Alexandre del
Valle : «L'islamiquement correct fait le jeu des terroristes»
Bloc-notes :
Islamisme, réveil d’une résistance française (29.03.2018)
Saint-Ouen :
rassemblement pour Nabila égorgée par son conjoint (27.03.2018)
La mère d'une
victime de Merah avait été menacée par Lakdim (27.03.2018)
Mayotte: le
renvoi d'immigrants illégaux vers les Comores possible (27.03.2018)
Italie: un navire
d'ONG saisi par la justice (27.03.2018)
Meurtre d'une
octogénaire à Paris : les deux suspects mis en examen (25.03.2018)
Meurtre de Mireille
Knoll: une «marche blanche» ce mercredi (27.03.2018)
Au lendemain d'un
vendredi meurtrier à Gaza, l'armée israélienne sur la défensive (31.03.2018)
Radicalisation:
20 étrangers expulsés en 2017 (31.03.2018)
Vaincre la mort
par l'amour (30.03.2018)
Natacha Polony :
«Le terreau de l'héroïsme et celui de la lâcheté» (30.03.2018)
Jean-Guilhem
Xerri : «Notre âme n'a pas changé. Ce qui la perturbe, oui !»
(30.03.2018)
«Le destin
religieux de la France n'est pas indifférent à celui de l'Église universelle»
(30.03.2018)
Jean-François
Colosimo : «Il y a pire que la mort et c'est la mort spirituelle» (30.03.2018)
La Turquie
froissée par la proposition française de médiation avec les Kurdes (30.03.2018)
Le soutien mesuré
de Paris aux Kurdes (30.03.2018)
Égypte :
la nouvelle guerre du Sinaï contre Daech (29.03.2018)
Avec les
catholiques chinois qui refusent de se soumettre au Parti communiste
(30.03.2018)
Un contrôle des
douanes françaises dans une commune italienne ulcère l'Italie (31.03.2018)
Tibéhirine :
les expertises fragilisent la version d'Alger (29.03.2018)
Une école brûlée
dans les Yvelines (02.04.2018)
Le pape François
baptise un jeune clandestin devenu un héros en arrêtant un braqueur
(01.04.2018)
Nicolas Baverez :
«Ne désespérons pas de la démocratie !» (01.04.2018)
«Le destin
religieux de la France n'est pas indifférent à celui de l'Église universelle»
(30.03.2018)
Un calme trompeur
règne à Gaza après un vendredi meurtrier (01.04.2018)
À l'ONU, Israël
rejette une demande d'enquête (01.04.2018)
Éthiopie : un
premier ministre pour sortir de la crise (01.04.2018)
Un djihadiste
malien livré à la justice internationale (01.04.2018)
Royaume-Uni : le
parti travailliste accusé de complaisance face à l'antisémitisme (01.04.2018)
Jeremy Corbyn ou
le désespérant succès de l'islamo-gauchisme (12.06.2017)
Violences à Gaza
: la gauche condamne Israël, l'exécutif reste silencieux (01.04.2018)
Au congrès de
l'ex-UOIF, affluence au stand «Free Tariq Ramadan» (01.04.2018)
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Tunisie d'accélérer les réformes (01.04.2018)
L'Allemagne débat
autour d'un «revenu solidaire de base» (30.03.2018)
L'expérience de
revenu universel en Finlande ne sera pas prolongée (30.03.2018)
Trois
alternatives à Facebook (01.04.2018)
Alexandre del Valle : «L'islamiquement correct fait le jeu
des terroristes»
- Par Paul Sugy
- Mis à jour le 26/03/2018 à 10:04
- Publié le 23/03/2018 à 19:38
FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN -
Alexandre del Valle a publié jeudi un volumineux essai, dans lequel il décrit
la «stratégie d'intimidation» des islamistes pour soumettre l'Occident. Le
lendemain, une nouvelle attaque terroriste ensanglantait la France. Il revient
longuement sur ses thèses dans un entretien au FigaroVox.
Géopolitologue, docteur en
histoire contemporaine, consultant et essayiste, Alexandre del Valle est
professeur de géopolitique et de relations internationales. Il vient de
publier La
Stratégie de l'intimidation, du terrorisme jihadiste à l'islamiquement correct(éd.
L'Artilleur, mars 2018).
FIGAROVOX.- À Trèbes, dans
l'Aude, un
homme a tiré sur des CRS avant d'abattre plusieurs civils dans un supermarché.
Dans votre livre, vous insistez sur la dimension idéologique de tels actes?
Alexandre DEL VALLE.- Oui,
et cela ne fait aucun doute pour tous les spécialistes du terrorisme: ce serait
une erreur fondamentale d'analyse que de réduire le terrorisme au profil
psychiatrique de ses petits soldats. Car en dernier ressort, ceux-ci sont mus
par une idéologie très puissante, capable de pousser un homme à sacrifier sa
propre vie pour le suprématisme islamiste. Les théoriciens de cette idéologie
ne sont ni des individus isolés ni des déséquilibrés, mais des intellectuels
dont le rayonnement à travers le monde est immense.
Le cri des jihadistes, que, selon
certains éléments, Redouane Lakdim aurait également poussé vendredi matin, est
«Allah akbar», Dieu est le plus grand. Ce cri nous fait remonter toute
l'histoire des conquêtes musulmanes, et jusqu'au prophète Mahomet lui-même! Il
rappelle la continuité historique et civilisationnelle entre le jihadisme et
l'islam.
Vous décrivez dans votre livre
une «stratégie de l'intimidation», celle d'un islamisme conquérant dont le
terrorisme n'est que la branche armée, tandis que la crainte qu'il inspire est
perpétuée par un discours «islamiquement correct». Que recouvre cette
expression?
En effet, la violence physique
des jihadistes produit une sidération et une intimidation qui profite en fait
grandement aux tenants de l'islamisme plus «institutionnel». Ceux-ci prétendent
que «le jihadisme n'a rien à voir avec l'islam» alors qu'ils s'abreuvent aux
mêmes sources totalitaires. D'où le sous-titre de l'essai: «du terrorisme
jihadiste à l'islamiquement correct», deux formes d'intimidation
complémentaires. Cette expression, que j'ai utilisée la première fois dans un
article du Figaro Magazine en 1999 en même temps que celle de «totalitarisme
islamiste», montre que plus l'on tue au nom de l'islam, et plus les Occidentaux
combattent l'islamophobie en affirmant que le «vrai islam» est pacifique.
Paradoxalement, donc, l'islamiquement correct n'est pas qu'une déclinaison de
la xénophilie, la version islamique du «politiquement correct», mais le
résultat d'une intimidation physique et psychologique qui pousse à céder devant
ceux qui sont prêts à mourir pour leur cause fanatique.
L'islamiquement correct est le
résultat d'une intimidation physique et psychologique qui pousse à céder devant
le fanatisme.
L'islamiquement correct est donc
devenu l'épicentre de la culture de l'excuse, le fruit le plus mûr du «complexe
occidental». Pareille capitulation des Occidentaux face à la stratégie de
conquête des pôles islamistes néo-conquérants est d'autant plus perverse qu'elle
est présentée comme un gage d'antiracisme. Pour le dire autrement,
l'islamiquement correct des «coupeurs de langue» (ceux qui font taire les
soi-disant «islamophobes» qui osent critiquer l'islam et l'islamisme) est
renforcé par la crainte suscitée par les «coupeurs de tête» (les jihadistes,
qui rappellent de façon fort persuasive à quel point il est dangereux de
critiquer l'islam). En mêlant ainsi les questions d'immigration, de crise des
réfugiés ou de «racisme» avec celle du totalitarisme islamiste, en assimilant
la critique de l'islam à la haine envers les musulmans, les islamistes
institutionnels et leurs alliés d'extrême-gauche sont parvenus à faire passer
toute critique de l'islam et toute dénonciation de l'islamisme pour un racisme
envers les immigrés musulmans et la civilisation musulmane.
Vous assimilez le terrorisme à
une «guerre psychologique»: quel en est l'objectif?
Toute guerre a un objectif, et
celui de l'islamisme mondial est de faire régner partout l'ordre de la charia,
de reconquérir tous les pays qui furent jadis musulmans (Balkans, Espagne,
Sicile, Portugal, Inde, Israël, etc.), qu'il veut réunir à terme dans un
califat, afin d'islamiser la planète entière. Mais, sachant que de nombreux
pays sont militairement plus forts qu'eux, les islamistes doivent désarmer
d'abord l'Occident grâce à l'interdiction de toute critique de l'islam sous
couvert de lutte contre l'islamophobie. Pour éliminer les obstacles sur leurs
chemins de conquête subversive, les pôles de l'islamisme mondial distillent
l'idée selon laquelle toute critique de l'islam serait une attaque contre les
musulmans. Cette «paranoïsation» des musulmans via l'idée que les «sociétés
mécréantes» les persécuteraient prépare la sécession possible d'une grande
partie des communautés musulmanes de nos pays, que les jihadistes comme les
«islamistes modérés» incitent à se «désassimiler».
De ce fait, il est stupide de
réduire la menace islamiste au seul terrorisme jihadiste, qui n'est que
l'avant-garde, la face émergée de l'iceberg. L'objectif de conquête du monde et
de l'Occident est en effet poursuivi tout autant par l'islam institutionnel
mondial et occidental, majoritairement fondamentaliste. La différence entre les
deux n'est pas de nature mais de degré. Le but commun est d'instaurer le règne
universel de la charia.
Selon vous, ces institutions
que vous nommez les «pôles subversifs» de l'idéologie islamiste dans le monde
prônent par conséquent une doctrine proche de celle des jihadistes?
Oui, la doctrine est la même,
elle découle des textes sacrés de l'islam: le Coran incréé, où les sourates
guerrières de Médine priment sur celles plus spirituelles de La Mecque, puis
les Hadîths (propos complémentaires rapportés et attribués à Mahomet), et la
Sira, la vie de Mahomet qui regorge de conflits et d'actes jihadistes. Dans
l'islam, rappelons qu'il n'y a pas réellement de théologie, comme dans le
christianisme: il y a une orthodoxie, qui opère une fusion totale entre le
spirituel et le temporel, et une orthopraxie qui en découle et qui valorise la
conquête, la ruse de guerre et le combat sacré. L'islam (soumission) se
distingue d'ailleurs de la foi (iman), car islam signifie la soumission à un
ordre plus politique que religieux. De ce fait, lorsque nos dirigeants refusent
d'interdire les Frères musulmans, les salafistes «modérés», le Tabligh
indo-pakistanais, ou l'islam turc du Millî Görüs, sous prétexte que ceux-ci
n'exercent pas d'action terroriste sur notre sol, ils n'ont rien compris à
l'islam, car ils n'ont pas affaire qu'à des prosélytes religieux, mais à des
adeptes d'un ordre juridico-politique fondé sur la vision totalitaire de la
charia et qui est qui plus est conquérant et opposé à l'ordre
démocratico-occidental judéo-chrétien.
L'Université d'Al-Azhar, la
plus prestigieuse du monde sunnite, n'a jamais excommunié les jihadistes.
Dans les universités islamiques
sunnites officielles, le religieux et le socio-temporel sont toujours enseignés
ensemble. Ces pôles de l'islamisme mondial conquérants sont par ordre
d'influence dans nos sociétés et dans le monde: les Frères musulmans, qui
dirigent de nombreuses mosquées aux États-Unis, en France, en Allemagne, en
Italie… Ensuite, il y a le salafisme wahhabite, produit et entretenu par
l'Arabie Saoudite, qui tient les lieux saints de l'islam et les grandes
organisations panislamistes mondiales (la Ligue islamique mondiale, l'OCI,
ISESCO, l'Assemblée mondiale des mosquées, etc.). Le pôle saoudien produit une
orthodoxie islamique totalitaire qui a contaminé une grande partie du monde
musulman depuis des décennies, y compris nos «banlieues de l'islam». On peut
aussi mentionner le Tabligh et la Jamaà Islamiya indo-pakistanaises, très
présents en Grande Bretagne ou en Amérique mais aussi chez nous, sans oublier
le Millî Görüs turc et autres confréries néo-ottomanes très actives au sein de
la diaspora en Europe et qui ont contribué à l'essor de l'AKP d'Erdogan en
Turquie. Et l'Université d'Al-Azhar, la plus prestigieuse du monde sunnite, qui
n'a jamais excommunié les jihadistes, alors qu'elle a déclaré «apostats» nombre
de libéraux.
J'ajoute que ce système
théocratique conquérant, sous couvert de prosélytisme et de liberté religieuse,
repose sur une vision foncièrement irrédentiste, puisque tout territoire qui
appartenait dans le passé au Califat (Espagne, Balkans, Inde, Andalous, Sicile,
etc.) est censé retourner à l'islam.
L'emploi de l'expression
«aslam taslam» («soumets-toi et tu seras épargné») par les jihadistes est pour
vous la preuve d'une continuité entre le terrorisme d'aujourd'hui, et la longue
histoire d'expansion de l'islam par l'appel à la soumission…
Absolument. À l'Institut du monde
arabe, qui représente pourtant un islam assez modéré, on montre régulièrement
une vidéo sur la vie du prophète des musulmans et sur les premières expansions
islamiques du VIIe siècle, dans laquelle on voit Mahomet envoyer des cavaliers
d'Allah aux quatre coins du monde pour aller déclarer aux rois byzantin ou
perse: «aslam taslam!», «soumets-toi et tu auras la paix».
Les textes des grands
jurisconsultes de l'islam, ceux de Bukhari, Muslim, Nawawi, etc. sont enseignés
en Europe dans la plupart des centres islamiques officiels ayant pignon sur
rue, alors qu'ils consacrent des chapitres entiers au jihad guerrier offensif,
au prélèvement des butins, à la prise des otages mécréants, à l'esclavage, aux
châtiments corporels, à l'infériorité des non-musulmans et des femmes et aux
peines de mort pour l'apostasie et le blasphème. Quand on prend conscience du
lien entre le jihadisme et les sources doctrinales légales de la violence sacrée,
on comprend que l'on ne peut pas déradicaliser un jihadiste si facilement. De
ce fait, j'affirme qu'un Mohammed Merah ou des égorgeurs de Daech n'ont pas
besoin de s'appuyer sur les textes «hérétiques» pour commettre leurs crimes:
ils n'ont qu'à écouter les sermons et lire les ouvrages (en vente à la FNAC) de
Youssef al-Qardawi par exemple, qui appelle à tuer les homosexuels, les
apostats et ceux qui blasphèment.
Vous dites également que
l'islamisme repose sur un mythe, celui d'un âge d'or de l'islam qui aurait
généré une dette de l'Occident à l'égard de la science et de la culture
arabo-musulmanes. Sur quoi repose-t-il selon vous?
Sur deux vecteurs. Le premier est
une haine de soi civilisationnelle entretenue par l'Occident lui-même, et
notamment un rejet de l'héritage Grecs byzantins. Pour ne pas être redevable
envers l'empire byzantin, l'Europe occidentale a créé le «mythe de l'islam
éclairé», de la supériorité philosophique, scientifique et morale d'un Orient
islamique qui nous aurait apporté le zéro, Aristote et Platon et sans qui nous
ne serions encore que des barbares obscurantistes.
Le second vecteur, qui poursuit
le premier, est la détestation de l'apport judéo-chrétien par l'Occident
moderne consumériste et multiculturaliste. En termes clairs, cette haine de
soi, ce «complexe occidental» conduit à exagérer par contraste l'influence
culturelle et philosophique du monde musulman envers lequel en réalité
l'Occident n'est pas redevable scientifiquement puisque la quasi-totalité des
savants et traducteurs qui ont transcrit en arabe les œuvres grecques, perses
et indiennes étaient ni arabes ni musulmans mais majoritairement chrétiens
d'Orient araméophones, byzantins, perses, juifs et espagnols.
Pour ne pas être redevable
envers l'empire byzantin, l'Europe occidentale a créé le « mythe de l'islam
éclairé ».
Ce mythe donne une légitimité
morale à l'impérialisme islamiste et à son irrédentisme agressif. Il est le
motif central des revendications jihadistes: il faut «venger l'offense de la
Reconquista» et «reprendre possession» d'une ex-colonie européenne islamique.
Le génie de l'islamisme est d'avoir su capter les mérites de nombreuses
cultures passées: les coupoles ont en réalité été inventées par les Perses,
l'irrigation par les Romains, le zéro par les Indiens, Aristote a été traduit
par les chrétiens grâce à des manuscrits empruntés à Byzance, etc.
Vous fustigez la réaction des
Occidentaux après chaque attentat, qui se contentent d'allumer des bougies.
Pourtant, il y a aussi des plans de prévention de la radicalisation: cela ne
vous semble pas suffisant?
Ce que l'on n'a pas compris en
Occident, c'est que lorsque l'on tue au nom de l'islam, les pôles
institutionnels de l'islamisme testent nos réactions. J'ai visité et pris en
photo les nombreux lieux de commémorations post-attentats édifiés comme des
autels par la mairie très gauchiste (Podemos) de Barcelone: il n'y a pas eu de
photo des victimes occidentales sur les lieux de commémoration, aucune croix
chrétienne, aucune apologie de ce que nous sommes, de l'Espagne ou de notre
identité, mais une omniprésence d'écrits en arabe, de pancartes où il était
écrit que l'islam c'est la paix, l'islam est innocent... Le lendemain des
attentats, la mairie de Barcelone fit augmenter les dotations accordées aux
organismes de lutte contre l'islamophobie! Nos professions de foi
post-attentats et nos bougies entourées de slogans exposées après des carnages
sur fond de «lutte contre l'islamophobie» sont perçues par les pôles de
l'islamisme institutionnel comme des extraordinaires messages de faiblesse. Ce
recours permanent à l'autoflagellation et à la culpabilisation est la preuve,
pour les islamistes, que nous sommes une proie facile.
Pour revenir à la
déradicalisation, je pense que celle-ci est quasiment impossible avec des vrais
radicalisés qui pris le «goût du sang». La prévention de la radicalisation est
en revanche la seule chose que l'on puisse effectivement faire, car les
personnes déjà touchées par la contagion du discours islamiste et qui l'ont mis
en pratique n'en reviennent jamais ou très rarement, d'autant que les
ex-jihadistes «revenants» ont le droit de mentir d'une façon illimitée dans le
cadre de la «ruse de guerre jihadiste», que l'on retrouve dans des textes de la
jurisprudence islamique.
Est-ce à dire qu'il n'existe
pas d'islam modéré en France?
En France, l'islam modéré, celui
de la mosquée de Paris ou de l'imam Chalghoumi, existe mais il est en perte de
vitesse et minoritaire au niveau des lieux de cultes et de la production de
discours et d'identité. L'État français et les Européens en général ont
beaucoup trop cédé durant des décennies, notamment en laissant les Frères
musulmans et à présent le pôle turc (néo-ottoman) contrôler le Conseil français
du culte musulman (CFCM). Il est urgent par exemple de n'accorder la gestion du
marché du halal de sacrifice des bêtes qu'à des pôles vraiment modérés de
l'islam, car on oublie trop souvent que les milliards du halal permettent à des
mouvances comme les Frères de s'auto-financer, en plus des dons des fidèles.
Depuis la mise en garde de
Karl Popper contre les totalitarismes du XXe siècle, dans «the open society and
its enemies», vous jugez que nos démocraties n'ont toujours pas tiré les leçons
de l'histoire?
Non, les pires erreurs se
répètent. Comme jadis face aux totalitarismes rouges et bruns qui annoncèrent
sans complexe leurs objectifs de conquêtes, nos démocraties ouvrent leurs
portes à l'ennemi islamiste. Karl Popper ne s'est pas trompé. J'irai même plus
loin. Cet auto-sabordage civilisationnel fait que nos sociétés ne définissent
plus leurs intérêts que de façon marchande, économique, de sorte que l'Arabie
saoudite, la Turquie ou le Qatar producteurs d'islamisme radical institutionnel
ou jihadiste, qui devraient être définis comme des ennemis dès lors qu'ils incitent
les musulmans chez nous à se «désassimiler», sont vus comme des amis ou des
alliés puisqu'ils le sont d'un point de vue économique ou stratégique face au
bloc russo-orthodoxe désigné comme ennemi principal par l'OTAN.
La contre-attaque consiste en premier
lieu à ne pas donner systématiquement raison à l'ennemi.
Et la haine envers la
civilisation occidentale, distillée par les idéologues révolutionnaires rouges
alliés des prédicateurs verts, crée un terreau favorable au processus de
radicalisation jihadiste. Certains États européens ont toutefois commencé à
mettre en place des mécanismes de défense: les Autrichiens, avant que
l'extrême-droite n'arrive au pouvoir, ont en effet interdit dès fin 2015 le
financement des lieux de culte et des centres gérés par des pôles islamistes
étrangers. Et pour autant que je sache, Erdogan ne leur a pas fait la guerre!
Cela montre que nous pouvons encore être maîtres de notre destin, et surtout
que nos dirigeants n'ont aucune excuse pour laisser proliférer une telle menace
géo-civilisationnelle.
Quels seraient justement,
selon vous, les ressorts de la «contre-attaque» idéologique et psychologique
que vous appelez de vos vœux?
La contre-attaque consiste en
premier lieu à ne pas donner systématiquement raison à l'ennemi. Lorsque les
islamistes utilisent le chiffon rouge de «l'islamophobie» pour justifier en
«représailles» les meurtres de Charlie Hebdo, nous ne devons pas nous
reconnaître coupables des blasphèmes qu'ils nous reprochent ou lancer des
campagnes de lutte contre l'islamophobie. Dire «je suis Charlie» ne sert à rien
si l'on continue ensuite à criminaliser la critique de l'islam!
Il faut ensuite lutter contre les
théories conspirationnistes, comme celles sur le 11 septembre. Ces théories
accréditent l'idée que l'Occident étant «l'Empire du mal, la seule force de
résistance face à ce monstre ne peut être que la lutte terroriste.
Il faut enfin que l'Occident se
réconcilie avec lui-même. Dans ses travaux, le thérapeute américain William
Schutz a montré que plus une entité véhicule une image positive d'elle-même, et
plus elle suscite l'adhésion de l'autre: l'Europe doit méditer ceci si elle
veut proposer un modèle concurrent de celui de l'islamisme! Les hussards noirs
de la IIIe République le savaient très bien, puisque même s'ils étaient
profondément anticléricaux, ils enseignaient aux élèves la fierté de l'héritage
civilisationnel européen et y compris de la monarchie chrétienne.
Il faut enfin redonner à la
justice les moyens de lutter efficacement contre ceux qui propagent les
discours qui conduisent les terroristes à passer à l'acte. Il n'y a pas de
raison que les citoyens musulmans ne fassent pas de bons Français et de bons
républicains, c'est déjà le cas de 46 % si l'on en croit l'étude de l'Institut
Montaigne. Reste les 54 % restants, qui sont soit très conservateurs, soit
carrément séparatistes et donc en rupture. Avec une politique de «patriotisme
assimilateur» fondée sur une exaltation de la fierté nationale, nous aurions pu
éviter ce gâchis. Il est clair que tant que nos institutions, et nos écoles en
particulier, n'auront plus d'autorité, nous ne pourrons que favoriser le chemin
vers la radicalisation islamiste.
Enfin, l'histoire des conquêtes
islamiques montre que c'est toujours la dissension interne et la faiblesse des
dirigeants qui ont permis à l'islamisme conquérant de prospérer: nous devrions
réfléchir aux conséquences funestes de la nouvelle guerre froide entre
l'Occident et la Russie.
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une politique de civilisation»
Bloc-notes : Islamisme, réveil d’une résistance française
(29.03.2018)
Les plus dangereux sont ceux qui
roupillent. Dans la guerre que l’islam suprémaciste a déclarée à la nation,
trop d’élites dorment encore au lieu de combattre l’ennemi intérieur. La
préservation du vivre-ensemble est leur excuse la plus cynique. Le "délai
de décence" est également régulièrement rappelé à ceux qui, après chaque
horreur djihadiste, exigent des actes plutôt que des résiliences. Résultat de
cette politique de l’oreiller : en France, le nazislamisme progresse sans
résistance. Cette idéologie s’appuie aussi bien sur un prosélytisme subtil que
sur l’enrôlement de voyous des cités. L’un d’eux, le délinquant
franco-marocain Radouane Lakdim, 25 ans, a égorgé le colonel
Arnaud Beltrame, 44 ans. L’officier de gendarmerie s’était proposé
comme otage à la place de la caissière du Super U de Trèbes (Aude). Au nom
d’Allah, le tueur avait préalablement assassiné Jean Mazières,
Christian Medvès, Hervé Sosna. En octobre, à Marseille, Laura
et Mauranne avaient été d’autres proies d’un autre barbare.
La judéophobie s’ajoute aux
fruits vénéneux que le Coran peut produire. Les chrétiens et les musulmans
mécréants sont également les cibles de sourates qui ordonnent de tuer pour
terroriser et imposer la charia. Lundi, le caractère antisémite a
été retenu par le parquet de Paris dans l’assassinat de Mireille Knoll,85
ans. Cette rescapée du Vél’ d’Hiv’ a reçu onze coups de couteau, dans son HLM
du XIe arrondissement. Son bourreau criait "Allah Akbar". "Les
Juifs ne sont pas en sécurité en France", a dénoncé Malek Boutih, ancien
président de SOS Racisme.Cependant, ce mouvement a sa part dans la
culpabilisation des Français à faire respecter leurs modes de vie. Son
"Touche pas à mon pote", encore brandi jeudi soir à Paris lors de la
marche blanche contre l’antisémitisme, a contribué à la victimisation des
immigrés, mais aussi des djihadistes. La culture de l’excuse, qui
est celle d’Emmanuel Macron, est l’héritière de cet humanisme dévoyé.
