mardi 7 novembre 2017

Islamisme et politique 06.11.2017

  • Discordances franco-maliennes après un raid français (06.11.2017)
  • En Afrique, Daech se heurte à al-Qaida (22.09.2016)
  • La nouvelle stratégie d'implantation locale d'al-Qaida (09.09.2016)
  • Riss : «Charlie Hebdo doit survivre à Daech» (06.11.2017)
  • Joann Sfar interpelle les autorités après les nouvelles menaces contre Charlie Hebdo (06.11.2017)
  • L'écrivaine Leïla Slimani nommée représentante de Macron pour la Francophonie (06.11.2017)
  • De «Charlie» à l'Hyper Cacher, 72 heures qui ont ébranlé la France (06.01.2016)
  • De nouveaux projets pour Charlie Hebdo (06.01.2017)
  • Céline Pina : «Deux ans après Charlie Hebdo, toujours et encore le même déni» (07.01.2017)
  • Arabie saoudite : l'extraordinaire purge (05.11.2017)
  • Pourquoi l'arrestation d'un prince saoudien inquiète Twitter (06.11.2017)
  • Les Saoudiens arrêtés seront jugés (06.11.2017)
  • Coca-Cola met en scène une Saoudienne au volant d'une voiture (06.11.2017)
  • Les médias traditionnels, remparts contre les fake news (05.11.2017)
  • «Paradise papers» : face à l'évasion fiscale, la classe politique démunie (06.11.2017)
  • Qui est Appleby, le cabinet au coeur des «Paradise papers» ? (06.11.2017)
  • «Paradise papers»: nouvelles révélations sur les milliards des paradis fiscaux (05.11.2017)
  • Paradise Papers : l'étonnant montage de Lewis Hamilton pour contourner la TVA (06.11.2017)
  • Le monde des paradis fiscaux en cinq questions (06.11.2017)
  • Harvey Weinstein : Asia Argento encourage Uma Thurman à prendre la parole (06.11.2017)
  • «Écriture inclusive : l'idéologisation du langage fait déjà des ravages au Québec» (06.11.2017)
  • Macron aux Émirats, seul «partenaire de confiance» (06.11.2017)
  • Egypte: un militant des droits de l'Homme lance sa campagne présidentielle (06.11.2017)
  • Grèce: tirs contre le siège du Parti socialiste (06.11.2017)



Discordances franco-maliennes après un raid français (06.11.2017)
Mis à jour le 06/11/2017 à 18h49 | Publié le 06/11/2017 à 18h39

INFOGRAPHIE - Un groupe de djihadistes accuse l'armée française d'avoir tué onze militaires maliens qu'il détenait « prisonniers », fin octobre, dans le nord du pays.

Des militaires maliens figurent-ils parmi les individus «mis hors de combat» lors d'un raid antidjihadiste de l'armée française dans le nord du Mali, le 23 octobre? Un «groupe armé terroriste» (GAT) affilié à al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) l'affirme, dans un communiqué daté du 27 octobre. Un comble, venant d'une organisation qui s'en prend très fréquemment aux soldats maliens, insiste-t-on, côté français, en dénonçant «propagande» et «manipulation».

Dans la nuit du 23 au 24 octobre, dans la région d'Abeibara, proche de la frontière algérienne, des militaires de l'opération «Barkhane» et des forces spéciales de «Sabre» lancent un raid contre un camp djihadiste. Un campement «dûment caractérisé», souligne-t-on à l'état-major des armées (EMA), c'est-à-dire ayant été l'objet d'un renseignement de long terme recoupé avec des informations récentes ayant permis de déclencher l'opération. Celle-ci donne lieu à une frappe de Mirage 2000, suivie d'une intervention d'hélicoptère Tigre parachevée par un ratissage au sol. «Quinze terroristes ont été mis hors de combat (tués ou capturés, NDLR)», annonce le 26 octobre l'EMA, qui précise que «du matériel, des armes et des munitions ont été récupérés ou détruits» - dans un pick-up en flammes. Le lendemain, 27 octobre, un communiqué en français et en arabe, signé du «Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans» (JNIM), principal mouvement islamiste de la région, dirigé par Iyad Ag Ghali, accuse l'armée française «croisée injuste» d'avoir «entraîné la mort de onze prisonniers de l'armée malienne (…) sous la surveillance de moudjahidins», dont trois ont également été tués.

Des «otages», regroupés dans une région dénuée de présence militaire malienne? Quelques jours plus tard, le groupe publie un nouveau communiqué pour réclamer une «instance neutre» afin d'autopsier les corps. À Bamako, on a indiqué dimanche au ministère de la Défense détenir des preuves qu'il s'agissait bien de militaires maliens faits prisonniers. En matière de bavure, le risque zéro n'existe pas. Mais en l'occurrence, «ceux qui ont été frappés étaient bien des terroristes, même s'il est vrai qu'il y avait parmi eux d'anciens soldats maliens qui œuvraient pour les GAT», plaide une source proche du dossier. Une réalité peu avouable à Bamako. Dans un contexte politique pour le moins complexe, d'aucuns au Mali ont pu aussi voir là un bon prétexte pour s'en prendre à la France, analyse cette source. Les discussions avec le Mali se poursuivent. Le chef de l'État, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), était à l'Élysée la semaine dernière. «C'est aux autorités maliennes de déterminer l'identité des personnes mises hors de combat», relève-t-on à l'EMA.

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En Afrique, Daech se heurte à al-Qaida (22.09.2016)
Par Tanguy Berthemet
Mis à jour le 22/09/2016 à 20h15 | Publié le 22/09/2016 à 19h49

INFOGRAPHIE - En grande difficulté en Libye, l'État islamique ne parvient pas à exercer une influence déterminante sur Boko Haram au Nigeria. Son rival, al-Qaida, reste en revanche bien implanté dans le Sahel et dans la Corne de l'Afrique.

Il y a dix jours, trois femmes s'infiltraient dans le commissariat central dans Mombasa, le grand port du Kenya du Sud. Les militantes parvenaient à poignarder un policier, à mettre le feu à une partie du bâtiment, avant d'être abattues. Peu après, Amaq, l'organe de communication de l'État islamique(EI), revendiquait cet attentat, assurant que les djihadistes avaient obéi à leur ordre. Ce raid, s'il reste très flou, est le premier jamais revendiqué par Daech au Kenya et l'un des premiers en Afrique subsaharienne. Dans la foulée, un groupe baptisé Jahba East Africa annonçait son affiliation au calife al-Baghdadi. Dans son communiqué, la nouvelle organisation s'en prend directement à al-Qaida et à sa filiale somalienne, al-Chebab, et se montre menaçante pour tous ceux qui ne plieraient pas.

Cette offensive du mouvement irako-syrien vers l'Afrique était attendue. Menacé dans ses fiefs irako-syriens, l'EI, qui se rêve en seul et unique tenant du djihadisme mondial, cherche à étendre son emprise vers un continent où la communauté musulmane est nombreuse et bien des États sont très faibles. Mais la mouvance se heurte à sa sœur ennemie, al-Qaida, dont la présence et l'emprise africaines sont anciennes. L'attractivité de l'EI, son activisme sur les réseaux sociaux et ses films aussi ultraviolents que léchés n'ont certes pas laissé indifférents les radicaux africains. Mais les ralliements demeurent rares.

