon. Des réponses que Google
ne se sera jamais donné la peine de produire, mais qu'il aura trouvées ailleurs
et sait très bien valoriser! Ces pratiques destructives de tous les fondements
du droit de propriété ont permis à Google de peser à New York plus de
540 milliards de dollars de capitalisation boursière…
En effet, grâce à toutes ces
informations qui sont «offertes gratuitement», Google capte le temps de
présence des internautes sur ses sites, d'une durée qui s'allonge d'autant plus
qu'on n'a plus besoin de se rendre sur les sites produisant l'information. Cela
a permis à Google, avec Facebook, de capter près de 80 % de la valeur
publicitaire des annonceurs sur Internet (et 90 % sur le mobile), soit
2,7 milliards d'euros en 2017. Leur part prise dans la croissance de la
publicité digitale était de 92 % en 2017, c'est-à-dire qu'ils captent à
eux deux, sans partage, toute la croissance du seul segment publicitaire qui
progresse.
Les pratiques exposées ci-dessus
doivent être regardées sous le prisme de l'abus de position dominante
conduisant à une concurrence déloyale. Elles doivent pouvoir être interrompues
en quelques semaines par la Commission européenne en la dotant du pouvoir de
prononcer des mesures conservatoires permettant de prohiber sans attendre de
telles pratiques.
* Délégué Général de l'Open
Internet Project (OIP), association européenne créée en 2014 pour combattre les
abus de position dominante sur le marché numérique européen. Elle compte au
nombre des plaignants dans les dossiers «shopping» et «Android».
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Anne-Sophie Letac : «Jeunesse tentée par les régimes
autoritaires: le cri de Mounk» (07.03.2018)
TRIBUNE - Un passionnant ouvrage
d'un chercheur à Harvard démontre le peu d'attrait des jeunes pour la
démocratie libérale, s'alarme l'agrégée d'histoire*.
On se figurait le jeune comme un
être à part, assez inoffensif, une espèce en voie de lente disparition, choyée
par ses parents et dotée de mœurs étranges, comme pianoter sur son écran de
smartphone avec les pouces, parler seul dans la rue, consulter Yelp avant toute
décision importante - le choix d'un restaurant de burgers par exemple -,
prendre des bains bouillants et débordants tout en acclamant la COP21,
manger des graines germées ou sillonner la planète grâce à son école de
commerce pour réaliser des projets humanitaires. Mais si l'on en croit le
politologue Yascha Mounk, le péril jeune serait plus grand. Dans son
livre The People vs. Democracy, le chercheur de Harvard montre, à
partir de nombreuses données, que le jeune, en particulier éduqué et diplômé,
tend à se détourner dangereusement de la démocratie.
Si les deux tiers des
Américains nés dans les années 1930 et 1940 se disent profondément attachés à
la démocratie, seul un tiers des millennials partage cette conviction
Selon Mounk, si les deux tiers
des Américains nés dans les années 1930 et 1940 se disent profondément attachés
à la démocratie, seul un tiers des millennials - la génération née après les
années 1980 - partage cette conviction. Certes, la confiance dans la démocratie
a reflué partout et dans tous les groupes d'âge. Le populisme, la proportion de
citoyens prêts à soutenir un leader fort et affranchi du jeu institutionnel et
parlementaire a progressé dans tous les pays avancés, notamment
en Europe. Mais dans un renversement historique frappant, ce sont les
jeunes qui sont les plus perméables à la «democracy fatigue», alors qu'à la
génération précédente, c'étaient eux qui portaient le flambeau des valeurs
démocratiques. Les 16-35 ans sont gagnés par une insidieuse apathie politique,
une indifférence au vote qui creuse le fossé avec leurs aînés, et n'est pas
compensée par des formes d'engagement protestataire comme Nuit
debout ou Podemos,
peu suivis si on les compare avec les révoltes des années 1970.
On pourrait penser que la
génération post-guerre froide défend mollement la démocratie libérale car elle
n'a jamais connu d'attaques en règle contre celle-ci. Mais cette hypothèse est
infirmée par le soutien croissant des millennials soit à des alternatives
autoritaires, soit à des gouvernements d'experts laissant l'avis du peuple de
côté, et, surtout pour les plus éduqués d'entre eux, à des dirigeants qui leur
ressemblent, fussent-ils éloignés du peuple. La jeunesse de nombre de
dirigeants, de Trudeau à Kurz en
passant par Macron ou Tsipras,
est un indice de cette exigence en miroir. Le goût des enfants de bobos pour La
France insoumise est un autre symptôme qui témoigne de l'affranchissement des
jeunes élites à l'égard de la démocratie libérale. Il est de bon ton de juger
la haine des médias «juste et nécessaire» (Mélenchon), de crier au complot, et
d'adopter un discours brutal et décomplexé qui se targue d'être «disruptif».
L'AfD, le FN engrangent les voix de nombreux millennials. En Italie, les jeunes
ont voté pour Luigi
Di Maio (31 ans) du M5S, qui représente une forme inédite de
radicalité. Dans un contexte d'ascension sociale entravée, de crainte de
l'avenir, d'identité malmenée par le spectre de la question migratoire, de
cacophonie des réseaux sociaux répercutant peurs, haine et délation, se
développe un
illibéralisme assumé. Mais Mounk souligne un point particulier: la
tentation de l'alternative non démocratique est plus forte chez les jeunes
aisés, libéraux, adaptés à la mondialisation et capables d'en tirer profit, ce
qui constitue une menace sérieuse au regard du pouvoir qu'ils peuvent espérer
exercer dans l'avenir.
Sans l'énerver, il faut
d'urgence donner au jeune l'arme principale, une instruction en histoire qui
lui fait singulièrement défaut
Rien de nouveau pourtant: dans
les bouillonnantes années 1930, les mouvements non conformistes qui
recherchaient une alternative à des démocraties bloquées s'appuyaient sur un
conflit générationnel. Sans parler du fascisme qui exaltait sport, vitesse et
jeunesse, ni de Hitler qui voulait une jeunesse «brutale, impérieuse, impavide
et cruelle», ou de l'élite des jeunes juristes allemands se précipitant dans la
SS, on se souviendra qu'en France, les Jeunes Turcs du Parti radical, les
néo-socialistes de la SFIO, ou les groupes de réflexion comme X-Crise voulaient
secouer la vie politique, renouveler les partis, rétablir un exécutif fort,
mettre en place un gouvernement d'experts.
Le jeune a donc toujours été
encombrant, surtout lorsqu'il réfléchit. S'en débarrasser est inenvisageable.
Non seulement il est plus fort que nous physiquement, mais il finance encore
pour un temps nos futures retraites. L'alternative est délicate: sans
l'énerver, il faut d'urgence lui donner l'arme principale, une instruction en
histoire qui lui fait singulièrement défaut. Il faut aussi lui offrir
l'occasion d'agir en politique, en déverrouillant le système des partis
classiques et en facilitant l'engagement citoyen, et lui donner des raisons
d'espérer, en luttant contre la corruption. Faute de quoi, le cri de Mounk,
poussé par un jeune homme éduqué (il est né en 1982), risque fort de n'avoir
pour écho que le bruit sourd et pierreux de l'éboulement des démocraties
libérales.
* Ancienne élève de l'École
normale supérieure et professeur de géopolitique en classes préparatoires au
lycée Lavoisier à Paris.
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En Égypte, des travaux pharaoniques pour bâtir une nouvelle
capitale (07.03.2018)
REPORTAGE - Une ville nouvelle se
construit à une cinquantaine de kilomètres du Caire. Présentée comme un nouveau
Brasilia mais avec le style Dubaï, elle devrait désengorger un Caire surpeuplé.
Crise oblige, cette future capitale qui essuie déjà de vives critiques a bien
du mal à voir le jour.
Au Caire
Il faut s'extraire d'un Caire
embouteillé, filer vers l'est et emprunter la route de Suez. Sur 45 km,
une ligne bétonnée deux fois six voies défile à perte de vue ; de chaque
côté, des monticules de sable caillouteux que des gros engins de constructions
remuent. Soudain, se dresse comme un mirage un immense compound aux murs
d'enceintes blancs.
De l'avis enthousiaste de la
presse locale et des autorités égyptiennes, il incarne l'Égypte du futur.
Lancée en grande pompe lors de la conférence de Charm el-Cheikh de 2015 sur le
développement économique du pays, la nouvelle capitale voulue par le président Abdel Fatah
al-Sissi est l'illustration du «city branding» compétitif qui a
cours sur la scène internationale: il faut construire plus, plus vite et plus
novateur pour prouver sa puissance et attirer les nouveaux investisseurs.
Sur le papier, c'est une «smart
city» de 700 km², sept fois plus grande que Paris, avec un million de
nouveaux logements, un aéroport, un stade, plus de 600 infrastructures de
santé, autant d'écoles, 1 250 mosquées et églises, un parc deux fois plus
grand que Central Park et un Disneyland, pour un budget initial de
43 milliards d'euros. Une ville écoresponsable et ultramoderne qui doit à
terme accueillir six millions d'habitants et ainsi désengorger un Caire
asphyxié par ses 20 millions de riverains, mais aussi créer plus d'un
million et demi d'emplois permanents. Dans les hauts cercles du pouvoir, cette
ville est vantée comme le nouveau Brasilia, un hub technologique, ultrasécurisé
qui attirera rapidement les entreprises et les touristes du monde entier, à
l'image de Dubaï. L'occasion aussi pour al-Sissi d'asseoir sa légitimité en
promettant des emplois et une rentrée de devises étrangères qui fait tant
défaut au pays depuis la désertion du tourisme en 2011.
Énormes retards
Pourtant, trois ans après la pose
des fondations, rien de tout ça ne semble être réellement en préparation. «Rien
ne paraît correspondre à ce qui a été promu il y a 3 ans», note Roman
Stadnicki, spécialiste en géographie urbaine. Une première grande structure de
béton est bel et bien sortie de terre, mais le mastodonte dans lequel on met
les pieds n'était même pas prévu sur les plans initiaux.
Les travaux entrepris pour
construire la nouvelle capitale de l'Egypte sont loin d'être terminés. -
Crédits photo : Xinhua/Newscom/ABACA
Dans le lobby vide d'un hôtel de
luxe, Rafic Kairalah, directeur général du groupe al-Masah qui gère
l'établissement, est impatient de montrer la maquette du site: «nous avons un
l'hôtel qui fait 85.000 m², avec 360 unités, dont 10 suites royales. Il y
a une piscine, quatre restaurants, 60 appartements, une lagune, deux spas, 15
villas présidentielles, six cinémas…» L'énumération est si longue qu'elle donne
le vertige. «Ce projet a été réalisé en 15 mois. Ça y est, nous sommes
opérationnels», insiste-t-il.
Le site qui fait office de
complexe témoin est impressionnant. Embarqué dans une voiturette de golf, le
directeur poursuit son état des lieux interminable: l'héliport présidentiel, la
plage et ses vagues artificielles, un restaurant fusion… Il y a aussi la grande
salle de conférence avec son dôme céleste de 48 mètres «considéré comme la plus
grande coupole en Afrique et au Moyen-Orient. Dans cette salle, nous pouvons
recevoir 54 présidents pour les sommets de la Ligue arabe.»
La grande salle de conférence
avec son dôme de 48 mètres est l'un des rares bâtiments sortis de terre. -
Crédits photo : Amr Dalsh/REUTERS
Aux côtés de l'équipe qui gère le
site, le président de Schneider Electric Egypte Walid Sheta ne gâche pas son
plaisir. Implantée en Égypte depuis de nombreuses années, l'entreprise a opté
pour une démarche de conseil technique: «nous avons choisi l'investissement de
nos équipes dans le projet comme si c'était le nôtre, comme si nous étions déjà
attributaires de contrats, parce que nous croyons à la nouvelle capitale.»
Une démarche payante. «Ils sont
les rois de la ville là-bas», commente sous couvert d'anonymat un diplomate
français. Schneider Electric, spécialisé dans les produits de gestion
d'électricité, s'est vu attribuer un premier contrat colossal. Si l'entreprise
refuse de donner le montant de son chiffre d'affaires dans le pays, elle assure
qu'elle «était, jusqu'à il y a peu, le 3e pays dans la région MO-Afrique. Avec
ce que je vois là, on pourrait prendre la première place des pays de la
région».
Promoteurs frileux
Mais encore faut-il que ce beau
projet se réalise tel qu'annoncé, et surtout trouve des financements. Lors de
son lancement, le développement de la nouvelle ville devait être en partie pris
en charge par Capital City Partners, un consortium privé dirigé par Mohammed
Alabbar, président d'Emaar Properties. Un protocole d'entente a bien été signé
mais, depuis, Emaar semble s'être discrètement retiré. Contacté, son chef
commercial Nabil Amasha assure ne pas pouvoir s'exprimer. Les autres gros
investisseurs censés lui succéder: China State Construction Engineering
Corporation (CSCEC) et China Fortune Land Development Company, ne sont pas
beaucoup plus bavards alors que la signature effective d'un contrat se fait
toujours attendre.
Seul le conseiller économique de
l'ambassade de Chine se laisse aller à la confidence: «CSCEC est dans la phase
finale de négociations pour un contrat de 3 milliards de dollars pour la
construction d'un centre d'affaires mais les détails sont toujours en phase
finale de discussion. C'est le seul projet que nous avons négocié jusqu'à
maintenant», assure Han Bing. Le blocage serait en partie dû à un procédé de
financement qui ne convient pas aux potentiels investisseurs. «Les autorités
essayent de convaincre les développeurs qu'ils doivent aussi être les
investisseurs. Ça signifie qu'ils leur demandent de financer eux-mêmes les
projets. Ça ne fait aucun sens», explique Yahia Shawkat, urbaniste spécialisé
en cartographie.
«C'est une politique nationale
depuis les années 1970 : celle de bâtir des cités dans le désert pour rediriger
le boom de la population loin du Nil mais cette politique est un total échec»
Yahia Shawkat, urbaniste
Face au refus des banques égyptiennes
de fournir des fonds, les promoteurs sont devenus frileux, forçant l'Égypte à
entamer à ses frais la phase initiale dans l'espoir d'attirer plus tard les
investisseurs. En mai 2016, la société de la Capitale administrative pour le
développement urbain (Acud) a donc été créée pour gérer le développement du
site: une société détenue à 51 % par l'armée et à 49 % par le
ministère du Logement.
Al-Sissi est-il en train de
tomber, comme ses prédécesseurs, dans le piège du grand projet fiasco? «C'est
une politique nationale depuis les années 1970: celle de bâtir des cités dans
le désert pour rediriger le boom de la population loin du Nil mais cette
politique est un total échec. Les villes restent vides et aucune d'entre elles
n'a atteint son objectif de remplissage», met en garde Yahia Shawkat. Les trente-deux villes nouvelles sorties de terre ces trente
dernières années n'abritent pas plus de 2 % de la population totale du
pays. Imaginées par Sadate ou Moubarak avant al-Sissi, elles sont pour
la plupart devenues de simples villes de garnison. «On est toujours dans une
surenchère qui se répète et ne remporte pas le succès escompté», note Roman
Stadnikci, alors que, dans le même temps, onze autres villes de ce type sont
aussi en construction à travers le pays.
«Ceux qui achètent ne pensent pas
à l'appartement, ils vont probablement le revendre avant même de l'avoir vu ou
vont le laisser vide pendant 15 à 20 ans», estime Youssef Tarek, un agent
immobilier commissionné sur la nouvelle capitale. - Crédits photo : Amr
Dalsh/REUTERS
Des appartements coquilles
vides
Pourtant, sur la route
périphérique du Caire, des panneaux publicitaires poussent partout, annonçant
«sold out» des dizaines de compounds de luxe dans la ville à venir. «Ça se vend
comme des petits pains. On met en vente, en trois jours c'est fini», explique
Youssef Tarek, agent immobilier, commissionné sur la nouvelle capitale.
«L'immobilier est une valeur refuge. Ceux qui achètent ne pensent pas à
l'appartement, ils vont probablement le revendre avant même de l'avoir vu ou
vont le laisser vide pendant 15 à 20 ans», assure-t-il, précisant que les
tournées d'attribution dépassent rarement les 600 appartements pour donner
l'illusion d'une forte demande. Une technique marketing bien connue des
promoteurs.
Safia Izaz a succombé à l'une de
ces publicités et a acheté dès l'officialisation du projet: «Je l'ai fait sur
un coup de tête, explique-t-elle, je voulais placer mon argent rapidement mais
la vérité, c'est que depuis que je l'ai acheté, je regrette et je n'arrive pas
à le revendre.» A-t-elle l'intention d'aller vivre là-bas? «Absolument pas,
dit-elle, vivre dans un tel endroit est inenvisageable.» «La question qu'il
faut se poser c'est: y a-t-il une bulle? Comment peut-il y avoir assez de
demandes pour tout ça?», s'interroge l'économiste et urbaniste David Sims,
auteur de Egypt's Desert Dreams: Development or Disaster?.
Car c'est là - aussi - que le bât
blesse: qui d'autre que l'Égyptien fortuné en recherche de placements pour se
payer un appartement dont le mètre carré se vend entre 12.000 et 18.000
EGP? «Le président de l'Acud affirme qu'il y aura une gamme de logements
adaptés à toutes les classes sociales et que seulement 35 % seront haut de
gamme. Il assure qu'avec un salaire de 8000 EGP, il sera possible de s'offrir
un appartement modeste, comme si ces niveaux de revenus étaient communs en
Égypte et ne concernait pas seulement 10 % de la population!», précise
David Sims dans la version actualisée de son livre à paraître. «Oubliez les
chiffres. Ils ne sont pas importants et pas fixes. Nous avons un rêve, et nous
le bâtissons maintenant», ironise-t-il en citant Khalid al-Husseini,
porte-parole de l'Acud.
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À Los Angeles, le combat d'un homme pour les sans-abri
(07.03.2018)
Un jeune catholique est en grève
de la faim pour alerter les autorités sur le sort du quartier le plus pauvre de
la cité des Anges.
À Los Angeles
Depuis le 14 février, Kaleb
Havens, 30 ans, fait une grève de la faim, enchaîné par la taille à la barrière
d'un ancien bâtiment de l'Armée du salut reconverti en entrepôt au cœur
de Skid
Row, le quartier le plus miséreux de Los Angeles. Il a donné la
clé de l'épaisse chaîne au conseiller municipal du district, José Huizar, et se
trouve désormais prisonnier de la vieille chaise longue autour de laquelle
s'entassent livres, sacs en plastique, bouteilles d'eau de coco et
d'électrolytes, couvertures, à côté d'un panneau solaire portable qui lui
permet de charger son téléphone. Bien qu'il ait entamé sa grève de la faim déjà
mince, Kaleb compte tenir le coup pendant la durée du carême, soit 46 jours.
Il fait partie de l'organisation Travailleurs catholiques, qui n'est pas
affiliée à l'Église mais dont les membres vivent en harmonie avec «la parole et
les actes du Christ».
Aussi le jeune diplômé ès lettres
loge-t-il en temps normal dans un abri pour SDF qu'il administre avec d'autres
membres de l'organisation charitable. Son salaire est de 25 dollars par
semaine. Kaleb a travaillé dans le milieu du cinéma comme scénariste, mais sa
foi lui a dicté non seulement de venir en aide aux plus démunis, mais de s'immerger
dans leurs difficiles existences. «Autrement, comment suis-je censé connaître
leurs luttes?», lance-t-il. Ses parents s'inquiètent un peu de sa ferveur et
lui envoient plusieurs SMS par jour pour prendre des nouvelles. De bons
samaritains lui rendent visite, comme cette infirmière qui passe régulièrement
pour mesurer ses signes vitaux. Son voisin Brian est un jeune SDF noir dont la
tente est plantée sur la 5e rue depuis plusieurs années. Bien qu'il parvienne
régulièrement à décrocher des petits boulots, il ne gagne pas suffisamment pour
louer ne serait-ce qu'une chambre.
«Brian travaille très dur, ses
deux parents étaient toxicos. Lui ne consomme aucune drogue. Il essaie de s'en
sortir par tous les moyens et pourtant, il n'arrive pas à s'extirper de Skid
Row»
Kaleb Havens
Les loyers ne cessent de
s'enflammer à Los Angeles. Au cours des six dernières années, selon une étude
menée par un professeur de l'Université de Californie à Los Angeles, ils ont
crû de 67 % tandis que les salaires n'ont eux augmenté que de 23 %.
«Brian travaille très dur, ses deux parents étaient toxicos. Lui ne consomme
aucune drogue. Il essaie de s'en sortir par tous les moyens et pourtant, il
n'arrive pas à s'extirper de Skid Row», explique Kaleb.
Contrairement à une idée reçue, les
résidents de Skid Row ne sont pas tous drogués, malades mentaux, handicapés, en
chômage de longue durée. Dans de nombreux cas, des revers de fortune imprévus -
perte d'emploi, maladie, ou augmentation de loyer - les ont précipités dans la
rue.
57.000 personnes sont actuellement sans abri dans le comté de Los Angeles.
Un sur dix atterrit à Skid Row, «le plus grand camp de réfugiés permanents du
pays», comme l'appelle Kaleb.
L'objectif du jeune catholique
est de faire sortir de leur léthargie les autorités ainsi que le reste de la
population et de les alerter sur le sort misérable de ce quartier
dangereusement insalubre. Celui-ci s'étend sur plusieurs blocs au sud de
Downtown, à la frontière du district des joailliers et à quelques encablures de
la cathédrale postmoderne Our Lady Queens of Angels, dont la construction a
coûté 189 millions de dollars - une somme qui aurait pu servir à loger
et nourrir
tous les SDF de l'immense mégalopole.