Les "assoupis ", ainsi
nommés mercredi par le chef de l’État lors de l’hommage national au "héros
français", sont au pouvoir. (La suite ici)
Je participerai, ce vendredi,
à L'heure des pros sur CNews (9h-10h30), puis au Club Pujadas sur LCI
(18h10-19h50)
Saint-Ouen : rassemblement pour Nabila égorgée par son
conjoint (27.03.2018)
Le Parisien - 2018-03-27
Saint-Ouen, vendredi 9 mars. Une
jeune femme de 23 ans a été tuée par son mari.
Comme après chaque meurtre
conjugal, Ernestine Ronai, responsable de l'observatoire des violences envers
les femmes en Seine-Saint-Denis, sera présente avec d'autres associations ce
mardi à 18 heures devant la mairie de Saint-Ouen pour le rassemblement en
mémoire de Nabila, 23 ans, tuée par son conjoint. L'Observatoire a choisi de
désigner ces meurtres par le terme de féminicide et de marquer chaque drame par
une marche ou un rassemblement. « Nous voulons faire savoir que ces femmes ont
été tuées. Elles ne doivent pas partir sans qu'un hommage leur soit rendu »,
rappelle Ernestine Ronai.
Dans le contexte national de
débat sur la violence faites aux femmes, la démarche des associations de
Seine-Saint-Denis revêt toute son acuité. « Nous n'en avons pas fini de penser
la dangerosité des hommes violents », estime la responsable de l'observatoire.
Pour Nabila, c'était
le 9 mars dernier, dans un appartement de la rue des Rosiers. Son mari, âgé
de 22 ans, l'avait égorgée avec un couteau de boucher. Le meurtre s'était
déroulé sous les yeux de leur bébé de six mois. Conseillé par sa famille chez
laquelle il s'était réfugié, l'auteur présumé s'était rendu à la police. Depuis
il a été mis en examen pour meurtre sur concubin et placé en détention
provisoire. Mais il persiste à nier les faits.
La jeune mère de famille était
originaire de Belgique. Après avoir vécu dans sa belle-famille en
Seine-et-Marne, elle avait emménagé avec son mari dans ce petit studio de la
rue de Rosiers, à Saint-Ouen. La jeune femme menait une existence très discrète
et sortait très peu. A tel point qu'aucun des voisins rencontrés n'a pu la
décrire.
Le bébé placé dans une famille
d'accueil
Après le meurtre de Nabila,
l'observatoire des violences envers les femmes avait immédiatement enclenché le
protocole de prise en charge des enfants témoins d'un drame conjugal.
L'observatoire de Seine-Saint-Denis a été le premier en France à mettre en
place cette procédure en concertation avec la justice. Car il considère que les
enfants sont des victimes à part entière et ils nécessitent d'être mis à
l'abri.
Une ordonnance de placement
provisoire a été prise par le procureur de la République de Bobigny. « Le bébé
n'était pas encore sevré et ne voulait plus se nourrir. Il a pu être
hospitalisé. Il est maintenant plus apaisé », explique Ernestine Ronai,
responsable de l'observatoire des violences envers les femmes. L'enfant a
ensuite été placé dans une famille d'accueil en attendant que les services
spécialisés conduisent une évaluation auprès de sa famille biologique.
La mère d'une victime de Merah avait été menacée par Lakdim
(27.03.2018)
- Par Le Figaro.fr avec AFP
- Mis à jour le 27/03/2018 à 22:26
- Publié le 27/03/2018 à 20:43
"Continue comme ça et tu
verras !": Latifa Ibn Ziaten, la mère d'une des victimes du djihadiste
Mohamed Merah, qui milite pour la laïcité, avait été menacée il y a près de
deux ans par Radouane Lakdim, auteur des récentes attaques dans le sud de la
France.
Le visage de Mme Ibn Ziaten est
connu dans les médias français car elle organise régulièrement des conférences
pour promouvoir le dialogue avec les jeunes des quartiers en difficulté et
éviter leur radicalisation. Son fils Imad Ibn Ziaten fut la première victime de
Mohamed Merah, qui a tué en mars 2012 sept personnes, dont trois enfants juifs,
dans le sud-ouest de la France.
Elle a raconté aujourd'hui à
l'AFP comment Radouane Lakdim, qui a abattu quatre personnes au nom du groupe
Etat islamique (EI) vendredi, l'avait interpellée au cours d'un passage à
Carcassonne. "Il est sorti du café, il est venu en vitesse, il m'a appelée
par mon prénom et par mon nom, il a mis sa capuche et il m'a dit +pourquoi vous
mentez ? Pourquoi vous dites que vous portez le foulard en signe de deuil
?+" "J'ai dit: +je mens pas, je n'ai pas peur, je porte ce foulard
depuis que j'ai perdu mon fils+. Et il m'a dit : +continue comme ça, ma mère,
et tu verras+".
"Il m'a fait peur sur le
coup, il m'a mis la main sur le dos, je pouvais rien faire", a ajouté Mme
Ibn Ziaten. "Il m'aurait tué, ça c'est sûr", s'il n'y avait pas eu du
monde autour, pense-t-elle. "Pour lui, "je suis une mauvaise
musulmane parce que je m'habille à l'occidentale".
LIRE AUSSI :
Mayotte: le renvoi d'immigrants illégaux vers les Comores
possible (27.03.2018)
- Par Le Figaro.fr avec AFP
- Mis à jour le 27/03/2018 à 19:46
- Publié le 27/03/2018 à 19:43
Le ministre français de
l'Intérieur, Gérard Collomb, a affirmé aujourd'hui que son homologue
comorien avait rouvert "la possibilité de renvoyer un certain nombre"
d'immigrants illégaux de Mayotte vers les Comores, au moment où les tensions
sont vives entre Paris et Moroni sur la question migratoire.
"J'ai pris contact avec mon
collègue, ministre de l'Intérieur des Comores qui avait cessé d'accueillir tout
retour. Il vient de rouvrir la possibilité de pouvoir renvoyer un certain
nombre d'illégaux", a déclaré Collomb devant le Sénat. "C'est déjà un
premier pas dont je me félicite", a ajouté le ministre de l'Intérieur.
Selon l'entourage de Collomb, le ministre comorien, Mohammed Daoudou, "a
publié un arrêté pour faciliter le retour des Comoriens en situation
irrégulière souhaitant revenir aux Comores". Un transfert a eu lieu hier
(lundi), a-t-on précisé. Le gouvernement comorien n'a pas officiellement
confirmé ces informations.
Les tensions sont vives
actuellement entre Paris et Moroni sur la question de Mayotte: cette île
française de l'océan Indien est agitée depuis un mois par un mouvement social
qui dénonce l'insécurité et l'immigration clandestine venue des Comores. Les
autorités ont multiplié dernièrement les expulsions de Comoriens sans papiers.
Moroni a riposté mercredi dernier en refusant de laisser rentrer sur son
territoire ses citoyens refoulés. Mais elles ont promis vendredi un
renforcement des mesures de sécurité sur l'île d'Anjouan, principal point de
départ des immigrants clandestins vers Mayotte, notamment pour
"traquer" les passeurs.
Hier, l'ambassadeur des Comores
en France a été convoqué au ministère des Affaires étrangères. Il "a été
rappelé" à M. Mohamed Soulaimana "la grave préoccupation quant aux
conséquences pour Mayotte des mesures notifiées la semaine dernière par les
autorités comoriennes", a indiqué le ministère des Affaires étrangères.
"Nous réitérons fermement notre demande de levée immédiate de ces mesures
qui empêchent le retour de ressortissants comoriens entrés irrégulièrement à Mayotte",
a déclaré la porte-parole du ministère, Agnès von der Mühll.
LIRE AUSSI :
Italie: un navire d'ONG saisi par la justice (27.03.2018)
- Par Le Figaro
- Mis à jour le 27/03/2018 à 22:27
- Publié le 27/03/2018 à 20:32
Un juge italien a confirmé
aujourd'hui le placement sous séquestre du navire d'une ONG espagnole
soupçonnée d'aide à l'immigration clandestine, tout en limitant les poursuites
possibles, a-t-on appris auprès de l'avocate de l'ONG. Après une opération de
sauvetage au cours de laquelle les secouristes de Proactiva Open Arms ont
refusé de confier aux gardes-côtes libyens des migrants secourus au large de la
Libye, trois responsables de l'ONG risquent des poursuites et son bateau,
l'Open Arms, est bloqué au port sicilien de Pozzallo.
Saisi par l'ONG, un juge a
maintenu le placement sous séquestre du navire mais n'a gardé comme chef
possible de poursuite que l'aide à l'immigration clandestine, rayant celui
d'association de malfaiteurs. Cette décision a pour effet de retirer l'enquête
au parquet général de Catane, dont le procureur Carmelo Zuccaro avait multiplié
les déclarations fracassantes contre les ONG l'an dernier, pour la ramener au
parquet local de Raguse. L'opération de sauvetage controversée a eu lieu le 15
mars, lorsque les gardes-côtes italiens ont signalé à l'Open Arms deux
embarcations en détresse à 73 milles nautiques au large de la Libye, avant de
préciser que Tripoli prenait la coordination des opérations.
» LIRE AUSSI : Méditerranée
: la justice italienne séquestre le navire d'une ONG d'aide aux migrants
L'Open Arms a commencé à secourir
les migrants puis a refusé de les transférer à une vedette libyenne arrivée
plus tard. La justice italienne estime que les migrants auraient dû débarquer à
Malte, le port le plus proche, et reproche à l'Open Arms d'avoir tout fait pour
les conduire en Italie, ce à quoi l'ONG répond que Malte n'accepte que les
urgences médicales. La décision du juge révèle aussi que c'est un navire de la
marine italienne, présent à Tripoli, qui a prévenu les gardes-côtes libyens de
la présence des embarcations en détresse. Pour le député radical Riccardo Magi,
cette participation active de la marine italienne aux opérations des
gardes-côtes libyens constitue un refoulement illégal dans la mesure où une
partie des migrants sur les canots - 40% en moyenne - ont droit au statut de
réfugié ou à la protection humanitaire.
En 2012, la Cour européenne des
droits de l'Homme avait condamné l'Italie pour avoir renvoyé des migrants en
Libye en 2009, avant même que leur situation dans le pays ne vire au cauchemar
après la chute de Mouammar Kadhafi. En Espagne, le blocage de l'Open Arms a
suscité un mouvement de soutien autour du slogan : "Sauver des vies n'est
pas un crime". Des centaines de personnes ont manifesté samedi, une
pétition sur le site internet Change.org a recueilli plus de 258.000 signatures
et l'ONG a reçu l'appui des acteurs Penelope Cruz et Javier Bardem.
LIRE AUSSI :
Meurtre d'une octogénaire à Paris : les deux suspects mis en
examen (25.03.2018)
- Mis à jour le 27/03/2018 à 17:48
- Publié le 25/03/2018 à 22:35
Paris : un suspect placé en
garde à vue après la mort d'une octogénaire juive
Un suspect a été interpellé dans
la nuit de dimanche à lundi, après la découverte du corps d'une octogénaire de
confession juive, poignardée dans son appartement partiellement incendié dans
le onzième arrondissement de Paris.
VIDÉO - Les deux hommes ont
été mis en examen mardi pour «homicide volontaire» à caractère antisémite,
quatre jours après le meurtre d'une femme de confession juive dans son
appartement parisien.
Ce mardi matin, les deux suspects
arrêtés pendant le week-end pour le meurtre d'une octogénaire ont été mis en
examen pour «homicide volontaire à raison de l'appartenance vraie ou supposée
de la victime à une religion et sur personne vulnérable». Ils ont également été
placés en détention provisoire. Lundi en fin d'après-midi, le parquet de Paris
avait indiqué retenir le
caractère antisémite. Dans la soirée, les deux suspects avaient été déférés
devant un juge d'instruction
Le
corps de Mireille Knoll, 85 ans, a été retrouvé lardé de coups de couteau et en
partie brûlé, vendredi peu avant 19h00 dans son appartement incendié du XIe
arrondissement où elle vivait seule. Les pompiers ont été alertés par une
voisine après le début de l'incendie. Cette mort a suscité une vive émotion au
sein de la communauté juive à laquelle appartenait la victime.
Mobile encore inconnu
Les policiers se sont rapidement
orientés vers la piste criminelle, après la découverte de plusieurs départs de
feu dans l'appartement, puis de traces de coups de couteau sur le corps de la
victime, selon une source proche du dossier. Sa dépouille a été retrouvée sur
son lit par les pompiers quelques minutes après leur entrée dans son
appartement, situé au deuxième étage d'un immeuble qui en compte dix.
L'incendie, d'ampleur moyenne, a été maîtrisé en une quarantaine de minutes,
selon la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP).
À la police, un membre de la
famille de Mireille Knoll a dit soupçonner un voisin qui avait l'habitude de
venir la voir et était passé dans l'appartement dans la journée. C'est cet
homme, né en 1989, qui a été placé samedi en garde à vue. «Apparemment, ma mère
le connaissait très bien et le considérait comme un fils», a déclaré à l'AFP le
fils de la victime.
«Nous sommes vraiment tous sous
le choc. Je ne comprends pas comment on peut tuer une femme qui n'a pas
d'argent, et vit dans un HLM», a ajouté le fils de la victime. Cette affaire
suscite l'émotion au sein de la communauté juive française, déjà
mobilisée ces derniers mois après le meurtre de Sarah Halimi, une juive
orthodoxe de 65 ans tuée à Paris par son voisin en avril 2017. Après des mois
de bras de fer judiciaire, le caractère antisémite du meurtre a finalement été
retenu début mars par la juge d'instruction.
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Meurtre de Mireille Knoll: une «marche blanche» ce mercredi
(27.03.2018)
- Mis à jour le 28/03/2018 à 09:30
- Publié le 27/03/2018 à 19:52
Malek Boutih : «Les juifs ne
sont pas en sécurité en France»
Malek Boutih, ancien député PS et
ex-Président de SOS Racisme a exprimé sur France Inter son inquiétude après
l'assassinat de Mireille Knoll, une octogénaire juive à Paris.
VIDÉO - L'ensemble des
courants politiques devrait être représenté lors de l'hommage rendu à cette
femme juive de 85 ans, ce mercredi à 18h30, à Paris. «Ni Jean-Luc Mélenchon et
les insoumis ni Marine Le Pen et le FN ne seront les bienvenus», a toutefois
déclaré le président du Conseil représentatif des institutions juives de
France.
Le meurtre, vendredi à Paris, de
Mireille Knoll, une femme juive de 85 ans qui avait échappé à la rafle du Vél
d'Hiv', a ému et indigné l'opinion publique et la classe politique. Alors
que deux
suspects ont été mis en examen pour homicide volontaire en raison «de
l'appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion» et «vol
aggravé», plusieurs élus et dirigeants politiques ont annoncé leur
participation à la «marche blanche» qui lui est dédiée ce mercredi. Le Conseil
représentatif des institutions juives de France (Crif), co-organisateur de la
marche, n'a cependant pas souhaité la venue des responsables du Front national
ni du leader des Insoumis et ses troupes.
Le FN mis à l'écart
Le président du Sénat (LR) Gérard
Larcher participera à cette marche, qui doit démarrer à 18h30 place de la
Nation à Paris jusqu'au domicile de Mireille Knoll, dans le XIe arrondissement.
Le président de LR, Laurent Wauquiez, sera également présent «pour dénoncer ce
crime odieux et la banalisation du nouvel antisémitisme», invitant «ceux qui partagent
les valeurs des Républicains» à le rejoindre, selon un tweet.
La maire de Paris, Anne Hidalgo
(PS), et la présidente du conseil régional d'Ile-de-France, Valérie Pécresse
(LR), viendront aussi, ainsi que le président de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde,
l'ancien ministre de l'Intérieur Matthias Fekl, ou encore le secrétaire
national du PCF, Pierre Laurent. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure,
participera à un rassemblement similaire à Toulouse. Le délégué général de La
République en marche (LaREM), Christophe Castaner, a appelé les adhérents du
mouvement présidentiel à participer à la marche.
«Le Front national n'est pas
souhaité.
Francis Kalifat, président du
Crif.
En revanche, la présidente du FN,
Marine Le Pen, n'y sera pas. «Le Crif refuse que nous venions sinon je serais
bien évidemment allée à cette marche blanche avec d'autres députés FN», a
déclaré à l'AFP Marine Le Pen. «Le Front national n'est pas souhaité» à cette
marche a en effet déclaré à l'AFP le président du Crif, Francis Kalifat. Dans
un communiqué publié dans la soirée, le FN, «nonobstant le message
discriminatoire incompréhensible du Crif», «appelle ses adhérents et ses
sympathisants à se joindre à la marche blanche organisée en hommage à Mme
Mireille Knoll». Le député FN Louis Aliot, membre du bureau exécutif du FN, a
estimé dans un tweet que le Crif «s'opposait d'une manière sectaire aux vrais
ennemis de l'islamisme plutôt qu'à l'islamisme lui-même».
Francis Kalifat : «Les
symboles de cette haine des juifs dans notre pays ne peuvent pas être présents»
Le président du CRIF ne souhaite
pas la venue de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon à la marche blanche
qu'il organise en hommage à Mireille Knoll.
Jean-Luc Mélenchon, qui avait
prévu de venir, n'échappe pas à la polémique. Dans un premier temps, le patron
du Crif a estimé que le chef de file de la France insoumise pourrait se rendre
à la manifestation, et se mettre «où il veut dans le cortège», tout en relevant
une «contradiction» entre sa présence et son soutien au «boycott d'Israël BDS»
qui exprimerait, selon le responsable communautaire, «une haine de l'Etat
d'Israël et des juifs». Mais dans la soirée, Francis Kalifat a durci sa
position en déclarant le leader des Insoumis et ses troupes persona non grata:
«Soyons clairs, ni Jean Luc Mélenchon et les insoumis ni Marine Le Pen et le FN
seront les bienvenus demain», a-t-il écrit dans un tweet.
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Au lendemain d'un vendredi meurtrier à Gaza, l'armée
israélienne sur la défensive (31.03.2018)
L'ONU et l'UE ont réclamé une
enquête «indépendante et transparente» sur les évènements de vendredi au cours
desquels au moins 16 Palestiniens ont été tués et plus de 700 autres blessées
par balles par Tsahal.
De notre correspondant à Jérusalem
Le bilan est lourd. Au
lendemain des
vastes rassemblements organisés dans la bande de Gaza à l'occasion de la
Journée de la terre, on dénombre au moins seize Palestiniens tués par
balles. Selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza, 1400 personnes ont
été blessés, dont plus de la moitié par des tirs à balles réelles.
Le secrétaire-général des Nations
unies, Antonio Gutteres, a réclamé une enquête «indépendante et transparente»
sur ces évènements. «Il y a une crainte que la situation puisse se détériorer
dans les prochains jours», a mis en garde un haut responsable de l'organisation
en marge d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité. L'Union européenne a
également demandé qu'une «enquête indépendante et transparente» soit menée. Les
dirigeants palestiniens, tout comme la Turquie, ont dénoncé «un usage
disproportionné de la force». Les autorités égyptiennes ont condamné «les
violences contre des civils désarmés qui participaient à une marche pacifique».
Le premier ministre israélien,
lui, a félicité ses soldats, expliquant «qu'Israël agit fermement et avec
détermination pour protéger sa souveraineté et la sécurité de ses citoyens»,.
Une
fois le fracas interrompu et la poussière retombée, les participants à
cette «grande marche du retour» ont mis en ligne les vidéos tournées vendredi
avec leur téléphone. L'une d'elles, filmée à l'est de Beit Lahya, a aussitôt
inondé les réseaux sociaux. On y voit un jeune homme vêtu d'un jeans et d'un
pull noir qui court, un pneu à la main, pour tenter d'échapper aux balles des
tireurs d'élite israéliens. Une détonation claque, puis une seconde et le
garçon tombe à terre. D'après ses amis, dont le témoignage a été confirmé par
les secouristes palestiniens, Abdel Fattah Abdel Nabi est mort sur le coup. À
en juger par ce document, l'homme âgé de 18 ans ne présentait aucun risque
immédiat pour les militaires qui l'ont abattu.
L'armée israélienne, gênée par la
diffusion d'images au contenu troublant, a appelé samedi à les considérer avec
prudence. «Ces documents diffusés par le Hamas sont sortis de leur contexte et
nous ne savons rien du lieu ni du moment où elles ont été tournées», a insisté
le lieutenant-colonel de réserve Peter Lerner, ancien porte-parole militaire,
qui a été rappelé spécialement pour l'occasion. Réfutant toute perte de
contrôle sur les évènements, l'armée a résumé sur Twitter: «Hier nous avons vu
30.000 personnes. Nous étions préparés et avions mobilisé des renforts. Tout
s'est déroulé de façon précise, mesurée et nous savons où chaque balle a
atterri». Le porte-parole s'est toutefois refusé à dévoiler le nombre de
projectiles tirés durant la journée.
«Tirer sur des manifestants
qui ne portent pas d'armes est illégal»
L'ONG israélienne B'Tselem
Calé sur la grille de lecture
adoptée plusieurs jours avant le rassemblement, Peter Lerner affirme que «le
Hamas a encouragé des milliers de Palestiniens à se diriger vers la clôture de
façon coordonnée pour l'endommager ou jeter des pierres et des cocktails Molotov
sur nos forces». L'armée, rappelle-t-il, avait clairement indiqué qu'elle
n'hésiterait pas à ouvrir le feu contre ceux qui s'approcheraient trop. L'État
hébreu considère, en vertu de l'accord de cessez-le-feu négocié à la fin de
l'été 2014, qu'il est dans son droit en faisant respecter par la force une
«zone tampon» de 300 mètres le long de la clôture. Le porte-parole militaire a
diffusé vendredi soir plusieurs vidéos sur lesquelles on voit des Palestiniens
jeter des pierres, brûler des pneus ou tenter de franchir la clôture. Deux
hommes auraient aussi ouvert le feu en direction des soldats avant d'être
abattus.
Les Palestiniens soulignent pour
leur part que les organisateurs avaient appelé à un rassemblement pacifique et
que la grande majorité des participants sont restés à plusieurs centaines de
mètres de la clôture. Tout au long de l'après-midi, des groupes de jeunes
hommes s'en sont certes approchés - certains pour planter un drapeau, d'autres
pour lancer des projectiles vers la clôture. Le Hamas a précisé samedi que cinq
des seize tués étaient affiliés à sa branche militaire. «Mais tirer sur des
manifestants qui ne portent pas d'armes est illégal, dénonce l'ONG israélienne
B'Tselem, et tout ordre donné à cette fin l'est également.»
Samedi à Hébron, des heurts ont
éclaté entre jeunes palestiniens et forces armées israéliennes. - Crédits
photo : HAZEM BADER/AFP
Samedi, des milliers de
Palestiniens ont participé aux obsèques des manifestants tués la veille. Seuls
quelques centaines de manifestants sont retournés samedi après-midi sur
plusieurs zones près de la frontière avec Israël pour poursuivre le mouvement
de protestation appelé «la marche du retour». Cette marche, organisée par des
activistes indépendants avec le soutien du Hamas, doit se poursuivre pendant
six semaines et culminera le 15 mai lors de rassemblements commémorant la
«catastrophe» («Nakba») subie par les Palestiniens lors de la création de
l'État d'Israël en 1948.
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Radicalisation: 20 étrangers expulsés en 2017 (31.03.2018)
Vingt étrangers radicalisés en
situation régulière ont été expulsés du territoire français en 2017, a affirmé
Gérard Collomb à Ouest-France dans un entretien paru aujourd'hui. Un
chiffre "jamais atteint auparavant", selon le ministre de
l'Intérieur.
Gérard Collomb était
interrogé sur les expulsions d'étrangers radicalisés, à nouveau réclamées par
la droite et l'extrême droite après les attentats jihadistes qui ont fait
quatre morts dans l'Aude le 23 mars. "Déjà le cas !", a-t-il aussi
répondu sur Twitter samedi, qualifiant le chiffre de 20 expulsions de
"record", sans donner plus de détails notamment sur la nationalité
des expulsés.
Dans son entretien à Ouest-France,
le ministre de l'Intérieur a aussi estimé que les attaques à Trèbes et
Carcassonne étaient "difficilement prévisible(s)". Leur auteur, Radouane
Lakdim, était inscrit au FSPRT (Fichier des signalements pour la
prévention et la radicalisation à caractère terroriste) depuis novembre 2015
mais les investigations n'avaient montré "aucun signe laissant présager un
passage à l'acte". La Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI)
lui avait envoyé en mars une lettre de convocation pour un entretien d'évaluation
: "elle souhaitait s'assurer qu'il ne présentait plus de signe de
radicalisation avant que son dossier ne soit éventuellement mis en
veille", a indiqué le ministre.