L'EI avait fondé des espoirs sur la Somalie, terre de djihad depuis une décennie. Une opportunité avait semblé s'ouvrir avec la mort de l'émir d'al-Chebab, Ahmed Abdi Godane, tué en 2014, et les rivalités qu'elle avait engendrés. Mais son successeur, Muhammad abdu Abdallah a vivement repoussé les avances, menaçant de mort toute personne ralliant l'EI. Seul un Abdiqadir Munin, le responsable d'un groupe basé dans le nord de la Somalie a osé braver l'interdit. Il demeurerait toutefois très faible, ne disposant que d'une cinquantaine de combattants. L'attaque de Mombasa, une ville conservatrice à majorité musulmane, semble être la réponse de l'EI à cette intransigeance.

Plus à l'ouest, l'EI a aussi fait face à des difficultés pour s'implanter. Au Mali, les groupes salafistes sont demeurés dans le giron d'al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), très bien implanté tant géographiquement qu'au sein des communautés. Mokhtar Belmokhtar, le chef d'al-Mourabitoune, très actif au Sahel et un temps brouillé avec Aqmi, a réaffirmé son alliance au groupe en juillet 2015. En Mauritanie, l'arrestation mercredi 21 septembre de plusieurs jeunes ayant couvert les murs de la capitale Nouakchott de tags favorables au calife semble démontrer que l'implantation locale de l'EI demeure balbutiante.

L'Afrique du Nord, en Algérie, en Tunisie, en Égypte et surtout en Libye, a certes montré une inclinaison pour la propagande de Daech. Des réseaux se sont montés. Mais, en Libye, après avoir tenu une bande côtière de 250 km de long autour de Syrte, les hommes de Daech, enfoncés par une offensive des combattants fidèles à Tripoli, ne contrôlent plus qu'un petit quartier de la cité. «L'EI recule, mais plusieurs milliers de ses combattants sont toujours présents en Libye», tempère-t-on au ministère de la Défense.

«Daech se rend compte qu'affilier Boko Haram, sur lequel il n'a aucun contrôle, a été une erreur qui se retourne contre lui »
Antoine Pérouse de Montclos, chercheur spécialiste du Nigeria

La seule force de l'EI en Afrique sub-saharienne repose donc pour l'instant sur le seul Boko Haram. Le puissant groupe nigérian a fait allégeance en mars 2015, devenant officiellement La province d'Afrique de l'Ouest de l'organisation de l'État islamique. L'importance que revêt Boko Haram pour l'EI est sans doute la raison pour laquelle, en août, al-Nabaa, une des publications du groupe, a annoncé une réorganisation. La maison mère entendait imposer comme «Wali» Abu Musab al-Barnawi en lieu et place du très fantasque Abubakar Shekau. Ce dernier a très vite réagi. Dans un message audio, il exigeait du calife qu'il revoie sa position. Depuis, la situation à la tête de Boko Haram est extrêmement confuse.

Abu Musab al-Barnawi serait le fils de Mohammed Yussuf, le fondateur vénéré de Boko Haram, assassiné en 2009, ce qui en fait un rival sérieux. Mais, dans ce mouvement, qui n'a jamais été très hiérarchisé, les scissions sont courantes.

«Daech se rend compte qu'affilier Boko Haram, sur lequel il n'a aucun contrôle, a été une erreur qui se retourne contre lui. L'effet en termes de communication est désastreux en Afrique», souligne Antoine Pérouse de Montclos, chercheur spécialiste du Nigeria. Dans plusieurs publications, l'EI a effectivement reproché à ses «frères» nigérians un manque de stratégie globale et des opérations nettement plus sanglantes pour les musulmans locaux que pour les chrétiens ou les étrangers. L'EI encouragerait sa filiale à s'en prendre à des intérêts occidentaux.

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La nouvelle stratégie d'implantation locale d'al-Qaida (09.09.2016)
Par Georges Malbrunot
Mis à jour le 09/09/2016 à 18h12 | Publié le 09/09/2016 à 18h08

Contrairement à Daech, la mouvance terroriste ne veut pas s'aliéner les populations pour établir des sanctuaires au Levant et en Afrique.

Il y a cinq ans, al-Qaida perdait son leader historique, Oussama Ben Laden, et semblait être happée dans une spirale déclinante. Aujourd'hui, la mouvance terroriste compte sur la défaite prochaine de sa rivale Daech en Syrie et en Irak pour au contraire rebondir, grâce à une stratégie d'implantation locale patiemment mise en place ces dernières années, que ce soit au Yémen, en Syrie ou au Maghreb. Le tournant s'est produit en 2010-2011.

Au cours des années qui ont suivi les attaques du 11 septembre 2001, al-Qaida fut soumis à d'intenses pressions qui forcèrent sa direction à fuir le sanctuaire afghan pour se disperser sans autre stratégie que de sauver sa peau. L'invasion américaine de l'Irak en 2003 et l'insurrection sunnite qui en résulta vit la naissance en octobre 2004 de la première filiale d'al-Qaida hors de la zone afghano-pakistanaise, en Irak, sous l'égide du Jordanien Abou Moussab al-Zarqaoui, pourtant en opposition avec Ben Laden sur certains points comme les relations avec les chiites. Puis, en 2007, une autre succursale vit le jour au Maghreb (al-Qaida au Maghreb islamique Aqmi) et en 2009 au Yémen, al-Qaida dans la péninsule arabique (Aqpa), résultat de la fusion des branches saoudienne et yéménite. Chacune de ces filiales était responsable de son action dans sa zone, et les branches d'al-Qaida étaient dirigées par un émir, souvent proche de Ben Laden, auquel il avait prêté serment. Cette période d'essaimage fut également mise à profit par la maison mère qui noua d'autres liens, mais informels, avec des organisations djihadistes du nord du Caucase, d'Indonésie ou des camps de réfugiés palestiniens du Liban.

Carence d'autorité

Mais de tous ces satellites, seule Aqpa se montra finalement capable d'honorer le serment de Ben Laden: frapper d'abord «l'ennemi lointain», c'est-à-dire les États-Unis. En décembre 2009 puis en octobre 2010, deux avions en partance du Yémen pour les États-Unis furent la cible d'attentats qui échouèrent. Ce qui fit dire à la CIA qu'Aqpa est «la plus dangereuse des succursales» d'al-Qaida à travers le monde. Mais, avec les révoltes arabes qui allaient secouer à partir de 2011 de nombreux pays du Moyen-Orient, al-Qaida trouva une occasion en or pour infléchir sa stratégie. «Sa nouvelle stratégie a été fondée sur une plus grande maturité», souligne Charles Lister, chercheur au Brookings Doha Center. «Les filiales locales firent alors le choix de s'enraciner socialement auprès de mouvements insurrectionnels capables de mener des batailles conventionnelles tout en établissant un contrôle plus durable sur les populations et leurs territoires.» Encore une fois, l'exemple vint de la terre ancestrale d'Oussama Ben Laden, le Yémen, où, à partir du printemps 2011, un faux nez, Ansar al-Charia, prit le relais d'Aqpa pour s'étendre auprès des toutes-puissantes tribus de ce pays, privé d'État central depuis de longues années. Cette même carence d'autorité permit à Aqmi d'implanter ses bases à partir de l'été 2012 à Tombouctou, avant l'arrivée de figures éminentes d'Aqmi dans le nord du Mali, dont Mokhtar Belmokhtar et Abou Zeid…

Le Front al-Nosra prit soin d'appliquer cette stratégie du bon voisinage avec la population

En Syrie, également, le Front al-Nosra prit soin d'appliquer cette stratégie du bon voisinage avec la population, comme le demanda son chef, Mohammed al-Joulani, à ses commandants en décembre 2012. «Jour après jour, rapprochez-vous des gens, après avoir gagné leur cœur et leur confiance… Soyez fermes avec eux sur les priorités de l'islam, mais flexibles sur les points de détail de la religion.»