Le diocèse de Los Angeles ne
soutient pas Kaleb Havens. Il est jusqu'à présent resté silencieux sur son
action et a ignoré une demande d'interview
Depuis plusieurs décennies, Skid
Row joue le rôle de cour des Miracles. Bloc après bloc, rue après rue, des
centaines de tentes, bâches, cartons, caddies de supermarchés débordant
d'effets personnels, cageots, se succèdent sur les trottoirs au milieu de
détritus et d'ordures. Tant et si bien que le quartier est souvent comparé aux
bidonvilles de Calcutta. «Le maire, Eric Garcetti, n'a fait installer que huit
toilettes portatives. On en réclamait 300. Comment voulez-vous que les gens ne
défèquent pas directement sur la chaussée?,s'insurge Kaleb Havens. Au temps où
il y avait encore 30 toilettes dans le parc de la rue San Julian, les employés
municipaux recueillaient 230 litres d'excréments par jour et par toilette.
Comme elles servaient apparemment aussi parfois de maisons de passe, la
municipalité a décidé de les enlever. Toute cette matière fécale est maintenant
déversée directement dans la rue. Et on s'étonne ensuite qu'il y ait une
épidémie d'hépatite virale!»
Depuis qu'en 2013, Eric Garcetti
a remplacé Antonio Villaraigosa à la mairie, le problème n'a fait qu'empirer:
le nombre de SDF a augmenté de 49 %. À tel point qu'aux dernières
élections, 76 % des électeurs ont adopté la mesure HHH qui, grâce à une
hausse de leurs impôts, devrait financer la construction de mille appartements
à loyers modérés à hauteur de 1,2 milliard de dollars. Près de cinq ans
plus tard, rien n'est encore fait. Les terrains inoccupés ne sont pas nombreux.
Et dans les municipalités où ils existent, les habitants se battent pour
empêcher l'implantation d'une population démunie.
Le diocèse de Los Angeles ne
soutient pas Kaleb Havens. Il est jusqu'à présent resté silencieux sur son
action et a ignoré une demande d'interview. Quant au conseiller municipal José
Huizar, il a fait installer six compteurs rouges (qui ressemblent à des
compteurs de stationnement) destinés à recevoir des donations pour les SDF. On ignore
encore le montant des sommes recueillies. Mais on peut être certain qu'elles ne
résoudront pas le problème.
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Syrie : l'envoi de renforts
kurdes à Afrine complique la donne
Cette «guerre dans la guerre»
syrienne exacerbe les tensions entre Ankara et Washington, principal parrain
des combattants kurdes des YPG.
Correspondante à Istanbul
La bataille d'Afrine a encore pris un nouveau
tournant, ce mardi, avec l'envoi sur place d'un contingent de milices kurdes
jusqu'ici mobilisées sur le front anti-Daech dans l'est de la Syrie. Affirmant
vouloir venir en aide aux Unités de protection du peuple (YPG) qui bataillent
contre l'armée turque dans cette enclave du Nord-Ouest syrien, les Forces
démocratiques syriennes (FDS) - majoritairement composées de combattants
kurdes - ont décidé d'y acheminer 1700 hommes en armes.
«Nos parents à Afrine constituent
une priorité et leur protection est plus importante que les décisions prises
par la coalition internationale», a déclaré Abou Omar al-Idlebi, un responsable
militaire des FDS dans la ville de Raqqa. Dès lundi, le Pentagone avait indiqué
que le départ d'une partie des combattants kurdes vers Afrine, pour renforcer
les positions kurdes, avait provoqué une «pause opérationnelle» contre l'EI.
La riposte turque ne s'est pas
fait attendre. «Indéniablement, nous attendons des États-Unis qu'ils
interviennent et empêchent le transfert […] à Afrine des forces des YPG qui
sont sous leur contrôle», a réagi ce mercredi le porte-parole de la présidence
turque Ibrahim Kalin. Déterminée à empêcher la formation d'un «corridor»
reliant Afrine aux cantons de Kobané et Qamichli, eux aussi sous contrôle des
forces kurdes, Ankara mène depuis le 20 février une guerre ouverte contre
les forces YPG.
Baptisée «Rameau d'olivier»,
cette opération est la deuxième intervention terrestre turque sur le territoire
voisin depuis le début de la guerre syrienne. En août 2016, l'armée turque - appuyée
par les rebelles syriens - avait déjà lancé dans le nord de la Syrie une autre
offensive, «Bouclier de l'Euphrate», visant à chasser les djihadistes de Daech
- et à prévenir, par la même occasion, la jonction des enclaves kurdes. Cette
fois-ci, la volonté de «nettoyer» le Nord syrien de la présence de
«terroristes» kurdes - terme officiellement utilisé par les autorités pour
désigner cette branche syrienne du PKK - est affichée sans ombrage. À ce jour,
Ankara affirme avoir «neutralisé 2960 terroristes» et repris 40 % du
canton d'Afrine.
Un enjeu national
Si la bataille s'avère lente et compliquée -
les combattants kurdes ayant creusé de nombreuses galeries - la Turquie veut la
remporter à tout prix. Ou, du moins, en sortir la tête haute. L'enjeu est
national: le président Erdogan entend capitaliser sur le succès de l'opération
à l'approche du scrutin de 2019. Il est également régional: la Turquie, engagée
dans les négociations sur l'avenir de la Syrie, espère peser de tout son poids
sur l'échiquier régional. Quitte à jouer les provocations: ce mardi encore, les
Turcs ont rappelé que leur objectif n'était pas seulement Afrine, mais la ville
de Manbij, à 150 kilomètres plus à l'est, afin de casser la continuité
territoriale du Kurdistan en Syrie.
Mais cette «guerre dans la
guerre» syrienne est risquée. Elle a exacerbé les tensions entre Ankara et
Washington, un des principaux parrains des YPG dans la lutte contre l'EI en
Syrie. «Nous attendons la reprise des armes (fournies par les États-Unis) des
YPG», a insisté Hami Aksoy, porte-parole du ministère turc des Affaires
étrangères, à la veille de «groupes de travail», prévus ces 8 et 9 mars à
Washington, pour régler les différends entre les deux pays.
L'opération «Rameau d'olivier»
constitue également une diversion par rapport à la priorité du combat contre
les djihadistes en Syrie. La décision des FDS de redéployer des forces sur
Afrine risque, selon les experts, de dégarnir le front de Deir Ezzor où sont
localisées les poches de résistance des combattants de l'EI. La coalition
pourrait en sortir fragilisée: la précision des raids aériens anti-EI dépend en
grande partie des informations fournies sur le terrain par les renseignements
kurdes.
«Ankara est passée d'un
soutien aveugle à l'opposition anti-Assad à la volonté de préserver ses
intérêts et d'empêcher l'expansion de la branche syrienne du PKK»
Un observateur
Pour l'heure, la Turquie assume
pleinement ses choix. Sept ans après le début de la révolution syrienne, ses
priorités affichées ont changé. «Ankara est passée d'un soutien aveugle à
l'opposition anti-Assad à la volonté de préserver ses intérêts et d'empêcher l'expansion
de la branche syrienne du PKK», commente un observateur.
Pays d'accueil de plus de
3 millions de réfugiés syriens, elle cherche aussi à s'alléger de ce poids
en promouvant, côté syrien, la mise en place d'une «zone sécurisée» longeant sa
frontière. L'annonce, mardi, de la construction d'un camp au nord-ouest va dans
ce sens. Destiné à accueillir les déplacés d'Afrine, ce nouveau village de
tentes (d'une capacité d'accueil de 170.000 personnes) pourrait, à terme,
ouvrir ses portes aux Syriens de Turquie.
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Italie : Berlusconi prêt à aider Salvini à former un
gouvernement (07.03.2018)
L'ancien président du Conseil est
sorti de son silence mercredi après le score décevant de son parti, Forza
Italia, aux législatives.
Rome
Silvio Berlusconi était resté
silencieux après le
choc électoral de dimanche. Il a repris l'initiative mercredi pour
réaffirmer dans une longue interview au Corriere della sera qu'il
demeure le seul garant de sa coalition et des engagements électoraux pris pour
conquérir le pouvoir. Il affirme qu'il soutiendra «fidèlement»Matteo
Salvini et se dit «convaincu» que son allié de la Ligue pourra
former un gouvernement. Mais il laisse échapper une certaine déception sur les
résultats électoraux de Forza Italia.
Si la coalition de droite a
recueilli douze millions de suffrages, la Ligue s'en attribue cinq millions et
réalise un score de 17,4 %, loin devant son propre parti, qui n'obtient
que 14 %, et 4,3 % pour leur troisième allié, Frères d'Italie
(extrême droite) de Giorgia Meloni. Au total, sa coalition comptera
263 sièges à la Chambre des députés et 140 au Sénat, mais il manquera
38 députés et 18 sénateurs pour atteindre la majorité absolue.
Trahi par ses propres
instituts de sondage
Silvio
Berlusconi avait mené une campagne électorale intense avec la
certitude de devancer la Ligue. Le 22 février, il déclarait encore:
«Matteo Salvini a une forte envie de jouer les vedettes. Mais ne vous en faites
pas. Dans les derniers sondages, la Ligue est quatre points derrière nous.
Celui qui formera le prochain gouvernement sera désigné par le parti qui aura
obtenu le plus de voix au sein de la coalition.» Il était tellement sûr de lui
qu'il avait même proposé comme caution européenne l'actuel président du
Parlement européen, Antonio Tajani, un fidèle parmi les fidèles. Pour une fois,
Silvio Berlusconi, pourtant bien informé en science électorale, a été trahi par
ses propres instituts de sondage.
«Nous changerons de manière
drastique les politiques suivies par les gouvernements de gauche depuis cinq
ans»
Silvio Berlusconi
L'Italie, poursuit-il, a besoin
«au plus tôt» d'un gouvernement qui «ne peut que venir de la coalition ayant
remporté les élections»: «Tout vaut mieux qu'une impasse prolongée ou des
solutions mal bricolées.» Un gouvernement de droite, affirme-t-il encore,
appliquera à la lettre le programme électoral convenu: «Diminution drastique
des impôts (Salvini veut imposer une «flat tax» à 15 %, lui propose
23 %, NDLR). Contrôle rigoureux de l'immigration. Priorité à la sécurité
des citoyens. Soutien aux catégories sociales défavorisées. Nous changerons de
manière drastique les politiques suivies par les gouvernements de gauche depuis
cinq ans», dit-il. Il ne répond pas aux critiques exprimées en Europe devant un
glissement de la coalition vers l'extrême droite. Ces derniers jours, Antonio
Tajani avait minimisé ce risque en présentant Matteo Salvini et Giorgia Meloni
«non pas comme des europhobes, mais comme des eurocritiques».
L'ancien président du Conseil
exclut tout accord avec le Parti démocrate, mais l'appelle à «retrouver
rapidement une identité et un rôle. Nous avons besoin d'un parti de gauche
moderne et démocratique».Enfin, il attribue l'échec électoral de son parti au
fait qu'il a été «empêché» de se présenter personnellement, ayant été déclaré
«inéligible» pour fraude fiscale par les tribunaux. Et appelle Forza Italia à
se ressaisir pour préparer les européennes de 2019: «Nous prendrons notre
revanche», assure-t-il.
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P
Rémy Rioux : «Au Sahel, le pilier développement a été
sous-calibré» (07.03.2018)
INTERVIEW - Mercredi, le
directeur général de l'Agence française de développement était à Londres pour
renforcer la coopération franco-britannique dans la zone sahélienne.
Rémy Rioux, 48 ans, est, depuis
juin 2016, directeur général de l'Agence française de développement (AFD),
dotée d'un budget de 11 milliards d'euros de financements. Celle-ci a
lancé 500 projets d'aide à la région du Sahel, en coopération avec plusieurs
pays européens.
LE FIGARO. - Le récent attentat de Ouagadougou visant la France, qui a
fait 8 morts et plus de 80 blessés, ne montre-t-il pas l'échec des
interventions militaires et humanitaires dans la région?
Rémy RIOUX. - C'était
une réaction à des opérations militaires qui avaient durement frappé les terroristes
dans les jours précédents. Je suis persuadé, comme le président de la
République l'a dit à plusieurs reprises, que la réponse passe à la fois par la
diplomatie, la défense et le développement. Le pilier développement,
sous-calibré jusqu'à présent, est devenu une priorité. Nous sommes dans une
phase de montée en puissance.
En quoi consiste
l'intervention humanitaire occidentale au Sahel?
L'alliance Sahel, lancée en juillet 2017 par Emmanuel
Macron et Angela Merkel, réunit la France, l'Allemagne et l'Union
européenne - l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni en particulier - avec la
Banque mondiale, la Banque africaine de développement et le Programme des
Nations unies pour le développement (Pnud) et nos partenaires africains du G5
Sahel. C'est un engagement pour le développement aussi fort que celui dans la
sécurité. Il prévoit 6 milliards d'euros d'investissements dans
500 projets.
«Nous n'intervenons pas dans
le monde pour des raisons de sécurité seulement. Nous voulons contribuer à
construire un futur pour ces populations»
Rémy Rioux
Quelles sont les priorités?
Nous visons un impact immédiat
sur les populations. Dans des secteurs précis comme l'éducation, la création
d'emplois, l'accès à l'énergie. Nous travaillons aussi sur le développement
agricole.
L'articulation entre défense
et développement ne peut-elle se révéler contre-productive?
Il faut trouver la bonne
distance. Les enjeux de développement se situent dans les zones en crise, mais
aussi dans les capitales, où il faut éviter les phénomènes de radicalisation.
Nous n'intervenons pas dans le monde pour des raisons de sécurité seulement.
Nous voulons contribuer à construire un futur pour ces populations.
«Les migrations sont d'abord
intra-africaines, d'où la nécessité d'une vision régionale»
Cette action peut-elle se
traduire par un impact sur les flux migratoires?
Il ne faut pas imaginer de
corrélations trop mécaniques. On constate sur le terrain que, quand les gens
ont plus de revenus, ils ont plus de choix, dont celui de migrer, que n'ont pas
les plus pauvres. Fondamentalement, les gens n'ont pas envie de partir de chez
eux. Nous voulons leur offrir davantage de choix, pour qu'ils ne soient pas
acculés à la migration. Quand ils le font, les Sahéliens ont plutôt tendance à
partir vers le sud, la Côte d'Ivoire, par exemple, et jusqu'en Angola ou en
Afrique du Sud, plutôt que de prendre cette route très dangereuse de la
Méditerranée vers l'Europe. Les migrations sont d'abord intra-africaines, d'où
la nécessité d'une vision régionale.
Qu'apporte l'implication de la
Grande-Bretagne?
Les Britanniques sont assez peu
présents dans la zone sahélienne. Mais l'AFD met déjà en œuvre des projets pour
le compte de leur gouvernement au Kenya, au Congo ou en Indonésie. Ils
souhaitent rejoindre l'alliance Sahel. Sur le fond, cela témoigne de leur
intention de rester partie prenante d'un effort commun coordonné par les
Européens, en dépit du Brexit. Ce n'est pas une surprise. Le Royaume-Uni a
montré la voie depuis plusieurs années, sous les gouvernements successifs de
Tony Blair, Gordon Brown, David Cameron et Theresa May, en consacrant 0,7 %
de son PIB à l'aide au développement international, avec un très fort consensus
bipartisan.
Emmanuel Macron et le
gouvernement français ont tracé une trajectoire pour faire passer notre aide au
développement de 0,38 % à 0,55 % du PIB d'ici à 2022. Cela conforte un
mouvement en Europe, impulsé par la France et l'Allemagne. En Grande-Bretagne,
où il est actuellement un peu remis en question, je dis aux Britanniques qu'ils
ont en France des partenaires fiables pour poursuivre une action concrète, même
en dehors de l'Union européenne.
Le scandale d'abus sexuels
chez le géant de l'humanitaire britannique Oxfam remet-il en cause le principe
de l'aide au développement?
Des choses inacceptables se sont passées, qui
interpellent tous les acteurs du développement. Nous sommes en train de
renforcer nos procédures. Personne ne peut dire qu'il est à l'abri de tels
faits, même si, pour l'heure, nous n'avons pas connaissance de cas comparables
en France. Le Royaume-Uni est à l'épicentre de cette crise. Plus la cause est
noble, plus on doit être irréprochable. En France, le soutien public à la
politique de développement est plutôt en croissance. Le président de la
République prend ces engagements forts parce qu'ils ont une grande importance
politique. L'aide au développement est un outil positif essentiel dans la
mondialisation.
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Le Sri Lanka déstabilisé par les extrémistes bouddhistes
(07.03.2018)
INFOGRAPHIE - Le
gouvernement a décrété l'état d'urgence pour contenir les violences contre les
minorités religieuses, en particulier musulmanes.
À New Delhi
Le Sri Lanka a connu mercredi une
nouvelle journée de tensions alors que des
émeutes secouent les districts de Kandy et d'Ampara, au centre et à l'est de
l'île, depuis fin février. Mercredi, des commerces ont été brûlés à
Kandy, poussant les autorités à bloquer partiellement l'accès aux réseaux
sociaux, et ce alors que l'état d'urgence a été décrété pour dix jours dans
tout le pays. Les violences ont fait au moins un mort pour l'instant.
D'après la version livrée par le
premier ministre Ranil Wickremesinghe devant le Parlement mardi, tout a
commencé le 22 février. Un chauffeur de l'ethnie cinghalaise est agressé
par quatre musulmans lors d'un incident de la circulation à Kandy. Blessée, la
victime est transportée à l'hôpital où elle succombe à ses blessures le
3 mars. Le lendemain soir, deux commerces tenus par des musulmans sont
incendiés à Kandy. Le 5 mars, les attaques prennent de l'ampleur. Des
boutiques ainsi que des mosquées sont prises pour cible. Un jeune musulman de
27 ans périt dans l'incendie de sa maison à Digana. Des moines cinghalais de
confession bouddhiste participent aux émeutes, mobilisant leurs partisans grâce
aux réseaux sociaux, sans que la police ne les interpelle.
Moines radicalisés
Ces événements sont les derniers
d'une série d'attaques qui se multiplient depuis 2012 contre les minorités
religieuses, en particulier musulmanes. La plupart du temps, ces agressions
sont encouragées par les bouddhistes radicaux du Bodu Bala Sena (BBS). Si les
bouddhistes de l'ethnie cinghalaise sont majoritaires au Sri Lanka,
représentant 70 % de la population, le BBS martèle que la croissance
démographique des musulmans menacerait leur statut social. Il reproche aux
minorités religieuses de multiplier les conversions, dont il prône la
pénalisation, réclame l'interdiction de l'abattage halal, des manifestations
religieuses musulmanes et chrétiennes,
ainsi que l'abolition du droit privé musulman.
L'an dernier, le BBS a trouvé un
nouveau cheval de bataille avec l'arrivée des
Rohingyas, de confession musulmane, ayant fui la répression de l'armée birmane.
Le chef du BBS, Gnanasara Thero, avait affirmé en mai 2017 lors d'une
conférence de presse que ces réfugiés étaient venus envahir le Sri Lanka.
Le premier ministre s'est dit
décidé à contenir les violences: «le gouvernement condamne les actes violents
et racistes. L'état d'urgence a été proclamé et nous n'hésiterons pas à prendre
d'autres mesures si nécessaire», a-t-il déclaré. Mais pour Alan Keenan,
chercheur à l'International Crisis Group, le chef du gouvernement a peu de
marges de manœuvre. «Les moines bouddhistes jouissent d'un statut social très
particulier et les interpeller serait perçu comme un manque de respect envers
le clergé.» Autre problème: l'ancien président Mahinda Rajapakse, opposant au
premier ministre, ne cache pas ses sympathies pour les extrémistes. Or
Rajapakse garde de nombreux soutiens dans les forces de sécurité et certains
observateurs pensent que l'armée et la police, qui lui seraient fidèles,
laissent faire les émeutiers.
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Mineurs étrangers : l'État va ajuster son aide
(07.03.2018)
Matignon doit trancher lundi
entre plusieurs hypothèses pour soutenir financièrement les départements dont
les dépenses d'aide sociale à l'enfance ont explosé avec les récentes vagues
migratoires.
La question des «mineurs non
accompagnés» (MNA) va-t-elle trouver sa solution? Le premier ministre a entre
les mains, depuis la mi-février, un rapport d'une cinquantaine de pages censé
lui fournir des pistes de sortie de crise, alors que la France a dû accueillir
plus de 50.000 de ces jeunes étrangers l'an dernier. Or tous ne sont pas
mineurs, tant s'en faut.
Édouard Philippe a lui-même commandé ce travail
aux Inspections générales de l'administration (IGA), des affaires sociales
(IGAS), de la justice (IGJ) mais aussi à l'Assemblée des départements de France
(ADF). Sa lettre de mission, cosignée par le président de l'ADF, Dominique Bussereau, indique: «Selon les estimations
portées à notre connaissance, une majorité des personnes demandant à accéder au
dispositif des MNA sont en réalité majeures».
Le 12 mars prochain, l'hôte
de Matignon doit donc trancher parmi divers scénarios qui lui sont proposés. Il
s'agit bien de conjurer l'enfer budgétaire dans lequel les récentes vagues
migratoires ont plongé les Conseils départementaux, seuls responsables de
l'aide sociale à l'enfance.
«Les départements ont pris en
charge 25.000 mineurs l'an dernier, la seule facture 2017 s'élève donc à
1,25 milliard d'euros!»
Pierre Monzani, directeur général
de l'ADF
L'État ne finance, pour l'heure,
que la phase d'évaluation du mineur étranger: 250 euros par jour dans la
limite de cinq jours, soit 1250 euros de participation pour un coût total
estimé à 50.000 euros par jeune et par an. «Les départements ont pris en
charge 25.000 mineurs l'an dernier, la seule facture 2017 s'élève donc à
1,25 milliard d'euros!», résume le préfet Pierre Monzani, directeur
général de l'ADF.
Comment en sortir? Première
hypothèse: l'État prend tout à sa charge. «Cette affaire n'est-elle pas la
conséquence directe de la politique migratoire d'essence régalienne?»,
interroge-t-on chez Bussereau. Les promesses faites par Emmanuel Macron, en
juillet dernier, à une délégation de l'ADF ont nourri, c'est vrai, certains
espoirs, «mais il ne faut pas trop rêver», pronostique un président de
département.
Autre hypothèse: un panachage,
qui pourrait avoir la faveur du gouvernement. Les départements seraient aidés
dans la phase d'évaluation du jeune durant vingt jours et non plus seulement
cinq jours, pour coller aux délais réels. Et l'État prendrait en plus 30 %
du coût de l'aide sociale à l'enfance pour ces mineurs, comme cela fut imaginé
sous Valls puis Cazeneuve.
Quelle que soit l'hypothèse
retenue, le projet de loi de finances 2018 est déjà bouclé et accordera une
participation étatique globale limitée à 132 millions d'euros pour les
mineurs étrangers isolés
Dans cette hypothèse, l'apport
financier de l'État interviendrait au-delà d'un «seuil raisonnable» fixé à
13.000 mineurs mis à l'abri. Concrètement, sur 25.000 mineurs pris en compte
dans les départements, l'État ne financerait que les 12.000 mineurs considérés
comme en surnombre.
Matignon retiendra-t-il la base
de 50.000 euros par an et par enfant, calculée par les départements? Rien
n'est moins sûr. Le montant journalier estimé pourrait être revu à la baisse,
autour de 40.000 euros. «Et pourtant, le coût réel est bien de
50.000 euros», rappelle-t-on à l'ADF.
Quelle que soit l'hypothèse
retenue, le projet de loi de finances 2018 est déjà bouclé et accordera une
participation étatique globale limitée à 132 millions d'euros pour les
mineurs étrangers isolés. «En gros, l'État ne finance, à ce jour, que 10 %
du coût réel de la politique migratoire concernant les mineurs», confie un
patron de département.
La bataille financière ne fait que
commencer. À l'ADF, la vigilance est de mise. L'assemblée présidée par
Dominique Bussereau aimerait obtenir des garanties au cas où le flux migratoire
viendrait encore à s'accentuer. «Il faudra, dit-on dans son entourage, que
l'État ait prévu quelle sera sa participation si, demain, 75.000 à 100.000
jeunes étrangers se présentent au guichet de l'aide sociale à l'enfance en un
an.» Une hypothèse qui est loin d'être farfelue.
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La cité perdue des pharaons noirs (06.03.2018)
EN IMAGES - Une équipe
d'archéologues pilotée par des Français a mis au jour la plus grande collection
de pièces en langue méroïtique, la plus ancienne langue d'Afrique noire, dans
une nécropole au Soudan.
Relancées en 2009, les fouilles
du site archéologique de Sedeinga, au Soudan, ne cessent de révéler de nouveaux
secrets sur le Royaume de Koush, une civilisation qui a occupé le Nil moyen
entre le VIIIe siècle avant J.-C. et le IVe siècle après J.-C., et dont la
langue, le méroïtique, reste encore aujourd'hui mystérieuse. Ses habitants ont
régné sur l'actuel Soudan pendant plus de 1000 ans, contrôlant les voies
d'accès entre l'Égypte, la mer Rouge et le reste de l'Afrique. Leur culture est
un mélange étonnant de traditions africaines et de culture égyptienne
pharaonique. Ce sont en quelque sorte les pharaons noirs d'Afrique.
Fin 2017, une équipe
internationale d'archéologues, pilotée par des chercheurs du CNRS, a notamment mis au jour
de nouvelles stèles et tombes dans cette vaste nécropole de Sedeinga, qui
abrite aujourd'hui la plus grande collection de textes rédigés en méroïtique,
la langue la plus ancienne d'Afrique noire. «La nécropole de Sedeinga s'étend
sur plus de 25 hectares et abrite les vestiges d'au moins quatre-vingts
pyramides de briques et de plus d'une centaine de tombes», explique Claude
Rilly, chercheur au CNRS et directeur de la mission. «Les stèles misent au jour
en novembre et décembre derniers datent pour leur majorité du IIe siècle après
J.-C., soit le début du déclin de la société méroïtique.»
Une société méconnue
Le Royaume de Koush ne bénéficie
pas de la même notoriété que ses voisins égyptiens. «Pourtant, on peut parler
de deux versants d'une même civilisation pharaonique», explique Claude Rilly.
Pendant longtemps, les recherches y ont été négligées. Les chercheurs ne
disposent pour l'heure que de 2000 textes, ce qui donne aux découvertes de
Sedeinga une importance toute particulière. D'autant plus que si on arrive
parfaitement à déchiffrer les écritures, on ne parvient pas encore à comprendre
correctement la langue. «Lire une langue, ce n'est pas forcément la même chose que
la comprendre», explique Claude Rilly. «Les textes retrouvés sont écrits en
caractères démotiques. Un alphabet en quelque sorte dérivé des hiéroglyphes et
présent sur la pierre de Rosette. C'est une sorte de langage
sténo.»
Les deux peuples sont très liés.
Le royaume de Koush est devenu autonome à la suite de l'éclatement du Nouvel
Empire égyptien au VIIIe siècle avant J.-C., après plus de huit siècles de domination.
«Les deux civilisations sont restées tellement proches qu'à plusieurs reprises
les Méroïtes ont tenté d'envahir l'Égypte», raconte le chercheur. De cette
longue période de domination, les Méroïtes ont gardé (entre autres) une partie
de la mythologie égyptienne. Des représentations de la déesse égyptienne de
l'ordre, de l'équité et de la paie, Maât, ont par exemple été mis au jour sur
le site. Il s'agit de la première représentation connue de cette déesse avec
des traits africains. «La moitié de leurs dieux était en quelque sorte “piquée”
aux Égyptiens», explique Claude Rilly.
«Dans la société méroïtique,
ce sont les femmes qui incarnent le prestige et qui en transmettent l'héritage.
(...) Elles occupent une place centrale et peuvent même être pharaons!»
Claude Rilly, chercheur au CNRS
et directeur de la mission
La ville de Sedeinga était une
grosse ville provinciale. «C'était une ville très riche. Il y a quelques
années, nous avons retrouvé la dépouille d'un enfant avec un collier de perles
millefiori (très colorées, avec des dessins de fleurs, NDLR), comme je n'en
avais jamais vu jusque-là!», explique Claude Rilly. Le site est sur la piste
des 40 jours, un lieu stratégique qui est encore aujourd'hui utilisé par les
caravanes de dromadaires. La ville devait largement bénéficier des revenus liés
au commerce. «À l'époque, c'était sûrement des ânes, mais on peut tout à fait
imaginer que ce chemin était déjà largement emprunté», rajoute le directeur de
la mission.
Autre signe de l'importance de
cette cité, plusieurs stèles de femmes importantes, proches de notables de
grandes cités, ont été inhumées ici. Les archéologues ont découvert une stèle
au nom de la Dame Maliwarasea, sœur de deux grands prêtres d'Amon (plus haut
rang sacerdotal) et dont l'un des fils a exercé la fonction de gouverneur d'une
grande cité en bordure du Nil. Une sépulture a été retrouvée portant le nom
d'Adatalabe, une haute dame issue d'une illustre lignée qui comprend un prince
royal, membre de la famille régnante de Méroé (la capitale du royaume après le
IVe siècle avant J.-C.). «Ces deux stèles ne sont pas des cas isolés», détaille
Claude Rilly. «Dans la société méroïtique, ce sont en effet les femmes qui
incarnent le prestige et qui en transmettent l'héritage. La lignée est matrilinéaire.
Les femmes y occupent une place centrale et peuvent même être pharaons!»
«Cette région est une porte
d'entrée pour appréhender l'histoire antique de l'Afrique noire. Car si les
sources sont rares pour les Méroïtes, elles sont encore plus rares plus au
sud», ajoute le chercheur. Les constructions en briques bâties sur du sable se
conservent très bien, alors qu'il est très difficile de retrouver des vestiges
dans des zones tropicales. Dernier élément primordial, la proximité des
Méroïtes avec les Grecs et les Romains nous permet de bénéficier de (rares)
sources extérieures, ce qui n'est pas le cas pour les autres civilisations
noires africaines de l'époque. «Mais notre niveau de connaissance reste encore
très parcellaire», regrette Claude Rilly. «C'est pourquoi les découvertes du
site sont incroyables!»
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Pourquoi la France est toujours la championne des dépenses
publiques… et risque de le rester (07.03.2018)
INFO LE FIGARO - François Écalle,
spécialiste des finances publiques, a analysé les finances de l'État pour
comprendre les raisons de ce record et l'écart affiché par rapport à ses
voisins européens.
François Écalle, spécialiste des
finances publiques. - Crédits photo : Thomas Padilla//MAXPPP
La France est, on le sait, la
championne de la zone euro en matière de finances publiques. Si les dépenses de
l'État, de la Sécurité sociale et des collectivités locales représentent plus
de la moitié de la richesse nationale, soit 56,4 % du PIB en 2016, les
raisons précises de ce record hexagonal sont moins souvent mises en avant. Dans
une note inédite que publie Le Figaro, le spécialiste des finances
publiques, François
Écalle, a analysé les données d'Eurostat pour trouver dans quels
domaines la sphère publique française est plus dispendieuse que la plupart de
ses voisins européens.
Ce magistrat de la Cour des
comptes en disponibilité, qui a créé le très instructif site Fipeco, relève que
l'écart entre les dépenses publiques françaises et la moyenne de la zone euro
s'est creusé, en dix ans, de plus de 2 points de PIB, passant de 6,5 à 8,8
points de PIB entre 2006 et 2016. Un delta loin d'être anodin car un
point de PIB vaut un peu plus de 20 milliards d'euros. «Le coût des
politiques publiques a plus augmenté en France que dans la zone euro», résume
ainsi François Écalle.
«Des choses courageuses ont
été faites par la nouvelle majorité, comme la baisse drastique du nombre de
contrats aidés. Mais les efforts ne sont - à ce jour - pas à la hauteur des
enjeux»
François Écalle, spécialiste des
finances publiques
La principale raison? Le modèle
social français. Son coût, déjà très supérieur à la moyenne de la zone
euro en 2006, a continué à s'envoler en raison de la crise plus vite
qu'ailleurs. Il atteint 31,5 % du PIB en 2016, contre 26,7 % chez nos
voisins. En cause, des mesures d'économies insuffisantes en matière de
retraite. Malgré la réforme des régimes spéciaux de 2008, celle du régime
général de 2010, puis celle - la première prise sous un gouvernement socialiste
- de 2014, les dépenses de pension ont progressé plus rapidement en France que
dans le reste de la zone euro (+2 points, contre +1,5 point de PIB).
Les partenaires européens ont en effet été plus loin dans leurs réformes,
l'Espagne ayant par exemple décidé en 2011 de repousser à terme l'âge légal de
départ à la retraite de 65 à 67 ans.
«Tandis que peu d'efforts ont
porté sur la sécurité sociale, beaucoup a été fait en revanche dans la sphère
de l'État», analyse François Écalle. Cela se traduit dans les «services
généraux», domaine un peu fourre-tout pour lequel la France est passée de 0,2
point sous la moyenne de la zone euro, à 6,1 % du PIB. Un mérite somme
toute relatif: la France s'endette en effet à des taux d'intérêt inférieurs à
ceux de l'Italie ou de l'Espagne…
Efforts insuffisants
Pour le reste des frais généraux,
«la maison France est plutôt bien tenue», estime tout de même le magistrat
financier. La révision générale des politiques publiques (RGPP) sous Nicolas
Sarkozy et les quelques économies réalisées sous François Hollande ont porté
leurs fruits. Certains ministères, comme à Bercy ou aux Transports, ont vu
ainsi leurs effectifs fondre. Au-delà, la
France continue de dépenser plus que ses partenaires dans d'autres
domaines de l'action publique, notamment le logement et l'éducation sans que
ces crédits importants débouchent pour autant sur de meilleurs résultats que
dans les pays voisins.
Les mesures d'économies votées à
l'automne et celles qui doivent être présentées au printemps changeront-elles
la donne? «Des choses courageuses ont été faites, comme la baisse drastique du
nombre de contrats aidés, analyse François Écalle. Mais les efforts ne sont - à
ce jour - pas à la hauteur des enjeux.» L'exécutif ambitionne de diminuer la
part des dépenses publiques dans le PIB d'ici 2022, à 51,6 % du PIB (avec
crédits d'impôts). Louable, mais insuffisant pour combler l'écart actuel
séparant la France de la moyenne de la zone euro.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 08/03/2018. Accédez à sa version
PDF en cliquant ici
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Olivier Delacroix : «Bernard de La Villardière tient
parfois des propos dangereux» (07.03.2018)
- Mis à jour le 07/03/2018 à 15:04
- Publié le 07/03/2018 à 15:04
Olivier Delacroix : «La
banlieue se méfie des médias»
INTERVIEW / VIDÉO – Le confident
du service public signe un documentaire intitulé Le parcours des combattantes
ce mercredi soir sur France 5. Invité du Buzz TV, il évoque le retour de son
magazine Dans les yeux d’Olivier sur France 2.
INTERVIEW / VIDÉO - Le
présentateur signe un documentaire intitulé Le parcours des
combattantes ce mercredi soir sur France 5. Invité du Buzz TV,
il se livre sans détour sur le numéro de Dossier Tabou consacré
à l’islam sur M6.
Dans le cadre de la journée
internationale des droits des femmes qui se tient cette semaine, Olivier
Delacroix a choisi de braquer ses caméras sur quatre mamans au parcours
extraordinaire. Dans le documentaire Le parcours des combattantes diffusé
ce mercredi soir sur France 5, le confident préféré du service public donne la
parole à Sylvie, Nadia, Tishou et Laetitia, quatre femmes qui ont grandi en
Seine-Saint-Denis. Promises à un avenir incertain dans des quartiers repliés
sur eux-mêmes, elles ont décidé de se battre pour accéder à la vie qu’elles
mènent aujourd’hui. À travers ces témoignages édifiants, Olivier Delacroix
propose une vision optimiste de la banlieue.
» LIRE AUSSI - Le parcours des combattantes : Olivier Delacroix
donne la parole aux femmes de banlieue
Invité du Buzz TV (voir
vidéo ci-dessus), le présentateur du magazine Dans les yeux
d’Olivier s’est exprimé sans langue de bois sur Bernard de La
Villardière. Ce dernier avait présenté en septembre 2016 un numéro de Dossier
Tabou sur M6 dans lequel il s’intéressait à l’islam dans les
quartiers. Une enquête qui, selon Olivier Delacroix, créé des tensions au sein
de la population. «Les propos de Bernard de La Villardière sont parfois
dangereux. Il ne faut pas voir derrière chaque femme voilée l’épouse d’un
terroriste. […] Comme il y a de plus en plus de musulmans en France, il faut
trouver des solutions pour vivre ensemble. En faisant Dossier Tabou,
on déconstruit la société, on lui fait du mal et c’est de l’info à deux
balles», estime-t-il. Après la Seine-Saint-Denis, Olivier Delacroix se
focalisera sur les quartiers Nord de Marseille dans le cadre d’un numéro inédit
de son magazine Dans les yeux d’Olivier sur France 2.
Quand la révolte des peuples occidentaux menace l'Europe de
Bruxelles… (09.03.2018)
CHRONIQUE - Pour Eric Zemmour,
les électeurs des pays européens donnent tout le temps tort aux formations
politiques immigrationnistes.
On se souvient de la boutade de
Bill Clinton, à peine élu président des États-Unis, en 1992, lancée à George
Bush, qui se croyait assuré de sa réélection, après sa campagne victorieuse en
Irak: «L'économie, idiot!» On pourrait aujourd'hui parodier la boutade
clintonienne: «L'immigration, idiot!»
En Italie après l'Allemagne, en
Autriche après le Brexit: à chaque fois,l'immigration s'impose
comme le thème majeur des élections. À chaque fois, elle déboulonne les
sortants et offre la victoire aux formations les plus déterminées à la
combattre. Merkel puis Renzi sont les grandes victimes, l'AFD puis la Ligue,
les grands vainqueurs.
«En Italie comme ailleurs,
l'immigration s'impose chaque fois comme le thème majeur des élections»
Nos médias expliquaient il y a
peu que la coupure se situait entre l'est et l'ouest de l'Europe, entre des
sociétés encore archaïques qui n'avaient pas de longue tradition démocratique,
celles de l'Est, et les nôtres, vieilles démocraties admirables, sociétés
multiculturelles détachées de leurs racines chrétiennes, États de droit
impeccables.
Tout cela n'était qu'un mythe.
Les élections en Europe de l'Ouest prouvent que les peuples occidentaux sont
d'accord avec les dirigeants de l'Est. L'alliance est à portée de main. Ceux
qui se lamentaient sur la coupure du continent peuvent se consoler. Mais la
réconciliation se fera sur le dos des élites occidentales. Et sur leurs
fameuses «valeurs» érigées en principes fondateurs de l'Union.
» LIRE AUSSI - Législatives
en Italie: la défaite de Bruxelles
C'est là le nœud gordien de ce
drame historique. La vague migratoire inouïe que nous subissons n'est pas un
effet secondaire de l'Union européenne. Elle est la quintessence de son
idéologie - on pourrait dire de sa philosophie qui, hantée par le souvenir
hitlérien, considère qu'une nation ne repose plus sur un peuple ni sur une
terre, mais sur des valeurs ; que les frontières sont des barrières
inutiles et même nuisibles au commerce ; que les hommes sont interchangeables,
simples producteurs et consommateurs sans passé, racines ni identité ; que
les États n'ont le droit ni de repousser les étrangers qui viennent sur leur
sol, ni de les discriminer en conservant des privilèges (sociaux) à leurs
nationaux, ni même de les assimiler à la culture dominante de leur nation.
La rebellion des peuples
C'est ce qu'à Bruxelles on
appelle avec emphase les sociétés ouvertes et l'état de droit. On dit
communément que l'Europe a laissé l'Italie seule face à la vague migratoire qui
déferle sur ses côtes. C'est pire que cela. L'Europe, par la jurisprudence de
ses juges, a obligé l'Italie à accueillir tous ceux qui voulaient l'envahir, à
sauver toutes les embarcations, à la plus grande joie des passeurs, et lui a
pratiquement interdit de les renvoyer chez eux.
Cette révolte des peuples
occidentaux, au cœur des pays fondateurs de l'Union, menace l'Europe comme
jamais. À Bruxelles, on doit désormais choisir: défendre les fameuses «valeurs»
ou subir les coups de bélier des peuples. C'est une question de vie ou de mort.
Pour l'Europe, mais aussi pour les nations qui la composent. Lamartine disait:
«Toutes les fois qu'une théorie est en contradiction avec le salut d'une
société, c'est que cette théorie est fausse ; car la société est la vérité
suprême.»
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(08.03.2018)
CHRONIQUE - La victoire en Italie
des souverainistes et des antisystème sanctionne l'obstination de l'Union
européenne à ne pas entendre les désirs des peuples.
C'est non. Une majorité
d'Italiens, pays cofondateur de l'Union européenne (UE), ne veut plus de cette
machine à déraciner les peuples. La
victoire, dimanche, des souverainistes et des antisystème (plus de
50 % des suffrages) donne un message clair: les intimidations des
moralistes ont vécu. Exit, le prêchi-prêcha de l'UE sur le vivre-ensemble, la
non-discrimination, l'accueil des «migrants». Exit, les anathèmes des
mondialistes contre les racistes, les xénophobes, les extrémistes ; bref,
contre ceux qui ne pensent pas correctement. Après les Anglais, Polonais,
Hongrois, Autrichiens, etc., les Italiens ont rappelé que l'immigration
massive était vécue comme une menace. Ils ne veulent plus de cette agression,
aggravée par la déstabilisation de la Libye: ce pays a jeté à la mer des
milliers de clandestins, parfois soutenus par des réseaux islamistes. Le procès
de l'UE, qui s'est construite sur l'ouverture des frontières, est ouvert.
Les immigrationnistes auraient
tort de se rassurer en regardant l'Allemagne. Certes, Angela
Merkel a sauvé sa place, grâce à l'accord de coalition renouvelé après
six mois de poussives tractations. Mais la folle décision de la chancelière,
responsable de l'entrée de plus d'un million de musulmans en 2015, a installé
une inquiétude ; elle explique son affaiblissement. Une même angoisse
existentielle relie l'ouest à l'est de l'Europe. L'AfD (Alternative pour
l'Allemagne), qui alerte sur l'invasion africaine et arabe, est devenue le
premier parti d'opposition. «Nous
sommes un parti libéral conservateur»,
assure Alice Weidel, présidente du groupe au Bundestag. En septembre, à
la Sorbonne, Emmanuel Macron s'en était pris aux «souverainistes de repli» et à
leurs «passions tristes». Depuis dimanche, il se retrouve isolé dans son projet
de «refondation» de l'UE. Même son clone italien, l'ex-chef du gouvernement
Matteo Renzi, a été remercié.
«La dynamique qui traverse
l'Europe, mais aussi les États-Unis, est identitaire. Le clivage est entre les
mondialistes et les souverainistes, les déracinés et les indigènes, les ”in“ et
les ”out“»
S'il y a un «dégagisme», il
menace l'UE et ses porte-voix, parmi lesquels Macron prédomine. La
chute de Renzi, qui a quitté lundi la direction du Parti démocrate après sa
raclée aux législatives (18,7 % des voix), a valeur d'avertissement:
enfant chéri de l'EU et de ses valeurs d'humanitarisme et d'universalisme,
Renzi s'est heurté à l'incompréhension de ses compatriotes, également touchés
par le chômage. Le même sort attend-il Macron? Le chef de l'État s'est persuadé
que la question économique et sociale restait le moteur de l'histoire. Or cette
analyse parcellaire est fausse. La dynamique qui traverse l'Europe, mais aussi
les États-Unis, est identitaire. Le clivage est entre les mondialistes et les
souverainistes, les déracinés et les indigènes, les «in» et les «out».
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en Italie: la défaite de Bruxelles»
Il suffit d'écouter les
représentants de l'UE dénoncer le «populisme», refrain repris par le chœur
médiatique, pour mesurer le mal dont souffre cette Europe mal pensée et mal
dirigée: elle ne veut entendre le peuple qu'à la condition qu'il file doux. Est
«populiste» celui qui s'oppose à l'idéologie bruxelloise, à ses lubies
postnationales et multiculturelles. Les caricatures et les injures qui pleuvent
sur ceux qui protestent sont des procédés de régimes agonisants, incapables de
susciter l'adhésion des gens. Il est probable que les attaques des eurocrates
en sursis et de leurs suiveurs vont se faire encore plus violentes. Des
commentateurs ne craignent pas d'annoncer, ici et là en Europe, le retour du
néonazisme ou du néofascisme. En réalité, les peuples insultés ne sont
coupables de rien, sinon de vouloir reprendre leur destin en main. Serait-il
devenu dangereux de se dire attaché à sa nation, à sa culture, à ses
frontières? L'UE en est convaincue…
Convergence avec la Ligue
arabe
Il serait temps de s'alarmer des
compromissions de l'UE avec ce monde islamique qui la manipule. La politique
pro-arabe, généralisée par l'Union après 1973 sous la pression de la crise
pétrolière, explique le choix de s'ouvrir à la civilisation musulmane pour
s'attirer ses faveurs. Or celle-ci vient grossir les contre-sociétés au cœur des
nations ouvertes. Quand Matteo Salvini, le leader de la Ligue qui revendique la
direction du gouvernement italien, déclare: «Je suis un ami et un frère
d'Israël», celui qui est présenté par les médias comme un extrémiste de droite
invite à regarder de près la politique extérieure de l'UE: son parti pris
anti-israélien a fait dire à Federica Mogherini, parlant au nom de l'UE le
27 février, que l'Europe avait avec la Ligue arabe «une convergence
complète d'objectifs» sur la relance du processus de paix. La décision de
Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël a été critiquée.
Cette soumission s'ajoute à celles déjà actées dans le cadre du «Dialogue
euro-arabe». Mais ces concessions ont conduit à rendre l'islam politique
intouchable. Le loup est présenté comme un agneau.
«Les peuples insultés ne sont
coupables de rien, sinon de vouloir reprendre leur destin en main»
C'est sous l'influence de la
Coopération euro-arabe, depuis longtemps dénoncée par l'essayiste Bat Ye'or,
que des pays d'Europe se sont pliés aux exigences islamiques. Comme le rappelle
Pierre Rehov (FigaroVox), la Suède a pris la tête de cette capitulation: elle
voit par exemple une «incitation à la haine» dans l'utilisation du terme
«terrorisme islamique». Le journaliste allemand Michael Stürzenberger a été
condamné à six mois de prison et 100 heures de travaux d'intérêt général
par le tribunal de Munich pour avoir publié sur sa page Facebook une photo du
grand mufti al-Husseini en compagnie d'Hitler ; le journaliste a été
déclaré coupable «d'incitation à la haine envers l'islam». En France, Marine Le
Pen vient d'être mise en examen pour avoir diffusé sur Twitter des photos
d'exactions de l'État islamique. L'assassinat de Sarah
Halimi, défenestrée en avril 2017 à Paris par un musulman hurlant
«Allah akbar», a été occulté avant que la justice n'accepte de reconnaître,
onze mois après, l'évidence de l'acte antisémite…
Ne pas stigmatiser
Mercredi, au
dîner du Conseil représentatif des institutions juives (Crif), le chef
de l'État a répété que le choix de Jérusalem comme capitale était «une
véritable erreur de Trump». S'il a évidemment dénoncé l'antisémitisme en
France, il l'a présenté comme une «résurgence», se gardant de parler de
l'antisémitisme musulman. Surtout, ne pas stigmatiser l'islam ou le Coran. Les
consignes de l'UE ont été bien comprises.
En fait, c'est l'utopie d'un
monde sans frontière qui rencontre son échec. À la claque italienne s'ajoute
celle de Trump, qui menace de relancer le protectionnisme économique. Un autre
monde se profile. L'EU va devoir s'y plier.
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Législatives en Italie : la défaite de Bruxelles (06.03.2018)
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Christophe
Bouillaud voit dans les élections italiennes de dimanche la confirmation d'un
mouvement général de rejet, par les périphéries européennes, des mesures
d'austérité budgétaire et de la politique migratoire de Bruxelles. Avec Matteo
Renzi, c'est aussi toute la social-démocratie qui est mise en échec.
Ancien élève de l'École
normale supérieure, Christophe Bouillaud est professeur agrégé de science
politique à l'Institut d'études politiques de Grenoble depuis 1999 et agrégé de
sciences sociales. Il est spécialiste de la politique italienne.
FIGAROVOX.- À l'heure qu'il
est, on ne sait pas encore quel camp sera véritablement le vainqueur des
élections en Italie. Mais on connaît au moins le nom des perdants: Matteo
Renzi, et avec lui l'Union européenne et la social-démocratie…
Christophe BOUILLAUD.- Oui,
vous avez entièrement raison là-dessus: le Parti démocrate a largement perdu
l'élection, et avec lui tous les petits partis centristes, incapables de
dépasser à eux tous la barre des 5 %. Et c'est clair et net: l'électorat
italien a refusé l'Union européenne, et la politique économique qu'elle a
imposée à Matteo Renzi. Celui-ci a échoué, alors même que la relance économique
qu'il avait promise commençait à poindre ; le hic, c'est que la faiblesse de la
politique de redistribution a empêché tout l'électorat du Sud du pays de
profiter des retombées de ce regain.
L'électorat italien a refusé
l'Union européenne, et la politique économique qu'elle a imposée à Matteo Renzi
En outre, Matteo Renzi connaît là
un échec personnel, qui vient sanctionner sa manière de gouverner: il a tenté
d'imposer au parti démocrate un leadership plutôt de droite, à la façon de
Berlusconi: il a fait cavalier seul. Cela n'a pas plu aux petits chefs du
parti, qui sont partis dans leur coin pour fonder un autre organe politique
dont le nom était justement «Libres et égaux», et ce n'est pas un hasard! C'est
une référence évidemment à la Constitution italienne, mais également un désaveu
du modèle de gouvernance imposé par Renzi. Il a manqué aux démocrates un jeu
collectif, car Matteo Renzi s'est comporté comme un prince entouré de
courtisans, à mille lieues du modèle traditionnel des socio-démocrates en
Europe, et aussi de tous les partis de l'arc constitutionnel de la Ière
République (1946-1992) dont est issu l'actuel Parti démocrate. Or ces partis
(communistes, démocrates-chrétiens, socialistes, etc.) avaient toujours refusé
de se donner des chefs autocratiques à cause de la mémoire du fascisme contre
lequel ils avaient tous lutté de 1922 à 1945.
La ressemblance entre Matteo
Renzi et Emmanuel Macron est assez frappante de ce point de vue: même ligne
politique, et même propension à vouloir s'imposer comme l'unique leader de leur
courant… La chute de l'un est-elle un mauvais signal pour l'autre?
La différence tout de même, c'est
qu'Emmanuel Macron est à la tête d'un parti qu'il a lui-même créé et dont pour
le moment aucune dissidence crédible ne peut émerger! En revanche, là où la
chute de Matteo Renzi est un mauvais signal pour Emmanuel Macron, c'est du
point de vue économique: les Italiens ont exprimé un rejet massif des
politiques d'austérité, et ont censuré les partis qui n'avaient que ce modèle à
leur vendre. Si Emmanuel Macron persiste lui-même dans cette voie, à savoir
d'imposer l'austérité, il y a fort à parier qu'il finisse par connaître de
sérieux revers électoraux. Idem pour la libéralisation du marché du travail,
dont les résultats en Italie ont été médiocres et qui a fortement accentué le
mécontentement des électeurs.
Quels sont les points majeurs
de désaccord entre le peuple italien et la politique de Bruxelles?
J'en vois principalement deux, et
un troisième plus anecdotique. Mais tout d'abord, c'est une fois de plus
l'austérité qui a été massivement rejetée par les Italiens. Ils se sont
prononcés contre une politique conduite en fonction des critères de Maastricht,
c'est-à-dire le plafonnement à 3 % du déficit budgétaire annuel, qui ont
conduit Matteo Renzi à mener une politique très stricte avec un faible nombre
d'investissements publics. Les électeurs italiens, eux, souhaitent des
investissements publics plus nombreux et de plus grande envergure, tout en
augmentant la redistribution des revenus, et en limitant si possible la
fiscalité. Il y a donc un vrai conflit entre la politique économique de rigueur
budgétaire qu'exige Bruxelles, et qui a été conduite dans le pays depuis
l'arrivée au pouvoir de Mario Monti en 2011, et leurs attentes. D'ailleurs, les
grands journaux italiens, pourtant favorables à l'Union européenne, n'ont pas
manqué de relever l'incompatibilité entre les promesses électorales de tous les
partis importants et même du Parti démocrate de Matteo Renzi lui-même, et les
normes dictées par l'UE.
Le fonctionnement actuel de
l'Union européenne est largement défavorable aux pays méditerranéens comme
l'Italie ou la Grèce.
Il y a ensuite la question
migratoire, seconde raison du désaveu massif de l'Union européenne par les
Italiens. Ceux-ci ont l'impression, et à juste titre, d'avoir été laissés seuls
face à l'immigration. En effet, le maintien en vigueur du règlement de Dublin
qui détermine les responsabilités des Etats-membres en matière de demandes
d'asile permet aux pays limitrophes de l'Italie de fermer leurs frontières, et
les clandestins qui arrivent sur les côtes italiennes doivent faire leur
demande d'asile en Italie. En somme, le fonctionnement actuel de l'Union
européenne est largement défavorable aux pays méditerranéens comme l'Italie ou
la Grèce. Et les Italiens en veulent d'autant plus à la France, mais aussi au
Royaume-Uni, qu'ils leur reprochent d'avoir déstabilisé la Lybie et ensuite la
Syrie, précipitant ainsi une crise migratoire dont ils refusent aujourd'hui
d'assumer les conséquences, pour des raisons de politique intérieure.
Enfin, bien des Italiens sont
déçus pour ne pas dire plus de voir que la corruption des grands partis
européistes est toujours d'actualité, et n'a jamais été condamnée par les
autorités européennes. Bruxelles perd là une part de sa légitimité, car
l'Europe devait améliorer la gouvernance italienne et moderniser la vie
politique. Cette promesse-là aussi, l'Union européenne n'a pas su la tenir: la
politique italienne est toujours aussi navrante qu'auparavant. Je ne crois pas
par exemple que l'accueil fait par Jean-Claude Juncker en tant que Président de
la Commission à un Silvio Berlusconi, pourtant définitivement condamné, ait été
une bonne chose pour l'image de l'Europe en Italie.
Ces élections confirment-elles
que les eurosceptiques sont en train s'imposer de part et d'autre de l'Europe?
Il est indéniable en effet qu'il
y a actuellement une forte poussée de l'euroscepticisme dans l'Union. Celui-ci
provient des périphéries, aux marges de pays qui ont délaissé une partie de
leurs territoires: le Sud de l'Italie, le Nord de l'Angleterre, l'Est de
l'Allemagne et de la Pologne… Ces territoires sont ceux qui ont été touchés de
plein fouet par les vagues d'austérité partout en Europe. En réalité, pour
unifier une zone économique tout en conservant un équilibre entre les
territoires, il aurait davantage fallu faire des transferts de richesses depuis
les centres de ce nouvel espace économique vers les territoires marginaux. Et
cela, l'Union européenne le sait au moins depuis les années 1980, au cours
desquelles elle a mis en place des politiques de cohésion en faveur de
l'Espagne et du Portugal. Mais l'insuffisance de ces transferts fait
qu'aujourd'hui, en Italie comme ailleurs, les eurosceptiques ont le vent en
poupe et n'ont jamais été si proches du pouvoir… quand ils ne l'ont pas déjà
conquis.
Justement, le Mouvement 5
Étoiles est devenu le premier parti du pays, en arrivant en tête des élections
avec 32 % des voix. Le Front national avait connu une percée similaire en 2014,
arrivant en tête des élections européennes. Pourtant, cela ne lui a pas suffi
pour prendre l'Élysée… le M5S a-t-il malgré tout ses chances pour arriver au
gouvernement?
Je crois qu'il existe des
différences significatives entre le M5S et le Front national. D'abord, les
élections d'hier en Italie étaient des élections législatives, et la très forte
poussée du Mouvement 5 Étoiles est bien plus significative que le succès
électoral du Front national aux européennes, car le M5S s'implante ici
durablement au cœur de la vie politique du pays, au cœur des deux Chambres du
Parlement, comme il le fait déjà depuis son premier triomphe électoral de 2013.
Cet usage des outils du parlementarisme et de la vie politique ordinaire a été
d'autant plus facile qu'il n'est pas ostracisé comme peut l'être le FN. Le M5S
a parfois fait des happenings dans l'enceinte parlementaire, mais il a aussi
travaillé ses dossiers. Malgré la défection d'une partie de ses députés et
sénateurs élus en 2013, il a donc pu jouer pleinement son rôle d'opposition
tout au long de la législature, et de fait, il a tenu le choc et ne s'est pas
ridiculisé, ce qui n'allait pas de soi pour un parti de jeunes amateurs,
ignares en vie parlementaire. Cette normalisation explique sans doute qu'il se
soit donc maintenu électoralement, et qu'il ait même largement confirmé ses
bons résultats dans le Sud du pays. Il est aujourd'hui en Italie la seule forme
d'alternative «anti-système» de création récente qui existe encore: par un
phénomène darwinien, tous les autres mouvements qui ont essayé de se placer sur
ce créneau ont périclité. Ainsi, le M5S qui représentait-il y a peu un quart
des électeurs, obtient maintenant un tiers des voix. Cela va renforcer encore
sa présence au Parlement, où, même s'il était relégué dans l'opposition, il
pourra s'exercer encore plus à une vie parlementaire approfondie, mener un
travail d'opposition plus sérieux que celui du FN qui n'a pas eu de groupe à
l'Assemblée depuis 1986-88. Tout se passe en effet comme si le M5S n'avait
cessé de se professionnaliser depuis cinq ans, tandis que dans le même temps,
le FN n'a pas réussi à sortir de son amateurisme.
Le seul moment où il faudra
vraiment une majorité claire au Parlement, ce sera en novembre au moment du
vote du budget.
Pour le reste, l'issue politique
en terme gouvernemental de ces élections est aujourd'hui très incertaine et nul
ne peut se risquer à des pronostics. Ce qui est certain, c'est que le M5S va
revendiquer son droit à former un gouvernement, et, s'il n'y parvient pas, il
en rejettera la faute sur les autres partis, ce qui peut lui valoir des scores
encore meilleurs aux prochaines élections éventuellement organisées dans
quelques mois. S'il arrive au gouvernement, il voudra prendre des mesures dont
certaines sont peut-être moins radicales que ce que les commentateurs
politiques laissent parfois entendre: dans des domaines comme l'écologie par
exemple, le M5S est somme toute assez consensuel. Par contre, il faut bien se
rendre compte que ni la Ligue de Matteo Salvini, ni le M5S n'iront gouverner
l'Italie sans imposer une forme de rupture nette avec toute la période
commencée avec l'arrivée en novembre 2011 aux affaires de Mario Monti. Celle-ci
apparaît d'ailleurs avec le recul comme le moment clé de l'Italie
contemporaine, avec l'échec économique qu'elle a induit aux yeux d'une majorité
d'Italiens, et aussi avec la perte de légitimité de l'idée même de «gouvernement
technique». C'est d'ailleurs ce qui rend la situation politique compliquée:
personne ne veut du retour d'un «technicien» à la tête du gouvernement italien,
alors que, depuis les années 1990, ce fut la solution classique de décantation
en cas de blocage parlementaire.
À présent, je crois que rien ne
presse vraiment, car le gouvernement Gentiloni peut très bien se maintenir
encore un moment pour expédier les affaires courantes: à vrai dire, le seul
moment où il faudra vraiment qu'une majorité claire se constitue dans les deux
chambres du Parlement, ce sera en novembre au moment du vote du budget. C'est
donc la date butoir, et d'ici là, il y a tout le temps pour mener les
négociations… et même pour revoter une nouvelle fois ce printemps ou au début de
l'été, ce qui serait un autre coup de tonnerre dans le contexte italien.
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un nouveau monde: les monstres sont dans l'isoloir (1/3)
François d'Orcival: «L'instinct maternel face à la théorie du
genre» (09.03.2018)
CHRONIQUE - Même en situation de
détresse sociale, les femmes restent des femmes, c'est-à-dire des mères.
Le vent sibérien a cessé de
souffler depuis huit jours, alors on n'en parle plus. Mais les SDF ne se sont
pas évanouis, ni les plans d'hébergement d'urgence. Un détail devrait retenir
l'attention: le comportement des femmes dénombrées dans la catégorie des
mal-logés. Pourquoi? Parce qu'il ne ressemble en rien à celui des hommes. Il y
a là une réalité que les débats sur la théorie du genre et l'égalité
homme-femme occultent par réflexe idéologique: même en situation de détresse
sociale, les femmes restent des femmes, c'est-à-dire des mères.
Sous le vocable SDF sont
confondues deux populations: les «sans-domicile» et les «sans-abri». En
examinant le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre ou les notes de
l'Insee, il est facile d'obtenir des données chiffrées sur le sujet. Selon les
enquêtes les plus récentes, 143.000 personnes, françaises et étrangères,
hommes et femmes, adultes et enfants, sont classées «sans domicile», ce qui ne
veut pas dire «à la rue», mais hébergées par des services d'urgence, des
centres d'accueil, des logements provisoires, etc. Certaines ont un
emploi, même fragile, d'autres vivent du RSA, d'autres encore sont sans
ressources. Dans ce nombre figurent quelque 30.000 enfants et de plus en
plus de migrants demandeurs d'asile, ce qui a fait augmenter cette population
de 50 % en dix ans.
Le «sans-abri» est un
phénomène masculin
Les «sans-abri», quant à eux,
forment un groupe distinct de quelque 6000 personnes ; ce sont ceux
que les équipes du Samu social repèrent dans la rue, le métro, les squats, les
toits de fortune. Or, si les femmes représentent près de 40 % des «sans-domicile»,
elles ne sont plus que 5 % des «sans-abri». Le «sans-abri» est un
phénomène masculin.
Ce qui signifie que les femmes
cherchent une protection, en particulier pour les enfants, et la sécurité.
Souvent victimes de violences et de ruptures conjugales, elles réclament un
abri apaisant. Et de l'hygiène. C'est pourquoi elles n'hésitent pas à appeler
le 115 (l'appel d'urgence sociale) de même qu'elles recherchent un emploi, quel
qu'il soit, parce qu'elles ont en tête de retrouver de la stabilité. N'en
déplaise aux théoriciens du genre: l'instinct maternel existe bien, et avec lui
le besoin d'un retour à la famille, même après sa destruction.
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Jean-Christian Petitfils : «La vertu de l'histoire de France
est de montrer que notre pays a connu pire» (09.03.2018)
INTERVIEW - Passionné d'histoire
des idées politiques et auteur de biographies de référence des rois de France
du Grand Siècle, Jean-Christian Petitfils publie une volumineuse synthèse de
l'histoire de France. Près de 1200 pages pour raconter 1200 années du passé
français : un livre qui s'inscrit sans fard dans la tradition du «roman
national».
Il a publié plus de trente livres
d'histoire et de science politique. Une œuvre colossale que ce multidiplômé
(sciences politiques, droit public, histoire-géographie) a longtemps poursuivie
en parallèle à une carrière privée dans le secteur bancaire. Fait rare, la qualité
de ses travaux, fondés sur d'authentiques recherches dans les archives, a
conduit Jean-Christian Petitfils, qui était au départ un historien du dimanche,
à jouir de la même légitimité qu'un professeur d'université. D'abord auteur de
monographies d'histoire des idées (La Droite en France, Le
Gaullisme, Les Socialismes utopiques), il s'est ensuite
orienté vers l'étude de l'Ancien Régime avec, notamment, une série de
biographies des rois Bourbons (Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI) qui
l'ont rendu célèbre. Sortant de sa spécialité, il a également publié une
biographie de Jésus qui a été un best-seller et qui a suscité de nombreux
débats dans les milieux chrétiens. Avec
son Histoire
de la France ,
Jean-Christian Petitfils réalise un projet dont il rêvait depuis dix ans.
Votre Histoire de la France
est peu ou prou votre trentième livre. Etait-ce un projet ancien que vous avez
longtemps mûri?
Jean-Christian Petitfils. - Il
arrive un moment où l'historien, après avoir écrit un certain nombre
d'ouvrages, est tenté par ce genre de synthèse qui permet de suivre les vastes
mouvements de l'histoire à travers les siècles. Mais, pour cela, il est
nécessaire de prendre de la hauteur et de mûrir le projet. J'ai commencé à
songer à écrire une histoire de France après la parution en 2008 de mon
Louis XIII, qui était ma troisième biographie d'un grand roi après Louis
XIV et Louis XVI, mais je n'ai commencé à prendre la plume qu'à
l'été de 2014, ayant fini d'écrire mon livre sur Louis
XV. Cette Histoire de la Francereprésente par conséquent
trois ans et demi de travail.
Vous revendiquez la formule de
«roman national». Mais peut-on faire de l'histoire scientifique en recourant à
ce terme de «roman»?
On peut certes se contenter de
faire une histoire scientifique et universitaire de la France, mais on ne
saisit pas, avec cette approche, ce qu'est l'âme de la France. Car l'histoire
de notre pays, c'est aussi la beauté de ses paysages, de ses villages, de ses
églises, de ses cathédrales, «notre dame la France» ou «la Madone aux fresques
des murs», comme disait de Gaulle. Sans trahir la vérité et les acquis de la
recherche, une bonne histoire joue également sur la corde de l'imaginaire. Il
importe d'allier, en quelque sorte, le souffle de Michelet et la science de
l'école des Annales. Sans emboucher les trompettes d'un patriotisme cocardier,
il n'y a rien de honteux à demander à l'histoire de transmettre un amour vrai,
profond et sincère du pays. Pour aimer la France, disait la philosophe Simone
Veil, il faut sentir qu'elle a un passé.
«Sans emboucher les trompettes
d'un patriotisme cocardier, il n'y a rien de honteux à demander à l'histoire de
transmettre un amour vrai, profond et sincère du pays»
L'Histoire mondiale de la
France publiée l'an dernier sous la direction de Patrick Boucheron se flatte au
contraire de tourner le dos au roman national. Pourquoi cette déconsidération
du récit historique et, concomitamment, du cadre national chez beaucoup
d'historiens?
C'est un phénomène complexe où
plusieurs éléments se conjuguent. Le sentiment de déclin de la France après la
Seconde Guerre mondiale. Les séquelles de la guerre d'Algérie qui ont légué à
toute une génération un sentiment de culpabilité né de l'histoire de la
colonisation. La construction européenne qui a fait croire que les
Etats-nations pouvaient être dépassés. Les crispations politiques plus récentes
liées à la quasi disparition du gaullisme comme force politique et, de l'autre
côté, de la gauche patriote. L'accaparement du thème de l'identité nationale
par l'extrême droite et parfois la droite qui, par contrecoup, a provoqué le
rejet d'une histoire nationale qui faisait autrefois consensus. Et enfin
l'affirmation d'un contre-modèle pernicieux fondé sur le multiculturalisme et
le communautarisme, qui réduisent notre héritage à un vague vivre-ensemble qui
est en réalité le contraire de notre histoire.
Pierre Nora lançait récemment
cet avertissement dans les colonnes duFigaro Magazine: «La dictature de
la mémoire menace l'Histoire.» Partagez-vous ce jugement?
Oui. L'instrumentalisation du
devoir de mémoire par la morale veut réduire notre destin à un affrontement
manichéen des forces du Bien et du Mal, et faire de l'histoire un champ de
repentance permanent, dans le registre convenu de l'indignation, de la compassion
et du dolorisme. Je n'ignore rien des pages noires de notre passé, mais on ne
peut pas prendre en permanence le point de vue des victimes pour récrire toute
l'histoire.
Il y a dix ans, la France
s'était divisée à l'occasion d'un grand débat sur l'identité nationale. Quels
sont, selon vous, les grands traits de l'identité nationale française?
«N'en déplaise à certains, il
existe une identité nationale française, qui est une identité ouverte, et qui,
mis à part quelques périodes sombres, a nourri le génie de notre pays.»
N'en déplaise à certains, il
existe une identité nationale française, qui est une identité ouverte, et qui,
mis à part quelques périodes sombres, a nourri le génie de notre pays. Dans mon
livre, j'ai essayé de montrer que la France s'est bâtie sur quelques piliers
fondateurs. J'en dénombre cinq, même s'il serait possible d'en énumérer
davantage. Premièrement, un Etat-nation souverain et centralisé, dont la langue
française est un facteur structurant, même s'il est apparu relativement tard
puisque la France du peuple a longtemps parlé des langues régionales et des
patois. Deuxièmement, un Etat de justice au service du bien commun. Ce
caractère n'est pas donné à tous les pays puisque l'Angleterre ou les
Etats-Unis se sont plutôt construits sur le thème des libertés de l'individu.
Au fil du temps, ce pilier de la justice a évolué vers la notion de justice
sociale. Troisièmement, un Etat laïque aux racines chrétiennes. La laïcité,
dans cette perspective, n'est pas seulement la laïcité de 1905, c'est aussi le
combat qui a été mené par les rois de France pour éviter au pouvoir sacerdotal
d'envahir le pouvoir politique. Quatrième pilier, un Etat marqué par des
valeurs universelles. Ce trait est fondamental: la France n'est pas un petit
pays marginal sur la scène mondiale, c'est un grand pays marqué et porté par
des valeurs à vocation universelle. Hier la chrétienté, quand la France était
considérée comme la fille aînée de l'Eglise ; aujourd'hui les droits de
l'homme, en dépit des dérives qui peuvent résulter d'un certain
droit-de-l'hommisme. Demain, peut-être, ce sera l'écologie planétaire où, là
aussi, la France peut prendre la tête d'une cause mondiale. En bref, la France
a toujours porté un idéal même si, ne soyons pas hypocrites, l'exaltation de la
nation se profile vite derrière ces valeurs universelles. Cinquième pilier,
enfin, un Etat multiethnique mais assimilateur. La France n'est pas une ethnie,
bien sûr, mais la nation s'est forgée à partir de provinces dont les cultures
étaient extrêmement diverses, puis, à l'époque moderne, en assimilant des
individus venus d'un peu partout. Mais ces cinq piliers, aujourd'hui, se
lézardent.
Toute histoire a un début.
Pourquoi faites-vous commencer votre Histoire de la France en 841?
Le samedi 25 juin 841 a lieu
dans le pays d'Auxerre une bataille fratricide qui oppose les petits-fils de
Charlemagne. Une stèle érigée en 1860 par Napoléon III commémore
l'événement: «La victoire de Charles le Chauve sépara la France de l'empire
d'Occident et fonda l'indépendance de la nationalité française.» Pour moi,
c'est le point de départ, prélude au traité de Verdun qui, en 843, attribue à
Charles le Chauve la Francie occidentale, soit une grande part de la France
actuelle. La France ne naît pas avec Vercingétorix ni avec Clovis, mais du
partage de l'Empire carolingien et de la volonté des derniers carolingiens et
des premiers capétiens d'édifier un royaume chrétien. Ce nouveau royaume s'est
édifié, évidemment, en inscrivant dans son corpus mémoriel des figures du
passé, Clovis, Pépin le Bref ou Charlemagne. Quant au sentiment national, il
n'apparaît que beaucoup plus tard. Un de ses premiers repères est la bataille
de Bouvines, en 1214, mais encore cela ne concerne-t-il que la France du Nord.
Vous êtes spécialiste de
l'Ancien Régime. Mais y a-t-il d'autres périodes de notre histoire qui vous
passionnent?
Avant d'aborder et d'approfondir
l'étude du Grand Siècle, je m'étais intéressé à la bataille des idées
politiques, de la Révolution à nos jours, dans le sillage de François Furet,
René Rémond, Raoul Girardet, Jean Touchard, et j'avais écrit plusieurs ouvrages
de synthèse sur la droite, l'extrême droite, le gaullisme, les socialismes
utopiques. Dans mon Histoire de la France, j'ai pu intégrer les
réflexions que j'ai tirées de cette étude.
Pouvez-vous citer trois
moments glorieux de l'histoire de France? Et trois pages sombres?
«Il ne faut pas faire de la
nation un absolu. La France est une communauté naturelle nécessaire et
bienfaisante, mais pas une idole.»
Trois? Dans les deux cas, on
pourrait en citer bien davantage. Pour l'aspect glorieux, mais je dirais plutôt
harmonieux, je retiendrai le beau XIIIe siècle, la France de Saint Louis:
c'est la période de construction des cathédrales, une époque de foi profonde,
sereine, et le règne d'un roi splendide, Louis IX. Ensuite la période Louis
XIV: le zénith de la puissance et du rayonnement culturel et artistique de la
France, même s'il y eut des aspects négatifs comme la révocation de l'édit de
Nantes ou la traite négrière. Et troisième choix, à l'époque moderne, la brève
présidence de Georges Pompidou, qui représente la volonté d'allier la grandeur
de la France, sa transformation en grande nation industrielle et le bonheur des
Français.
Quant aux pages sombres, je
citerai les périodes où la légitimité du pouvoir central a traversé une crise.
L'époque du traité de Troyes, en 1420, quand la France est occupée, dépecée, et
livrée à l'autorité anglaise. Ensuite la période de la huitième guerre de
Religion, quand le pays est abandonné aux luttes de factions, chaque camp, dans
cette guerre civile, ayant ses extrêmes qui cherchent des appuis à l'étranger.
Troisième exemple, à l'époque moderne, l'histoire tragique du régime de Vichy,
où les rares éléments initiaux de souveraineté laissés par l'armistice sont
engloutis par la collaboration, le jeu trouble de Laval et de Darlan, la
coopération d'une partie de la police et de l'administration dans la
déportation des Juifs, les exactions criminelles de la Milice. Mais ces trois
pages sombres ne peuvent faire oublier une quatrième: la Terreur de 1793-1794,
ce régime totalitaire contredisant non seulement le message des droits de
l'homme de 1789, mais toute la tradition française d'équilibre des pouvoirs,
car la monarchie classique a connu une forme d'équilibre des pouvoirs.
Si toute histoire a un début,
elle a aussi une fin: la France peut-elle mourir? Quelles sont vos raisons
d'inquiétude sur son avenir? A contrario, quels sont vos motifs d'avoir foi en
l'avenir du pays?
La France peut mourir et, à
l'échelle des temps cosmiques, c'est même une certitude. C'est pourquoi il ne
faut pas faire de la nation un absolu. La France est une communauté naturelle
nécessaire et bienfaisante, mais pas une idole. A l'évidence, ses piliers fondateurs,
aujourd'hui, sont attaqués, érodés. Là encore, les facteurs négatifs sont
nombreux et divers. Evoquons la dérive des institutions de la
Ve République, notamment avec le quinquennat. Les excès de la construction
européenne qui, n'ayant pas voulu s'arrêter à une Europe des nations, a
accouché d'un système bancal faisant coexister un mécanisme fédéraliste et une
logique d'accords entre Etats, compromis insatisfaisant qui conduit une large
partie des opinions publiques, dans les grands pays fondateurs de l'Union, à
rejeter l'Europe. Citons encore les excès de la décentralisation, et je ne
parle pas seulement de la Corse. La montée de l'islamisme radical. La perte de
maîtrise de nos frontières. L'échec relatif de l'assimilation, dès lors qu'une
part grandissante de la jeunesse d'origine immigrée refuse de se reconnaître
comme française, ce qui devient très préoccupant. Et la division profonde entre
la France des élites et la France périphérique. J'ajouterai en dernier une
crise que nul n'évoque: notre recul démographique.
Ce tableau négatif est à
compenser par la liste des atouts dela France. Notre pays est la sixième
puissance économique du monde. Il possède un siège au Conseil de sécurité des
Nations unies, et demeure une puissance nucléaire majeure. La France dispose
d'ingénieurs de très haut niveau, de laboratoires de pointe, d'une recherche
scientifique excellente, d'un système de santé envié. Notre pays possède un
rayonnement considérable dans le monde. Quand surviennent des attentats à
Paris, toute la planète entre en ébullition. Notre pays est encore la première
destination touristique au monde.
Il suffirait de peu de choses
pour modifier la donne: supprimer les 35 heures, encourager la création de
grandes PME exportatrices, rétablir l'école dans sa mission fondamentale de
transmission des savoirs. Et, pour les Français, changer de mentalité en
renonçant à la sinistrose… La vertu de l'histoire de France, c'est de permettre
de comprendre que, malgré la gravité de la crise actuelle, notre pays a connu pire.
Histoire de la France. Le
vrai roman national, de Jean-Christian Petitfils. Fayard, 1 152 p.,
29 €.
La rédaction vous
conseille :
- Jean-Christian
Petitfils: le renouveau du roman national
- Histoire
de la France: des siècles de controverses
Une fabrique de «fake news» aux portes de l'Europe
(08.03.2018)
La ville de Veles, en Macédoine,
abrite une véritable industrie des fausses nouvelles, où certains sites
ressemblant comme deux gouttes d'eau à des sites d'actualité permettent à des
éditeurs de gagner jusqu'à 2 500 dollars par jour.
La petite ville de Veles, en
Macédoine, est tristement célèbre aux États-Unis. C'est une fabrique de «fake
news», de fausses informations diffusées par des sites Internet qui ont
capté une audience très importante, initialement grâce à des comptes Facebook
et Twitter de personnes imaginaires, créés sans doute dans la même ville de
l'ex-Yougoslavie. Quelques mois avant l'élection de Donald Trump aux États-Unis
en novembre 2016, le site américain BuzzFeedet celui du quotidien britannique The
Guardian ont révélé que cette ville hébergeait une centaine de
sites Internet pro-Trump.
Sur le site bidon politicspaper.com,
aujourd'hui heureusement disparu, on pouvait à l'époque lire «Bill Clinton a
admis être un meurtrier» ou «Michelle Obama trompait son mari avec Eric
Holder», l'ancien procureur général des États-Unis. Il s'agissait, bien sûr, de
fausses nouvelles.
David Remnick, journaliste
au New Yorker, raconte que pendant la dernière campagne, Barack
Obama et son directeur politique, David Simas, «ont discuté presque de manière obsessionnelle d'un article
de BuzzFeed qui décrivait une ruée vers l'or numérique dans la
ville de Veles, quand un groupe de jeunes gens de la ville avait publié plus
d'une centaine de sites pro-Trump, avec des centaines de milliers de
“followers” sur Facebook. Les sites avaient des noms comme WorldPoliticus.com
ou TrumpVision365.com, et la plupart des informations étaient sensationnelles,
recyclées de sites alternatifs d'extrême droite». D'autres rumeurs
fantaisistes, comme «le pape François soutient Trump», y étaient aussi
annoncées.
«Le nouvel écosystème des médias
veut dire que tout est vrai et rien n'est vrai», ajoute le grand hebdomadaire
américain, en citant l'analyse de Barack Obama sur les réseaux sociaux. En
apparence, les pages conspirationnistes ressemblent à s'y méprendre aux vraies
pages Facebook ou à de véritables sites Internet. Car le mécanisme de la
rémunération, notamment à travers Google AdSense, en quelque sorte la régie
publicitaire du premier site de recherches sur Internet, dépend du nombre de
visites. Plus il y a d'internautes qui s'y connectent, en particulier
américains, plus la rémunération publicitaire reversée par Google augmente.
D'où l'intérêt de propager des rumeurs pour attirer le chaland.
Des cours payants
Et à Veles, il s'agit d'une
véritable industrie, a montré également une enquête de CNN. Car non seulement les faux sites
ont permis à certains de leurs éditeurs de gagner jusqu'à 2500 dollars par
jour, mais des cours payants sont organisés pour enseigner les techniques pour
créer les profils de personnages imaginaires. L'un des professeurs de ces
méthodes, Mirko Ceselkoski, a expliqué à CNN qu'il y a une large communauté de
jeunes gens qui n'ont rien à faire, et qu'il leur promet une rémunération
mensuelle d'un millier d'euros. Et ce dernier d'estimer avoir au moins une
centaine de ses élèves qui ont construit de faux sites d'informations sur la
politique américaine, depuis Veles.
Face à ces mécanismes pervers,
Google et Facebook ont mis en place des solutions techniques pour débusquer les
faux sites et les comptes imaginaires, en recoupant les informations. Mais les
techniques évoluent dans les deux sens. Les experts en Macédoine espèrent
contourner les contrôles pour poursuivre leur commerce, lucratif, de la rumeur.
De la même manière, il est
légitime de se demander si la coopération de Twitter à la substantielle analyse
scientifique publiée dans Science n'est pas un moyen pour le réseau social de
tenter de se dédouaner?
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«Fake news» : «Les réseaux sociaux ne se soucient pas de ce
que nous partageons» (08.03.2018)
INTERVIEW - Benjamin Sonntag,
cofondateur de la Quadrature du Net, fait le point sur le phénomène des
« fake news ».
LE FIGARO. - Une grande étude
du MIT vient de montrer que les informations fausses se propagent plus vite que
les vraies sur Twitter. Est-ce une surprise?
Benjamin SONNTAG. - Pas
vraiment. Et je pense que c'est vrai depuis longtemps, et pas seulement sur
Twitter. On m'a appris, quand j'étais enfant, qu'il fallait beaucoup plus
d'énergie pour corriger une idée fausse que pour en propager une vraie. Et ce
n'est pas surprenant puisque les réseaux sociaux, comme Twitter ou Facebook,
sont conçus pour capter notre attention, pour, au final, nous exposer de la
publicité, sans se soucier que nous partagions des idées fausses ou vraies.
La désinformation n'est pas
nouvelle. Pourquoi le problème prend-il autant d'ampleur sur Internet?
Benjamin Sonntag.- Crédits photo
: collection personnelle
Ce qui change, c'est que la
propagation peut se faire de manière beaucoup plus rapide qu'avant. Avec
Gutenberg, il a fallu apprendre à lire, car tout le monde pouvait enfin lire
des livres. Maintenant, avec Internet, tout le monde peut écrire. La liberté
d'expression est enfin accessible à tous. Mais comment fait-on en société quand
tout le monde peut écrire, et peut aussi écrire n'importe quoi? Il faut donc
qu'on apprenne à se méfier, et à développer un sens critique.
Le projet de loi du
gouvernement contre les «fake news» sera-t-il efficace?
On
ne va pas corriger les «fake news» avec des nouvelles lois. La loi de
1881 sur la liberté de la presse contient déjà un délit de fausses nouvelles,
qui pourrait parfaitement s'appliquer sur Internet et sur les réseaux sociaux.
La justice pourrait faire appliquer cette loi sur Twitter et Facebook, mais,
malheureusement, je pense qu'elle n'en a ni le temps ni les moyens.
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Sur Twitter, les «fake news» voyagent plus vite que les
vraies informations (08.03.2018)
INFOGRAPHIE - Des chercheurs du
MIT publient une grande étude sur la propagation de la désinformation sur le
réseau social.
Les rumeurs voyagent plus vite et
plus loin que des informations exactes et vérifiées sur Twitter. Tel est le
principal résultat d'une étude sans précédent, publiée dans la revue Science du
9 mars et réalisée par trois chercheurs du Massachusetts Institute of
Technology de Cambridge (MIT, États-Unis), dont deux travaillent au prestigieux
Media Lab et un troisième à l'école de management Sloan. Une étude importante
dans le contexte des débats sur l'impact des «fake news» sur les résultats des
récentes élections, aux États-Unis comme en Europe, et au moment
ou le gouvernement français prépare une loi pour tenter d'enrayer le phénomène.
» LIRE AUSSI - Françoise Nyssen: «La loi contre les “fake news” est nécessaire
pour protéger notre démocratie»
L'étude du MIT porte sur 126.000
histoires diffusées via Twitter de 2006 à 2017. Des sujets dont la
véracité a été authentifiée ou infirmée par six organisations de «fact
checking», c'est-à-dire qui vérifient si le fait propagé est exact, erroné ou
entre les deux (comme Snopes.com ou Factcheck.org). Ces organisations peuvent
classer une information comme étant mixte, c'est-à-dire à peu près vraie ou à
peu près fausse. C'est notamment le cas si un chiffre diffusé est trop arrondi
par rapport à ce qui a été mesuré, tel un taux de chômage dans un pays annoncé
à 10 % alors que sa valeur réelle est de 11,9 %.
Première validation
scientifique du phénomène
L'étude est à la fois très
étendue dans le temps, depuis la naissance du site de «microblogging», et
remarquable pour la quantité de données compilées. Les chercheurs ont étudié la
propagation en cascade, par partages successifs d'un internaute à l'autre, de
126.000 informations par 3 millions de personnes diffusées plus de
4,5 millions de fois. Fait rarissime, le média social a coopéré avec les
chercheurs.
«L'étude est originale. C'est la
première validation scientifique d'hypothèses qui pouvaient être faites
intuitivement mais que personne n'avait pu vérifier à une telle ampleur»,
souligne Ioana Manolescu, directrice de recherche de l'Inria au centre de
Saclay (Essonne). Et d'ajouter: «Les scientifiques ont obtenu une coopération
inédite du réseau social. L'ampleur du “corpus” est considérable. Il leur a été
possible d'avoir accès à des données incroyables. Notamment quels tweets ont
été diffusés et lus par les utilisateurs du réseau social pendant les 60 jours
précédents chaque tweet étudié. Les chercheurs ont donc pu calculer une sorte
de distance à la nouveauté d'une information qu'une personne allait renvoyer.
C'est-à-dire mesurer si un tweet est nouveau ou pas pour une personne qui
renvoie un message», précise la chercheuse, experte du domaine. C'est donc la
bonne méthode qui aurait été suivie par les chercheurs.
Lourdes conséquences
Les fausses nouvelles voyagent
plus vite, plus loin, vers davantage d'utilisateurs du réseau social et sont
propagées un bien plus grand nombre de fois que les informations justes. Ainsi,
les chercheurs du MIT ont pu calculer que les fausses informations sont
renvoyées 70 % de fois plus souvent que celles qui sont exactes, et cela
indépendamment de l'âge et de la qualité de l'émetteur du tweet. Transmettre
une rumeur inspire à ses émetteurs une plus grande surprise et un plus grand
dégoût qu'un fait avéré.
L'effet est le même pour les «bots», ces robots qui
renvoient automatiquement des rumeurs pour tenter d'influencer l'opinion
publique lors d'élections. Il y a une multitude d'exemples: notamment sur le
supposé «état de démence» de la candidate Hillary Clinton. Par ailleurs, un
tweet d'une fausse explosion qui aurait blessé Barack Obama a fait perdre 130 milliards
de dollars à la capitalisation boursière de Wall Street.
Les chercheurs notent, bien sûr,
que le pic d'usage de Twitter s'est produit au moment des élections américaines
de 2012 et de 2016. Et que les fausses rumeurs sont propagées indépendamment du
nombre de suiveurs et de l'activité d'un utilisateur du réseau social.
L'éducation, seul rempart
En France, Emmanuel Macron
souhaite réglementer la diffusion de rumeurs pendant les périodes électorales.
Mais selon l'étude, une telle ambition semble impossible. Une fois encore, la
technologie semble dépasser les objectifs de la loi. En 5000 minutes, soit 3,5
jours, une information vraie est rediffusée le long d'une chaîne de 10 à 11
personnes, alors qu'un tweet d'une rumeur est retransmis plus de 20 fois! En
deux jours, le mal est fait, la mauvaise rumeur a déjà atteint son but de
déstabilisation. Des délais si brefs qu'il sera impossible de réagir à temps
pour supprimer les tweets inquiétants. L'éducation serait l'un des meilleurs
remparts à ce phénomène.
Toutefois, cette publication doit
être considérée avec prudence. «Il peut y avoir un biais. L'étude porte
uniquement sur les tweets qui ont fait l'objet d'un “fact checking”. Or les
choses évidentes et vraies comme “Trump rencontre Macron à Paris” ne sont pas
vérifiées par les grandes organisations de vérification des informations»,
remarque Ioana Manolescu. Conscients de cette difficulté, les chercheurs ont
tenté de confirmer leurs résultats en sélectionnant 169 rumeurs non ciblées par
le «fact checking». Mais est-ce que l'algorithme utilisé pour cette opération
n'était pas lui-même un peu orienté pour détecter en priorité les rumeurs?
Il reste que Twitter est par
essence, comme les autres médias sociaux, une voie de diffusion alternative aux
médias traditionnels. N'étant pas réglementés, ils propagent davantage de
ragots. Enfin, comme le rappelle la chercheuse de l'Inria, «les éditeurs de
réseaux sociaux ont l'habitude de dire qu'ils ne sont pas un média, mais
seulement un médium».
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Le Livre des sentences de l'inquisiteur Bernard Gui: la véritable figure de
l'Inquisition (08.03.2018)
Le livre des sentences du plus
célèbre des représentants de l'institution médiévale est réédité. L'occasion de
mieux saisir la mentalité d'un homme d'Église qui n'était pas le fou assoiffé
de sang véhiculé par l'imagerie populaire.
Qui était vraiment Bernard Gui,
le grand inquisiteur mis en scène par Umberto
Eco dans Le
Nom de la Rose ? Ce personnage n'a nullement été pris au
hasard par le grand romancier, spécialiste du bas Moyen Âge. Celui-ci a choisi
de donner à la figure de l'inquisiteur dans son roman le nom et les traits du
plus célèbre des représentants de la Sainte Inquisition médiévale. Certes,
Bernard Gui œuvra surtout dans le sud de la France où cette institution mise en
place par le
pape Innocent III, l'un des plus grands juristes de son temps, fut
particulièrement active contre l'hérésie cathare.
Bernard Gui était né près de
Limoges et il se montra particulièrement actif à une époque où les
«inquisiteurs de la dépravation hérétique», comme on les appelait, ne
rencontraient plus de contestation sérieuse. Les frères franciscains comme
Bernard Délicieux avaient remis en cause le pouvoir de la Sainte Inquisition,
faisant preuve d'une grande compréhension à l'égard des «chrétiens à problème».
Ils avaient dénoncé l'usage de la torture et pu faire triompher un temps l'idée
- très moderne - qu'il «n'y a dans ce pays d'autres hérétiques que ceux que les
inquisiteurs eux-mêmes font hérétiques».
Bernard Gui cherche avant tout
le repentir et, à lire ses sentences très amplement motivées, on découvre qu'il
n'a de cesse d'essayer de sauver celui qui s'égare.
Mais cette résistance avait cédé
et l'Inquisition dominicaine l'avait emporté. Du reste Bernard Délicieux sera
condamné par Bernard Gui, non pour hérésie, mais pour «entrave à l'office d'inquisition».
La figure de Gui a incarné l'horreur d'une religion aveugle et il est
indéniable que le film de Jean-Jacques
Annaudrenforce cette vision maléfique tandis que le roman d'Eco
souligne de façon plus juste la complexité du personnage. La publication des
sentences de cet inquisiteur le plus célèbre de son temps permet de mieux
saisir la mentalité de cet homme d'Église qui n'était pas le fou assoiffé de sang
qu'une imagerie populaire, surtout véhiculée au XIXe siècle en se référant
plutôt à l'Inquisition espagnole de la Renaissance (qui fut bien plus aveugle),
a véhiculé.
L'inquisiteur médiéval cherche à
exterminer l'hérésie mais non les fidèles et il tente de ramener avant tout les
«brebis égarées» à l'orthodoxie, pesant soigneusement les fautes et les peines.
Si d'autres inquisiteurs ont pu abuser de leur pouvoir, souligne Julien Théry
dans la préface de cette édition revue et augmentée des sentences qu'il a
traduites en français, Gui reste l'un des plus sensés il cherche avant tout le
repentir et il n'a de cesse, peut-on voir dans ces sentences très amplement
motivées (l'Inquisition marquera un grand progrès dans la procédure
judiciaire), d'essayer de sauver celui qui s'égare.
- Crédits photo : Biblis
Il est rare qu'il suggère à
l'autorité civile de prononcer une peine mortelle (l'Inquisition ne condamne
pas à mort directement). Seules 6,7% des condamnations prononcées par Bernard
Gui conduisent à des peines de mort, ce qui est au final fort peu. Et Gui sait
châtier ceux qui instrumentalisent la religion. Plusieurs sentences visent ceux
qui ont accusé faussement un parent ou un voisin d'hérésie pour s'en
débarrasser. Au passage, ce livre des sentences offre un intéressant panorama
des «hérésies» qui existaient alors en Europe, depuis les Cathares jusqu'aux
Vaudois en passant par les «manichéens» ou les «béguins». L'ombre qui continue
à planer sur cet inquisiteur est propre à toute prétention au monopole de la
Vérité, ce qui est un des traits de toute religion, d'où leur menace en
politique. Gui le résume dans une de ses sentences contre un faux témoin, Joan
de la Salvetat: «Tu as travesti la vérité - laquelle est seule considérée et
recherchée en matière de foi.»
● Le
livre des sentences de l'inquisiteur Bernard Gui , préface de
Julien Théry, CNRS, coll. «Biblis», 304p., 10€.
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Macron au Crif : l'antisémitisme est «le déshonneur de la
France» (07.03.2018)
VIDÉO - Le chef de l'État est
venu hier soir rassurer la communauté juive de France lors du traditionnel
dîner annuel du Conseil représentatif des Institutions juives de France.
L'an passé, c'était un Emmanuel
Macron, candidat, qui fut reçu avec beaucoup d'égard au dîner
du Conseil représentatif des Institutions juives de France, le Crif.
Mercredi soir, il y a été chaleureusement accueilli en président de la
République, accompagné de son épouse et de nombreux ministres, applaudi par
1 100 personnes, responsables politiques, économiques, culturels et
religieux sans oublier une trentaine d'ambassadeurs.
Emmanuel Macron a fait alors
part d'une forte détermination pour rassurer la communauté juive qu'il sent
«inquiète»
Il s'est dit «ému» en commençant
son discours situé dans le contexte européen, Allemagne, Italie, où soufflent
des «vents mauvais» et des «passions tristes» qui «existent dans notre pays».
Car, a-t-il confessé, «nous avons collectivement cru, à tort, que
l'antisémitisme avait définitivement reculé dans notre pays. Et même face à ces
crimes, certains ont pendant trop longtemps commis l'erreur, la faute morale
même, du déni. Or la réalité est là, elle est incontestable. Nous avons compris
avec effroi que l'antisémitisme était toujours vivant».
Le président a alors parlé d'un
«échec» devant une telle «résurgence» qu'il ne considère pas «réductible» au
seul conflit israélo-palestinien. Cette montée de l'antisémitisme est «plus
grave, plus installée» et «tous les Républicains doivent le combattre parce que
c'est cela qui a fait chuter la République» et que «jamais la France ne renoncera
jamais aux juifs».
Emmanuel Macron a fait alors part
d'une forte détermination pour rassurer la communauté juive qu'il sent
«inquiète»: «Notre réponse doit être implacable. La France ne serait plus
elle-même si nos concitoyens juifs devaient la quitter parce qu'ils ont peur.»
Et «jamais nous ne faiblirons, dans la
dénonciation de l'antisémitisme et dans la lutte contre ce fléau.
Il n'y a là aucun accommodement, aucun interdit de langage, aucune cécité
possibles. (…) Il est le déshonneur de la France».
Ajoutant encore : «Je le redis ce
soir devant vous, avec toute la force d'un engagement public: il ne saurait y
avoir demain ou après-demain le moindre renoncement de l'État, le moindre
abandon des familles juives de France». En effet, «la France est fière de
compter en son sein des concitoyens de confession juive et ne se résoudra
jamais aux torts qui leur sont faits à raison de cette confession. Jamais.»
Parmi les mesures, le président
de la République a annoncé que le «recueil des plaintes», notamment pour «mieux
caractériser» les actes antisémites, serait amélioré. Pour ce qui est de la
montée de l'antisémitisme sur internet, le président Macron a assuré que tout
en s'inspirant du modèle allemand, il voulait que ce soit au niveau «européen»
qu'une modalité de répression juridique de l'antisémitisme soit décidée et mise
en œuvre.
«La sécurité de notre allié
israélien est une priorité absolue, qui n'est pas négociable, je le répète ici
avec la plus grande fermeté»
Abordant ensuite la question
sensible d'Israël, et de Jérusalem, le président Français a insisté - quitte à
déplaire à la salle qu'il a prévenue - sur le «dialogue» entre les deux
parties, Israël et les Palestiniens, en lien avec les États-Unis mais sans
pression unilatérale. Car «la sécurité de notre allié israélien est une
priorité absolue, qui n'est pas négociable, je le répète ici avec la plus
grande fermeté», notamment face à la problématique de l'Iran.
Évoquant enfin, en sortant de son
discours, l'affaire de l'écrivain Céline, Emmanuel Macron n'a pas vu possible
«une police morale de l'édition», mais «nous n'avons pas besoin de ces
pamphlets» pour connaître cet auteur.
Dans son discours d'accueil, le
président du Crif, Francis Kalifat, avait choisi pour cette année de ne rien
éluder du tableau sombre de la situation de la communauté juive en France. «Il
est grand temps de restaurer l'autorité de l'État partout en France», a-t-il
demandé, appelant «une politique de tolérance zéro» et des «sanctions
exemplaires et dissuasives» pour contrer «l'antisémitisme du quotidien» qui
«prospère dans notre pays». Car «nous sommes pris entre l'antisémitisme
traditionnel surreprésenté à l'extrême droite et l'antisémitisme antisioniste
surreprésenté à l'extrême gauche». Et «nous sommes coincés entre
l'antisémitisme musulman très présent chez les 15 à 25 ans et le statut de
cible privilégiée pour les terroristes islamistes».
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Syrie : le régime accentue son emprise sur la Ghouta, privée
d'aide humanitaire (08.03.2018)
Malgré une trêve de 30 jours
décrétée fin février par l'ONU, le régime de Bachar el-Assad a poursuivi son
offensive lui permettant de reconquérir la moitié de l'enclave rebelle en proie
à une grave crise humanitaire. Au total, plus de 900 civils auraient été tués
dans des bombardements.
Le régime syrien a accentué son
emprise sur le fief rebelle dans la Ghouta orientale, cible depuis trois
semaines d'un déluge de feu d'une rare violence, les autorités empêchant ce
jeudi l'entrée d'un convoi d'aides vital pour une population en proie à une
grave crise humanitaire. Appuyé
par l'indéfectible allié russe, le pouvoir de Bachar el-Assad a reconquis plus
de la moitié de l'enclave rebelle, après avoir lancé le 18 février une
offensive de grande ampleur qui, selon l'Observatoire syrien des droits de
l'Homme (OSDH), a tué plus de 900 civils dans ce dernier bastion insurgé aux
portes de la capitale.
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l'étau se resserre sur la Ghouta
Les forces du régime poursuivent
sans répit leur offensive terrestre et leur pilonnage meurtrier, malgré les
appels d'une communauté internationale impuissante face au bain de sang. Selon
l'Observatoire, le régime cherche à scinder l'enclave pour affaiblir les deux
forces principales du fief rebelle, Jaich al-Islam, au Nord, et Faylaq
al-Rahmane, au Sud. Des combats entre rebelles et forces du régime se déroulent
au cœur même de l'enclave, en périphérie de Douma mais aussi des localités de
Hammouriyé et Jisrine, plus au sud, cibles de raids aériens, d'après la même
source. Un responsable militaire a indiqué à des journalistes que les autorités
syriennes ont mis en place un nouveau couloir humanitaire, reliant la
périphérie de la capitale au sud de l'enclave, pour permettre la sortie des
civils.
La livraison d'aide
humanitaire ajournée
Un bombardement à la Ghouta, ce
jeudi. - Crédits photo : AMMAR SULEIMAN/AFP
Les quelque 400.000 habitants de
l'enclave, assiégés depuis 2013, subissent au quotidien pénuries de nourriture
et de médicaments, et vivent désormais terrés dans les sous-sols pour échapper
au déluge de feu. Des aides médicales et de la nourriture devaient y être
distribuées ce jeudi mais l'ONU et des ONG ont annoncé que la livraison avait
été ajournée. La situation «sur le terrain (...) ne nous permet pas de mener
l'opération» à bien, a indiqué Ingy Sedky, une porte-parole du Comité
international de la Croix-Rouge (CICR). «Aujourd'hui, l'ONU et ses partenaires
n'ont pas pu retourner à Douma (...) car le mouvement du convoi n'a pas été
autorisé par les autorités syriennes pour des raisons de sécurité», a indiqué
Jens Laerke, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires
de l'ONU (Ocha), à Genève.
» LIRE AUSSI - Syrie:
qui sont les rebelles dans la Ghouta orientale?
Fin
février, le Conseil de sécurité avait adopté une résolution réclamant un
cessez-le-feu de trente jours dans toute la Syrie, ravagée depuis
2011 par une guerre qui a fait plus de 340.000 morts. Par la suite, la Russie a
décrété une «pause humanitaire» quotidienne de cinq heures dans l'enclave
rebelle mais, mercredi, les bombardements ont encore tué 91 civils, selon
l'OSDH.
De nouvelles allégations
d'attaques chimiques
«En raison d'une attaque au gaz
de chlore (...), des patients souffrent de difficultés respiratoires sévères»
Société médicale syro-américaine
Par ailleurs, au moins 60
personnes ont souffert mercredi soir de difficultés respiratoires à Saqba et
Hammouriyé après des frappes aériennes, a indiqué l'OSDH. Des cas de
suffocation similaires ont déjà été rapportés à deux reprises ces derniers
jours, selon l'Observatoire. «En raison d'une attaque au gaz de chlore (...),
des patients souffrent de difficultés respiratoires sévères», a indiqué la
Société médicale syro-américaine (SAMS), une ONG qui soutient des centres
médicaux en Syrie. À Hammouriyé, un correspondant de l'AFP a pu voir des
dizaines de personnes, femmes et enfants, quitter des sous-sols et s'installer
sur un toit dans l'espoir de pouvoir mieux respirer.
Les parents ont déshabillé les
enfants qui toussaient sans cesse pour les laver à grande eau, et tenter
d'éliminer une possible présence de gaz toxique sur leur corps. «Je vais
suffoquer», hurlaient deux enfants, alors que des secouristes les portaient
pour les emmener se faire soigner. Le régime, qui a plusieurs fois démenti
utiliser des armes chimiques, a été dénoncé ces dernières semaines à la suite
d'attaques présumées au gaz de chlore. Ces accusations, «irréalistes» selon
Bachar el-Assad, ont provoqué un tollé sur la scène internationale, Washington
et Paris brandissant la menace de frappes en Syrie.
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Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian,
quitte le Parti socialiste (08.03.2018)
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Sur
CNews jeudi, le ministre des Affaires étrangères a expliqué «prendre acte» de
la décision du PS, qui l'avait exclu «de fait» après son entrée dans le
gouvernement d'Emmanuel Macron.
Membre du gouvernement d'Emmanuel
Macron et, en même temps, membre du Parti socialiste? Impossible avait répondu
le coordinateur national du PS Rachid Temal. Le chef par intérim du parti a
toujours affirmé que les socialistes qui avaient rejoint Emmanuel Macron
s'étaient exclus «de fait». Pourtant, le ministre des Affaires étrangères a
longtemps laissé planer l'ambiguïté, continuant
à se revendiquer du PS. Jean-Yves Le Drian a finalement levé le voile
jeudi sur CNews en annonçant qu'il «prenait acte» de la décision et qu'il
quittait le Parti socialiste.
De la «fierté» mais aussi de
la «déception»
«Je me retire du Parti
socialiste, avec beaucoup d'émotion après 44 ans, beaucoup de fierté parce que
j'ai participé à des combats sous François Mitterand, sous Lionel Jospin, sous
François Hollande avec qui j'ai toujours une forte amitié mais je me retire
aussi avec déception», a souligné Jean-Yves Le Drian.
Le ministre des Affaires
étrangères regrette notamment que le PS se range, selon lui, «dans une
opposition sectaire et puérile» plutôt que dans une démarche constructive avec
la majorité. «J'estime aujourd'hui que la manière d'avancer vers l'Europe, la
manière de transformer notre pays, c'est auprès d'Emmanuel Macron qu'il faut le
faire. Je regrette que le Parti socialiste se replie sur des convictions à mon
sens dépassées», a-t-il déploré. Jean-Yves Le Drian refuse en revanche de
rejoindre La République en marche, préférant simplement se revendiquer «de la
majorité présidentielle.»
La prise de position de Jean-Yves
Le Drian intervient une journée après un article de Mediapart, épinglant le ministre. Il est soupçonné
d'avoir obtenu un passe-droit pour inscrire ses deux petits-enfants au lycée
français de Barcelone. Le proviseur de l'établissement comme le ministre ont
démenti.
«Ça a dû lui faire mal»
Une décision «cohérente» saluée
par les socialistes, à commencer par Stéphane Le Foll. «On ne peut pas être au
gouvernement, soutenu par une majorité, et être dans un parti d'opposition. Ça
ne pouvait pas continuer, à un moment soit il faut quitter le gouvernement,
soit quitter le Parti socialiste. C'était une clarification qui était
extrêmement nécessaire», a déclaré jeudi sur Public Sénat son
ancien collègue ministre sous François Hollande, aujourd'hui candidat au poste
de Premier secrétaire du PS. «Jean-Yves Le Drian a une longue histoire avec le
Parti socialiste: ça a dû lui faire mal mais je pense qu'il a fait ce choix il
y a déjà quelques temps, en soutenant Emmanuel Macron», a avancé de son côté le
commissaire européen et socialiste Pierre Moscovici sur BFM TV.
«Il n'est plus membre du PS
depuis son entrée au gouvernement»
Rachid Temal, coordinateur
national du Parti socialiste
Le coordinateur national du Parti
socialiste Rachid Temal, le premier à avoir annoncé que Jean-Yves Le Drian ne
faisait plus partie du PS, s'est quant à lui montré plus sévère. «Certains
s'intéressent - au lendemain du débat réussi - à celles et ceux qui ont quitté
le PS pour rejoindre une autre formation politique ou le gouvernement d'Édouard
Philippe. Moi je m'intéresse aux militants et élus qui sont au Parti socialiste
au nom de nos valeurs et préparent l'avenir», a-t-il commenté sur sa page
Facebook. «Il n'est plus membre du PS depuis son entrée au gouvernement»,
a-t-il d'ailleurs souligné auprès du Figaro.
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Empilement des dettes : se souvenir de la crise grecque
(08.03.2018)
FIGAROVOX/TRIBUNE - Bruno Le
Maire a dit son opposition à tout effacement de la dette de pays en crise. Il a
tort, selon l'économiste Charles Wyplosz, qui explique comment il vaudrait
mieux décourager les prêteurs légers ou cyniques.
- Crédits photo : Clairefond
Tirant les leçons de la crise
précédente, les pays membres de la zone euro envisagent de créer un Fonds
monétaire européen. Un aspect crucial, mais technique, de ce projet pose un
problème à la France. Il s'agit, en préalable à tout prêt à un pays en crise,
d'exiger qu'une partie de sa dette existante soit purement et simplement
annulée. Bruno Le Maire a indiqué qu'il y était opposé, et pourtant c'est une
idée très saine, contrairement aux apparences. Ce qu'il a présenté comme une
ligne rouge est une bien mauvaise idée qui rappelle des mauvais souvenirs.
Lorsque la Grèce s'est retrouvée
en crise au début de 2010, la question d'un effacement partiel de sa dette
publique s'est posée. Emmenés par le président de la BCE, Jean-Claude Trichet,
les pays de la zone euro ont tracé la même ligne rouge que Bruno Le Maire
aujourd'hui. Or c'est cette posture qui a conduit à la catastrophe en Grèce, à
la contagion vers d'autres pays et au risque d'éclatement de la zone euro. À
l'époque, un effacement de la dette grecque aurait affecté, entre autres,les
banques allemandes et françaises, déjà secouées par la crise financière.
L'argument officiel était que l'on ne pouvait pas prendre le risque d'une
nouvelle crise bancaire. Peut-être, mais il s'agissait avant tout de protéger
les banques. Une grande part de l'argent public prêté aux Grecs a été consacrée
à rembourser des banques privées. Il faudra maintenant aux Grecs deuxou trois
générations pour rembourser les généreux prêts qu'on les a obligés d'accepter.
En
2010, la dette publique grecque représentait 130 % du PIB. C'était
déraisonnable, comme l'histoire l'a prouvé, mais à qui la faute? Aux
gouvernements grecs successifs qui ont dépensé sans compter, bien sûr, mais pas
seulement. Il faut être deux pour un prêt. Le prêteur se doit de mesurer les
risques qu'il prend, car un prêt est toujours risqué. Ceux qui ont prêté à la
Grèce dans les années qui ont précédé 2010 ont soit choisi d'ignorer les
risques qu'ils prenaient, soit imaginé que la Grèce serait «sauvée» par
l'argent des contribuables des autres pays de la zone euro. Ignorer les risques
est une bien mauvaise idée. Compter sur les contribuables est éminemment
cynique.
Une des leçons de la crise
grecque est qu'il ne faut plus se retrouver dans cette situation. La réforme du
Pacte de stabilité et de croissance vise à accentuer la pression sur les
gouvernements pour qu'ils tiennent leurs budgets. Même si cette réforme a peu
de chances de réussir, l'objectif est primordial et il faudra persévérer. La
réflexion sur cette question est en cours.
«Officiellement, les dettes
publiques sont considérées comme sans risque, donc sans exigence de précaution.
Or c'est une fiction».
Pour autant, il est tout aussi
important de décourager les prêteurs irréfléchis ou cyniques, pour leur propre
intérêt et pour celui des contribuables européens. Plusieurs possibilités
existent. La première est la réglementation bancaire. Les banques doivent
constituer un matelas en proportion des risques qu'elles prennent, ce qui les
amène à modérer la prise de risque et permet d'espérer qu'elles seront mieux
équipées pour faire face au prochain coup dur. Mais, officiellement, les dettes
publiques sont considérées comme sans risque, donc sans exigence de précaution.
Or c'est une fiction. Les dettes publiques de l'Italie et du Portugal s'élèvent
aujourd'hui à quelque 130 % de leurs PIB, plus que la Grèce en 2010! Mais
aucun gouvernement ne veut ouvrir cette boîte de Pandore. On maintient donc la
fiction que les dettes publiques n'entrent pas dans la catégorie des dettes à
risque.
La deuxième possibilité pour
décourager les prêteurs légers ou cyniques est de leur envoyer un message
clair: il n'y aura plus d'aide publique aux pays de la zone euroen difficulté.
Le Traité de Maastricht a institué cette règle, mais elle a volé en éclat
lorsque des prêts ont été accordés à la Grèce, puis aux autres pays en crise,
sur la base d'une obscure clause du traité. Les discussions en cours sur la
création d'un Fonds monétaire européen, destiné à renflouer les pays de la zone
euro en cas de besoin montrent que cette clause du traité reste caduque et que
les gouvernements n'ont aucune intention d'adopter cette option. Le message
adressé au marché est donc funeste: prêtez, prêtez, chères banques, le
contribuable vous aidera.
La troisième possibilité est
d'associer les aides à un effacement partiel de la dette. C'est ici que la
ligne rouge de Bruno Le Maire intervient. La proposition qu'il rejette rendrait
obligatoire que toute aide collective à un pays en crise soit accompagnée par
un effacement partiel de sa dette publique. Comme les dettes publiques sont
largement détenues par des institutions financières, ceci permettrait de
protéger les contribuables, désormais engagés, mais aussi de limiter les coûts
qu'ils auraient à subir.
«Il est désormais plus facile
d'effacer les dettes publiques.»
De plus, la dette du pays en
crise serait moins élevée au sortir de l'épisode, contrairement à la Grèce dont
la dette atteint 180 % du PIB aujourd'hui, ce qui signifie qu'elle est
loin d'être sortie d'affaire après dix ans d'intense austérité (et malgré,
finalement, une remise de dette bâclée de l'ordre de 50 % du PIB en 2012).
Enfin, et surtout, cela enverrait un message plus sain aux prêteurs, désormais
avertis qu'ils devraient mettre la main au portefeuille.
Il est désormais plus facile
d'effacer les dettes publiques. En 2012, dans le cadre du traité qui a établi
le Mécanisme européen de stabilité (qui aide les pays en crise), il a été
décidé que les dettes publiques de plus d'un an émises par les pays de la zone
euro à partir du 1er janvier 2013 doivent inclure une clause dite d'action
collective.
Cette clause vise à empêcher
qu'une minorité de détenteurs de dette ne bloquent un accord d'effacement avec
le gouvernement en question. Le principe auquel s'attaque Bruno Le Maire est
donc implicitement acquis, sinon à quoi pourrait bien servir la clause d'action
collective? Les raisons de ce raidissement sont bien mystérieuses. A-t-il peur
que la France soit, un jour, obligée à effacer sa dette? Si c'est le cas, la
solution est de ne plus faire de déficits.
Si le gouvernement français
réussit à faire échouer l'accord en cours d'élaboration, l'on n'aura pas
progressé. Les contribuables européens des pays en crise devront supporter
toujours plus de dettes publiques et leurs homologues des pays prêteurs seront
toujours obligés de garantir ces prêts pour voler au secours des banques
privées. La morale de l'affaire est claire: contribuables de tous les pays,
unissez-vous!
* Professeur d'économie
internationale à l'Institut de hautes études internationales et du
développement (IHEID) à Genève, Charles Wyplosz est directeur du Centre
international d'études monétaireset bancaires.
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Le Sri Lanka déstabilisé par les extrémistes bouddhistes
(07.03.2018)
INFOGRAPHIE - Le
gouvernement a décrété l'état d'urgence pour contenir les violences contre les
minorités religieuses, en particulier musulmanes.
À New Delhi
Le Sri Lanka a connu mercredi une
nouvelle journée de tensions alors que des
émeutes secouent les districts de Kandy et d'Ampara, au centre et à l'est de
l'île, depuis fin février. Mercredi, des commerces ont été brûlés à
Kandy, poussant les autorités à bloquer partiellement l'accès aux réseaux
sociaux, et ce alors que l'état d'urgence a été décrété pour dix jours dans
tout le pays. Les violences ont fait au moins un mort pour l'instant.
D'après la version livrée par le
premier ministre Ranil Wickremesinghe devant le Parlement mardi, tout a
commencé le 22 février. Un chauffeur de l'ethnie cinghalaise est agressé
par quatre musulmans lors d'un incident de la circulation à Kandy. Blessée, la
victime est transportée à l'hôpital où elle succombe à ses blessures le
3 mars. Le lendemain soir, deux commerces tenus par des musulmans sont
incendiés à Kandy. Le 5 mars, les attaques prennent de l'ampleur. Des
boutiques ainsi que des mosquées sont prises pour cible. Un jeune musulman de
27 ans périt dans l'incendie de sa maison à Digana. Des moines cinghalais de
confession bouddhiste participent aux émeutes, mobilisant leurs partisans grâce
aux réseaux sociaux, sans que la police ne les interpelle.
Moines radicalisés
Ces événements sont les derniers
d'une série d'attaques qui se multiplient depuis 2012 contre les minorités
religieuses, en particulier musulmanes. La plupart du temps, ces agressions
sont encouragées par les bouddhistes radicaux du Bodu Bala Sena (BBS). Si les
bouddhistes de l'ethnie cinghalaise sont majoritaires au Sri Lanka,
représentant 70 % de la population, le BBS martèle que la croissance
démographique des musulmans menacerait leur statut social. Il reproche aux
minorités religieuses de multiplier les conversions, dont il prône la
pénalisation, réclame l'interdiction de l'abattage halal, des manifestations religieuses
musulmanes et chrétiennes,
ainsi que l'abolition du droit privé musulman.
L'an dernier, le BBS a trouvé un
nouveau cheval de bataille avec l'arrivée des
Rohingyas, de confession musulmane, ayant fui la répression de l'armée birmane.
Le chef du BBS, Gnanasara Thero, avait affirmé en mai 2017 lors d'une
conférence de presse que ces réfugiés étaient venus envahir le Sri Lanka.
Le premier ministre s'est dit
décidé à contenir les violences: «le gouvernement condamne les actes violents
et racistes. L'état d'urgence a été proclamé et nous n'hésiterons pas à prendre
d'autres mesures si nécessaire», a-t-il déclaré. Mais pour Alan Keenan,
chercheur à l'International Crisis Group, le chef du gouvernement a peu de
marges de manœuvre. «Les moines bouddhistes jouissent d'un statut social très
particulier et les interpeller serait perçu comme un manque de respect envers
le clergé.» Autre problème: l'ancien président Mahinda Rajapakse, opposant au
premier ministre, ne cache pas ses sympathies pour les extrémistes. Or Rajapakse
garde de nombreux soutiens dans les forces de sécurité et certains observateurs
pensent que l'armée et la police, qui lui seraient fidèles, laissent faire les
émeutiers.
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Armes chimiques : Paris menace Damas de «riposte»
(08.03.2018)
VIDÉO - Dans la Ghouta, des ONG
accusent le régime d'avoir frappé au chlore les rebelles, mais les preuves
manquent encore.
Jean-Yves Le Drian a promis jeudi
une «riposte française» en cas d'utilisation avérée d'armes chimiques dans le
conflit syrien. Cette nouvelle menace française intervient deux jours après la
publication d'un rapport par la commission d'enquête de l'ONU sur les crimes de
guerre, accusant Damas d'avoir eu recours à des armes chimiques, notamment dans
la Ghouta orientale, la dernière enclave rebelle autour de la capitale,
bombardée depuis près de trois semaines.
«Il y a aujourd'hui des faisceaux
de convergence, des faisceaux d'indications qui laissent à penser que l'arme
chimique peut être utilisée ou a déjà été utilisée», a déclaré le ministre des
Affaires étrangères sur CNews. Jean-Yves Le Drian a toutefois reconnu que
«nous n'av(i)ons pas les preuves» d'une telle utilisation d'armes chimiques par
le régime syrien contre les rebelles assiégés dans la Ghouta, où 900 civils
ont péri en trois semaines et où un convoi humanitaire n'a pu venir secourir
jeudi la population dans le besoin.
La «ligne rouge» française
Citant des médecins sur place,
une ONG internationale, l'Union des organisateurs de secours et soins médicaux,
affirme qu'une attaque au chlore s'est produite vers 21 heures mercredi
dans les villes de Saqba et Hamouria. D'après les secouristes des Casques
blancs, une cinquantaine de personnes ont été affectées. Elles souffraient de
difficultés respiratoires après des frappes aériennes. Des accusations jugées
«irréalistes» par Damas. Ces dernières semaines, le régime a été, à plusieurs
reprises, montré du doigt pour des attaques présumées au chlore. «Si d'aventure
l'usage d'armes chimiques était constaté, vérifié, attribué, et que l'usage de
l'arme chimique (….) faisait des morts, alors la riposte française serait au
rendez-vous», a détaillé Jean-Yves Le Drian.
Mais les spécialistes s'accordent
à reconnaître que l'établissement de telles preuves est un exercice très
délicat. Bref, alors que les rebelles syriens reculent dans la Ghouta
- que les pro-Assad sont parvenus à couper en deux et à reconquérir à plus
de 50 % en quelques jours -, Jean-Yves Le Drian rappelle la
«ligne rouge» française, établie par Emmanuel Macron, peu après son élection à
la présidence de la République. Mais, à l'Élysée, on soulignait en début de
semaine que «ce n'(était) pas une action militaire que la France (menait) en
Syrie».
«Il n'y a pas de changement dans
nos priorités en Syrie, la priorité numéro un reste la lutte antiterroriste»,
confiait un proche du chef de l'État, tout en rappelant que, si des
preuves de l'utilisation d'armes chimiques par Damas étaient
établies, Paris prendrait ses responsabilités. La riposte serait aussi
américaine, a précisé Jean-Yves Le Drian. Ce qui laisse supposer une
coopération dans des frappes contre des sites - connus - de stockages
d'armes chimiques par Damas.
En 2013, François Hollande avait
voulu «punir» par des bombardements Bachar el-Assad, déjà accusé d'avoir
utilisé des armes chimiques dans la Ghouta (plus de 1000 morts). Mais, au
dernier moment, Barack Obama avait renoncé à recourir à la force contre le
régime syrien.
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Immigration illégale : la Californie se rebelle contre
Washington (08.03.2018)
Cet «État sanctuaire» se mobilise
après que le ministère de la Justice a porté plainte contre des lois protégeant
les clandestins.
La guerre larvée opposant
l'Administration de Donald
Trump à la Californieest entrée mardi dans une nouvelle phase,
juridique cette fois, et pourrait bien se terminer devant la Cour suprême.
L'objet de la dispute, qui n'est pas nouvelle mais vient d'atteindre un
paroxysme, est l'immigration illégale et le statut d'«État sanctuaire» de la
Californie, déclaré en octobre par son gouverneur démocrate Jerry
Brown. Le président américain désire tenir sa promesse électorale
d'expulser le plus grand nombre de clandestins possibles.
«La Californie utilise tous
les pouvoirs qu'elle a - et parfois qu'elle n'a pas - pour contrecarrer
l'application de la loi fédérale, vous pouvez être sûrs que je vais utiliser
tous mes pouvoirs pour l'arrêter.»
Jeff Sessions, ministre américain
de la Justice
De leur côté, les leaders
californiens ont juré de les protéger grâce à trois lois récentes considérées
comme radicales par l'Administration Trump. La première, AB 450, interdit
aux entreprises non seulement de partager sciemment des renseignements
concernant leurs employés avec des agents de l'immigration, mais les contraint
de plus à les alerter en cas d'inspection par les autorités fédérales. La deuxième,
AB 103, impose des inspections des centres de détention fédéraux de
clandestins, réputés iniques. La dernière, SB 54, interdit aux forces de
l'ordre locales d'informer les mêmes autorités fédérales lorsque des
clandestins potentiellement sujets à l'expulsion sont sur le point d'être
libérés de prison.
Un événement a fini d'attiser le
ressentiment de Washington contre la Californie rebelle: fin février, Libby
Schaaf, la mairesse d'Oakland - une banlieue de San Francisco - a
envoyé un e-mail aux résidents de sa ville pour les prévenir que la police de
l'immigration préparait une rafle anticlandestins. Piqué au vif par une telle
insolence, le ministère de la Justice vient de contre-attaquer en déposant une
plainte contre l'État doré. Jeff Sessions l'accuse de «faire obstruction à la
capacité des États-Unis d'appliquer les lois votées au Congrès ou d'agir selon
la Constitution. La Californie utilise tous les pouvoirs qu'elle a - et parfois
qu'elle n'a pas - pour contrecarrer l'application de la loi fédérale, vous
pouvez être sûrs que je vais utiliser tous mes pouvoirs pour l'arrêter».
«Refuser d'appréhender et de déporter les clandestins, en particulier les
éléments criminels, va en effet à l'encontre de toutes les lois sur
l'immigration (…) et privilégie un système de frontières ouvertes. L'ouverture
des frontières est une idée extrémiste, irrationnelle que nous ne
pouvons pas accepter», a-t-il affirmé mercredi lors d'un discours devant des
responsables des forces de l'ordre à Sacramento, la capitale de l'État, tandis
que des centaines de manifestants étaient venus contester sa présence.
Donald Trump voudrait forcer
les forces de l'ordre de l'État à coopérer avec l'ICE, chargée des expulsions.
Il accuse la Californie de protéger les clandestins criminels et de mettre
ainsi ses citoyens en danger.
La riposte des leaders
californiens ne s'est pas fait attendre. Le gouverneur Jerry Brown a qualifié
la plainte d'un «coup de pub» doublé d'une «déclaration de guerre». «Dans une
période de tourmente politique sans précédent, Jeff Sessions est arrivé en
Californie pour diviser et polariser l'Amérique. Regardons les choses en face,
la Maison-Blanche est en état de siège. De toute évidence, Jeff Sessions a un
mal fou à se comporter en ministre de la Justice normal. Il se trouve pris au
piège du trumpisme et vient de commencer un règne de la terreur», a ajouté le
leader démocrate.
Donald Trump voudrait forcer les
forces de l'ordre de l'État à coopérer avec l'Immigration and Customs
Enforcement (ICE), chargée des expulsions. Il accuse la Californie de protéger
les clandestins criminels et de mettre ainsi ses citoyens en danger. Les
leaders du «Golden State» rétorquent qu'au contraire, si les clandestins
venaient à craindre les dénonciations de la police, ils cesseraient de signaler
les activités criminelles de leurs quartiers par peur d'être arrêtés et
priveraient ainsi la police de témoignages cruciaux pour ses enquêtes.
Loin de paraître intimidés par
les provocations du président, qui a menacé de faire sortir tous les agents
fédéraux de Californie pour lui donner une leçon et la plonger ainsi dans le
crime sans bouclier, les responsables politiques californiens ont durci leur
position. Le président du Sénat Kevin de Leon, un fils d'immigrés, accuse Jeff
Sessions d'avoir une idéologie basée sur le «suprémacisme et le nationalisme
blancs». Quant au ministre californien de la Justice, Xavier Becerra, lui aussi
fils d'immigrés, il a déclaré que «notre tâche, c'est la sécurité de la
population, pas les expulsions».
Le bras de fer s'annonce d'autant
plus féroce que défier l'Administration
Trump est presque devenu un devoir en Californie: les habitants se
veulent l'antithèse de ce qu'il représente, que ce soit en matière d'immigration,
de lutte contre le réchauffement climatique ou de légalisation du cannabis. Un
quart environ des 11 millions de clandestins vivent dans cet État le plus
peuplé d'Amérique. Leur sort sera défendu par l'ex-ministre de la Justice de
Barack Obama, Eric Holder, que la Californie a embauché.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 09/03/2018. Accédez à sa version
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menace de poursuivre les villes protégeant les clandestins
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Laszlo Trocsanyi : «La Hongrie entend défendre ses
frontières» (08.03.2018)
INTERVIEW - Immigration,
multiculturalisme... Le ministre de la Justice hongrois, qui fut ambassadeur à
Bruxelles et à Paris, évoque ces sujets sensibles en Europe centrale.
Le ministre hongrois de la
Justice, Laszlo Trocsanyi, vient de passer plusieurs jours à Paris pour y
défendre la position de la Hongrie, alors que le premier ministre Viktor
Orban a engagé un bras de fer avec Bruxelles sur la question de
l'immigration. Il a rencontré Le Figaro.
LE FIGARO. - La Hongrie est
accusée de dériver vers une démocratie autoritaire, qui porte atteinte à
l'indépendance de la justice et de la presse notamment. Que répondez-vous à ces
critiques?
Laszlo TROCSANYI. - Je
m'inscris en faux contre ces accusations et je ne dis pas cela à la légère,
étant moi-même professeur de droit constitutionnel et grand connaisseur du
système européen de contre-pouvoirs et notamment de celui de la France. J'ai
d'ailleurs profité de ma visite pour parfaire mes connaissances sur la question
de la nomination des juges administratifs français et des garanties
d'indépendance de la justice. Le pouvoir exécutif n'a aucune influence sur
l'activité de la justice en Hongrie. Nous avons adopté une loi nouvelle sur le
contentieux administratif et élargi la compétence des juges. C'est certes le
président qui nomme les juges, mais il n'y a pas de contreseing du premier
ministre, et c'est le Conseil de la magistrature, exclusivement constitué de
juges, qui propose les candidats.
C'est vrai qu'en 2011 il y a eu
des bagarres autour du pouvoir judiciaire quand le gouvernement a voulu mettre
à la retraite les juges dès l'âge de 65 ans, pour qu'ils tombent sous le
même régime que les autres professions. La Cour de justice européenne a alors
décidé que notre décision violait les traités et nous avons corrigé notre
copie, acceptant que les juges demeurent jusqu'à 70 ans. Le dossier est
clos depuis huit ans! Mais on continue de parler d'atteintes à l'indépendance
de la justice, sans fondement! La réalité, c'est qu'une bataille se joue autour
de la Hongrie pour d'autres raisons. Nous recevons des mauvaises notes parce
que nous avons un point de vue différent sur la question de la migration et de
la défense des frontières.
Que voulez-vous dire?
Depuis la vague de réfugiés de
2015, on fait le procès à la Hongrie d'avoir voulu contrôler sa frontière, qui
est aussi la frontière extérieure de l'UE. Ce qui est en débat, c'est l'idée de
la «société ouverte», ce modèle politique qui prône le multiculturalisme et les
frontières ouvertes et met la défense de l'individu au-dessus de tout le reste.
Nous sommes attachés aux libertés individuelles, mais nous pensons que d'autres
éléments doivent peser: l'intérêt général, l'ordre public, la souveraineté
nationale, l'identité culturelle. Nous avons en Europe centrale une vision
différente de celle d'Europe occidentale, due à notre histoire. Nous n'avons
pas connu le phénomène des colonies ni eu l'expérience d'une immigration de
masse.
«Pour nous, les racines
chrétiennes sont importantes, or nous voyons aujourd'hui qu'à cause du
multiculturalisme, l'Europe veut cacher sous le tapis ses racines, au prétexte
que cela peut léser certains.»
Laszlo Trocsanyi
Est-ce l'islam qui fait peur à
la Hongrie?
Le multiculturalisme en Europe
centrale suscite une vraie réticence, d'autant que nous observons que cela ne
marche pas si bien que ça en Europe occidentale. Cela ne veut pas dire que nous
sommes contre la solidarité. Nous avons accueilli énormément d'Ukrainiens
depuis l'annexion de la Crimée et énormément de réfugiés des Balkans. Mais nous
voulons contrôler notre frontière et ne comprenons pas que cela ne soit pas
compris. C'est notre obligation dans le cadre de Schengen. Nous voyons aussi
que d'autres pays, comme l'Espagne, ont construit des clôtures et que cela a
été accepté. Alors pourquoi certains murs seraient-ils bons et d'autres
mauvais? Pour nous, la question de la migration est clé, car elle touche à la
composition de la population du pays, et donc du type de société dans lequel
nous allons vivre, pas seulement aujourd'hui mais dans vingt ans. Est-il
possible de forcer les États à accueillir des populations étrangères s'ils ne
le veulent pas? C'est tout le débat que nous avons avec Bruxelles. Pour nous,
ce sujet touche à la souveraineté nationale et à l'identité constitutionnelle
de notre pays. Cela nous amène à votre question sur l'islam. Nous avons du
respect pour cette grande religion, pas d'hostilité. Mais la question se pose
de savoir comment le christianisme et l'islam peuvent vivre ensemble. Nous
avons certaines craintes et, pour nous, les racines chrétiennes sont
importantes, or nous voyons aujourd'hui qu'à cause du multiculturalisme,
l'Europe veut cacher sous le tapis ses racines, au prétexte que cela peut léser
certains. Mais comme le disait notre ancien premier ministre Jozsef Antall, il
ne faut pas oublier qu'en Europe, même les athées sont chrétiens, car c'est
notre culture. Il faut la préserver.
La Hongrie a néanmoins signé
les conventions de Genève sur le droit d'asile.
Bien sûr, il y a les conventions
de Genève. Mais les règles de droit d'asile sont une compétence partagée entre
les États et l'UE. Va-t-on priver les États de cette compétence? Nous voyons se
développer à Bruxelles une tendance au fédéralisme, qui donne de plus en plus
de pouvoir aux institutions européennes sur ce sujet et porte atteinte à la
souveraineté nationale. Regardez les déclarations du premier ministre belge,
qui a affirmé que l'on doit décider, avec une majorité qualifiée, de forcer les
États à accepter les quotas de migrants.
L'UE peut-elle vous forcer la
main sur les quotas? Certains appellent à couper les fonds régionaux qui ont
fait votre prospérité.
Théoriquement, en effet, on
pourrait court-circuiter le Conseil des chefs d'État et forcer la main des pays
d'Europe centrale, au niveau du Conseil des ministres de l'intérieur. Mais
est-ce sage? Vouloir nous punir sur la question des fonds structurels serait
inapproprié car ces fonds sont destinés à pallier les différences entre régions
et n'ont rien à voir avec la question migratoire.
Mais l'UE pense que l'Europe
centrale, après avoir bénéficié du principe de solidarité, pourrait l'endosser
à son tour…
Il y a un clivage entre les
quatre pays du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et
Slovaquie, NDLR)et les autres sur la migration. Aujourd'hui, les pays d'Europe
occidentale et les institutions européennes veulent appliquer un système basé
sur la solidarité. Mais nous mettons en avant le principe de sécurité. L'Europe
doit être une enceinte de négociation et de compromis. Nous pensons qu'il est
indispensable de créer des centres de transit à l'extérieur de l'UE, afin de ne
pas avoir à gérer les migrants qui se retrouvent déboutés du droit d'asile mais
sont très difficilement expulsables, comme on le voit aujourd'hui en Allemagne.
Dans quelle Europe voulons-nous vivre? Une Europe fédérale ou une Europe forte
avec des États forts? L'Europe de «la société ouverte», c'est l'Europe forte
avec des États faibles. Nous n'en voulons pas.
«La Hongrie et les pays de
Visegrád ont une approche concrète de l'immigration et ont toujours été prêts à
discuter avec tous leurs partenaires européens dans le plus grand respect.»
Laszlo Trocsanyi
Les pays de Visegrad sont-ils
aujourd'hui totalement isolés ou sentez-vous un changement dans l'approche de
l'Europe occidentale, vu le débat qui s'y développe sur la question des
frontières et des résultats mitigés du multiculturalisme ?
Nous voyons bien qu'il y a débat
à l'ouest de l'Europe entre les gouvernants et les peuples. Est-il possible de
faire une politique contre l'avis des citoyens? C'est une grande question, qui
ne se pose pas seulement chez nous. Regardez l'Allemagne, dont l'équilibre
politique est remis en question à cause de la politique migratoire de Merkel.
Peut-être, à cause de cette réalité, percevons-nous un changement d'approche
récent, notamment en France. L'actuel gouvernement a une vraie volonté
d'écouter ce que nous avons à dire. Le président Macron envisage d'ailleurs de
venir bientôt en Hongrie même si la date n'est pas fixée.
Quelle est votre réaction au
résultat des élections italiennes? La nouvelle donne en Italie va-t-elle vous
fournir des alliés?
Il est indéniable que les
questions relatives à l'immigration ont été au cœur de la campagne électorale
en Italie, et que le gouvernement qui va émerger prendra cet élément en
considération. La Hongrie et les pays de Visegrád ont une approche concrète de
l'immigration et ont toujours été prêts à discuter avec tous leurs partenaires
européens dans le plus grand respect. Mais le possible changement de la
position italienne est clairement de nature à rapprocher les points de vue de
notre groupe et ceux de l'Italie.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 09/03/2018. Accédez à sa version
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Armes chimiques : Paris menace Damas de «riposte»
(08.03.2018)
VIDÉO - Dans la Ghouta, des ONG
accusent le régime d'avoir frappé au chlore les rebelles, mais les preuves
manquent encore.
Jean-Yves Le Drian a promis jeudi
une «riposte française» en cas d'utilisation avérée d'armes chimiques dans le
conflit syrien. Cette nouvelle menace française intervient deux jours après la
publication d'un rapport par la commission d'enquête de l'ONU sur les crimes de
guerre, accusant Damas d'avoir eu recours à des armes chimiques, notamment dans
la Ghouta orientale, la dernière enclave rebelle autour de la capitale,
bombardée depuis près de trois semaines.
«Il y a aujourd'hui des faisceaux
de convergence, des faisceaux d'indications qui laissent à penser que l'arme
chimique peut être utilisée ou a déjà été utilisée», a déclaré le ministre des
Affaires étrangères sur CNews. Jean-Yves Le Drian a toutefois reconnu que
«nous n'av(i)ons pas les preuves» d'une telle utilisation d'armes chimiques par
le régime syrien contre les rebelles assiégés dans la Ghouta, où
900 civils ont péri en trois semaines et où un convoi humanitaire
n'a pu venir secourir jeudi la population dans le besoin.
La «ligne rouge» française
Citant des médecins sur place,
une ONG internationale, l'Union des organisateurs de secours et soins médicaux,
affirme qu'une attaque au chlore s'est produite vers 21 heures mercredi
dans les villes de Saqba et Hamouria. D'après les secouristes des Casques
blancs, une cinquantaine de personnes ont été affectées. Elles souffraient de
difficultés respiratoires après des frappes aériennes. Des accusations jugées
«irréalistes» par Damas. Ces dernières semaines, le régime a été, à plusieurs
reprises, montré du doigt pour des attaques présumées au chlore. «Si d'aventure
l'usage d'armes chimiques était constaté, vérifié, attribué, et que l'usage de l'arme
chimique (….) faisait des morts, alors la riposte française serait au
rendez-vous», a détaillé Jean-Yves Le Drian.
Mais les spécialistes s'accordent
à reconnaître que l'établissement de telles preuves est un exercice très
délicat. Bref, alors que les rebelles syriens reculent dans la Ghouta
- que les pro-Assad sont parvenus à couper en deux et à reconquérir à plus
de 50 % en quelques jours -, Jean-Yves Le Drian rappelle la
«ligne rouge» française, établie par Emmanuel Macron, peu après son élection à
la présidence de la République. Mais, à l'Élysée, on soulignait en début de
semaine que «ce n'(était) pas une action militaire que la France (menait) en
Syrie».
«Il n'y a pas de changement dans
nos priorités en Syrie, la priorité numéro un reste la lutte antiterroriste»,
confiait un proche du chef de l'État, tout en rappelant que, si des
preuves de l'utilisation d'armes chimiques par Damas étaient
établies, Paris prendrait ses responsabilités. La riposte serait aussi
américaine, a précisé Jean-Yves Le Drian. Ce qui laisse supposer une
coopération dans des frappes contre des sites - connus - de stockages
d'armes chimiques par Damas.
En 2013, François Hollande avait
voulu «punir» par des bombardements Bachar el-Assad, déjà accusé d'avoir
utilisé des armes chimiques dans la Ghouta (plus de 1000 morts). Mais, au
dernier moment, Barack Obama avait renoncé à recourir à la force contre le
régime syrien.
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L'Ulster otage du Brexit (09.03.2018)
Les négociations sur le Brexit
font craindre, outre-Manche, le rétablissement d'une frontière entre l'Eire et
l'Irlande du Nord.
La frontière extérieure de
l'Union européenne passera-t-elle demain au milieu de la mer d'Irlande entre
les deux îles britanniques? Au cœur des âpres négociations sur le Brexit, le
gouvernement de Theresa May et la Commission européenne achoppent
notamment sur le futur statut de l'Ulster. En théorie, l'Irlande du
Nord, qui appartient au Royaume-Uni, devrait rompre les amarres avec l'UE en
mars 2019 dans les mêmes termes que la Grande-Bretagne. Pourtant, Michel
Barnier, qui mène les négociations du divorce au nom de l'UE, a expliqué que
l'Irlande tout entière, Eire et province de l'Ulster associées, constituerait
demain une seule et même «aire réglementaire commune». Donc, ipso facto,
l'Irlande du Nord demeurerait dans l'Union européenne tandis que le reste du
Royaume-Uni lui tournerait le dos.
L'audace
du négociateur en chef européen a provoqué une réponse cinglante
du Premier ministre britannique: pas question de toucher à «l'intégrité
constitutionnelle du Royaume-Uni», a tempêté Theresa May. Et vendredi
2 mars, lors
d'un long discours consacré aux perspectives de
l'après-Brexit, elle est revenue sur le sujet. «En tant que Premier
ministre de l'ensemble du Royaume-Uni, a-t-elle déclaré, je ne veux pas que
notre départ de l'Union européenne remette en cause les progrès historiques
obtenus en Irlande du Nord ; et je n'autoriserai rien non plus qui puisse
porter atteinte à notre précieuse Union.» Tout le dilemme du gouvernement
britannique se trouve dans cette phrase.
30.000 personnes passent
quotidiennement de l'Eire à l'Ulster
Dans l'accord du Vendredi saint
signé en avril 1998, qui mit fin à trente ans d'attentats et d'assassinats
causant près de 3500 morts en Ulster et en Grande-Bretagne, la question de
la frontière avec la République d'Irlande avait été réglée en l'ouvrant et en
laissant une libre circulation totale. Depuis lors, quelque
30.000 personnes, salariés et étudiants, passent quotidiennement d'un pays
à l'autre - surtout dans le sens Eire-Ulster car le salaire moyen est plus
élevé au nord qu'au sud.
«Au sud comme au nord, on sait
que les deux économies ont beaucoup à perdre d'un Brexit mal négocié»
Tout rétablissement des contrôles
à la frontière aurait donc un double effet négatif. Politiquement, il pourrait
rouvrir la plaie nord-irlandaise et le conflit entre les protestants unionistes
attachés à la Grande-Bretagne - et partenaires dans la majorité de Theresa May
- et les catholiques du Sinn Fein partisans d'une unification irlandaise.
Economiquement, il mettrait en difficulté des dizaines de milliers de
travailleurs frontaliers, dont de nombreux enseignants, et causerait un grave
problème aux sociétés et aux écoles qui les emploient. La branche
nord-irlandaise du FSB, la fédération des petites entreprises, a déjà exprimé
publiquement ses inquiétudes sur un éventuel «durcissement» de la frontière.
De son côté, Michel Barnier s'est
défendu d'avoir voulu provoquer Londres. Pour lui, sa proposition n'était que
la conséquence des discussions de décembre dernier, où la partie britannique
avait souligné son intention de ne pas rétablir une frontière en bonne et due
forme. Malicieux, le négociateur européen s'est étonné que Londres n'ait
toujours pas formulé de solution viable, hormis quelques suggestions purement
technologiques, du type portiques électroniques, tout à fait insuffisantes pour
fonder un règlement définitif.
Cet épineux dossier est scruté de
près par une troisième partie: la République d'Irlande. A
Dublin, on s'inquiète des prises de position souvent contradictoires des
leaders conservateurs britanniques. Boris Johnson, ministre des
Affaires étrangères, n'a-t-il pas prédit la semaine dernière une frontière
«dure» entre les deux Irlandes avec des contrôles renforcés? Theresa May a
rectifié en parlant d'une frontière «soft». Mais la cacophonie demeure. Et, au
sud comme au nord, on sait que les deux économies ont beaucoup à perdre d'un
Brexit mal négocié.
Journaliste
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Radioscopie de l'affaire Halimi (09.03.2018)
Dans son livre L'Affaire
Sarah Halimi, Noémie Halioua enquête sur les «défaillances» qui ont abouti
au meurtre de Sarah Halimi et expliquent ce long mutisme sur son caractère
antisémite.
Près d'un an: c'est le temps
qu'il aura fallu à la justice pour reconnaître
le caractère antisémite du meurtre de Sarah Halimi, cette Française
juive de 67 ans torturée aux cris d'«Allah akbar!» dans son appartement
parisien de Belleville, puis défenestrée, dans la nuit du 3 au 4 avril
2017. Près d'un an de bataille pour la famille de la victime. La juge
d'instruction Anne Ihuellou, qui avait mis son bourreau Kobili Traoré en examen
le 10 juillet pour meurtre, n'a retenu l'antisémitisme de ce Franco-Malien
de 28 ans comme circonstance aggravante que la semaine dernière. Dès
juillet, lors de la commémoration des 75 ans de la rafle du Vél' d'Hiv,
Emmanuel Macron avait pourtant demandé à la justice de faire «toute la clarté»
sur ce meurtre, «malgré les dénégations du meurtrier». Au risque de se voir
reprocher d'enfreindre la séparation des pouvoirs.
- Crédits photo : _ISA
Dans L'Affaire Sarah
Halimi, Noémie Halioua, responsable des pages «Culture» du magazine
Actualité juive, enquête sur les «nombreuses défaillances» qui ont abouti au
meurtre de Sarah Halimi et expliquent ce long mutisme sur son caractère
antisémite.
Sur les pas de William Attal, le
frère de la victime, elle nous emmène d'abord dans cette HLM du
XIe arrondissement de Paris où Sarah Halimi vivait depuis une trentaine
d'années. C'est peu dire que les locataires, immigrés du Maghreb ou d'Afrique
noire en majorité, n'accueillent pas le tandem à bras ouverts. Personne,
sauf épisodiquement ses voisins de palier, ne fréquentait cette Juive orthodoxe
portant jupe longue et perruque. Un monde sépare ce côté du boulevard
de Belleville de La Bellevilloise, où la gauche branchée aime célébrer la
«diversité».
Dans l'immeuble de Sarah Halimi,
une seule femme accepte de raconter à la journaliste, sous couvert d'anonymat,
«l'islamisation de la population maghrébine de Belleville qui s'est
intensifiée, surtout chez les jeunes».
Kobili Traoré est l'archétype de
ce phénomène. Après avoir quitté l'école en troisième, il vivote grâce au RSA
et au deal. Incarcéré quatre fois, il compte quatre condamnations pour vol, six
pour violences - dont une pour avoir brûlé un individu afin de le détrousser -,
huit pour usage ou trafic de stupéfiants, deux pour outrage, un pour port
d'armes… La liste n'est pas exhaustive.
«Le soir du meurtre, la
connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les
policiers présents»
Noémie Halioua
Noémie Halioua a reconstitué son
emploi du temps le jour du meurtre. Il s'est rendu deux fois à la mosquée Omar,
rue Morand, qu'un témoin qualifie de «fabrique de tueurs». Puis il a «zoné»
dans le quartier avec ses copains et est rentré se coucher. Une journée
habituelle, sauf que lorsqu'il se réveille, vers 3 h 30 du matin, il
va chez la famille Diarra, dont l'appartement permet l'accès à celui de Sarah
Halimi. C'est un membre de la famille Diarra qui va alerter la police, un peu
plus tard, en entendant les vociférations et les appels à l'aide chez la
voisine. Pourquoi, alors que trois agents de la BAC sont arrivés sur place à
4 h 25 du matin, Traoré n'a-t-il été interpellé qu'à
5 h 35, après avoir défenestré sa victime? Pour le savoir, Me Gilles-William
Goldnadel, avocat de la sœur de Sarah Halimi, a déposé plainte pour
«non-assistance à personne en danger». Les parties civiles ont demandé une
reconstitution, refusée par la juge en raison de l'état mental du prévenu.
Noémie Halioua dénonce une «inertie policière» et explique ce refus par le
souci de dissimuler «le grave dysfonctionnement des forces de l'ordre ce
soir-là».
C'est en faisant appel de cette
décision que le parquet et les parties civiles ont enfin obtenu la
reconnaissance du caractère antisémite du crime. La juge a préféré anticiper une possible «évocation» - c'est le terme juridique - du fond du dossier par la cour d'appel. Mais que de temps perdu! «Le soir du meurtre, affirme Noémie Halioua, la connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les policiers présents.»
reconnaissance du caractère antisémite du crime. La juge a préféré anticiper une possible «évocation» - c'est le terme juridique - du fond du dossier par la cour d'appel. Mais que de temps perdu! «Le soir du meurtre, affirme Noémie Halioua, la connotation islamiste ne laissait aucun doute, ni pour les témoins ni pour les policiers présents.»
La responsabilté des médias
Police, justice, mais aussi
médias: L'Affaire Sarah Halimi pointe les responsabilités de
tous ses acteurs, chacun à leur niveau. La «vulgate journalistique» qui qualifie
de «déséquilibrés» des islamistes pourtant revendiqués, les journaux qui ont
choisi de «différer la publication de l'information pour “ne pas faire le jeu
de Marine Le Pen”», parce que Sarah Halimi a été tuée en pleine campagne
présidentielle, ont joué eux aussi un rôle dans ce drame.
Dès
le 1er juin 2017,
17 intellectuels, dont Elisabeth Badinter, Alain Finkielkraut, Marcel
Gauchet, Jacques Julliard et Michel Onfray avaient publié une tribune
dans Le
Figaro pour
demander que «toute
la vérité soit établie sur le meurtre de Sarah Halimi», mais
aussi que «toute la vérité soit dite sur la profondeur des fractures
françaises». Le livre de Noémie Halioua y contribue.
L'Affaire Sarah Halimi, de
Noémie Halioua, Cerf, 140 p., 16 €. En librairie le 16 mars.
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Halim
Tariq Ramadan visé par une troisième plainte pour «viols»
(07.03.2018)
Une femme a déposé plainte, ce
mercredi, auprès du parquet de Paris, contre l'islamologue. Elle affirme avoir
subi des actes sexuels violents et dégradants lors d'une dizaine de rendez-vous
entre février 2013 et juin 2014.
Une troisième femme a porté
plainte pour viols, ce mercredi à Paris, contre Tariq Ramadan. L'islamologue
suisse controversé est déjà inculpé et incarcéré depuis un mois pour des faits
similaires. Cette Française d'une quarantaine d'années - qui souhaite garder l'anonymat
- affirme avoir été sous l'emprise du théologien et avoir subi de multiples
viols entre 2013 et 2014 en France, à Bruxelles et à Londres, selon une source
proche du dossier citant la plainte.
» LIRE AUSSI - Tariq
Ramadan: double discours et double personnalité?
Cette femme musulmane, qui a
choisi le pseudonyme «Marie», affirme avoir subi des actes sexuels
particulièrement violents et dégradants lors d'une dizaine de rendez-vous entre
février 2013 et juin 2014, le plus souvent dans des hôtels en marge des
conférences à succès de l'islamologue de 55 ans. Sur cette période, «Marie
tentait en vain d'échapper à l'emprise de M. Ramadan qui ne cessait de la
menacer», selon la source proche du dossier.
La radio Europe 1 précise, de son
côté, que la plaignante avait confié à Tariq Ramadan «son passé d'escort girl»
et avoir fait «partie des femmes rémunérées pour avoir eu des relations
sexuelles avec Dominique Strauss-Kahn», ancien ministre français et directeur
général du FMI, au coeur de plusieurs scandales sexuels qui lui ont coûté sa
carrière politique. Des éléments dont l'intellectuel se serait servi pour la
menacer, affirme la radio qui a consulté des SMS reçus par la plaignante et que
cette dernière attribue à Tariq Ramadan.
Vif émoi dans une partie des
rangs musulmans
Le théologien a été inculpé le 2
février pour viols, dont l'un sur personne vulnérable, après
les plaintes de deux femmes, fin octobre, qui ont débouché sur une
enquête confiée à trois juges d'instruction. Tariq Ramadan, qui conteste ces
accusations, a été écroué en banlieue parisienne, la justice craignant une
possible fuite, des pressions sur les plaignantes ou une réitération des faits.
La détention de ce petit-fils du
fondateur de la confrérie islamiste des Frères musulmans a suscité un vif émoi
dans une partie des rangs musulmans, certains dénonçant un «deux poids, deux
mesures», voire un «complot» contre une des rares figures médiatiques de
l'islam européen.
Tariq
Ramadan avait invoqué son état de santé pour contester cette
détention, qui a été confirmé par la cour d'appel de Paris fin février sur la
base d'une première expertise médicale. Cette dernière avait remis en question
les deux maladies, une sclérose en plaques et une neuropathie, dont le
théologien dit souffrir, jugeant leur diagnostic «incertain». Une expertise
médicale complète a été ordonnée par les juges et doit être rendu d'ici la fin
mars.
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