Face aux critiques de
l'opposition qui demandent des mesures plus sévères à l'encontre des individus
fichés, Gérard Collomb a par ailleurs estimé que "mettre en prison
les 26.000 fichés S, ou ceux qu'on jugerait dangereux" était
"impossible".
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Vaincre la mort par l'amour (30.03.2018)
TRIBUNE - Pour le Père Matthieu
Rougé, curé de Saint-Ferdinand des Ternes*, le sacrifice d'Arnaud Beltrame
éclaire particulièrement la fête de Pâques.
Étonnante semaine sainte dans
notre pays cette année: commencée dans la violence meurtrière d'un nouvel
attentat mais éclairée par le sacrifice désintéressé d'un serviteur humble et
généreux. Les Rameaux auraient pu se limiter à un moment de nostalgie vaguement
superstitieuse: ils ont révélé à nouveau la profondeur du besoin de salut de
notre humanité blessée. Pâques aurait pu n'être que la fête des
chocolatiers: elle met en lumière, par le témoignage d'un homme qui bouleverse
tous nos contemporains, la puissance de l'amour, décidément plus fort, en dépit
des apparences, que la haine et la mort. La mort et la résurrection du Christ
ne constituent pas un événement du passé, elles dévoilent la vérité du présent.
Retrouver le sens de la foi
C'est cette découverte sans doute
qui avait conduit Arnaud
Beltrame, comme en ont témoigné ses plus proches, à redémarrer
dans la foi à trente ans passés par la première communion, la
confirmation et la
préparation au sacrement du mariage. Voilà une histoire bel et bien
caractéristique de l'époque spirituelle que nous traversons en France
aujourd'hui: beaucoup, étourdis ou divertis par le tourbillon
contemporain, se désintéressent des questions spirituelles, de nombreux
observateurs prétendant faire autorité se moquent des croyants ou les
dénigrent. Mais, malgré cela, des
hommes et des femmes font le choix résolu de croire vraiment. Leur vie
en est transformée et illumine ceux qui les entourent.
Des hommes et des femmes font
le choix résolu de croire vraiment. Leur vie en est transformée et illumine
ceux qui les entourent
Encore faut-il qu'ils se laissent
illuminer. Le père
Jacques Hamel, le colonel Beltrame et, d'une manière différente mais
analogue,Mireille
Knoll : ces vies et ces morts suscitent une
émotion unanime et magnifique. Mais sur quoi déboucheront les
larmes et les cris d'admiration? N'aurons-nous pas oublié à la Trinité
- «mironton, mironton, mirontaine…» -, ou même avant, ce qui nous
faisait pleurer à Pâques? La volatilité et la surabondance des informations
sont telles qu'elles paraissent nous protéger, si l'on peut dire, de toute
remise en cause spirituelle, au point de nous condamner à l'éternel retour du
cercle vicieux de la violence et de l'émotion en fait superficielle. «L'homme
de ce temps a le cœur dur et la tripe sensible», avertissait Bernanos avec
sa lucidité coutumière.
Au caractère désespérant de la
violence récurrente semble donc s'ajouter le caractère désespérant de notre
incapacité à verser autre chose que des larmes de crocodiles. «Le démon de mon
cœur s'appelle: “À quoi bon?”» écrivait aussi Bernanos: à quoi bon lutter
contre la violence puisqu'elle aura manifestement toujours le dernier mot? À
quoi bon donner sa vie, puisque aucune vie offerte ne peut visiblement juguler
l'escalade de la haine et de la mort? L'acte de bravoure et de générosité
d'Arnaud Beltrame ne relève-t-il pas d'un
sens de l'honneur et du panache en réalité déraisonnable, suranné
et finalement vain?
Une vie ne parvient à son
accomplissement que lorsqu'elle se donne totalement par amour
On ne peut assumer et éclairer
ces questions qu'en prenant au sérieux la profondeur du mystère de la vie. Une
vie ne parvient à son accomplissement que lorsqu'elle se donne totalement par
amour. Constamment, l'homme contemporain redoute de se perdre en se donnant. Le
Christ mort et ressuscité, vainqueur de la mort par l'amour - par l'amour
qui va «jusqu'au bout» (Jean 13, 1) -, délivre de cette peur ceux qui
le veulent bien et leur ouvre le chemin du bonheur véritable. Car, au-delà de
ses effets visibles immédiats, une vie vraiment donnée porte toujours des
fruits de joie et de paix, alors qu'une vie superficielle est, par inconscience
ou par lâcheté, complice de la violence. La violence engendre la violence, mais
la lâcheté la laisse prospérer. L'amour seul, qui n'est pas exclusif d'une
fermeté sereine, peut parvenir à désarmer, à désamorcer la violence.
» LIRE AUSSI - Arnaud
Beltrame, un officier, un héros, un chrétien
Nous n'avons donc plus le choix
ou plutôt nous n'avons qu'un seul choix, comme le disaient déjà les premières
pages de la Bible: choisir la vie ou la mort (Deutéronome 30, 19). Ou bien
nous choisissons la profondeur de l'amour qui se donne et nous devenons des
serviteurs de la vie, ou bien nous nous laissons aller à la violence ou à la
facilité, et nous sommes, d'une manière ou d'une autre, acteurs ou complices de
la mort. Notre époque n'aime guère les choix radicaux et se méfie des «jusqu'au
boutistes». Il n'y a de fait qu'un seul «jusqu'au boutisme» qui vaille: celui
de l'amour. À l'«à quoi bon vivre?», à l'«à quoi bon risquer sa vie?», qui
taraude, voire désespère, l'homme contemporain, la résurrection du Christ
répond par le triomphe toujours possible du «jusqu'au bout» de l'amour. Ce
triomphe est un appel. Qui l'entendra?
* Professeur au Collège des
Bernardins.
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Natacha Polony : «Le terreau de l'héroïsme et celui de la
lâcheté» (30.03.2018)
CHRONIQUE - Le réarmement moral
de notre pays passe par la certitude, de la part des professeurs, que leur rôle
n'est pas de «former l'esprit critique» mais d'émanciper par des savoirs
universels, qui seuls permettent de penser librement, et de sensibiliser à la
beauté, à la grandeur, à la fraternité.
Il est des moments dans
l'histoire d'un peuple où les mots sont le premier pas d'une reconquête, où le
verbe se fait action. «Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française
ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas.» Sans doute le président de la
République, à l'heure de prononcer l'éloge
funèbre du colonel Beltrame, avait-il en tête ces jours où, par le
pouvoir des mots, une idée s'est mise à exister, celle de la perpétuation de la
France.
Pour la première fois depuis
longtemps, les Français ont entendu un chef de l'État sortir des discours
compassionnels et lénifiants. Un chef de l'État qui a prévenu les adeptes du
néant: ils ont choisi «une mort lâche» et «seront pour longtemps la honte de
leur famille, la honte de nombre de leurs coreligionnaires». Ils n'auront pas
notre haine, certes, mais ils auront notre mépris. Et l'opprobre de tout un
peuple. Mots inutiles? Absolument pas. Car ils signent la fin de la culpabilité
malsaine, la fin des excuses psychologiques et sociales dans lesquelles la
France s'est tant complu.
Plus encore Emmanuel Macron a su
enfin, au nom des Français, parler de celui qui est allé «au bout de sa vérité
d'homme, de soldat, de chef». Oui, un de nos dirigeants se souvient ce que
signifie être un chef. Et il tente de nous enjoindre à nous inscrire dans ce
projet commun qui consiste à affirmer que, «pour ne pas manquer aux autres, il
faut ne pas se manquer à soi-même» et que «la France mérite qu'on lui donne le
meilleur de soi». Ces mots sont-ils ceux qui allumeront la flamme de la
résistance à «l'ennemi insidieux», la résistance, surtout, à notre propre
lâcheté qui nous a fait proclamer que le plus urgent était de continuer à «boire
des verres en terrasse» et vivre comme avant, pour que les
terroristes ne «gagnent pas»?
La question qui se pose à nous
est vertigineuse. Nul ne sait s'il saurait faire montre, face au danger, d'un
courage physique qui surgit du fond de l'âme et des tripes. Mais le premier
entraînement à cette disposition si rare est le courage intellectuel. La
capacité à affronter les lâchetés idéologiques de ceux qui, depuis tant
d'années, ont pris l'habitude de battre leur coulpe sur le dos de la France et
de son peuple pour prouver à tous qu'ils sont des gens bien.
De quoi souffre donc cette
France travaillée par des forces centrifuges ? Du rejet de ces récits, de
l'éradication de ses héros
Les jours derniers nous ont
montré l'aspiration collective à la grandeur. Car, si le courage demeure une
des dimensions mystérieuses de notre être, il est un terreau dont il peut se
nourrir. Il ne s'agit nullement de s'imaginer que l'on va créer un peuple de
héros. Aucune éducation ne le peut. Mais il est des principes éducatifs qui
créent des foules de lâches ou d'indifférents, et même d'âmes en déshérence. Un
être humain se forge à travers des modèles, et toute société construit les
siens grâce à des récits collectifs qui portent les valeurs communes. De quoi
souffre donc cette France travaillée par des forces centrifuges? Du rejet de
ces récits, de l'éradication de ses héros. Depuis des décennies, la figure du
héros est réduite à celle du malheureux mourant dans les tranchées de 14 pour un
bout de colline ou la gloriole d'un général. Depuis des décennies, on convainc
nos enfants qu'il n'est pas de noblesse à mourir pour sa patrie. C'est une
insulte à tous ces héros qui, malgré la peur, malgré l'abjection et le
non-sens, sont sortis de la tranchée parce que ne pas le faire, c'était laisser
leur terre, leur famille, leurs concitoyens privés de souveraineté, sous le
joug d'une puissance étrangère.
Il est des mesures immédiates à
prendre pour répondre aux attaques qui nous frappent. Et la première est sans
doute d'expulser
immédiatement les étrangers radicalisés, pour simplement rappeler que
nous n'avons aucune raison d'accueillir ceux qui nous haïssent. Mais il est un
travail de fond à mener pour le réarmement moral de notre pays, et il passe par
un retour dans nos classes de l'admiration pour le beau, de l'exaltation pour
la grandeur. Il passe par la certitude, de la part des professeurs, que leur
rôle n'est pas de «former l'esprit critique» - slogan devenu le cache-misère
masquant le résultat sur de nombreux élèves: un mélange de scepticisme
complotiste et d'obscurantisme crasse - mais d'émanciper par des savoirs
universels, qui seuls permettent de penser librement, et de sensibiliser à la
beauté, à la grandeur, à la fraternité, à tout ce qui sert notre humanité
commune.
Un professeur a raconté comment
ses élèves, exaltés par le destin d'Arnaud Beltrame, ont affiché son portrait
sur toutes les portes de leur lycée. Dix minutes plus tard, les feuilles
avaient été arrachées: affichage sauvage. Ou comment certains se cachent
derrière le respect du règlement pour maquiller leur peur d'assumer, face à
d'éventuels perturbateurs, les valeurs de la Nation.
Un lieutenant-colonel de
gendarmerie grandi dans l'admiration des grandes figures françaises vient de
nous rendre notre fierté. Sa victoire, notre victoire, sera que tous les jeunes
Français, de quelque origine et de quelque religion qu'ils soient, puissent eux
aussi nourrir cette admiration et s'identifier à des êtres dont la grandeur
dépasse les appartenances. Encore faut-il que les adultes soient à la hauteur
de notre jeunesse, en ne trahissant pas leur devoir de transmettre.
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«Notre âme n'a pas changé. Ce qui la perturbe, oui !»
INTERVIEW - Face à une société
hédoniste et sans transcendance, le psychanalyste, chrétien engagé, invite
chacun à soigner davantage son « écologie intérieure ».
C'est un psychanalyste-thérapeute
hors norme. Biologiste médical, ancien interne des hôpitaux de Paris, diplômé
de l'Institut Pasteur, Jean-Guilhem Xerri s'est aussi longtemps et directement
engagé auprès des gens de la rue. Cette triple expérience, scientifique,
humanitaire et… spirituelle - il avait reçu le prix humanisme chrétien pour son
premier livre À quoi sert un chrétien?- le conduit aujourd'hui à
ouvrir une nouvelle voie dans le monde de la thérapie psychique et
psychologique qui n'est pas fermée à la dimension spirituelle et à la
méditation. C'est le sens de l'ouvrage, accessible et substantiel, qu'il vient
de publier au Cerf, Prenez soin de votre âme. Petit traité d'écologie
intérieure.
LE FIGARO. - Vous posez le
diagnostic d'une société de plus en plus assistée par la technique mais
souffrant d'un «malaise intérieur»…
Jean-Guilhem XERRI. - L'homme
fait violence à sa propre nature! Extérieure, environnementale et intérieure.
Il se réduit à ses seuls aspects biologiques et psychologiques, ignorant sa
composante spirituelle, son intériorité, ce souffle intérieur qui l'habite. À
cela s'ajoute une société hédoniste, consumériste, techniciste et sans
transcendance que tous les observateurs dénoncent. Tout cela aliène notre
équilibre intérieur. Et nous entretient dans l'illusion que le bonheur est
extérieur dans une quête infinie de technologie et de consommation. Or le
bonheur réside en notre intérieur. Au malaise intérieur donc, je réponds par
l'écologie intérieure! Elle consiste à respecter et à prendre soin de notre vie
intérieure.
Pour utiles qu'elles soient -
vous êtes psychanalyste-thérapeute -, les thérapies psychologiques pour un
«mieux-être» sont limitées?
Mal-être, souffrances psychiques,
sexualité triste, dépendance
aux écrans, rapport démesuré au travail, perte de sens, solitude… Ces manifestations
pointent toutes vers la souffrance de nos âmes. Les psychothérapies et la
pharmacologie sont précieuses et indispensables, mais elles ne permettent pas
toujours de la «guérir». Et pour cause, souvent ces troubles ont leur origine
au plus profond de nous, au-delà de notre biologie et de notre mental. Ils
renvoient à des tensions intérieures que les plus grandes traditions
spirituelles de l'humanité ont identifiées, explorées et accompagnées. Mais ce
soin ne relève pas seulement d'un traitement. Il implique nos modes de vie et
les sagesses. Pour traiter de «psy et d'intériorité», il faut donc mobiliser la
biologie, la psychologie et la philosophie.
Vous osez utiliser le mot
«âme» dans le titre de votre livre. Ce mot est pourtant tabou?
À l'aube du XXIe siècle, une
nouvelle conception de l'homme est apparue, celle de l'«homme neuronal», pour
reprendre le titre du livre de Jean-Pierre Changeux. Ceux qui définissent notre
nouvelle humanité ne sont plus majoritairement des religieux, des philosophes ou
des psychanalystes, mais des biologistes, des cognitivistes et des
cybernéticiens. Cette vision de l'homme est naturaliste et matérialiste. Il
apparaît comme un être strictement biologisé, un organisme vivant comme les
autres. À l'extrême, il n'est qu'un corps réduit à son cerveau. L'âme a été
évacuée, coupable de ne pas être visible sur un IRM cérébral!
Cette «âme» est-elle une
réalité ou une illusion?
Ce que la science dit de l'homme
n'est pas faux, mais incomplet. Elle ne pourra jamais saisir son mystère.
Écoutons donc les sagesses. Nos contemporains le sentent bien, eux qui se
tournent de plus en plus vers les spiritualités, notamment orientales. Toutes
les grandes traditions spirituelles reconnaissent cette composante spirituelle
à l'homme. Parmi elles, la tradition chrétienne apporte un éclairage
particulièrement pertinent et utile.
À ce titre vous avez retrouvé
une sagesse perdue, celle des Pères du désert, ces premiers moines chrétiens de
l'histoire qui ont diagnostiqué les «huit maladies de l'âme». Leurs remèdes
sont au cœur de votre livre. Mais n'est-elle pas trop datée et réservée aux
chrétiens?
Clairement, non. Un des intérêts
majeurs de l'approche des Pères du désert est qu'elle est fondée sur deux
choses: une anthropologie, c'est-à-dire une connaissance fine de l'anatomie et
de la physiologie intérieures de l'homme. Et sur quatre siècles d'expérience
qui donnent aujourd'hui l'équilibre vécu dans les monastères. Ils nous donnent
ainsi le mode d'emploi de notre âme. Leur sagesse ne requiert pas d'abord
d'adhésion confessionnelle, mais seulement le désir de chercher des réponses à
la question de notre intériorité et de son soin. Les Pères du désert sont des
maîtres de sagesse sûrs. Ils ne sont pas des coachs parmi d'autres. Comme
d'autres l'ont fait pour les maladies du corps, ils ont élaboré une
classification, une démarche de diagnostic et des recommandations
thérapeutiques des maladies de l'intériorité. Si les temps ont donc changé,
notre nature humaine, elle, n'a pas changé!
En quoi la sagesse de ces
ermites et ascètes du IVe siècle peut aider un homme du XXIe siècle?
Notre âme n'a pas changé, mais ce
qui la perturbe, oui! Comme il existe des perturbateurs endocriniens qui
impactent notre physiologie, il existe des perturbateurs de l'intériorité qui
altèrent notre âme. Les Pères du désert nous aident à les repérer: bruit,
images, surconsommation, hyperérotisation, survalorisation du narcissisme,
dictature de la disponibilité permanente, gavage informationnel. Tout cela
conduit à des maladies de l'âme. Les Anciens considéraient que trois d'entre
elles revêtent un relief particulier: les avidités - matérielle, alimentaire et
sexuelle -, le narcissisme et l'acédie (sorte de dépression spirituelle, NDLR).
Aujourd'hui, les symptômes correspondants prennent les visages du matérialisme,
du burn-out, des addictions de masse, de l'hyperactivité, du mal-être, de la
fatigue intérieure. Les Pères nous apprennent concrètement à retrouver du sens,
à être davantage présent à nous-même et à remettre de la lenteur et de la
continuité dans nos vies. «Assieds-toi, fais silence et apaise tes pensées»,
nous prescrit l'un d'eux, Abba Arsène…
L'homme occidental semble tout
avoir, mais que lui manque-t-il pour être vraiment heureux?
Nous avons tout, sauf
l'essentiel. La condition est de nous simplifier, pour sortir des ruminations,
de l'activisme et de la possession. Pour cela, les Anciens nous indiquent le
chemin, qui tient en trois réalités: le
service, la sobriété et la méditation. Autrement dit se tourner
vers les autres, s'alléger et renouer le contact avec ce qui nous habite.
Le bonheur, la paix
intérieure… des leurres?
La paix est plus que l'absence de
guerre, le bonheur est plus que le plaisir. Ils appellent un changement de mode
de vie, qui nous oriente toujours davantage vers l'essence de l'humain, ce
Souffle qui l'habite et le fait vivre. Il est aussi vital que fragile.
Prenons-en soin!
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 31/03/2018. Accédez à sa version
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«Le destin religieux de la France n'est pas indifférent à
celui de l'Église universelle» (30.03.2018)
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Dans son
passionnant ouvrage Comment notre monde a cessé d'être chrétien ,
Guillaume Cuchet, spécialiste d'histoire religieuse, détaille les causes et
l'ampleur de la déchristianisation en France.
LE FIGARO. - Le titre de votre
livre est Comment notre monde a cessé d'être chrétien. De quel
«monde» parlez-vous? Après tout, on pourrait facilement vous objecter que le
christianisme progresse à l'échelle mondiale…
Guillaume CUCHET. - En
effet. Mon objet est le catholicisme français, ce qui ne préjuge pas de ce qui
se passe ailleurs, même s'il ne faut pas oublier qu'au XIXe siècle la
France était la première puissance catholique en termes démographiques et que
les trois quarts des missionnaires catholiques dans le monde étaient français.
Le destin religieux de la France n'est donc pas indifférent à celui de l'Église
universelle. Je ne crois pas à la thèse d'Emmanuel Todd de la «crise terminale
du catholicisme français» lequel, pour un malade à l'agonie, me paraît au
contraire assez en forme. Simplement (mais c'est décisif) le catholicisme a changé
de format de façon spectaculaire et, pour partie, de sociologie. Le titre du
livre attire l'attention sur le fait qu'en devenant minoritaire et en passant
sous une certaine barre statistique, ses effets sociaux et culturels ne sont
plus du tout les mêmes.
«Au XIXe siècle la France
était la première puissance catholique en termes démographiques et les trois
quarts des missionnaires catholiques dans le monde étaient français»
Guillaume Cuchet
De quand date ce grand
effondrement? Pouvez-vous en décrire l'ampleur?
La déchristianisation est une
vieille histoire en France qui remonte au moins à la Révolution. À l'intérieur
de ce processus de longue durée, qui n'a été ni linéaire ni univoque (il y a eu
des phases de reprise religieuse limitées, la dernière en date dans les années
1930-1960), une rupture de pente s'est produite au milieu des années 1960,
d'une importance comparable à celle de la Révolution. Dans les vingt ans qui
ont suivi la Seconde Guerre mondiale, l'Église de France s'est lancée dans des opérations
de comptage des pratiquants massives destinées à éclairer sa pastorale et à
favoriser la reconquête chrétienne du pays. Au seuil des années 1960, elle
avait conclu à la stabilité globale des taux dans la longue durée, moyennant
une pente légèrement déclive, un peu déprimante certes parce qu'on n'arrivait
pas à redresser les courbes, mais qui préservait a priori de toute mauvaise
surprise. Or, au moment même où s'imposaient ces conclusions, vers 1965-1966,
les courbes se sont mises à plonger. Pour illustrer le phénomène, je citerais
simplement deux séries de chiffres. En 1965, 94 % de la génération était
baptisée dans les trois mois après la naissance contre 30 à 35 %
aujourd'hui dans les sept ans ; 25 % des adultes allaient à la messe
tous les dimanches (moyennant des contrastes locaux très importants) contre
moins de 2 % aujourd'hui.
Vous dites que Vatican II a
été le «déclencheur» de l'effondrement de la pratique. Pourquoi?
Je suis reparti des constats
faits à l'époque par le chanoine Boulard qui était le grand spécialiste de ces
questions dans l'Église. Les courbes plongent brutalement autour de 1965,
l'Église perdant du quart au tiers des pratiquants du début des années 1960
(des jeunes surtout) en deux ans. Il faut bien qu'il y ait eu un événement
derrière une telle rupture et on ne voit pas bien quel autre que le
concile pourrait avoir joué ce rôle-là. Mai 1968 a
amplifié une vague qu'il n'a pas créée. On a eu longtemps du mal à en convenir
dans l'Église parce qu'on avait peur, ce faisant, d'apporter de l'eau au moulin
des adversaires du concile qui ont depuis longtemps planté leur drapeau noir
sur cette fâcheuse «coïncidence». Ma thèse est que le concile a non pas
provoqué la rupture au sens où elle aurait pu ne pas avoir lieu sans lui,
puisqu'elle a eu lieu dans les pays protestants et qu'elle procède de causes socioculturelles
plus larges, mais qu'il l'a déclenchée tout en lui donnant une intensité
particulière.
Toute la question - mais combien
complexe - est de savoir ce qui dans le concile (dans ses textes, leur
interprétation, la manière dont ils ont été appliqués, ses effets indirects) a
pu jouer un tel rôle. La réforme liturgique, adoptée dès décembre 1963, a
un peu obsédé la discussion. Elle a masqué à mon avis un changement plus
décisif intervenu dans le sens même de la pratique: la sortie brutale de la
culture de la pratique obligatoire sous peine de péché grave longtemps très
insistante en catholicisme.
Dans la «carte Boulard»
présentant une photographie de la France chrétienne, avant l'effondrement, on
voit des disparités géographiques très importantes. À quoi sont-elles dues?
La première édition de la Carte
religieuse de la France rurale date de 1947. C'est un des documents
les plus fascinants de l'histoire de France. Elle montre à la fois l'ampleur
des contrastes religieux régionaux (sans équivalent ailleurs en Europe) et une
géographie d'ensemble de la France chrétienne très singulière. Un même dimanche
des années 1950, la pratique pouvait varier de 100 % dans un bourg du nord
de la Vendée à 0 % dans le Limousin. En quelques kilomètres on pouvait
changer de monde religieux.
«En 1965, 25 % des adultes
allaient à la messe tous les dimanches contre moins de 2 % aujourd'hui»
Guillaume Cuchet
La France chrétienne recouvrait
tout l'Ouest, le Nord, l'Est lorrain, alsacien, vosgien, le Jura, le Nord des
Alpes, tout le rebord Sud-Est du Massif central (de la Haute-Loire au Tarn ou à
l'Aveyron), le Pays basque et le Béarn. Inversement, une «diagonale du vide»
courait des Ardennes au Sud-Ouest en passant par tout le Bassin parisien et
l'Ouest du Massif central, avec des prolongements dans la vallée du Rhône, le
Languedoc, la Provence. Cette carte est née pendant la Révolution française.
Les pays qui ont accepté la politique religieuse de la Révolution sont
généralement devenus les «mauvais» pays religieux des XIXe et XXe siècles,
et vice versa.
Cette carte est-elle toujours
d'actualité?
Elle n'a pas totalement disparu
mais elle n'existe plus vraiment comme carte de la pratique et des croyances,
plutôt comme carte culturelle et anthropologique. Par exemple dans la carte des
dons du sang en France, ce qui n'est pas tout à fait anodin symboliquement.