La branche syrienne d'al-Qaida ne renonce pas à établir son califat en Syrie, mais cet objectif ne pourra être atteint qu'à long terme. D'où le clash qui l'opposa à l'État islamique, partisan, au contraire, d'aller vite et de soumettre la population par tous les moyens. C'était l'époque où certaines belles âmes en Occident suggéraient que les partisans d'al-Nosra étaient «des nationalistes syriens qui ne veulent pas s'en prendre aux intérêts occidentaux», contrairement à Daech.

«Un combat à long terme»

Ayman al-Zawahiri lui-même, successeur de Ben Laden, publie en 2013 Les Principes généraux du djihad, dans lequel il prône une certaine mesure dans l'action violente. Les djihadistes se voient demander de «ne pas combattre ceux qui n'ont pas levé les armes contre eux et de ne pas s'en prendre aux civils musulmans». Et le chef d'al-Qaida de révéler la vraie raison de cette manœuvre: «Le djihad est un combat à long terme qui a besoin de sanctuaires.» Pour cela, mieux vaut donc ne pas se mettre toutes les populations à dos. Qu'ils soient au Yémen, en Libye ou ailleurs, ces sanctuaires pourraient accueillir les membres de la diaspora terroriste qui est en train de se disperser à partir du califat irako-syrien de Daech en contraction. Mais, comme le rappelle l'expert britannique Charles Lister, l'objectif final d'al-Qaida et de ses filiales reste de frapper l'Occident, comme l'a montré l'attaque contre Charlie Hebdo, en janvier 2015, par les frères Kouachi, qui étaient allés se former dans les maquis yéménites.

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Grand reporter, spécialiste du Moyen-Orient
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Riss : «Charlie Hebdo doit survivre à Daech» (06.11.2017)
Par Claire Bommelaer
Mis à jour le 07/11/2017 à 08h05 | Publié le 06/11/2017 à 18h45

INTERVIEW - Après avoir reçu de nouvelles menaces de mort, l'hebdomadaire dépose plainte. Son directeur s'exprime aussi sur le procès Merah et la vie depuis janvier 2015.

La dernière une de l'hebdomadaire satirique qui présente un Tariq Ramadan au sexe hypertrophié, proclamant «Je suis le 6e pilier de l'islam!», place à nouveau le journal au cœur d'une polémique. À la suite de menaces de mortdiffusées sur les réseaux sociaux, l'hebdomadaire satirique a annoncé lundi un dépôt de plainte. Riss, son directeur, se veut debout envers et contre tout. «Depuis janvier 2015, nous avons l'obligation de durer», estime-t-il.

Le dessinateur vient de publier, aux Éditions Les Échappés, un grand format sur Charlie Hebdo, 1992-2017 et s'apprête à sortir, jeudi 9 novembre, un hors-série de 48 pages sur le procès Merah, qu'il a suivi de bout en bout.

LE FIGARO. - Charlie Hebdo fait l'objet de menaces de mort, à la suite de la une sur Tariq Ramadan, le prédicateur musulman. Est-ce, désormais, le prix à payer pour votre liberté d'expression?

RISS. - Ce n'est pas la première fois, depuis janvier 2015, que nous recevons de nombreuses menaces de mort. Mais il semble que pour cette couverture, leur nombre soit plus élevé que d'habitude. Depuis janvier 2015, la parole s'est libérée et l'appel au meurtre s'est banalisé, en particulier sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, la violence terroriste peut frapper n'importe qui, et pas seulement Charlie Hebdo. Le «prix à payer», s'il doit y en avoir un, est désormais pour tout le monde.

Vous avez passé cinq semaines au palais de justice de Paris à croquer le procès d'Abdelkader Merah. Pourquoi vous être mis, vous, au cœur d'un tel événement?

Je suis journaliste avant tout, et j'y ai assisté en tant que dessinateur. Ce procès, même s'il parlait beaucoup de celui qui n'était pas là, Mohammed Merah, avait une intensité palpable. Il a permis de comprendre des mécanismes de la construction de l'extrémisme religieux. L'affaire Merah, c'est le début de quelque chose, l'explication d'un type d'attentat inédit en France.

J'ai passé des semaines à écouter cette famille expliquer que l'Amérique et Israël tuaient leurs frères arabes, et qu'il fallait les venger. Ou que l'on devenait un élu de Dieu si on passait par la case prison. Assis à l'étage, en face du prétoire, j'ai dessiné, rempli des grandes pages, qui formeront un hors-série de planches commentées.

Ce procès, c'était une forme de mise en abîme pour vous…

En quelque sorte. S'il y a un procès en 2018 impliquant le réseau à l'origine des attentats de janvier 2015, je serai forcément appelé en tant que témoin. Le procès Merah m'aura préparé à cette confrontation qui, je le sais d'avance, sera très difficile.

«Le 7 janvier, j'étais dans la salle de rédaction, et ce que j'ai vécu - jusqu'au bruit, au ressenti ou aux odeurs - ne peut se raconter dans le détail, sauf à deux ou trois personnes»
Riss
Depuis 2015, vous êtes entouré de gardes du corps. Comment vit-on ainsi?

On fait avec. Aucun de nous, dans l'équipe, ne pourra plus jamais avancer sans avoir cette journée à l'esprit. Elle plane au-dessus de nos têtes, tout le monde y pense, sans jamais en parler.

Vu de l'extérieur, le 7 janvier a une unité de lieu et de temps. Mais pour ceux qui étaient à l'intérieur des locaux de Charlie Hebdo, le temps et l'expérience n'ont pas été les mêmes. Chacun d'entre nous a vécu quelque chose de différent, selon l'endroit où il se trouvait. Pourtant, chacun s'est vu au centre du drame. J'étais dans la salle de rédaction, et ce que j'ai vécu - jusqu'au bruit, au ressenti ou aux odeurs - ne peut se raconter dans le détail, sauf à deux ou trois personnes. Luz a écrit un livre sur son expérience. Moi, je n'ai pas les mots pour, et, de toute façon, je ne sais pas si mon récit serait compris des autres.

«Quinze ans après le premier numéro de Charlie, nous sommes confrontés à l'obligation de durer. Nous avons le devoir de continuer, tout en ayant les mêmes soucis que tous les autres journaux papier»
Riss

Vous employez les mêmes mots que les rescapés de la Shoah, après-guerre.

C'est du même ordre. Certaines choses relèvent d'une langue inconnue du commun des mortels. Pourquoi parler, au final? Je me le demande moi-même. Tout ce que je sais c'est que je ne veux pas être enfermé dans un statut de victime, d'autant que tout le monde se perçoit comme tel. L'avocat Dupond-Moretti a même été jusqu'à affirmer que la mère de Mohamed Merah «était aussi la mère d'un mort»…

Quel est l'avenir de Charlie Hebdo?

En janvier 2015, les gens ont compris que nous pourrions disparaître. Ce qu'ils ne savent pas, c'est que c'est toujours le cas. Après le drame, nous nous sommes retrouvés investis d'une mission, à notre corps défendant. Nous essayons d'y répondre en nous centrant sur ce que nous aimons faire, le dessin d'humour. Nous avons toujours été pessimistes, de toute façon!

Mais quinze ans après le premier numéro de Charlie, nous sommes confrontés à l'obligation de durer. Nous avons le devoir de continuer, tout en ayant les mêmes soucis que tous les autres journaux papier. En 1992, il y avait 36.000 points de vente pour la presse, il n'en reste plus que 20.000. Pour nous, la gratuité sur Internet va de soi: nous ne pouvons pas être que mercantiles, et la seconde génération de lecteurs lit largement sur le Web. Il faudra toutefois trouver un juste équilibre entre le payant et le gratuit.

«Les “islamo-gauchistes” ne nous surprennent plus, et répondent à des schémas idéologiques tellement démagogiques qu'ils en perdent toute crédibilité»
Riss

On avait vu 4 millions de Français dans la rue, en janvier 2015, clamant qu'ils étaient Charlie. Aujourd'hui, qui sont vos soutiens?

L'existence même du journal conforte ceux qui nous avaient soutenus et nous conforte, nous, dans notre détermination à continuer à le faire. Il y a un intérêt réciproque, entre les lecteurs, les citoyens et les membres du journal, à voir exister Charlie Hebdo, bientôt trois ans après l'attaque. Il faut tenir: Charlie Hebdo doit survivre à Daech.

Les récentes manifestations des «islamo-gauchistes» vous inquiètent-elles?

Les «islamo-gauchistes» font partie du paysage politique depuis déjà longtemps. Ils ne nous surprennent plus, et répondent à des schémas idéologiques tellement démagogiques qu'ils en perdent toute crédibilité. Comme la gauche conventionnelle incarnée par le PS, les «islamo-gauchistes» sont eux aussi en pleine décrépitude. La crise que traverse la gauche française frappe aussi cette partie de la gauche. Les gauches dites «radicales» ou «alternatives» sont elles aussi en train de toucher le fond. Le renouveau de la gauche française, si renouveau un jour il y a, devra concerner toutes les familles de la gauche, y compris les plus radicales.

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Joann Sfar interpelle les autorités après les nouvelles menaces contre Charlie Hebdo (06.11.2017)
L'auteur de bande dessinée est surpris par l'absence de «sanction judiciaire immédiate» après la diffusion de menaces de mort sur les réseaux sociaux visant l'hebdomadaire satirique. La semaine dernière, la une du journal arborait une caricature de Tariq Ramadan, sous le coup de deux plaintes pour viol en France.

L'hebdomadaire français Charlie Hebdo a annoncé le dépôt d'une plainte contre la démultiplication des menaces de mort sur les réseaux sociaux depuis la publication d'une caricature de l'islamologue Tariq Ramadan. Le parquet de Paris a annoncé, ce lundi soir, l'ouverture d'une enquête préliminaire pour «menaces de mort matérialisées par un écrit» et «apologie publique d'un acte de terrorisme».

Dans sa dernière édition parue mercredi, l'hebdomadaire satirique représente le théologien suisse, visé par deux plaintes pour viol, le pantalon déformé par un énorme sexe en érection et proclamant: «Je suis le 6e pilier de l'islam». «Viol: la défense de Tariq Ramadan», peut-on lire au-dessus du dessin signé Juin. Depuis la parution de ce numéro, les critiques et les menaces se sont multipliées à l'encontre de la rédaction de l'hebdomadaire, en 2015.

Interrogé sur les messages de haine et les menaces adressées à Charlie Hebdo, le dessinateur Riss, directeur de la publication, a déclaré lundi sur Europe 1 qu'ils n'avaient «jamais vraiment cessé». «Parfois, il y a des pics où on reçoit sur les réseaux sociaux des menaces de mort explicites: c'est le cas une fois de plus, a-t-il ajouté. C'est toujours difficile de savoir si ce sont des menaces sérieuses ou pas, mais par principe, on les prend au sérieux et on dépose plainte». Riss a jugé «étonnant qu'après tout ce qui s'est passé depuis deux, trois, quatre ans, il y ait encore des réactions aussi violentes, des appels au meurtre».

«J'ai toujours pensé que ceux qui “ne veulent pas mettre de l'huile sur le feu” sont les plus sûrs alliés des assassins»
Joann Sfar

Ces menaces de mort ont été dénoncées par de nombreuses personnalités, dont le dessinateur Joann Sfar. Dans un message publié sur les réseaux sociaux, l'auteur du Chat du Rabbin dit ne pas comprendre que lesdites menaces «n'autorisent pas une sanction judiciaire immédiate» de la part des pouvoirs publics. «Ou bien il faut admettre que les usagers de Twitter ne sont pas soumis aux mêmes lois que les autres, explique-t-il. Ou bien les massacres d'il y a quelques années incitent les pouvoirs publics à “ne pas mettre de l'huile sur le feu”. J'ai toujours pensé que ceux qui “ne veulent pas mettre de l'huile sur le feu” sont les plus sûrs alliés des assassins.»

Interrogé sur le choix du dessin de Juin, Riss a rappelé que Tariq Ramadan était présenté comme «un islamologue, comme un sachant» et que «le 6e pilier de l'islam (....), c'est le jihad». «C'est ce par quoi il se présente qu'on le dessine», a-t-il dit. Les cinq piliers de l'islam constituent le fondement du mode de vie islamique: la profession de foi, la prière, la zakat (l'aumône), le jeûne du mois de Ramadan et le pèlerinage à la Mecque une fois dans la vie pour ceux qui en ont les moyens. Le jihad est considéré comme le sixième pilier de l'islam par une minorité de sunnites bien qu'il n'en ait pas le statut officiel.
«Menacer de mort quelqu'un, ce n'est ni autorisé dans la rue, ni dans un journal, ni nulle part, c'est “poursuivable”», a ajouté le directeur de publication de l'hebdomadaire. «Ce n'est pas simplement de la contestation ou de la discussion, ce n'est même pas de l'injure, c'est au-delà de ça: c'est que, maintenant, ça s'est banalisé d'appeler au meurtre», déclare-t-il. C'est «assez inquiétant» et «révèle un climat assez lourd», estime-t-il.

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A propos de Joann Sfar

L'écrivaine Leïla Slimani nommée représentante de Macron pour la Francophonie (06.11.2017)

  • Mis à jour le 06/11/2017 à 17:29 

  • Publié le 06/11/2017 à 11:00
LE SCAN POLITIQUE - L'écrivaine franco-marocaine, qui a obtenu le prix Goncourt l'année dernière, a été nommée ce lundi «représentante personnelle» du président.

Il y a un an, Leïla Slimani recevait le prestigieux prix Goncourt pour son deuxième roman Chanson Douce. Ce lundi, alors que le nom de son successeur sera connu, l'écrivaine a été nommée «représentante personnelle» du président pour la Francophonie, confirmant des informations du Parisien . Leïla Slimani «incarne le visage de la francophonie ouverte sur un monde pluriculturel. Et c'est une femme engagée. Elle fait partie d'une nouvelle génération que le président veut faire émerger», justifie un conseiller du président auprès du quotidien.

«Le visage de la francophonie»

«Selon la lettre de mission qu'elle a reçue du Président de la République, elle présentera la France au Conseil permanent de la Francophonie», indique l'Elysée. «Leïla Slimani portera au plus haut le rayonnement et la promotion de la langue française et du plurilinguisme, ainsi que des valeurs que les membres de la Francophonie ont en partage. Elle représentera une politique francophone ouverte, en action, centrée sur des projets concrets liés aux priorités du Président de la République telles que l'éducation, la culture, l'égalité femmes-hommes, l'insertion professionnelle et la mobilité des jeunes, la lutte contre le dérèglement climatique et le développement du numérique.»

L'écrivaine franco-marocaine de 36 ans avait déjà été sollicitée par Emmanuel Macron. Séduit par son roman, le chef de l'État lui aurait même proposé de devenir ministre de la Culture. Interrogée sur la question fin août, Leïla Slimani n'avait pas démenti la proposition.

De «Charlie» à l'Hyper Cacher, 72 heures qui ont ébranlé la France (06.01.2016)
Par Marie-Amélie Lombard-Latune et Service InfographieMis à jour le 07/01/2017 à 15h54 | Publié le 06/01/2016 à 21h07

RÉCIT - Le 7 janvier 2015, les terroristes frappent la rédaction de Charlie Hebdo, les clients et employés de l'Hyper Cacher et des policiers. Alors que les experts ne cessaient d'avertir sur l'imminence d'une attaque djihadiste, la France subissait sur son sol la première d'une longue série d'attaques meurtrières.

Deux ans après les attentats de janvier 2015, le terrorisme n'est plus une lointaine chimère pour la société française. Voici le récit de ces trois jours où la France a été confrontée pour la première fois sur son sol aux attaques de Daech.

La France de janvier 2015, installée dans la morosité, prononce le rituel «Bonne année» sans trop y croire. François Hollande est au plus bas dans les sondages, le chômage bat des records. La majorité est en capilotade, l'économie à fond de cale. Depuis des mois, responsables politiques et experts de la sécurité répètent sur tous les tons que «la question n'est pas de savoir s'il va y avoir une attaque terroriste mais quand elle aura lieu». La France écoute d'une oreille distraite ces Cassandre lui saper son maigre moral. Elle fait le dos rond. Il fait froid.

Le 13 novembre 2015 n'est encore qu'une date anodine sur les calendriers

Les terroristes frappent le 7 janvier, peu avant midi. Si bien peu de Français lisent encore Charlie, l'assassinat de Cabu, Wolinski et de leurs camarades claque comme une déclaration de guerre. La liberté d'expression est bafouée par deux énergumènes qui éructent des «Allah Akbar» pour signer leur forfait. Plus tard, viendra le temps des polémiques. Mais, cette semaine de janvier, le «Je suis Charlie» griffonné par un graphiste, slogan en lettres blanches sur fond noir, est adopté par les Français avant de faire le tour du monde. Plus tard, éclateront les controverses sur les failles de l'antiterrorisme, les ambiguïtés, les aveuglements…

Mercredi après-midi, la traque des tueurs de Charlie commence. Leur nom, Kouachi, sonne comme une rafale de kalach'. Jeudi, la trace des assassins se perd entre l'Aisne et l'Oise tandis que, du monde entier, les messages de condoléances affluent vers Paris. Vendredi, à l'heure du déjeuner, alors que les frères terroristes sont localisés dans une imprimerie, nouveau coup de tonnerre. Une prise d'otages dans un magasin de produits casher. Plus de vingt clients et employés à la merci de Coulibaly. Des Juifs pris pour cible.

La France retient son souffle. Elle scrute les images muettes de l'imprimerie de Dammartin comme la façade aveugle de l'Hyper Cacher. Elle se fige. Avant d'avancer, par millions, dans les rues, le dimanche 11 janvier. Le 13 novembre 2015 n'est encore qu'une date anodine sur les calendriers.

Retrouvez le récit de ces 72 heures sur Le Figaro.fr:


Paris, siège de Charlie Hebdo, le terrorisme islamiste fait irruption dans la capitale. Le bilan est lourd: 12 morts.


Montrouge, avenue Pierre-Brossolette, une fusillade retentit sur la voie publique. Une jeune policière municipale est abattue de plusieurs tirs.


Dammartin-en-Goële, les frères Kouachi se sont retranchés dans l'imprimerie CTD et ont pris son patron en otage. Dans le même temps, Lilian Lepère, employé, s'est caché sous un évier du bâtiment.

Paris, porte de Vincennes, Amedy Coulibaly prend en otage le personnel et les clients de l'Hyper Casher. Il abat quatre personnes.

● 9 janvier, 16h30: Hollande donne le feu vert aux forces d'élite pour les assauts
Paris, l'Élysée, alors que les frères Kouachi décident de sortir de l'imprimerie et de livrer leur dernier combat, le président de la République et ses ministres vont devoir prendre une grave décision: lancer ou pas l'assaut contre l'Hyper Casher.

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De nouveaux projets pour Charlie Hebdo (06.01.2017)

Par Chloé Woitier
Publié le 06/01/2017 à 21h29

Depuis décembre, Charlie a traversé le Rhin, avec le lancement d'une version allemande du journal tirée à 200.000 exemplaires.

N'en déplaise à ses détracteurs: deux ans après la tuerie qui a décimé une grande partie de sa rédactionCharlie Hebdo est toujours debout. L'hebdomadaire satirique continue de défendre son droit à rire de tout, en dépit de critiques provenant du monde entier. Fin décembre, Moscou s'indignait d'une série de caricatures autour du crash de l'avion militaire russe transportant les Chœurs de l'Armée rouge. En septembre, la ville italienne d'Amatrice, touchée par un séisme meurtrier, portait plainte contre le journal français. En cause: un dessin comparant les victimes mortes écrasées à des lasagnes. «On a l'impression que le monde entier surveille ce que l'on fait», déplore auprès de l'AFP Riss, le directeur de la publication. «Les gens sont devenus encore plus intolérants à l'égard deCharlie

15 millions d'euros bloqués en banque

On se souvient de l'immense élan de solidarité des Français, qui s'étaient déplacés en masse pour acheter le «numéro des survivants», écoulé à plus de 7 millions d'exemplaires. Charlie Hebdo avait alors atteint un chiffre record de 260.000 abonnés. Vertigineux pour un journal en difficulté financière, qui ne vendait avant l'attaque que 30.000 exemplaires par semaine, dont 10.000 par abonnement. En ce début 2017, les chiffres de vente de Charlie Hebdo demeurent importants: 100.000 ventes par semaine, réparties à parité entre achats en kiosque et abonnement. En Belgique, l'hebdomadaire reste un succès avec 8000 exemplaires vendus par semaine, contre 500 en 2014. Certes, deux tiers des abonnés n'auront pas renouvelé leur engagement. Mais cette situation était prévisible, ces abonnements étant plus motivés par l'émotion que par une réelle adhésion à la ligne éditoriale, finalement peu connue du grand public.

Grâce aux ventes records du «numéro des survivants», Charlie Hebdo a de quoi parer à d'éventuels soucis financiers. Près de 15 millions d'euros ont ainsi été bloqués en banque. Le journal a adopté le nouveau statut d'entreprise solidaire de presse, qui l'oblige à réinvestir 70% de ses bénéfices. Une partie de cet argent a permis de lancer de nouveaux projets. Début 2016, un site Internet a été mis en ligne, avec un article et un dessin inédit par jour. L'édito de Riss y est traduit chaque semaine en anglais. En décembre, Charliea traversé le Rhin, avec le lancement d'une version allemande du journal. Deux cent mille exemplaires ont été tirés pour le premier numéro, paru le 1er décembre. La direction dit ignorer combien d'exemplaires ont été vendus, les remontées d'informations depuis les points de vente étant plus lentes en Allemagne qu'en France.

De nouveaux dessinateurs

2016 aura également été marquée par la montée en puissance de nouveaux dessinateurs. Après la tuerie, Riss et Coco ont assumé la quasi-totalité des illustrations du journal. Ils ont depuis été épaulés par Juin, Foolz et Vuillemin. Le journal compte aujourd'hui une vingtaine de permanents et autant de collaborateurs externes, bravant la peur d'être pris pour cible. La rédaction a déménagé depuis un an dans des locaux ultra-sécurisés, quelque part dans Paris. Le dispositif de sécurité, comprenant une escorte permanente pour certains salariés, coûte au titre un million d'euros par an.

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Céline Pina : «Deux ans après Charlie Hebdo, toujours et encore le même déni» (07.01.2017)
Par Céline Pina
Mis à jour le 07/01/2017 à 14h53 | Publié le 06/01/2017 à 19h11

FIGAROVOX/TRIBUNE - Il y a deux ans, les frères Kouachi attaquaient Charlie Hebdo. Pour Céline Pina, une partie des élites trahit l'esprit d'unité nationale en se refusant à condamner clairement les coupables, au point d'oublier les victimes.

Ancienne conseillère régionale d'Ile-de-France, Céline Pina est essayiste et militante. Elle avait dénoncé en 2015 le salon de «la femme musulmane» de Pontoise et a récemment publié Silence Coupable (éditions Kero, 2016). Avec Fatiha Boudjahlat, elle est la fondatrice de «Viv(r)e la République», mouvement laïque féministe et républicain appelant à lutter contre tous les totalitarismes et pour la promotion de l'indispensable universalité de nos valeurs républicaines.

Il y a des dates comme cela: nous nous souvenons tous où nous étions et de ce que nous faisions ce 7 janvier 2015 quand nous avons appris le massacre des journalistes de Charlie. Et il y a une raison à cela: jamais nous n'aurions pensé que l'on puisse perpétrer dans notre pays une telle tuerie collective pour des motifs politiques. Inconsciemment nous pensions être délivrés du tragique de l'histoire et de la violence comme mode de résolution des conflits politiques .

Là est la particularité du 7 janvier par rapport aux attentats qui ont précédé (Merah) et ceux qui ont suivi. En investissant l'immeuble de la rue Nicolas-Appert, les frères Kouachi savaient exactement qui ils allaient tuer et avaient un objectif précis: faire régner l'autocensure par la peur, instaurer un délit de blasphème par le sang versé, museler les consciences grâce au traumatisme causé.

Des victimes mises en accusation

D'ailleurs seuls les victimes de cet attentat-là ont eu le triste privilège d'être mises en accusation et jugées un peu responsables quand même de ce qui leur arrivait. Par charité, épargnons-nous la liste complète de ces Tartuffes qui, après le passage obligé des condoléances, expliquaient que quand on s'en prend aux contenus d'une croyance, il ne faut pas s'étonner de la réaction des fidèles. Pour eux, l'exercice de la dérision et de la liberté d'expression est en soi un vecteur de violence. Le but de la manoeuvre: refuser aux victimes la cause même de leur mort, leur dénier le fait d'être des symboles de la liberté, nier la dimension politique des assassinats.

Rien d'étonnant à ce que la mouvance islamiste dans toutes ses composantes justifie l'attaque, mais voir une partie de nos élites a alimenté un sentiment de trahison dans la population.

Rien d'étonnant à ce que la mouvance islamiste dans toutes ses composantes justifie l'attaque, mais voir une partie de nos élites, politiques, médiatiques ou culturelles leur emboîter le pas a alimenté un sentiment de trahison dans la population. Ainsi, alors que la barbarie nous éclatait au visage, nous avons eu droit à un festival de déni. Et, force est de constater, à ma grande amertume, que les leaders de la gauche, qui se croit morale, sont fortement représentés dans le panel. On y retrouve Tariq Ramadan bien sûr et ses amis de l'UOIF et du CCIF, Jean-Marie le Pen («je suis Charlie Martel»), Dieudonné («je suis Charlie Coulibaly») mais aussi les Plenel, Todd, Badiou, Lancelin, Lordon, Plantu, Geluck, Brauman, Gresh et j'en oublie. Pour un certain nombre, la bande à Charlie est plus coupable d'«islamophobie» que victime de la liberté d'expression et ce sont leurs bourreaux et ceux qui diffusent le totalitarisme islamiste que l'on transforme en victimes de la société au nom d'un antiracisme dévoyé.

Que dire aussi des analyses post 11 janvier...

Que dire aussi des analyses post 11 janvier. Passons sur ceux qui ne supportent pas d'appartenir à un collectif et qui, pour se sentir exister et prendre la lumière, choisissent systématiquement le contre-pied de tout élan d'union nationale. Ils sont dans le fond assez rares. Mais comment comprendre la violence des critiques qu'a essuyées Charlie à peine un mois après les massacres? La tuerie avait démontré que le règlement de désaccords idéologiques dans le sang et le choix de supprimer physiquement les adversaires plutôt que de débattre même durement faisait un retour fracassant dans notre pays civilisé. Ainsi donc, non seulement dans le pays de la liberté d'expression on peut désormais être assassiné pour ses opinions, mais pire encore, on trouve une bonne partie de l'élite pour mettre en cause la responsabilité des victimes. Cela n'incite pas à se laisser pousser le courage, surtout quand on sait que certains de ses contemporains qui font l'opinion sont prêts à jeter l'opprobre sur vous, même après que vous ayez payé le prix du sang.

L'explosion des revendications séparatistes

Plus grave encore, certains se mettront au service de l'idéologie qui a rendu un tel massacre pensable, possible et légitime pour évacuer les morts réels au profit de victimes symboliques. C'est ainsi que très rapidement, au lieu de s'interroger sur l'exercice réel des libertés constitutionnelles quand une idéologie comme l'islamisme égrène morts et violences dans toute l'Europe, certains se mobilisent pour fournir un discours victimaire prêt à penser aux terroristes et aux idéologues qui les forment: c'est ainsi que les plus cyniques de cette part d'élite dévoyée ont utilisé les morts de Charlie et les attentats qui suivirent, pour vendre leurs concepts séparatistes. La notion «d'islamophobie» visant à interdire toute critique de l'islam, est ainsi érigée en ultime combat contre les discriminations. La revendication d'une loi sur le blasphème, qui vise à museler une de nos libertés fondamentales, est présentée comme une marque de respect et de tolérance à l'égard des minorités et la mobilisation pour le port du voile (version uniforme des femmes de Daesch) est définie comme l'apogée du combat pour la liberté des femmes…

Combien de journaux aujourd'hui oseraient publier une caricature de Mahomet ?

Résultat, combien de journaux aujourd'hui oseraient publier une caricature de Mahomet? En posant la question on a déjà la réponse.

Ainsi deux ans après le plus grand massacre politique que notre pays a connu ces dernières années, on pourrait penser que les frères Kouachi sont arrivés à leurs fins. La censure et l'autocensure se développent et la violence contre les lanceurs d'alerte et les laïques, sommés de se taire à coups d'accusation de racisme et de collusion avec le FN, est bien réelle.
Et tandis que les militants du séparatisme et de l'apartheid comme Houria Bouteldja, porte-parole des indigènes de la république trustent les émissions du service public, des militants de l'islamisme et de l'islamogauchisme sont présentés comme «militants antiracistes» ou «doctorants» alors qu'ils interviennent au nom de cette idéologie totalitaire qu'est l'islamisme. Qu'eux avancent masqués s'entend, c'est dans leur intérêt. Mais que ceux qui leur tendent des micros ne fassent pas leur travail en ne disant pas d'où parlent ces personnes est plus difficile à comprendre. On en a encore eu un exemple lors de l'émission politique de France 2 qui accueillait Manuel Valls ce jeudi 5 janvier. On y a croisé en guise de représentants des Français, des militants politiques expérimentés, débitant un argumentaire et des éléments de langage qui font de la jeune femme voilée, une bonne représentante de l'idéologie islamiste et de l'«agriculteur», qui maîtrisait son discours gauchiste sur le bout des doigts, un activiste assumé. C'est leur droit mais pourquoi ceux dont le métier est la rigueur de l'information nous trompent-ils sur ce que sont réellement leurs invités? D'autant qu'en la matière David Pujadas est un récidiviste .

Ces meurtres ne provoquent pas chez la majorité de nos consciences intellectuelles la condamnation sans faille que l'on eût attendue.

Pendant ce temps, les lanceurs d'alerte et les laïques sont attaqués par une partie de la classe politique dont ce devrait être au contraire l'honneur et le devoir que de les soutenir dans ce combat difficile et dangereux qui ne leur a échu que parce que ceux dont c'est la fonction ne le mènent pas. Ainsi, l'après Charlie nous montre que, non seulement en France on peut être assassiné pour ses idées, mais que ces meurtres ne provoquent pas chez la majorité de nos représentants et de nos consciences intellectuelles la condamnation sans faille que l'on eût attendue.

Préférer avoir raison avec Aron que tort avec Sartre

La liste de grands penseurs ayant cautionné les pires régimes de l'histoire et les plus monstrueux tyrans donne le vertige.

Il faut lire le papier déchirant de Fabrice Nicolino dans le numéro spécial de Charlie sorti le 4 janvier dernier, son titre est sans appel: «cette gauche qui s'est toujours couchée devant les despostes», sa lecture est désespérante mais éclairante. Elle montre le sort qu'une certaine intelligentsia de la gauche a réservé à ceux qui sortaient de ces propres rangs quand ils osaient refuser la soumission au totalitarisme. La liste de grands penseurs ayant cautionné les pires régimes de l'histoire et les plus monstrueux tyrans donne le vertige. Du soutien à la politique de Staline en passant par Mao, Pol Pot, Fidel Castro, c'est toute une génération qui ferme les yeux sur le totalitarisme, le meurtre de masse et la violence comme moyen de gouvernement parce que l'idéologie qu'elle porte correspond à leur romantisme révolutionnaire. Non seulement l'horrible réalité du meurtre comme instrument de domination ne les trouble pas, mais ils font du refus du réel et de la vérité, leur étendard et leur fierté. Il fallait quand même oser préférer à ces époques-là «avoir tort avec Sartre que raison avec Aron», car concrètement cette phrase signifie préférer être aux côtés des idéologies totalitaires et meurtrières plutôt que du côté de la démocratie et de la civilisation. C'était être du côté des bourreaux et nier les charniers, c'était ajouter à la mort physique, la mort symbolique des victimes du totalitarisme.

La postérité de ces clercs sans conscience est nombreuse, bruyante et tout aussi dangereuse intellectuellement qu'irresponsable politiquement.

Hélas, au lieu d'être ensevelis sous la honte qui aurait dû être la leur, la postérité de ces clercs sans conscience est nombreuse, bruyante et tout aussi dangereuse intellectuellement qu'irresponsable politiquement. Ils sont minoritaires dans le pays, mais semblent majoritaires chez nos élites. En tout cas ils donnent encore le ton.

Deux ans après la mort de Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Honoré, Bernard Maris, Elsa Cayat, Franck Brinsolaro, Ahmed Merabat, Frédéric Boisseau, Michel Renaud, Mustapha Ourrad, il est plus que jamais indispensable d'être Charlie, de le rester et de le revendiquer. Pour que cette année 2017 ne soit pas encore une année d'évitement, pour que les vrais enjeux qui pèsent sur notre avenir soient abordés, pour que ceux de Charlie ne soient pas morts pour rien, nous devons obliger nos politiques à être clairs sur leurs responsabilités et leurs missions. Que le courage et la lucidité face à l'idéologie islamiste nous permettent de jauger les esprits et les cœurs.

Pour finir, j'emprunte à Guy Konopnicky la citation qui clôt son beau message d'hommage à ses amis de Charlie sur Facebook. «Imbéciles, c'est pour vous que je meure» lança un résistant aux soldats allemands qui venaient le fusiller .

C'est pour nous que sont morts ceux de Charlie. Voilà pourquoi je préfère et préférerai toujours avoir raison avec Aron que tort avec Sartre. Voilà pourquoi je suis Charlie.

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Céline Pina

Arabie saoudite : l'extraordinaire purge (05.11.2017)
Par Georges Malbrunot
Mis à jour le 06/11/2017 à 11h48 | Publié le 05/11/2017 à 17h48

Mohammed Ben Salman a fait arrêter des princes milliardaires et plus d'une trentaine de hautes personnalités.

A 32 ans, le prince héritier, Mohammed Ben Salman (MBS), se lance dans un grand ménage qui frappe aussi bien les princes corrompus de la famille Saoud que de potentiels adversaires politiques. Par un décret signé samedi soir par son père, le roi Salman, créant une agence anticorruption, quatre ministres et une trentaine d'anciens hauts responsables ont été arrêtés, tandis que dans la grande ville portuaire de Djedda, des avions privés étaient cloués au sol pour empêcher certaines personnalités de fuir le royaume. Du jamais-vu à la cour des Saoud où l'on a toujours privilégié la transaction plutôt que le bâton. Mais avec MBS, le nouvel homme fort de l'Arabie, cette clémence est révolue.

«Pratiquement toutes les grandes fortunes du royaume sont touchées par cette opération mains propres», relève, encore sous le choc, un homme d'affaires français, familier de l'Arabie.

«Ben Salman fait du Poutine, il casse tous les oligarques qui peuvent lui barrer la route.»
Un homme d'affaires

Ont été visés: le prince multimilliardaire Walid Ben Talal, Saleh Kamel (à la tête de la chaîne satellitaire Arabsat), Bakr Ben Laden, intermédiaire notamment de plusieurs sociétés françaises, mais aussi l'ancien chambellan de feu le roi Abdallah, Khaled al-Twaijri, ainsi que son fils, Turki. «Ce sont des hommes d'affaires qui se sont gavés pendant les années de règne du précédent roi, Abdallah», analyse l'homme d'affaires français. Ils seraient confinés à l'hôtel Ritz Carlton de Riyad, réquisitionné pour la circonstance, selon nos informations.

Écarter certaines voix qui pourraient gêner son ascension

Au nom de la lutte anticorruption dans un royaume longtemps immensément riche, le prince héritier en profite aussi pour écarter certaines voix qui pourraient gêner son ascension vers le sommet du pouvoir. Des électrons libres, comme Walid Ben Talal, fils du «prince rouge», exilé depuis de nombreuses années au Caire. Des propriétaires de grands réseaux audiovisuels, comme Walid al-Ibrahim qui détient la chaîne MBC. Mais aussi le ministre de la Garde nationale, le prince Mutaïb, le fils de l'ex-roi Abdallah, propriétaire de l'hôtel Crillon à Paris. Mutaïb était le dernier membre du clan rival à pouvoir lui faire de l'ombre. Il a été remplacé par un fidèle de MBS à la tête de la Garde, cette «armée des tribus», indispensable à la sécurité d'un royaume fragile, que de nombreuses sociétés étrangères ont équipée des années durant. Le ministre de l'Économie, Ibrahim al-Assaf, et le patron de la Marine nationale ont également été démis de leurs fonctions et remplacés par des proches de MBS. «Ben Salman fait du Poutine, il casse tous les oligarques qui peuvent lui barrer la route», constate un autre homme d'affaires.

L'héritier du trône consolide ainsi son pouvoir. En trois ans à peine, son ascension est fulgurante. Lors de la constitution du premier gouvernement nommé par son père, qui venait de succéder à Abdallah en janvier 2015, MBS devient tout à la fois ministre de la Défense, directeur du diwan (le cabinet royal) et président du Comité pour les affaires économiques. Avant de mettre la main sur Aramco, le géant pétrolier qu'il entend privatiser. Et d'écarter en juin dernier lors d'une minirévolution de palais le prince héritier Mohammed Ben Nayef, l'homme de la CIA et de l'antiterrorisme. Enfin, en septembre, il fait embastiller des religieux et des intellectuels, souvent hostiles à sa politique d'ouverture ou à la guerre qu'il a déclenchée contre son voisin du Qatar. De quoi se faire beaucoup d'ennemis! Au sein de la famille régnante d'abord, où contrairement à ce qui avait été annoncé officiellement, le Conseil de l'allégeance - cet aréopage des princes de premier rang - ne s'est même pas réuni pour avaliser sa nomination comme prince héritier. «À long terme, son forcing peut être dangereux, met en garde un diplomate, car MBS aura besoin de ces gens-là pour réussir son pari.»

«Nous n'allons pas passer trente ans de plus de notre vie à nous accommoder d'idées extrémistes et nous allons les détruire maintenant.» 
Mohammed Ben Salman

«Ce qui intéresse Mohammed Ben Salman, analyse François-Aïssa Touazi, expert de l'Arabie, ce sont les classes moyennes et les jeunes qui forment 70 % de la société saoudienne». Or ces deux catégories vont, selon lui, «applaudir» cette opération mains propres. Il s'agit de «préserver l'argent public, punir les personnes corrompues et ceux qui profitent de leur position», justifiait samedi soir l'agence de presse officielle SPA.

Après des années de stagnation, alors que l'ennemi iranien est redevenu une puissance régionale, le prince héritier veut faire émerger une nouvelle Arabie. Pour réussir ce gigantesque pari, MBS mise sur l'après-pétrole et veut remettre à sa place le puissant lobby des religieux conservateurs.

«C'était très clair au sommet de Riyad qui a réuni la semaine dernière le gratin de la finance mondiale», souligne François-Aïssa Touazi, qui y participait. Devant 2.500 décideurs, Ben Salman a promis l'avènement d'une Arabie «modérée», en rupture avec l'image d'un pays longtemps considéré comme l'exportateur du wahhabisme, une version rigoriste de l'islam qui a nourri nombre de djihadistes à travers le monde. «Nous n'allons pas passer trente ans de plus de notre vie à nous accommoder d'idées extrémistes etnous allons les détruire maintenant», a-t-il assuré sous les applaudissements des participants à ce «Davos du désert».

«Il veut remettre en cause le pacte fondateur entre les Saoud et les wahhabites, au terme duquel la famille régnante céda le contrôle du pouvoir aux religieux en échange de leur allégeance.»
François-Aïssa Touazi, expert de l'Arabie

«MBS semble vouloir aller plus loin, poursuit François-Aïssa Touazi, puisqu'il veut remettre en cause le pacte fondateur vieux de plus de deux siècles entre les Saoud et les wahhabites, au terme duquel la famille régnante céda le contrôle du pouvoir aux religieux en échange de l'allégeance des wahhabites.»

Déjà, la police religieuse, vestige archaïque de cette alliance, a vu ses pouvoirs rogner. MBS vient également d'autoriser les femmes à conduire et l'ouverture de cinémas dans un pays où la jeunesse s'ennuie.

Peut-il mener de front tous ces chantiers, alors que son pays est embourbé dans une guerre au Yémen contre des rebelles alliés de l'Iran, et que Riyad ne parvient pas à ramener dans le rang le minuscule Qatar? «Il a une énergie et une autorité débordante», assure François-Aïssa Touazi. Son coup de balai est probablement le dernier acte avant sa prise de pouvoir. Depuis des mois, des rumeurs insistantes laissent entendre que le roi Salman, 81 ans et souffrant, pourrait abdiquer. Au profit de MBS, qui deviendrait ainsi à moins de 35 ans le plus jeune monarque de l'Arabie moderne. Et pour des décennies. Le temps d'essayer de transformer ce colosse aux pieds d'argile.

Walid Ben Talal, un familier de l'Élysée

Arrêté lui aussi, Walid Ben Talal  est le plus francophile des princes saoudiens. Le propriétaire du George V à Paris se targuait d'être l'ami des présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande, qui le recevaient à l'Élysée. L'an dernier, WBT, à la tête d'un holding qui pèse plus de 17 milliards de dollars, a signé un accord de partenariat avec  la Caisse des dépôts. Et récemment,  il est venu au secours de la Banque Saudi-Fransi (ex-Crédit agricole d'Arabie). Jean-Louis Borloo s'est également associé à lui pour lancer ses opérations d'aide à l'Afrique. Ses prises de position, souvent iconoclastes, agaçaient la cour à Riyad. Le jeudi soir, dans sa «ferme» du désert au sud  de Riyad, il recevait des cohortes  de Bédouins venus lui embrasser l'épaule, signe d'allégeance au prince, en échange d'un billet de 100 dollars. Une obole bédouine qui a pu finalement lui attirer des ennuis…

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Grand reporter, spécialiste du Moyen-Orient
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Pourquoi l'arrestation d'un prince saoudien inquiète Twitter (06.11.2017)

  • Publié le 06/11/2017 à 19:31
Le prince Al-Walid, arrêté ce week-end sur ordre d'une commission saoudienne anti-corruption, est l'un des investisseurs les plus importants de Twitter.

L'arrestation de plusieurs princes, anciens membres du gouvernement et ministres saoudiens secoue le monde des affaires. Kes autorités saoudiennes ont effectué un spectaculaire coup de filet anti-corruption samedi 4 novembre. Parmi les personnes arrêtées figurerait le richissime prince Al-Walid ben Talal. L'homme d'affaires, qui figure parmi les cinquante plus importantes fortunes au monde, est l'une des personnalités saoudiennes les plus médiatisées en Occident.

Le milliardaire a investi dans de grands noms des nouvelles technologies, dont Apple, la société de transport Lyft ou encore Twitter. Le 23 octobre, lors d'une interview accordée à CNBC, le prince Al-Walid avait confirmé toujours détenir des parts de la société californienne, se montrant optimiste au sujet de son investissement. «Cela ne promet pas d'être facile car ils font face à quelques difficultés, mais notre investissement initial a été très raisonnable, et nous nous orientons vers un seuil de rentabilité», avait-il alors indiqué au sujet de l'entreprise.

Le volume de parts actuellement détenu par l'homme d'affaires reste opaque, en raison de la politique de confidentialité de Kingdom Holding Company, sa société d'investissement. En décembre, le prince détenait 4,9% des parts de l'entreprise, selon le site InsiderScore.com, faisant de lui le cinquième investisseur le plus important de la société, d'après Ben Silverman, directeur de recherche d'InsiderScore, mentionné par CNBC. Fin 2015, al-Walid ben Talal avait annoncé être devenu le deuxième actionnaire de Twitter, après une augmentation de sa participation. Avec 5% de parts, il avait supplanté l'actuel PDG du groupe, Jack Dorsey, qui n'en détient que 3.23%.

La crainte d'une chute en Bourse

L'impact de l'annonce semble être encore modéré sur l'entreprise. Le cours de Twitter accusait une baisse de 1,35% en fin d'après-midi à la Bourse de New York. Le cours de Citigroup, dont Kingdom Holding Company détient également des parts, a, lui, baissé de 1%.

L'annonce de l'arrestation présumée d'Al-Walid a en revanche eu des conséquences directes sur sa société d'investissement. Le milliardaire est le principal actionnaire, à 95%, de Kingdom Holding, une société d'investissement qui détient des participations dans nombre d'entreprises, dont Accor. Ce matin, l'action du groupe hôtelier accusait une perte de 1,48% (à 42,07 euros) à la Bourse de Paris, soit l'une des plus fortes baisses de l'indice CAC 40, avant de retrouver son niveau d'origine. Le cours de Kingdom Holding a lui-même chuté de 9,9% à l'ouverture de la bourse saoudienne dimanche, au lendemain de l'arrestation présumée du prince. Le règlement de la bourse saoudienne plafonne la baisse des actions à 10% lors d'une sessions. L'indice Tadawul All-Shares (Tasi), la Bourse la plus importante des pays arabes, a également subi une baisse de 1,6%, une minute seulement après son ouverture.

L'Arabie Saoudite doit désormais examiner aux investissements à l'international des personnes arrêtées pour en évaluer les répercussions. