mercredi 18 avril 2018

Islamisme et politique 14.04.2018

Syrie, fiscalité, islam... revivez l'entretien d'Emmanuel Macron (15.04.2018)
Bourdin, Plenel : la France des oubliés a été oubliée (16.04.2018)
Élisabeth Lévy : «Je préfère Mai 68 à ses ridicules et tristes remakes» (13.04.2018)
Manifestation à Barcelone contre la détention d'indépendantistes depuis 6 mois (15.04.2018)
Turquie : Erdogan, président tout-puissant (15.04.2018)
Mali : des soldats français blessés dans une attaque à Tombouctou (15.04.2018)
Cinq ans après l'opération Serval, al-Qaida gangrène le Mali (28.01.2018)

Montpellier : 41 gardes à vue après la manifestation contre le gouvernement (15.04.2018)
Philippe défend les frappes en Syrie face aux députés (15.04.2018)
Wauquiez : «Macron est déconnecté de la vie quotidienne» des Français (15.04.2018)
L'organisme qui supervise le Web annonce la mort à venir des mots de passe (13.04.2018)
Israël observe avec prudence les frappes en Syrie (15.04.2018)
Nicolas Baverez: «Au Moyen-Orient, l'engrenage» (15.04.2018)
Castel Volturno, le royaume de la «Black Camorra» (16.04.2018)
Les Français surestiment grandement leur vraie richesse et le PIB du pays (15.04.2018)
Syrie : qu'est-ce que le mystérieux Centre chimique frappé par les alliés ? (16.04.2018)
Trump et les généraux américains déclarent «mission accomplie» en Syrie (15.04.2018)
Frappes en Syrie : le bilan incertain de la participation française (16.04.2018)
L'appel de 119 sénateurs : «Les droits de l'enfant sont plus importants que le désir d'enfant» (12.04.2018)
Syrie : les experts de l'OIAC n'ont pas encore eu accès à Douma (16.04.2018)
Philippe défend les frappes en Syrie face aux députés (15.04.2018)
Troupes américaines en Syrie : Paris et Washington partagent «la même position» (16.04.2018)
Jeune fille au pair tuée à Londres : l'accusé charge son ex-compagne (16.04.2018)
Le déplacement scruté de Justin Trudeau dans l'Hexagone (16.04.2018)
Ce qu'il faut retenir de l'interview de Macron face à Bourdin et Plenel (15.04.2018)
Le préfet de l’Hérault a la «ferme volonté de dégager Paul Valéry» des bloqueurs (16.04.2018)
Toulouse : nouvelle nuit de violences entre jeunes et forces de l'ordre (16.04.2018)
Allemagne : un enfant découvre un trésor d'un célèbre roi danois du Xe siècle (16.04.2018)
Les anti-Brexit s'organisent pour obtenir un nouveau référendum (16.04.2018)
Asile et immigration : les esprits s'échauffent autour du texte (16.04.2018)
Ce que contient la loi asile et immigration (20.02.2018)
Les mesures polémiques du projet de loi asile et immigration (16.04.2018)
Djamila Boutoutaou, première djihadiste française condamnée à perpétuité en Irak (17.04.2018)
Ce qu'il faut retenir du discours d'Emmanuel Macron devant le Parlement européen (17.04.2018)
À Strasbourg, Macron hausse le ton pour défendre l'intervention en Syrie (17.04.2018)
Attaque chimique en Syrie: la difficile mission des inspecteurs internationaux (17.04.2018)
La sortie de Castaner sur le «voile catholique» suscite la moquerie (17.04.2018)
Loi asile et immigration  : l'exécutif joue l'apaisement (17.04.2018)
Asile et immigration : le contre-projet de Valérie Pécresse (17.04.2018)
Données personnelles : coup d'envoi des actions collectives contre les GAFAM (17.04.2018)
En Hongrie, au cœur des passions identitaires d'Europe centrale (17.04.2018)

Syrie, fiscalité, islam... revivez l'entretien d'Emmanuel Macron (15.04.2018)
  • Par  3 Auteurs 

  • Mis à jour le 15/04/2018 à 23:31 

  • Publié le 15/04/2018 à 19:28
Emmanuel Macron a répondu pendant près de 3 heures aux questions de Jean-Jacques Bourdin et d'Edwy Plenel en direct du Palais Chaillot.
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ORDRE DES POSTS
TERMINE : Fin du direct : 15/04/2018 à 23:52
16/04/2018 à 00:45
Macron face à Bourdin et Plenel : les cinq échanges les plus tendus
L'entretien présidentiel a très vite viré au combat de boxe entre le chef de l'État et les deux journalistes. La brutalité des échanges a complètement damé le pion au fond des sujets abordés. Notre article à lire en cliquant ici
16/04/2018 à 00:41
Emmanuel Macron vous a-t-il convaincu ?
Répondez à notre question en cliquant ici
16/04/2018 à 00:40
Ce qu'il faut retenir de l'interview de Macron face à Bourdin et Plenel
Intervention en Syrie, réforme de la SNCF, blocage des universités, dossier de la dépendance, islam radical... Retrouvez les principales interventions du chef de l'État sur BFM-TV et Mediapart dans notre article en cliquant ici.


16/04/2018 à 00:24
L'entretien est terminé
Après près de 2h45 de débats, cet entretien est maintenant terminé. 
16/04/2018 à 00:23
Emmanuel Macron «félicite» le Paris Saint-Germain
En conclusion, Jean-Jacques Bourdin interroge Emmanuel Macron sur le match de football entre Paris et Monaco, gagné sept buts à un par les Parisiens ce dimanche soir. "Je tiens à féliciter le Paris Saint-Germain pour cette victoire mais je suivrai avec attention le parcours européen de l'Olympique de Marseille", dit-il en souriant.

Quant à la possibilité de faire un second entretien à la fin de sa deuxième année de quinquennat, Emmanuel Macron répond : "Chiche !".


16/04/2018 à 00:19
«Je n’ai pas attendu #MeToo pour m’en rendre compte» dit Macron
Évoquant le mouvement #MeToo, Edwy Plenel demande au président: “Qu’allez-vous dire, qu’allez-vous faire ?”
“Je n’ai pas attendu #MeToo pour m’en rendre compte. Quand j’ai lancé En Marche, il y a eu une grande consultation citoyenne dans laquelle est ressortie la problématique des inégalités et des violences faites aux femmes."
Sur le fait d’avoir un plateau constitué de trois hommes: “Vous ne pouviez pas changer de sexe pour tenir mon engagement”, ironise Emmanuel Macron et poursuit:
“J’ai fait en sorte que mon mouvement investisse autant de femmes que d’hommes. Si vous regardez notre assemblée nationale, nous avons fait élire autant de femmes que d’hommes, ce qui n’était jamais arrivé dans la République. Nous avons ensuite fait un gouvernement paritaire, comme mon prédécesseur. Nous avons établi un stratégie nationale portée par Marlène Schiappa. Je l’ai fait pour le personnel politique, les ministres, les députés, je vais continuer à le faire pour les hauts fonctionnaires. Cela va se poursuivre à l’école, à la maison afin que ces femmes comprennent: la honte elle n’est pas de votre côté", clame Emmanuel Macron.
16/04/2018 à 00:17
Macron constate la montée des "démocraties illibérales" en Europe
Jean-Jacques Bourdin interpelle le Président sur l’Europe, et la volonté de certains pays d'Europe de l'Est de remettre en cause les traités européens : "comment pouvez-vous refonder l’Union Européenne avec des dirigeants comme Viktor Orban"?
"Je ne partage rien de ses valeurs, mais il est là et il est élu" répond Emmanuel Macron, qui constate une montée en puissance des "démocraties illibérales", dont la Hongrie, qui selon lui "remettent en cause l'Etat de droit". Constatant aussi une fatigue des peuples européens quant à la pratique des institutions, le Président dit vouloir en France "une démocratie forte et vivante", pour éviter l'élection de partis populistes. Sur l’Union Européenne, Emmanuel Macron dit croire à une "Europe souveraine" capable de porter un nouveau projet et d'enthousiasmer les peuples européens. "Nous devons avoir des concitoyens qui prennent conscience" de l'importance de l'Union Européenne selon le chef de l'Etat. Pour lui, l'Europe doit protéger des grands risques, et assister les grandes transformations, citant notamment l’exemple de la sauvegarde des données personnelles.


16/04/2018 à 00:11
Emmanuel Macron «Nous sommes face à un phénomène migratoire inédit et qui va durer»
Nouveau sujet : la loi asile et immigration. Emmanuel Macron est interrogé par Edwy Plenel. Selon le co-fondateur de Mediapart, le défenseur des Droits, Jacques Toubon "critique cette loi qu'il trouve être un grave recul". "La France a été condamnée cinq fois en 2016 par la Cour européenne des droits de l'homme", affirme-t-il."Le droit d'asile, ce sont des migrants légaux, il est remis en cause", déplore le journaliste, évoquant également le délit de solidarité, qu'Emmaüs souhaite supprimer. "Vous ne posez jamais de questions factuelles", observe le président.

"Nous sommes face à un phénomène migratoire inédit et qui va durer", certifie le président. "Il y a des conflits géopolitiques, des situations climatiques et une démographie africaine qui est là, une véritable bombe, il faut bien le dire. Les migrants se tournent vers l'Europe car nous avons ce destin lié avec l'Afrique", explique-t-il.

Selon lui, le droit d'asile est un principe "inconditionnel et constitutionnel" et il est "respecté", contrairement à ce qu'affirme le journaliste. Quant aux migrants économiques, qui ne relèvent pas de l'asile car ils ne risquent pas leur vie "il faut pouvoir les raccompagner chez eux", indique le chef de l'État, qui dit aborder la situation avec "beaucoup d'humilité". 
16/04/2018 à 00:04
Terrorisme: «mettre tout le monde en prison» est «contre-productif» pour Macron
Emmanuel Macron est ensuite interpellé sur les personnes présentes dans le Fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) - différent des "fichés S"- et les propositions faites par l'opposition d'expulser les étrangers présents dans ce fichier:

» Déradicalisation : les principales mesures du plan gouvernemental

"C’est un fichier de soupçon. Il s'agit de surveiller des gens en fonction de ce qui est connu d’eux. Est-ce que tous les gens, environ 19.000 individus dont 10.000 particulièrement suivis ont fait quelque chose de répréhensible ? La réponse est non."


Le président différencie ensuite "les étrangers en situation régulière" de ceux en situation irrégulière: "Si un fait est identifié et que l'individu est en situation irrégulière, la personne est alors expulsée, ou en voie d'expulsion. Dès qu’il y a un élément matériel, on prend les dispositions pour le faire sortir du territoire, dans des conditions dignes", assure t-il.
Sur l'éventualité de mettre en détention toutes les personnes présentes dans ce fichier, Emmanuel Macron montre son opposition: "Le but est de démanteler des réseaux. Si nous mettons tout le monde en prisons, nous ferrons quelque chose qui n’est pas conforme au droit et qui est contre-productif puisque les prisons sont aussi des lieux de surveillance. Donc on renforce les règles et on recrute plus de forces de police pour pouvoir les empêcher de passer à l’acte. Nous avons, malheureusement, avec le terrorisme améliorer nos performance", juge le président.
15/04/2018 à 23:55
Pour Macron, le voile "insécurise" la société française
Edwy Plenel demande au Président s’il est d’accord pour déconseiller aux femmes voilées d’accompagner les sorties scolaires, comme l’a fait le ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer. Emmanuel Macron comment par défendre son ministre : "il mène une réforme indispensable, qui est une réforme de justice". Sur le cas des mères accompagnatrices, le chef de l’Etat distingue celles qui collaborent officiellement au fonctionnement de l’école, qui ne doivent pas se voiler lors des sorties scolaires, et les mères qui accompagnent les élèves de manière ponctuelle, qui peuvent le faire.
"Quand vous croisez une femme voilée, quel est votre sentiment ?" lui demande alors Jean-Jacques Bourdin. "Je la respecte" répond d'abord Emmanuel Macron, tout en avouant se demander si son choix est libre. Pour lui, le voile "insécurise" (sic) la société française, car il n'est pas "conforme à notre civilité. Nous ne comprenons pas qu’il y ait cette distance, cette séparation qu’est le voile. Ce dont je veux être sûr, c’est qu’aucune femme ne soit obligée de le porter". Emmanuel Macron parle d’une nécessaire bataille pour l’émancipation.

15/04/2018 à 23:50
Islamisme radical : «Il faut être intraitable», dit Macron
Selon Emmanuel Macron, les peurs de certains Français quant à l'islam sont causées par "un fait que nous devons regarder en face : l'islamisme radical". "C'est un travail de reconquête qui est l'un des plus grands défis de notre nation. Nous avons aujourd'hui des femmes et hommes qui, au nom de la religion qu'est l'islam, proposent à nos jeunes de sortir de la République. La seule manière, c'est d'interdire leur activité et de remettre la République. Pour y parvenir, il faut mettre en place un meilleur contrôle des écoles. Dans l'école de France, il ne doit pas y avoir des propos comme cela", affirme le président, en référence à certains jeunes qui auraient prôné le djihad lors de commémorations d'attentats.

"Il faut être intraitable" avec l'islamisme radical, clame-t-il. "C'est une lèpre dans la société". Le président estime que la République a "échoué dans les quartiers les plus difficiles, c'est là que l'école a démissionné". "Il faut aider ces jeunes à l'école, au collège, au lycée. Il faut les aider dans l'accès à l'université", liste le chef d'État.


15/04/2018 à 23:44
Emmanuel Macron : « Nous devons pacifier les liens entre la société» et l'islam
Le président de la République est interrogé sur l'islam, qui ferait "peur" à une partie des Français, selon Jean-Jacques Bourdin. "Nous nous sommes installés dans une situation où, depuis quelques décennies, nous avons une religion qui a pris une place plus importante depuis la deuxième guerre mondiale. C'est une réalité", résume le président.

"Aujourd'hui, on a entre 4.5 et 6 millions de Français qui croient dans l'islam. Cette religion est nouvelle pour la République. Dans son histoire, elle a eu une relation avec la religion catholique, juive et catholique, protestante. Elle s'est construite. L'islam est apparu ensuite alors que ses règles sont très différentes", poursuit-il. "C'est un fait qui s'est installé dans ces dernières années. Ma conviction, c'est que si nous devons nous tenir unis, nous devons pacifier les liens entre la société et les religions", affirme le chef de l'État.
15/04/2018 à 23:44
«Moi, je ne prends pas les ministres pour des obligés», tacle Macron à propos d’Hollande
Concernant la sortie du livre Les leçons du pouvoir de François Hollande, Jean-Jacques Bourdin interpelle Emmanuel Macron sur sa “duplicité” avancée par l’ancien président.
“Il a sa part de vérité. J’ai du respect pour François Hollande. Vous me connaissez maintenant. Quand je suis devenu conseiller de François Hollande, je n’étais pas d’accord sur tout. Je l’ai dit et je suis parti en ne demandant rien, en juillet 2014. J’ai été rappelé comme ministre. (...) Moi dans mon gouvernement, je ne prends pas les ministres pour des obligés. Ce sont des femmes et des hommes libres. Je vous fais la chronique des cinq années avec François Hollande. Ces cinq années j’ai toujours dit ce que je faisais. J’ai plutôt l’impression que j’ai dû assumer des désaccords. Je peux regarder en face ce que j’ai fait en tant que conseiller puis ministre. Je ne considère pas qu’être un ministre c’est être un obligé”, conclu Macron à propos de son prédécesseur.
15/04/2018 à 23:43
Macron, un «monarque républicain» ?
Les journalistes abordent la manière d’exercer le pouvoir du Président Emmanuel Macron. Evoquant une "nostalgie implicite de la monarchie" des Français, Jean-Jacques Bourdin cite Ricoeur sur le danger d'un gouvernement des spécialistes, puis demande au chef de l'Etat : "est-ce que vous n’êtes pas dans une illusion puérile de toute-puissance?" En réponse, Emmanuel Macron cite toutes les réformes en cours et son souhait de dialogue permanent : "si je croyais à la toute-puissance, je vous dirais que j’ai une solution" pour tous les problèmes du pays. Disant croire à l’autorité et tirer sa légitimité du peuple français, le chef de l'Etat met en avant sa "constance dans les convictions".
Edwy Plenel affirme alors qu'Emmanuel Macron a été élu avec très peu de suffrage au premier tour (18% des votants inscrits, non des exprimés). Pour répondre, son interlocuteur ajoute qu’il n’y a pas eu de front républicain, mais admet que beaucoup des votants qui ont voté pour lui au second tour n’adhéraient pas à son projet. La vraie preuve, selon le chef de l'Etat, de sa légitimité politique, repose sur le vote des élections législatives où le mouvement En Marche a remporté une victoire nette. Enfin, s’il possède la "légitimité démocratique", Emmanuel Macron dit respecter l’ensemble de la société, malgré les désaccords. "Nous sommes un pays en colère", ajoute-t-il, mettant l'accent sur l'importance des réformes pour "débloquer la société" et "réunifier le pays".


15/04/2018 à 23:31
Macron à Plenel : «Je m'installe dans votre salon et on dit que c'est un projet agricole alternatif ?»
Interrogé par Edwy Plenel sur le fait que certaines personnes ont des "projets collectifs" à Notre-Dame-des-Landes via des SCOP, SCIC, Emmanuel Macron assure que cela "existe déjà". "Nous portons ces projets", clame-t-il.

"Vous détruisez ces projets", déplore Edwy Plenel. "Laissez des alternatives s'inventer !", demande-t-il.

"Vous dites des contre-vérités alors que ces formes juridiques existent déjà", réplique le président. "Je m'installe dans votre salon et on dit que c'est un projet agricole alternatif ? C'est impossible", ironise-t-il. Et de conclure : "Il faut se conformer, ensemble, aux règles de la République". 
15/04/2018 à 23:27
NDDL : à l'issue du nouveau délai, «tout ce qui doit être évacué le sera», promet Macron
Le président de la République s'exprime maintenant sur Notre-Dame-des-Landes, dont le site a été évacué la semaine dernière : "Les choses avancent mais tout n'est pas réglé", affirme-t-il. "Il y avait un projet d'aéroport. Des gens ont créé une ZAD car ils s'opposaient au projet d'aéroport. Nous avons décidé de ne pas faire cet aéroport car il n'était plus conforme à nos priorités écologiques et qu'il était attaché à un sentiment d'injustice et de trahison des populations", explique le chef de l'État.

Quant à l'occupation par des zadistes, elle avait "presque dix ans d'âge". "À la fin de la trêve, on devra évacuer les choses. Ces gens étaient là en occupant illégalement le domaine public. Certains ont un projet agricole, ils le mènent, le conduisent, il n'ont pas été évacués", détaille-t-il. Mais, à l'issue du nouveau délai fixé par le gouvernement, "tout ce qui doit être évacué le sera".

» ZAD de Notre-Dame-des-Landes : une semaine d'expulsions et de heurts


15/04/2018 à 23:23
«Vous traitez les étudiants d’agitateurs professionnels», critique Edwy Plenel
Sur le mouvement des universités bloquées ces dernières semaines, Edwy Plenel rappelle l'anniversaire prochain de Mai 68: "Vous traitez les étudiants d’agitateurs professionnels, friands de diplômes en chocolat tandis que les CRS entrent dans l’université. C’est votre façon à vous de fêter les 50 ans de mai 68, par la répression ?", lance le journaliste de Mediapart, taquin.
“Bon comme vous y allez. Votre question a quelque facilité avec la réalité”, débute d’abord Emmanuel Macron, avant de développer: “Dans toutes les universités bloquées, ceux qui bloquent sont minoritaires. Des groupes minoritaires viennent bloquer en ayant un projet politique. Ceux-là ne sont pas des étudiants." Le président cite ensuite Audiard: "Ceux-là sont des professionnels du désordre."
Interrogé sur l’université de Tolbiac, dont son président a demandé l’intervention des forces de l’ordre, Emmanuel Macron précise que cette université "a une particularité, elle est topographique, c’est un tour. C’est presque plus dangereux d'intervenir que de ne pas intervenir."


15/04/2018 à 23:20
Emmanuel Macron : «Privatiser la SNCF, ça n'a aucun sens»
Jean-Jacques Bourdin aborde le sujet de la réforme de la SNCF. Emmanuel Macron souligne la nécessité de moderniser le fonctionnement de l'entreprise au regard de ses résultats, des besoins financiers actuels de la SNCF, et notamment 1,5 milliard annuel de financement de sa dette. Le Président cite les règles propres au personnel de l’entreprise et ses nombreuses spécificités, qu'il souhaite renégocier. Interrogé sur le statut légal de la SNCF, Emmanuel Macron évoque sa transformation en "société privée à capitaux publics", récusant tout projet de privatisation, qui "n'a aucun sens". Il indique vouloir "faire une SNCF plus forte, pour apporter un meilleur service aux Français".
Edwy Plenel dit "la crainte des cheminots" que la concurrence à venir se concentre sur les lignes profitables, plombant les comptes de l'entreprise publique, et demande ensuite au Président pourquoi il ne "change pas" les dirigeants de la SNCF. Refusant de répondre sur ce dernier point (et déplorant la méthode du journaliste), Emmanuel Macron répond qu'il respecte et comprend les angoisses des cheminots et, disant "prendre ses responsabilités", souligne qu'il y aura un "temps de dialogue" avec les syndicats dans le cadre de la réforme.

» Ces 47 milliards d'euros de dette qui plombent la SNCF

» SNCF : Tout savoir sur la grève des cheminots


15/04/2018 à 23:04
Emmanuel Macron : «Le système de retraites par répartition va continuer»
Le chef de l'État est maintenant interrogé sur le système de retraites par répartition. Compte-t-il le remettre en cause ? "Non, j'y crois et je veux le consolider. Ce qu'il faut revisiter, c'est l'injustice du système de retraites dans lequel nous vivons avec une quarantaine de systèmes différents. Progressivement, tout le monde va converger vers un système unique. Le système par répartition va continuer", promet Emmanuel Macron.

Le président souhaite un système "plus transparent et équitable" avec la suppression des "régimes spéciaux", y compris celui des cheminots.
15/04/2018 à 23:03
Une deuxième journée de solidarité: «Je ne suis pas contre», annonce Macron
L'interview traite maintenant de la question du financement du troisième âge. Sur ce dossier, Emmanuel Macron annonce qu'instaurer une seconde journée travaillée non payée est envisageable: “C’est une piste intéressante. Je ne suis pas contre.”
Il prévient également que c'est "l'ensemble de la collectivité nationale qui va devoir prendre en charge" ce financement et qu'il faut "penser cette problématique collectivement", peut-être en créant un cinquième risque assuré par la sécurité sociale. Des annonces arriveront "fin d'année 2018, début 2019", promet Emmanuel Macron.
15/04/2018 à 22:59
Edwy Plenel interpelle Emmanuel Macron sur les hôpitaux
Le journaliste de Mediapart aborde maintenant le sujet de la Santé, évoquant les économies à réaliser par l’hôpital public, et les professionnels du secteur "poussés à bout". Le président admet "plusieurs décennies de défaillance collective", et indique vouloir réformer le système de tarification à l’activité, annonçant des mesures qui seront précisées d'ici juin prochain. Emmanuel Macron dit aussi vouloir repenser "à la fois l’hôpital et la médecine de ville", pour mieux s'adapter aux différences démographiques. Concernant l'organisation des soins, le président souhaite donner "plus de responsabilité au personnel soignant".
L’échange s’oriente ensuite sur le sujet des maisons de retraite et de la vieillesse. Constatant une dynamique qui s’accélère et un problème démographique, le chef de l’Etat souligne l’importance de la dépendance, qui concerne des périodes de plus en plus longues. Le président dit vouloir organiser le "risque de dépendance".
15/04/2018 à 22:53
Macron «entend les colères», réfute la «coagulation» des «mécontentements» sociaux
Emmanuel Macron estime que les différents mouvements sociaux en cours ne correspondent "pas à une coagulation" des "mécontentements", même s'il dit les "entendre" et les "respecter".  "Je conteste l'orientation de votre question qui viserait à voir une logique ou à vouloir créer une coagulation dans ces mécontentements. Il n'y en a pas tant que cela. Le mécontentement des cheminots a peu à voir avec le mal-être profondément légitime à l'hôpital qui dure depuis des années...", assure le chef de l'État. 
15/04/2018 à 22:46
Emmanuel Macron : «Il n'y aura pas de nouvel impôt»
Le président de la République est maintenant interrogé sur la taxe foncière. Va-t-elle être modifiée ? "Aucune décision n'a été fixée à ce sujet", admet Emmanuel Macron. "La taxe foncière a des règles qui sont liées à des valeurs qui sont négatives qui doivent être modifiées. Aujourd’hui nous devons refondre en profondeur notre fiscalité locale. "On va la recomposer pour la répartir entre les communes, les départements et les régions", assure-t-il.

Mais, dans tous les cas, "il n'y aura pas de nouvel impôt" ni local, ni national, promet le chef de l'État. 
15/04/2018 à 22:43
Edwy Plenel et les "cadeaux" de Macron aux plus aisés
Edwy Plenel souligne que cinq milliards de cadeaux ont été faits et qu’aucune garantie n’est prise pour s’assurer des effets sociaux des réformes, évoquant le CICE mis en place alors qu'Emmanuel Macron conseillait François Hollande. En réponse, Emmanuel Macron conteste le terme de "cadeau" et explique que les réformes sont nécessaires pour "garder les talents" et en attirer d’autres, même s’il admet que les effets bénéfiques sur la croissance ne sont jamais une certitude et qu’il est "très difficile de séparer le bon grain de l’ivraie".
Alors que le président défend la réforme de l’ISF et la taxe de 30% sur les revenus financiers, Jean-Jacques Bourdin s'invite dans l'échange, insistant sur les facilités faites aux plus aisés alors que "la réforme de la CSG pénalise les retraités", orientant ainsi le débat sur ce dossier socialement tendu.

“Qui paye la retraite ? Les travailleurs !”, assène le président. “Je n’ai pris personne en traître, je ne me cache pas là-dessus, j'avais annoncé cette mesure pendant ma campagne. Mais à partir du premier novembre 2018, ils seront largement compensés par la baisse de la taxe d’habitation”, ajoute le président avant de rappeler le calendrier de la suppression de la taxe d'habitation: "premier novembre de cette année, un tiers, premier novembre 2019, un tiers et dernière phase pour le premier novembre 2020."
15/04/2018 à 22:30
Emmanuel Macron : «Je ne vais pas interdire les plans sociaux»
Interrogé sur la situation à Carrefour où des dividendes auraient été distribués à hauteur de 345 millions d'euros, Emmanuel Macron répond : "Est-ce que c'est mon rôle de dire qu'il y a des injustices dans ce pays ? Oui. Est-ce que mon rôle est de dire que je vais l'empêcher ou le bloquer ? Non".

"Votre rôle est de faire dans ce pays que tout soit plus égalitaire", rétorque Jean-Jacques Bourdin.

"Je vous remercie de me donner des instructions sur ce que je devrais faire. Ce que vous dites est la vérité. Ce sont des injustices que nous vivons dans notre pays", répond Emmanuel Macron. "Je ne vais pas réaliser un texte qui interdit les plans sociaux. Face à ces injustices, on doit poursuivre la possibilité que chaque salarié puisse être considéré", ajoute-t-il. 
15/04/2018 à 22:25
Emmanuel Macron évoque le redressement fiscal de Mediapart
Nouveau moment très tendu sur la plateau de l'émission : vraisemblablement agacé par les piques et interruptions d'Edwy Plenel au sujet de la fraude fiscale, le président évoque directement le journal Mediapart, dont Edwy Plenel est co-fondateur, qui a subi un redressement fiscal en 2014. Le journal s'était appliqué des règles fiscales trop favorables, la somme éludée s'étant élevée à 4,2 millions d'euros.


Sur un plan européen, le président assure qu’il y a "des mécanismes en Europe qui sont condamnables moralement”, en évoquant l’optimisation fiscale. “Nous devons réussir à avoir une convergence sociale et fiscale avec les pays européens. C’est ce que je demande dans les prochaines priorités budgétaires européennes”, assure Emmanuel Macron en ajoutant que “le gouvernement français sera intraitable en terme de fraude fiscale”.
Edwy Plenel interrompt le président en le questionnant: “Il y a peut-être de l’argent que vous ne voulez pas aller chercher ?” puis évoque le cas du groupe de luxe Kering, qui est accusé d’avoir évadé 2,5 milliards d’euros. “L’Italie a ouvert une enquête pour fraude fiscale, pas la France. Allez-vous demander au ministre des comptes publics d’ouvrir une enquête ?”

“Mais le président ne peut pas demander d’ouvrir ou de supprimer une enquête fiscale Monsieur Plenel”, lui répond le président.
15/04/2018 à 22:19
Emmanuel Macron : «Je n'ai pas d'amis»
Jean-Jacques Bourdin évoque le présumé "ami" d'Emmanuel Macron, Bernard Arnault, propriétaire du groupe de luxe LVMH. "Je n'ai pas d'amis", assure le président de la République. "Vous n'êtes pas des juges, vous êtes des intevieweurs. Je ne suis pas là pour juger qui que ce soit", lâche le chef de l'État.


15/04/2018 à 22:18
Le ton monte au sujet de la fraude fiscale
Le sujet de la fraude fiscale et des paradis fiscaux a donné lieu à une altercation entre Emmanuel Macron et ses deux intervieweurs. Interpellé sur les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre les fraudeurs, le Président souhaite d'abord faire une distinction entre "fraude" et "optimisation" fiscale; une précision "technique" qui fait sortir Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel de leurs gonds. Après plusieurs interruptions musclés, le débat reprend son cours.

» Les propositions du gouvernement pour lutter contre la fraude fiscale
15/04/2018 à 22:11
Emmanuel Macron dénonce une question «biaisée» d'Edwy Plenel
Changement de thème. Edwy Plenel pose une longue question à Emmanuel Macron : "Vous auriez du appeler votre mouvement “En force !”", lance le co-fondateur de Mediapart, faisant allusion aux nombreuses réformes en cours. Selon le journaliste, Macron a "divisé le pays" et les "colères montent de toutes parts".

Mécontent, Emmanuel Macron estime que la question d'Edwy Plenel est plus un "plaidoyer" qu'une question objective. "Je conteste l'orientation de votre question", assure-t-il. "Je réponds et je répondrai à toutes les questions, mais je tenais à dire que votre question était posée de manière biaisée", lâche le chef de l'État.

S'il comprend les "colères" des Français, le président dit "assumer" toutes ses réformes.





15/04/2018 à 22:09
«On ne va pas changer de constitution parce qu’elle ne vous plait pas» lance Macron à Plenel
En question de “transition”, Edwy Plenel interroge maintenant le président sur le rôle du parlement après les frappes en Syrie: “Il y a un problème démocratique en France dès que les armes parlent. Vous êtes le seul à décider. Est-ce que vous trouvez cet archaïsme normal ?”
Emmanuel Macron hausse le ton et répond: “Je ne parlerai pas d’un pouvoir solitaire, je parlerai d’une responsabilité du chef des armées décidée par la constitution. Ça peut vous déplaire mais ça a été décidé par le peuple. Et je ne décide pas seul, je décide avec le chef d’État major des Armées.
Visiblement insatisfait, le journaliste de Mediapart insiste: “Mais la question c’est celle du contrôle et du pouvoir du parlement ?"
"Il est défini par notre constitution, avec l’article 35 alinéa 2, on ne va pas changer de constitution parce qu’elle ne vous plait pas. Il y en avait d’autres qui voulaient la changer pendant l’élection présidentielle mais ils n’ont pas gagné", rétorque le président. 
15/04/2018 à 22:04
Pour Edwy Plenel, «Donald Trump se moque bien du peuple syrien»
Edwy Plenel affirme que "Donald Trump se moque bien du peuple syrien", et que sa cible est l’Iran, soulignant devant Emmanuel Macron le risque de surenchère guerrière de la part des Etats-Unis, d’Israël et de l’Arabie Saoudite. En réponse, Emmanuel Macron affirme qu’il a évoqué avec Mohamed Ben Salmane, l’homme fort de l’Arabie Saoudite, la question humanitaire au Yémen actuellement cible d’opérations militaires saoudiennes. "Nous avons réacquis de la crédibilité devant les Russes" affirme le chef de l’Etat, pour qui les frappes en Syrie ont permis de montrer la résolution française, et ont permis de "diviser les Turcs et les Russes".
Concernant l’initiative de paix, le Président dit son objectif de "mettre tout le monde autour de la table", et de créer une alternative aux groupes de négociations actuels.
15/04/2018 à 21:55
Emmanuel Macron : «La France n'a pas déclaré la guerre au régime de Bachar al-Assad»
Le président est-il convaincu que l'on peut "obtenir la paix par un acte de guerre", interroge Jean-Jacques Bourdin. "On n'obtient pas la paix en faisant des bombardements", assure le président. "La France n'a pas déclaré la guerre au régime de Bachar al-Assad. Nous avons œuvré pour que le droit international ne soit plus violé, ainsi que les résolutions de l'ONU", affirme-t-il. "Nous préparons une solution politique" en Syrie afin de "permettre une transition", précise-t-il.

"La France est le pays qui a été le plus actif sur le plan diplomatique et humanitaire ces derniers mois. Nous étions arrivés à un moment ou cette frappe était indispensable pour donner de la crédibilité à notre communauté. Pour construire cette solution durable en Syrie, il faut discuter avec l'Iran, la Syrie, la Russie", explique le président de la République, assurant qu'il est d'une "constance extrême" dans cette affaire.


15/04/2018 à 21:53
Edwy Plenel interpelle Macron sur la décision française de bombarder la Syrie
Le journaliste de Mediapart interpelle d'abord le président en lui demandant si cette décision ne donne pas à la France le rôle de "gendarme du monde", prenant le risque d'accroître le désordre mondial. Emmanuel Macron répond nettement "non", arguant que la France mène d'abord une guerre contre Daech, en rappelant l'implication des djihadistes basés en Syrie dans les attentats de 2015.

Le président souligne ensuite que l'ennemi de Bachar al-Assad est "son propre peuple", et déplore le fait que la Syrie ne se soit pas conformée au droit international sur les armes chimiques. Il justifie également les bombardements de vendredi sans accord à l'ONU à cause du "blocage constant des Russes".


Emmanuel Macron rappelle enfin que les frappes ont été réalisées par “trois membres du Conseil sécurité”, dans un “cadre stricte sans déclarer la guerre au régime de Bachar Al-Assad” et qu’il n’y a eu aucun “dommage à l’égard des Russes”.



15/04/2018 à 21:47
Emmanuel Macron : «Nous avons réussi l'opération militaire» en Syrie
Le président de la République est interrogé sur les frappes en Syrie, effectuées samedi matin par la France, les États-Unis et la Grande-Bretagne après l'utilisation présumée d'armes chimiques à Douma, dans la Ghouta orientale par le régime de Bachar al-Assad. "Je veux ici rendre hommages à nos soldats. L'opération a été parfaitement conduite, de manière remarquable. C'est le professionnalisme de nos militaires, de nos équipements. Trois sites de production et de traitements d'armes chimiques ont été visés. Un site de manière conjointe avec les force américaines et britannique, un autre par les Américains, le troisième par les Français", explique le chef de l'État. Et d'assurer : "Nous avons réussi l'opération militaire. Les capacités d'armes chimiques ont été détruites. Il n'y a eu aucune victime".

Emmanuel Macron revient ensuite sur la décision de frapper la Syrie. "Cette décision a été prise, sur le principe, dès dimanche dernier, après les premières identifications d'armes chimiques dans la Ghouta orientale en Syrie. Elle est conforme aux engagements que nous avions pris. Nous avons obtenu par nos services et les services de nos alliés des preuves que des armes chimiques avaient été utilisées. Nous avons obtenu la preuve que ces armes pouvaient être attribuées au régime syrien. C'est ce qui nous a conduit a conduire cette intervention", affirme-t-il.

» Frappes en Syrie : le récit en images et en vidéos


15/04/2018 à 21:40
L'entretien d'Emmanuel Macron débute
L'interview du président de la République devrait durer au moins deux heures, au théâtre national de Chaillot, face à Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel. 
15/04/2018 à 21:30
Les images de l'arrivée d'Emmanuel Macron
L'entretien du président doit débuter dans deux minutes. Ci-dessous, les images de son arrivée avec Brigitte Macron. Emmanuel et Brigitte Macron.AFP PHOTO / FRANCOIS GUILLOTEmmanuel Macron serre la main aux journalistes de BFMTV et Mediapart.AFP / FRANCOIS GUILLOT
15/04/2018 à 21:22
Le plateau de l'interview
Voici le plateau de l'interview, au théâtre national de Chaillot, à Paris. 
15/04/2018 à 21:19
Les dossiers chauds qui attendent Macron
De la grève SNCF à la réforme du système de retraits, en passant par les impôts, le chef de l'État va tenter ce soir de faire de la pédagogie sur les nombreuses réformes en cours et à venir. Le Figaro fait le point dans notre article à lire en cliquant ici.
15/04/2018 à 21:09
Pourquoi avoir choisi Bourdin et Plenel ?
“Lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s'était engagé auprès des rédactions de BFMTV et RMC d'une part, de Mediapart d'autre part, à revenir répondre à leurs questions s'il était élu président. Depuis l'élection, RMC/BFMTV et Mediapart avaient séparément renouvelé leurs invitations. Près d'un an après son entrée à l'Élysée, le président a proposé à BFMTV, RMC et Mediapart d'organiser ensemble une émission (...) pour faire le bilan de son action”, explique Nextradiotv dans un communiqué.
15/04/2018 à 21:07
Plenel, figure contestée
Jean-Jacques Bourdin sera accompagné d’Edwy Plenel, président et co-fondateur du site Mediapart. Après avoir longtemps hésité, le journaliste, engagé à gauche, a finalement accepté l’invitation du chef de l’État pour “ne pas se dérober”. Il a promis de relayer les "questionnements sans concessions de la société". Longtemps considéré comme le chantre du journalisme d’investigation, il a été accusé de complaisance à l'égard de l’islamologue suisse Tariq Ramadan, mis en examen pour viol fin février.

» Edwy Plenel, le pari risqué d'Emmanuel Macron
15/04/2018 à 21:05
Bourdin, un cogneur face à Macron
C’est inédit. Ce soir, Emmanuel Macron sera confronté à Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel, deux figures du journalisme actuel. Le premier est considéré comme le plus craint des intervieweurs par les hommes politiques. Il anime l’émission “Bourdin direct”, tous les matins sur RMC et BFMTV, émission célèbre pour son interview politique de 8h35. Porte-parole des colères populaires, il exige des réponses sans langue de bois et ne devrait pas hésiter à attaquer le président de la République ce dimanche soir.

» Après TF1 jeudi, Macron sera face à Bourdin et Plenel dimanche soir 
15/04/2018 à 21:02
Dans les coulisses, Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel se préparent

Les deux journalistes n'ont plus que quelques minutes, avant le début de l'entretien du président de la République. 
15/04/2018 à 20:59
Pourquoi le Palais Chaillot ?
Pour cet "entretien d’évaluation", le lieu n’a pas été choisi au hasard. Alors qu’Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin se sont opposés fermement à interroger le président au palais de l’Elysée, le journaliste de Mediapart a fait savoir sur son site que son équipe avait proposé plusieurs lieux: "le Collège de France au cœur du Quartier Latin et le café ‘Fluctuat nec mergitur’ place de la République". Finalement, précise le journaliste, c’est le théâtre national de Chaillot, place du Trocadéro (16e arrondissement de Paris) qui a été choisi "pour des raisons de symbole et de sécurité".


Côté symbole, Edwy Plenel rappelle que cet édifice, construit en 1937, est notamment associé à la figure populaire de Jean Vilar. Mais c’est surtout ce théâtre qui a accueilli après la seconde Guerre Mondiale, deux réunions de l’ONU. C’est durant l’une d’elle, en 1948, que fut adoptée la déclaration universelle des droits de l’homme. Un symbole fort, donc.
15/04/2018 à 20:56
Une côte de popularité en baisse
Alors que la cote de confiance du chef de l'État, mesurée par Kantar Sofres pour Le Figaro Magazine, était restée stable ces derniers mois, elle a enregistré une forte baisse depuis le début de la grève des cheminots. Selon le dernier baromètre daté du 6 avril dernier, 40% des Français font confiance à Emmanuel Macron.    » Sondage : la cote d'Emmanuel Macron repart à la baisse
15/04/2018 à 20:53
Macron arrive au théâtre Chaillot
Main dans la main avec Brigitte Macron, le chef de l'État vient d'arriver sur les lieux de l'interview, au théâtre national de Chaillot, dans le 16e arrondissement de Paris.
15/04/2018 à 20:49
Lors de son entretien à Berd'huis, Emmanuel Macron n'a pas convaincu les retraités
Plus de 6,4 millions de téléspectateurs ont suivi jeudi sur TF1 les explications du chef de l'État, assis au milieu d'une salle de classe de Berd'huis, dans l'Orne, face à Jean-Pierre Pernaut. Selon un sondage Odoxa et Dentsu Consulting réalisé pour Le Figaro et Franceinfo, 63% des Français ont trouvé Emmanuel Macron “convaincant”.  
Les retraités, qui étaient l'un des publics visés par cet entretien, sont 72 % à ne pas avoir trouvé le président convaincant sur la hausse de la CSG. Sur la SNCF, le soutien à la réforme reste acquis avec 56 % des sondés y étant favorables. Ils sont aussi 55 % à désapprouver le principe de la grève reconductible.
15/04/2018 à 20:44
À Berd’huis, Macron a «entendu les inquiétudes» des Français
Avant son entretien face à Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel dimanche, Emmanuel Macron a répondu aux questions de Jean-Pierre Pernaut, jeudi à 13 heures, sur TF1. Interrogé depuis Berd'huis, un petit village de l’Orne, le chef de l’État a assuré qu’il avait "entendu" les inquiétudes des Français.
Le président a également affirmé que le gouvernement devait “aller jusqu’au bout” de ses réformes. Sur tous les dossiers sensibles, il a justifié et défendu les décisions prises, de la hausse de la CSG qui mécontente les retraités à la limitation de la vitesse à 80 km/h, très impopulaire chez les automobilistes.
15/04/2018 à 20:38
Le dispositif ce dimanche
Alors que l’interview de Berd’huis avait eu lieu dans une salle de classe d’une école du petit village normand, le président et ses deux intervieweurs seront cette fois assis autour d'une table triangulaire, et dans un cadre prestigieux: le grand foyer du théâtre national de Chaillot à Paris. Le lieu donne sur les jardins du Trocadéro et la tour Eiffel, et est en outre situé symboliquement sous le Parvis des droits de l'Homme. Une grue va être déployée, ainsi que huit caméras à l'intérieur et deux à l'extérieur du théâtre.
"C'est une émission qui est très différente et complémentaire de celle de jeudi, qui était un exercice de proximité, dans une commune rurale, avec des symboliques fortes dans ce sens là; et des reportages sur la vie quotidienne des Français. Dimanche, l'exercice est très différent, avec un lieu au cœur de Paris, une durée de deux heures minimum, une interview “brute” c'est à dire sans reportages, et deux intervieweurs réputés pour leur pugnacité", a déclaré Hervé Béroud, rédacteur en chef de BFMTV. 
15/04/2018 à 20:36
Le programme de l’entretien d’Emmanuel Macron
Emmanuel Macron sera interrogé dimanche, en direct sur BFMTV, RMC et Mediapart par Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel. Le début de cet entretien, qui devrait durer deux heures, est programmé à 20h35. 
Du côté des thèmes, "il y aura une place plus importante sur les questions qui engagent la France dans le conflit syrien, la Turquie, Trump, Poutine...", selon Hervé Béroud, rédacteur en chef de BFMTV. À l'inverse, dans l'actualité nationale, "il y a certains sujets sur lesquels nous ne reviendront pas, comme les 80 km/h sur les routes", le président s'étant déjà largement exprimé là dessus jeudi, à Berd’huis, face à Jean-Pierre Pernaut. "Ce sera un peu comme le Bourdin du matin, mais en version XXL", conclut le patron de la chaîne d'info, confie Hervé Béroud, au Figaro.
15/04/2018 à 20:34
Bonsoir à tous
Suivez en direct sur ce live l’entretien d’Emmanuel Macron sur BFMTV, RMC et Mediapart. Après avoir été interviewé jeudi par Jean-Pierre Pernaut sur TF1 à Berd’huis, un petit village de l’Orne, le chef de l’État sera questionné par Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel à partir de 20h35 ce dimanche.
Jusqu'à présent, avare d'apparitions à la télévision, le président mène cette offensive médiatique pour marquer le premier anniversaire de son arrivée, selon la présidence. Elle intervient aussi dans un contexte social perturbé qui a entraîné un décrochage de l'exécutif dans les sondages.

» Sondage : la cote d'Emmanuel Macron repart à la baisse 

Bourdin, Plenel : la France des oubliés a été oubliée (16.04.2018)
Par Vincent Tremolet de Villers
Publié le 16/04/2018 à 17h20
ANALYSE - Les portes du théâtre de Chaillot étaient fermées pour ceux qu'Emmanuel Macron aurait aimé séduire, convaincre, rassurer.
Si, comme le dit Hugo, «la forme c'est le fond qui monte à la surface», c'est une impression trouble et déplaisante qui habite les esprits depuis l'émission du Palais de Chaillot. Sachants et communicants rivalisent d'ingéniosité et de paradoxes pour donner de l'éclat à un exercice terne, de la cohérence au désordre mais l'agressivité n'est pas le rythme et la dramaturgie ne se réduit pas aux éclats de voix. Durant cet interminable voyage au bout de l'ennui, tout était circulaire, «médiapolitique», un jeu de rôle entre le chef de l'État et Plenel et Bourdin en embuscade. Les deux cols ouverts étaient censés représenter la France des oubliés. Leurs voix, mielleuses ou tonitruantes, devaient être celles des obscurs, des sans-grade: ceux qui désertent les bureaux de vote et n'attendent plus rien du pouvoir. Les «Nobody». Las, plus que jamais les oubliés furent oubliés. Edwy Plenel assurait qu'il n'était là que par la volonté du peuple mais il devait ces deux heures de gloire à la seule volonté du chef de l'État et dans l'onctuosité hostile de ses questions, tout était idéologique, rien n'était populaire. Certes, il n'a jamais voulu prononcer la formule d'usage, «Monsieur le Président», mais jamais le peuple ne s'est distingué par ses mauvaises manières et l'on peut être offensif en étant courtois, incisif sans être sinueux. Le relâchement tenait lieu d'indépendance, la désinvolture d'audace, la dénonciation des riches de philanthropie.
Jupiter n'était pas au café du commerce mais dans un bistrot de carton-pâte au cœur du XVIe arrondissement.
Le peuple? Jean-Jacques Bourdin l'incarne médiatiquement, chaque matin. Il en a, croit-il, les colères soudaines, les impatiences viriles, les exigences éruptives. Pourtant, dimanche soir, il semblait ne parler que pour lui-même et mesurait chacun de ses effets. Comme on le dit d'un comédien, il voulait faire «peuple» mais confondait lui aussi la facilité et la simplicité, la démagogie et le bon sens, le contentement de soi et l'opiniâtreté. Les «vrais gens» sonnaient faux et les portes du théâtre de Chaillot étaient fermées pour ceux qu'Emmanuel Macron aurait aimé séduire, convaincre, rassurer. Les familles écrasées d'impôt, l'agriculteur épuisé de paperasse, le patron de PME qui chaque jour de grève perd de l'argent, l'automobiliste vent debout contre la limitation à 80 km/h, le propriétaire qui se sent injustement taxé, la jeune femme qui n'ose plus mettre une jupe avant d'emprunter certaines lignes de RER, le banlieusard qui le soir rentre chez lui comme en terre étrangère n'étaient pas invités. Les places étaient réservées aux zadistes «créatifs», aux grévistes de la SNCF, aux «étudiants» inquiets de ne pas avoir 15/20 sans avoir à déboucher un stylo. Sur l'hôpital ou l'islam, le réel a bien tenté quelques apparitions mais très vite les deux illusionnistes reprenaient la main. On peut même penser que les catégories populaires ne se sont jamais senties aussi exclues d'une émission qui leur était destinée. Jupiter n'était pas au café du commerce mais dans un bistrot de carton-pâte au cœur du XVIe arrondissement.
Certes, le chef de l'État n'est pas tombé dans le traquenard mais pourquoi, diable, en a-t-il accepté le principe ?
«C'est un exercice inédit», essayait de se consoler en direct Emmanuel Macron et l'on devait comprendre que l'ancien monde des entretiens compassés et connivents laissait place aux interviews à l'américaine. Ring, gants, cordes, victoire aux points: tout le champ sémantique de la boxe a nourri les conversations des commentateurs mais pourtant notre superproduction n'avait ni le professionnalisme, ni la qualité des grands débats outre-Atlantique. Là-bas, on dit «Mr Président» sans honte et les relances ou les questions précises ont pour objet d'épuiser un sujet, pas de satisfaire le journaliste qui les prononce.
Il y a déjà, c'est l'usage, des sondages qui indiquent le vainqueur de l'exercice et l'utilité de l'émission. C'est un fait: Emmanuel Macron, par effet de contraste, ne pouvait pas perdre cette confrontation. Il l'a emportée, largement. On peut, cependant, craindre que l'autorité qui partout l'accompagnait comme la distance altière qui le plaçait en surplomb des politiciens ont souffert d'un tel exercice. Certes, le chef de l'État n'est pas tombé dans le traquenard mais pourquoi, diable, en a-t-il accepté le principe?
Confuse, approximative, cette soirée n'aura finalement contenté personne. C'est la malédiction des communicants: plus ils cherchent la «proximité», plus le pouvoir (qu'il soit politique ou médiatique) semble s'éloigner des réalités concrètes. L'authenticité  ne se fabrique pas.

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Élisabeth Lévy : «Je préfère Mai 68 à ses ridicules et tristes remakes» (13.04.2018)

  • Publié le 13/04/2018 à 19:19

FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - Élisabeth Lévy répond aux questions de FigaroVox à l'occasion de la parution du dernier Causeur. De Peggy Sastre à Mai 68, elle déploie sa lecture des évolutions du féminisme, de la libération sexuelle qu'elle juge salutaire à une «libération de la parole» dont elle dénonce l'unanimisme.

Élisabeth Lévy est journaliste et directrice de la rédaction deCauseur. Dans son dernier numéro, le magazine publie un entretien sans tabous avec Peggy Sastre, une figure inclassable du féminisme. Le numéro revient également sur Mai 68, dans un dossier intitulé «de la révolution à l'inquisition».

En couverture du dernier Causeur, on trouve ce mois-ci le portrait de Peggy Sastre, qui vous accorde un long entretien. Entre son darwinisme obsessionnel, ses prises de position sur la GPA ou sur l'utérus artificiel… pas sûr que ça plaise à tous vos lecteurs, si?
Quelle drôle de question! Et quelle curieuse idée de nos lecteurs! Tous vos amis ne partagent pas forcément vos opinions ou croyances. Un journal n'est pas un régiment, mais un salon, qui serait fort ennuyeux si tous ceux qui le fréquentent pensaient la même chose. L'entre-soi idéologique stérilise notre vie intellectuelle où de bons esprits montrent leur vertu en refusant de frotter leur «cervelle à celle d'austruy», comme le recommandait Montaigne. Causeur n'est le bulletin d'aucune paroisse et si nous avons une sensibilité commune, disons, un attachement à l'ancien monde (sensibilité que nous partageons avec François Hollande…), nous n'aimons rien tant que la chatouiller, l'énerver, la confronter à d'autres qu'elles. Connaissez-vous beaucoup d'activités sociales plus agréables que les disputes entre amis?
L'indifférence de Peggy Sastre au qu'en-dira-t-on, son refus de céder aux injonctions de penser droit et sa drôlerie m'enchantent.
Si Peggy Sastre est à la «une» de Causeur, c'est parce que sa pensée nous stimule et qu'elle témoigne de sa grande liberté, qualité malheureusement en passe de devenir rare dans le monde intellectuel, notamment universitaire où le conformisme et le politiquement correct s'ajoutent à la baisse du niveau académique. Quant à ce que vous appelez son «darwinisme obsessionnel», il me paraît être à moi une grille de lecture particulièrement féconde. En un sens, un darwinien conséquent est forcément obsessionnel, il voit de l'Évolution partout. C'est sans doute trop systématique, mais bien plus cohérent que notre bricolage pour faire tenir ensemble les faits de nature et ceux de culture. Bref, je suis loin d'adhérer à l'absolutisme matérialiste de Peggy Sastre, mais il m'ouvre des pistes de réflexion. Et, je le répète, sa rafraîchissante indifférence au qu'en-dira-t-on, son refus de céder aux injonctions de penser droit et sa drôlerie m'enchantent. Je crois, et j'espère, qu'on n'a pas fini d'entendre cette voix singulière.
Vous aviez signé comme elle la fameuse tribune dans Le Monde, revendiquant une «liberté d'importuner».Trois mois plus tard, après des centaines d'articles, des heures de débats à la télé et pas mal d'insultes, jugez-vous que ce texte a porté des fruits? Aujourd'hui, vous n'en changeriez pas même une virgule?
J'aurais changé plus d'une virgule avant de le signer car il est toujours difficile de signer un texte écrit par d'autres. Mais c'est la règle du jeu. Donc, non, aujourd'hui, je ne changerais rien. Si nos détracteurs n'avaient pas trouvé les trois bouts de phrases qui ont tourné en boucle pour nous discréditer, je leur fais confiance, ils en auraient trouvé d'autres. Si nous espérions susciter un beau débat, argumenté, loyal et viril sur la «révolution Balance ton porc» (qu'il est de bon ton d'appeler «Révolution Metoo» pour effacer la forme infamante qu'elle a prise en France), je vous accorde que c'est raté. Mais outre le fait que je n'exclus pas que ce texte ait semé quelques graines de doutes dans les esprits les plus ouverts, il a été la première brèche dans le mur de l'unanimisme public (en tout cas la première suffisamment bruyante car nous avions précédemment publié une «une» contre «la chasse à l'homme»).
Notre tribune a été la première brèche dans le mur de l'unanimisme public.
Or cette unanimité est un pur bidonnage médiatique. En effet, ce sont les médias de masse qui ont permis à des groupuscules et à leurs représentants de s'autoproclamer porte-parole de «nous les femmes». Eh bien, notre texte a, je crois, libéré des millions de femmes qui n'ont pas le sentiment de vivre dans une jungle (comme le sous-entend la campagne de la RATP contre le harcèlement) et qui ne veulent pas être considérées ni comme des victimes, ni d'ailleurs comme des êtres bons par principe. Rien n'est plus bêtement sexiste que cette assignation au Bien. Les femmes ont leur part dans le Mal et dans le malheur du monde.
Quand même, à force de dénoncer le «féminisme policier», ne finissez-vous pas par minimiser l'ampleur du phénomène que dénoncent les féministes, à savoir les nombreuses femmes qui témoignent d'avoir été harcelées, agressées, battues ou violées?
Il est possible que je sous-estime l'ampleur des violences, en partie par réaction inconsciente au déferlement qui fait de tous les hommes des coupables potentiels. Oui, j'ai envie de défendre les hommes de mon pays qui, pour une immense majorité, ont appris à tenir en laisse la pulsion qui pourrait les pousser à sauter sur la femme qu'ils convoitent, pulsion qui s'appelle plus banalement le désir et dont l'expérience prouve qu'elle fonctionne différemment pour les deux sexes. La plupart des hommes, dans nos contrées, savent qu'un homme, ça s'empêche. Et un certain nombre, parmi ceux qui ne le savent pas, sont dans nos prisons. Pas assez, me dit-on. Peut-être.
Mais je vois aussi qu'on essaye de faire passer pour des atteintes irréparables des propos un peu lestes, des blagues olé-olé, voire des regards ou des compliments, bref, toutes sortes d'expressions du désir des hommes qui, si elles peuvent paraître inconvenantes, ne sont pas dangereuses, ni d'ailleurs forcément déplaisantes. Je ne connais aucun homme qui se sentirait humilié par le regard lubrique d'une femme. Pourquoi une femme serait-elle «souillée» par le regard d'un homme? À qui va-t-on faire croire qu'une femme indépendante est traumatisée pendant des années parce qu'un homme lui a dit, dans une soirée «tu as de gros seins, tu es mon type de femme, je vais te faire jouir toute la nuit»? - terrible agression dont la victime, plusieurs années après, n'a pu se libérer qu'en créant «Balance ton porc» et en ruinant la vie de l'agresseur. Peggy Sastre évoque dans son article les suicides de personnalités mises en cause dans des scandales sexuels. Tant pis, me dira-t-on, il faut bien casser les œufs pour réussir l'omelette de l'avenir radieux. Les agresseurs de femmes doivent être sanctionnés. Mais je ne suis pas d'accord pour les carrières gâchées, les réputations ruinées, et pas non plus avec les films remontés et les tableaux censurés. Comme l'a dit Alain Finkielkraut en citant un article d'Hannah Arendt intitulé «Les œufs se rebiffent» («Eggs speak up»), il faut que quelqu'un soit l'avocat des œufs.
Peggy Sastre écrit dans votre magazine: «le viol est aujourd'hui le seul crime dont on attend de la victime qu'elle ne s'en sorte jamais»...
Ce que veut dire Peggy Sastre, c'est que face à ce crime épouvantable, on encourage la victime à rester traumatisée. Si vous êtes victime d'une agression non sexuelle, on vous poussera à aller de l'avant. On dirait que, des victimes de viol, la société attend une souffrance inextinguible. Du reste, certains féministes (après tout, il y a aussi des hommes et, dans ma grammaire française, le masculin l'emporte), demandent pour les crimes sexuels l'imprescriptibilité qui n'existe pas pour le meurtre mais uniquement pour le crime contre l'humanité - Auschwitz. C'est bien une façon d'affirmer que le souvenir de ces crimes (sexuels) ne doit jamais s'effacer. Paul Ricoeur, je crois, plaide pour le besoin d'oublier des sociétés. Ce besoin vaut aussi pour les individus: si on n'oublie pas, on devient fou comme Funes, le héros de Borges. Le viol est un crime horrible mais faut-il décréter qu'il est plus horrible que tous les autres, que le meurtre même? Je laisserai les femmes qui ont survécu à ce crime en juger. Cependant, à la réflexion, cette sacralisation négative du crime sexuel témoigne peut-être d'une conception très puritaine du corps de la femme, temple si sacré que toute violation est une déchéance de son être même. Il faut le dire et le répéter: ce n'est pas la victime qui est salie par un viol, c'est le violeur!
Qu'il soit opportun ou non de les balancer, vous ne niez tout de même pas l'existence des «porcs» incriminés. Selon vous, qu'est-ce qui les a produits? Notre société est-elle en train de se transformer en une véritable porcherie?
Il faudrait un livre pour essayer de répondre à cette question. Tout d'abord, contrairement à ce que laisse penser le barnum médiatique, la situation des femmes ne s'est pas dégradée, elle s'est considérablement améliorée. Avec cette conséquence qu'il y a d'ailleurs de plus en plus de harceleurs qui sont des harceleuses. Diriez-vous que nous ne respectons pas la vie humaine parce qu'il y a des meurtriers? De même, le fait qu'il y ait des délinquants et des criminels sexuels dans nos sociétés ne change rien au fait que l'égalité est la norme, anthropologique, culturelle, politique. On me dit qu'ils sont plus nombreux qu'avant et même qu'ils sont partout. Je n'en crois rien. En revanche, des choses qui restaient cachées sont aujourd'hui étalées au grand jour.
S'agissant des viols, des agressions, des chantages exercés par le chef, c'est une bonne chose de les dénoncer à condition qu'ils soient exposés devant des tribunaux et non pas cloués au pilori médiatique. Mais aujourd'hui, c'est la sexualité tout entière que l'on prétend soumettre à la transparence et à l'édiction de normes sociales. Depuis quelques décennies, les forces qui se disent de progrès mènent un combat acharné contre la différence des sexes, considérée comme attentatoire à l'égalité et qui serait, nous dit-on, une pure construction (on ne naît pas femme, on le devient). Mais ce sont la sexualité et le désir lui-même qui sont dans leur viseur. Toute la littérature en témoigne, le sexe est le domaine du négatif, de la division, de l'incommunicabilité, du ratage et on prétend le transformer en activité contractuelle entre individus égaux, merci bien! À l'arrivée, comme le dit Peggy, les hommes deviendront des femmes comme les autres: ils seront traumatisés par une blague cochonne et défailliront si une femme s'extasie sur leurs attributs. Voilà qui console de devoir quitter ce monde un jour…
Les événements de Mai 68 ont sans doute eu moins d'importance que ce que laisse penser leur bruyante postérité.
C'est tout de même un comble: après votre entretien avec Peggy Sastre, vous ouvrez un long dossier au ton acerbe sur mai 68 avec ces mots: «50 ans, ça suffit!». Pourtant, à bien des égards, on est en droit de penser que Peggy Sastre a un petit côté «soixante-huitard», quand même!
Il faut le lire en entier! Outre que «50 ans ça suffit!» est un clin d'œil au slogan soixante-huitard sur de Gaulle («Dix ans, ça suffit!»), notre dossier n'est ni un plaidoyer ni le énième procès du printemps mythique, nous nous demandons en quoi le mythe «Mai 68» infuse notre présent. Et nous en concluons effectivement que le mythe lui-même commence à s'user. Quant aux événements, fomentés, comme l'explique magistralement Paul Thibaud, par les générations épargnées par la guerre, ils ont sans doute eu moins d'importance que ce que laisse penser leur bruyante postérité. En réalité, Mai 68 avait commencé bien avant mai 68, dès l'après-guerre dans l'éducation comme le montre Barbara Lefebvre. Et nous publions aussi de délicieux témoignages d'époque, comme l'article de Jonathan Siksou sur la haute société qui allait s'encanailler à l'Odéon ou celui du cinéaste Pascal Thomas, qui a vu Ionesco lancer à des manifestants «Vous finirez notaires!». Cela dit, cette saillie devenue classique est un assez mauvais procès. Je ne reprocherais pas aux soixante-huitards ce qu'ils sont devenus, qu'ils soient bourgeois fillonistes vaguement réacs, patrons de médias ou bergers. Ce qui pose problème, c'est ce qu'ils ont fait, en tant que génération ou plutôt ce qu'ils n'ont pas fait: transmettre aux générations suivantes la culture dont ils étaient dépositaires. À ce sujet, je vous recommande le texte de l'universitaire québécois François Ricard, auteur d'un superbe essai paru en 1992, La génération lyrique.
Même vous, franchement… on ne vous imagine pas non plus sur les Champs-Élysées le 30 mai 1968, un fichu sur la tête et un portrait de De Gaulle à la main!
Il ne manque à votre caricature que le béret et la baguette! Effectivement, en lisant, toujours avec plaisir, les écrits de cette époque (j'avais quatre ans), je ne peux pas me départir d'une certaine envie. Et quand j'observe les sinistres remakes que sont Nuit debout ou, plus sinistre encore, le micro-mouvement étudiant actuel contre l'idée même de la méritocratie, je rêve de 68. Du reste, je ne m'en suis jamais cachée, s'agissant des mœurs, je suis très soixante-huitarde et je ne renoncerais pour rien au monde à «la paisible jouissance de l'indépendance privée». Mais je ne crois ni ne désire un monde de l'illimitation, où je n'aurais à faire avec aucun déterminisme, à lutter contre aucune contrainte. Je veux choisir ma sexualité, pas mon sexe. Et si je suis enchantée par la révolution qu'a été la sexualité sans reproduction, la révolution en cours de la reproduction sans sexualité me paraît infiniment moins désirable. Eric Zemmour, qui pense que 68 est un bloc, me dirait qu'à partir de la pilule, la PMA-GPA était inévitable. Peut-être. Mais je ne voudrais pas vivre dans le monde d'avant la contraception (je sais, ça toujours existé, comme en témoignent les générations où les femmes s'épuisaient en couches).
En fait, on a l'impression que le puritanisme a changé de camp: ce sont les réacs qui défendent la libération des mœurs, et les petits-enfants de mai 1968 qui se fondent dans un féminisme policier. L'envie ne vous prend pas, parfois, d'aller taguer sur les murs «interdit d'interdire»?
L'envie me prend surtout de les inviter à lire des romans et à se trouver un autre but dans la vie que d'essayer de réformer leurs contemporains. Pour parler poliment.
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Manifestation à Barcelone contre la détention d'indépendantistes depuis 6 mois (15.04.2018)

  • Publié le 15/04/2018 à 15:56
EN IMAGES - Des centaines de milliers de Catalans ont défilé dimanche pour soutenir les dirigeants indépendantistes, placés en détention provisoire dans la région de Madrid depuis le 16 octobre, notamment pour «rébellion».
Au cri de «liberté pour les prisonniers politiques», des centaines de milliers de Catalans ont défilé dimanche à Barcelone pour protester contre la détention de neuf figures de l'indépendantisme accusées de «rébellion» et réclamer l'ouverture d'un dialogue politique. Six mois après les premières incarcérations, les manifestants emplissaient l'avenue Paralel, résonnant du slogan: «nous voulons que vous rentriez à la maison».
Selon la police municipale, ils étaient 315.000 participants.
Un message de soutien aux dirigeants indépendantistes en détention provisoire dans la région de Madrid pour «sédition», «détournements de fonds» ou le délit contesté de «rébellion», passible d'un maximum de 30 ans de prison, et qui suppose un «soulèvement violent».
Les anciens présidents d'associations indépendantistes Jordi Sanchez et Jordi Cuixart sont en détention provisoire depuis le 16 octobre. Incarcérés avant la vaine proclamation d'une «République catalane» le 27 octobre, ils sont considérés comme des membres du noyau dur ayant piloté la marche frustrée vers l'indépendance.

«Nous sommes de plus en plus nombreux à dénoncer la judiciarisation de la politique (...) et à dire qu'il faut donner une solution démocratique à ce conflit», ont clamé sur scène des acteurs catalans chargés de lire le manifeste des organisateurs. «Comme ils ne peuvent pas décapiter l'indépendantisme, ils essaient de le faire par la voie judiciaire», affirmait la manifestante Roser Urgelles, institutrice de 59 ans, portant un ruban jaune comme des milliers de manifestants. «Ils ont besoin de démontrer qu'il y a eu violence pour exécuter les peines qu'ils veulent, alors ils l'inventent, mais nous continuerons à manifester pacifiquement».
L'appel à manifester avait été lancé par une plateforme d'associations et syndicats créée en mars pour «défendre les institutions catalanes» et «les droits et libertés fondamentales» des citoyens. Le fait que les sections catalanes des deux grands syndicats, Commissions ouvrières et UGT, en fassent partie - aux côtés des associations séparatistes ANC et Omnium - a provoqué de vives protestations parmi ceux de leurs membres qui n'ont jamais voulu de l'indépendance.
«Mais ce n'est pas une manifestation indépendantiste», avait affirmé à l'AFP le secrétaire général de l'UGT régionale, Camil Ros. «C'est le moment de jeter des ponts et le problème de la Catalogne ne doit pas se résoudre dans les tribunaux mais par le dialogue et la politique».

«Puigdemont, président», réclamaient des manifestants, dix jours après la remise en liberté de l'ex-président indépendantiste catalan Carles Puigdemont en Allemagne, où un tribunal a considéré que les charges pour «rébellion» n'étaient pas étayées.
Cependant, des magistrats espagnols ont transmis jeudi à leurs homologues allemands des éléments afin d'accréditer l'existence «de violences justifiant la rébellion» selon Madrid, dans l'espoir d'obtenir la remise de M. Puigdemont à l'Espagne pour cette accusation. L'indépendantiste est également accusé de détournement de fonds publics, en lien avec l'organisation du référendum d'autodétermination interdit du 1er octobre.

«Ce qui me rend triste, c'est l'accusation de violence, qui n'a jamais existé», répondait dès décembre Jordi Sanchez sur Twitter. Élu député catalan alors qu'il était détenu, M. Sanchez a été proposé par deux fois comme candidat à la présidence régionale, mais le juge a refusé de le laisser sortir de prison pour être investi. «J'ai participé à toutes les manifestations et n'ai jamais vu une once de violence sauf celle de la police quand elle a réprimé le référendum», soutenait l'un des manifestants, le retraité Juan José Cabrero, ancien transporteur de 74 ans.
Au nombre des deux millions de personnes - 47,5% des électeurs catalans - ayant redonné aux sécessionnistes une majorité en sièges au parlement régional en décembre, il concluait, pessimiste: «Je ne crois pas que je verrai la République catalane indépendante, nous n'avons le soutien de personne dans le monde, ils ne comprennent pas ce que peut être l'identité catalane».
Il reste cinq semaines aux indépendantistes pour investir un candidat à la présidence catalane, faute de quoi de nouvelles élections régionales seront organisées en juillet.
Dans une lettre envoyée depuis la prison, l'ancien vice-président indépendantiste catalan Oriol Junqueras a appelé son camp à éviter les «gesticulations» et «attitudes jusqu'au-boutistes qui ne mènent nulle part». Il a présenté comme «une nécessité» la formation immédiate d'un gouvernement catalan, pour que la région - sous la tutelle de Madrid - retrouve ses institutions autonomes.

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Turquie : Erdogan, président tout-puissant (15.04.2018)

Par Anne Andlauer
Mis à jour le 15/04/2018 à 17h38 | Publié le 15/04/2018 à 17h16
VIDÉO - Il y a un an, le président turc remportait un référendum visant à renforcer ses pouvoirs. Sans attendre la réforme, il règne déjà sans partage.
À Istanbul
C'est devenu une habitude. Chaque fois que Recep Tayyip Erdogan s'adresse à une foule, dans une ville ou une autre de Turquie, il lui rappelle son «score» du 16 avril 2017. «Avec 61 % de oui, Bagcilar a écrit une légende», remerciait-il, fin mars, les habitants de ce district de l'ouest d'Istanbul. «Avec 36 %, Aydin est resté très en deçà de nos attentes», sermonnait-il, le 7 avril, cette ville égéenne, coupable d'avoir rejeté la réforme la plus importante de ses quinze années de pouvoir.
Ce 16 avril 2017, le chef de l'État turc remportait de justesse (51,4 %) un référendum sur un texte décuplant ses prérogatives. Le nouveau régime - un régime présidentiel fort, qui abolit neuf décennies de tradition parlementaire - n'entrera en vigueur qu'aux élections prévues en novembre 2019. «Nous y sommes déjà, rectifie Baris Yarkadas, député du Parti républicain du peuple (CHP). Le président gouverne à coups de décrets-lois d'état d'urgence, en court-circuitant le Parlement, le premier ministre et les ministres, qui ne sont même pas au courant des lois qu'ils sont censés avoir préparées. Ils ne font que signer là où on leur dit de signer», assure l'élu d'opposition.
«Grâce à l'état d'urgence, le président use déjà de la plupart des pouvoirs prévus par la réforme. Il n'a pas à attendre les élections de 2019, dont il y a fort à parier qu'elles seront avancées»
Le politologue Ismet Akça
La réforme adoptée transforme le chef d'État en chef de l'exécutif, gouvernant par décrets sans contrôle constitutionnel, nommant seul ses ministres sans droit de regard du Parlement, qu'il peut dissoudre à sa guise. «Grâce à l'état d'urgence (instauré après le coup d'État manqué de juillet 2016), le président use déjà de la plupart des pouvoirs prévus par la réforme, confirme le politologue Ismet Akça. Il n'a pas à attendre les élections de 2019, dont il y a fort à parier qu'elles seront avancées, peut-être dès cet automne», estime cet universitaire limogé par décret, comme des milliers de ses collègues et plus de 110.000 fonctionnaires depuis la tentative de putsch.
«Nous sommes dans une dictature légale, institutionnalisée par un référendum aux résultats truqués», s'indigne le député Baris Yarkadas, rappelant les soupçons de fraude qui avaient entouré le vote d'avril 2017. «Peu importe l'étiquette, nuance Ismet Akça, l'essentiel est de bien définir: c'est un régime qui institue des mécanismes de contrôle social pour limiter au maximum l'expression de voix discordantes, au profit du pouvoir personnel d'un président fort qui domine à la fois l'exécutif, le législatif et le judiciaire.»
Au cours de l'année écoulée, c'est d'ailleurs la justice qui a pâti le plus des effets du référendum. Le texte prévoyait l'entrée en vigueur immédiate de 3 des 18 articles. L'un d'eux a permis à Erdogan de retrouver la tête de sa formation politique, le Parti de la justice et du développement (AKP), et d'y faire le ménage avant les élections. Mais un autre article, moins connu, a modifié radicalement la composition du Conseil des juges et procureurs (HSK), dernier garant de l'indépendance judiciaire. Six de ses 13 membres (autrefois 22) sont désormais nommés par le chef de l'État. Les autres sont choisis par le Parlement, dominé par le parti du président et son allié ultranationaliste, le MHP.
165 journalistes derrière les barreaux
«90 % des médias sont désormais sous contrôle du président»
Baris Yarkadas, député et ancien journaliste
«La première mesure du nouveau HSK a été de muter 17 membres de notre syndicat, seul syndicat indépendant de la magistrature», raconte Nuh Hüseyin Köse, vice-président du Yargiçlar Sendikasi, connu pour son opposition au pouvoir, notamment sur les questions de laïcité. Le juge Köse a lui-même été contraint de quitter Istanbul pour un tribunal de Kayseri, en Anatolie centrale. Ces opposants mis à l'écart s'ajoutent aux quelque 4000 magistrats limogés sans ménagement depuis juillet 2016 pour leurs liens supposés avec le prédicateur Fethullah Gülen, leader présumé du putsch. Effet de cette reprise en main, selon Nuh Hüseyin Köse: «des collègues de moins en moins courageux», qui jugent sous pression du pouvoir, quitte à violer la jurisprudence et à défier leur hiérarchie, sans risque d'être sanctionnés par le HSK.
Nuh Hüseyin Köse rappelle notamment le refus d'un tribunal local de libérer deux journalistes de renom, Sahin Alpay et Mehmet Altan, malgré un verdict en ce sens de la Cour constitutionnelle en janvier. «C'était inédit et hautement symbolique, insiste le juge. La juridiction suprême a maintenu sa décision et la cour locale a finalement été contrainte de libérer Sahin Alpay, mais pour le placer en résidence surveillée, ce qui contredit là encore la décision des juges constitutionnels.»
Le cas de ces éditorialistes illustre aussi les atteintes à la liberté de la presse dans la Turquie de l'après-putsch et de l'après-référendum. «Au moins 165 journalistes sont derrière les barreaux, souligne le député Baris Yarkadas, lui-même ancien journaliste. Et avec le rachat récent du groupe Dogan (le plus gros groupe médiatique turc) par un holding proche du pouvoir, sur ordre du pouvoir, 90 % des médias sont désormais sous contrôle du président.» L'élu s'insurge notamment de ce que l'opposition «ne bénéficie que de 30 minutes d'antenne quotidienne, alors qu'Erdogan fait cinq discours d'une heure par jour, diffusés en entier par au moins 20 des 30 chaînes nationales». Et de conclure, inquiet: «Les prochaines élections se dérouleront dans un climat de silence inédit pour toutes les voix d'opposition.»

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Anne Andlauer

Mali : des soldats français blessés dans une attaque à Tombouctou (15.04.2018)

  • Mis à jour le 15/04/2018 à 15:10 

  • Publié le 15/04/2018 à 14:27
Des attaques ont été lancées samedi contre un complexe de la mission de l'Onu et une base de l'armée française à Tombouctou.
Des tirs de roquettes, des assaillants déguisés en Casques bleus montés à bord de véhicules piégés, des échanges de coups de feu: les camps de la mission onusienne Minusma et de la force française Barkhane à Tombouctou ont été la cible, samedi, d'une attaque qui a fait au moins un mort et une vingtaine de blessés. Parmi eux, au moins sept soldats français, selon les informations du Figaro. Tous ont été hospitalisés à Gao.
L'assaut s'est produit peu après 14h (16h en France) sur le site aéroportuaire de cette ville du nord du Mali.
Mortiers, échanges de tirs et attaque au véhicule suicide
Alors que les deux camps essuyaient une «dizaine de tirs de roquettes», des hommes portant des casques bleus ont tenté de «s'infiltrer» dans la zone militaire à bord de deux véhicules piégés, a précisé dans un communiqué le ministère malien de la Sécurité. L'un des véhicules portait les couleurs des Forces armées maliennes (FAMAS) et l'autre le sigle «UN» des Nations unies. Le premier «a explosé», tandis que le second «a pu être immobilisé».
Sur Twitter, la force de l'ONU a évoqué une «importante attaque complexe» associant «mortiers», «échanges de tirs» et «attaque au véhicule suicide». «C'est la première fois qu'il y a eu une attaque de cette envergure contre la Minusma à Tombouctou», a relevé une source sécuritaire étrangère. «C'est une attaque qu'on n'avait jamais connue», a confirmé un responsable du gouvernorat de Tombouctou.
«Les combats ont pris fin vers 18h30 (heure locale)», soit plus de quatre heures après leur début, selon le ministère. Bamako et la Minusma ont rapidement assuré que la situation était à nouveau «sous contrôle».
«Cette attaque sournoise a été contrée, l'objectif de provoquer le plus de dégâts possible a échoué», a dit le porte-parole de l'état-major français, le colonel Patrik Steiger. Selon lui, «au moins une quinzaine (d'assaillants) ont été tués», dont certains à l'extérieur de l'enceinte du camp.
Une opération coûteuse en vies humaines
Déployée au Mali en juillet 2013, la Minusma, qui compte environ 12.500 militaires et policiers, est actuellement la mission de maintien de la paix de l'ONU la plus coûteuse en vies humaines. Elle avait, avant l'attaque de samedi, perdu plus de 160 Casques bleus, ce qui représente plus de la moitié des soldats de l'ONU tués sur cette période dans le monde.

Il reste quelque 4000 soldats français stationnés au Mali, auxquels s'ajoutent les casques bleus de la Minusma. La Minusma comptait, fin mars, quelque 11.800 militaires et 1700 policiers au Mali. Bien que les groupes liés à Al-Qaïda aient été dispersés et en grande partie chassés du nord du Mali, des zones entières de ce pays échappent encore au contrôle des forces maliennes, françaises et de l'ONU, régulièrement visées par des attaques.
Depuis 2015, ces attaques se sont étendues au centre et à la partie sud du Mali et le phénomène déborde sur les pays voisins, en particulier le Burkina Faso et le Niger, où quatre soldats américains et quatre militaires nigériens ont été tués dans une embuscade en octobre 2O17.
Exécutions sommaires
Depuis le 11 avril, quelque 1500 militaires africains, américains et européens sont engagés dans des manœuvres dans l'ouest et le nord du Niger, pour s'entraîner face aux menaces terroristes. Ces exercices devraient renforcer l'efficacité de la force du G5 Sahel, qui devrait compter d'ici à la mi-2018 5000 soldats issus du Mali, du Niger, de la Mauritanie, du Tchad et du Burkina Faso.
La signature en 2015 d'un accord pour ramener la paix au Mali n'a pas empêché la recrudescence des violences. Jeudi, le représentant du haut-commissaire aux droits de l'homme au Mali, Guillaume Ngefa, a évoqué les «exécutions sommaires d'au moins 95 personnes» dans la région de Menaka, frontalière du Niger.
Mise en cause, une coalition de deux groupes armés qui participent aux opérations de sécurisation avec les troupes françaises et maliennes, le MSA et le GATIA, a rejeté samedi ces accusations. Ces deux groupes sont soupçonnés de profiter de leur proximité avec Barkhane pour régler de vieux contentieux territoriaux, notamment avec la communauté peule.
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Cinq ans après l'opération Serval, al-Qaida gangrène le Mali (28.01.2018)

Par Thierry Oberlé
Mis à jour le 02/02/2018 à 11h15 | Publié le 28/01/2018 à 17h53
REPORTAGE - Malgré l'intervention militaire française en 2013 dans le nord du Mali, l'insécurité et le terrorisme islamiste ne cessent de se propager, menaçant de briser l'unité d'un État défaillant.
Envoyé spécial à Bamako et Tombouctou
Les commerçants ont verrouillé la porte de fer de leurs échoppes. Le marché central, plaque tournante du négoce, est silencieux. Les chaussées tapissées de sable sont vides. Tombouctou, cité de légendes, est une «ville morte». Calfeutrés dans leurs maisons en terre crue, les habitants suivent massivement un appel à la grève générale lancé par des mouvements de la société civile pour protester contre l'insécurité. Quelques jours plus tôt, un douanier a été assassiné nuitamment. Un meurtre qui s'ajoute à une longue liste de règlements de comptes entre voyous.

«La symbiose entre les populations que l'on connaissait naguère a disparu. Chez nous, il n'y a que des difficultés.»
Boubacar Sadek, un adjoint au maire de Tombouctou
Cinq ans après la fin de l'occupation djihadiste, l'ambiance est morose. La population noire, majoritaire, se méfie des «peaux blanches», les Arabes, accusés de tous les maux. Dénués de motivation, les gendarmes venus du sud du pays se claquemurent dans leurs locaux par crainte de se faire trouer la peau. «La symbiose entre les populations que l'on connaissait naguère a disparu. Chez nous, il n'y a que des difficultés. Les autorités de l'État nous parlent d'insécurité résiduelle et d'éléments égarés, mais comment voulez-vous croire à la paix quand des gens sont tués en pleine rue et que nous souffrons de la mauvaise gouvernance?», s'interroge Boubacar Sadek, un adjoint au maire de Tombouctou.
Une étrange faune gravite dans la cité. Les indics des islamistes armés croisent des bandits. Un pouvoir invisible, celui des mafias islamistes, politiques et criminelles, règne sur cette zone grise où des alliances mouvantes sont dictées par les intérêts du moment.
La plupart des chefs qui dirigeaient la ville sous l'occupation d'Aqmi, la branche sahélienne d'al-Qaida ont été éliminés, mais certains poissons - petits ou gros - sont passés au travers des mailles du filet. C'est le cas de Houka Houka. Arrêté en 2013, il dirigeait la justice islamiste à Tombouctou sous le règne d'al-Qaida et procédait à ce titre à des amputations au nom de la charia. Il a été libéré deux ans plus tard dans le cadre des négociations entre le gouvernement et les groupes rebelles non djihadistes. Depuis, le petit juge coupe des membres dans son fief de Zouera et réclame l'ouverture d'écoles coraniques. La déliquescence de l'État pousse une partie des habitants de la région à trouver ses méthodes expéditives peu choquantes. «Certains se disent que face au sentiment d'injustice généralisé la charia a du bon», confirme un journaliste local.
Et qui est vraiment Dina Ould Daya, l'un des chefs du MAA (Mouvement arabe de l'Azawad) et potentat local? S'est-il infiltré dans le système pour mieux poursuivre ses activités de narco et de trafiquant de migrants? Ou s'est-il reconverti durablement dans le business légal? Les avis divergent. En avril 2012, il avait investi Tombouctou aux côtés d'Aqmi avant d'en être chassé par son leader, Abou Zeid, et de se replier avec son groupe armé sur sa bourgade de Ber. Il a rejoint La Plateforme, une alliance de groupes maliens pro-gouvernementaux signataires à Alger en 2015 des accords de paix avec Bamako qui n'ont toujours pas été appliqués.
«Les actes de terrorisme et de criminalité ont doublé, voire triplé en deux ans»
Un responsable de la sécurité des Nations unies
À l'extérieur de la cité, les djihadistes tendent des embuscades et posent des mines sur les pistes. Ils tuent les «collabos», les personnes qui renseignent les soldats des forces spéciales françaises en charge de la lutte contre les terroristes d'al-Qaida dans l'immensité minérale du Sahara. Samedi, au moins quatorze soldats maliens ont été tués dans l'attaque de leur camp de Soumpi. «Les actes de terrorisme et de criminalité ont doublé, voire triplé en deux ans», note un responsable de la sécurité des Nations unies.
Tombouctou est enclavée. La route qui longe le fleuve n'est pas sous contrôle. La cité est reliée à Bamako, via un vol quotidien unique assuré par les Nations unies. Enkystée au sommet de la courbe nonchalante du Niger, la Ville aux 333 saints ne parvient pas à enrayer son déclin. Les visiteurs l'ont délaissée. Les guides touristiques se sont reconvertis en traducteurs pour les Casques bleus. Une missionnaire suisse s'était réinstallée dans une bicoque après un premier rapt en 2012 par les djihadistes. Seule résidente occidentale, elle est à nouveau portée disparue depuis deux ans.
En face de la mosquée Sankoré, un édifice voûté construit en sable voici six siècles pour abriter une prestigieuse université islamique, la bibliothèque de manuscrits anciens al-Imam Essayouti, a rouvert. Elle expose des manuscrits consacrés au Coran, à l'histoire, à l'astrologie, à l'astronomie ou à la médecine. Les plus anciens datent du XIe siècle. «Lorsque les djihadistes sont arrivés, les miens ont pris les manuscrits pêle-mêle. Nous les avons emballés et rangés dans des cantines pour les mettre à l'abri dans un endroit tenu secret. Nous les avons ressortis voici deux ans maintenant», dit Alpha Ben Essayouti. Son père, le grand imam Ben Essayouti défend un islam qui se veut tolérant mais strict. Il exerce jusqu'à ce jour une forte influence sur sa pieuse communauté.
«Je viens de vivre la journée la plus importante de ma vie politique. La France restera avec vous le temps qu'il faudra»
François Hollande , le 2 février 2013, à Tombouctou
Il n'en va pas de même de l'autre côté du fleuve où les oulémas du Centre du Mali sont violemment contestés. Si le terrorisme est de retour au Nord chez les Touaregs et les Arabes sous l'effet des crises religieuses, identitaires et sociales, il se répand aussi comme une traînée de poudre dans le Centre autour de la région de Mopti, l'ex-«Venise du Mali» où les Peuls, un peuple d'éleveurs de bétail dispersés dans le Sahel, du Sénégal à la Centrafrique, sont en effervescence. Il profite de la faiblesse de l'État pour entraîner le pays dans une spirale infernale. Tel des cellules cancéreuses, le djihadisme se propage chez les voisins, au Burkina Faso et au Niger.
L'opération militaire française «Barkhane» ponctuée de raids secrets des forces spéciales contre les terroristes et la présence de plus de 10 000 Casques bleus souvent vulnérables contiennent la menace à défaut de la contrôler. Mais cinq ans après le déclenchement de l'opération «Serval», les forces françaises et la communauté internationale s'enlisent dans un conflit sans fin. «Serval» et son prolongement à travers l'opération «Barkhane» n'ont pas résolu la question du djihadisme dans la région et la pression internationale n'a pas suffi à imposer la paix avec la mise en place d'une solution politique entre un Nord irrédentiste et un Sud incapable de reconstruire un État malgré l'aide des bailleurs de fonds.
Tout avait pourtant bien commencé. Le 11 janvier 2013, la France entre en guerre pour chasser les groupes djihadistes qui occupent le nord du Mali depuis près d'un an (*). Dès la nuit du 27 au 28 janvier, les parachutistes du 2e REP s'emparent de Tombouctou sans rencontrer de résistance. Bien préparée, l'opération «Serval» est un succès incontestable. Les djihadistes sont en déroute. Le 2 février 2013, François Hollande est à Tombouctou. À l'issue de sa visite éclair il déclare: «Je viens de vivre la journée la plus importante de ma vie politique.» Et il fait une promesse: «La France restera avec vous le temps qu'il faudra.»
Le coup de massue assené par les troupes françaises a disloqué les groupes armés et neutralisé la plupart de leurs leaders emblématiques. Il les a chassés des centres urbains mais, après une période de veille mise à profit pour reconstituer les réseaux, les terroristes sont réapparus.
Principale tête d'affiche d'al-Qaida, Iyad Ag Ghali, le patron touareg d'Ansar Dine a étendu son influence et fédéré les mouvements djihadistes maliens sous la bannière de Jamaat Nosra al-Islam wal-Mouslimin, le JNIM (Groupe pour le soutien de l'islam et des musulmans).
Figure de la lutte pour l'indépendance des Touaregs, Iyad Ag Ghali a mené plusieurs rébellions identitaires durant sa période prédjihadiste. À l'époque, il entretient des contacts soutenus avec les services de renseignement algériens soucieux de contrôler leur arrière-cour du nord du Mali. Nommé consul du Mali à Djedda, en Arabie saoudite, par la présidence malienne qui souhaite l'éloigner, il embrasse l'islam radical. Il rejoint al-Qaida avec son groupe salafiste Ansar Dine quand, en 2012, les vents noirs de l'histoire poussent Aqmi à s'emparer de la partie malienne du Sahel. Son statut d'autochtone et son ancrage dans la société lui valent d'être mis en avant par la direction algéro-mauritanienne d'Aqmi. Une stratégie de faux nez qui semble toujours d'actualité.
«Imposteurs» et «charlatans»
Sa longévité est un mystère bien gardé. De nombreux officiels français affirment sous couvert d'anonymat que Iyad Ag Ghali est sous protection algérienne. Plusieurs tentatives de «neutralisation» ou projet d'élimination de cette cible prioritaire des autorités françaises ont échoué au cours des dernières années en raison de son repli sur le territoire algérien ou parce que les risques de dégâts collatéraux étaient trop élevés. L'une d'elles a été annulée au dernier moment en 2014 à Tinzaouten, une localité à cheval sur le Mali et l'Algérie.
Le cas Iyad Ag Ghali est un clou dans la chaussure des relations franco-algériennes. Il est régulièrement abordé lors des déplacements de hauts responsables français en Algérie. Il a été encore évoqué durant l'entretien entre Emmanuel Macron et Abdelaziz Bouteflika le 6 décembre dernier à Alger. À chaque fois, les responsables algériens affirment ne rien savoir de ses déplacements clandestins.
C'est pourtant bien à Alger qu'un émissaire du président malien Ibrahim Boubacar Keïta dit IBK a rencontré, selon nos informations, Iyad Ag Ghali début 2017 pour explorer une voie de négociation entre Bamako et le mouvement terroriste Ansar Dine, fer de lance d'al-Qaida. Une réunion discrète couverte par le premier ministre algérien de l'époque Abdelmalek Sellal. Dans les semaines précédentes, le Haut Conseil islamique (HCI), une institution d'obédience wahhabite présidée par Mahmoud Dicko, un dignitaire religieux influent à Bamako, avait ouvert des canaux de discussion avec le chef djihadiste.
Fidèle aux principes de non-intervention de ses forces armées hors de ses frontières, le régime algérien est, par son pouvoir d'influence, un des acteurs majeurs au Nord Mali et plus généralement dans le Sahel, où il juge la présence française et américaine contraire à ses intérêts. Il est aussi le seul pays limitrophe à ne pas s'engager directement dans la lutte contre les djihadistes. Même la Mauritanie, longtemps rétive, va participer sur sa frontière avec le Mali au déploiement de la force antiterroriste africaine du G5 Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, Mauritanie). Cette dernière a fort à faire à la frontière entre le Burkina Faso et le Mali où une nouvelle insurrection a vu le jour avec à sa tête un prédicateur de 57 ans, Hamadoun Koufa. Elle se développe dans la région de Mopti, point de suture entre deux parties du Mali qui s'ignorent.
Pour comprendre la trajectoire de Koufa, le leader de la katiba Macina d'Ansar Dine, il est nécessaire de plonger dans l'histoire des Peuls, son ethnie d'origine. Koufa s'inspire de l'exemple de l'empire théocratique peul fondé au XIXe siècle, par le cheikh Amadou Barry, défenseur d'un islam soufiste mais radical. Il fut fondé après un djihad sur la base de la charia. Formé au Pakistan, Koufa combat les descendants du fameux cheikh, ces «imposteurs» et «charlatans» qu'il accuse d'être corrompus. Il pourfend les élites locales qu'il estime complices des «spoliateurs» de Bamako et écrit à ses heures perdues des poèmes sur la vie pastorale. Son éloquence et ses prêches enflammés fascinent ses auditeurs. Quand le pouvoir tente de l'amadouer, il se radicalise et débarque dans le Tombouctou des djihadistes en 2012, où il reçoit une instruction militaire.
Le 9 janvier 2013, il participe à la bataille de Konna remportée par al-Qaida contre l'armée malienne. Une victoire qui précipite l'intervention militaire française. Ses discours appelant à une société «juste» et «égalitaire» et l'appui militaire d'Iyad Ag Ghali lui ont permis de constituer des forces autonomes sur le terreau fertile de l'exaspération des populations peules rackettées par les propriétaires fonciers et plongées dans le marasme social.
Fractures ethniques
Son armée du Macima, son fief, creuse les fractures ethniques. Elle s'appuie sur le ressentiment des Peuls contre les Bambaras et les Dogons qui incarnent aux yeux d'une partie d'entre eux «le pouvoir noir» de la lointaine et oublieuse capitale, Bamako. Les troupes de Koufa sont évaluées à 100 à 150 combattants. Parmi eux des éleveurs, des étudiants des écoles coraniques, des marginaux et des mercenaires attirés par une prime d'embauche d'un montant de 230 euros. C'est à la fois peu et beaucoup. «Ce chiffre ne doit pas occulter le nombre bien plus important de fidèles, d'indicateurs, de “sonnettes” et de soutiens logistiques. Quasiment tous les villages peuls du Macima auraient des ressortissants auprès de lui, preuve de sa popularité», estime Adam Thiam, auteur d'une solide étude sur la crise du centre du Mali. «Un point de rupture a été atteint. Le risque est que les turbulences du Centre coupent le pays en deux, ce qui pourrait relancer la question de l'indépendance du nord du Mali tout en maintenant le Centre dans une situation d'insécurité propice à toutes les dérives», prévient-il.
 «La peur s'est installée. Les Peuls craignent les amalgames. Tous les ingrédients sont réunis pour une explosion.»
Boubacar Sankaré, chercheur
Les djihadistes abattent des notables, des fonctionnaires et des imams, attaquent des convois militaires et ferment par la menace des centaines d'écoles qualifiées de «françaises». Jeudi, vingt-quatre civils sont morts sur la route dans l'explosion d'un engin piégé. Incapable de rétablir l'ordre, Bamako riposte par des ratissages marqués par des bavures, des exactions et des arrestations arbitraires.
Minés par un sentiment d'abandon, des villages bambaras et dogons montent des milices d'autodéfense. Ces groupes paramilitaires aiguisent les rivalités intercommunautaires. «La peur s'est installée. Les Peuls craignent les amalgames. Tous les ingrédients sont réunis pour une explosion. L'État doit s'appuyer sur des relais dans la société civile pour désamorcer cette bombe», commente le chercheur Boubacar Sankaré, originaire de la région.
À la Primature, le nouveau premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, affirme avoir fait de la crise du centre du Mali sa «priorité». Apprécié des Français, il a été nommé à son poste fin décembre par le président IBK, élu en 2013 avec l'appui tacite de Paris et louangé sous François Hollande. Il est aujourd'hui très critiqué dans son pays comme à l'étranger. Proche d'IBK, Soumeylou Boubeye Maïga apparaît comme la dernière carte du président avant la remise en jeu de son mandat, prévue en principe l'été prochain. «Il faut lutter contre les groupes terroristes et en même temps engager une série d'actions urgentes pour rétablir la confiance en l'État des habitants du Centre», explique Soumeylou Boubeye Maïga au Figaro. «Nous allons déployer très prochainement un volume important de forces militaires et sécuritaires sur une vingtaine de postes fixes dans des agglomérations. Elles seront jumelées avec des patrouilles et des opérations de nettoyage. En parallèle, des services publics vont être installés pour répondre aux besoins d'éducation, de santé, de sécurité alimentaire, de justice et de droits de l'homme. Nous prévoyons aussi des mesures d'apaisement pour recréer un lien de confiance. Nous devons gagner le cœur et l'esprit des populations.» Soit la gamme complète, sur le papier du moins, d'un plan de contre-insurrection. «Koufa profite de tensions séculaires. Il prospère sur le recul de l'État», estime cet ancien chef des services de renseignement à la carrière de ministre bien remplie.
«Nous devons parvenir à des résultats en accélérant la mise en place des accords de paix d'Alger et en stabilisant le Centre pour que les élections puissent se tenir
Le premier ministre malien
Avant Soumeylou Boubeye Maïga, quatre chefs de gouvernement ont tenté de tirer le nord du Mali hors de la nasse des terroristes, des rebelles et des bandits. Les quatre ont échoué. «Nous devons parvenir à des résultats en accélérant la mise en place des accords de paix d'Alger et en stabilisant le Centre pour que les élections puissent se tenir», promet, cependant, le premier ministre qui devra composer avec les «faucons» de la présidence. Exaspérées, les «Nations unies ont prévu de sanctionner les protagonistes si fin mars ils n'ont pas progressé sur le chemin de la paix. Et la communauté internationale est lasse de déverser des centaines de millions de d'euros d'aide.
Échec à la fois personnel et collectif
Élu avec l'aura d'un homme fort, IBK a vu sa cote fortement décliner. Le président ne cache pas ses liens d'amitié avec Michel Tomi, dernier «parrain» corse à l'ancienne et roi des casinos et des jeux en Afrique poursuivi par la justice française. IBK le considère comme son «frère». Michel Tomi a obtenu son amitié en misant de longue date sur son avenir présidentiel alors que sa cote était basse. Un pari gagnant. Il a servi d'intermédiaire dans un des premiers actes du chef de l'État, l'achat d'un avion pour ses déplacements ou pour la formation de sa garde personnelle via une société française de sécurité.
Accusé de jouir du pouvoir plutôt que de l'exercer, IBK se voit également reprocher par ses opposants de servir en premier lieu son clan composé de son fils Karim, un noceur avide d'argent et maîtrisant ses dossiers, de sa femme et de membres de sa famille. «IBK est le plus rusé des politiciens maliens et a une autorité naturelle qu'il peut exercer sur les imams ou les méchants du Nord, mais la capacité technocratique de son équipe à mettre en place des projets se heurte à une évasion des fonds», note un fin connaisseur français des arcanes du palais présidentiel de Koulouba et amateur d'euphémismes. Pour beaucoup, IBK a mené un mandat pour rien. Il n'est pas parvenu à rétablir l'autorité de l'État dans le Nord et n'a pas su imposer la paix. Un échec à la fois personnel et collectif. «Pourquoi nous n'avançons pas? Sans doute parce qu'au Mali tout le monde fait semblant. Parce qu'au-delà des belles paroles il n'y a pas de patriotisme», commente le chercheur Boubacar Sangare. Un jeu de dupes dans lequel la France est engagée en menant une guerre de Sisyphe.
* «Notre guerre secrète au Mali», Isabelle Lasserre et Thierry Oberlé, Fayard, 2013.

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Montpellier : 41 gardes à vue après la manifestation contre le gouvernement (15.04.2018)
  • Par  Le Figaro.fr avec AFP 

  • Mis à jour le 15/04/2018 à 17:02 

  • Publié le 15/04/2018 à 12:03

Quarante-et-une personnes sont encore en garde à vue aujourd'hui, au lendemain de la manifestation de «convergence des luttes» organisée à Montpellier lors de laquelle la police a procédé à 51 interpellations, a précisé la préfecture de l'Hérault.
Ces personnes sont entendues pour violences sur personnes dépositaires de l'ordre public, dégradations aggravées et/ou participation à un groupement en vue de commettre des dégradations, selon le procureur de la République de Montpellier Christophe Barret.
«Pure com»
Me Sophie Mazas, présidente de la Fédération de la Ligue des droits de l'Homme de l'Hérault, qualifie ces interpellations et ces gardes à vue de «pure com» auprès de l'AFP.
«Ces personnes, dont deux membres de l'équipe légale de la LDH, ont été arrêtées totalement au hasard, plus de deux heures après les dégradations commises en marge de la manifestation, et à 2 km des dégradations», affirme Me Mazas, selon qui les manifestants interpellés étaient alors sur le chemin de l'université Paul-Valéry, bloquée depuis la mi-février, où ils se rendaient pour participer à une Assemblée générale.
Dès hier soir la LDH a dénoncé dans un communiqué «la nasse policière» mise en place pour ces interpellations, et «l'entrave à la liberté de manifester» : «Certaines arrestations ont été très violentes, il y a eu une répression inhabituelle à Montpellier», insiste Me Mazas.
Entre 1000 et 2000 manifestants
La manifestation, qui a rassemblé entre 1000 et 2000 personnes hier à Montpellier, a été le théâtre d'affrontements entre certains manifestants et les forces de l'ordre. Un peu avant 16h, environ 200 manifestants, le visage dissimulé, se sont directement confrontés avec les policiers, déployés en nombre, ont constaté les journalistes de l'AFP.
Les dégâts causés à divers commerces - banques, agences immobilières ou magasins de téléphonie - en marge de la manifestation n'ont pas encore été évalués.
Cette manifestation antigouvernementale a notamment réuni de jeunes anarchistes, des opposants à la loi Vidal sur l'accès à l'université, des militants défendant les droits des migrants ou des opposants à la dispersion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique).

Philippe défend les frappes en Syrie face aux députés (15.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 18:40 

  • Publié le 15/04/2018 à 16:16

Frappes en Syrie : les images satellites des deux sites touchés
Les frappes occidentales ont touché deux sites en Syrie : un dans le district de Barzé, au nord de Damas, et un à l'ouest de Homs
LE SCAN POLITIQUE - Les parlementaires débattent de l'opération «Hamilton» lancée dans la nuit de vendredi à samedi par Washington, Paris et Londres.
L'intervention militaire de la France en Syrie a fait l'objet, lundi en fin d'après-midi, d'un débat public à l'Assemblée nationale et au Sénat. L'occasion pour le premier ministre de défendre les frappes lancées dans la nuit de vendredi à samedi. Devant un hémicycle clairsemé, particulièrement à droite, Edouard Philippe a repris l'argumentation utilisée dimanche soir par le président de la République qui a longuement justifié sa décision de frapper des sites de production d'armes chimiques du régime de Bachar al-Assad.
«Notre ennemi n'est pas la Syrie, notre ennemi, c'est Daech (...) Mais notre politique restera vaine si une arme de terreur entretenait la barbarie et contredisait toutes les règles que se donnent les humains. Avec les armes chimiques, c'est la raison et la civilisation qui vacillent durablement», a affirmé Edouard Philippe. «En mai 2017, le président de la République avait très précisément défini la ligne rouge: une attaque chimique avérée, attribuable aux forces armées syriennes, avec des conséquences létales, entraînerait une riposte immédiate (...) Nous avons envoyé un message ferme, un message clair et un message fort», a-t-il insisté en estimant que «le coût de l'inaction était plus grand encore». «Cette intervention n'est pas le prélude à une guerre. Nous ne voulons pas renoncer à une solution politique», a assuré le premier ministre mais «aucune solution politique ne sera trouvée tant que l'utilisation de l'arme chimique sera impunie».
Les frappes lancées par les armées américaine, française et britannique, dans le cadre de l'opération «Hamilton», ne suscitent pas la même unanimité que l'intervention au Mali décidée par François Hollande en 2013.
Aucun vote n'a ponctué cette séance exceptionnelle. Comme le mentionne l'article 35 de la Constitution, «le gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger, au plus tard trois jours après le début de l'intervention. Il précise les objectifs poursuivis».

L'opposition inquiète
Si l'intervention française en Syrie devait excéder les quatre mois, le gouvernement se verrait contraint de demander l'autorisation du Parlement. À ceci près que si ce dernier n'est pas en session à cette échéance (ce qui sera le cas, pause estivale oblige), il faudra attendre la session suivante, qui démarre en octobre.
Le président du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, Christian Jacob, avait demandé dès vendredi à ce qu'un tel débat ait lieu. Invité d'Europe 1, le député de Seine-et-Marne s'alarmait d'un «vrai risque d'embrasement mondial» au vu de l'évolution du conflit syrien. Invoquant l'exemple de la deuxième guerre du Golfe en 2003, fondée sur l'existence finalement non avérée d'armes de destructions massives, l'élu LR a estimé que le gouvernement pouvait «éclairer la représentation nationale sur ce sujet avant de prendre une décision».
D'autres élus d'opposition se sont montrés plus virulents à l'égard de la décision prise par Emmanuel Macron, une première depuis son arrivée à l'Élysée. Jean-Luc Mélenchon, qui organisait samedi une marche anti-Macron à Marseille, s'est dit «triste» et «inquiet» de cette escalade. «Le président français s'est, d'une manière tout à fait lamentable, aligné sur les États-Unis d'Amérique en se disant certain d'avoir des preuves de la responsabilité de Bachar el-Assad dans l'utilisation d'armes chimiques. Alors, s'il a ces preuves, qu'il les montre. C'est la meilleure manière de nous convaincre», a-t-il déclaré à la presse, réunie sur place.

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Wauquiez : «Macron est déconnecté de la vie quotidienne» des Français (15.04.2018)

  • Mis à jour le 15/04/2018 à 14:44
Laurent Wauquiez sur TF1 en mars dernier. LIONEL BONAVENTURE/AFP
Balayant en revue l'ensemble des sujets d'actualité, le patron des Républicains étrille la politique du chef de l'État qu'il accuse de «duplicité» et de pratiquer une «politique du marketing».
Laurent Wauquiez n'avait pas réagi à l'interview d'Emmanuel Macron sur TF1 ni aux frappes françaises contre l'arsenal chimique syrien. Aujourd'hui, le temps est à la réplique. Avant une nouvelle intervention du chef de l'État ce dimanche soir sur BFM TV et Mediapart, le président des Républicains balaie dans Le Journal du dimanchel'ensemble des sujets d'actualité et frappe fort.
À commencer par l'opération armée menée en Syrie dans la nuit de vendredi à samedi. Il rejoint le camp des dirigeants politiques sceptiques: «Si l'usage d'armes chimiques est avéré, Bachar el-Assad devra répondre de ses actes. La CPI existe précisément pour cela. Mais je ne crois pas à l'utilité de frappes punitives. Frapper pour frapper, pour donner le sentiment de faire quelque chose, sans qu'il y ait une quelconque stratégie derrière, je n'en comprends ni l'utilité, ni le sens», dit Laurent Wauquiez dans Le JDD.
Plus globalement, le président de LR dénonce la politique du chef de l'État qu'il accuse depuis plusieurs mois de ne «pas comprendre le pays». «Ce qui me frappe, c'est qu'Emmanuel Macron ne ressent pas le pays et ne comprend pas la France», affirme-t-il en accusant le chef de l'État d'avoir «menti» sur sa politique. «Il s'était engagé à ce que seuls les retraités les plus aisés paieraient la hausse de la CSG: c'est faux. Il a menti». «Il est déconnecté de la vie quotidienne de nos compatriotes. Le candidat de la feuille de paie est en train de devenir le président de la feuille d'impôt!», accuse-t-il. Des termes qui rappellent un argument de Manuel Valls pendant la primaire du PS! «Je suis le candidat de la feuille de paie, et je ne veux pas que Benoît soit le candidat de la feuille d'impôt», avait-il lancé à l'encontre de son opposant Benoît Hamon. Un an plus tard, Laurent Wauquiez tente désormais d'accoler cette étiquette au chef de l'État qu'il accuse aussi de «stigmatiser» les retraités et de ne s'adresser qu'à «ceux qui n'ont pas de problème».
Illusionniste
Pour Laurent Wauquiez, le président serait également illusionniste, incapable de «traiter les vrais problèmes». «Le macronisme est un illusionnisme», dénonce-t-il en visant les derniers projets de réforme du gouvernement. À commencer par celle de la SNCF. «Quel est le projet de redressement de la SNCF? Quelle vision pour les petites lignes ou les investissements stratégiques?», énumère Laurent Wauquiez qui dit soutenir la réforme du statut des cheminots. «Et où en est-on de la réforme des régimes spéciaux de retraite? Nulle part», regrette-il en demandant au chef de l'État d'inscrire dans la Constitution le service minimum. Une idée avancée notamment par Valérie Pécresse cette semaine. «Avec Macron, les mots peuvent être séduisants, mais dès qu'on gratte le vernis, les doutes assaillent», soutient-il encore dans Le Journal du dimanche. «Je le dis à nos compatriotes: ne vous laissez pas abuser par de belles paroles, regardez les faits. Eux ne mentent pas», complète-t-il encore en abordant la question de l'évacuation de Notre-Dame-des-Landes. «Notre-Dame-des-Landes, c'est le symbole de la capitulation de la République. Encore heureux qu'on évacue la zone: on a tout cédé aux zadistes!», s'offusque-t-il. Quant au discours d'Emmanuel Macron lundi dernier devant les évêques de France, Laurent Wauquiez dit avoir «un sentiment étrange de duplicité: je mets en garde contre de belles paroles... avec un risque de réveil brutal». «La réalité, c'est qu'il s'apprête à mettre en place la PMA, à l'opposé des valeurs défendues par nombre de catholiques. Je n'aime pas ces numéros d'équilibriste. À force de tout vouloir faire en même temps, le danger, c'est de tromper tout le monde», fait-il valoir.
En matière de sécurité, Laurent Wauquiez reproche au chef de l'État de n'être «absolument pas à la hauteur du défi». «On a expulsé 20 étrangers radicalisés alors qu'ils seraient plus de 3000 selon le ministère de l'Intérieur! Il veut ‘réguler' les financements étrangers des mosquées quand il faudrait les interdire», précise-t-il en l'accusant aussi de «sous-estimer gravement l'ampleur de la menace que représente l'intégrisme islamique». Le président de LR demande donc au chef de l'État de profiter de la révision constitutionnelle qu'il souhaite engager pour inscrire dans la Constitution «la lutte contre le terrorisme». Une proposition qui devrait être reprise mercredi par les Républicains lors de leur convention «asile et immigration». S'il pouvait poser une question au chef de l'État sur BFMTV, Laurent Wauquiez aimerait l'interroger sur «les étrangers fichés pour radicalisme» et qui vivent en France. «Il faut les expulser. Le droit le permet, rien ne s'y oppose. Pourquoi refuse-t-il de le faire alors que c'est le bon sens?», énonce-t-il.
Un an après l'élection d'Emmanuel Macron, le président de LR est convaincu que le chef de l'État «inspire de moins en moins de Français». «Les Français décryptent mieux que personne les stratégies politiciennes. Sur la durée, c'est toujours la vérité qui l'emporte», soutient-il en faisant valoir qu'il ne fait pas lui dans le «en même temps». «Je ne cherche as à plaire à tout le monde comme le Président. Je ne crois pas que l'ambiguïté permanente soit notre horizon».
Et alors qu'au sein même des Républicains, certains le pressent de clarifier sa ligne politique, notamment après l'appel de Thierry Mariani à une union des droites dans une tribune cosignée avec des élus du FN, Laurent Wauquiez dit être «sans ambiguïté». «Pas d'alliance avec le Front national. C'est la ligne des Républicains. La position de Thierry Mariani est totalement isolée dans notre famille, et s'il devait passer aux actes, il ne ferait plus partie de notre mouvement», annonce-t-il. Dans un tweet le 13 avril, Valérie Pécresse avait ainsi demandé «la suspension immédiate de Thierry Mariani en attendant son exclusion de LR».
Pas question de laisser un boulevard donc à Valérie Pécresse ni à Emmanuel Macron… Le président de LR a prévu de s'exprimer à nouveau lundi soir sur le plateau du 20h de France 2 et mercredi matin sur RTL.

L'organisme qui supervise le Web annonce la mort à venir des mots de passe (13.04.2018)

  • Mis à jour le 13/04/2018 à 14:52
Nos habitudes d'authentification sur le web vont évoluer avec le déploiement de ce nouveau standard. ARUN SANKAR/AFP
Le consortium international W3C a approuvé un nouveau standard dont le déploiement va permettre d'améliorer la sécurité des usages en ligne.
Le mot de passe appartiendra bientôt au passé et c'est une bonne nouvelle. Le World Wide Web Consortium (W3C), l'organisation qui gère les standards du Web, a annoncé la mise en place d'un nouveau modèle d'authentification. Il concernera notamment l'accès aux banques en ligne, aux réseaux sociaux ou encore aux sites d'e-commerce. L'institution internationale, qui réunit plus de 400 grandes organisations liées au web, prévoit de déployer la connexion par biométrie et périphériques mobiles. Le grand public verra sa mise en place dans les prochains mois et années. Il faut en effet laisser le temps aux développeurs d'adapter les sites à ce nouveau standard. Jugés aisément piratables et peu fiables, les mots de passe devraient, quant à eux, progressivement tirer leur révérence.
Avec la nouvelle authentification FIDO2, les mots de passe devraient disparaître. World Wide Web Consortium
Associé au FIDO, un standard d'authentification, le W3C a dû mettre d'accord les représentants de plus de 30 entreprises comme Airbnb, Alibaba, Apple, Google ou encore le français Orange. Il était question de mettre au point un système d'authentification simplifié pour l'utilisateur et qui améliore la sécurité des comptes.
Les utilisateurs auront le choix entre deux modes d'authentification: soit depuis un périphérique externe (smartphone, badge NFC, clé USB, montre connectée), soit directement depuis leur ordinateur par biométrie (reconnaissance d'empreinte, de visage, d'iris ou de la voix). Certaines de nos machines embarquent déjà les équipements nécessaires (lecteur d'empreinte, webcam), ils vont peu à peu se démocratiser. Pour ce qui est de la reconnaissance d'iris, elle nécessite des caméras de bonne qualité et un logiciel particulier, peu communs sur les appareils grand public. Néanmoins, certains smartphones haut de gamme comme le Galaxy S9 en sont déjà pourvus. Une fois lancés par l'utilisateur, ces systèmes enverront une signature numérique au site pour accéder au service. Comme le rapporte 01net, ce standard attendait l'approbation du W3C depuis 2015.
L'organisation annonce avoir déjà convaincu de nombreux acteurs du numérique comme les navigateurs Chrome, Edge, Mozilla et Opéra ainsi que des plateformes à l'instar de Facebook, ebay ou Google. Facebook et Google justement se sont déjà équipés de ce mode d'authentification en complément du mot de passe. Les entreprises vont peu à peu déployer le standard FIDO2, par le biais de l'API WebAuthn (une interface logicielle) récemment mise à disposition des développeurs.
Les mots de passe, «maillon faible» de la sécurité en ligne
«Alors qu'il y a de nombreux problèmes de sécurité en ligne et que l'on ne peut tous les résoudre, l'usage des mots de passe est l'un des maillons les plus faibles», explique Jeff Jaffe, dirigeant du consortium. En effet, de nombreux internautes ne respectent pas les règles de création de mots de passe les plus élémentaires ou se font piéger par des hackers.
L'organisation explique que la sécurité en sera donc renforcée. Le standard FIDO2 serait la solution contre le phishing, les attaques de l'homme du milieu (interceptions de communications) et les usurpations d'identité. Le phishing, par exemple, est un hameçonnage de l'internaute invité par un e-mail spam à donner des informations un site web frauduleux imitant parfaitement un site de confiance. Avec WebAuthn, il sera difficile à exécuter car le nom de domaine du service est lié au système d'authentification par cryptage. En somme, si un pirate essaie de récupérer des données via un faux site, le système ne transmettra pas la signature numérique de l'internaute. Aujourd'hui, les données d'identification comme le mot de passe transitent jusqu'au site web. S'il s'agit d'un faux, le pirate peut donc les récupérer. Si certains regretteront la nécessité d'avoir un périphérique sur soi ou de devoir faire une manipulation pour accéder à un service en ligne, le gain de sécurité sera une réelle plus-value selon le W3C.
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Israël observe avec prudence les frappes en Syrie (15.04.2018)

  • Publié le 15/04/2018 à 07:53
Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou. DEBBIE HILL/AP
Le premier ministre Benyamin Nétanyahou a exprimé samedi soir son « plein soutien » à l'opération mais il a demandé à ses ministres de garder profil bas pour ne pas froisser la Russie.
De notre correspondant à Jérusalem
C'est sans doute le moins qu'on pouvait attendre de lui. Samedi soir, le premier ministre israélien a exprimé son «soutien» aux frappes menée en Syrie. «Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne ont démontré que leur engagement ne se limite pas à des déclarations de principes», s'est félicité Benyamin Nétanyahou selon un communiqué publié par son bureau. Il a poursuivi: «Il devrait être clair pour le président Assad que ses efforts imprudents pour acquérir et utiliser des armes de destruction massive, ainsi que son mépris pour les lois internationales et sa disposition à fournir une base avancée à l'Iran comme à ses intermédiaires, mettent la Syrie en danger».
Benyamin Nétanyahou, qui évite généralement de s'exprimer publiquement durant le repos hebdomadaire du chabbat, avait demandé quelques heures plus tôt à son gouvernement de garder le silence. Seul Yoav Gallant, ministre du Logement et membre du cabinet de sécurité, a salué sur son compte Twitter «un signal important» et estimé que «l'utilisation d'armes chimiques franchit une ligne rouge que l'humanité ne peut tolérer». La tonalité de ces premiers commentaires apparaît relativement sobre, s'agissant d'une opération militaire pilotée par le plus proche allié de l'Etat hébreu et menée contre un pays avec lequel il demeure théoriquement en guerre.
Cette discrétion s'explique sans doute par le souci de ne pas accroître le malaise qui s'est installé ces derniers jours avec Moscou. Quarante-huit heures après une frappe imputée à l'Etat hébreu contre une base militaire syrienne sur laquelle sept membres des Gardiens de la révolution ont été tués, Vladimir Poutine a appelé mercredi soir Benyamin Nétanyahou à «s'abstenir de toute action déstabilisante». La Russie a longtemps détourné le regard lorsque l'armée israélienne jugeait nécessaire de viser des convois ou des dépôts d'armes destinés au Hezbollah. Mais elle montre depuis peu des signes d'agacement. La condamnation par Israël, en début de semaine, de l'attaque chimique imputée au régime de Bachar el-Assad, a aussi été sèchement critiquée par l'ambassadeur russe à Tel Aviv.
Relative discrétion
Dans un contexte de tension régionale croissante, les dirigeants israéliens veulent éviter que la colère de Moscou après les frappes américaines ne se retourne contre eux. Samedi matin, un haut gradé russe a évoqué la possibilité de fournir au régime syrien les batteries de missiles antiaériens S-300 qu'il lui refusait jusqu'à présent. «Après ce qui vient de se passer, nous n'excluons pas de réexaminer notre décision», a indiqué le général Sergei Rudskoi. Un tel virage constituerait une rude nouvelle pour l'armée de l'air israélienne, qui, malgré l'entrée en scène de l'aviation russe en septembre 2015, conserve une certaine liberté de mouvement dans le ciel de la Syrie. Le mécanisme de «déconfliction» mis en place par les deux pays a jusqu'à présent permis d'éviter tout accrochage entre leurs appareils.
Les stratèges israéliens n'excluent pas que l'Iran ou ses alliés aient l'idée de répondre aux frappes américaines en visant Israël. En milieu de semaine, un haut responsable cité par le quotidien Maariv sous couvert de l'anonymat a prévenu: «Assad et son régime disparaîtront de la surface de la terre si les Iraniens tentent vraiment de s'en prendre à Israël ou à ses intérêts depuis le territoire syrien». Vendredi soir, l'armée israélienne a révélé qu'un drone iranien abattu le 10 février dernier au-dessus de son territoire transportait des explosifs. L'annonce visait possiblement à justifier a posteriori les frappes qui ont visé lundi dernier la base syrienne T-4, d'où l'appareil sans pilote était dirigé. Hassan Nasrallah, secrétaire général de la milice libanaise chiite Hezbollah, a répondu à ces accusations en accusant Israël d'avoir commis «une erreur historique». «Avec cette agression, a-t-il ajouté, ils se sont eux-mêmes mis en situation de combat direct avec l'Iran.»
Mais il y a sans doute une autre raison à la relative discrétion affichée par Israël après les frappes américaines. Samedi, des voix influentes se sont élevées pour en déplorer le caractère limité. «Dans le meilleur des cas, elles vont dissuader le régime d'utiliser ses armes chimiques, mais Assad conserve son permis de commettre des massacres de masse en utilisant les armes à feu, les bombardements, la famine et la torture, a déploré sur Twitter le général de réserve Amos Yadlin, qui dirige l'Institut israélien pour les études sur la sécurité nationale. Cette attaque ne contribue nullement à démanteler les capacités chimiques du régime, ni à menacer son avenir.»
Certains responsables israéliens craignent aussi que l'Administration américaine ne se considère comme quitte après les frappes menées dans la nuit de vendredi à samedi. Peu avant l'attaque chimique de Douma, Donald Trump avait exprimé son intention de retirer les forces spéciales américaines déployées en Syrie. Un tel désengagement fragiliserait un peu plus encore la position israélienne, qui cherche à tout prix à empêcher un enracinement militaire durable de l'Iran à sa frontière nord, et sait ne pas pouvoir compter sur le soutien de la Russie.


Nicolas Baverez: «Au Moyen-Orient, l'engrenage» (15.04.2018)

Nicolas Baverez. - Crédits photo : ERIC GARAULT/Le Figaro Magazine
Vox Monde | Par Nicolas Baverez
Mis à jour le 15/04/2018 à 17h14
CHRONIQUE - La guerre de Syrie sert de laboratoire des conflits du XXIe siècle, tout comme la guerre d'Espagne pour le second conflit mondial.
La guerre de Syrie, avec ses 500.000 morts et ses 12 millions de réfugiés sur une population de 22 millions, est emblématique des conflits sans fin du XXIe siècle. La défaite militaire de l'État islamique au Levant, qui acte la fin du projet de califat, n'a mis fin ni à la mondialisation du djihad, ni aux opérations militaires. Tout au contraire, elle s'accompagne d'une ascension aux extrêmes de la violence qui va de pair avec un changement de nature et de dimension de la crise. La guerre civile se clarifie avec la partition de la Syrie en trois zones ; mais le conflit s'internationalise, la guerre de religion étant de plus en plus surplombée par l'affrontement des puissances régionales et mondiales.
Les lignes rouges, plus encore qu'il y a cinq ans à la Ghouta, ont été délibérément franchies. Les frappes punitives des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni sont légitimes.
Le bombardement chimique effectué par le régime de Damas sur la Douma, le 7 avril dernier, marque un tournant. L'utilisation délibérée de chlore et de sarin contre des populations civiles, sans aucun objectif militaire, franchit un nouveau seuil dans la terreur. Venant après plus de 85 frappes chimiques depuis l'été 2013, il souligne l'inanité de l'engagement pris alors par Damas - avec la garantie de Moscou - de détruire son arsenal de gaz tout en ouvrant la voie à une très dangereuse banalisation de l'usage des armes de destruction massive. Les lignes rouges, plus encore qu'il y a cinq ans à la Ghouta, ont été délibérément franchies. Les frappes punitives des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni sont légitimes. Elles ont rempli leur objectif en ciblant les sites de recherche et de production d'armes chimiques du régime de Damas, en évitant de possibles pertes liées au durcissement du déni d'accès de l'espace syrien par les systèmes russes S300 et S400 - illustré par la destruction récente d'un F16 israélien -, enfin en préservant les forces russes et iraniennes pour limiter les risques d'escalade.
L'engrenage vers l'affrontement de moins en moins indirect entre les États-puissances se trouve néanmoins enclenché. Au nord, la Turquie, malgré son appartenance à l'Otan, s'apprête, après la conquête d'Afrine, à lancer ses troupes contre Manbij, défendue par les milices kurdes du YPG appuyées par des soldats américains et français. Israël poursuit méthodiquement ses raids contre les bases abritant les forces al-Qods du général Soleimani et le déploiement de missiles iraniens en Syrie, à l'image des frappes sur l'aéroport de Tayfur le 9 avril. Enfin, pour la première fois depuis la guerre froide, les États-Unis ont tué, lors du bombardement de Deir ez-Zor, quelque 200 soldats russes déguisés en mercenaires pour les besoins de la guerre hybride devenue une spécialité russe.
La guerre de Syrie sert de laboratoire des conflits du XXIe siècle, tout comme la guerre d'Espagne pour le second conflit mondial
Par ailleurs, se profile, le 12 mai prochain, la très probable décision de Donald Trump de sortir les États-Unis de l'accord du 14 juillet 2015 sur le nucléaire iranien, préparée par le remplacement de Rex Tillerson par Mike Pompeo à la tête du département d'État et par celui du général H. R. Mc Master par John Bolton comme directeur du Conseil de sécurité nationale. Ces nominations témoignent de la priorité désormais donnée au cantonnement stratégique de l'Iran, tant dans le domaine de la prolifération nucléaire et balistique que de son expansion de l'Irak et de la Syrie au Liban en passant par le Yémen - servie par les errements de la politique américaine au Moyen-Orient depuis 2003. L'Iran se retirera vraisemblablement à son tour de l'accord, ce qui implique la réactivation des sanctions liées au programme nucléaire, un nouveau train de mesures liées aux missiles et à leur exportation, ainsi que des frappes américaines et israéliennes en cas de relance des sites dédiés à l'atome militaire qui permettrait à Téhéran de détenir la bombe à brève échéance.
La dynamique de la guerre entre les puissances s'emballe donc au Moyen-Orient. Elle s'inscrit sur fond d'une reprise de la course aux armements - dont les dépenses augmentent de plus de 10 % par an -, de la prolifération nucléaire et balistique et de la montée des cybermenaces.
Elle se structure autour de deux systèmes d'alliances qui, pour ne pas être formalisées, ne sont pas sans présenter certains points communs avec celles de l'Europe de 1914: d'un côté, l'axe entre Israël, l'Égypte et l'Arabie saoudite appuyé par les États-Unis ; de l'autre, l'axe entre la Syrie de Bachar, l'Iran et la Turquie, adossé à la Russie. Elle s'inscrit sur fond d'une nouvelle guerre froide entre les États-Unis et la Russie de Vladimir Poutine qui multiplie les coups de force - des interventions militaires en Ukraine et en Syrie à la tentative d'assassinat de Sergueï Skripal et sa fille au novitchok en passant par la manipulation cybernétique de l'élection présidentielle aux États-Unis ainsi que des référendums sur le Brexit et l'indépendance de la Catalogne.
La guerre de Syrie sert de laboratoire des conflits du XXIe siècle, tout comme la guerre d'Espagne pour le second conflit mondial et celle de Corée pour la guerre froide.

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Castel Volturno, le royaume de la «Black Camorra» (16.04.2018)

À peine arrivées, les femmes nigérianes se retrouvent prises dans la spirale de la servitude pour dettes et sont obligées de se prostituer sur la via Domitiana. - Crédits photo : DMITRY KOSTYUKOV/The New York Times-REDUX-REA/DMITRY KOSTYUKOV/NYT-REDUX-REA
International | Par Julie Connan
Mis à jour le 16/04/2018 à 14h58
REPORTAGE - Dans cette bourgade située à cinquante kilomètres de Naples, devenue un carrefour de l'immigration illégale, prospèrent les trafics en tous genres et la prostitution. Après s'être affrontée à la Camorra italienne, une mafia nigériane, surnommée la « Black Axe », règne sur cette zone de non-droit.
De notre envoyée spéciale à Castel Volturno

La rubalise rouge et blanche virevolte encore autour du pin. Installée par la police après l'overdose fatale d'un homme de 40 ans, le 18 février, elle n'a pas empêché de nouveaux fantômes de venir hanter la carcasse abandonnée de l'hôtel Boomerang, posée devant une piscine verdâtre où flottent des ordures. Un pantalon épinglé sur un fil à linge et quelques ombres trahissent leur présence, dans ce lieu de Castel Volturno tristement connu pour héberger des toxicomanes en fin de course et servir de plaque tournante de stupéfiants, à une cinquantaine de kilomètres de Naples.
«Il y a deux cadavres à la morgue dont nous ne savons pas quoi faire. Les enterrements, ça coûte cher…», se lamente Dimitri Russo, le maire (démocrate) de Castel Volturno, dans la province de Caserte (Campanie), devenu un carrefour de l'immigration illégale, où prospèrent les trafics en tous genres et la prostitution. «90% des problèmes de Castel Volturno viennent de l'extérieur, de gens de passage ou en fin de parcours», explique l'édile de la ville qui compte environ 2000 locaux et 10.000 Napolitains pour 15.000 migrants.
Cette proportion quasi inédite en Europe n'étonne pas Antonio Casale, directeur du Centro Fernandes, un centre d'accueil et de services pour les migrants dépendant de Caritas. «Déjà, à l'ouverture du centre, en 1996, on pouvait imaginer comment la situation migratoire allait évoluer. Au début, les migrants venaient travailler dans l'agriculture. Ils pouvaient se loger sans trop de difficultés et profiter de la tolérance, voire du laxisme, des autorités qui ne pratiquaient pas beaucoup de contrôles. Ensuite, le bouche-à-oreille a fonctionné, explique le responsable. Aujourd'hui, avec la crise, le travail se fait plus rare et les environs sont comme des limbes où attendre un permis - illégal - pour aller à l'étranger. Mais cela peut durer dix ans…»
Une mafia invisible
À l'extérieur du bourg moribond, les problèmes s'agrègent de part et d'autre de la via Domitiana, une ancienne voie romaine facilitant l'accès à la baie de Naples. Les abords parlent d'eux-mêmes sur plusieurs kilomètres: des hôtels douteux aux prestations à peine dissimulées (jacuzzi, barre de pole dance…) et aux noms évocateurs (Joy, Venus…) accueillent clients et prostituées pour «20 euros les 24 heures». Sur la route, des femmes fuyantes dont personne n'ignore l'activité lisent, téléphonent, font semblant de faire du stop ou d'attendre un bus qui n'arrive pas. Autour d'elles, des rôdeurs à vélo font mine de ne pas les surveiller. Le long du littoral tout proche, la pinède, protégée, est fermée pour ne pas servir de lieu de passes. Les hôtels sont traditionnellement pour les filles venues de l'Est, alors que celles d'Afrique «travaillent» davantage dans des «connexion houses». Ces maisons aux rideaux tirés ont pignon sur rue: leurs habitués se refilent les «bonnes adresses», pour déguster un «menu» poulet préparé et bière à 5 euros, consommer des drogues douces et des prostituées.
Le tout est aux mains d'une mafia exogène - nigériane - surnommée la «Black Axe». «C'est une mafia invisible. Je n'ai aucune idée de qui sont les chefs et où ils habitent. Ils vivent de façon discrète, sans ostentation, ni costume, ni grosse voiture», reconnaît Dimitri Russo, qui assure ne ressentir aucune pression directe de ce réseau tentaculaire. Ces dernières années, cette mafia «liquide» a dû composer avec la pieuvre locale, les Casalesi, un clan de la Camorra qui règne sur la région de Caserte et tient toujours des villages alentour, en pleine «Terra dei fuochi» («Terre des feux») où les célèbres bufflonnes (donnant la fameuse mozarrella di bufala) broutent au milieu de terrains pollués par des ordures. C'est aussi là que prospère le système du Caporalato, en vertu duquel travaillent des centaines d'immigrés payés au lance-pierre à la journée, après avoir lanterné dès l'aube au «carrefour des esclaves».
«La mafia nigériane a un fonctionnement pyramidal, avec des cellules, des “capi” régionaux puis internationaux, et utilise trois méthodes de la Camorra: menaces, violence et assujettissement»
Le procureur Giovanni Conzo
Le procureur Giovanni Conzo, qui travaille depuis dix ans sur la mafia nigériane, décrit une structure très similaire à la Camorra. «Elle a un fonctionnement pyramidal, avec des cellules, des “capi” régionaux puis internationaux, et utilise trois méthodes de la Camorra ou la ‘Ndrangheta: menaces, violence et assujettissement, précise le magistrat, qui vit sous protection policière. Au début, les Nigérians devaient payer le “pizzo” (racket) aux Casalesi, mais ils ont fini par se révolter.» Une rébellion qui a débouché sur le «massacre de Castel Volturno». Le 18 septembre 2008, sur la Domitiana, le clan des Casalesi abat sept hommes - togolais, ghanéens et libériens - choisis au hasard et sans lien avec des activités criminelles. Une opération anti-Camorra est lancée après cette vendetta. «Le chef de la Camorra a pris un tel coup sur la tête à l'époque que les Nigérians se sont libérés, se souvient le procureur Conzo. Je pense qu'il n'y a plus de soumission à présent.»
La soumission est en revanche la pierre angulaire des relations entre les prostituées et leurs souteneurs, qui organisent leur venue depuis le Nigeria, en jouant sur leur naïveté ou en leur faisant miroiter un emploi en or en Italie. À leur arrivée à l'issue d'un périple passant souvent par la Libye, Lampedusa et la Sicile, les jeunes femmes sont vite informées du sort qui les attend. «Il m'a dit que c'était moi qui devais le payer: 60.000 euros! Et que pour cela, je devais me prostituer», se souvient, au sujet de celui qu'elle pensait être son employeur, Blessing Okoedion, une rescapée des trottoirs de Castel Volturno, dans son livre Il Coraggio della libertà (Éd. Paoline, non traduit).
Ces femmes se retrouvent prises dans la spirale de la servitude pour dettes. «En arrivant, elles doivent rembourser 60.000, 80.000 ou 100.000 euros, selon nos enquêtes, mais elles n'arrivent presque jamais à s'affranchir, même en travaillant du matin au soir!» explique le magistrat. Les passes tournent autour de 20 euros mais les filles ont pour consigne de ne pas refuser pour 10 ou 15 euros. Quand elles vieillissent ou ont des enfants, elles deviennent maquerelles, «Madam» ou «Maman» (en français). «Elles ont peur des mesures de rétorsion sur leurs familles restées au pays. La vraie dette, c'est la peur, explique Giovanni Conzo. Et puis, il y a aussi la peur du vaudou («woodoo» ou «juju» en nigérian), auquel elles croient beaucoup.» «Le juju est une forme de contrôle, une chaîne psychologique très forte», confirme Blessing Okoedion.
 «Je ne savais pas encore que le diable pouvait se présenter sous les traits d'un homme d'Église»
Blessing Okoedion, une rescapée des trottoirs de Castel Volturno
Dans les rues défoncées et fantomatiques du quartier de Destra Volturno, les pancartes d'églises évangéliques pullulent et promettent que tel ou tel prêtre pourra «répondre à toutes vos prières» ou que «Dieu est pour vous». Elles seraient au moins une cinquantaine à profiter de la détresse spirituelle des migrants et des prostituées pour solliciter des dons forcés. Selon la journaliste italienne Anna Pozzi, qui a coécrit le livre de Blessing Okoedion, certains pasteurs demandent, en échange de prières, un pourcentage sur leurs gains. «Je ne savais pas encore que le diable pouvait se présenter sous les traits d'un homme d'Église», écrit la rescapée dans son témoignage.
À Castel Volturno, seuls les orangers semblent s'épanouir dans les jardins des maisons décaties où fleurissent les panneaux «Vendesi» («à vendre») ou «Affittasi» («à louer»). Difficile d'imaginer que la ville fut par le passé un lieu de villégiature de la petite bourgeoisie napolitaine. Aujourd'hui, des agents peu regardants sur les contrats et l'identité des occupants louent certains logements pour une centaine d'euros par mois. D'autres propriétaires rêvent de céder leur bien à la mairie, qui ne peut se permettre de tels «cadeaux».
Décorum apocalyptique
Dans le quartier de Villagio Coppola, en bord de la mer Tyrrhénienne, les ruines de résidences de luxe témoignent du faste et de la démesure du projet Pinetamare, lancé en toute illégalité avec des fonds mafieux, dans les années 1960. Malgré la vue splendide sur l'île d'Ischia, le «village», abîmé par le temps et les tentatives de démolition, évoque désormais des images d'exode et même de guerre. Au loin, deux hommes vident des gravats dans une décharge improvisée sur la plage, surnommée «Plastic Beach». Un canapé désarticulé a échoué dans la vase d'une gigantesque piscine, autrefois azur. Pas étonnant au beau milieu de ce décorum apocalyptique que la série Gomorra (adaptée du livre de Roberto Saviano) y filme régulièrement des scènes, dans lesquelles quelques habitants s'évadent le temps d'un tournage.

Le quartier de Villagio Coppola, en bord de mer, évoque désormais des images d'exode et même de guerre.- Crédits photo : Julie Connan
Dans cet univers de quasi-non droit, une forme de coexistence plus ou moins pacifique s'est instaurée entre locaux et migrants. Certains se sont adaptés, à l'instar des épiciers locaux qui ont reconverti leur commerce en «African markets». «Il faut reconnaître que les migrants font survivre le commerce local, qui s'est adapté», explique Roberta Gravina, travailleuse sociale qui donne des cours d'italien au Centro Fernandes. «Il y a des tensions, mais elles sont souvent liées à des problèmes de langue et se résolvent la plupart du temps par la médiation», ajoute-t-elle, dans les locaux de l'association dont les murs sont ornés de posters jaunis de la chanteuse sud-africaine Miriam «Mama Africa»Makeba, décédée il y a dix ans à Castel Volturno des suites d'un malaise après un concert de soutien à Roberto Saviano.
Certains habitants forment des poches de «résistance», refusant de laisser la ville à l'abandon et aux mains de la Pieuvre noire. Le capitaine du Napoli et international slovaque de football Marek Hamsik vit dans une petite enclave «chic» de la ville qui accueille aussi le centre d'entraînement du club. Des grilles ont été posées à l'entrée de plusieurs rues. Seuls les riverains en ont la clef. Une brocante avec des frigos à 10 euros témoigne aussi de l'économie de débrouille et de survie.
Alfonso, un quadragénaire bonhomme, retape le toit d'une maison secondaire. «Je vis ici depuis huit ans maintenant. Avant, j'habitais dans un quartier très pauvre de Naples dans lequel il n'y avait pas de travail, raconte-t-il, ajustant un vieux bonnet D&G. Ici au moins, j'ai récupéré une vieille maison de famille et je peux faire des petits boulots payés à la journée.» Ces jours-ci, il garde toujours une pelle à portée de main pour venir désensabler les véhicules aventuriers pris au piège de la petite route côtière inondée par les vagues, faute d'entretien municipal et de digue digne de ce nom. «Je n'ai aucun problème avec les Africains ici. Eux aussi font des petits boulots dans des maisons. Mon seul problème ici, c'est l'eau et le sable.»

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Les Français surestiment grandement leur vraie richesse et le PIB du pays (15.04.2018)

Selon le rapport Spinetta publié en février, les coûts d'exploitation de la compagnie ferroviaire s'élèvent à 22,2 milliards d'euros l'an, dont 10,5 milliards financés par des subventions publiques et par «le versement transport» des entreprises. - Crédits photo : Sébastien SORIANO/Le Figaro
Conjoncture | Par Jean-Pierre Robin
Publié le 15/04/2018 à 19h06
CHRONIQUE - Notre richesse nationale telle que l'évalue le PIB est à l'évidence très surestimée car sa partie «non marchande» est surpayée et gonflée à l'hélium.
Cette cheminote entendue à la télévision n'en démord pas: «Nous ne voulons pas être rentables, nous voulons être utiles.» Voilà qui est beau comme l'antique, et elle a entièrement raison. «C'est proprement ne valoir rien que de n'être utile à personne», écrivait Descartes dans son Discours de la méthode(1637). Le seul hic, comment évaluer cette utilité? Quel est son prix, quel est son coût? «La santé n'a pas de prix, mais elle a un coût»: la formule ressassée ad nauseam résume tout le drame de l'Assurance-maladie, notamment en ce qui concerne ces «traitements innovants» de l'hépatite C qui peuvent dépasser 40.000 euros par patient.
Pour la SNCF, la distinction est assez facile à établir. Selon le rapport Spinetta publié en février, les coûts d'exploitation de la compagnie ferroviaire s'élèvent à 22,2 milliards d'euros l'an, dont 10,5 milliards financés par des subventions publiques et par «le versement transport» des entreprises. Précisons que ces chiffres n'incorporent pas la contribution annuelle de l'État au financement du régime spécial de Sécurité sociale des agents de la SNCF, à hauteur de 4,2 milliards en 2016. Au total, les usagers du train n'acquittent qu'un peu plus de la moitié du coût de transport, le contribuable faisant l'appoint.
La proportion est du même ordre pour la RATP dont les recettes provenant de la vente de tickets et de la carte Navigo ne couvrent que 52 % des coûts de la Régie autonomie des transports parisiens. Mieux encore que la RATP et la SNCF, l'Opéra national de Paris permet à ses spectateurs de payer moins de la moitié du prix réel de leur billet, la subvention de l'État, et dans une assez faible mesure le mécénat privé de l'Arop, assurant le reste. Le mélomane qui se rend à l'Opéra Garnier ou à Bastille éprouve donc un plaisir à la fois esthétique («la musique creuse le ciel», selon Baudelaire) et économique, car il creuse les déficits publics pour son seul agrément!
Au-delà des entreprises publiques subventionnées, ce sont en réalité des pans entiers de l'activité productive dont on ne sait plus quelle est aujourd'hui la vraie valeur.
Trêve de plaisanterie, les subventions à haute dose dénaturent complètement la valeur des choses et les choix collectifs. Quel est le prix que le voyageur accepte réellement de payer pour prendre le train? Et au nom de quoi l'auditeur de Don Giovanni ou de Tristan est-il autorisé à se faire offrir ses extases lyriques par l'impôt? Au-delà des entreprises publiques subventionnées, ce sont en réalité des pans entiers de l'activité productive dont on ne sait plus quelle est aujourd'hui la vraie valeur.
Rappelons que le PIB, le produit intérieur brut qui mesure la richesse produite annuellement par un pays, est calculé en fonction des prix auxquels les biens et les services s'échangent sur le marché. Mais quid des produits et principalement des services publics (enseignement, justice, police, défense, etc.) qui n'ont pas de prix? Depuis la création de la comptabilité nationale, à la fin des années 1940, les règles internationales établies par l'ONU ont stipulé que les activités «non marchandes» seraient valorisées en fonction de leurs coûts (principalement salariaux).
Le PIB total de la France, 2228,9 milliards d'euros en 2016, se décompose ainsi en deux parties: le PIB marchand, de 1828 milliards d'euros, et le PIB non marchand, de 400,9 milliards d'euros, selon les chiffres de l'Insee. Il faut rendre hommage à notre institut national de la statistique d'établir cette distinction entre «marchand» et «non marchand», même si on n'en parle pratiquement jamais. Très peu de ses homologues étrangers font ce calcul, quand bien même le FMI et l'OCDE l'ont ardemment recommandé à partir de 2008.
L'une des difficultés est que la frontière entre les deux est parfois fragile. Ainsi la Commission de Bruxelles, obsédée par les subventions des États aux entreprises, a décrété qu'une entreprise publique ayant une fonction de production est classée dans le PIB «marchand» à la condition qu'elle couvre au moins la moitié de ses coûts par des recettes propres. Moyennant quoi la production de la SNCF et de la RATP est incluse dans le PIB «marchand», mais seulement pour la partie couverte par la vente des billets, précise-t-on à l'Insee.
Mesurer la valeur des services publics en fonction de leur coût et non de leur utilité est fort contestable, même si personne n'a encore trouvé de meilleure solution.
Reste que mesurer la valeur des services publics en fonction de leur coût et non de leur utilité est fort contestable, même si personne n'a encore trouvé de meilleure solution. Plus on accroît le nombre de fonctionnaires et plus le PIB «non marchand» s'améliore. Le fait est que ce dernier a augmenté de 16,3 % depuis 2008 en France, alors que le «PIB marchand» ne progressait pour sa part que de 10,7 %.
Certes, les comparaisons internationales sont défectueuses puisque de nombreux pays n'identifient pas leur PIB «non marchand» en tant que tel. L'OCDE n'en a pas moins calculé une sorte de substitut en agglomérant les services publics administratifs, les dépenses de santé et d'éducation. Ces trois éléments représentent 23 % du PIB total en France, 18 % en Allemagne et au Royaume-Uni et 16 % au Japon.
Or ce surcroît quantitatif ne se traduit pas par une qualité de service supérieure, bien au contraire comme en témoignent les comparaisons internationales, et notamment l'enquête Pisa de l'OCDE en matière d'éducation où la France est très mal classée. «Il y a un problème d'efficience des services publics en France», reconnaissait la semaine dernière François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France. Notre richesse nationale telle que l'évalue le PIB est à l'évidence très surestimée car sa partie «non marchande» est surpayée et gonflée à l'hélium. Il serait temps d'arrêter de prendre les vessies pour des lanternes.

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Syrie : qu'est-ce que le mystérieux Centre chimique frappé par les alliés ? (16.04.2018)

Les raids occidentaux ont notamment visé un immeuble du Centre d'études et de recherches scientifiques situé à Barzeh, un quartier de la proche banlieue de Damas. - Crédits photo : Uncredited/AP
International | Par Georges Malbrunot
Mis à jour le 16/04/2018 à 15h08
DÉCRYPTAGE - Les raids occidentaux ont visé un site, le Centre d'études et de recherches scientifiques situé à Barzeh et soupçonné de produire des armes chimiques, selon le rapport d'un service de renseignements occidental. La France avait collaboré à sa création dans les années 70.
Mission accomplie: «une bonne partie de l'arsenal chimique» du régime syrien a été détruite par les frappes occidentales dans la nuit de vendredi à samedi, s'est félicité samedi Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères.
Au moins deux sites ont été visés par les raids occidentaux: celui de Massyaf près de Homs dans le centre du pays et celui de Barzeh, dans la proche banlieue de Damas qui abrite le Centre d'études et de recherches scientifiques (Cers). Sur de premières vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, on voit des maisons réduites en gravats ou des immeubles détruits à Barzeh.
Le Cers a été crée dans les années 1970 avec le concours de la France qui retira sa coopération vingt ans plus tard lorsque Paris se rendit compte que le partenariat était «risqué».
«Non, non, un seul immeuble a été détruit par les bombardements à Barzeh, nous a déclaré un Syrien, proche du Cers. Et ce n'était pas un laboratoire chimique, simplement un bâtiment avec des salles de classes pour étudiants et des bureaux. Cette histoire d'armes chimiques est une mascarade», jure-t-il.
«Nous savons par nos services de renseignements que la Syrie a continué d'acheter des tas de saloperies ces dernières années. Ce n'étaient pas des frappes symboliques »
Un proche d'Emmanuel Macron
Le Cers dispose d'une autre emprise à Jamrayah, derrière le palais présidentiel de Bachar el-Assad sur le mont Qassioun, épargné par les frappes mais qui a été, à plusieurs reprises depuis 2013, bombardée par l'aviation israélienne, dont une dernière fois en décembre dernier.
Les sites de Barzeh, Mayssaf et Jamrayah produisent des armes chimiques, selon le rapport d'un service de renseignements occidental, qui fuita en mai 2017 sur la BBC. C'est à Mayssaf et Barzeh, les deux sites visés la nuit dernière, que de telles armes seraient montées sur des missiles. Le régime de Damas nie l'existence de telles activités clandestines.
«De vraies installations ont été détruites la nuit dernière, confie au Figaro un proche d'Emmanuel Macron. Nous savons par nos services de renseignements que la Syrie a continué d'acheter des tas de saloperies ces dernières années. Ces frappes n'étaient pas symboliques», dit-il.

Paris et d'autres capitales occidentales accusent Damas d'avoir préservé un programme chimique clandestin après 2013, date à laquelle la Syrie s'était pourtant engagée à détruire son arsenal chimique. La Russie s'était portée garante d'un tel démantèlement après la crise de l'été 2013 lorsqu'une précédente attaque chimique avait été perpétrée dans la Ghouta. Mais ensuite, Damas omit de déclarer un grand nombre d'activités du Cers, accuse Paris.
« Nous avons très bien collaboré avec le Cers jusqu'en 1981 »
Alain Chouet, ancien cadre de la DGSE
Depuis longtemps, l'établissement était dans le collimateur des puissances occidentales et de la France en particulier. Le 21 mars dernier, le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, sanctionnait par un gel de leurs avoirs plusieurs responsables du Cers: le général de brigade, Youssef Ajeeb, chef de la sécurité du Cers, Maher Soulaiman, médecin et directeur de l'Institut supérieur des sciences appliquées et des technologies (Issat), lié au Cers, Salam Tohmé, son directeur-adjoint, et Zuhair Fadhlun, chef de «l'Institut 3000», une succursale du Cers dans l'enceinte de Barzeh.
Le Cers est une vieille connaissance des diplomates français en poste à Damas. «Nous avons très bien collaboré avec le Cers jusqu'en 1981», se souvient Alain Chouet, ancien cadre de la DGSE, les services de renseignements extérieurs et fin connaisseur de la Syrie. Ce fut longtemps l'un des aspects les moins connus de notre coopération avec la Syrie de Hafez el-Assad, le père de l'actuel président. «Un jour, se souvient un ancien diplômé syrien du Cers, on a décidé de mettre en place avec les Français une salle blanche pour nos expériences scientifiques. Un accord avait été conclu avec l'INPG de Grenoble, mais au dernier moment, regrette-t-il, les Français nous dirent que ce n'était plus possible». «Les Syriens en voulaient toujours plus», fait valoir un ancien ambassadeur à Damas.
Les frappes de la nuit ont-elles réduites à néant les capacités de production d'armes chimiques du Cers et d'autres installations en Syrie? Rien n'est moins sûr.

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Trump et les généraux américains déclarent «mission accomplie» en Syrie (15.04.2018)

  • Mis à jour le 15/04/2018 à 12:20
Pour Donald Trump, président des États-Unis, la frappe en Syrie était «parfaitement exécutée». MANDEL NGAN/AFP
Le Pentagone a affirmé samedi que les 105 missiles tirés par la coalition contre trois centres d'armes chimiques syriens avaient atteint leurs cibles.
De notre correspondant à Washington
«Une frappe parfaitement exécutée. […] Merci à la France et au Royaume-Uni pour leur sagesse et la puissance de leurs belles armées. On n'aurait pu obtenir de meilleur résultat. Mission accomplie!» En un tweet samedi matin Donald Trump a clos, provisoirement au moins, l'épisode des représailles occidentales à l'attaque chimique perpétrée une semaine plus tôt par le régime syrien à Douma, une banlieue de Damas.
Cent cinq projectiles ont frappé en moins de deux heures, dans la nuit de vendredi à samedi, trois cibles associées au programme syrien d'armes chimiques, a précisé le Pentagone: 76 missiles (dont 57 Tomahawks américains) ont détruit le site de Barzeh près de la capitale, décrit comme un centre de recherche voué au développement et aux tests d'agents chimiques, 22 missiles ont visé le dépôt d'armes chimiques de Him Shinshar, à l'ouest de Homs, et sept autres projectiles ont frappé un autre centre de stockage et de commandement dans la même zone.
«Nous considérons que nous avons atteint le cœur du programme d'armement chimique syrien»
Le général Kenneth McKenzie
«Nous pensons que tous nos missiles ont atteint leurs cibles», a déclaré le général Kenneth McKenzie, directeur des opérations à l'état-major américain. Il a souligné que cette vague unique de frappes représentait «le double de la force utilisée un an plus tôt et qu'elle était portée «par une coalition internationale», en contraste avec les 59 Tomahawks tirés par les États-Unis en avril 2017 contre une base aérienne syrienne. À l'époque, «c'est la délivrance des agents chimiques qui était visée, a précisé le général. Cette fois c'est la production et le stockage.»
«Nous considérons que nous avons atteint le cœur du programme d'armement chimique syrien», a-t-il ajouté. Pressé de questions, il a admis: «Le système syrien [d'armes interdites] est plus large que les trois cibles visées. Il leur reste quelques capacités, mais nous pensons que nous avons porté un coup sérieux.» Les substances contenues sur les cibles n'ont pu être évacuées car «elles n'étaient pas transportables», assure l'officier. Il est même «probable» que les frappes aient provoqué «une certaine dispersion» de substances nocives, «mais nous pensons avoir réussi à limiter au maximum» le nuage toxique.

Les Syriens ont affirmé avoir abattu plus de 100 missiles, les Russes assurant pour leur part que 71 projectiles occidentaux avaient été détruits. Selon l'état-major américain, «les forces syriennes ont tiré 40 missiles sol-air», mais «aucun n'a engagé avec succès» ses cibles occidentales. «Les capacités russes de défense (antiaérienne) n'ont pas été employées», a en outre précisé le général McKenzie. Une guerre de propagande fait rage qui, selon Dana White, la porte-parole du Pentagone, a vu au cours des dernières 24 heures «une augmentation de 2000 % des ‘'trolls'' russes sur les réseaux sociaux».
Une réponse «justifiée, légitime et proportionnée»
«L'Amérique ne cherche pas à rester indéfiniment en Syrie, en aucune circonstance»
Donald Trump
L'opération américano-franco-britannique a été «soigneusement planifiée et méthodiquement exécutée», a précisé Dana White. Cette réponse «justifiée, légitime et proportionnée» au massacre commis le 7 avril à Douma «ne représente pas un changement dans la politique américaine en Syrie», ni une tentative de provoquer «un changement de régime» à Damas, souligne-t-elle. Une semaine plus tôt, Donald Trump avait ordonné à ses généraux de commencer à préparer le retrait des 2000 Forces spéciales américaines de Syrie dans les six mois. Vendredi soir, il a répété que «l'Amérique ne cherche pas à rester indéfiniment en Syrie, en aucune circonstance».
Dans son allocution télévisée, le président américain a aussi affirmé que les alliés étaient «prêts à poursuivre leurs actions jusqu'à ce que le régime abandonne son recours à ces agents chimiques prohibés». Dans la foulée, le secrétaire à la Défense, James Mattis, avait précisé qu'une s'agissait d'une «frappe unique» et qu'elle était terminée. «Ce qui se passe maintenant dépend entièrement de ce que fait le régime syrien, a expliqué samedi la porte-parole du Pentagone. Nous espérons qu'il a entendu notre message.»
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Frappes en Syrie : le bilan incertain de la participation française (16.04.2018)

Emmanuel macron, Donald Trump et Theresa May. - Crédits photo : STEPHANE DE SAKUTIN/AFP
Vox Monde | Par Renaud Girard
Mis à jour le 16/04/2018 à 15h04
DÉCRYPTAGE - La décision d'Emmanuel Macron de participer à l'offensive américaine et de s'aligner sur la position de Donald Trump possède quelques avantages, mais de nombreuses questions demeurent selon le grand reporter du Figaro Renaud Girard.
S'engager dans un acte de guerre est toujours, pour un chef d'Etat, une décision grave. Emmanuel Macron n'a sûrement pas décidé à la légère de faire participer la France à une opération punitive, principalement américaine, de bombardement de la Syrie, aux toutes premières heures du samedi 14 avril 2018. Nous n'avons aucune raison de douter de la sincérité du président français lorsqu'il affirme détenir des preuves irréfutables que le régime de Bachar al-Assad a fait, le 7 avril 2018, usage d'armes chimiques, dans son opération de reconquête d'une banlieue proche de Damas, jusque-là contrôlée par des unités rebelles islamistes, mais peuplée d'un grand nombre de femmes et d'enfants.
La décision de l'Elysée a dû être d'autant plus réfléchie qu'en mars 2003, le président Jacques Chirac avait refusé d'associer la France à une opération militaire américaine, beaucoup plus vaste, visant une autre dictature moyen-orientale, l'Irak, accusé (faussement) de fabriquer clandestinement des armes chimiques et bactériologiques interdites par les Conventions internationales.
Le chef de l'Etat a donc certainement longuement mûri les conséquences à court, moyen et long terme de son action de guerre, qu'il a voulu circonscrite à la seule capacité syrienne alléguée de production d'armes chimiques.
Quel bilan coûts-avantages pour la France pouvons-nous tirer de sa participation à l'opération militaire américaine?
Les avantages sont au nombre de quatre:
● La France montre qu'elle poursuit sa politique constante de bannissement des armes chimiques. Ayant eu à souffrir elle-même il y a un siècle de l'usage des armes chimiques par son ennemi allemand, la France a toujours été très impliquée dans les efforts internationaux de contre-prolifération chimique.
● Les puissances non nucléaires vont sans doute désormais réfléchir à deux fois avant de se lancer dans la production et l'usage des armes chimiques. Les puissances nucléaires (Russie, Chine, Inde, Pakistan, Israël, Corée du Nord) sont bien sûr immunisées face à toutes injonctions occidentales en ce domaine.
● Si les renseignements parvenus aux armées françaises sont exacts, et si des stocks d'armes chimiques ont effectivement été détruits durant le raid, c'est autant qui ne risquera jamais de tomber aux mains des djihadistes internationalistes infiltrés en Syrie, et de se retrouver un jour dans le métro de Paris.
● Le président français montre qu'il tient parole. Lors de la rencontre Macron-Poutine du 29 mai 2017 à Versailles, la France et la Russie s'étaient engagées publiquement à frapper le premier qui utiliserait des gaz chimiques dans le conflit syrien. Le Pentagone a plusieurs fois publiquement accusé les groupes islamistes d'avoir eu recours aux armes chimiques. Les Russes auraient donc dû frapper en compagnie de la France. Le problème est qu'ils considèrent qu'il n'existe aucune preuve qu'Assad ait fait usage d'armes chimiques, et que le dictateur syrien n'avait pas le moindre intérêt à agiter un tel chiffon rouge devant les Américains.
Mais face à ces avantages, de nombreuses questions demeurent.
● En s'alignant sur la position de Donald Trump, la France n'a-t-elle pas fait le jeu d'une opération de diversion intérieure du président américain, actuellement harcelé par le FBI?
● En s'alignant sur les Etats-Unis - alors qu'elle aurait pu décider de procéder seule à cette opération militaire, après enquête plus approfondie -, la France ne risque-t-elle pas de perdre une grande partie de son prestige dans le monde arabo-musulman? Les Français ne risquent-ils pas d'apparaître comme les caniches des Américains, un reproche que Paris avait fait à Tony Blair en mars 2003?
● Emmanuel Macron se rend à Washington du 23 au 25 avril 2018. Sa participation aux frappes américaines lui permettra-t-il d'obtenir des concessions de Donald Trump? Parviendra-t-il à convaincre le président américain de ne pas déchirer l'accord nucléaire du 14 juillet 2015 avec l'Iran, négocié et signé par son prédécesseur Barack Obama? De ne pas transférer son ambassade en Israël à Jérusalem, avant qu'une solution durable ne soit trouvée au conflit israélo-arabe et qu'un Etat viable ne soit donné aux Palestiniens? Si Macron n'y parvient pas, n'aura-t-il pas été inutile pour la France de s'être aligné au Levant sur une grande puissance dont elle ne partage pas la politique moyen-orientale?
● Emmanuel Macron doit se rendre en Russie au mois de mai 2018. Les Russes le considéreront-t-ils toujours comme un intermédiaire indépendant, crédible et efficace, capable de réduire les tensions Est-Ouest et de présider aux négociations de désarmement nucléaire partiel, voulues aussi bien par Moscou que Washington?
● La France a un ennemi principal. Ce sont les islamistes, qui tuent nos enfants, dans nos rues. Ce n'est pas Bachar el-Assad ; tout cruel qu'il soit, il n'a jamais tué un Français. Nos frappes sur la Syrie baasiste contribuent-elles à notre combat à mort contre l'islamisme, ou profitent-elles au contraire à nos ennemis djihadistes?
● Cette opération militaire va-t-elle vraiment améliorer, à moyen et long terme, la situation des populations civiles syriennes? N'est-ce pas qu'une demi-mesure? Un coup pour nourrir l'Ogre médiatique? Une politique inaboutie?
Car nous savons très bien que nous n'irons jamais, mus par quelque projet civilisationnel à la Jules Ferry, réoccuper notre ancienne colonie syrienne, d'où nous partîmes en 1946, laissant derrière nous un beau régime démocratique, qui dura trois ans.
Si, dans six mois, nous nous apercevons que les frappes du 14 avril 2018 ont provoqué une prise de conscience positive des Russes et des Iraniens et qu'ils ont favorisé à Damas une transition politique non chaotique - c'est-à-dire différente de la transition libyenne -, nous devrons reconnaître à Emmanuel Macron du génie stratégique pour s'être aligné sur la position d'un leader aussi déconcertant que Donald Trump. Si, en revanche, les Français n'obtiennent rien des Américains quant à leur politique moyen-orientale, et si la situation des populations civiles syriennes ne s'améliore pas, l'Histoire retiendra ce geste symbolique d'alignement français sur Washington, comme la première faute du président Emmanuel Macron en politique étrangère.
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Chroniqueur chargé des questions internationales
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L'appel de 119 sénateurs : «Les droits de l'enfant sont plus importants que le désir d'enfant» (12.04.2018)

«Le besoin de chaque enfant d'avoir un père et une mère ne doit pas être tenu pour négligeable», écrivent les signataires. - Crédits photo : 81096570/Inna Vlasova - stock.adobe.com
Vox Societe | Par Philippe Bas
Mis à jour le 12/04/2018 à 18h47
TRIBUNE - Le besoin de tout enfant d'avoir un père et une mère mérite la plus grande attention du législateur, avertissent Philippe Bas, président de la commission des lois du Sénat (LR), Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat ainsi que 117 autres parlementaires de différents groupes de la Haute Assemblée.
Les questions relatives à l'éthique du vivant, en particulier celles qui concernent le don de la vie, sont difficiles à trancher parce qu'il s'agit en réalité de régir les mœurs. Or, les mœurs sont rarement filles de la loi. Pourtant, il faut bien que la loi pose quelques règles car les technologies médicales, couplées à de nouvelles pratiques sociétales, ouvrent la possibilité de satisfaire le désir d'enfant par des moyens qui ne relèvent plus seulement de la vie privée mais aussi de la collectivité. Ces innovations interpellent la société tout entière, qui doit décider de ce qui ne dépend que d'elle, c'est-à-dire d'apporter ou non son assistance à la procréation et de sanctionner les pratiques qui lui paraîtraient contrevenir gravement aux droits fondamentaux.
Depuis toujours, la satisfaction du désir d'enfant relevait exclusivement de la sphère privée, des circonstances de la vie, de la liberté individuelle. Elle comportait aussi des obstacles, parfois insurmontables. On devait alors se résigner à ne pas avoir d'enfant, sauf à imaginer des arrangements dont l'histoire et la littérature ne sont pas avares d'exemples. Aujourd'hui, l'infertilité n'est plus sans remède médical et de nombreuses personnes seules ou formant un couple de même sexe pourraient, de ce fait, accéder aussi à une «parentalité pour tous». Face aux interdits qui les empêchent encore de devenir parents, elles expriment de plus en plus fortement le sentiment d'être victimes d'une inégalité, voire d'une injustice. La société aurait, selon elles, le devoir de corriger cette injustice puisque le progrès technique et de nouvelles formes de conventions entre particuliers, comme le contrat de gestation pour autrui, en ouvrent la possibilité matérielle.
«Fonder une famille, avoir des enfants, est un droit naturel de la personne humaine. Mais il ne peut s'exercer pleinement que si d'autres droits d'égale importance n'y font pas obstacle»
Les signataires
Ces attentes soulèvent cependant de multiples interrogations. Il faudrait décider dans quelle mesure un médecin peut agir en dehors d'une déontologie qui lui prescrit de traiter la maladie mais ne lui permet pas de répondre à d'autres demandes comme le ferait un simple prestataire de services. Il faudrait accepter de mettre l'hôpital public à la disposition de ceux qui auraient le droit d'exiger son intervention, en adaptant la répartition des moyens alloués aux différentes catégories de soins, tâche d'autant plus ardue que ces moyens font cruellement défaut. Il faudrait prévoir la prise en charge des nouvelles prestations médicales en mobilisant ou non l'assurance maladie et la solidarité nationale.
On devrait par ailleurs se poser la question de l'élargissement des conditions du don de gamètes, voire réexaminer le principe de sa gratuité. S'il décidait d'autoriser la «gestation pour autrui», le législateur devrait aussi déterminer les garanties susceptibles d'être apportées aux mères porteuses.
Enfin, il faudrait dans tous les cas définir les conséquences des nouveaux modes de procréation sur la filiation légale, l'exercice de l'autorité parentale, l'accès aux origines. On ne peut envisager d'extension de l'assistance médicale à la procréation sans avoir préalablement répondu à ces questions. Aucune ne relève de l'évidence, mais à l'inverse aucune ne peut reposer sur une parole de savant, de médecin ou de juriste. La bioéthique appartient à tous les Français. Cessons de l'enfermer dans le sanctuaire de l'expertise!
Le plus important reste en effet l'enjeu de société. Toutes les autres considérations lui sont subordonnées. Certes, on comprendrait mal que le désir d'enfant soit considéré comme foncièrement altruiste et généreux de la part d'un couple fécond formé d'une femme et d'un homme, tandis qu'il ne serait plus que l'expression d'un égoïste et immoral «droit à l'enfant» dans tous les autres cas. Le désir d'enfant est au cœur de toute humanité et il est toujours légitime. Fonder une famille, avoir des enfants, est un droit naturel de la personne humaine, une liberté inaliénable. Ce droit, cette liberté, ne peuvent être restreints à une catégorie d'individus. Mais voilà, comme tous les autres droits de l'homme, ce droit n'est pas une faculté que chacun pourrait exercer à sa guise. Il ne peut s'exercer pleinement que si d'autres droits d'égale importance n'y font pas obstacle. Dans le cas contraire, la loi civile, qui protège la famille en donnant la priorité aux besoins de l'enfant et porte aussi un regard attentif au conjoint vulnérable, doit trouver une conciliation en fixant de légitimes limites à la liberté individuelle.
Cette conciliation n'est cependant pas toujours possible. Prenons le cas des mères porteuses. Certains ne voient dans cette pratique qu'une liberté à encadrer. Contraire à la dignité de la femme qui se prête ou se loue, contraire à la dignité de l'enfant offert ou vendu, elle fait l'objet d'un interdit absolu dans de nombreux pays démocratiques. Il est vain de rechercher des modalités de mise en œuvre qui la rendraient éthique car elle est par son essence même en contradiction avec les principes humanistes qui fondent nos sociétés.
«Il s'agit ici non pas de décider du sort d'enfants déjà nés, mais de concevoir et de faire naître des enfants pour satisfaire une demande individuelle. Cette différence est essentielle»
Les signataires
Au-dessus du désir d'enfant, il faut prendre en considération les droits fondamentaux de l'enfant. Pour l'essentiel, c'est bien sûr aux parents qu'il appartient de le faire. C'est leur mission. Elle repose sur un postulat de confiance de la société à leur égard. Mais ils doivent eux-mêmes respecter des règles posées par la société, la protection de l'enfance étant l'une des missions les plus fondamentales de la puissance publique. Nous ne vivons pas dans une société atomisée où chacun pourrait déterminer en toute autonomie et sans restriction d'aucune sorte l'architecture et le mode de fonctionnement de sa famille, en prétendant de surcroît exercer sur la collectivité un doit de tirage pour obtenir les prestations nécessaires à son projet.
Le besoin de chaque enfant d'avoir un père et une mère ne doit pas être tenu pour négligeable, comme s'il s'agissait d'un ultime avatar des sociétés du passé. Notre histoire collective comporte assurément de nombreux exemples d'enfants placés par les circonstances de la vie sous la responsabilité d'un seul de leurs parents ou d'un parent d'adoption. Aujourd'hui, le nombre de familles monoparentales ne cesse d'ailleurs d'augmenter et la politique familiale reconnaît à juste titre la nécessité de leur apporter une attention particulière. On admet aussi depuis longtemps l'adoption d'enfants par une personne seule.
Enfin, de nouveaux modèles familiaux se sont mis en place autour de couples de même sexe qui apportent à l'enfant le meilleur d'eux-mêmes. Ce qui hier encore était impensable a progressivement été toléré, avant de faire l'objet semble-t-il d'une large acceptation.
«Ces questions méritent mieux qu'une approche désinvolte en termes de modernité ou de ringardise. Elles font appel à notre sens de l'humain, à notre conception du bien de l'enfant, à notre vision de la société et des valeurs qui la fondent»
Les signataires
Mais ces réalités ne sauraient nous dispenser d'évaluer l'intérêt supérieur de l'enfant avant d'envisager l'assouplissement des conditions d'accès à l'assistance médicale à la procréation. Car il s'agit ici non pas de décider du sort d'enfants déjà nés, mais de concevoir et de faire naître des enfants pour satisfaire une demande individuelle. Cette différence est essentielle. Une chose est de surmonter le manque qui s'inscrit au cœur de la vie d'un orphelin ou d'un enfant abandonné. Une autre est d'expliquer à un enfant qu'il a été conçu en étant destiné à vivre sans père ou sans mère par la décision d'adultes, fussent-ils des parents aimants dotés de qualités exceptionnelles. Qui peut oser prendre sans hésiter une telle responsabilité vis-à-vis de l'enfant? Comment exiger de la société qu'elle la partage? N'est-il pas présomptueux de penser que la force d'amour et la puissance éducative d'un adulte ou d'un couple d'adultes vont pouvoir remplir le vide inhérent aux origines de la vie de l'enfant ainsi conçu? A-t-on pensé à l'ensemble des risques pris pour le développement de sa personnalité, qui pourraient se réaliser très longtemps après sa naissance? Quelle confiance l'enfant pourra-t-il faire à ses parents s'il souffre du fait des conditions de sa conception? Comment ne pas comprendre qu'il s'agit ici de bien autre chose que d'une adoption? C'est un saut dans l'inconnu.
Ces questions méritent mieux qu'une approche désinvolte en termes de modernité ou de ringardise. Elles font appel à notre sens de l'humain, à notre conception du bien de l'enfant, à notre vision de la société et des valeurs qui la fondent. Le débat qui s'est engagé par les états généraux de la bioéthiquepermettra-t-il d'y répondre de manière impartiale alors qu'au lieu de rester neutre, l'instance qui en a à la charge au nom du gouvernement, le comité national consultatif d'éthique pour les sciences de la vie, a curieusement pris position avant même qu'il ait lieu? On aimerait avoir la certitude que tout n'a pas été réglé d'avance du fait de la position personnelle du président de la République. Le Parlement souverain est là qui décidera démocratiquement au nom des Français et ne manquera pas d'inscrire sa réflexion dans le cadre qui convient: celui des principes fondamentaux issus de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, pour le bien de l'enfant et le respect des valeurs de notre société, en conjuguant humanisme et raison dans la grande tradition héritée du siècle des Lumières.

La liste des signataires:
Philippe Bas, président de la commission des lois du Sénat (LR), ancien ministre de la Famille
Bruno Retailleau, sénateur LR de la Vendée, Président du Groupe LR
Philippe Adnot, sénateur de l'Aube, Délégué de la réunion administrative des Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (Non-inscrits)
Serge Babary, sénateur LR d'Indre-et-Loire
Jean-Pierre Bansard, sénateur LR représentant les Français établis hors de France
Jérôme Bascher, sénateur LR de l'Oise
Arnaud Bazin, sénateur LR du Val-d'Oise
Anne-Marie Bertrand, sénateur LR des Bouches-du-Rhône
Jérôme Bignon, sénateur Les Indépendants - République et Territoires de la Somme
Christine Bonfanti-Dossat, sénateur LR de Lot-et-Garonne
François Bonhomme, sénateur LR du Tarn-et-Garonne
Bernard Bonne, sénateur LR de la Loire
Pascale Bories, sénatrice LR du Gard
Gilbert Bouchet, sénateur LR de la Drôme
Céline Boulay-Espéronnier, sénatrice LR de Paris
Yves Bouloux, sénateur LR de la Vienne
Jean-Marc Boyer, sénateur LR du Puy-de-Dôme
Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques
Marie-Thérèse Bruguière, sénatrice LR de l'Hérault
François-Noël Buffet, sénateur LR du Rhône
Agnès Canayer, sénateur LR de la Seine-Maritime
Jean-Noël Cardoux, sénateur LR du Loiret
Jean-Claude Carle, sénateur LR de la Haute-Savoie
Anne Chain-Larché, sénatrice LR de la Seine-et-Marne
Patrick Chaize, sénateur LR de l'Ain
Pierre Charon, sénateur LR de Paris
Alain Chatillon, sénateur LR de la Haute-Garonne
Marie-Christine Chauvin, sénateur LR du Jura
Guillaume Chevrollier, sénateur LR de la Mayenne
Pierre Cuypers, sénateur LR de la Seine-et-Marne
Philippe Dallier, sénateur LR de la Seine-Saint-Denis, Vice-Président du Sénat
René Danesi, sénateur LR du Haut-Rhin
Mathieu Darnaud, sénateur LR de l'Ardèche
Marc-Philippe Daubresse, sénateur LR du Nord
Jean-Pierre Decool, sénateur Les Indépendants - République et Territoires du Nord
Nathalie Delattre, sénatrice RDSE de la Gironde
Annie Delmont-Koropoulis, sénatrice LR de la Seine-Saint-Denis
Catherine Deroche, sénatrice LR de Maine-et-Loire
Jacky Deromedi, sénateur LR représentant les Français établis hors de France
Chantal Deseyne, sénateur LR d'Eure-et-Loir
Yves Détraigne, sénateur UC de la Marne
Catherine Di Folco, sénateur LR du Rhône
Philippe Dominati, sénateur LR de Paris
Alain Dufaut, sénateur LR du Vaucluse
Catherine Dumas, sénatrice LR de Paris
Laurent Duplomb, sénateur LR de la Haute-Loire
Nicole Duranton, sénateur LR de l'Eure
Jean-Paul Emorine, sénateur LR de la Saône-et-Loire
Dominique Estrosi-Sassone, sénateur LR des Alpes-Maritimes
Jacqueline Eustache-Brinio, sénatrice LR du Val-d'Oise
Michel Forissier, sénateur LR du Rhône
Pierre Frogier, sénateur LR de la Nouvelle-Calédonie
Joëlle Garriaud-Maylam, sénateur LR représentant les Français établis hors de France
Jacques Genest, sénateur LR de l'Ardèche
Frédérique Gerbaud, sénatrice LR de l'Indre
Bruno Gilles, sénateur LR des Bouches-du-Rhône
Jordi Ginesta, sénateur LR du Var
ColetteGiudicelli, sénateur LR des Alpes-Maritimes
Jean-Pierre Grand, sénateur LR de l'Hérault
Daniel Gremillet, sénateur LR des Vosges
Jacques Grosperrin, sénateur LR du Doubs
Pascale Gruny, sénateur LR de l'Aisne
Charles Guené, sénateur LR de la Haute-Marne
Jean-Michel Houllegatte, sénateur PS de la Manche
Jean-Raymond Hugonet, sénateur LR de l'Essonne
Benoît Huré, sénateur LR des Ardennes
Jean-François Husson, sénateur LR de la Meurthe-et-Moselle
Sophie Joissains, sénateur UC des Bouches-du-Rhône
Muriel Jourda, sénateur LR du Morbihan
Guy-Dominique Kennel, sénateur LR du Bas-Rhin
Marc Laménie, sénateur LR des Ardennes
Elisabeth Lamure, sénateur LR du Rhône, président de la délégation sénatoriale aux entreprises
Christine Lanfranchi-Dorgal, sénatrice LR du Var
Florence Lassarade, sénatrice LR de la Gironde
Daniel Laurent, sénateur LR de la Charente-Maritime
Christine Lavarde, sénateur LR des Hauts-de-Seine
Antoine Lefèvre, sénateur LR de l'Aisne
Dominique de Legge, sénateur LR d'Ille-et-Vilaine
Ronan Le Gleut, sénateur LR représentant les Français établis hors de France
Jean-Pierre Leleux, sénateur LR des Alpes-Maritimes
Sébastien Leroux, sénateur LR de l'Orne
Henri Leroy, sénateur LR des Alpes-Maritimes
Brigitte Lherbier, sénateur LR du Nord
Gérard Longuet, sénateur LR de la Meuse, ancien Ministre, Président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques
VivetteLopez, sénateur LR du Gard
Michel Magras, sénateur LR de Saint-Barthélemy, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer
Didier Mandelli, sénateur LR de la Vendée
Jean-François Mayet, sénateur LR de l'Indre
Colette Mélot, sénatrice Les Indépendants - République et Territoires de la Seine-et-Marne
Marie Mercier, sénateur LR de la Saône-et-Loire
Sébastien Meurant, sénateur LR du Val-d'Oise
BrigitteMicouleau, sénatrice LR de la Haute-Garonne
Jean-Marie Mizzon, sénateur UC de la Moselle
Patricia Mohret-Richaud, sénatrice LR des Hautes-Alpes
Jean-Marie Morisset, sénateur LR des Deux-Sèvres
Philippe Mouiller, sénateur LR des Deux-Sèvres
Louis-Jean de Nicolaÿ, sénateur LR de la Sarthe
Olivier Paccaud, sénateur LR de l'Oise
Philippe Paul, sénateur LR du Finistère
Philippe Pemezec, sénateur LR des Hauts-de-Seine
Stéphane Piednoir, sénateur LR de Maine-et-Loire
Jackie Pierre, sénateur LR des Vosges
François Pillet, sénateur LR du Cher, Président du comité de déontologie parlementaire du Sénat
Rémy Pointereau, sénateur LR du Cher, Questeur du Sénat
Christophe Priou, sénateur LR de la Loire-Atlantique
Michel Raison, sénateur LR de la Haute-Saône
Jean-François Rapin, sénateur LR du Pas-de-Calais
André Reichardt, sénateur LR du Bas-Rhin
Charles Revet, sénateur LR de la Seine-Maritime
Hugues Saury, sénateur LR du Loiret
René-Paul Savary, sénateur LR de la Marne
Bruno Sido, sénateur LR de la Haute-Marne
Jean Sol, sénateur LR des Pyrénées-Orientales
Lana Tetuanui, sénatrice UC de la Polynésie française
Claudine Thomas, sénatrice LR de la Seine-et-Marne
Catherine Troendlé, sénateur LR du Haut-Rhin, Vice-Président du Sénat
Michel Vaspart, sénateur LR des Côtes-d'Armor
Jean-Pierre Vial, sénateur LR de la Savoie
Dany Wattebled, sénateur Les Indépendants-République et Territoires du Nord

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Syrie : les experts de l'OIAC n'ont pas encore eu accès à Douma (16.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 20:48 

  • Publié le 16/04/2018 à 15:17
Londres a affirmé lundi que la Russie et la Syrie n'avaient pas encore autorisé à la mission de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) l'accès au site de l'attaque présumée aux «gaz toxiques».
Arrivés samedi à Damas, les inspecteurs internationaux n'ont pas pu se rendre sur le site de l'attaque chimique présumée du 7 avril dans la Ghouta orientale, la Russie invoquant des «problèmes de sécurité» et assurant que cela serait possible mercredi. «La Russie et la Syrie n'ont pas encore autorisé l'accès à Douma. Accès sans entrave essentiel. La Russie et la Syrie doivent coopérer», a déclaré l'ambassade britannique à La Haye dans un tweet. Les experts de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) ont pour mandat d'enquêter sur l'utilisation éventuelle d'armes chimiques mais pas d'en identifier les auteurs. À La Haye, les ambassadeurs de Russie, du Royaume-Uni et de France se sont rendus lundi matin au siège de l'organisation pour une réunion d'urgence consacrée à la Syrie.
La délégation britannique a ainsi exhorté l'organisation à «demander des comptes aux auteurs de l'attaque de Douma», sans quoi le monde risquerait «d'autres utilisations barbares d'armes chimiques, en Syrie et ailleurs». «Les faits sont là et têtus. Ils résistent aux mensonges les plus grossiers et aux dénégations les plus absurdes», a déclaré l'ambassadeur français Philippe Lalliot lors de la réunion d'urgence convoquée à La Haye. Les pays occidentaux tiennent le régime de Bachar el-Assad pour responsable de l'attaque chimique de Douma. À croire le représentant américain auprès de l'OIAC, la Russie pourrait être intervenue sur le terrain où a été menée l'attaque chimique à Douma afin de supprimer des éléments de preuve, avant la visite de la délégation d'inspecteurs.
« Nous considérons ces accusations comme sans fondement.»
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov
Pour la Russie, le retard pris par la visite de la délégation tient aux frappes occidentales survenues pendant la nuit de vendredi à samedi. Moscou, grand allié du régime, s'est de son côté engagé à «ne pas s'ingérer» dans le travail de la mission, officiellement invitée par les autorités de Damas qui nient toute responsabilité dans le drame. «Nous considérons ces accusations comme sans fondement», a aussi rétorqué le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. «Dès le début, la Russie a été catégoriquement contre des accusations ou jugements précipités et infondés» sur les éventuels auteurs de cette attaque «et s'est prononcée pour une enquête impartiale», a souligné Dmitri Peskov.
Les enquêteurs à Damas ont tenu «plusieurs réunions» avec des responsables du régime, pour discuter de la mission à mener «avec transparence et neutralité», a assuré le vice-ministre syrien des Affaires étrangères, Fayçal Mokdad, cité par l'agence officielle Sana. «La Syrie a souligné lors de ces réunions qu'elle était disposée à coopérer et à fournir toutes les facilités nécessaires pour permettre à la délégation de mener à bien sa mission», a-t-il souligné. Le travail s'annonce toutefois compliqué pour les enquêteurs, qui arrivent plus d'une semaine après les faits dans une zone passée depuis sous contrôle de l'armée syrienne et de la police militaire russe et où des opérations de déminage sont en cours.
Après les raids occidentaux en représailles de l'attaque de Douma, le ballet diplomatique a ainsi repris sur le dossier syrien, pays en proie depuis 2011 à une guerre dévastatrice qui a fait plus de 350.000 morts. Américains, Français et Britanniques ont notamment présenté à l'ONU un nouveau projet de résolution sur la Syrie qui devrait être discuté à partir de lundi. Le texte inclut notamment la création d'un nouveau mécanisme d'enquête sur l'emploi d'armes chimiques.

Philippe défend les frappes en Syrie face aux députés (15.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 18:40 

  • Publié le 15/04/2018 à 16:16

Frappes en Syrie : les images satellites des deux sites touchés
Les frappes occidentales ont touché deux sites en Syrie : un dans le district de Barzé, au nord de Damas, et un à l'ouest de Homs
LE SCAN POLITIQUE - Les parlementaires débattent de l'opération «Hamilton» lancée dans la nuit de vendredi à samedi par Washington, Paris et Londres.
L'intervention militaire de la France en Syrie a fait l'objet, lundi en fin d'après-midi, d'un débat public à l'Assemblée nationale et au Sénat. L'occasion pour le premier ministre de défendre les frappes lancées dans la nuit de vendredi à samedi. Devant un hémicycle clairsemé, particulièrement à droite, Edouard Philippe a repris l'argumentation utilisée dimanche soir par le président de la République qui a longuement justifié sa décision de frapper des sites de production d'armes chimiques du régime de Bachar al-Assad.
«Notre ennemi n'est pas la Syrie, notre ennemi, c'est Daech (...) Mais notre politique restera vaine si une arme de terreur entretenait la barbarie et contredisait toutes les règles que se donnent les humains. Avec les armes chimiques, c'est la raison et la civilisation qui vacillent durablement», a affirmé Edouard Philippe. «En mai 2017, le président de la République avait très précisément défini la ligne rouge: une attaque chimique avérée, attribuable aux forces armées syriennes, avec des conséquences létales, entraînerait une riposte immédiate (...) Nous avons envoyé un message ferme, un message clair et un message fort», a-t-il insisté en estimant que «le coût de l'inaction était plus grand encore». «Cette intervention n'est pas le prélude à une guerre. Nous ne voulons pas renoncer à une solution politique», a assuré le premier ministre mais «aucune solution politique ne sera trouvée tant que l'utilisation de l'arme chimique sera impunie».
Les frappes lancées par les armées américaine, française et britannique, dans le cadre de l'opération «Hamilton», ne suscitent pas la même unanimité que l'intervention au Mali décidée par François Hollande en 2013.
Aucun vote n'a ponctué cette séance exceptionnelle. Comme le mentionne l'article 35 de la Constitution, «le gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger, au plus tard trois jours après le début de l'intervention. Il précise les objectifs poursuivis».

L'opposition inquiète
Si l'intervention française en Syrie devait excéder les quatre mois, le gouvernement se verrait contraint de demander l'autorisation du Parlement. À ceci près que si ce dernier n'est pas en session à cette échéance (ce qui sera le cas, pause estivale oblige), il faudra attendre la session suivante, qui démarre en octobre.
Le président du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, Christian Jacob, avait demandé dès vendredi à ce qu'un tel débat ait lieu. Invité d'Europe 1, le député de Seine-et-Marne s'alarmait d'un «vrai risque d'embrasement mondial» au vu de l'évolution du conflit syrien. Invoquant l'exemple de la deuxième guerre du Golfe en 2003, fondée sur l'existence finalement non avérée d'armes de destructions massives, l'élu LR a estimé que le gouvernement pouvait «éclairer la représentation nationale sur ce sujet avant de prendre une décision».
D'autres élus d'opposition se sont montrés plus virulents à l'égard de la décision prise par Emmanuel Macron, une première depuis son arrivée à l'Élysée. Jean-Luc Mélenchon, qui organisait samedi une marche anti-Macron à Marseille, s'est dit «triste» et «inquiet» de cette escalade. «Le président français s'est, d'une manière tout à fait lamentable, aligné sur les États-Unis d'Amérique en se disant certain d'avoir des preuves de la responsabilité de Bachar el-Assad dans l'utilisation d'armes chimiques. Alors, s'il a ces preuves, qu'il les montre. C'est la meilleure manière de nous convaincre», a-t-il déclaré à la presse, réunie sur place.

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Troupes américaines en Syrie : Paris et Washington partagent «la même position» (16.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 15:26 

  • Publié le 16/04/2018 à 08:17
Emmanuel macron : « nous avons réussi l'opération en Syrie »
INFOGRAPHIES - Deux jours après les frappes américaines, françaises et britanniques en Syrie en réponse à l'utilisation d'armes chimiques par le régime de Bachar el-Assad, les dirigeants français et américain semblent avoir du mal à se comprendre. Le président de la République a cependant démenti tout malentendu entre la France et les États-Unis.
La France et les États-Unis ont bien la «même position» concernant la durée de leur engagement militaire en Syrie. En effet, Emmanuel Macron a démenti ce lundi tout malentendu entre les deux pays après avoir déclaré dimanche soir dans son interview accordée à BFM TV, RMC et Mediapart qu'il avait convaincu le président américain Donald Trump de ne pas retirer ses troupes de Syrie et de «rester dans la durée».
«Il y a 10 jours, le président Trump disait que les États-Unis d'Amérique avaient vocation à se désengager de la Syrie. Nous l'avons convaincu, nous l'avons convaincu qu'il était nécessaire d'y rester (...). Je vous rassure, nous l'avons convaincu qu'il fallait rester dans la durée», a déclaré Emmanuel Macron dimanche soir. Une affirmation qui intervenait après les frappes conjointes américaines, françaises et britanniquescontre des usines d'armes chimiques utilisées par le régime syrien.

L'État islamique, ennemi commun
Or, ce lundi, Donald Trump a réagi en affirmant qu'il souhaitait toujours rapatrier aussi vite que possible les forces américaines déployées en Syrie. «La mission américaine n'a pas changé: le président a été clair sur le fait qu'il veut que les forces américaines rentrent à la maison le plus vite possible», a déclaré la porte-parole de la Maison-Blanche, Sarah Sanders. Dans son communiqué, la porte-parole ajoute: «Nous sommes déterminés à écraser totalement Daech et à créer les conditions qui empêcheront son retour. En outre, nous attendons de nos alliés et partenaires régionaux qu'ils prennent une responsabilité accrue, à la fois militairement et financièrement, pour sécuriser la région.»
Une vision que partage Emmanuel Macron et qu'il a tenu a souligné ce lundi, lors d'une conférence de presse aux côtés de la première ministre de Nouvelle Zélande à l'Elysée. «Notre engagement militaire en Syrie, qu'il s'agisse des États-Unis comme de tous les alliés de la coalition internationale, n'est pensé, justifié, que dans le cadre de la guerre contre l'État islamique», a déclaré le chef de l'État.
«Ce qu'a rappelé la Maison Blanche cette nuit, ça a été notre position depuis le début, il n'y a donc aucun changement et je n'ai indiqué aucun changement hier», a déclaré Emmanuel Macron. «Je n'ai pas dit que ni les États-Unis ni la France allaient rester militairement engagés dans la durée en Syrie.» «J'ai simplement dit que les États-Unis ont décidé avec la Grande Bretagne et la France de mener une opération ciblée (...) et que ce faisant, ils ont reconnu avec nous que notre responsabilité politique en Syrie ne se résumait pas à la lutte contre Daech, c'est un fait», a-t-il ajouté. «La Maison Blanche a raison de rappeler que l'engagement militaire est contre Daech et s'arrêtera le jour ou la guerre contre Daech sera parachevée. La France a la même position», a-t-il dit.

Une alliance contre les armes chimiques en Syrie
Ce débat fait suite à l'opération conjointe des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni, samedi. Une action qui visait à punir le régime syrien une semaine après des soupçons d'attaque chimique à Douma. L'objectif de ces frappes: «Établir une forte dissuasion à la production, à la dissémination et à l'usage d'armes chimiques», avait indiqué Donald Trump la veille, dans un discours diffusé à la télévision, assurant que Paris et Londres étaient «prêtes à poursuivre leurs actions jusqu'à ce que le régime abandonne son recours à ces agents chimiques prohibés».
Dans son adresse à la Nation annonçant le déclenchement des frappes, le 45e président des États-Unis avait déjà été très clair: «L'Amérique n'aspire en aucun cas à une présence illimitée en Syrie».
Lors de ces raids qui ont duré un peu moins d'une heure, trois cibles ont été visées: un centre de recherche scientifique dédié au développement et aux tests d'agents chimiques dans la banlieue de Damas, un dépôt d'armes chimiques à l'ouest de Homs et un poste de commandement dans la même zone.
Des frappes «nécessaires» et «légitimes», selon le président de la République, Emmanuel Macron, qui assure tout de même que «la France n'a pas déclaré la guerre au régime». «La finalité est de construire ce qu'on appelle une solution politique inclusive pour parler avec tout le monde», notamment avec les alliés du régime comme la Russie et l'Iran, et les acteurs régionaux comme la Turquie. La France et les États-Unis gardent tout de même un but commun: éradiquer Daech.
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Jeune fille au pair tuée à Londres : l'accusé charge son ex-compagne (16.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 20:37 

  • Publié le 16/04/2018 à 17:41
Ouissem Medouni, employeur de Sophie Lionnet, a nié lundi avoir causé la mort de la jeune fille au pair. Il décrit en revanche son ex-compagne comme «dominante» et «instable». Le 20 septembre dernier, le corps de Sophie Lionnet était retrouvé calciné dans le jardin du couple dans le sud-ouest de Londres.
À la question, «avez-vous causé la mort de Sophie Lionnet?», Ouissem Medouni, 40 ans, a répondu «non». Devant la cour criminelle d'Old Bailey, à Londres, ce dernier a préféré décrire la relation tumultueuse qu'il entretenait avec Sabrina Kouider, son ex-compagne, également accusée du meurtre de la jeune femme. L'accusé a évoqué la personnalité «dominante» et «instable» de sa compagne. Le procès, entamé le 19 mars, avait jusqu'ici donné la parole à l'accusation, qui a décrit le calvaire vécu par la jeune fille de 21 ans originaire de Troyes, pendant les vingt mois qui ont précédé sa mort.

Les pompiers, alertés par des voisins intrigués par une importante fumée et une «horrible» odeur, avaient retrouvé le 20 septembre 2017 son cadavre carbonisé dans le jardin du couple de Français, dans le Sud-Ouest londonien. Son corps présentait de multiples fractures au sternum, aux côtes et à la mâchoire mais en raison des brûlures, la cause exacte de la mort n'a pas pu être déterminée.
S'exprimant en anglais sans l'aide d'un interprète, par des phrases courtes et d'une voix effacée, Ouissem Medouni a expliqué avoir rencontré Sabrina Kouider en 2001 à une fête foraine et obtenu son numéro de téléphone par un ami commun. «Elle était très, très belle» et «j'étais un peu timide», a-t-il expliqué. Issu d'un milieu humble - il a grandi avec son père plombier dans la banlieue sud de Paris - Ouissem Medouni étudiait alors l'économie à l'université parisienne Panthéon-Assas, tout en travaillant à mi-temps. Après ses études, il a travaillé comme analyste financier, à Paris et à Londres.
» VOIR AUSSI - Londres: un couple inculpé pour le meurtre d'une fille au pair française
Londres : un couple inculpé pour le meurtre d'une fille au pair française
Le 20 septembre, le corps calciné d'une jeune femme est retrouvé dans le jardin d'une maison dans le quartier de Southfields à Wimbledon, dans le sud de Londres
 «Soudain, j'ai peur»
Rapidement, Ouissem Medouni et Sabrina Kouider ont entamé une relation qui durera jusqu'à leur arrestation, mais entrecoupée de plusieurs ruptures, en raison d'aventures amoureuses de sa compagne, a-t-il expliqué. Elle a eu deux enfants avec deux autres hommes, dont Mark Walton, fondateur irlandais du boys band Boyzone en 1993. À la question de savoir qui dominait dans leur relation, l'accusé a répondu «elle».
Selon lui, elle pouvait avoir «des hauts et des bas en l'espace de quelques secondes» et a fait plusieurs tentatives de suicide. «Au cours des dernières années, elle criait tous les matins pour rien», l'accusant notamment d'adultère, indûment d'après lui. Ouissem Medouni s'est lui-même décrit comme «généreux, travailleur, dévoué et ambitieux» et «jamais» violent envers sa compagne. Malgré tout, il est toujours revenu vers elle. «Je l'aime», a-t-il répondu, en précisant que c'était encore le cas.
Sophie Lionnet était arrivée à Londres en janvier 2016, employée comme jeune fille au pair pour s'occuper des deux enfants de Sabrina Kouider. Vingt mois plus tard, la police découvrait son corps brûlé dans le jardin du couple. Ses deux employeurs avaient été arrêtés dans la foulée et inculpés pour meurtre, qu'ils continuent de nier. «Il y a beaucoup de tensions et je suis accusée de choses que je n'oserais JAMAIS faire. Soudain, j'ai peur», écrivait la jeune fille à son père fin juin 2017. «Les deux accusés auraient pu s'en sortir impunément malgré leur meurtre», avait souligné le procureur en mars. En effet, les deux accusés plaident non coupable pour le chef d'accusation de meurtre. Ils ont en revanche plaidé coupable d'entrave à la justice pour avoir tenté de se «débarrasser» du corps «en le brûlant». Le procès doit se poursuivre jusqu'au 11 mai.
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Le déplacement scruté de Justin Trudeau dans l'Hexagone (16.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 21:05 

  • Publié le 16/04/2018 à 11:51
Paris: Macron reçoit le Premier ministre canadien Justin Trudeau
Emmanuel Macron reçoit le Premier ministre canadien Justin Trudeau, qui entame une visite officielle à Paris pour préparer le G7. Au menu de leurs discussions: le climat et le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada.
De passage pour deux jours en France, le premier ministre canadien entend bien faire oublier le fiasco de son précédent voyage diplomatique en Inde. Emmanuel Macron lui a réservé les honneurs de l'Assemblée.
Justin Trudeau effectue son premier voyage officiel en France. Le chef du gouvernement canadien restera deux jours dans l'Hexagone. Son programme est chargé. Le dirigeant canadien, dont le pays préside cette année le G7, s'entretiendra avec le président français Emmanuel Macron dès ce lundi. Selon une haute responsable canadienne, ils discuteront en particulier de commerce bilatéral, dans le contexte de l'Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l'Union européenne, entré «provisoirement» en vigueur en octobre; et d'environnement, avec la mise en œuvre de l'Accord de Paris en toile de fond. Justin Trudeau aura également une «série de rencontres de haut niveau», il participera à une cérémonie aux Invalides et inaugurera la nouvelle ambassade du Canada à Paris, à deux pas du palais de l'Élysée. Il sera notamment accompagné de son ministre du Commerce international François-Philippe Champagne, a ajouté la source canadienne.
» VOIR AUSSI - Justin Trudeau: le Ceta, «un accord qui reflète les valeurs partagées par le Canada et la France»
Justin Trudeau : le Ceta, «un accord qui reflète les valeurs partagées par le Canada et la France»
Le Premier ministre canadien a vanté les mérites du traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada (Ceta), lors de sa visite à Paris, ce lundi.
 «C'est toujours un grand plaisir de travailler avec Emmanuel.»
Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, dans «'Les Échos»
Arrivé dimanche, le Canadien devrait afficher pour l'occasion sa grande proximité avec Emmanuel Macron. «Nous sommes totalement alignés sur ces questions mais aussi sur les autres enjeux, que ce soit l'engagement positif envers le monde, que ce soient les changements climatiques, que ce soit l'ordre international, que ce soit le travail pour la paix et la sécurité. C'est toujours un grand plaisir de travailler avec Emmanuel», déclare le premier ministre canadien dans Les Échos . En retour, le Français le lui rend bien puisque c'est la première fois dans l'histoire de la Ve République qu'un chef de gouvernement canadien prendra la parole au Palais Bourbon, ce mardi. Seuls vingt chefs d'État étranger ont eu le droit à cet honneur.
Justin Trudeau : l'histoire de son fiasco indien
Le premier ministre canadien aimerait bien faire oublier le fiasco de son précédent voyage diplomatique en Inde.
Le faux pas indien
Justin Trudeau s'envolera ensuite pour Londres du 17 au 20 avril. Il doit y rencontrer son homologue britannique Theresa May et la reine Elizabeth II, cheffe d'État en titre du Canada. Il doit aussi participer à la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth.
À l'occasion de ce passage en Europe, Justin Trudeau aura à cœur de faire oublier le fiasco de son précédent déplacement en Inde en février dernier. Durant la semaine passée sur place, le chef du gouvernement canadien avait été snobé par une majeure partie de la classe politique du pays. La famille Trudeau avait à défaut multiplié les visites de monuments et les réceptions, s'attirant les railleries pour ses apparitions en tenues traditionnelles.
Un moindre faux pas pourrait cette fois lui coûter cher à son retour au Canada. Le chef du gouvernement, qui était samedi au Sommet des Amériques à Lima, a déjà été contraint de faire une escale imprévue dimanche à Ottawa pour tenter de résoudre une crise politique liée au pétrole, dont son pays est un important producteur. Les partis d'opposition l'avaient prié d'annuler ses déplacements à l'étranger. Le promoteur américain du projet, auquel tient particulièrement le premier ministre, menace de l'abandonner en raison de l'opposition farouche de la province de Colombie Britannique. L'Alberta, cœur de l'industrie pétrolière canadienne, a menacé la province voisine de représailles économiques «très agressives», laissant planer le risque d'une crise constitutionnelle inédite.
Emmanuel Macron et Justin Trudeau se retrouveront au Canada pour le sommet du G7 qui se tiendra les 8 et 9 juin à La Malbaie, au bord du fleuve Saint-Laurent, au Québec.
(Avec AFP)
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Ce qu'il faut retenir de l'interview de Macron face à Bourdin et Plenel (15.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 17:06 

  • Publié le 15/04/2018 à 23:02
Ce qu'il faut retenir de l'interview d'Emmanuel Macron sur BFMTV
Lors d’une interview-fleuve de près de deux heures, Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin ont interrogé le président de la République sur de nombreux sujets d’actualité. Voici ce qu’il faut retenir. Emmanuel Macron a déclaré que les russes
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Intervention en Syrie, réforme de la SNCF, blocage des universités, dossier de la dépendance, islam radical... Retrouvez les principales interventions du chef de l'État sur BFM-TV et Mediapart.
● «L'intervention en Syrie est légitime», mais «la guerre n'est pas déclarée»
Actualité oblige, Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel ont entamé leur exercice avec la question syrienne. Emmanuel Macron a décidé, conjointement avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, de lancer samedi des frappes militaires contre «trois sites de production d'armes chimiques» du régime de Bachar el-Assad. Le chef de l'Etat a d'abord voulu «rendre hommage» à l'armée française. «Nous avons réussi l'opération sur le plan militaire», a-t-il affirmé, confirmant que des traces chimiques avaient été trouvées dans la zone de la Ghouta orientale. «[Nous sommes intervenus] de manière légitime dans le cadre multilatéral», a-t-il ajouté. «Nous étions arrivés à un moment où cette frappe était indispensable pour pouvoir redonner de la crédibilité à la parole de notre communauté» internationale. «La France n'a pas déclaré la guerre au régime de Bachar al-Assad», a cependant assuré le chef de l'État.
Le président de la République a également taclé son homologue russe, Vladimir Poutine, l'accusant d'avoir été indirectement «complice» des attaques menées par le régime syrien, en ne contribuant pas à bloquer la prolifération d'armes chimiques. «Nous avons simplement œuvré pour que le droit international et pour que les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU ne soient pas lettre morte», a-t-il déclaré. Interrogé sur la posture changeante de Donald Trump, Emmanuel Macron s'est félicité d'avoir réussi à «convaincre» son homologue américain de «rester sur place en Syrie dans la durée». «Nous avons ré-acquis de la crédibilité», estime le chef de l'Etat à propos de la diplomatie française, mise à mal selon lui par l'intervention avortée de 2013. Emmanuel Macron a pour objectif de «convaincre les Russes et les Turcs de venir autour de la table de négociations» pour trouver une solution politique en Syrie.
● Pas de «coagulation» des «mécontentements»
«Je conteste l'orientation de votre question qui viserait à voir une logique ou à vouloir créer une coagulation dans ces mécontentements. Il n'y en a pas tant que cela. Le mécontentement des cheminots a peu à voir avec le mal-être profondément légitime à l'hôpital qui dure depuis des années...», a assuré le chef de l'État. «J'entends toutes les colères», a-t-il ajouté, rappelant que s'il avait «dès le jour de [son] investiture» évoqué le besoin de «réconcilier le pays», ça ne se ferait «pas du jour au lendemain».
● SNCF: la dette sera reprise à partir de 2020
Sur la réforme de la SNCF, Emmanuel Macron a gardé le cap, s'engageant à ce que l'entreprise ferroviaire demeure «100% publique» avec des «titres incessibles». «À partir du 1er janvier 2020 [date d'entrée en vigueur de la réforme], l'État reprendra progressivement de la dette», a par ailleurs annoncé le président de la République. Affirmant que la SNCF avait été «moins performante que ses grands voisins», Emmanuel Macron a dénoncé l'absence d'investissements de la part de l'Etat dans le passé. «Il ne s'agit pas de stigmatiser les cheminots, (…) ils font tourner la SNCF», a-t-il assuré, tout en réitérant la promesse de garder les actuels salariés sous leur statut.
«On continue à alimenter un système déséquilibré. La loi sera votée en première lecture mardi à l'Assemblée. (…) Il y aura ensuite le temps du dialogue dans l'entreprise, (…) les partenaires auront à inventer une nouvelle convention», a annoncé Emmanuel Macron, qui dit souhaiter avant tout «moderniser» l'entreprise publique. Affirmant que l'usager de la SNCF avait payé sa part dans la rénovation du système ferroviaire à travers l'augmentation du prix des billets, le chef de l'Etat a appelé, au cours d'un échange particulièrement rugueux avec Edwy Plenel, à ne pas attaquer les dirigeants de cette entreprise. «Je n'opposerai pas les cadres, en donnant leur salaire en pâture, (…) aux cheminots», a défendu Emmanuel Macron.
● Université, Notre-Dame-des-Landes: «rétablir l'ordre républicain»
Emmanuel Macron a dénoncé les bloqueurs dans les universités, «souvent minoritaires». «Ce sont des professionnels du désordre, des groupes qui mènent un projet politique, dont la finalité est le désordre». «Jamais les forces de l'ordre n'interviennent sans la demande du président de l'université, avec l'indépendance qui est la sienne», a-t-il justifié, excluant une intervention immédiate à Tolbiac «une tour» dans laquelle il est plus difficile d'intervenir.
Sur l'évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, Emmanuel Macron a juré qu'«à l'issue du délai (le 23 avril, ndlr) tout ce qui doit être évacué le sera». «Il y a plus d'une soixantaine de gendarmes blessés, c'est inadmissible. Je crois en l'ordre républicain. Il y a une phase de négociation dans le cadre républicain mais, pour le reste, l'ordre sera fait parce que la République a besoin d'ordre» «Cette occupation a presque dix ans d'âge (...) Il n'y a plus de raison d'être là. Ils sont là en occupant illégalement le domaine public», a fait remarquer le chef de l'État.
• Loi asile-immigration: «Les parlementaires ne sont ni des godillots ni des frondeurs»
La loi asile-immigration va-t-elle fracturer la majorité? Interrogé sur ce point, Emmanuel Macron a affirmé que «Richard Ferrand fait son rôle de chef de groupe et qu'il le fait très bien». Mais il a concédé que les députés «sont libres et exprimeront leur conviction». «C'est cela le débat. Je crois en une démocratie où les parlementaires ne sont ni des godillots ni des frondeurs», a ajouté le chef de l'État. «Il y a des désaccords, je les assume. Mais contrairement à l'idée que vous laissez s'installer, il y a un débat démocratique dans la majorité», a-t-il conclu, assurant que certains amendements avaient été retenus par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb. Sans citer Michel Rocard, Emmanuel Macron a toutefois paraphrasé l'une de ses plus célèbres citations, en assurant que la France «ne peut pas prendre toute la misère du monde».
● Le voile islamique n'est «pas conforme à la civilité» mais «nous devons le tolérer»
Interrogé sur la place grandissante de la religion musulmane en France, Emmanuel Macron a d'abord affirmé que «l'islam est là». Un constat qui s'appuie selon lui sur des «réalités démographiques et sociales». «Plusieurs concitoyens ont peur de ce fait nouveau, (…) il se nourrit d'un fait que nous devons regarder en face, c'est l'islamisme radical», a-t-il déclaré, estimant que le «travail de reconquête» dans certains quartiers était «l'un des plus grands défis de notre nation». «Il faut être intraitable, car c'est une lèpre de la société», a dénoncé le chef de l'Etat, parlant de l'endoctrinement qui se répandait dans certaines écoles. Emmanuel Macron a par ailleurs déclaré que trois mosquées accueillant des prêches islamistes radicaux avaient été fermées depuis son arrivée au pouvoir.
Sur les «mœurs musulmanes», le président s'est épanché quelque peu sur le port du voile islamique. «Je respecte la femme voilée, mais je veux être sûr d'une chose, c'est que c'est par choix. (…) Nous devons le tolérer», estime-t-il, sans donner de «réponse univoque». D'après Emmanuel Macron, le voile «insécurise» parce qu'il n'est «pas conforme à la civilité» de la société française, «au rapport entre hommes et femmes». Pas «spécialement heureux» que des femmes arborent le foulard, le chef de l'Etat a refusé qu'il y ait une loi pour l'interdire dans l'espace public.
● «Remettre la France au travail»
«Je ne crois pas à la théorie du ruissellement». Renvoyé par ses intervieweurs à son image de président des riches, Emmanuel Macron a cherché à montrer qu'il souhaitait, à la manière d'un Nicolas Sarkozy, rendre du pouvoir d'achat aux Français par le travail. Le principal levier de cette hausse du pouvoir d'achat annoncée par le chef de l'Etat demeure la hausse de la CSG de 1,7 point. Une mesure qui affecte notamment les retraités se situant au taux normal. Un «effort» assumé par le président, censé «rendre le travail plus rémunérateur» pour les salariés. «Aujourd'hui, il y a trop de gens qui travaillent dur mais qui ne gagnent pas suffisamment de leur travail», a-t-il dénoncé. «Il faut remettre la France au travail, et donc que le travail paye mieux.» Pour compenser cet «effort intergénérationnel», Emmanuel Macron a rappelé son objectif d'exonérer progressivement les Français de leur taxe d'habitation.
Dans la même thématique, il a récusé l'idée selon laquelle il aurait octroyé des «cadeaux» aux Français les plus aisés, tout en évitant de recourir à son expression des «premiers de cordée». «Quand on empêche les gens de réussir, dans notre monde, ils vont réussir ailleurs», a-t-il d'abord constaté, rappelant que la France était «dans une économie mondialisée». Assumant ses choix de retirer l'impôt sur la fortune pour les valeurs mobilières, Emmanuel Macron a affirmé que son but était de «garder des talents» sur le sol français en leur permettant de «réinvestir» dans le pays.
● Pas de nouvel impôt local ou national
Le chef de l'État a promis la stabilité fiscale. «Il n'y aura pas de création d'un nouvel impôt, ni local ni national. Il n'y aura pas d'augmentation» de la fiscalité d'ici 2022, a-t-il assuré. Il plaide cependant pour une refonte de la fiscalité locale. «Il faut recomposer dans le cadre d'un dialogue la fiscalité locale pour la répartir entre les communes, les départements et les régions. Mais il n'y aura aucune augmentation.» Interrogé sur la possibilité que l'impôt sur la fortune immobilière, qui a remplacé l'impôt sur la fortune, puisse aller aux collectivités locales, Emmanuel Macron a répondu que cela faisait «partie des hypothèses qui sont sur la table». Il a en revanche indiqué que «rien» n'était «décidé» sur une éventuelle modification de la taxe foncière.
● Dépendance: vers une nouvelle journée de solidarité?
Emmanuel Macron a promis de traiter le sujet du financement de la dépendance. «Avant 2019, nous devons poser les bases», a-t-il promis. Il a qualifié l'instauration d'une deuxième journée de solidarité de «piste intéressante». La première journée avait été instaurée après la canicule de 2003. Autre option: «construire des mécanismes de sécurité sociale (une nouvelle branche, ndlr) qui permettront de faire des investissements». «Sur les Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ndlr), il nous faut investir pour davantage médicaliser. On ne peut pas le régler du jour au lendemain mais nous nous y attellerons.»
• Macron répond à Hollande: «Je ne considère pas qu'un ministre doit être un obligé»
Confiant qu'il n'avait «pas encore lu» le livre de François Hollande (ce qu'il fera «sans doute» un jour), Emmanuel Macron a répondu au procès en «duplicité» qui lui était fait par son prédécesseur. «Il a sa part de vérité», a-t-il d'abord jugé. «J'ai du respect pour François Hollande. Il a été le président de la République française, j'ai été son conseiller puis son ministre», a-t-il ajouté. «Quand j'ai eu des désaccords en tant que conseiller, je suis parti, en ne demandant rien. (…) J'ai été rappelé comme ministre. Je ne prends pas les ministres pour des obligés. (…) J'ai assumé des désaccords, je peux regarder en face tout ce que j'ai fait», a-t-il martelé. Avant de conclure: «Quand on a un désaccord fondamental et qu'on croit dans son pays, on peut prendre tous les risques: c'est ce que j'ai fait».
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Le préfet de l’Hérault a la «ferme volonté de dégager Paul Valéry» des bloqueurs (16.04.2018)
Par Wally Bordas • Publié le 16/04/2018 à 18:19 • Mis à jour le 16/04/2018 à 18:31
En milieu de semaine dernière, un groupe d’individus cagoulés avait vandalisé la salle des serveurs de l’université. Crédits photo: PASCAL GUYOT/AFP

Lors d’un point presse organisé à Montpellier, Pierre Pouëssel, le préfet de l’Hérault, a annoncé avoir la «ferme volonté de dégager Paul Valéry». Le président de l’université avait appelé «l’État» à prendre ses responsabilités.
Bientôt une intervention des forces de l’ordre à l’université Paul Valéry de Montpellier? C’est ce que laisse présager les propos tenus par Pierre Pouëssel, préfet de l’Hérault, lors d’un point presse organisé lundi 16 avril. Au cours de son intervention, le préfet a indiqué qu’une intervention des forces de l’ordre allait bientôt avoir lieu afin de libérer l’université des étudiants bloqueurs.
«Nous avons la ferme volonté de dégager Paul Valéry»
«Je ne peux pas vous donner ni l’heure, ni la date, mais il est clair que nous avons la ferme volonté de dégager Paul-Valéry», a-t-il expliqué lors de ce point presse, rappellant que seulement «200 étudiants bloquent la faculté». Aucune précision n’a en revanche été donnée concernant la nature ni le jour de l’intervention.
«Il y a le choix du moment, et la nécessité sans doute aussi d’avoir une vision nationale, de l’ensemble de la manœuvre qui ne concerne pas que nous», a-t-il précisé. Et d’ajouter: «Les universités de Tolbiac, Paris 8 et Jean-Jaurès sont également bloquées par des minorités».
Le président de l’université demande l’intervention des forces de l’ordre
Un peu plus tôt dans la journée, dans un communiqué de presse, Patrick Gilli, le président de l’université Paul Valéry, avait annoncé que de nouveaux débordements avaient eu lieu durant le week-end au sein du campus. «Nous avions eu des informations inquiétantes durant la nuit sur les risques de violences dans l’établissement et découvert des armes par destination (pavés, bâtons), c’est la raison pour laquelle j’ai demandé aux personnels, à l’exception de services actuellement prioritaires, de ne pas venir aujourd’hui sur le campus», a-t-il précisé.
«La forme que prend le mouvement à l’université Paul-Valéry nous met dans l’impossibilité d’assumer les mesures de police ordinaire qui incombent à un président d’établissement et rendent extrêmement difficile le fonctionnement de l’administration et des services de l’université. J’ai donc déposé dès le milieu de la semaine dernière un référé ‘mesures utiles’ devant le tribunal administratif pour enjoindre l’État à aider l’établissement et demander le recours aux forces de l’ordre», a ajouté le président de l’université. Et d’ajouter: «Il faut maintenant que l’État prenne les responsabilités qui lui reviennent en matière d’ordre public».
Les serveurs saccagés et les examens reportés
En milieu de semaine dernière, un groupe d’individus cagoulés avait pénétré dans la salle des serveurs de l’université et causé de graves dommages matériels. Le site de l’université, qui a été remis en ligne depuis, est resté indisponible pendant plusieurs jours, tout comme la connexion sur le campus.
L’objectif du sabotage? Empêcher la tenue des partiels en ligne organisés par l’université. Des examens qui ont été suspendus mais qui auront tous bel et bien lieu, nous confirme Patrick Gilli, le président de l’université. Les étudiants comme le personnel de l’université avaient fait savoir leur indignation après ses actes de vandalisme. «C’est une action condamnable. Depuis deux semaines, on voit les bloqueurs s’accrocher à la revendication du semestre gratuit, on en vient à se demander quelles sont leurs réelles motivations», témoignait notamment une étudiante de l’université au Figaro.
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Toulouse : nouvelle nuit de violences entre jeunes et forces de l'ordre (16.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 17:31 

  • Publié le 16/04/2018 à 13:32
Toulouse: nouvelle nuit de violences entre jeunes et forces de l'ordre
Après des premiers heurts dimanche soir dans les quartiers de Bellefontaine et de la Reynerie à Toulouse (Haute-Garonne), de nouveaux affrontements ont eu lieu lundi soir. Au total, 18 personnes ont été interpellées et 24 véhicules brûlés.
VIDÉO - Après des premiers heurts dimanche soir dans les quartiers de Bellefontaine et de la Reynerie à Toulouse (Haute-Garonne), de nouveaux affrontements ont eu lieu lundi soir. Au total, 18 personnes ont été interpellées et 24 véhicules brûlés.
Les quartiers de la Reynerie et de Bellefontaine à Toulouse, tous deux classés en zone de sécurité prioritaire (ZSP) et situés dans le Grand Mirail, sont secoués par des heurts entre jeunes et forces de l'ordre depuis 48 heures. Lundi soir, les affrontements ont débuté à 20h40 à la Reynerie avant de prendre fin vers 23 heures. Les effectifs de police ont subi de nombreux jets de projectiles et de tirs de mortiers de la part de groupes organisés composés de 30 à 40 personnes chacun, indique un communiqué du syndicat Alliance. Ces faits ont fait l'objet des réponses adaptées par l'usage de grenades lacrymogènes et de tirs de lanceurs de balles de défense, ajoute-t-il. Un hélicoptère de la gendarmerie nationale est venu sur place pour assister les troupes au sol. Au total, 18 personnes ont été interpellées et placées en garde à vue. Leur audition a été prolongée de 24 heures mardi en fin d'après-midi. Par ailleurs, 24 véhicules ont été brûlés selon la préfecture d'Occitanie.
«Les forces de l'ordre ont été prises à partie tout au long de la nuit et ont procédé à 18 interpellations pour des faits de violences, de destruction de bien par incendie et d'outrage», a déclaré ce mardi matin le préfet Pascal Mailhos.
La veille, une centaine de jeunes s'était déjà opposée aux forces de l'ordre, à la Reynerie et à Bellefontaine. Au cours de la soirée, dix voitures avaient été incendiées, ainsi qu'un engin de chantier tandis que le commissariat de police de Bellefontaine, visité en mars par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, avait été la cible de jets de pierres, selon le directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) adjoint, le commissaire Arnaud Bavois. Ces premiers incidents n'avaient «fait aucun blessé» et n'avaient donné lieu à «aucune interpellation», avait-il ajouté. Les violences avaient essentiellement eu lieu entre 20 heures et 23h30 mais le calme n'était revenu qu'après minuit.
Une enquête en flagrance a été ouverte par le parquet de Toulouse pour violences aggravées avec armes et sur personnes dépositaires de l'autorité publique, dégradations et incitations à l'émeute, selon une source judiciaire.
«Il y avait clairement une volonté de s'en prendre aux forces de l'ordre. Ça faisait bien longtemps qu'on n'avait pas vu ça», a constaté le commissaire Arnaud Bavois, décrivant des scènes de «grande violence» avec des jeunes qui ont mis le feu à des voitures et avec l'idée «de prendre les policiers en guet-apens». Au total, plus de cent policiers, CRS et gendarmes avaient été mobilisés pour ramener le calme dimanche soir, ainsi qu'un hélicoptère de la gendarmerie.
Contrôle d'identité et rumeurs
La tension dans le quartier, selon Arnaud Bavois, est montée dimanche dans l'après-midi après le contrôle d'une femme voilée refusant de se soumettre aux vérifications de la police. Elle a été interpellée et placée en garde à vue pour rébellion et outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, selon une source judiciaire. Ce lundi dans la soirée, la garde à vue a été prolongée, a précisé la même source. Ces violences pourraient également avoir été déclenchées par une rumeur selon laquelle des gardiens de la prison de Seysses, au sud de Toulouse, auraient été à l'origine du décès samedi d'un détenu, originaire du quartier, a précisé le DDSP adjoint.
Or, si un homme d'une trentaine d'années est bien mort samedi dans cette prison, c'est «à la suite d'un suicide», a souligné le commissaire, précisant qu'il y a eu également «une tentative de suicide» d'un autre détenu dont le «pronostic vital» est engagé. Une enquête judiciaire a été ouverte pour «recherche des causes de la mort» par le parquet de Toulouse, qui a souligné que l'autopsie avait confirmé que les causes du décès du détenu «sont compatibles avec une mort par pendaison». Ce lundi en milieu d'après-midi, quelque 90 détenus ont refusé de réintégrer leur cellule pendant quelques heures, a encore indiqué le parquet, ajoutant que la situation est revenue à la normale dans la soirée.
Le maire dénonce des violences «inacceptables»
Le maire LR de Toulouse Jean-Luc Moudenc a condamné «fermement les violences urbaines» qui «portent d'abord préjudice aux quartiers eux-mêmes» et «sont inacceptables». «Soutien aux forces de l'ordre, au sang froid exemplaire face à cette situation et ce déferlement d'agressivité», a-t-il indiqué sur Twitter.
La préfecture a de son côté pris des mesures particulières concernant la règlementation en matière de distribution et de transport de carburant. De lundi 15 heures à mercredi 20 heures, «l'achat et la vente au détail, l'enlèvement ou le transport de tout carburant par jerricanes, cubitainers, bidons, flacons ou récipients divers sont interdits dans les points de distribution des communes de Toulouse Métropole, Portet-sur-Garonne, Vieille-Toulouse, Ramonville Saint-Agne et Labège», selon la préfecture.
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Allemagne : un enfant découvre un trésor d'un célèbre roi danois du Xe siècle (16.04.2018)

  • Mis à jour le 16/04/2018 à 20:51 

  • Publié le 16/04/2018 à 18:39
Allemagne : à 13 ans, il découvre le trésor d'un célèbre roi danois du Xe siècle
Cet écolier de 13 ans a fait la découverte de centaines de pièces, de perles ou encore d'un marteau de Thor sur l'île allemande de Rügen.
VIDÉO - Aidé d'un archéologue amateur, un écolier de 13 ans a mis au jour un «trésor unique» composé de centaines de pièces, de perles ou encore d'un marteau de Thor sur l'île allemande de Rügen.
Un enfant de 13 ans et un archéologue amateur ont découvert sur l'île allemande de Rügen un trésor «unique» ayant pu appartenir au roi Harald à la Dent bleue qui a introduit le christianisme au Danemark. Le trésor est composé de centaines de pièces, de perles, d'un marteau de Thor, de broches et d'anneaux brisés, rapporte l'agence allemande Dpa ce lundi, citant l'archéologue amateur René Schön et l'office archéologique régional.

René Schön et l'écolier, Luca Malaschnitschenko, ont fait la découverte d'une pièce en janvier à l'aide d'un détecteur de métal dans un champ près de la localité de Schaprode sur cette île de Rügen en mer Baltique. Et les autorités locales ont procédé à l'excavation du trésor les 14 et 15 avril. Une centaine de pièces semblent dater du royaume de Harald 1er (910-987), roi unificateur qui a rejeté les croyances viking et lancé la christianisation du Danemark. Des pièces plus anciennes et provenant de contrées très éloignées ont aussi été retrouvées, notamment un Dirham de Damas transformé en bijou et datant de 714.
Les pièces les plus récentes datent des années 980, ce qui laisse croire que ce trésor a pu être caché par l'entourage de Harald Ier qui, après avoir perdu une bataille contre son propre fils en 986, avait fui vers la Poméranie où il est mort un an plus tard, selon la littérature du Xe siècle, explique Dpa.
Une découverte «unique en son genre»

«Nous avons ici un cas rare, lorsqu'une découverte a l'air d'être en lien avec des sources historiques», explique l'archéologue en chef de la région allemande du Mecklembourg-Poméranie orientale, Detlef Jantzen, «le trésor de Schaprode est une découverte unique en son genre». Des bijoux datant de la même époque avaient déjà été découverts non loin de là, sur l'île de Hiddensee à la fin du XIXe siècle. Les historiens de la région considèrent aussi que ces objets précieux ont pu être cachés lors de la fuite du roi.
Harald à la Dent bleue est une figure historique importante dans l'espace nordique. C'est en son honneur que la technologie de communication sans fil Bluetooth a été baptisée. Le symbole du Bluetooth est d'ailleurs un mélange de deux lettres d'alphabets runiques représentant les initiales du roi Harald.

Les anti-Brexit s'organisent pour obtenir un nouveau référendum (16.04.2018)

  • Publié le 16/04/2018 à 17:16
Sept organisations unissent leurs forces, avec des représentants de plusieurs partis politiques pour empêcher la sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne dans moins d'un an.
Correspondant à Londres
Il leur reste moins de 350 jours. C'est peu pour tenter de faire dérailler le processus de sortie de l'Union européenne de la Grande-Bretagne, prévue le 29 mars 2019. Jusqu'à présent en ordre dispersé, les anti-Brexit unissent leurs forces pour essayer d'obtenir un nouveau vote sur la question avant le grand saut. Baptisée «The People's Vote» (le vote populaire), la campagne a été lancée dimanche à Londres.
Elle regroupe des membres du Parti conservateur au pouvoir, de l'opposition travailliste, du parti libéral démocrate centriste (proeuropéen) et des Verts. Elle réunit aussi sept organisations qui luttent à différents niveaux contre le Brexit, comme Open Britain ou European Movement. Leur campagne est dotée d'environ 1million de livres (1,15 million d'euros) pour tenter de faire bouger l'opinion.
Depuis le référendum de juin 2016 qui a vu les Britanniques se prononcer à près de 52% pour quitter l'Union européenne, le sentiment a légèrement évolué sans retournement radical. Certains sondages reflètent exactement ce résultat, tandis que d'autres montrent une inversion des proportions.
Vote sur l'accord de sortie
«Le Brexit n'est pas inévitable», veut croire James McGrory, directeur d'Open Britain. L'objectif est d'obtenir un nouveau référendum sur les termes de l'accord de sortie attendu d'ici à l'automne entre Londres et ses 27 partenaires européens. Le Parlement peut aussi modifier la trajectoire prévue par le gouvernement de Theresa May au cours d'une série de votes importants sur les conditions de la sortie britannique. «Je ne pense pas que ce soit à 650 politiciens de décider pour 65 millions de personnes», estime Chuka Umunna, député travailliste et figure de proue de la campagne.
Pour le conservateur Bill Cash, ces militants pro-Europe «défient totalement le peuple britannique qui a pris une décision». Depuis peu, le soutien du public à un second référendum a progressé. 44% des Britanniques y seraient favorables, contre 36% qui n'en veulent pas, selon un sondage YouGov réalisé au début du mois pour l'organisme pro-Brexit Best for Britain.
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Asile et immigration : les esprits s'échauffent autour du texte (16.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 17:05 

  • Publié le 16/04/2018 à 12:09
Des députés de la majorité envisagent de s'abstenir, voire de voter contre le projet de loi.
Combien seront-ils, vendredi soir, à voter contre le projet de loi asile et immigration au sein de la majorité? La perspective d'une opposition massive au texte de Gérard Collomb inquiète les cadres de La République en marche (LaREM), qui restent pour la plupart traumatisés par les frondes à répétition du précédent quinquennat.
Après près de trente heures d'intenses débats en commission des lois, le texte controversé du ministre de l'Intérieur est débattu toute la semaine dans l'hémicycle. Plus de 1000 amendements doivent être étudiés, dont 200 déposés par les députés LaREM. Malgré plusieurs modifications apportées sur les aspects les plus litigieux du projet de loi - encadrement de la vidéoaudience, amélioration des conditions de rétention -, une poignée de députés de la majorité continue de faire entendre son hostilité au texte. «Je reste sur ma faim», lâche Stella Dupont, députée LaREM du Maine-et-Loire, qui fait partie du petit groupe de contestataires. Cette ancienne socialiste a cosigné une dizaine d'amendements, dont un qu'elle a rédigé pour autoriser l'expérimentation du travail des réfugiés, dès lors qu'ils ont déposé une demande d'asile. «Voter pour me paraît compliqué, je suis à ce stade sur une position d'abstention», affirme Stella Dupont. Un autre député, Jean-Michel Clément, lui aussi transfuge du PS, a déjà fait savoir qu'il voterait contre, opposé depuis le début «à la philosophie comme à l'orientation» d'un texte qu'il juge trop dur. Sonia Krimi, qui avait interpellé Gérard Collomb dans l'hémicycle en décembre, brandit elle aussi la menace du vote sanction.
Dans les rangs de LaREM, plusieurs élus reconnaissent qu'ils voteront «à contrecœur» pour le projet de loi. «C'est le texte de Collomb, le président y est attaché, on n'a pas le choix», souffle un député macroniste. Beaucoup regrettent l'attitude trop ferme de Gérard Collomb et le maintien de l'augmentation du délai de rétention, passant de 45 jours actuellement à 90 jours. «Il est resté campé sur ses positions», râle une députée MoDem. Le groupe centriste a déposé une quinzaine d'amendements. Erwan Balanant, député du Finistère, pourrait lui aussi s'abstenir, même s'il espère encore des «avancées» sur la question de la rétention des mineurs.
Rappel à l'ordre
À Beauvau, après«six mois de pédagogie» auprès des députés, on critique«les postures» de ceux qui s'opposent «a priori». «On a toujours su que des parlementaires prendraient leurs distances. L'important, c'est que le texte soit voté», démine-t-on. En coulisses, toutefois, le rapport de force se tend. Mardi dernier, dans le huis clos de la réunion de groupe hebdomadaire, le chef de file des députés LaREM, Richard Ferrand, a passé dix longues minutes à rappeler à l'ordre ses troupes. «Liberté dans le débat, mais unité dans le vote. […] Quand on n'a pas réussi à convaincre en réunion de groupe, on n'a pas réussi»a-t-il martelé, appelant les réfractaires à se rallier à la position majoritaire.
L'élu breton a même menacé d'exclusion ceux qui poursuivraient leur combat contre le texte. «Si certains préfèrent devenir autoentrepreneurs, c'est le statut de non-inscrit» à un groupe, a-t-il rappelé, se disant prêt à «casser des œufs s'il le faut». «Sa main ne tremblera pas», affirme son entourage. «Il ne veut pas couper des têtes, mais il veut que les textes soient votés.» Selon nos informations, Richard Ferrand s'est entretenu en tête à tête avec Matthieu Orphelin, la semaine dernière. Un rendez-vous est aussi envisagé avec Jean-Michel Clément. Le secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement, Christophe Castaner, a, lui, souligné, lundi matin sur RTL, qu'il ne pratiquait pas «la chasse aux sorcières». Mais il a toutefois indiqué que ceux qui s'abstiendraient ou voteraient contre«manqueraient de solidarité». Plusieurs responsables du groupe espèrent au final «dix voix dissonantes maximum, dont huit abstentions et deux votes contre». «Ce seront des votes personnels, intimes, et non pas idéologiques», minimise-t-on.
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Ce que contient la loi asile et immigration (20.02.2018)

  • Mis à jour le 21/02/2018 à 10:10 

  • Publié le 20/02/2018 à 19:58
Le projet de loi sur l'asile
Le projet de loi sur l'asile et l'immigration, porté par Gérard Collomb est jugé trop répressif, notamment par les associations d'aides aux migrants. Il sera présenté mercredi en Conseil des ministres.
VIDÉO - Rétention administrative étendue, accélération des demandes d'asile... Les mêmes mesures peuvent déplaire à gauche et à droite, pour des raisons opposées.
La loi asile et immigration mécontente. Elle témoigne du funambulisme auquel se livre le gouvernement. Les mêmes mesures apparaissent inhumaines à gauche et dénuées d'efficacité à droite. Le texte raidit les mesures existantes, plus qu'il ne semble en inventer de nouvelles. En revanche, celles qui sont les plus favorables aux réfugiés paraissent à contre-courant de la nécessité d'endiguer le flux des candidats à l'immigration.

● 24 heures pour vérifier le droit au séjour
Jusqu'ici, les forces de l'ordre qui souhaitaient vérifier l'identité des personnes interpellées pour défaut de papiers pouvaient user de la retenue administrative durant 16 heures seulement. Désormais, elles disposeront de 24 heures pour mener leurs investigations. Cette mesure vise à mieux maîtriser les remises en liberté et à éviter que des individus dangereux ne soient relâchés, sachant cependant que le séjour irrégulier n'est pas un délit en France. Éric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes déplore «le non-rétablissement du délit pour séjour irrégulier supprimé par Manuel Valls en 2015».
● Une rétention administrative étendue dans la durée
Pour les personnes devant être expulsées, elle était jusque-là de 45 jours. Elle devrait passer à 90 jours renouvelables trois fois, à raison de périodes de quinze jours. Cette extension a pour but de faciliter l'organisation des départs et de faciliter la négociation entre la France et les pays des ressortissants avec l'espoir de rendre plus effectives les mesures d'éloignement. Mais pour Éric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes, allonger les durées de rétention ne suffit pas: «Il manque un renforcement des procédures de rétention afin de permettre un meilleur éloignement, puisque aujourd'hui seuls 5 % des déboutés le sont réellement.»
● Accélérer les demandes d'asile
C'est l'un des points qui suscitent l'ire des avocats qui rappellent la fragilité des demandeurs d'asile. Aujourd'hui, ces derniers ont 120 jours pour adresser leur demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Puis un mois pour faire appel de la décision de refus auprès de la Cour nationale du droit d'asile. Demain, ces délais seront respectivement portés à 90 et 15 jours. Des délais jugés «infiniment trop courts», par Me Olivier Brisson, membre du réseau d'avocats Elena, spécialisé dans le droit d'asile. «Si cela est encore tenable pour ceux hébergés en centre d'accueil, les demandeurs qui n'ont qu'une domiciliation administrative n'auront pas le temps de préparer leur recours», car ils n'ont pas d'accès direct à leur courrier ni aux associations qui pourraient les aider. «Certains ne verront peut-être jamais un juge», souligne un bon connaisseur du dossier.
Désormais les demandes d'asile n'empêcheront plus de délivrer des obligations de quitter le territoire français pour les demandeurs de pays sûrs, comme l'Albanie ou le Kosovo
● Des demandes d'asile plus suspensives
Désormais les demandes d'asile n'empêcheront plus de délivrer des obligations de quitter le territoire français (OQTF) pour les demandeurs de pays sûrs, comme l'Albanie ou le Kosovo, ou ceux dont on estime qu'ils ont un profil dangereux. En ligne de mire, la recrudescence de la délinquance en bande organisée mais aussi la lutte contre le terrorisme.
● La vidéoconférence pour tous
C'est un point de rupture avec les avocats du droit d'asile. La loi donnera la possibilité de tenir des audiences de l'asile en visioconférence pour éviter aux demandeurs de se déplacer jusqu'à Paris. Certains juges y sont favorables à condition qu'ils soient accompagnés de leurs avocats. Ces derniers estiment que cela déstabilisera les plus fragiles.
● Le rejet de l'asile vaut obligation de quitter la France (OQTF)
C'est une mesure qui avait été proposée en 2015 par le Sénat et sa majorité de droite. Certains spécialistes n'y sont pas opposés à condition qu'une procédure d'urgence soit également instituée, sur le modèle des référés suspension.
Les mineurs réfugiés qui jusqu'ici pouvaient faire venir leurs parents pourront désormais faire aussi venir leurs frères et sœurs
● Une carte de séjour étendue
Désormais les réfugiés bénéficiant de la protection au titre de la subsidiarité - menacés dans leur pays - et les apatrides pourront disposer d'une carte de séjour de quatre ans - au lieu d'un an actuellement - et qui, à terme, deviendra un titre de résident.
● La réunification familiale élargie aux frères et sœurs
Ce point fait littéralement bondir la droite, qui y voit «l'ouverture des vannes de l'immigration à travers un regroupement familial élargi». Le texte prévoit en effet dans son article 3 que les mineurs réfugiés qui jusqu'ici pouvaient faire venir leurs parents pourront désormais faire aussi venir leurs frères et sœurs afin que «la réunification familiale ne se fasse pas au détriment de l'unité familiale».
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Les mesures polémiques du projet de loi asile et immigration (16.04.2018)

Par Paule Gonzalès
Mis à jour le 16/04/2018 à 18h46 | Publié le 16/04/2018 à 18h37
VIDÉO - Le texte controversé présenté par le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, est débattu toute cette semaine à l'Assemblée nationale.
Droit dans ses bottes. Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, n'a pas infléchi son texte. Son objectif est double: faciliter les contrôles des personnes interpellées sans papiers et accélérer la procédure de l'asile pour augmenter le nombre des reconduites aux frontières. En veillant à rendre ces dernières effectives. Par ailleurs, le texte propose une meilleure protection des mineurs et des personnes obtenant l'asile.
● Du temps pour les forces de l'ordre
Ces dernières disposaient jusque-là de 16 heures pour vérifier l'identité des personnes dépourvues de papiers lors de leur interpellation. Ce délai sera porté à 24 heures afin d'éviter les libérations intempestives d'individus dangereux.
● Accélérer les procédures d'asile (articles 5, 6 et 8)
C'est ce qui fait bondir les associations et les professionnels de l'asile. Tous les délais de procédure ont été diminués de manière drastique: les demandeurs d'asile n'auront plus que 90 jours au lieu de 120 pour déposer leur dossier à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). De même, ils n'auront que 15 jours pour faire appel devant la Cour nationale du droit d'asile. Un temps jugé trop court pour des personnes vulnérables souvent dépourvues de domicile fixe. Par ailleurs, pour décourager les demandeurs déboutés de faire appel, les décisions concernant les ressortissants des pays sûrs seront exécutoires sans attendre l'appel.
● Augmenter le temps de rétention administrative (article 16)
C'est l'un des principaux points de friction entre le gouvernement et sa majorité. Pour donner plus de chances aux expulsions d'être effectives, les délais de rétention sont rallongés. Ils passent de 45 à 90 jours. Le but est en effet de laisser le temps aux pays de retour de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires à l'expulsion des personnes sans risquer des libérations impromptues, faute de respect des délais.
● Protéger les mineurs (article 3)
Les mineurs isolés qui obtiendront l'asile pourront demander la «réunification familiale». Cette dernière ne concernera pas seulement les parents mais aussi les fratries. De même, les enfants - fille comme garçon - menacés de mutilations sexuelles bénéficieront de l'asile ainsi que leurs parents. De quoi faire craindre à la droite l'ouverture de nouvelles filières de passeurs.
● Faciliter le séjour légal (articles 1 et 2)
Le titre de séjour qui sera accordé aux demandeurs d'asile sera valable 4 ans et non plus une seule petite année. De quoi éviter les tracasseries administratives. Les députés de la majorité souhaitent que les demandeurs d'asile puissent avoir l'autorisation de travailler au bout de 6 mois et non plus au bout de 9 comme actuellement.

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Djamila Boutoutaou, première djihadiste française condamnée à perpétuité en Irak (17.04.2018)
  • Par  Amel Charrouf 

  • Publié le 17/04/2018 à 17:13
La jeune mère de famille a déclaré à la justice irakienne avoir découvert, lors d'un voyage touristique en Turquie en famille, que son mari était membre de Daech et qu'ils s'apprêtaient à rejoindre les territoires de l'État islamique.
La loi antiterroriste irakienne est l'une des plus sévères au monde. Elle permet d'inculper des personnes qui ne sont pas impliquées dans des actions violentes mais sont soupçonnées d'avoir aidé l'État islamique et prévoit la peine capitale pour appartenance au groupe djihadiste même pour des non-combattants. Ces derniers mois, une dizaine de ressortissantes turques et une Allemande ont été condamnées à la peine de mort par les tribunaux irakiens. Mardi, une Française en a fait l'expérience, Djamila Boutoutaou, en comparaissant devant la cour pénale centrale de Bagdad, qui l'a condamnée à la prison à vie.
Djamila Boutoutaou est apparue vêtue d'une tunique rose et d'un foulard marron, dans un box en bois, comme le prévoit toute comparution en Irak. Elle a déclaré être d'origine algérienne et s'être convertie à l'islam alors qu'elle était chrétienne. La mère de famille de 29 ans a expliqué avoir quitté la France pour Istanbul, où elle devait passer une semaine de vacances avec ses enfants et son mari qui était chanteur de rap. L'intéressée, qui a clamé son innocence et celle de ses enfants, victimes malgré eux de l'État islamique, a plaidé avoir été dupée par son mari, tué par la suite près de Mossoul.
«En Turquie , j'ai découvert que mon mari était un djihadiste. Il a été contacté par un homme nommé al-Qourtoubi qui nous a emmenés mes enfants (Abdallah et Khadidja) et moi vers un endroit où nous étions forcés de nous cacher, mon mari m'avait dit ‘je ne veux plus t'entendre' et il m'a forcé à rester dans une cave», a-t-elle encore raconté. La famille a ensuite vécu 10 mois dans le «califat» autoproclamé de l'EI depuis 2014. «Pendant les dix mois que j'ai passés en Irak, je n'ai pas vu mon mari qui passait son temps hors de la maison», a poursuivi la jeune femme.
Une autre Française en attente de jugement
En 2017, au terme d'une longue et meurtrière contre-offensive qui a conduit à l'arrestation d'environ 20.000 personnes, les forces irakiennes ont repris l'ensemble des zones peuplées tenues par l'EI. Au cours de ces combats, «mon fils Abdallah (dont elle n'a pas donné l'âge) a été tué dans un bombardement. Avant sa mort, je pesais 122 kilos, aujourd'hui, à cause de ma tristesse, je n'en pèse plus que 47», a ajouté Djamila Boutoutaou, qui a fini par se rendre aux peshmergas et être retenue dans le camp Tel Keif, avec d'autres femmes et enfants de djihadistes.
À la question du juge «as-tu rejoint l'EI avec ton mari Mohammed Nassereddine et tes deux enfants?», Djamila Boutoutaou a persisté en répondant qu'elle l'avait fait contre son gré.
Une autre Française attend d'être jugée en Irak. Il s'agit de Mélina Boughedir, 27 ans, condamnée en première instance à 7 mois de prison pour séjour illégal en Irak. Mais ses liens présumés avec Daech ont interpellé la justice irakienne qui a décidé de faire appel et de la poursuivre pour «appartenance à une organisation terroriste». Elle encourt elle aussi la peine de mort.

Ce qu'il faut retenir du discours d'Emmanuel Macron devant le Parlement européen (17.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 12:32 

  • Publié le 17/04/2018 à 11:29
Pour son premier discours devant les députés européens, le chef de l'État a livré sa vision de la démocratie et de la souveraineté européenne.
LE SCAN POLITIQUE - Pour son premier discours devant les députés européens, le chef de l'État a livré sa vision de la démocratie et de la souveraineté européenne. Principale annonce : sa volonté de mettre en place un programme européen pour financer les collectivités accueillant des réfugiés.
● «La démocratie européenne est notre meilleure chance»
Dénonçant une fois de plus les risques du «repli nationaliste», le chef de l'État a exprimé une réflexion plus personnelle. «J'appartiens à une génération qui n'a pas connu la guerre, (…) qui s'offre le luxe d'oublier ce que ses prédécesseurs ont vécu», a-t-il déclaré, se revendiquant d'une terre «qui a connu toutes les saignées» de l'Histoire. Emmanuel Macron a appelé à défendre «fermement» la démocratie, «un mot qui a tout son sens parce qu'il est le fruit de batailles passées». «Je ne céderai à aucune fascination pour la souveraineté autoritaire», a-t-il prévenu, refusant d'appartenir «à une génération de somnambules», expression qu'il a déjà utilisée à plusieurs reprises. «Je souhaite que nous parvenions à dépasser les clivages entre le nord et le sud, entre l'est et l'ouest.» Et le président français de fustiger ceux qui nourrissent les «confrontations habituelles» et les «divisions bien connues et concertées». «La démocratie européenne est notre meilleure chance», a-t-il assuré. «Nous devons faire vivre le débat, créer cet espace public européen», a-t-il poursuivi, évoquant les «consultations citoyennes», qu'il lance dès ce soir, à Épinal (Vosges).
● Une «souveraineté réinventée» et «complémentaire» en cinq points
Face à la tentation «autoritaire» qui menace en Europe, Emmanuel Macron a appelé à une «souveraineté réinventée». Bien que «pleine et entière» à l'échelle du continent, celle-ci serait «complémentaire et pas de substitution» par rapport à celle des États. Elle reposerait sur cinq piliers, dont le premier serait «la sécurité intérieure, extérieure, et de défense». Viendrait ensuite une «position unie dans le domaine commercial», qui permettrait d'avoir une économie «protectrice des intérêts légitimes, des travailleurs comme des consommateurs». Pour qu'il y ait «aussi une souveraineté climatique et énergétique», le chef de l'État a affirmé que «la France poussera pour un prix minimum et une taxe aux frontières sur le CO2». «La quatrième souveraineté» porte selon le président sur «la santé et l'alimentation». «Nous devons soutenir une souveraineté alimentaire de qualité. (…) C'est bon pour nos économies et nos territoires, bon pour nos concitoyens, et c'est un choix cohérent avec nos engagements dans la durée». Enfin, le locataire de l'Élysée a cité «la souveraineté numérique»: «Nous sommes en train de devenir un espace géographique unique au monde où nous favorisons l'innovation de rupture, (…) et en même temps, nous nous mettons en capacité de protéger les libertés individuelles».
● Une taxe sur le numérique pour financer des projets européens
Emmanuel Macron a annoncé que la France était «prête à augmenter sa contribution» à l'Union Européenne, à condition que le budget soit remodelé. Le chef de l'État souhaite en effet «définir une feuille de route par étapes sur l'union bancaire pour favoriser la convergence [des pays] sur la zone euro». Évoquant le numérique, Emmanuel Macron a également demandé l'instauration d'«une taxe à court terme qui permette de mettre fin aux excès les plus choquants». «Essentielle» à ses yeux, celle-ci constituerait selon lui «une piste de ressource propre pour le budget à venir». Pour le dirigeant français, cette réforme du budget permettrait de «financer dignement l'action européenne», notamment pour répondre aux questions liées à la «défense» et aux «migrations».
● Un programme pour financer les collectivités qui accueillent des réfugiés
Le président de la République a ouvert une piste de réflexion sur le sujet de l'immigration. Souhaitant que l'Union européenne obtienne des «résultats tangibles» en la matière, Emmanuel Macron a appelé les eurodéputés à «dépasser» le débat sur les «dublinés», ces étrangers déjà enregistrés dans un premier pays européen et contraints d'y retourner pour formuler leur demande d'asile. «Nous devons créer un programme pour financer les collectivités locales [européennes] qui accueillent et intègrent des réfugiés», a lancé le chef de l'État, appelant plus globalement à renforcer les «solidarités internes et externes» à l'Europe.
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À Strasbourg, Macron hausse le ton pour défendre l'intervention en Syrie (17.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 13:22 

  • Publié le 17/04/2018 à 12:56
À Strasbourg, Macron hausse le ton pour défendre les frappes en Syrie
Face aux députés européens, le président de la République a vertement dénoncé les postures de ceux qui «à chaque fois s'indignent» mais «restent assis».
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO - Face aux députés européens, le président de la République a vertement dénoncé les postures de ceux qui «à chaque fois s'indignent» mais «restent assis».
De son propre aveu, Emmanuel Macron «aime particulièrement l'exercice du débat avec le Parlement». Ainsi, alors qu'il s'exprimait pour la première fois devant les députés européens réunis en séance plénière à Strasbourg ce mardi, le chef de l'État s'est livré à plusieurs diatribes endiablées. D'abord lorsqu'il a sèchement répondu aux eurosceptiques Florian Philippot et Nicolas Bay. Mais aussi - et surtout - lorsqu'il a évoqué la question de l'intervention française en Syrie, qu'il «assume parfaitement».
«Je vous le demande: les mêmes qui à chaque fois s'indignent devant les images que nous avons vues, d'enfants (et) de femmes morts d'attaques de chlore, restons-nous assis? Défendons-nous des droits en disant: “les droits c'est pour nous”, “les principes c'est pour nous”, mais “la réalité, elle est pour les autres”? Non! Non! (...) Trois pays sont intervenus et, je vous le dis avec beaucoup de franchise: pour l'honneur de la communauté internationale!», a-t-il martelé en haussant le ton.
El-Assad «mène une guerre parallèle contre le peuple syrien et ses opposants»
Rappelant que la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis étaient intervenus «dans un cadre légitime, multilatéral (et) de manière ciblée», il a souligné qu'«aucune victime humaine» n'était à déplorer. Il s'est également félicité que «trois sites de production et de transformation d'armes chimiques» avaient été détruits. «Regardons nos principes en face, regardons le droit international en face, et demandons-nous où nous voulons aller?», a-t-il poursuivi, sous les applaudissements d'une partie de l'hémicycle.
Enfin, Emmanuel Macron a concédé que «ces frappes ne règlent rien». «Mais elles mettent fin, simplement, à un système auquel nous nous étions habitués qui est que, en quelque sorte, le camp du droit serait devenu le camp du faible. Et je ne m'y résous pas», a-t-il conclu. «Nous continuons le travail (...) diplomatique et humanitaire», a-t-il ajouté, précisant qu'il n'avait «déclaré la guerre à personne» d'autre que Daech. Contrairement à Bachar el-Assad, qui «mène une guerre parallèle contre le peuple syrien et ses opposants».

Attaque chimique en Syrie: la difficile mission des inspecteurs internationaux (17.04.2018)

  • Publié le 17/04/2018 à 17:33
Dix jours après l'attaque chimique présumée qui a fait plus de 40 morts à Douma, dans la banlieue de Damas, les membres de l'Organisation internationale pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) sont arrivés sur place, ce mardi. La collecte des preuves dans cette zone contrôlée par le régime et les Russes s'annonce délicate.
Plus de dix jours après les faits, les enquêteurs internationaux sont arrivés, ce mardi, sur les lieux de l'attaque chimique présumée qui a fait plus de 40 morts à Douma, dans la banlieue de Damas. Mais les chances sont minces pour qu'ils puissent récolter des éléments probants afin d'éclaircir les circonstances de l'attaque attribuée à Bachar el-Assad.
La zone est aujourd'hui contrôlée par l'armée syrienne et par les Russes. Les experts de l'OIAC (Organisation internationale pour l'interdiction des armes chimiques) sont donc confrontés à «une mission, sinon impossible, du moins très compliquée», assure à l'AFP Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), spécialiste des armes chimiques. «Comme pour toute scène de crime, il est fondamental d'arriver le plus vite possible sur les lieux. Là, il y a déjà un délai qui est très au-delà de ce que prévoient les statuts de l'OIAC (24 à 48 heures)», précise-t-il. «Par ailleurs, la zone de l'attaque présumée est aujourd'hui occupée par les forces syriennes et russes qui sont les principaux suspects dans cette affaire, donc on imagine bien que la tentation doit être immense de faire le ménage...», ajoute-t-il.
«Problèmes de sécurité»
Mardi matin, dans un communiqué officiel, le ministère français des Affaires étrangères a estimé qu'il était «très probable que des preuves et des éléments essentiels disparaissent» du site de Douma. «A ce jour, la Russie et la Syrie refusent toujours aux enquêteurs l'accès au site de l'attaque alors que ceux-ci sont arrivés en Syrie le 14 avril.»
Invoquant des «problèmes de sécurité», la Russie a assuré que les inspecteurs de l'OIAC auraient accès aux lieux de l'attaque, niant toute mauvaise volonté. «Il est quand même étrange, si les Russes et les Syriens n'ont rien à se reprocher, qu'ils attendent 36 à 72 heures pour laisser les inspecteurs avoir accès au site, sous des prétextes fallacieux de sécurité», ajoute Olivier Lepick. C'est probablement pour avoir le temps de terminer le ménage.»
«On a apparemment retrouvé des munitions chimiques sur les toits de quelques immeubles, mais là aussi c'est très facile à nettoyer.»
Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS)
Pour l'ambassadeur américain auprès de l'OIAC, Ken Ward, «les Russes pourraient avoir visité le site de l'attaque. Nous craignons qu'ils ne l'aient altéré dans l'intention de contrecarrer les efforts de la mission de l'OIAC pour mener une enquête efficace (...) Cela soulève de sérieuses questions sur la capacité de la mission d'enquête à faire son travail.» Sur place, les enquêteurs internationaux, chargés de confirmer une attaque chimique sans pour autant l'attribuer à une partie, vont, suivant leur procédure habituelle, commencer par procéder à des prélèvements physico-chimiques: échantillons de terre ou de gravats, végétaux, qu'ils emporteront pour analyse. «On a apparemment retrouvé des munitions chimiques sur les toits de quelques immeubles, mais là aussi c'est très facile à nettoyer», précise le spécialiste de la FRS. «Il faudrait être d'une naïveté absolue pour croire que les Syriens ont mis des scellés sur l'immeuble.»
Difficile collecte de témoignages
Ils vont également tenter de faire des prélèvements biologiques sur des blessés, voire des cadavres, sur lesquels les traces d'une absorption de produits toxiques peuvent persister longtemps. «Encore faut-il que les inspecteurs aient accès à des blessés ou à des cadavres de l'attaque», fait remarquer Olivier Lepick. L'enquête de l'OIAC va également porter sur les circonstances de l'attaque, en tentant de collecter des témoignages, ce qui, là encore, risque de s'avérer difficile au vu des circonstances.
«Vous imaginez bien que dix jours plus tard, avec les principaux suspects occupant les lieux, les chances de trouver le «smoking gun s'amenuisent.»
Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS)
Dans l'entourage du ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, on faisait remarquer, ce mardi, que les systèmes de surveillance, notamment américains, avaient détecté, au moment même de l'attaque chimique présumée, «une opération militaire en cours par les forces du régime, avec l'utilisation d'hélicoptères». Étant donné que les rebelles ne disposent pas d'hélicoptères, «cela signe de façon quasi-mécanique la culpabilité du régime», estime un expert, sous couvert d'anonymat. «Chaque heure qui passe rend la difficulté de l'enquête plus aiguë», conclut Olivier Lepick. «Dans ce genre d'affaire, il est toujours très compliqué d'avoir des preuves irréfutables, alors vous imaginez bien que dix jours plus tard, avec les principaux suspects occupant les lieux, les chances de trouver le “Smoking Gun” (preuve irréfutable) s'amenuisent.»
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La sortie de Castaner sur le «voile catholique» suscite la moquerie (17.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 17:00 

  • Publié le 17/04/2018 à 12:52
La sortie de Castaner sur le «voile catholique» suscite la moquerie
Cherchant à nuancer la réflexion d'Emmanuel Macron sur le foulard islamique, le secrétaire d'État a eu recours à une comparaison quelque peu périlleuse.
LE SCAN POLITIQUE - Cherchant à nuancer la réflexion d'Emmanuel Macron sur le foulard islamique, le secrétaire d'État a eu recours à une comparaison quelque peu périlleuse.
Lorsqu'on invoque l'histoire, il faut être sûr de soi. Lundi, au lendemain de l'interview musclée accordée par Emmanuel Macron à Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel, Christophe Castaner a tenté de décrypter la parole présidentielle au sujet de l'islam. Interrogé sur le voile islamique par les deux journalistes, le chef de l'État avait reconnu que ce symbole de la foi musulmane suscitait le malaise de nombreux Français car il «n'est pas conforme à la civilité de notre pays, c'est-à-dire au rapport qu'il y a entre les hommes et les femmes».
Invité de la matinale de RTL, le secrétaire d'État chargé des Relations avec le Parlement ne semblait pas être du même avis. Et l'ancien socialiste de s'essayer à une comparaison osée: «On s'est posé la question, il y a quelques années, quand toutes les femmes catholiques portaient un voile? Je ne crois pas.»
Se prenant en exemple, Christophe Castaner a avancé qu'il y a «quelques années, quand en France, y compris nos mamans portaient un voile, portaient le voile catholique, on ne se posait pas la question».
«Fou, grotesque et dangereux»
Au-delà du côté bancal de la référence historique - l'ex-maire de Forcalquier est né dans les années 1960, époque où, comme le rappelle Marianne , seules les nonnes se couvraient les cheveux -, celle-ci a suscité de nombreuses réactions à droite et à l'extrême droite, souvent moqueuses.
«Castaner compare le voile islamique au voile porté par toutes les femmes catholiques ‘il y a peu'. (...) Je n'avais pas remarqué toutes ces dames en mantilles dans nos rues. Soit Castaner se trompe d'époque... soit il se trompe de pays?», s'est demandé Roger Karoutchi, sénateur Les Républicains des Hauts-de-Seine. La mantille est une écharpe de soie que portaient les croyantes les plus rigoureuses, qui se conformaient au code de droit canonique de 1917.
Jean Messiha, cadre du Front national, a qualifié le secrétaire d'État de «fou, grotesque et dangereux». Quant à Gilbert Collard, député FN du Gard, il a manié l'ironie en supputant une «hallucination (...) due au vin de messe».
La députée LR des Bouches-du-Rhône Valérie Boyer a également moqué Christophe Castaner. «Qui lui explique que le voile islamique repose sur une conception selon laquelle l'homme ne peut pas résister à la beauté féminine?», a-t-elle interrogé.
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Loi asile et immigration  : l'exécutif joue l'apaisement (17.04.2018)

  • Publié le 17/04/2018 à 19:22
Des députés LaREM envisagent de s'abstenir ou de voter contre le texte tandis que les débats sont tendus avec l'opposition.
«Petite» pour la droite, «inhumaine» pour la gauche: la loi asile et immigration fait l'objet depuis lundi soir de premiers échanges virulents à l'Assemblée. Des affrontements classiques entre le gouvernement et l'opposition. Des confrontations plus étonnantes entre le gouvernement et les 312 députés LaREM. Une vingtaine d'entre eux ont d'ores et déjà semé la zizanie en confiant depuis plusieurs jours qu'ils s'abstiendront. D'autres comme l'ex-PS Jean-Michel Clément, pourraient voter contre. Dans les couloirs de l'Assemblée, plusieurs parlementaires de la majorité reconnaissent aussi qu'ils voteront le texte car «c'est le projet du président» mais «à contrecœur».
 Je ne voterai pas en faveur du texte. Mon vote n'est pas arrêté, il sera entre le rejet ou l'abstention »
Sonia ­Krimi, députée LaREM de la Manche
Pas de quoi convaincre en tout cas, la députée LaREM de la Manche, Sonia Krimi, Tunisienne naturalisée en 2012 qui a fait à nouveau entendre ses divergences. «Je ne voterai pas en faveur du texte. Mon vote n'est pas arrêté, il sera entre le rejet ou l'abstention», explique-t-elle. Elle dénonce les délais de recours raccourcis. «Ce sont les personnes les moins armées administrativement - et peut-être celles qui ont le plus besoin d'obtenir ce droit d'asile - qui en pâtiront», fait-elle valoir. La veille, Stella Dupont, députée LaREM du Maine-et-Loire qui a cosigné une dizaine d'amendements reconnaissait quelques «avancées sur le texte». Pas suffisant pour la faire changer d'avis, indique l'élue qui reste «sur sa faim» et compte s'abstenir.
Pour calmer les esprits, les députés LaREM vont «dans les prochains mois» mettre en place un groupe de travail sur l'interdiction du placement en rétention des mineurs, dans le but de rédiger une proposition de loi. C'est l'un des sujets de forte opposition des frondeurs face à Gérard Collomb. Florent Boudié, chef de file LaREM sur le projet de loi asile et immigration a fait cette annonce lors de la réunion matinale du groupe majoritaire.
Le test de Mayotte
Car le gouvernement qui ne souhaite pas s'enliser plaide «l'urgence» à agir. La loi devrait donc être votée dès la nuit de vendredi à samedi après l'examen de 1000 amendements dont plus de 200 ont été déposés par les élus de LaREM.
Premiers députés à monter au front, les élus LR ont dénoncé, par la voix du député de l'Yonne, Guillaume Larrivé, une loi qui «ne permettra pas à la France de sortir du chaos migratoire». Mansour Kamardine, député LR de Mayotte, et un des trois orateurs du groupe LR sur ce débat, regrette que le texte du gouvernement «n'apporte pas de solution décisive pour restaurer l'exercice du droit d'asile ni pour ce qui a trait à l'intégration», a-t-il indiqué en plein débat à l'Assemblée. Mais surtout, il estime que l'adoption de ce projet ne réglera rien. «Permettez-moi de vous dire que l'adoption de votre projet en appellera d'autres tant les défis migratoires sont devant nous», a-t-il lancé à Gérard Collomb. Selon lui, «Mayotte est un test pour la France et l'Europe, l'exemple type des conséquences d'une politique migratoire inefficiente».
Les élus LR ont dénoncé, par la voix du député Guillaume Larrivé, une loi qui «ne permettra pas à la France de sortir du chaos migratoire»
Sur la même longueur d'onde, Damien Abad, vice-président de LR a d'ores et déjà annoncé, «qu'il ne voterait pas le texte car il n'est pas assez audacieux et novateur». Selon le député de l'Ain, le projet de loi du gouvernement «ne cible en réalité que 15 % des premiers titres de séjour en France. Son échec est ainsi déjà annoncé», parie-t-il, très sceptique. «Depuis 1981, la représentation nationale a changé sa politique d'immigration tous les deux ans. Dix-sept lois se sont succédé. Elles ont toutes enflammé le débat parlementaire et l'opinion publique. Annoncées comme des révolutions, elles n'ont en fait été qu'une succession de cautères sur une même jambe de bois», avance-t-il. Le porte-parole du PS Boris Vallaud a estimé, «c'est une loi inutile parce qu'on a légiféré il y a peu de temps. C'est une loi dangereuse parce qu'elle réduit les délais de recours et augmente les durées de détention et qu'elle ne règle pas la question des enfants […] Et c'est une loi viciée dans ses fondements puisqu'elle s'appuie sur les accords de Dublin qui ne marchent plus», a poursuivi le secrétaire national à l'Europe du PS. Même tonalité du côté de La France insoumise. Le député de la Seine-Saint-Denis Éric Coquerel a, lui, dénoncé un discours «nauséeux» de LR dont le rôle est à ses yeux de «jouer à l'idiot utile du macronisme et faire passer une loi extrême pour une loi équilibrée», alors qu'elle est «inhumaine».
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Asile et immigration : le contre-projet de Valérie Pécresse (17.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 10:19 

  • Publié le 17/04/2018 à 07:00

LE SCAN POLITIQUE - Alors que le projet de loi asile et immigration est examiné à l'Assemblée et que les Républicains organisent mercredi leur convention sur ce sujet, Valérie Pécresse formule 11 propositions «pour retrouver la maîtrise de notre politique migratoire».
Après un premier cahier sur les déserts médicaux et une note sur l'université, le mouvement Libres! de Valérie Pécresse met 11 propositions sur la table qui allient «fermeté», «crédibilité» et «humanité» pour retrouver «la maîtrise de la politique migratoire», peut-on lire dans le document que s'est procuré Le Figaro. «Nous proposons un projet plus complet et plus ferme que celui du gouvernement», explique le vice-président de Libres!, Maël de Calan, qui a coordonné les travaux avec Patrick Stefanini. «Le discours du ministre de l'Intérieur est un discours de fermeté. Mais au-delà des mots, les premiers signaux envoyés ne sont pas à la hauteur de la situation. Sur des sujets essentiels (la lutte contre les mariages blancs, la réduction du regroupement familial, l'inscription dans la loi d'une liste de pays sûrs pour lesquels l'asile ne pourra pas être demandé, la lutte contre l'immigration clandestine, l'augmentation des reconduites à la frontière…), il semble faire le choix du laxisme», déplore Maël de Calan.
Pour durcir le regroupement familial, Valérie Pécresse propose d'augmenter à 2 ans la durée minimum de résidence permettant d'en bénéficier et d'augmenter «de 25 à 50% le niveau de ressources minimum exigé». Le mouvement «Libres!» associé à LR propose aussi un débat annuel au Parlement à propos de l'immigration, «et de faire voter une loi d'orientation comprenant des objectifs par catégorie d'immigration». «Nous proposons d'organiser dans le même temps un système par points pour privilégier ceux dont notre économie a besoin, et qui sont les plus à même de s'intégrer», énonce le vice-président. «À titre d'exemple, 100.000 demandes d'asile ont été enregistrées en 2017 (dont 7700 Albanais, 4900 Haïtiens, 3200 Ivoiriens…). Environ les deux tiers de ces demandes seront rejetées, mais l'immense majorité des demandeurs ne quitteront jamais le territoire», détaille encore Maël de Calan.
● L'inscription de «pays sûrs» dans la loi
Dans les 11 propositions figure la demande de l'inscription dans la loi d'une liste de pays sûrs pour lesquels les demandes ne pourront pas être examinées. «Les déboutés de l'asile devront être systématiquement expulsés», fait valoir Maël de Calan. Pour Libres!, le délai de rétention administrative devrait être allongé de 45 jours à 6 mois, contre trois mois dans le projet de loi du gouvernement.
● Un fichier de signalement pour lutter contre les mariages blancs
Si certaines propositions de Libres! rappellent celles des différents candidats à la primaire de la droite et du centre, d'autres sont plus nouvelles. Comme la lutte contre les mariages blancs et gris par la mise en place d'un fichier de signalement sous l'égide du parquet «en cas de soupçon ou de refus d'un officier d'état civil de célébrer le mariage». «Près de 50.000 visas sont délivrés chaque année aux “familles de Français”, essentiellement dans le cadre de mariages binationaux. La lutte contre les mariages blancs (frauduleux) et les mariages gris (escroquerie sentimentale) doit être accrue», peut-on lire dans les propositions. Comme l'application des peines pénales.
● La réforme des conditions d'acquisition de la nationalité et des droits du sol
Pour réformer les conditions d'acquisition de la nationalité, Libres! propose plusieurs pistes de réflexion. En ce qui concerne les étrangers nés à l'étranger, la durée minimale de résidence en France exigée d'un candidat à la naturalisation devrait être portée à 8 ans, comme c'est le cas en Allemagne. «La République doit évidemment s'opposer à toute naturalisation dès lors que l'assimilation du demandeur ne sera pas établie (maîtrise du Français, respect de nos valeurs, en particulier de l'égalité femmes/hommes, etc...)», peut-on encore lire dans les propositions. Le mouvement propose aussi de conditionner l'acquisition de la nationalité à l'absence de condamnation pénale et une réforme du droit du sol pour les enfants nés en France. Ils devront avoir au moins un des deux parents en situation régulière au moment de leur naissance. Une disposition qui vise notamment Mayotte et la Guyane. Début mars, en déplacement à Mayotte, Laurent Wauquiez avait lui aussi proposé de sortir pour Mayotte «des conditions d'application du droit du sol et qu'on revienne à un principe de bon sens. Quand un enfant naît ici de parents clandestins ça ne peut pas aboutir à l'octroi de la nationalité française», avait-il ainsi affirmé.
● Remplacer l'AME et la carte de séjour étranger malade
Le mouvement de Valérie Pécresse propose aussi de «remplacer la carte de séjour étranger malade» par «des régularisations exceptionnelles pour motif humanitaire» décidées par les préfets, en tenant compte de l'offre de soin dans les pays d'origine. «Selon la Cour des comptes, jusque 90% des demandeurs “étrangers malades” dans certains départements sont des déboutés du droit d'asile», explique Maël de Calan. «Nous proposons également de remplacer l'AME (Aide Médicale d'État, qui fournit une couverture sociale aux immigrés illégaux) par un nouveau dispositif recentré sur la lutte contre les épidémies et les urgences médicales», précise-t-il.
Autre volet de ces propositions: l'encadrement des mineurs non accompagnés alors que ce «dispositif est de plus en plus détourné à la fois par de jeunes majeurs qui mentent sur leur âge, et par des familles qui utilisent un mineur pour s'établir progressivement dans notre pays», juge Maël de Calan. «Nous demandons que l'État s'engage pleinement au côté des départements, pour évaluer, avec tous les moyens dont il dispose, si les personnes concernées sont bien mineures, et effectivement non accompagnées.»
Au niveau européen, Valérie Pécresse aimerait que soit instaurée une taxe européenne sur les visas et les titres de séjour (sur le modèle de l'ESTA américain), pour tripler les effectifs de Frontex, l'agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes.
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Données personnelles : coup d'envoi des actions collectives contre les GAFAM (17.04.2018)

  • Mis à jour le 17/04/2018 à 12:05 

  • Publié le 17/04/2018 à 11:40
La Quadrature du Net est la première association européenne à entamer une série de procédures collectives, ces fameuses «class action», contre les grandes entreprises du Net. Elle s'appuie pour cela sur un nouveau texte de loi européen.
Ils veulent «récupérer la liberté» que leur ont prise Google, Apple, Facebook, Amazon ou encore Microsoft (GAFAM) en exploitant leurs données personnelles et donc, leur vie privée. Les militants de la Quadrature du Net, une association de défense des libertés numériques, vont lancer 12 actions collectives contre les services bien connus de ces géants. L'association les accuse de «marchandiser la vie personnelle des citoyens européens», alors qu'il s'agit, selon l'Union européenne, d'un droit fondamental et donc par nature inaliénable et inviolable.
Les plaintes seront toutes déposées le 26 mai, au lendemain de l'application du nouveau Règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD), qui permet pour la première fois de fédérer les plaintes groupées pour les présenter aux autorités compétentes. D'ici là, La Quadrature du Net souhaite collecter le maximum de mandats d'actions via un formulaire dédié. Cette procédure juridique ne coûtera rien à ceux qui y contribuent, mais ne leur rapportera rien non plus, sinon la satisfaction d'éventuelles condamnations du modèle des GAFAM.
Les GAFA, qui sont-ils ?
Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft, les cinq géants américains d’internet, sont partout, sur les réseaux sociaux ou travaillent sur l’intelligence artificielle. Mais derrière quelles marques se positionnent-ils ? Qui détient quoi ?
Car la Quadrature du Net a souhaité s'attaquer directement aux racines du problème: le modèle économique des géants du web. «Nous interrogeons la conformité juridique mais d'une manière qui ne donne ni lieu à des enquêtes ou des débats interminables», explique Arthur Messaud, juriste et porte-parole de l'association qui s'est souvent engagée dans de longues procédures juridiques pour défendre les droits et libertés des citoyens sur Internet. Arthur Messaud n'hésite pas non plus à avoir des mots très durs quant à l'action des autorités de données personnelles, comme la Commission Nationale Informatique et Libertés (Cnil). «La Cnil a très peu usé de son pouvoir de sanction, car elle est davantage dans une stratégie d'accompagnement des entreprises vers la conformité juridique. Ce n'est pas suffisant au vu des milliards qui sont engrangés par ces entreprises sur la base de violations de nos droits».
Si la Cnil ne réagit pas aux 12 plaintes collectives transmises par la Quadrature du Net, l'association s'engage à poursuivre son action devant un juge au civil. Si la Cnil suit les démarches voulues par le RGPD, les plaintes devraient être transmises à l'autorité référente de chaque entreprise en matières de litiges liées aux données personnelles. Les dossiers pourraient donc aller jusqu'à Dublin pour ce qui concerne Facebook ou au Luxembourg pour ce qui est d'Amazon.
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En Hongrie, au cœur des passions identitaires d'Europe centrale (17.04.2018)

Par Laure Mandeville
Mis à jour le 17/04/2018 à 19h44 | Publié le 17/04/2018 à 18h53
REPORTAGE - La Hongrie ne s'est pas remise d'avoir perdu  les deux tiers de  son territoire après  la Première Guerre mondiale. Le nationalisme de Horthy, puis la douloureuse transition après la chute  du communisme ont continué de façonner  une mentalité rétive au libéralisme. Viktor Orban est issu de cette histoire, mieux comprise à l'est qu'à l'ouest de l'Europe.
Envoyée spéciale à Budapest
Le 6 avril dernier, à deux jours des législatives, une foule de partisans du premier ministre, Viktor Orban, chantait sur la place baignée de soleil de l'ancienne capitale des rois de Hongrie, à Szekesfehervar. «Comme une fleur qui a été déracinée et est en train de mourir, comme les millions de Hongrois éparpillés hors des frontières, si tu ne fais pas attention, cela peut aussi t'arriver», chantaient les manifestants, émus et recueillis. «Nous sommes du même sang, peu importe ce qui se passe dans nos vies», fredonnaient-ils, en agitant des drapeaux blanc, rouge et vert, couleurs de la Hongrie. Ce chant sombre évoque le destin tragique de leur pays, amputé des deux tiers de son territoire après le traité de Trianon de 1920, imposé par la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis, pour punir l'Autriche-Hongrie de son engagement dans la Première Guerre mondiale aux côtés de l'Allemagne. Un traumatisme national.
La défense de l'identité nationale est un thème clé de la révolution conservatrice engagée par le parti Fidesz, depuis 2010
La Hongrie, joyau baroque de la Mitteleuropa et longtemps nation dominante de la région Danube pour avoir arraché des droits particuliers pour son peuple aux empereurs autrichiens par le traité de 1867, ne s'est jamais vraiment remise de ce «rétrécissement», tandis que ses voisins de Roumanie, Tchécoslovaquie, Serbie, Croatie et Ukraine profitaient d'un démembrement qui avait rejeté hors des frontières un Hongrois de souche sur trois. Le choix d'un chant évoquant Trianon, en plein meeting électoral d'Orban, n'était évidemment pas un hasard. La défense de l'identité nationale est un thème clé de la révolution conservatrice engagée par son parti, Fidesz, depuis 2010. Quelque 3 millions de Hongrois vivent toujours dans ces territoires perdus et se sont vu octroyer le droit à la citoyenneté par le gouvernement Orban.
Impossible de comprendre ce qui se passe aujourd'hui en Hongrie, et dans le reste de l'Europe centrale, sans un retour sur l'histoire longue et tourmentée de cette région encore incroyablement méconnue à l'Ouest. Il faut se souvenir des envahisseurs successifs qui ont occupé et dominé cette mosaïque de territoires - les Turcs, les Autrichiens, les nazis puis les Soviétiques -, pour saisir l'attachement farouche de la région à sa souveraineté. Dans le petit livre qu'elle a consacré à la nation hongroise (*), un récit de voyage subtil qui est aussi une promenade dans la psyché du pays, la journaliste Françoise Pons évoque un pays hanté «par l'angoisse de la disparition». «L'histoire de la Hongrie est celle d'une survie», écrit Pons, notant que l'effondrement de la démographie du pays accroît aujourd'hui la crainte de la dilution et d'un isolement déjà prédéterminé par une langue hermétique. Un million de Hongrois ont quitté le pays depuis 1990. Les jeunes diplômés partent en masse. Cette saignée démographique explique partiellement la crispation du pays sur la question de la migration, devenue un sujet de vive actualité à partir de 2015, sous l'effet de la crise syrienne, quand des centaines de milliers de migrants en route vers l'ouest et le nord de l'Europe avaient échoué un temps en gare de Budapest.
«On a les mêmes ressorts en Pologne, qui connaît elle aussi des pénuries de main-d'œuvre importantes dues au départ massif de centaines de milliers de citoyens» 
Ziemowit Szczerek, reporter et écrivain
Mais, contrairement à ce que préconisent certains économistes de l'ONU ou de l'UE persuadés que les déficits de main-d'œuvre européens doivent être comblés de manière mécanique par des migrations régulières, pas question de remplacer les Hongrois par des non-Hongrois, affirme-t-on à Budapest. Il y va de l'identité nationale. «On a les mêmes ressorts en Pologne, qui connaît elle aussi des pénuries de main-d'œuvre importantes dues au départ massif de centaines de milliers de citoyens», note le reporter et écrivain varsovien Ziemowit Szczerek, qui voit «d'évidents parallèles» entre le nationalisme conservateur du parti Droit et Justice de Jaroslaw Kaczynski et le parti Fidesz de Viktor Orban. Dans les deux cas, Bruxelles est désormais perçu comme le nouveau despote supranational. «À bien des égards, c'est ridicule ou exagéré, mais il est évident que Bruxelles, par son attitude méprisante à l'égard des “fascistes” polonais ou hongrois, alimente la crispation!», regrette Szczerek.
La réhabilitation de Horthy
La rébellion menée par Orban se nourrit aussi de la peur viscérale du libéralisme des Hongrois depuis Trianon, précise l'historien Krisztian Ungvary. «La Hongrie occupe une place unique en Europe dans sa relation confuse au libéralisme. Le nationalisme, qui y a émergé après 1920, ne pouvait être qu'antilibéral, car le dépeçage du pays avait été dicté par la France, les États-Unis et la Grande-Bretagne, qui étaient tous des États libéraux», explique-t-il. Pendant les années 1920 et 1930, sous la régence de Miklos Horthy, l'idée de remettre en cause Trianon et de reconstituer la Grande Hongrie, se conjuguera d'ailleurs avec un nationalisme antilibéral qui voue aux gémonies les Lumières et la lutte contre la religion. C'est au nom de ce révisionnisme que Horthy ira jusqu'à collaborer avec l'Allemagne nazie, dans l'espoir de récupérer les territoires perdus. Aujourd'hui, une opération partielle de réhabilitation de Horthy, critiquée par la communauté juive et les milieux libéraux de Budapest, est d'ailleurs en cours. L'érection d'un monument en plein centre de la capitale, représentant la Hongrie sous les traits de l'ange Gabriel et prise entre les serres de l'aigle nazi, a suscité maintes polémiques, beaucoup y voyant une manière pour Budapest de se disculper, malgré sa participation active à la déportation de 450 000 Juifs par les nazis entre 1944 et 1945. Mais certains soulignent que ces Juifs avaient été protégés par Horthy jusqu'en 1944.
«Les Hongrois ont eu le sentiment d'avoir été roulés au nom du libéralisme»
Françoise Pons
Jamais l'hostilité ancienne au libéralisme dont parle Ungvary n'aurait resurgi avec tant de force si la transition post-1989 avait été moins douloureuse. La marche pour l'Europe a suscité un effondrement socio-économique majeur. Les compagnies étrangères ont racheté la plupart des usines locales avant d'en fermer la plupart. «Ils ont vendu les bijoux de famille», écrit Françoise Pons, notant que «les Hongrois ont eu le sentiment d'avoir été roulés au nom du libéralisme».Viktor Orban a surfé sur l'«épuisement» de ce cycle libéral, en parlant nation, passé glorieux et État protecteur aux laissés-pour-compte de la transition. Un projet qui s'est transformé aussi en contre-révolution culturelle sur les «valeurs»: protection de la famille, attachement aux racines chrétiennes, opposition au multiculturalisme, rejet des idées libérales sur l'avortement ou le mariage gay. «Après le démontage de l'État paternaliste kadarien, la frustration a été trop grande et un nouveau paternalisme a émergé», décrypte le journaliste Sergueï Birioukov dans Russkaïa Idea, dont l'article est un exemple du vif intérêt porté par la presse russe au phénomène Orban.
La haine du cosmopolite Soros
La révolution conservatrice consacre un tournant antidémocratique, pointent les oppositions hongroise et polonaise, qui soulignent les dérives népotistes et autoritaires des partis au pouvoir dans ces deux pays. Le gouvernement hongrois réfute l'accusation, en soulignant que la «démocratie illibérale» défendue par leur premier ministre ne menace pas les libertés. «C'est le rejet du projet de société ouverte qui favorise la globalisation et fait de la migration un droit de l'homme qui explique pourquoi l'équipe Orban a pris fait et cause contre le milliardaire d'origine hongroise George Soros», nous déclarait récemment le ministre de la Justice, Laszlo Trocsanyi. Il se référait à un article de Soros, publié en septembre 2015 dans Bloomberg, qui appelait l'UE à accueillir chaque année 1 million de migrants. «On nous parle du principe de solidarité, nous invoquons le principe de sécurité», plaidait le ministre hongrois.
«L'Europe de l'Est ne peut pas se laver les mains du problème qui frappe l'Europe et se contenter de diaboliser les migrants»
Le journaliste polonais Ziemowit Szczerek
L'université d'Europe centrale, fondée par le milliardaire George Soros, en plein centre de Budapest, est au cœur de la polémique qui oppose libéralisme et national-conservatisme. Dans son grand bureau lambrissé, le recteur de cette faculté prestigieuse, Michael Ignatieff, un Canadien, évoque ses batailles avec le gouvernement Orban pour assurer l'existence de son université, en suspens parce que «son fondateur s'appelle Soros». Il affirme qu'un accord a finalement été trouvé, mais dit attendre la signature du premier ministre. «Je ne suis pas le porte-parole de M. Soros, mais dire qu'il est la cause de tous les maux est faux et dangereux», déclare-t-il, parlant d'attaques au ton haineux et hystériques, teintées d'antisémitisme. «J'espère que c'était juste une manœuvre électorale», dit Ignatieff, lequel dénonce «une démocratie populiste majoritaire qui emploie la légitimité démocratique pour réduire systématiquement les contre-pouvoirs, universités comme presse».
Le journaliste polonais Ziemowit Szczerek est d'accord pour souligner les dangers d'une Hongrie se renfermant sur son pré carré national. «L'Europe de l'Est ne peut pas se laver les mains du problème qui frappe l'Europe et se contenter de diaboliser les migrants», dit-il. Mais il met aussi en garde contre «les dénis de la gauche et du centre» qui, à Varsovie, comme à Budapest, rejettent la réalité du problème migratoire. «Peut-être que la peur de la disparition est exagérée par la droite, mais ces craintes n'en ont pas moins des fondements», dit-il, notant que «c'est le même déni que celui d'Angela Merkel, qui disait en 2015 qu'on devait ouvrir tout grand nos frontières. Une grossière erreur». Le reporter écrivain conseille aux Européens de l'Ouest de comprendre les inquiétudes de l'Est et ses raisons légitimes d'être en désaccord avec Bruxelles. «Nous devons montrer que nous savons ce que nous faisons. Sinon, les populistes prendront le pouvoir, et pas seulement à l'Est», avertit-il, constatant l'aura croissante d'Orban à travers l'Europe.
(1) Hongrie. L'angoisse de la disparition, Nevicata, 2016.

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