Tout un discours dans l'Église
au moment de ce tournant a été de dire que la qualité finirait par l'emporter
sur la quantité, et que c'en était fini d'un christianisme «sociologique».
Quels ont été les effets de ce discours?
On doit cette expression de
catholicisme «sociologique» à Gabriel Le Bras, qui a fondé la sociologie
religieuse dans les années 1930. Le fait que le catholicisme, censé procéder de
convictions intimes, avait une sociologie et une géographie particulières
stables dans la longue durée, montrait l'importance des facteurs collectifs
dans le maintien ou la perte de la foi. Le Bras n'était pas très optimiste sur
la teneur en christianisme «réel» du catholicisme de nombre de ses contemporains.
Le décrochage des courbes dans les années 1960 a souvent été interprété comme
le résultat d'une sorte d'opération vérité au terme de laquelle ne seraient
plus restés dans l'Église que les fidèles vraiment convaincus. Vérité
historique ou philosophie de la misère?
«Gabriel le Bras note qu'en
France, depuis les lendemains de la Révolution, chaque génération de
catholiques a eu plus ou moins le sentiment d'être la première à avoir une foi
vraiment personnelle»
Guillaume Cuchet
C'est bien difficile à dire, mais
l'historien note qu'en France, depuis les lendemains de la Révolution, chaque
génération de catholiques a eu plus ou moins le sentiment d'être la première à
avoir une foi vraiment personnelle! En réalité, c'est le concept même de
religion «sociologique» qui est problématique. Les catholiques d'aujourd'hui,
qu'on ne soupçonnera pas de l'être par pur conformisme social, ne sont-ils pas
eux aussi pour la plupart les enfants d'une certaine «sociologie», s'il faut
entendre par là les efforts accomplis par leurs parents pour leur transmettre
la foi?
L'Église est-elle devenue en
France trop élitiste?
Dans les années 1970, il y a eu
dans l'Église toute une controverse sur la «religion populaire» perçue par les
uns comme une chose positive à préserver et par les autres comme une sorte de
poids mort dont il fallait se débarrasser. Quelles qu'en soient les raisons, le
fait est que le catholicisme populaire «autochtone» a beaucoup diminué parmi
nous.
Guillaume Cuchet, Comment
notre monde a cessé d'être chrétien, Seuil, 288 pages.
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FIGAROVOX/ENTRETIEN - Historien
des idées et des religions, directeur de l'Institut Saint-Serge, Jean-François
Colosimo s'interroge avec courage dans son essai, Aveuglements, sur
la responsabilité des Lumières dans le nihilisme contemporain, dont l'islamisme
djihadiste est, à sa manière, une manifestation. Et insiste sur l'impossibilité
de séparer et d'opposer fondamentalement le politique et le religieux.
C'est un des livres majeurs pour
comprendre notre époque. Aveuglements. Religions, guerres, civilisations (Editions
du Cerf) fait partie de ces essais essentiels qui nous éclairent brillamment
sur le monde comme il ne va plus. Nourri de références philosophiques,
plongeant dans les méandres douloureux de l'Histoire et de la géopolitique,
mais ancré dans l'actualité, il bouscule idées reçues, clichés, erreurs et
fantasmes sur la prétendue nécessaire sécularisation de nos sociétés et l'usage
de la laïcité comme arme absolue face aux intolérances religieuses. Etablit une
filiation troublante mais convaincante entre révolutionnaires français,
nihilistes russes et islamistes contemporains, tous adeptes de la Terreur.
Démontre que «le relativisme libéral continue à sa façon, atomisée, le
caporalisme totalitaire». Balaie le principe selon lequel toutes les religions
se valent. Explique comment «l'utopie de la paix perpétuelle mène à l'enfer de
la guerre perpétuelle». Et en appelle à une démarche authentiquement
spirituelle pour retrouver la (vraie) lumière et effacer notre myopie
volontaire sur les maux qui rongent la France.
«Robespierre, Lénine, Hitler
sont des inventeurs de religions conscients et acharnés.»
«Aveuglements», tel est le
titre de votre livre: de quelle cécité souffririons-nous?
Chaque jour ou presque, en
ouvrant le journal, la radio ou la télévision, nous apprenons que quelqu'un,
quelque part, vient de tuer au nom de Dieu. Au loin, en Irak, au Sahel ou en
Birmanie. Chez nous, au Stade de France, à Nice ou dans l'Aude. Chaque fois,
cette nouvelle nous laisse sidérés. Que reste-t-il des Lumières? De leurs
promesses? Où sont passés la marche du progrès, le triomphe de la raison,
l'émancipation de l'humanité? La religion ne devait-elle pas finir? Et, avec
elle, les archaïsmes, les obscurantismes, les fanatismes? Nous restons les yeux
écarquillés. C'est que le soleil moderne a tourné à l'astre calciné. Il
n'éclaire plus rien. Il est en fait responsable de l'éclipse du sens qui nous
plonge dans le noir.
Comment expliquez-vous alors
ce que les sociologues et les politologues appellent le «retour du religieux»?
En montrant que le religieux n'a
pas eu à revenir parce qu'il n'est jamais parti. Dans le mythe antique,
Prométhée dérobe à Zeus le feu sacré. Dans la légende moderne, il le fabrique.
C'est le temps de l'homme-dieu. Robespierre, Lénine,
Hitler sont des inventeurs de religions conscients et acharnés. Ils expulsent
le christianisme pour le remplacer par des cultes scientistes qu'ils conçoivent
comme rationnels: l'Etre suprême, le matérialisme historique, la surhumanité
biologique. Ils improvisent des credo, des clergés, des communions. Leur
détournement symbolique aboutit à la mort industrielle: la guillotine, le
goulag, Auschwitz. Pourquoi? Parce que, quand on veut faire descendre de force
le Ciel sur la Terre, la régénération des masses n'attend pas. Elle requiert
l'extermination des «dégénérés». Les religions politiques ont été infiniment
plus meurtrières que les religions historiques.
Cette dimension religieuse,
perceptible dans les totalitarismes, s'applique-t-elle aussi bien à nos
sociétés profondément sécularisées?
Ce que l'on nomme la
sécularisation, c'est précisément comment la modernité a divinisé le fait
social. D'abord par le haut, en transférant les attributs de Dieu à l'Etat.
Devenu à son tour souverain, l'Etat se fait transcendant, omnipotent,
omniscient. Il s'arroge le monopole de la loi et de la violence. Il ordonne le
sacré, commande le sacrifice. La IIIe République se dote d'un baptême,
d'un catéchisme, d'un panthéon et survit à l'hécatombe abyssale de la Grande
Guerre par le culte des morts tombés pour la Patrie. Au même moment, les
soviets
«Plus les structures de foi
traditionnelles reculent, plus les communautés de croyance anarchiques
fleurissent.»
embaument Lénine pour l'éternité.
L'aspiration démocratique vient compliquer ce schéma. Dans les sociétés
postmodernes d'opinion et d'abondance comme la nôtre, un deuxième transfert
s'opère. Cette fois, par le bas. L'individu souverain supplante l'Etat
souverain. Tyran auto-couronné, il érige sa subjectivité en droit divin. Il
exerce absolument son arbitraire. Son consumérisme sans limite se révèle comme
la face cachée de son égalitarisme sans frein. Résultat? Plus les structures de
foi traditionnelles reculent, plus les communautés de croyance anarchiques
fleurissent. Le marketing s'étend à la mystique et la spiritualité a ses
supermarchés. On rit de la messe dominicale, mais on lit l'horoscope quotidien.
Le relativisme libéral continue à sa façon, atomisée, le caporalisme
totalitaire. Ce sont les deux faces d'un même nihilisme.
Vous semblez dire que, au
fond, le politique ne fait que singer le religieux, qu'il n'en est que la forme
dégradée…
Non. Mais c'est un de nos
aveuglements que d'opposer le religieux et le politique comme deux sphères
exclusives. Ils ne cessent en fait de se réfléchir l'un et l'autre, selon un
effet de miroir. A Rome, religio désigne le culte de l'empereur, les rites prescrits
dans les temples homologués, les dévotions familiales de rigueur dans le cadre
du foyer. Le mot s'applique au lien objectif qui soude une communauté humaine
en un tout consistant et cohérent. Il renvoie aux représentations invisibles
qui la font s'unir, se dépasser et se transmettre. Le croire personnel et
intime, que recouvre le terme superstitio, est annexe et indifférent dès lors
qu'il ne contrarie pas l'ordre public. Cette religion civique dont a rêvé
Rousseau, le Nouveau Monde en a fait une réalité.Aux Etats-Unis, Dieu figure
sur le dollar, le président jure sur la Bible, le Capitole est un sanctuaire
parlementaire et Thanksgiving, un offertoire populaire. Avec, pour conséquence,
que la mobilisationde la jeunesse au service de guerres lointaines et
idéaliséesbat son plein. Tout un appareil politico-religieux dont l'Union
européenne est incapable et qui explique pourquoi elle est sans frontières,
sans diplomatie et sans armée.
Assisterait-on, dès lors, à la
victoire posthume de Carl Schmitt et de son célèbre concept de «théologie
politique»?
Posant faussement au défenseur du
catholicisme mais véritablement tenté par le nazisme, Schmitt théorise, dans
l'entre-deux-guerres, la dictature de la décision, de l'urgence et de
l'exception. Autrement dit, la primauté de la force. Il ne met pas moins au
jour trois phénomènes modernes qui sont fondamentaux. D'abord, que le
politiquerepose toujours plus sur la logique de l'ami et de l'ennemi. Ensuite,
que les idées politiques prétendumentneuves ne sont jamais que de vieux axiomes
théologiques laïcisés. Enfin, que l'enrôlement des civils et des populations
dans la guerre provoque en retour l'apparition du partisan en armes, qu'il se
veuille réactionnaire ou révolutionnaire. La faute de Schmitt, c'est de naturaliser
ce constat, d'en retirer une doctrine et de la légitimer. Ce judéophobe
viscéral sera, ainsi que je le montre, l'inspirateur des terroristes rouges et
bruns des années 1970 en Allemagne ou en Italie qui influenceront le
développement du djihadisme au Proche-Orient. Significativement, Carlos s'est
converti au sunnisme militant en prison.
Dans votre livre, vous
établissez une parenté directe entre les nihilistes russes du XIXe siècle
et les djihadistes du XXIe siècle. Pensez-vous que l'islamisme ne soit que
le faux nez contemporain d'une «philosophie» plus ancienne?
Mais les nihilistes russes du
XIXe siècle se revendiquent eux-mêmes des terroristes français du
XVIIIe siècle! Si l'on veut établir une généalogie complète, il faut
remonter à Saint-Just avant de redescendre vers Netchaïev et Ben Laden. Le
«populicide» de Vendée, pour reprendrele mot créé par le progressiste qu'était
Gracchus Babeuf, représente le premier projet d'une purification systématique
du corps social où le simple fait d'exister vaut culpabilité, condamnation et
exécution. Réactivant ce principe, la Terreur en actes va causer en Russie,
entre 1895 et 1917,pas moins de 23 000 attentats se soldant
par plusieurs dizaines de milliers de morts avec une tendance croissante au
recrutement en milieu criminel, à l'incitation au geste spontané et à la
liquidation de gens ordinaires. Les confessions de ces tueurs suicidaires
pourraient servir de bande-son aux massacres de mars 2012 à Toulouse, de
janvier et novembre 2015 à Paris. Les djihadistes sont aussi, ne nous en
déplaise, les enfants adultérins de 1793 et 1917.
«C'est encore un aveuglement
typiquement contemporain que d'invoquer une prétendue résurgence du Moyen Age,
forcément ténébreux et barbare, pour expliquer l'avènement de Daech»
Cette double filiation
n'est-elle pas quelque peu exagérée? Les Lumières dont se réclamait la
Révolution ne sont-elles pas justement la meilleure arme à opposer aux
intolérances religieuses, notamment islamiques?
A moins de comprendre et
d'assumer que l'inverse est vrai, on rate l'essentiel. A commencer par la
capacité de riposter. C'est encore un aveuglement typiquement contemporain que
d'invoquer une prétendue résurgence du Moyen Age, forcément ténébreux et
barbare, pour expliquer l'avènement de Daech. Ce trompe-l'œil découle de la
propagande antireligieuse des encyclopédistes. Mais, quoi qu'il en ait été de
l'Inquisition ou de la Saint-Barthélemy, à l'évidence injustifiables, on ne
saurait ignorer que la chasse aux sorcières qui a ravagé l'Europe aux Temps
modernes a été menée non pas par les Eglises mais par les Etats, non pas au nom
de l'Evangile, mais de la Raison. Avec un bilan sans précédent en nombre et en
intensité: de 60.000 à 100.000 suppliciés sur moins d'un siècle,
entre 1560 et 1650. On manifeste la même hémiplégie intellectuelle
lorsqu'on demande aux musulmans de construire un islam des Lumières, modernisé
et réformé. Ils y ont pensé et ils y ont travaillé sans relâche depuis la fin
du XVIIIe siècle et ce à quoi ils ont abouti est très précisément l'islamisme.
L'historien des idées et des
cultures que vous êtes estime-t-il que, de ce point de vue, toutes les
religions se valent?
«L'utopie de la paix
perpétuelle mène sans surprise à l'enfer de la guerre perpétuelle.»
Tous les dieux ne sont pas égaux,
loin s'en faut. C'est là un mirage de plus, favorisé par l'ignorance générale
quant au fait religieux. Si n'importe quelle croyance est à même de secréter sa
propre forme de fondamentalisme, l'islam présente une porosité singulière à
l'islamisme. Une des raisons en est que la foi coranique se constitue
originellement comme un monothéisme politique strict, total, achevé, se voulant
universel tandis que l'Oumma se forge dans le conflit dès ses débuts, puis
connaît la division immédiatement après la mort de Mahomet. D'où cette
ambivalence que pointent les études de l'Institut Pew: aujourd'hui, les
musulmans se montrent les plus coercitifs pour les minoritaires lorsqu'ils sont
majoritaires et les plus contestataires envers les majoritaires lorsqu'ils sont
minoritaires. Le monde musulman n'a pas besoin de plus de politique, mais de
plus de théologie.
Au cours de vos divers essais,
vous avez commenté la «théodémocratie américaine», la «théodicée russe» ou
encore la «théosophie iranienne» pour rendre compte des mutations
géopolitiques. Quelle radiographie planétaire en retirez-vous?
Nous assistons à un conflit
mondialisé entre deux fondamentalismes prosélytes de création moderne et à
prétention globale, l'islamisme sunnite et l'évangélisme américain. On ne
saurait les confondre. Mais, en décrétant lutter pour le Bien, la Liberté,
l'Humanité au cours d'expéditions intitulées «Justice illimitée» ou
«Détermination absolue», les Etats-Unis maximalisent la guerre, diabolisent
l'adversaire et confortent la conception apocalyptique qui l'anime. Au «zéro
mort» du Pentagone répond ainsi le «tous
morts» du califat. C'est une voie sans issue. L'utopie de la paix
perpétuelle mène sans surprise à l'enfer de la guerre perpétuelle. La Russie
orthodoxe et l'Iran chiite, certes peu aimables, représentent des leviers pour
sortir de l'impasse. Que Paris les ait longuement ignorés pour s'aligner sur
Washington a eu pour prix notre impuissance. Or, la France ne peut se résigner
à une telle marginalisation, contraire à sa vocation.
La fin de l'Histoire est-elle
pour demain?
- Crédits photo : ,
L'heure, la Bible y insiste, est
inconnue. Il en va différemment de l'effacement de l'Europe, toujours possible
comme il arriva un jour à Athènes. Mais vers quelle espérance se tourner? La
ministre de la Défense n'a guère été avisée de saluer le «sacrifice suprême» du
lieutenant-colonel Beltrame sans le qualifier: Arnaud Beltrame n'a pas
seulement accompli son devoir de gendarme au point d'en perdre sa vie
terrestre, il a plus essentiellement témoigné de sa foi de chrétien en la vie
éternelle jusqu'à la gagner. Il a démenti le martyre mensonger par son martyre
authentique. Face au nazisme, la poétesse Catherine Pozzi notait déjà
qu'affronter le mal radical requiert moins des héros que des saints. Il y a
pire que la mort et c'est la mort spirituelle. Sans retour à l'eschatologie,
nous disparaîtrons, engloutis sous nos myopies volontaires. Et jamais nous ne
verrons que la nuit épaisse du vendredi saint ne fait que préparer à la
radiance matinale de Pâques.
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La Turquie froissée par la proposition française de médiation
avec les Kurdes (30.03.2018)
Ankara, qui craint la formation
d'une entité autonome à sa frontière, dénonce une aide à des «terroristes».
La réaction turque ne s'est pas
fait attendre. «Qui êtes-vous pour parler de médiation entre la Turquie et une
organisation terroriste?», a lancé, vendredi, Recep Tayyip Erdogan à son
homologue français. Répondant à l'offre d'une médiation française en vue d'un
dialogue entre Ankara et les FDS (Forces démocratiques syriennes), le président
turc s'est dit «extrêmement peiné» par la position «totalement erronée» de
Paris.
«Qu'ils ne s'avisent pas de
nous demander de l'aide quand la France sera pleine de terroristes fuyant la
Syrie et l'Irak après avoir été encouragés par la politique française»
Recep Tayyip Erdogan, président
de la Turquie
Si la coalition internationale
soutient traditionnellement ce groupe de combattants arabo-kurdes, auquel elle
s'est alliée dans la lutte contre Daech sur le territoire syrien, Ankara a
toujours exprimé son hostilité face aux FDS, qu'elle considère comme une simple
façade des YPG. Aux yeux des autorités turques, les milices kurdes YPG ne sont
ni plus ni moins qu'une extension du PKK, le Parti des travailleurs du
Kurdistan, classé comme organisation terroriste. Craignant la formation, à leur
frontière, d'une entité kurde autonome, elles lancèrent en janvier l'opération
«Rameau d'olivier» qui mena à l'expulsion,
le 19 mars, de ces forces de l'enclave syrienne d'Afrine. Revigoré
par cette victoire, le président turc s'empressa alors d'annoncer
vouloir mettre le cap sur Manbij, plus à l'ouest. Une déclaration qui
ne manqua pas d'inquiéter les Américains, présents sur le terrain, mais aussi
la France, soucieuse de trouver une solution à cette guerre dans la guerre
syrienne.
Mais l'entremise de Paris suscite
des grincements de dents. «Au lieu de prendre des mesures susceptibles d'être
interprétées comme conférant une légitimité à des organisations terroristes,
les pays que nous considérons comme amis et alliés doivent prendre fermement
position contre le terrorisme dans toutes ses formes. Les noms divers et variés
ne sauraient cacher la vraie identité d'une organisation terroriste», a déclaré
Ibrahim Kalin, le porte-parole de la présidence turque. «Ceux qui aident les
terroristes et qui les reçoivent dans leurs palais réaliseront tôt ou tard
leurs erreurs. Ils risquent d'être confrontés aux mêmes problèmes que nous
avons connus. Qu'ils ne s'avisent pas de nous demander de l'aide quand la
France sera pleine de terroristes fuyant la Syrie et l'Irak après avoir été
encouragés par la politique française», a également prévenu le président
Erdogan.
«France, retrouve ta place! Tu
ne connais rien à la Syrie!»
Ankara,
dont les relations avec la France s'étaient récemment réchauffées, a
aussi fermement réagi à l'envoi de soldats français à Manbij: un projet annoncé
la veille par Asiya Abdellah, une des représentantes kurdes reçue à Paris - et
que l'Élysée s'est empressé de démentir. «Ceux qui coopèrent avec des groupes
terroristes contre la Turquie (…) et attaquent la Turquie avec eux, recevront
le même traitement que nous infligeons à ces groupes terroristes et seront des
cibles pour la Turquie», a prévenu vendredi le vice premier ministre et
porte-parole du gouvernement turc, Bekir Bozdag. «Nous espérons que la France
ne prendra pas une telle mesure irrationnelle», a-t-il ajouté.
Lors d'un échange téléphonique
avec Jean-Yves Le Drian, son homologue français, le ministre turc des Affaires
étrangères, Mevlut Cavusoglu, a pour sa part signifié son «trouble» face à
l'accueil d'une délégation des FDS à l'Élysée. «L'accueil d'une organisation
terroriste au plus haut niveau est une indication de la politique de deux poids
deux mesures de la France dans sa lutte contre le terrorisme», a-t-il déclaré selon
le quotidien Hurriyet, en rappelant que l'YPG et le PKK sont une
même et unique organisation «responsable de la mort d'environ 40.000 personnes
en Turquie».
L'initiative française a
également été fermement condamnée par le parti turc d'opposition CHP. «France,
retrouve ta place! Tu ne connais rien à la Syrie!», a déclaré son représentant
parlementaire, Engin Altay. Avant d'ajouter: «Nous appelons la France à revoir
sa décision».
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Le soutien mesuré de Paris aux Kurdes (30.03.2018)
La France ne prévoit pas de
nouvelle opération militaire dans le Nord syrien en dehors de la coalition
anti-EI.
Il s'agit en fait d'un faux
revirement. Un revirement dont les Kurdes ont tellement rêvé qu'ils en ont sans
doute fait leur réalité après avoir rencontré Emmanuel Macron jeudi. En
recevant sous les dorures du Palais de l'Élysée des responsables militaires
kurdes et des personnalités des Forces démocratiques syriennes (FDS), au moment
où leurs positions sont menacées par l'offensive militaire turque qui veut les
déloger du nord de la Syrie, le président français a adressé à ces alliés de la
coalition internationale un message politique fort.
Les Occidentaux, qui se sont
appuyés sur les FDS et notamment sur leur avant-garde kurde YPG (Unités de
protection du peuple) pour lutter contre Daech, sont accusés d'avoir abandonné
leurs précieux alliés locaux. Ils ont été le fer de lance de la communauté
internationale contre l'État islamique, notamment
à Raqqa, où ils ont largement contribué à la défaite des djihadistes.
Mais depuis plus de deux mois, ils ploient sous les bombardements de la
Turquie, qui les considèrent comme une excroissance de l'organisation
«terroriste» PKK contre laquelle Ankara combat au sud-est du pays.
Les Kurdes, selon une source
proche du dossier, auraient manifesté un «enthousiasme excessif» et fait
«l'amalgame» entre deux messages présidentiels
Devant la délégation arabo-kurde,
Emmanuel Macron a fait part de la disponibilité française à «faciliter» le
dialogue entre Ankara et les FDS. Mais il n'a jamais affirmé, assure l'Élysée,
comme l'ont prétendu jeudi soir des représentants kurdes, que la France allait
envoyer des troupes à Manbij, dans le nord de la Syrie, où la Turquie menace de
lancer sa prochaine attaque. Les Kurdes, selon une source proche du dossier,
auraient manifesté un «enthousiasme excessif» et fait «l'amalgame» entre deux
messages présidentiels, le premier réitérant l'engagement de la France à
poursuivre sa mission dans le cadre de la coalition et le second affirmant
qu'il serait «inacceptable» que les
militaires turcs, qui ont déjà expulsé d'Afrine les Unités de protection du
peuple, poursuivent leur opération militaire à Manbij et au-delà.
L'engagement militaire français
en Syrie ne changera pas. Sauf à la marge. Quelques éléments des forces
spéciales françaises sur le terrain pourraient être repositionnés. Et la lutte
contre Daech «réexaminée», concède l'Élysée. La présidence s'inquiète en effet
d'une «résurgence» de l'organisation terroriste qui, dans certaines régions de
Syrie, fait mine de relever la tête. «La lutte contre Daech n'est pas terminée.
C'est pour cette raison que nous avons besoin de la pleine mobilisation des
Kurdes sur le terrain.» La France et les États-Unis considèrent que l'offensive
d'Ankara contre la milice kurde affaiblit par ricochet la lutte contre le groupe
État islamique.
«La Turquie est un partenaire
important dont nous avons besoin pour trouver une solution politique à la
Syrie. Le but n'est pas de rompre les liens»
Une source à l'Élysée
Mais l'action militaire française
n'ira pas plus loin. «Il n'y aura pas de nouvelle opération en dehors de la
communauté internationale», précise une source à l'Élysée. Déjà en froid avec
la Russie, Paris peut difficilement se permettre une rupture avec la Turquie,
considérée comme un poids lourd de l'Otan et dont l'implication directe en
Syrie en fait un partenaire obligé pour une future solution politique,
l'objectif de la diplomatie française. Enfin la Turquie, outre qu'elle a la
main sur l'un des robinets de migrants à destination de l'Europe, contrôle
aussi en partie le retour des djihadistes chassés de Syrie sur le Vieux
Continent. «La Turquie est un partenaire important dont nous avons besoin pour
trouver une solution politique à la Syrie. Le but n'est pas de rompre les
liens», affirme une source à l'Élysée.
Et s'il fallait un argument
supplémentaire à la retenue militaire française en Syrie, le retrait annoncé
par Donald
Trump, qui promet que les Américains vont partir de Syrie «très
vite»,
maintenant que la victoire contre Daech est proclamée, le fournit.
Mais cette posture ne clarifie
pas la position ambiguë, inconfortable et pas toujours assumée de la France,
qui en Syrie reste tiraillée, comme d'ailleurs ses alliés occidentaux, entre
ses intérêts de sécurité qui dépendent de la Turquie et les valeurs, comme
l'honneur, qui la pousserait à soutenir les Kurdes.
Depuis jeudi soir, la colère des
responsables turcs n'est pas retombée, même après la mise au point de l'Élysée.
La proposition de médiation française avec les Forces démocratiques syriennes
et Ankara a été rejetée par le pouvoir turc. Recep
Tayyip Erdogan a vivement réagi vendredi, accusant Emmanuel Macron de
faire des déclarations qui le «dépassent». Il a jugé l'approche de la France
sur le sujet «totalement erronée».
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Égypte : la nouvelle guerre du
Sinaï contre Daech (29.03.2018)
GRAND REPORTAGE - L'armée a lancé
une vaste offensive contre les djihadistes. Mais ceux-ci jouissent de
complicités locales.
Tous les 500 mètres, des tourelles
de guet, équipées de radars, émergent d'une mer de sable. «Aucun terroriste ne
doit s'infiltrer dans le Sinaï par le canal de Suez», assure le général Khaled
Azazi, sur l'esquif qui fait la navette entre les deux rives. Il arrive au nord
de la nouvelle ville d'Ismaïlia, dans le centre du Sinaï. Sur l'autre berge,
Ismaïlia «l'historique», avec ses vieilles maisons aux toits coloniaux bâties
pour les ingénieurs français qui construisirent la voie d'eau en 1869. En face,
une immensité désertique hérissée de dunes: le territoire des Bédouins,
dispersés dans le Sinaï, cette presqu'île de 70.000 km2 - un huitième du
territoire français - où
l'armée traque les djihadistes. Une tâche titanesque. «Les terroristes
se cachent dans des grottes», explique un journaliste égyptien, qui s'y rend
avec la troupe.
Le 9 février, le président Abdel
Fattah al-Sissi a lancé l'offensive «Sinaï 2018», une opération militaire qui
succède à d'autres opérations qui n'avaient pu venir à bout des combattants de
la branche locale de l'État islamique, Wilayat Sinaï, forte d'à peine plus d'un
millier d'hommes. Mais cette fois, la guerre est totale. «C'est une question de
vie ou de mort», jure le député Abdelrahim Ali, qui offre de l'argent aux mères
des martyrs tombés au combat. «Si l'armée échoue, ce sera un désastre, car les
terroristes arriveront jusqu'au Caire», renchérit Ali Friji, chef d'une tribu
de Nakhel, dans le centre du Sinaï.
Une armada de 42.000 hommes
Déclenchée après
l'attentat qui tua, fin novembre, 324 fidèles en prière dans une mosquée de Bir
al-Abed, dans le Nord, «Sinaï 2018» mobilise une armada de 42.000
hommes déployés au sein de 88 bataillons. Une guerre sans témoin. La péninsule
a été décrétée zone militaire fermée. Aucun journaliste étranger ne peut
théoriquement y pénétrer. «C'est le black-out total», regrette un diplomate au
Caire.
L'armée a changé de tactique.
«Elle menait avant de petites attaques, explique le cheikh Friji. Maintenant,
elle frappe des maisons, elle attaque des grottes, l'armée de l'air est
engagée, mais aussi la marine et les forces spéciales.» La tête du cheikh est
réclamée par Daech. Sa tribu, les Massaïd, renseigne l'armée sur les
djihadistes. «Quand je rentre du Caire à Nakhel, je suis incognito», avoue le
chef tribal dans sa tenue traditionnelle. «Les islamistes ont déjà tué, dit-il,
cinq députés, 30 responsables tribaux et 200 civils qu'ils accusaient de
collaborer avec l'État.»
«Si l'armée échoue, ce sera un
désastre,car les terroristes arriveront jusqu'au Caire»
Ali Friji, chef d'une tribu de
Nakhel
Sa région est encore relativement
épargnée par les violences. La zone des combats se situe plus au nord, le long
d'une bande côtière entre les villes de Rafah, frontalière de la bande de Gaza,
Cheikh Zuweid, el-Arish, et dernièrement Bir al-Abed. Ali Friji a deux filles à
el-Arish, mais il ne peut plus leur rendre visite. Les routes sont coupées. La
«troisième armée», qui multiplie les barrages, a fermé les entrées et les sorties
à partir d'al-Hasna dans le centre du Sinaï, à l'arrière de Bir al-Abed. Objectif
du blocus: isoler les terroristes, les empêcher de circuler entre les villes.
Des avions de chasse F-16 survolent l'étendue désertique et pilonnent des
positions djihadistes. «Ils bombardent beaucoup, constate un expatrié, des
pick-up, des Toyota». Le bilan des raids fournit par le porte-parole de l'armée
se veut impressionnant. «Nous avons neutralisé 812 cibles par des frappes
aériennes hors de zones habitées: des dépôts de munitions, des centres de
commandement ou des rassemblements de terroristes», affirme le colonel Tamer
el-Refaï, dans une rare interview à la presse étrangère. «157 terroristes» ont
été tués, «trois centres médias» détruits, ainsi
que six
tunnels, reliant Rafah à la bande de Gaza.
Actions de guérilla
L'armée et la police ratissent et
arrêtent massivement. En 50 jours, 3200 personnes ont été appréhendées, mais
1400 relâchées après interrogatoire. Parmi les individus arrêtés - comme parmi
les tués - figurent des étrangers, révèle le colonel al-Refaï. Des Palestiniens,
venus de la bande de Gaza, mais aussi d'autres nationalités. «On ne peut pas
encore révéler leurs origines», ajoute le porte-parole de l'armée. Paris, qui a
dépêché Bernard Emié, le patron des renseignements extérieurs, cherche à savoir
si certains de ses ressortissants ont migré de Raqqa et Mossoul vers le Sinaï.
Les djihadistes ne contrôlent pas
de territoires, mais ils multiplient les actions de guérilla. Face à eux,
l'armée a un besoin vital de renseignements. C'est là où la traque a longtemps
péché. Si les Bédouins du Sud-Sinaï collaborent avec l'armée, au nord, leur
loyauté est mouvante. «Des tribus, comme les Tarabin ou les Zamaloot sont
patriotiques, estime le journaliste qui les fréquente. Mais d'autres ont peur
des représailles, et puis, il y a les agents doubles», qui s'allient tantôt
avec Daech, tantôt avec l'armée. «Depuis longtemps, le Nord-Sinaï a été laissé
à l'abandon par les autorités, analyse le diplomate. Les Égyptiens ont laissé
monter un djihadisme local - des jeunes sans espoir qui ont basculé dans la
violence - et puis des gens sont venus de l'extérieur, notamment de Gaza via
les tunnels, et d'autres de Libye.»
«Les Égyptiens ont laissé
monter un djihadisme local et puis des gens sont venus de l'extérieur,
notamment de Gaza via les tunnels»
Un diplomate
Les
djihadistes locaux se cachent parmi la population des villes. «À
el-Arish, affirme le Dr Salah Salam, joint au téléphone, on ne les a pas vus
depuis un certain temps dans les rues.» Selon lui, leur dernière attaque
d'envergure remonte à l'été dernier quand ils ont braqué une banque dans
l'artère principale de l'ancienne station balnéaire, s'emparant d'un important
butin. Les combattants étrangers, eux, se fondent plutôt dans le désert. Ils
creusent de nombreux tunnels pour se cacher, stocker de la nourriture et des
charges explosives. «On a retrouvé de petites usines de fabrication d'engins
explosifs improvisés», confie le colonel Refaï.
L'armée a neutralisé 648 de ces
bombes à effet dirigé (IED) que les djihadistes placent le long des routes,
surtout entre le sud d'el-Arish et Bir al-Abed, où des cellules, très actives,
ont tué dans leurs embuscades de nombreux policiers. Mais ce qui est nouveau,
c'est la découverte de C4, un explosif militaire. La dernière vidéo de Wilayat
Sinaï, diffusée la semaine dernière, en fait largement état. En revanche, elle
ne demande pas aux djihadistes en errance dans la zone irako-syrienne de venir
dans le Sinaï.
L'appui très discret donné par
Israël
Pour déclencher leurs engins de
mort, les djihadistes utilisent des cartes SIM distribuées par les opérateurs
israéliens, selon la revue spécialisée Globes. Avantage: rendre leur
détection plus difficile par l'armée égyptienne. Ce qui sous-entend un
approvisionnement, via la bande de Gaza, dirigée par les islamistes du Hamas.
Pourtant, les relations entre le Hamas et la branche de Daech dans le Sinaï se
sont dégradées. «Ses leaders ne peuvent plus se réfugier via des tunnels dans
la bande de Gaza», note le chercheur Oded Berkowicz, le Hamas, qui négocie avec
l'Égypte, a durci son contrôle.»
L'Égypte espère en finir avec ses
ennemis d'ici au 25 avril, date anniversaire de la restitution du Sinaï par
Israël en 1982. Un vœu probablement pieux. Comme les précédentes offensives,
«Sinaï 2018» piétinerait. D'où
l'appui très discret donné par Israël. Et depuis longtemps. En février,
le New York Timesrévélait que Tsahal avait mené ces dernières
années plus d'une centaine de frappes aériennes au moyen de drones et
d'hélicoptères contre Daech dans le Sinaï, avec l'accord de l'Égypte, qui
dément une telle coopération.
«Au début de l'offensive, on a
souffert de pénuries alimentaires et d'un manque d'essence, mais maintenant
cela va mieux»
Dr Salam d'el-Arish
Le 19 décembre, un mois seulement
après le choc de l'attentat de Bir al-Abed, le pouvoir égyptien faillit même
être décapité. Cachés dans le désert à 5 km de l'aéroport d'el-Arish, des
djihadistes ont détruit au missile Kornet l'hélicoptère dans lequel les
ministres de l'Intérieur et de la Défense devaient monter. «Cela s'est joué à
quelques dizaines de secondes près», se souvient un militaire étranger.
L'attaque fit deux morts, dont l'aide de camp du ministre de la Défense, déjà
dans l'hélicoptère, alors que les deux ministres s'en approchaient. Les
assaillants bénéficiaient d'agents dans l'enceinte de l'aéroport. D'où venait
le missile? «D'un stock de l'armée égyptienne volé pendant les troubles de la
révolution de 2011, ou alors de Libye, ou bien du Hamas quand ils avaient des
relations de travail», selon Oded Berkowicz. Immédiatement après, l'armée
imposa une zone tampon sur un périmètre de 5 km autour de l'aéroport
d'el-Arish. «Des fermes ont été évacuées, selon le Dr Salah Salam. Des gens ont
été déplacés, mais on comprend, dit-il, les impératifs de sécurité».
C'est loin d'être le cas de tout
le monde. Fin 2014, l'armée rasa une bande de terre de 5 km de profondeur, le
long des 12 km de la bande de Gaza. Quelque 800 maisons furent détruites. Des
milliers d'habitants se sont retrouvés sans logis, ce qui en fait des recrues
faciles pour les djihadistes. C'est l'autre faille de la guerre. Un point
ultrasensible pour les autorités qui rappellent que 900 millions de livres (45
millions d'euros) ont été distribués pour compenser les destructions. Des
compensations largement insuffisantes. Les réseaux sociaux relaient des
messages d'habitants du Sinaï en colère.
Une aide encore insuffisante
D'autant que le blocus de l'armée
a des répercussions humanitaires. «Au début de l'offensive, relate le Dr Salam
d'el-Arish, on a souffert de pénuries alimentaires et d'un manque d'essence,
mais maintenant cela va mieux, l'armée distribue de la nourriture et alimente
les stations-essence.» Une aide là encore insuffisante. Or la victoire contre
Daech ne pourra se faire sur le dos de la population. «J'ai proposé à l'armée
que les tribus puissent porter des armes contre Daech, rappelle le chef tribal
Ali Friji. L'armée nous a répondu qu'elle avait seulement besoin qu'on
l'informe sur
les planques des djihadistes et lorsqu'on voit un jeune se
radicaliser.»
Le pouvoir redoute que ses armes
se retournent contre lui dans une zone où la contrebande, le trafic de drogue
notamment, a toujours fleuri. L'armée a mis la main sur des dizaines de
milliers de pilules de stupéfiants détenues par Daech et détruit quelque 155
«fermes» où les djihadistes cultivent le bango, le cannabis local. L'argent
ainsi généré leur permet de recruter des jeunes désœuvrés, ou des déçus du
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ENQUÊTE - Alors qu'un
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clandestins de ce fief des chrétiens de Chine sont partagés entre inquiétude et
résignation. Leurs évêques pourraient être contraints de se soumettre à
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prière « officielle ».
C'est une grotte traversée par un
ruisseau, à laquelle on accède par un étroit passage obligeant à avancer
accroupi. À l'intérieur, des fidèles, agenouillés devant un petit autel
surmonté d'un crucifix, de bougies et de roses, chantent une prière en dialecte
local. Originaire de la région, M. Zhang, 74 ans, effectue chaque
année avec sa femme, ses enfants et ses petits-enfants le pèlerinage à Lankou,
dans le Fujian, dans le sud-est de la Chine. C'est dans ce village que s'était
réfugié l'un des premiers martyrs de l'Église catholique en Chine: l'évêque Bai
- de son vrai nom Pedro Sanz y Jordá. Il fut exécuté en 1747 par un empereur de
la dynastie Qing, avec quatre missionnaires espagnols. La marche part d'une
église ancienne empruntant des éléments d'architecture chinoise, puis serpente
à travers la nature en suivant un chemin de croix, dont les stèles ont été
recouvertes par des blocs de béton.
Cela fait près de quatre siècles,
depuis que des frères dominicains ont débarqué sur les côtes vallonnées du
Mindong, à l'est du Fujian. Les catholiques sont solidement ancrés dans cette
région de cultivateurs et de pêcheurs. «Malgré des périodes d'extrêmes tensions
avec le pouvoir chinois - entrecoupées de moments d'accalmies -, ils ont tenu
bon, en s'adaptant au contexte local», explique Eugenio Menegon, professeur
d'histoire à l'université de Boston. Certaines époques furent particulièrement
douloureuses. Les missionnaires ont été bannis sous les Qing, pendant plus de
cent ans, jusqu'à ce que les Occidentaux imposent leur retour au XIXe siècle,
après les guerres de l'opium. La communauté religieuse fut ensuite persécutée
sous Mao Tsé-toung, en particulier pendant la Révolution culturelle. «Quand
j'étais enfant, toutes les églises étaient en ruine. On devait prier en secret
à la maison», se souvient M. Zhang.
Des «sacrifices» pour mettre
fin à sept décennies de divisions
Sur les quelque
80.000 catholiques que compte le Mindong, l'immense majorité appartient,
comme lui, à l'église «clandestine», qui reconnaît l'autorité du Pape. Ils n'ont
jamais rejoint l'Église étatique, supervisée par le Parti communiste chinois
(PCC) depuis sa création en 1957. Mais aujourd'hui, cette population rurale,
qui a souvent été l'enjeu de querelles se jouant très loin d'eux, entre Pékin
et l'Europe, se retrouve au cœur d'un nouveau débat déchirant. Un rapprochement
se profile en effet entre le Vatican et Pékin, qui n'ont plus de relations
diplomatiques depuis 1951. Dans l'accord en cours de négociation, le Pape
aurait son mot à dire concernant les nominations d'évêques - une concession de
la part du régime chinois, très méfiant envers les religions sous influence
étrangère. Il pourrait peut-être aussi disposer d'un droit de veto, dont les
contours restent flous. En échange, Rome reconnaîtrait sept évêques «patriotiques»
qui avaient été nommés sans l'aval du Saint-Siège (certains ont été
excommuniés). Preuve de sa détermination, le Vatican a demandé à deux évêques
«clandestins» de céder leur place à leurs homologues «officiels». Dans ce
schéma, Mgr Guo Xijin, en charge du diocèse du Mindong, se placerait sous
l'autorité de Mgr Zhan Silu, membre du Parlement chinois.
À Hongkong, le cardinal
Joseph Zen, adversaire de longue date de ce projet, a accusé le Vatican
de «vendre» les catholiques chinois, restés «loyaux» envers le Pape pendant des
décennies malgré les souffrances que leur a infligées le régime. Sa position
n'est pas isolée. «Beaucoup de catholiques clandestins sont inquiets: en
particulier le clergé et les croyants les plus éduqués», insiste Ren Yanli,
chercheur à l'Académie des sciences sociales de Chine, à Pékin. Le cardinal
Pietro Parolin, le numéro deux du Vatican, a reconnu que certains devraient
faire des «sacrifices» pour mettre fin à sept décennies de divisions entre les
deux Églises, qui comptent de 10 à 12 millions de fidèles, à peu près répartis
à parts égales. Cette réconciliation est d'autant plus cruciale pour Rome que
le nombre de catholiques recule en Chine, alors que d'autres religions sont en
plein essor.
Prêtres et évêques sous
surveillance
En ce dimanche soir de fin
février, ce n'est pas Mgr Guo qui célèbre la messe, à Luojiang, dans la
cathédrale de style néogothique, décorée de carreaux blancs et surmontée de
deux grandes croix. Sur le parvis, beaucoup de paroissiens ne sont pas au
courant des négociations. Mais la perspective de devoir passer sous la coupe de
l'Église étatique en préoccupe plusieurs, dans les ruelles du village, dont de
nombreuses portes sont ornées de croix. «Si c'était le cas, la plupart des
croyants ne seraient pas d'accord. Tout le monde aime Mgr Guo, qui a
toujours refusé d'appartenir à l'église officielle», réagit Luo Yong, très
alarmé à l'idée que son Église puisse «être contrôlée par le PCC». «Je n'irai
plus à la messe si elle devient patriotique. Dans les années 1980, un évêque
officiel a essayé de venir ici et nous l'avons chassé!», s'emporte la patronne
d'un petit restaurant, fière, comme beaucoup, d'appartenir à une famille
catholique «authentique» depuis de nombreuses générations. Mais «si le Vatican
et Pékin établissent des relations et que le Pape nous envoie un évêque
patriotique en disant qu'il faut l'écouter, alors on n'aura pas le choix»,
conclut M. Chen, qui s'est joint à la conversation. Une formule qui
revient souvent dans la bouche des habitants.
«Nous avons très peur que
l'authenticité de la foi soit abîmée si on passe sous l'autorité du Parti.»
Une nonne de 38 ans
Même si elle n'est pas reconnue
par Pékin, cette communauté n'est cependant pas obligée de vivre cachée. Les
dizaines d'églises du Mindong sont en effet très visibles, tout comme
l'imposant évêché de Luojiang, où habite Mgr Guo. Et les gens sont libres
de se rendre à la messe. Mais les religieux vivent mal les restrictions dont
ils font l'objet. Plusieurs prêtres et évêques «clandestins» sont étroitement
surveillés par le gouvernement. Signe, selon certains observateurs, que Pékin
n'a guère l'intention de laisser de marges de manœuvre au Vatican,
Mgr Guo, a été arrêté pendant 24 heures par les autorités chinoises
peu avant ce week-end de Pâques. Le prélat, qui avait déjà été détenu une
vingtaine de jours l'an dernier à la même époque, aurait refusé de servir la messe
avec l'évêque officiel, avance un média spécialisé. Les cours de catéchisme
pour les enfants et les adolescents, théoriquement interdits, doivent par
ailleurs être donnés «discrètement», en ne réunissant pas trop de monde. Et il
est compliqué pour les nonnes et les prêtres de suivre des études de théologie
à l'étranger. «Nous avons très peur que l'authenticité de la foi soit abîmée si
on passe sous l'autorité du Parti», confie une nonne de 38 ans, qui craint
également que la «liberté d'expression» ne disparaisse. L'inquiétude des
religieux peut se comprendre: le régime chinois a mis en œuvre début février de
nouvelles réglementations visant à encadrer plus strictement la liberté de
culte. Et une réorganisation gouvernementale récente devrait, en outre, permettre
au PCC d'accroître encore son emprise sur les religions.
Aujourd'hui, «les paroissiens
clandestins boycottent généralement les évêques étatiques», résume Ren Yanli.
Mais il serait «trop simpliste de décrire les catholiques du Mindong comme deux
groupes statiques en compétition», estime de son côté Michel Chambon, doctorant
en anthropologie à l'université de Boston, pour qui, par endroits, les
antagonismes tendent à se réduire avec le développement économique. Depuis les
années 1990, beaucoup de croyants «clandestins» de la région se sont installés
dans de grandes villes comme Shenzhen, Guangzhou ou Shanghaï pour y démarrer
une affaire. «Plusieurs sont devenus des entrepreneurs établis qui, bien que
fidèles à leur Église, se montrent très patriotes et ne sont pas dans une
opposition frontale avec la structure officielle», poursuit ce chercheur, qui
précise que la plupart des évêques nommés par Pékin ces dernières années ont
également été reconnus par Rome. Une partie des ouailles ne se sentiraient d'ailleurs
pas concernée par les débats actuels. «À quelle église appartient l'évêque, ce
n'est pas vraiment mon problème… Je veux juste pouvoir aller à la messe»,
indique ainsi une jeune femme de Luojiang.
Blessures encore ouvertes
Pour d'autres, notamment les plus
anciens, les blessures du passé ne se sont pas refermées. Non loin de Luojiang,
dans le village de Shangwan, deux visiteuses sont venues se recueillir près de
la tombe du martyr Miao Zishan. Comme de nombreux prêtres chinois, il vécut un
calvaire sous Mao. Emprisonné dans des conditions terribles en 1955, il fut
ensuite envoyé dans un camp de travail, où il tomba gravement malade, avant de
mourir dans son village natal. Après avoir récité des prières, les pèlerines
s'allongent quelques instants dans un lit situé près de l'autel, accomplissant
un rituel censé guérir les maladies. Aux yeux des prêtres restés dévoués au
Pape, ce lieu revêt une signification beaucoup plus symbolique. La perspective
d'un accord fait frémir l'un d'eux, formé en secret dans les années 1980, et
emprisonné une dizaine de jours en 2002. Encore aujourd'hui, il ne peut pas
sortir du pays, et ses mouvements sont observés. Il ne compte toutefois pas se
rebeller. «Si le Pape nous demande d'obéir, nous le ferons», se résigne-t-il. Ce
sera «bien sûr un sacrifice», admet cet ecclésiastique de 60 ans, mais
dans cette région, «le catholicisme a toujours été une histoire de sacrifices».
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Un contrôle des douanes françaises dans une commune italienne
ulcère l'Italie (31.03.2018)
La France a dû expliquer samedi
que la présence de douaniers français à l'intérieur d'un local de la gare d'une
commune alpine frontalière en Italie était parfaitement légale, répondant à une
avalanche de propos outrés de la classe politique italienne. Dans une ambiance
frôlant le couac diplomatique, le ministère italien des Affaires étrangères a
convoqué samedi en fin d'après-midi l'ambassadeur de France à Rome, Christian
Masset, pour demander des explications claires.
Auparavant, l'ONG Rainbow4Africa
-qui occupe depuis décembre ce même local de la gare pour accueillir des
migrants en transit vers la France- s'était plainte de "l'irruption"
vendredi soir de douaniers français souhaitant qu'un Nigérian y effectue un
test urinaire. Très rapidement soutenue par des responsables politiques locaux
puis nationaux, indignés d'une possible ingérence française sur le territoire
italien.
Les explications de la France
Dans un communiqué relayé par
l'ambassade de France à Rome après la convocation de l'ambassadeur, le
gouvernement français a finalement fourni des explications.
Vendredi soir, une équipe de la
brigade ferroviaire des douanes françaises de Modane était en contrôle sur le
TGV Paris-Milan, indique le communiqué signé du ministre français de l'Action
et des Comptes publics, Gérald Darmanin, chargé des douanes.
"Ces agents en uniforme et
identifiés comme douaniers français ont suspecté un voyageur, de nationalité
nigériane et résident italien, de transport in corpore de stupéfiants. En
application de l'article 60bis du code des douanes, les agents ont demandé à la
personne si elle consentait à un test urinaire de détection de stupéfiants, ce
qu'elle a accepté par écrit à 19h15", stipule le communiqué.
"Afin de réaliser ce
contrôle dans des conditions de respect de la personne, les agents ont attendu
l'arrivée du train pour utiliser le local attenant à la gare de Bardonnechia,
mis à la disposition de la douane française en application des accords du
bureau à contrôles nationaux juxtaposés (BCNJ) de 1990", note le
gouvernement français.
"Ce local étant depuis
quelques mois également mis à la disposition d'une association d'aide aux
migrants, les agents ont sollicité la possibilité d'accéder aux sanitaires, ce
qui leur a été accordé. Le contrôle s'est finalement révélé négatif",
ajoute encore le communiqué.
Tibéhirine : les expertises fragilisent la version
d'Alger (29.03.2018)
Un rapport d'expertises conforte
l'hypothèse selon laquelle les sept moines assassinés en 1996 ont été décapités
post mortem.
Vingt-deux ans après les faits,
la thèse officielle des autorités algériennes pour expliquer l'assassinat des
moines de Tibéhirine se trouve ébranlée par les conclusions d'un épais rapport
d'expertises. Versé il y a quelques jours au dossier instruit par les juges
Nathalie Poux et Jean-Marc Héribaut, ce document de 185 pages explore
plusieurs des
zones d'ombre entourant les circonstances de la mort des religieux
français de l'ordre de Cîteaux. Enlevés dans leur monastère dans la nuit du 26
au 27 mars 1996, leurs crânes avaient été retrouvés sur le bord d'une
route de montagne, deux mois après leur disparition. Des crimes qu'Alger a
toujours imputés officiellement au Groupe islamiste armé (GIA).
» LIRE AUSSI - Il
y a vingt ans, les moines de Tibéhirine étaient enlevés
«Cette découverte conforte la
manière précipitée avec laquelle les Algériens ont placé les corps sous
scellés»
Me Patrick Baudouin, avocat
des familles
Premier constat, l'expertise
génétique de crânes et leur confrontation avec l'ADN de parents révèlent que
six des sept religieux ont été intervertis au moment d'être placés dans les
cercueils. Seule la dépouille du frère Luc, médecin, a été retrouvée dans la
sépulture à son nom. «Cette découverte conforte la manière précipitée avec
laquelle les Algériens ont placé les corps sous scellés, déplore
Me Patrick Baudouin, avocat des familles. Pour n'importe quel assassinat,
on prend en général la peine de pratiquer une autopsie avant de mettre la
victime en bière.»
Par ailleurs, les analyses
entomologiques ont permis, grâce à l'observation d'insectes dans la tête des
moines, d'établir que «le décès serait antérieur de plusieurs jours à la
découverte des têtes». «Cet intervalle post mortem est supérieur à neuf jours»,
assure au Figaro Me Baudouin, ce qui pourrait remettre en
cause l'authenticité du communiqué attribué au GIA puisque le texte faisait
remonter les assassinats au 21 mai 1996 et que les macabres découvertes
datent du 30 mai. Constatant l'état de décomposition des têtes, les
experts militent en faveur d'une mort plus ancienne. Ils vont même jusqu'à
conclure que «l'hypothèse d'un décès survenu entre le 25 et le 27 avril
reste plausible».
Aucune particule métallique
Cette piste avaliserait les
confidences de Karim Moulaï, ancien agent du département du renseignement et de
la sécurité (DRS) algérienne, exilé en Écosse depuis qu'il a soutenu que les
sept moines avaient été exécutés à la fin avril 1996 par les services
secrets de son pays. Confortant une «hypothèse à 80 %», émise par le juge
Trévidic au lendemain d'un premier rapport remis dès juillet 2015, le
document certifie, comme l'a relaté jeudi France Inter, que les lésions, constatées
au «micro-scanner» et au «stereo-miscroscope» sur chacune des têtes des sept
moines, plaident «en faveur d'une décapitation post mortem». Ce qui serait de
nature à donner corps, sans preuve irréfutable, à la piste d'une mise en scène
d'une exécution islamiste.
«Les autorités algériennes en
savent beaucoup plus que la version officielle consistant à répéter avec
constance que le GIA est à l'origine de ces crimes barbares»
Me Patrick Baudouin, avocat
des familles
En outre, les experts n'ont
retrouvé dans les crânes aucune particule métallique, c'est-à-dire aucune trace
de balles, comme aurait pu le suggérer l'hypothèse d'une bavure de l'armée
algérienne lors d'une opération de ratissage. Si les conclusions «botaniques»
et «géologiques» sont à prendre avec précaution en raison du peu de matière
résiduelle retrouvée sur les crânes, les experts privilégient la piste selon
laquelle les corps auraient été ensevelis, puis exhumés avant d'être découvert.
«Cette hypothèse d'une première inhumation, avant la découverte des têtes,
reste cependant la plus vraisemblable» puisque, assure le rapport, «l'absence
de lésions identifiables de grignotage par des prédateurs permet d'exclure que
les têtes des moines soient restées à l'air libre entre la date de sa mort et le
30 mai 1996».
Loin de lever encore toutes les
zones d'ombre, ce document est une avancée pour les familles. «Une étape
importante a été franchie et des éléments essentiels ont été fournis à
l'instruction», se félicite Me Patrick Baudouin, persuadé que «les
autorités algériennes en savent beaucoup plus que la version officielle
consistant à répéter avec constance que le GIA est à l'origine de ces crimes
barbares». Outre l'organisation de nouvelles auditions, la partie civile attend
maintenant le retour de la traduction d'une vingtaine d'interrogatoires menés
par un juge algérien dans le cadre d'une commission rogatoire internationale
délivrée en décembre 2011.
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Une école brûlée dans les Yvelines (02.04.2018)
Une école maternelle de
Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines a été incendiée samedi soir, nous
apprend Le Parisien. Selon le journal, un ou plusieurs individus
ont fracturé les portes de l'établissement avant d'y mettre le feu. Plusieurs
salles sont ravagées, dont le dortoir.
Dans le journal, Catherine
Arenou, la maire (LR) de la ville, estime que la totalité de l’école est «
inutilisable » et ce « pour plusieurs semaines, voire même plusieurs mois
puisqu’il faut vérifier l’état même de la structure ».
Sur Twitter, cette dernière a
exprimé sa colère : "quand on vous dit que l’éducation est une priorité
pour nos quartiers, qu’un enfant sans école, c’est un enfant sans repères, qu’à
chaque fois qu’un voyou détruit, nous sommes tous salis, écoutez-nous."
Pour l'heure, les 80 élèves de
l'école devraient être rapatriés dans un centre de loisirs à compter de demain
mardi. Le commissariat de Conflans est chargé de l’enquête.
Le pape François baptise un jeune clandestin devenu un héros
en arrêtant un braqueur (01.04.2018)
John Ogah, un migrant de 31 ans,
originaire du Nigeria, s'est illustré le 26 septembre dernier en Italie, où il
a désarmé un voleur armé d'un couperet et l'a immobilisé jusqu'à l'arrivée de
la police.
Conformément à la tradition, de
nombreux baptêmes ont lieu lors de la veillée pascale. Samedi, veille de
Pâques, le pape François a ainsi procédé à huit baptêmes d'adultes en la
basilique Saint-Pierre du Vatican. Parmi eux, John Ogah, un migrant de 31 ans,
originaire du Nigeria, ex-sans-papiers devenu un héros en arrêtant un braqueur.
Le 26 septembre dernier,
alors que le jeune homme était en train de mendier devant un supermarché
Carrefour, piazza delle Conifere à Rome, un Italien de 37 ans, qui venait de
commettre un vol à main armée dans le magasin avec un couperet à viande, est
soudainement sorti, se retrouvant face à lui, avec son arme et environ
400 euros. D'un geste instinctif, le clandestin nigérian a non seulement
désarmé le voleur mais l'a aussi retenu jusqu'à l'arrivée de la police. John
Ogah s'est ensuite éclipsé, craignant d'être lui-même interpellé puisqu'il
vivait illégalement sur le sol italien, selon la presse italienne. «J'ai fait
quelque chose de bien, pourquoi donc fuir?, s'est-il dit, selon le récit qu'il
a livré au journal La Repubblica. Et puis je me suis dit: “Je ne
suis pas en règles, c'est mieux si je m'en vais.”» John Ogah craignait
également que des proches de l'agresseur le retrouvent et s'en prennent à lui.
John Ogah craignait également
que des proches de l'agresseur le retrouvent et s'en prennent à lui.
«Avoir une vie digne»
La police a pu retrouver le héros
discret à l'aide des vidéos des caméras de surveillance. «Si le Pape ou le
président de la République faisaient quelque chose pour moi, je serais l'homme
le plus heureux du monde, confiait-il en octobre 2017, dans l'interview à
La Repubblica. Cela ne m'intéresse pas d'être un héros, je voudrais seulement
pouvoir être en règles, travailler et avoir une vie digne en Italie.» Le jeune
homme a été exaucé puisque son acte de courage lui a permis d'obtenir le droit
de rester, légalement, en Italie. Il travaille désormais comme gestionnaire de
stock dans une association caritative. Samedi, lors du baptême au Vatican, il
avait pour parrain un des policiers qui l'a aidé à obtenir son titre de séjour,
le capitaine des carabiniers, Nunzio Carbone.
Les autres personnes baptisées
par le pape François lors de la veillée pascale sont originaires d'Albanie, des
États-Unis, d'Italie et du Pérou.
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Nicolas Baverez : «Ne désespérons pas de la
démocratie !» (01.04.2018)
CHRONIQUE - Loin des illusions
entretenues autour de la fin de l'histoire, les menaces stratégiques sont de
retour.
La démocratie est confrontée à sa
crise la plus grave depuis les années 1930. Loin des illusions entretenues
autour de la fin de l'histoire, les menaces stratégiques sont de retour. Pour
autant, le premier péril reste la décomposition intérieure des nations libres,
prises sous le feu croisé de l'individualisme, de la corruption de
l'information et de la contagion de la violence.
La France n'est pas épargnée qui
accumule les fractures sociales, statutaires, générationnelles et territoriales
et demeure impuissante devant la salafisation d'une partie de la population
comme devant la résurgence de l'antisémitisme, que confirme l'ignoble
assassinat de Mireille Knoll.
Après l'effondrement de
l'économie de bulles, nous assistons au krach de la démocratie sous le choc du
populisme: Brexit et élection de Donald Trump ; percée de l'extrême droite
en Allemagne et en Autriche ; sécessionnisme catalan ; alliance à
très haut risque du M5S et de la Lega en Italie ; conversion des pays du
groupe de Visegrad à la démocratie illibérale. Le populisme prend sa source
dans la déstabilisation des classes moyennes du fait de la mondialisation et de
la révolution numérique, dans la polarisation des individus et des territoires,
dans le repli identitaire face aux vagues migratoires, dans la prise de
conscience des menaces intérieures et extérieures sur la sécurité, dans la
révolte contre la trahison des élites et l'impuissance des dirigeants.
Pour autant, nous ne devons pas
désespérer de la démocratie, ce qui constituerait la meilleure manière
d'assurer la victoire de ses ennemis.
L'islam politique se réduit à
une culture de la pauvreté, de l'oppression et de la mort, à l'opposé d'un
projet de civilisation.
Les succès momentanés du djihadisme et
des démocratures ne peuvent masquer leurs impasses à long terme. L'islam
politique se réduit à une culture de la pauvreté, de l'oppression et de la
mort, à l'opposé d'un projet de civilisation. La théocratie iranienne a utilisé
les errements des États-Unis pour constituer un empire chiite mais bute sur les
coûts de sa surexpansion militaire qui sont de moins en moins acceptés par sa
population. La stratégie de la Chine de contester le leadership économique et
technologique des États-Unis est incompatible avec le refus de l'Étatde droit
et des libertés qui fait du rêve collectif chinois un cauchemar individuel.
L'impérialisme de la Russie est promis à l'échec par son suicide démographique,
par la stagnation de son économie qui ne représente que le quinzième de celle
des États-Unis, par une corruption endémique, par son enlisement dans la guerre
sans fin de Syrie. Sous prétexte de réorientation vers la Russie, le monde
arabe ou l'Afrique, la Turquie ne va ni vers l'est ni vers l'ouest mais vers un
trou noir.
Compétitivité économique,
cohésion sociale, vitalité démocratique et renforcement de la sécurité
La démocratie n'a donc pas encore
perdu. Mais elle ne dispose d'aucune garantie de vaincre, comme ce fut le cas
au XXe siècle. Émergent huit priorités, dont l'Europe du Nord, qui allie
compétitivité économique, cohésion sociale, vitalité démocratique et
renforcement de la sécurité, montre qu'elles n'ont rien d'utopique.
Faire la vérité sur la situation
et sur les erreurs politiques et intellectuelles accumulées depuis l'effondrement
de l'Union soviétique. Investir massivement dans l'éducation et la formation
tout au long de la vie. Évoluer vers un modèle de croissance durable et
inclusive. Saisir les chances de la révolution numérique tout en gérant ses
risques en réintégrant ses acteurs dans l'État de droit, dans la fiscalité, la
régulation et l'éthique. Restaurer la souveraineté, ce qui passe par la
réhabilitation des fonctions régaliennes de l'État. Rénover la démocratie en
améliorant sa transparence et la participation des citoyens grâce aux
technologies digitales. Repenser l'Europe sous le signe de la protection de ses
citoyens, de la souveraineté et de la sécurité. Réaffirmer la communauté de
valeur et de destin des nations libres au-delà de la divergence ponctuelle de
leurs intérêts.
La violence ne peut être
annihilée seulement par la force. Le combat décisif se livre dans la tête et le
cœur des citoyens qui doivent retrouver la confiance dans la liberté et la
volonté de la défendre. Ce qui suppose d'opposer des émotions positives aux
passions mortifères. Marc Bloch, dans L'Étrange Défaite, rappelait
qu'«il y a deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l'histoire de
France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux
qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération». Aujourd'hui, de
même, ceux qui demeurent insensibles devantle sacrifice du colonel Beltrame se
condamnent à rester étrangers à l'histoire de France comme au long et rude
combat des hommes pour conquérir leur dignité et leur liberté. Tant qu'il
restera des citoyens et des serviteurs
de l'État de la trempe d'Arnaud Beltrame, la démocratie ne sera pas
défaite et le déclin de l'Occident ne sera pas fatal.
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Nicolas Baverez
«Le destin religieux de la France n'est pas indifférent à
celui de l'Église universelle» (30.03.2018)
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Dans son
passionnant ouvrage Comment notre monde a cessé d'être chrétien ,
Guillaume Cuchet, spécialiste d'histoire religieuse, détaille les causes et
l'ampleur de la déchristianisation en France.
LE FIGARO. - Le titre de votre
livre est Comment notre monde a cessé d'être chrétien. De quel
«monde» parlez-vous? Après tout, on pourrait facilement vous objecter que le
christianisme progresse à l'échelle mondiale…
Guillaume CUCHET. - En
effet. Mon objet est le catholicisme français, ce qui ne préjuge pas de ce qui
se passe ailleurs, même s'il ne faut pas oublier qu'au XIXe siècle la
France était la première puissance catholique en termes démographiques et que
les trois quarts des missionnaires catholiques dans le monde étaient français.
Le destin religieux de la France n'est donc pas indifférent à celui de l'Église
universelle. Je ne crois pas à la thèse d'Emmanuel Todd de la «crise terminale
du catholicisme français» lequel, pour un malade à l'agonie, me paraît au
contraire assez en forme. Simplement (mais c'est décisif) le catholicisme a
changé de format de façon spectaculaire et, pour partie, de sociologie. Le
titre du livre attire l'attention sur le fait qu'en devenant minoritaire et en
passant sous une certaine barre statistique, ses effets sociaux et culturels ne
sont plus du tout les mêmes.
«Au XIXe siècle la France
était la première puissance catholique en termes démographiques et les trois
quarts des missionnaires catholiques dans le monde étaient français»
Guillaume Cuchet
De quand date ce grand
effondrement? Pouvez-vous en décrire l'ampleur?
La déchristianisation est une
vieille histoire en France qui remonte au moins à la Révolution. À l'intérieur
de ce processus de longue durée, qui n'a été ni linéaire ni univoque (il y a eu
des phases de reprise religieuse limitées, la dernière en date dans les années
1930-1960), une rupture de pente s'est produite au milieu des années 1960,
d'une importance comparable à celle de la Révolution. Dans les vingt ans qui
ont suivi la Seconde Guerre mondiale, l'Église de France s'est lancée dans des
opérations de comptage des pratiquants massives destinées à éclairer sa
pastorale et à favoriser la reconquête chrétienne du pays. Au seuil des années
1960, elle avait conclu à la stabilité globale des taux dans la longue durée,
moyennant une pente légèrement déclive, un peu déprimante certes parce qu'on
n'arrivait pas à redresser les courbes, mais qui préservait a priori de toute
mauvaise surprise. Or, au moment même où s'imposaient ces conclusions, vers
1965-1966, les courbes se sont mises à plonger. Pour illustrer le phénomène, je
citerais simplement deux séries de chiffres. En 1965, 94 % de la
génération était baptisée dans les trois mois après la naissance contre 30 à
35 % aujourd'hui dans les sept ans ; 25 % des adultes allaient à
la messe tous les dimanches (moyennant des contrastes locaux très importants)
contre moins de 2 % aujourd'hui.
Vous dites que Vatican II a
été le «déclencheur» de l'effondrement de la pratique. Pourquoi?
Je suis reparti des constats
faits à l'époque par le chanoine Boulard qui était le grand spécialiste de ces
questions dans l'Église. Les courbes plongent brutalement autour de 1965,
l'Église perdant du quart au tiers des pratiquants du début des années 1960
(des jeunes surtout) en deux ans. Il faut bien qu'il y ait eu un événement
derrière une telle rupture et on ne voit pas bien quel autre que le
concile pourrait avoir joué ce rôle-là. Mai 1968 a
amplifié une vague qu'il n'a pas créée. On a eu longtemps du mal à en convenir
dans l'Église parce qu'on avait peur, ce faisant, d'apporter de l'eau au moulin
des adversaires du concile qui ont depuis longtemps planté leur drapeau noir
sur cette fâcheuse «coïncidence». Ma thèse est que le concile a non pas
provoqué la rupture au sens où elle aurait pu ne pas avoir lieu sans lui,
puisqu'elle a eu lieu dans les pays protestants et qu'elle procède de causes
socioculturelles plus larges, mais qu'il l'a déclenchée tout en lui donnant une
intensité particulière.
Toute la question - mais combien
complexe - est de savoir ce qui dans le concile (dans ses textes, leur interprétation,
la manière dont ils ont été appliqués, ses effets indirects) a pu jouer un tel
rôle. La réforme liturgique, adoptée dès décembre 1963, a un peu obsédé la
discussion. Elle a masqué à mon avis un changement plus décisif intervenu dans
le sens même de la pratique: la sortie brutale de la culture de la pratique
obligatoire sous peine de péché grave longtemps très insistante en
catholicisme.
Dans la «carte Boulard»
présentant une photographie de la France chrétienne, avant l'effondrement, on
voit des disparités géographiques très importantes. À quoi sont-elles dues?
La première édition de la Carte
religieuse de la France rurale date de 1947. C'est un des documents
les plus fascinants de l'histoire de France. Elle montre à la fois l'ampleur
des contrastes religieux régionaux (sans équivalent ailleurs en Europe) et une
géographie d'ensemble de la France chrétienne très singulière. Un même dimanche
des années 1950, la pratique pouvait varier de 100 % dans un bourg du nord
de la Vendée à 0 % dans le Limousin. En quelques kilomètres on pouvait
changer de monde religieux.
«En 1965, 25 % des adultes
allaient à la messe tous les dimanches contre moins de 2 % aujourd'hui»
Guillaume Cuchet
La France chrétienne recouvrait
tout l'Ouest, le Nord, l'Est lorrain, alsacien, vosgien, le Jura, le Nord des
Alpes, tout le rebord Sud-Est du Massif central (de la Haute-Loire au Tarn ou à
l'Aveyron), le Pays basque et le Béarn. Inversement, une «diagonale du vide»
courait des Ardennes au Sud-Ouest en passant par tout le Bassin parisien et
l'Ouest du Massif central, avec des prolongements dans la vallée du Rhône, le
Languedoc, la Provence. Cette carte est née pendant la Révolution française.
Les pays qui ont accepté la politique religieuse de la Révolution sont
généralement devenus les «mauvais» pays religieux des XIXe et XXe siècles,
et vice versa.
Cette carte est-elle toujours
d'actualité?
Elle n'a pas totalement disparu
mais elle n'existe plus vraiment comme carte de la pratique et des croyances,
plutôt comme carte culturelle et anthropologique. Par exemple dans la carte des
dons du sang en France, ce qui n'est pas tout à fait anodin symboliquement.
Tout un discours dans l'Église
au moment de ce tournant a été de dire que la qualité finirait par l'emporter
sur la quantité, et que c'en était fini d'un christianisme «sociologique».
Quels ont été les effets de ce discours?
On doit cette expression de
catholicisme «sociologique» à Gabriel Le Bras, qui a fondé la sociologie
religieuse dans les années 1930. Le fait que le catholicisme, censé procéder de
convictions intimes, avait une sociologie et une géographie particulières
stables dans la longue durée, montrait l'importance des facteurs collectifs
dans le maintien ou la perte de la foi. Le Bras n'était pas très optimiste sur
la teneur en christianisme «réel» du catholicisme de nombre de ses
contemporains. Le décrochage des courbes dans les années 1960 a souvent été
interprété comme le résultat d'une sorte d'opération vérité au terme de
laquelle ne seraient plus restés dans l'Église que les fidèles vraiment
convaincus. Vérité historique ou philosophie de la misère?
«Gabriel le Bras note qu'en
France, depuis les lendemains de la Révolution, chaque génération de
catholiques a eu plus ou moins le sentiment d'être la première à avoir une foi
vraiment personnelle»
Guillaume Cuchet
C'est bien difficile à dire, mais
l'historien note qu'en France, depuis les lendemains de la Révolution, chaque
génération de catholiques a eu plus ou moins le sentiment d'être la première à
avoir une foi vraiment personnelle! En réalité, c'est le concept même de
religion «sociologique» qui est problématique. Les catholiques d'aujourd'hui,
qu'on ne soupçonnera pas de l'être par pur conformisme social, ne sont-ils pas
eux aussi pour la plupart les enfants d'une certaine «sociologie», s'il faut
entendre par là les efforts accomplis par leurs parents pour leur transmettre
la foi?
L'Église est-elle devenue en
France trop élitiste?
Dans les années 1970, il y a eu
dans l'Église toute une controverse sur la «religion populaire» perçue par les
uns comme une chose positive à préserver et par les autres comme une sorte de
poids mort dont il fallait se débarrasser. Quelles qu'en soient les raisons, le
fait est que le catholicisme populaire «autochtone» a beaucoup diminué parmi
nous.
Guillaume Cuchet, Comment
notre monde a cessé d'être chrétien, Seuil, 288 pages.
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clôture solennelle du concile Vatican II
Un calme trompeur règne à Gaza après un vendredi meurtrier
(01.04.2018)
Après la mort de 17 manifestants
tués par des tirs israéliens, un nouveau cycle de violences est prévisible.
Légitime défense ou carnage
délibéré? L'affrontement entre Israël et le Hamas s'est déplacé dimanche sur le
front médiatique. Sur le terrain, un calme précaire a en revanche prévalu
après la
plus sanglante journée qu'ait connue la bande de Gaza depuis quatre ans avec 17
Palestiniens tués et des centaines de blessés par balles vendredi
lors de la Grande Marche organisée à la frontière pour exiger le «droit au
retour» des réfugiés palestiniens dans ce qui est devenu Israël. Ce lourd bilan
était prévisible.
L'armée israélienne avait
ostensiblement déployé pas moins d'une centaine de tireurs d'élite le long de
la frontière, ainsi que des très importants renforts en hommes, en chars, en
drones spécialement équipés pour répandre des gaz lacrymogènes sur les
manifestants se rapprochant du no man's land interdit d'accès. Les islamistes
palestiniens du Hamas au pouvoir dans la bande de Gaza avaient assuré que le
défilé serait «pacifique». Mais sans surprise, cet engagement n'a pas été tenu.
» LIRE AUSSI - L'effervescence
à Gaza inquiète Israël
Chacun joue désormais au petit
jeu du «ce n'est pas moi qui ai commencé». Seule certitude: les affrontements
de vendredi ont de fortes chances de ne constituer qu'un premier round. Le
Hamas compte maintenir au maximum la pression pendant un mois et demi jusqu'au
15 mai. Cette date a une double valeur symbolique. Elle marque la
commémoration de la Naqba, la catastrophe en arabe, autrement dit la création
de l'État d'Israël en 1948 et le départ volontaire ou forcé de leur foyer de
centaines de milliers de Palestiniens devenus des réfugiés. Mais
c'est aussi à la mi-mai que doit avoir lieu le transfert de l'ambassade
américaine de Tel-Aviv à Jérusalem annoncée par Donald Trump, qui a
provoqué la fureur des Palestiniens.
Deux raisons pour exprimer une
colère également attisée par les conséquences catastrophiques du sévère
blocus imposé par Israël depuis une décennie aux deux millions de
Gazaouis isolés également du reste du monde par la fermeture quasiment
permanente de la frontière avec l'Égypte. Bref, tous les éléments d'un cocktail
explosif sont réunis pour déclencher une nouvelle vague de violence susceptible
de dépasser en intensité celle du week-end.
Chacun des protagonistes se
prépare à cette échéance. Du côté israélien, les dirigeants ont accordé un
satisfecit aux soldats qui ont ouvert le feu contre les «terroristes qui
tentaient de s'attaquer à la souveraineté israélienne». Benyamin Nétanyahou, le
premier ministre a adressé un «bravo» enthousiaste à ses troupes. Le ministre
de la Défense Avigdor Lieberman a rejeté catégoriquement la création d'une
commission d'enquête réclamée par le Meretz un petit parti d'opposition de
gauche. Le porte-parole de l'armée est lui aussi monté au créneau en publiant
une liste de 10 Palestiniens tués présentés comme des membres de la branche
militaire du Hamas ou des activistes du Djihad islamique, un groupe encore plus
radical.
Mahmoud Abbas, le président de
l'Autorité palestinienne, a lancé un énième appel au secours à la communauté
internationale.
Objectif: prouver que les
dizaines de milliers manifestants de vendredi n'étaient pas de simples civils
«innocents» mais bien des militants encadrés par des «terroristes». Selon
Avigdor Lieberman, «90 % des manifestants étaient membres du Hamas».
L'armée a également diffusé une vidéo de deux Palestiniens armés s'approchant
de la frontière qui sont ensuite tués par des tirs de chars. «Il n'y a pas
d'images de femmes, d'enfants touchés. Nos tirs étaient très précis et il n'y a
pas eu d'assassinat ciblé», a assuré un porte-parole de l'armée. Plusieurs
organisations israéliennes de défense des droits de l'homme israéliennes ont
contesté cette version en laissant entendre que les soldats avaient eu la
gâchette trop facile.
Les Palestiniens ont eux aussi
engagé la guerre des images avec une vidéo où l'on voit un jeune Palestinien
tué d'une balle dans le dos alors qu'il s'éloigne en courant de la zone proche
de la frontière. Un document dont l'authenticité est tout aussi difficile à
apprécier que celui de l'armée israélienne. Seule certitude: le Hamas a admis
que cinq des tués faisaient partie de sa branche militaire.
De son côté, Mahmoud Abbas, le
président de l'Autorité palestinienne, qui gouverne une partie de la
Cisjordanie, n'a pas pu faire autrement que d'exprimer sa solidarité avec les
victimes de la manifestation organisée par le Hamas, le frère ennemi du Fatah,
son parti. Il a décrété une journée de deuil national et une grève générale
samedi en Cisjordanie et à Jérusalem qui n'a été que partiellement suivie tout
en lançant un énième appel au secours à la communauté internationale. Le Hamas
n'est pas non plus parvenu pour le moment malgré de multiples appels au
soulèvement à enflammer ces deux secteurs.
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À l'ONU, Israël rejette une demande d'enquête (01.04.2018)
Le secrétaire général des Nations
unies, Antonio Guterres, avait réclamé vendredi soir l'ouverture d'une investigation,
se disant «ému» par la gravité des événements.
New York
Israël a rejeté dimanche l'appel
des Nations unies à l'établissement d'une enquête indépendante sur l'usage par
l'armée israélienne de balles réelles, après les
violences survenues dans la bande de Gaza, tandis que les États-Unis
faisaient avorter une initiative en ce sens au Conseil de sécurité, à New York.
Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, avait réclamé
vendredi soir l'ouverture d'une telle investigation, se disant «ému» par la
gravité des événements. «Toutes les parties impliquées doivent s'abstenir
d'agir de quelque manière qui entraîne de nouvelles victimes et en particulier
de toute mesure qui mette en danger des civils», a précisé son porte-parole
Farhan Haq.
La réponse du gouvernement
israélien est tombée, cinglante. «Les soldats israéliens ont fait ce qui était
nécessaire. Je pense que tous nos soldats méritent une médaille», a rétorqué à
Guterres dimanche le ministre de la Défense Avigdor
Lieberman. «Pour ce qui est d'une commission d'enquête, il n'y en aura
pas.»
Blocage des États-Unis
Samedi soir, le Conseil de
sécurité de l'ONU s'était réuni en urgence pour évoquer la situation à Gaza, à
l'initiative du Koweït. Se déclarant «inquiète», la France avertissait du
risque d'escalade «réel», «un seuil (ayant) été franchi dans la violence»,
selon les termes du coordinateur politique de la représentation française à
l'ONU, Antoine Michon. «Il est urgent de reprendre rapidement les négociations
en vue de mettre en œuvre la solution à deux États», a déclaré celui-ci devant
le Conseil de sécurité, relayant les vœux d'Antonio Guterres. Paris appelle
Israël «au discernement et à la retenue», ainsi que les manifestants à «s'abstenir
de tout débordement».
Se déclarant «profondément
attristés» par les vies humaines perdues, les États-Unis ont néanmoins bloqué
l'adoption d'une déclaration finale du Conseil de sécurité, tandis que le
représentant israélien Danny Danon s'insurgeait contre l'initiative koweïtienne
lancée le premier soir de la Pâque juive et jugée «contraire à l'esprit des
Nations unies», les diplomates israéliens ne pouvant déroger à leurs
obligations religieuses. S'agissant de la demande d'enquête, Danon s'est dit
«choqué d'entendre une telle hypocrisie», ajoutant que les délégations
recevraient «des informations sur les terroristes» qui ont pris part aux
troubles. «La situation risque de se détériorer dans les prochains jours», a
confié sombrement un responsable de l'ONU, en marge de la réunion de samedi.
De son côté, le président
turc, Recep
Tayyip Erdogan, a qualifié dimanche le premier ministre israélien,
Benyamin Nétanyahou, de «terroriste», prolongeant une joute verbale entamée
vendredi.
Recep Tayyip Erdogan est revenu à
la charge dimanche pendant un discours devant ses partisans: «Nous ne sommes
pas frappés de la honte des envahisseurs, Nétanyahou. Vous êtes un envahisseur
et vous êtes présent sur ces terres en tant qu'envahisseur. En même temps, vous
êtes un terroriste.»
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Éthiopie : un premier ministre pour sortir de la crise
(01.04.2018)
INFOGRAPHIE - Abiy Ahmed est issu
de l'ethnie oromo, un groupe qui proteste depuis des années contre sa
marginalisation.
Abiy Ahmed sera lundi premier
ministre de l'Éthiopie. Ce
jeune homme de 42 ans a été choisi la semaine dernière comme
nouveau leader par le Conseil de l'EPRDF (le Front démocratique révolutionnaire
des peuples éthiopiens), le tout-puissant parti au pouvoir. Il lui reste certes
à être élu par le Parlement mais ce vote ressemble à une formalité, l'EPRDF y
disposant de la totalité des 524 sièges. La surprise de cette désignation tient
moins à son âge qu'à son origine oromo. Ce groupe ethnique, le plus grand du
pays avec environ 34 % de la population, s'estime, non sans raison,
marginalisé par les Tigréens (6 %) qui concentrent entre leurs mains
presque tous les pouvoirs. Il ne fait guère de doute que l'élection d'Abiy
Ahmed vise à donner des gages à la population, en particulier aux Oromos, qui
depuis des semaines intensifient les protestations. Jamais en vingt-sept ans de
pouvoir, l'EPRDF, une coalition de quatre partis, n'avait propulsé un membre du
groupe dominant au pouvoir. «Il y a une évidente volonté d'apaisement», affirme
Awol Allo, un analyste politique éthiopien.
La tâche qui attend Abiy Ahmed
est colossale, comme tout dans ce pays de plus de 100 millions d'habitants
en pleine croissance économique. Il lui faudra d'abord mettre un terme aux
manifestations qui bloquent régulièrement Addis-Abeba. Ce mouvement de
contestation est né en 2015 dans les régions oromos, lassées de leur pauvreté
et des méthodes ultra-autoritaires de l'EPRDF. Les protestations n'ont fait
depuis que s'amplifier, s'étendant à d'autres communautés, à commencer par les
Amharas. À eux deux ces groupes forment presque 60 % de la population. Une
répression s'est abattue, faisant officiellement 940 morts, un chiffre très
sous-estimé selon plusieurs ONG. Sans vrais effets. La grogne persiste. Elle a
entraîné la démission surprise le 15 février du premier ministre
Hailemariam Desalegn et l'instauration d'un nouvel état d'urgence.
La priorité pour Abiy Ahmed est
de mettre un terme au régime d'exception qui crispe la situation et plombe
l'économie. Les autorités soufflent sur ce point le chaud et le froid. Si,
après le départ du premier ministre, elles ont semblé faire des concessions,
elles ont depuis repris la méthode brutale. Plusieurs prisonniers
emblématiques, comme le journaliste Eskinder Nega et l'homme politique Andualem
Arage, qui avaient été libérés en mars après plus de six années de prison, ont
été réincarcérés la semaine dernière. Et, plus de 1 100 personnes ont été
arrêtées depuis l'instauration de l'état d'urgence selon les médias officiels.
La capacité à faire libérer ces
opposants montrera pour beaucoup la marge de manœuvre dont dispose réellement
le nouvel élu. Les conditions de son accès au pouvoir restent mystérieuses. Il
a été désigné par les 180 membres du Conseil de l'EPRDF au cours d'un processus
très opaque, une habitude dans ce mouvement qui n'a jamais oublié ses vieux
réflexes de guérilla clandestine et marxiste. Le temps qu'a pris cette
désignation montre que ce ne fut pas simple. L'analyste éthiopien Hallelujah
Lulie, cité par l'AFP, souligne ainsi que l'on ignore quelles promesses il a pu
faire aux autres membres de la coalition. Chef depuis peu de l'Organisation
démocratique du peuple oromo (Opdo), l'une des branches de l'EPRDF, Abiy Ahmed
a forcément dû s'engager sur certains points auprès du TPLF, l'omnipotente
organisation tigréenne.
«Quand vous voyez les
changements qui ont eu lieu au sein de l'Opdo, il y a toutes les raisons de
penser qu'il poussera l'agenda réformateur de son parti.»
Roland Marchal, chercheur à
Sciences Po
«Ce n'est pas un simple jeu de
chaises musicales mais ce n'est pas beaucoup plus», pense Roland Marchal,
chercheur à Sciences Po. Pour Awol Allo, les chances qu'il engage des réformes
sont pourtant grandes. «Quand vous voyez les changements qui ont eu lieu au
sein de l'Opdo, il y a toutes les raisons de penser qu'il poussera l'agenda
réformateur de son parti», dit-il. Une allusion a la liberté de ton de l'Opdo
qui, après avoir longtemps été comme une simple marionnette des Tigréens, s'est
crédibilisée en se rapprochant ces dernières années des manifestants et de
leurs revendications.
«L'élection d'Abiy est
significative pour plusieurs raisons. Premièrement, c'est la seule chose qui
pouvait empêcher la dissolution de l'EPRDF. Ensuite, il est le seul qui soit à
peu près acceptable en région oromo», a tranché, sur Twitter l'activiste oromo
Mohammed Ademo, d'un optimisme mesuré.
Cette prudence vient sans doute
du parcours d'Abiy Ahmed qui est loin d'être celui d'un révolutionnaire. Ancien
ministre des Sciences et de la Technologie, il est un représentant du sérail.
Il est certes né en Oromia, dans une famille mi-chrétienne mi-musulmane, mais
il est vite entré dans l'armée où il a fait carrière jusqu'au grade de
lieutenant-colonel. Il a ensuite rejoint les services de sécurité où il a
cofondé puis dirigé l'Information Network and Security Agency, qui a largement
contribué à exercer un contrôle ferme sur Internet et les réseaux sociaux. «Il
va devoir satisfaire les demandes politiques des Éthiopiens qui souhaitent un
débat pluriel. C'est complexe, mais pas infaisable. Mais au niveau social, il
sera plus délicat de répondre aux exigences car ça demande de réviser des
fonctionnements, d'engager notamment une réforme agraire», explique Roland
Marchal.
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Un djihadiste malien livré à la justice internationale
(01.04.2018)
Le commissaire al-Hassan était à
la tête de la police des mœurs de Tombouctou lors de l'occupation islamiste de
la ville.
Le commissaire de Tombouctou
devra rendre compte de ses actes devant la justice internationale. Al-Hassan,
un djihadiste malien a été remis samedi à la Cour pénale internationale (CPI)
qui l'accuse notamment de viols et crimes contre l'humanité. Al-Hassan, 40 ans,
de son nom complet al-Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, est une
figure de l'occupation islamiste de la ville, entre 2012 et 2013. Il était très
proche de Mohammed Moussa, l'un des chefs d'Ansar Dine, un groupe touareg lié à
al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Le commissaire avait en charge la police
des mœurs qui imposait de manière tatillonne la charia, la loi islamique. Les
habitants se souviennent des patrouilles de sa voiture, un 4 × 4
noir, et de la peur qu'inspirait sa police, dans ses locaux, une ancienne
banque de la ville reconvertie.
De nombreuses femmes ont été
arrêtées pour avoir «enfreint» la loi islamique, un prétexte selon
l'accusation, pour des abus sexuels. «Il aurait participé à la politique de
mariages forcés (…), qui ont donné lieu à des viols répétés et à la réduction
de femmes et de jeunes filles à l'état d'esclaves sexuelles», a indiqué la CPI
dans un communiqué. Il aurait aussi pris une part active dans la destruction
systématique des mausolées de saints dans la cité du désert. Pour avoir arasé
ces sanctuaires vieux de plusieurs siècles, un premier djihadiste, Ahmad
al-Faqi al-Mahdi, a été jugé devant la CPI. En 2016, il a été condamné à neuf
ans de prison. Al-Hassan pour sa part devrait comparaître pour la première fois
à La Haye le 4 avril.
Cet article est publié dans
l'édition du Figaro du 02/04/2018. Accédez à sa version
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Royaume-Uni : le parti travailliste accusé de complaisance
face à l'antisémitisme (01.04.2018)
Le parti dirigé par Jeremy Corbyn
a perdu le soutien de l'un de ses grands donateurs.
L'interview donnée mercredi par
Jeremy Corbyn au Jewish News, un média juif du Royaume-Uni, n'a pas
permis d'éteindre l'incendie. La communauté juive britannique n'est toujours
pas convaincue de la détermination du leader travailliste à combattre
l'antisémitisme dans les rangs de son parti. Un des plus gros donateurs du
Labour a en effet annoncé hier qu'il mettait fin à son adhésion au Parti
travailliste. Sir David Garrard, qui a fait don de 1,5 million de livres
sterling (environ 1,14 million d'euros) au Parti travailliste depuis 2003,
a déclaré à The Observerqu'il ne se sentait «plus aucune
affinité ni aucun lien» avec le Labour.
Cette décision intervient au
terme d'une semaine extrêmement tumultueuse pour le premier parti d'opposition
de Grande-Bretagne, accusé de faire preuve de complaisance face à
l'antisémitisme. Lundi dernier, une manifestation organisée par une
organisation juive, le Board of Deputies of British Jews, a rassemblé plusieurs
centaines de personnes devant le Parlement de Westminster. Les organisateurs du
mouvement de protestation reprochent à Jeremy Corbyn de se trouver
régulièrement «du côté des antisémites».
Depuis
son élection à la tête du Labour en septembre 2015, le député
socialiste a été accusé à plusieurs reprises de ne pas avoir réagi avec
suffisamment de fermeté aux propos antisémites tenus par certains
travaillistes.
Jeremy Corbyn directement mis
en cause
L'attitude adoptée par le Labour
à l'égard de l'ancien maire de Londres, Ken Livingstone, par exemple, est très
contestée, notamment par les membres du mouvement travailliste juif. Ken
Livingstone, qui avait déclaré en 2016 que Hitler «soutenait
le sionisme avant de devenir fou et de finir par tuer six millions de Juifs»,
a été suspendu pendant deux ans. Ses critiques souhaitent qu'ils soient exclus
du Labour à titre définitif.
Jeremy Corbyn a également été
directement mis en cause pour le soutien qu'il a exprimé à des individus et à
des organisations antisémites. Le 23 mars dernier, Corbyn s'est excusé
pour un commentaire publié en 2012 sur Facebook. Il avait apporté son soutien à
un graffeur dont la fresque, qui comportait des symboles clairement
antisémites, était sur le point d'être effacée.
Jeudi dernier, John McDonnell, le
bras droit du leader travailliste, s'est engagé à ce que l'antisémitisme soit
éradiqué des rangs du Labour. Selon le responsable des questions économiques au
sein du cabinet fantôme, la démission mercredi dernier de Christine Shawcroft
prouve la détermination du parti à s'attaquer au problème. Cette responsable
travailliste avait demandé la réhabilitation d'un candidat aux élections
locales du 3 mai alors que celui-ci avait tenu des propos négationnistes.
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(12.06.2017)
FIGAROVOX/CHRONIQUE - Malgré les
attentats en Grande-Bretagne, la question du terrorisme islamique ne fut pas au
cœur des débats lors des législatives britanniques. Dans sa chronique,
Gilles-William Goldnadel critique la position sur l'islam de Jeremy Corbyn,
leader du parti de l'opposition.
Gilles-William Goldnadel est
avocat et écrivain. Il est président de l'association France-Israël. Toutes les
semaines, il décrypte l'actualité pour FigaroVox.
Interdiction d'aborder la
question matricielle des responsabilités intellectuelles, médiatiques et
politiques du terrorisme islamique désormais quotidien qui ensanglante
l'Europe.
Il est des jours où l'on voudrait
tellement s'être trompé. Des jours où ses appréhensions obsessives se trouvent
confirmées au-delà de toute désespérance.
Ce lundi noir du résultat des
élections anglaises sera sur ce point à marquer d'une pierre tombale.
Qu'ai-je constamment écrit ces
dernières semaines à propos du regard strabique imposé sur le terrorisme
islamique?
Qu'il existait des territoires
occultés de l'information dominante.
Qu'un surmoi névrotique empêchait
de regarder en face la réalité de l'islam radical et les questions migratoires
et associées.
Qu'une idéologie de dilection
pour l'altérité s'employait à privilégier dans le débat électoral, par souci de
diversion, le primat aseptisé de l'économie au détriment des questions
sociétales infectées. Tout porteur de ces discours étant traité par des
journalistes-infirmiers diplômés comme une manière de pestiféré, avec force
bruissement de crécelles alentour pour la prophylaxie.
C'est donc dans ce cadre
idéologique largement inconscient que les élections anglaises doivent être
observées de manière objectivement critique et, pour l'auteur engagé de ces
lignes, assez désespéré.
Voilà un pays qui aura connu en
l'espace d'un mois à Manchester puis dans sa capitale Londres, deux attentats
terroristes sanglants dramatiquement retentissants ayant pour auteurs des
musulmans radicaux issus de tant de l'immigration que de la migration.
Le dernier attentat sur le London
Bridge s'étant déroulé à quelques heures de la consultation nationale,
l'idéologie précitée ne put éviter, qu'au rebours des élections françaises, le
débat sur la question du terrorisme islamique soit abordé de front . L'émotion
encore vive empêchant l'occultation, la durée de vie émotionnelle d'un attentat
mortel ne dépassant pas la semaine.
Et à quoi ce débat obligatoire se
borna-t-il? En dehors d'une imprécation salutaire par la première britannique
contre «la tolérance excessive pour l'idéologie malfaisante de l'islamisme
radical» qui contrastait avec la vacuité abyssale du discours du premier
français (ma précédente chronique: «N'ayons
pas peur de nommer l'islam radical»): A un débat sécuritaire, nécessaire
mais aseptisé sur l'insuffisance des moyens policiers.
Autrement dit, interdiction
d'aborder la question matricielle des responsabilités intellectuelles,
médiatiques et politiques du terrorisme islamique désormais quotidien qui
ensanglante l'Europe.
S'il en avait été autrement le
focus aurait été naturellement pointé sur la personnalité très particulière du
leader de l'opposition travailliste Jérémy Corbyn.
Un article publié par le
Monde du 16 septembre 2015 aurait été épousseté: «Monsieur Corbyn
est un militant pro- palestinien depuis des décennies, très actif en tant que
parlementaire. Il a présidé d'autre part le Collectif «Stop the War» qui a
organisé de grandes manifestations contre les guerres en Afghanistan et en
Irak. Attaqué en juillet pour avoir utilisé le mot «ami» en accueillant des
délégations du Hamas et du Hezbollah lors d'une rencontre parlementaire, il a
répondu qu'il s'agissait d'une expression «collective» et de «langage
diplomatique»… Après l'avoir nié, Corbyn a aussi admis avoir rencontré à
Londres en 2009 Dyab Abou Jajah, ancien combattant du Hezbollah et leader en
Belgique d'un mouvement islamiste, la Ligue Arabe Européenne, qui a organisé à
Anvers en 2002 des manifestations communautaires qui ont tourné à l'émeute
après l'assassinat d'un enseignant d'origine marocaine.»
«… En août ce militant a
qualifié Monsieur Corbyn «d'ami» sur son compte Twitter. Il a affirmé avoir
rencontré Monsieur Corbyn et avoir collaboré avec lui.» «Monsieur Corbyn
a aussi a aussi été mis en cause par le journal juif britannique Jewish
Chronicle pour avoir assisté à des réunions du groupe «Deir Yassine Remembered»
fondé par le négationniste Paul Eisen… Le responsable travailliste a reconnu
avoir assisté à «deux ou trois événements voici quelques années».… Le meilleur
pour la fin: «En juillet, Monsieur Corbyn avait tenté en vain d'intervenir
auprès de la banque HSBC qui venait de clôturer d'autorité le compte de la
mosquée de Finsbury Park. Une enquête de la BBC a établi que cette décision
était prise afin d'éviter les foudres de l'administration du fait de
l'inscription du lieu de culte sur un fichier de vigilance bancaire sous la
rubrique «terrorisme» en raison de ses activités antérieures à 2005.
L'interdiction bancaire est aussi liée, selon la BBC, à la présence au conseil
d'administration de la mosquée de Mohammed Sawalah, une figure des Frères
Musulmans soupçonnée d'être un ancien commandant du Hamas à Gaza. Alors que
Sawalah occupe cette position depuis la réouverture de la mosquée en 2005, le
retrait de HSBC semble consécutif à la décision de David Cameron, en 2014, de
commander un rapport sur les liens entre les Frères Musulmans et le terrorisme»
«Enfin, Corbyn a effectivement participé à Londres, le 12 février 2006, à
une manifestation contre les caricatures de Mahomet… À propos des attentats de
Paris, le député a diffusé à la chambre des Communes une motion qui ne faisait
pas allusion à l'attaque meurtrière contre le supermarché kasher mais exprimé
sa sympathie à l'égard des victimes de l'attentat contre Charlie Hebdo.»
À la lecture accablante de ce qui
précède, qui pourrait soutenir de bonne foi, que dans le cadre d'un débat
rationnel et honnête, le positionnement radicalement pro- islamiste du leader
de l'opposition n'aurait pas dû être placé au centre même du débat électoral
portant sur ce terrorisme islamique qui venait de frapper doublement?
Qui oserait soutenir que ce passé
récent de Corbyn qui en fait une sorte de caricature d'islamo-gauchiste pur et
dur, pour ne pas écrire de compagnon de route des islamistes radicaux , a été
porté à la connaissance du public français au moment même où il s'imposait?
Diversion suprême, telle une
cerise sur le gâteau de l'occultation, alors que la première ministre
britannique tente de former un gouvernement, le focus est désormais placé sur
son alliance forcément contre nature avec un parti irlandais unioniste pro-life
et anti mariage gay, plutôt que sur l'alternative obscénité de voir un parti
travailliste au pouvoir dirigé par le gauchiste radical précité.
Car exactement pour les mêmes
raisons qui font que, pour protéger toute une classe médiatique et
intellectuelle, le procès du communisme n'a pas été instruit il y a 30 ans, la
question de la responsabilité de l'islamo-gauchisme ne sera pas posée.
Interdiction de s'interroger
sur la bienveillante compréhension du gauchisme à l'égard de la violence
terroriste.
Interdiction donc de s'interroger
sur les responsabilités d'une pensée réflexe plutôt que construite qui aura
aboli pendant des décennies toute pensée critique sur les crimes de l'islamisme
et son rapport aux femmes, aux juifs, aux chrétiens, aux homosexuels et à la
démocratie.
Interdiction de s'interroger sur
la bienveillante compréhension du gauchisme à l'égard de la violence
terroriste.
Interdiction de ne considérer
autrement que comme irénique et bienfaisante l'immigration islamique aussi
massive qu'irrésistible. Interdiction de s'interroger sur les ratés manifestes
de l'intégration sinon sous les angles obtus d'une discrimination économique et
raciale aiguë.
Et c'est sous l'empire de cette
interdiction, qu'en Grande-Bretagne, Jeremy Corbyn remporta un succès plutôt
que d'être décrété d'accusation. Et qu'en France, la question du terrorisme
islamique n'a pas été posée durant le combat électoral et qu'aujourd'hui son
vainqueur s'interdit même de le nommer .
Mais, les véritables raisons de
la puissance de l'occultation - diversion sont sans doute moins intellectuelles
et culturelles qu'épidermiques et tripales.
Au demeurant, l'article du Monde que
j'ai cité était avant tout rédigé pour faire le procès de Caroline Fourest
coupable «de s'être laissée emporter par ses arguments» à trop
méchamment diaboliser le dirigeant travailliste dont il convenait malgré tout
de relativiser les excès.
Le journal vespéral se faisant moins
pondéré lorsqu'il pèse chaque jour les fautes de la droite nationale.
On veut bien jeter aux chiens
un président qui veut murer son territoire devant l'islam, mais pas question de
mettre à la question quelqu'un qui voudrait lui ouvrir ses portes et fenêtres.
Monsieur Corbyn n'aura pas été
mis sur la sellette, parce que dans ce monde esthétique qui gouverne les cœurs
, il ne fait pas l'objet d'une particulière détestation. Au fond, quelqu'un qui
est bon envers l'islam même radical ne peut pas être tout à fait mauvais. On
veut bien jeter aux chiens ou à l'asile un président peroxydé qui veut murer
son territoire devant l'islam, mais pas question de mettre à la question
quelqu'un qui voudrait lui ouvrir ses portes et fenêtres.
La question idéologique de nos
temps névrotiques et sanglants ne relève ni des idées ni de la logique, mais du
cœur et du sang.
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Gilles William Goldnadel
Violences à Gaza : la gauche condamne Israël, l'exécutif
reste silencieux (01.04.2018)
LE SCAN POLITIQUE - La France
insoumise et le PS ont critiqué l'usage de la force par l'armée israélienne qui
a tué 16 Palestiniens et blessé plus de 1400 personnes dans la bande de Gaza
vendredi.
Il s'agit des affrontements les
plus meurtriers depuis la guerre de 2014. Vendredi, l'armée israélienne a ouvert le feu sur des Palestiniens qui s'étaient approchés à
quelques centaines de mètres de la barrière séparant l'Etat hébreu de la bande
de Gaza. Le bilan est très lourd: 16 Palestiniens ont été tués et plus
de 1400 blessés, dont 758 par des tirs à balles réelles.
Au niveau international, les
réactions ont été nombreuses. Les Etats-Unis se sont dits «profondément
attristés par les pertes humaines à Gaza», exigeant «des mesures pour faire
diminuer les tensions», tout en bloquant un projet de déclaration de l'ONU
appelant «toutes les parties à la retenue». Le secrétaire général de l'ONU,
Antonio Guterres, ainsi que la représentante de la diplomatie européenne
Federica Mogherini, ont réclamé une «enquête indépendante» sur l'usage par
Israël de munitions réelles.
Le Quai d'Orsay n'a pas réagi
pour le moment, tout comme l'Elysée. Mais à gauche de l'échiquier politique,
les condamnations sont nombreuses. Le leader des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon,
a été l'un des premiers à réagir. «La violence et la cruauté sans borne du
gouvernement d'Israël allument volontairement un incendie sans limite. Les
casques bleus doivent être déployés», a exigé le député des Bouches-du-Rhône.
Ses collègues du groupe LFI à l'Assemblée ont multiplié les condamnations,
participant à des rassemblements pro-palestiniens, à l'instar d'Adrien
Quatennens à Lille.
Valls réplique à Faure
Le nouveau premier secrétaire du
PS, Olivier Faure, a lui aussi condamné l'action d'Israël. «Au moment où Israël
fête Pessah (la pâque juive, ndlr) commémoration du passage de la mer rouge par
le peuple juif sortant de l'esclavage, terrible effet de sens quand Tsahal tire
sur la marche des Gazaouis. Chaque mort renforce les stratégies du pire»,
a-t-il écrit sur Twitter, appelant la France à «peser de toute son influence».
L'ancien premier ministre Manuel
Valls, qui a multiplié depuis la fin de son passage à Matignon les signes
d'amitié vis-à-vis d'Israël, lui a fermement répondu. «Ce genre de commentaire
pseudo-religieux serait-il possible sur tout autre conflit? Non. Qui rappelle
que le premier ministre de l'Autorité Palestinienne a subi un attentat à Gaza
probablement commandité par le Hamas?Un peu de recul et de maîtrise du dossier
s'imposent», a-t-il écrit sur Twitter.
La députée PS Valérie Rabault
s'est quant à elle étonnée du «silence de la France» sur le sujet.
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Au congrès de l'ex-UOIF, affluence au stand «Free Tariq
Ramadan» (01.04.2018)
Alors qu'il est en prison, le
prédicateur continue d'attirer les foules, qui achètent ses livres et signent
sa pétition de soutien.
Un stand attire l'œil dès
l'entrée du 35e rassemblement
des Musulmans de France (nouveau nom de l'Union des organisations
islamiques de France, UOIF), au Parc des expositions du Bourget, en
Seine-Saint-Denis. Valorisé par sa position centrale dans le grand hall
d'accueil, le stand «Free Tariq Ramadan» («libérer Tariq Ramadan») abonde en
activité et en fréquentation. Ce prédicateur musulman, jusque-là superstar de
ce rendez-vous annuel qui se tient toujours pendant le week-end des fêtes de
Pâques, avec quelque 170.000 visiteurs, est sous les verrous. Il est accusé
par trois femmes d'agressions sexuelles. Aussi de faire signer, en
cette absence remarquable, une pétition à son effigie qui sera adressée au
président de la République et à la ministre de la Justice pour que la
présomption d'innocence soit respectée, affirme un tract. On affirme ici que
«ses droits fondamentaux sont bafoués» et qu'il vit une «incarcération sans
jugement, sans fondement et dans un état de santé alarmant».
Avec son épouse, Jamel, la
quarantaine, en jean, baskets et doudoune tendance, vient de signer la
pétition. «Je demande que soit respectée la présomption d'innocence et qu'il ne
soit pas déjà jugé coupable par un tribunal médiatique qui va de la gauche à la
droite, martèle-t-il. Je n'attends pas cela d'un pays comme la France.
L'affaire a perturbé la communauté, mais cela nous met en colère de voir qu'un
musulman soit traité de cette manière dans ce pays.»
«Nous assistons à un lynchage
médiatique. Or nous croyons à une justice indépendante en France, dont nous
sommes fiers.»
Amar Lasfar, président des
Musulmans de France
Le président des Musulmans de
France, Amar Lasfar, est sur la même ligne: «Nous assistons à un lynchage
médiatique, s'agace-t-il. Or nous croyons à une justice indépendante en France,
dont nous sommes fiers. Nous demandons donc un procès équitable et que l'on
prenne en compte sa santé. Nous prions Dieu pour qu'il soit libéré et qu'il
soit blanchi. Même s'il était condamné, la pensée de Tariq Ramadan restera.
Personne ne peut remettre en cause ce qu'il a enseigné. D'ailleurs, ses livres
se vendent comme des petits pains sur son stand.»
Dans
le contexte des attentats, Amar Lasfar a tenu à revenir, devant la
presse, sur la lutte contre la radicalisation. «Si vous avez une recette,
donnez-la nous, nous l'appliquerons à la lettre, lance-t-il. Mais notre travail
porte surtout sur la prévention. Nous avons beaucoup œuvré pour créer des
écoles, assurer la promotion sociale des musulmans pour qu'ils ne tombent pas
dans la délinquance. Nous travaillons également à la citoyenneté: un bon
musulman doit être un bon citoyen. Pour nous, le respect de la loi est un
devoir religieux! Nous sommes pour la laïcité. La loi de séparation de 1905
nous va très bien. Voilà la meilleure façon de s'immuniser contre l'islamisme.»
Quant à l'idée d'«interdire» le
salafisme, il répond: «Il ne suffit pas de l'interdire. Ces 15 ou
20 terroristes se disent musulmans, mais moi, je n'ai pas le pouvoir de
les excommunier. D'ailleurs, ces mouvements, le salafisme et l'islamisme, ils
sont en perte de vitesse. L'islam, en tant que tel, n'est pas responsable de
tout ce qui s'est passé. Nous, musulmans, nous avons notre part de
responsabilité, mais l'État également, l'école de la République aussi. Il ne
faut pas tout nous demander.»
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Rédacteur en chef,
chargé des religions
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L'OCDE presse la Tunisie d'accélérer les réformes
(01.04.2018)
Le pays redresse la tête mais
doit encore lever des obstacles à l'investissement étranger, préalable aux
créations d'emplois.
La Tunisie est au milieu du gué.
Sept ans après les printemps
arabes, un long processus de transition démocratique qui sera marqué
début mai par les premières élections municipales depuis la révolution, le défi
est de doper l'économie. «Le pays a connu un contexte très difficile, rappelle
Isabelle Joumard de l'OCDE, qui vient de publier une première étude sur le
pays. Il fallait réaliser la transition politique avant la transition
économique.» Le rapport de l'organisation internationale souligne le «saut
démocratique significatif», mesuré par l'indicateur de la Banque
mondiale, sur la liberté d'expression et la capacité des citoyens à participer
à la vie politique. Autre indicateur de progrès, la représentation des femmes à
l'Assemblée est plus élevée que dans la majorité des pays de l'OCDE et des pays
émergents.
«L'export tunisien est plus
intégré dans les chaînes de valeur mondiales, comparable au Portugal, sur des
secteurs à plus forte valeur ajoutée et plus intensifs en compétences.»
Isabelle Joumard (OCDE)
Sur le front économique, la
croissance a connu une accélération l'an dernier - hausse du PIB de 2 %
contre 1 % en 2016 - soutenue par de bonnes récoltes, une conjoncture
internationale favorable, en particulier en Europe, son principal client et une
reprise du tourisme, secteur clé sinistré après les attentats de 2015. Le recul
du risque sécuritaire a permis le
retour des touristes (hausse de 27 % l'an dernier).
L'embellie reste toutefois nettement insuffisante pour permettre un
développement inclusif de la société même si le taux de pauvreté a reculé ces
dernières années. Le PIB par habitant a décliné depuis 2010 et le chômage atteint
15,4 % et plus de 30 % chez les jeunes.L'organisation internationale
plaide pour une accélération des réformes, en priorité sur l'investissement,
«précurseur des créations d'emplois, surtout dans le secteur formel», insiste
Isabelle Joumard. L'investissement des entreprises a marqué le pas ces
dernières années, en raison de l'insécurité et des freins structurels, l'étude
met en avant «la prolifération des réglementations et des autorisations et
l'inefficacité des services logistiques».
Disparités régionales
Le gouvernement a lancé depuis
plus d'un an un plan d'investissement et de développement, dont l'objectif
chiffré est de doper le PIB de 4 % par an. «Tunisie 2020» vise à
simplifier les procédures et libéraliser les marchés, notamment pour les investissements
étrangers. Là encore, en dépit d'avancées, beaucoup de restrictions subsistent.
L'OCDE souligne la dichotomie entre le marché national rigide et l'activité
moins réglementée destinée aux marchés étrangers, exemptée de droits de douane.
«L'export tunisien est plus intégré dans les chaînes de valeur mondiales,
comparable au Portugal, sur des secteurs à plus forte valeur ajoutée et plus
intensifs en compétences», complète Isabelle Joumard, mentionnant l'électrique
et la mécanique qui ont supplanté le textile. Le secteur «offshore» (ces
sociétés qui réexportent des biens transformés sur place) est de fait beaucoup
plus dynamique: le nombre d'entreprises a été multiplié par plus de 13 fois en
vingt ans contre deux fois pour les autres sociétés. En 2015, ces entreprises
ont contribué à plus de 34 % de l'emploi salarié formel et 78 % des
exportations hors énergie. Ce grand écart marque aussi d'importantes disparités
régionales, entre les régions côtières plus dynamiques, à l'image du port
d'exportation de Gabès, et l'intérieur du pays plus déshérité.
«Il faut promouvoir le
développement régional et mettre l'accent sur l'éducation, surtout
l'enseignement secondaire et supérieur qui n'est pas adapté aux besoins du
marché», ajoute l'économiste. L'OCDE pointe la persistance
de risques liés aux tensions sociales et l'insécurité. Autre
fragilité mise en avant: le dérapage des finances publiques, qui nécessite
l'instauration d'un plafond des dépenses. Le rapport table sur une accélération
du PIB à 3 % en 2018 et 3,5 % l'an prochain. La Tunisie, en mixant
gestion saine et réformes, a les moyens d'enclencher un cercle vertueux de
croissance et d'emplois.
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L'Allemagne débat autour d'un «revenu solidaire de base»
(30.03.2018)
Les pistes avancées pour soutenir
150.000 chômeurs de longue durée divisent la classe politique, surtout le SPD.
De notre correspondant à
Berlin
La prospérité allemande ne
bénéficie pas à tous. De l'autre côté du Rhin, près de 6 millions de
personnes, adultes ou mineurs, au chômage, en formation ou dans des minijobs,
perçoivent le minimum social «Hartz IV». Le mot fait frémir. Il est devenu synonyme
de précarité, de pauvreté ou d'impasse. C'est l'un des défis du nouveau
gouvernement et notamment la lutte contre le chômage de longue durée, qui
touche 850.000 personnes.
Pour les sortir de l'inactivité,
le maire de Berlin, Michael Müller, a relancé cette semaine l'idée d'un «revenu
solidaire de base». Celui-ci serait versé aux chômeurs de longue durée en
contrepartie d'un emploi d'utilité publique au niveau communal. D'un montant de
1200 euros, il remplacerait les allocations sociales Hartz IV
(416 euros par mois pour une personne seule).
«C'est une chance pour le SPD
de montrer qu'il existe une alternative aux réformes Hartz IV»
Le maire de Berlin, Michael
Müller
Ce que Michael Müller propose,
c'est un premier pas vers la refonte du système d'assurance-chômage allemand
créé par le SPD au début des années 2000 et de «tourner la page» des
réformes Hartz, stigmate politique dont le SPD voudrait se défaire.
«C'est une chance pour le SPD de montrer qu'il existe une alternative aux
réformes Hartz IV», a-t-il insisté dans une tribune publiée cette semaine dans
le Tagesspiegel. Le ministre SPD des Affaires sociales, Hubertus
Heil, y a répondu favorablement en jugeant «nécessaire» la réflexion. Le SPD
voudrait ainsi marquer ses différences avec la CDU. Au début du mois, un
ministre conservateur, Jens Spahn, avait suscité la polémique en estimant que
les personnes touchant le minimum social n'étaient «pas pauvres».
Les syndicats ont salué un pas
«dans la bonne direction»: «Il vaut mieux financer le travail que le chômage»,
a estimé le leader du DGB Rainer Hoffmann. De son côté, le patronat a dénoncé
«l'erreur» d'emplois subventionnés sans réalité économique.
Marché du travail social
Mais la critique la plus
définitive est venue des rangs même du SPD. Le ministre des Finances SPD Olaf
Scholz, président par intérim du parti, a prévenu qu'il n'était «pas question»
de remettre en cause le système Hartz IV et «son principe»: «aider et exiger».
Olaf Scholz a été l'un des artisans de la mise en œuvre de l'Agenda 2010.
Avec son idée, le maire de Berlin
n'a toutefois pas tout perdu. Il a ouvert la discussion sur la création d'un
«marché du travail social». Le projet figure en ces termes dans le contrat de
coalition signé entre la CDU/CSU et le SPD. Celui-ci concernerait environ
150.000 chômeurs de longue durée en situation particulièrement difficile. Ils
seraient embauchés au salaire minimum par les communes pour des travaux
simples. Un budget d'un milliard d'euros par an est prévu.
En jouant sur la confusion des
termes, Michael Müller a aussi tenté peut-être de se réapproprier l'idée
du «revenu de base universel», délivré à tous et sans conditions.
L'idée est expérimentée depuis quatre ans à Berlin par une association, Mein
Grundeinkommen: grâce à des dons, elle finance pendant un an un revenu minimum
de 1000 euros pour des personnes tirées au sort. 159 Berlinois en ont déjà
profité ou vont le percevoir.
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L'expérience de revenu universel en Finlande ne sera pas
prolongée (30.03.2018)
REPORTAGE - Depuis un an, 2000
chômeurs, tirés au sort, touchent d'une allocation sans condition. Les
bénéficiaires estiment ce système plus compatible avec la reprise d'une
activité. Le gouvernement n'est pas convaincu.
Jurva (Finlande)
Juha Järvinen, père de famille
finlandais de 39 ans, se dit «toujours super heureux de recevoir un revenu de
base sans conditions depuis plus d'un an», un ballon d'oxygène salutaire après
des années de galère, de chômage, qui lui a permis de se «remettre à flot».
Il est l'un des deux mille
chômeurs tirés au sort dans toute la Finlande, âgés de 25 à 58 ans, qui
bénéficient depuis janvier 2017, pendant deux ans, d'un montant net de 560
euros par mois, correspondant aux minima sociaux, dans ce pays où le
chômage est de 8,4% et où le revenu net moyen dépasse les 2200 euros par
personne selon l'OCDE.
Cette expérience de revenu
universel, la première réalisée à l'échelle nationale en Europe, est destinée à
«promouvoir l'emploi et à motiver les chômeurs pour être plus entreprenants»
selon le premier ministre centriste Juha Sipilä, un de ses ardents défenseurs.
«Je peux accepter maintenant
des petits travaux et autant que je veux sans craindre de perdre mes
allocations comme par le passé lorsque j'étais au chômage»
Tuomas Muraja, écrivain
bénéficiaire du revenu universel
Dans son village de Jurva, à 400
km au nord-ouest d'Helsinki, Juha Järvinen raconte comment, sept ans après la
faillite de sa société fabricant des cadres de fenêtres décoratifs, il était
«au bout du rouleau». Pour ce vidéaste et sculpteur, il n'était plus possible
d'emprunter à la banque pour démarrer une nouvelle affaire. Ce père de six
enfants, plutôt que de tenter l'aventure à la capitale, préférait rester dans
sa région afin de recréer une entreprise. Le revenu universel était «en quelque
sorte la manne providentielle, même si c'est un petit montant, raconte-t-il.
J'ai utilisé ces 560 euros pour acheter à manger et le travail de ma femme,
Mari, a arrondi le budget du ménage. J'ai pu ainsi enregistrer ma nouvelle
entreprise - une fabrique de tambours chamaniques traditionnels - et ce que
j'ai gagné (environ 1000 euros par mois) a servi à investir dans de nouveaux
appareils. Mon affaire prospère et je suis sûr qu'à la fin de cette année je
serai debout sur mes deux pieds».
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débat autour d'un «revenu solidaire de base»
À Helsinki, Tuomas Muraja,
écrivain, se félicite, lui aussi, de «cette expérience positive». «Elle me
donne plus de temps pour me concentrer à écrire et à promouvoir mes livres.
Certes le montant du revenu universel ne me permet pas de vivre. Mais je peux
accepter maintenant des petits travaux et autant que je veux sans craindre de
perdre mes allocations comme par le passé lorsque j'étais au chômage».
«Les témoignages de certains
participants montrent que ce système les encourage à travailler, à trouver des
emplois à temps partiel et à créer leur propre entreprise, et c'est le but que
nous recherchons», constate la ministre des Affaires sociales et de la Santé,
Pirkko Mattila. Mais elle estime qu'il est encore trop tôt pour tirer les
conclusions de cette expérience de deux ans.
Le patronat estime impossible
la généralisation de ce programme au coût exorbitant de 10 à 15 milliards
d'euros pour un pays de 5,5 millions d'habitants
Architecte de ce projet à Kela,
la sécurité sociale finlandaise, le professeur Olli Kanga estime qu'«une
période de deux ans n'est pas très longue pour constater des changements dans
les comportements et mesurer l'impact du revenu garanti sur l'emploi». Mais le
gouvernement de centre-droit, qui a alloué 20 millions d'euros à ce projet en
2017-2018, n'envisage pas sa poursuite à la fin de l'année. Tout comme le
patronat qui estime impossible la généralisation de ce programme au coût
exorbitant de 10 à 15 milliards d'euros par an pour un pays de 5,5 millions
d'habitants.
Dans son atelier de tambours,
Juha Järvinen est «triste d'apprendre la fin de cette expérience du revenu
universel, «un bon coup de pouce pour réaliser un nouveau départ». Selon lui,
«le gouvernement et le Parlement ont fait volte-face dans la politique de
l'emploi, abandonnant la carotte pour le bâton». En effet, en décembre dernier
l'Eduskunta, le Parlement monocaméral, a donné son feu vert à un projet de loi
accentuant le contrôle des demandeurs d'emploi qui devront désormais avoir
travaillé au moins 18 heures ou suivi une formation de 5 jours au cours des
trois derniers mois, au risque de voir leurs indemnités diminuer de 4,65% par
mois. Selon le journal Aamulehti, le gouvernement s'attend à
engranger des économies de 53 millions d'euros par an grâce à ces contrôles
plus stricts.
À mi-chemin, l'expérience
finlandaise, si limitée soit-elle, a néanmoins le mérite d'être pionnière en
testant à l'échelle nationale, pour la première fois en Europe, une idée née
dans les courants de pensées du XVIIIe siècle et qui fait toujours débat.
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Trois alternatives à Facebook (01.04.2018)
Face au plus populaire des réseaux
sociaux, d'autres services en ligne tentent de rivaliser en se montrant moins
intrusifs et moins laxistes.
Difficile de l'ignorer: Facebook a
plutôt mauvaise presse, ces derniers temps. Accusé d'avoir laissé
échapper les données
personnelles de ses membres au profit du cabinet d'études
Cambridge Analytica, le réseau social est la proie de nombreuses critiques.
Jugeant que le système allait trop loin, des membres éminents de Facebook et
même d'anciens dirigeants de l'entreprise appellent à quitter le navire, tandis
que le mot-clé #DeleteFacebook se répand sur les réseaux sociaux. Des
personnalités, comme
le milliardaire Elon Musk, ont décidé d'effacer toutes les pages concernant
leurs activités. De son côté, l'investisseur Jason Calacanis,
estimant que «Facebook est une force destructrice pour notre société», a
proposé d'injecter 100.000 dollars dans le projet qui proposera la meilleure
alternative à Facebook.
«Facebook est une force
destructrice pour notre société.»
L'investisseur Jason Calacanis
En attendant, quelles solutions
s'offrent alors aux candidats au départ? N'espérez pas trouver de meilleures
pratiques sur les réseaux sociaux concurrents, comme Twitter, Instagram,
Snapchat, WhatsApp ou LinkedIn. Deux d'entre eux appartiennent d'ailleurs à
Facebook. Et puis, leurs conditions d'utilisation ne sont pas forcément plus
respectueuses de vos données personnelles. La plupart analysent votre
navigation et exploitent vos informations pour «personnaliser» leurs services
et afficher des publicités ciblées. Certains s'approprient tous les droits sur
vos publications et d'autres récupèrent les coordonnées de vos contacts. Le
site «Terms of Service
Didn't Read» (tosdr.org) décrit clairement les pratiques des
principaux sites communautaires d'Internet. En fait, il existe des services qui
permettraient de garder le contrôle des données personnelles, d'être moins
ciblé par la publicité et, parfois, de découvrir des options inédites. Leur
seul problème est leur manque de notoriété et leur faible nombre
d'utilisateurs. Difficile de rivaliser avec les 2 milliards de membres de
Facebook. Cependant, les récents déboires de leur grand concurrent pourraient
créer un appel d'air et les rendre plus populaires.
- Crédits photo : Droits Reservés
Diaspora (1): la liberté
décentralisée
Créé en 2010 par des étudiants
américains, ce réseau social bénévole se présente comme une alternative «open
source» à Facebook. Il repose sur trois principes: la décentralisation (au lieu
d'être stockées sur un site unique, les données sont réparties sur des serveurs
indépendants), la liberté (le code logiciel est accessible à tous, la publicité
est bannie du réseau et les membres n'ont pas besoin de fournir leur identité
réelle) et le respect de la vie privée (chaque membre garde le contrôle de ses
données, de ses publications et de qui peut les consulter). Comme sur Facebook,
il est possible de publier des messages, accompagnés de photos, de vidéos ou
d'autres types de fichiers, de partager et de commenter des contenus, de
rejoindre un cercle d'amis, de définir un profil public et privé, de suivre
d'autres personnes et de filtrer les publications au moyen de «hashtags». Pour
faciliter la transition, le réseau propose de créer des liens avec un compte
Facebook. En pratique, il faudra se familiariser avec un mode de fonctionnement
original. Il faut notamment s'inscrire à un serveur (appelé «pod») en fonction
de ses centres d'intérêt, vérifier qu'il permet de communiquer par messagerie
instantanée et inviter (ou trouver) des amis. Encore en développement, Diaspora
ne compte qu'environ un million de membres actifs mais connaît une bonne
progression depuis quelques mois.
- Crédits photo : Droits Reservés
Friendica (2): en petit comité
Autre service issu du monde du
logiciel libre, ce réseau social géré par des volontaires partage avec Diaspora
des ressources techniques et la même philosophie de serveurs décentralisés. Il
faudra donc choisir un groupe en fonction de ses intérêts… et de la langue,
l'allemand et l'anglais étant les plus répandus. L'interface de Friendica
rappelle un peu celle des premiers comptes Facebook. Lui aussi permet de
publier des articles et des photos, de communiquer en direct avec d'autres
membres et de commenter les publications de ses amis. En prime, on peut
personnaliser l'aspect de sa page personnelle, créer plusieurs profils, choisir
ceux qui peuvent être consultés et qui peuvent les consulter. Une option donne
également accès à un compte Facebook ou Twitter. Là encore, il faudra
convaincre les amis de rejoindre le réseau, qui ne compte qu'une dizaine de
milliers de membres.
- Crédits photo : Droits Reservés
Ello (3): un espace de
créativité
Lancé en 2014, ce réseau s'est
présenté comme la
seule alternative crédible à Facebook avec ses pages sans publicité, la
promesse de respecter la vie privée et de ne pas revendre les données
personnelles. En pratique, il s'inspire de la formule de Facebook: on peut
publier des textes et des photos, suivre d'autres utilisateurs et commenter
leurs messages, consulter des publications liées à ses centres d'intérêt. Le
service filtre les informations des amis et les sujets plus généraux, qualifiés
de «bruit». Pourtant, son fonctionnement un peu complexe et l'absence de
certaines fonctions, comme la messagerie instantanée, ont refroidi la vague
d'enthousiasme qui a accompagné son lancement. Aujourd'hui, le réseau compterait
moins de 500 000 utilisateurs par mois et s'est davantage orienté vers une
communauté de «créateurs» des univers de la mode, du design et de la photo.
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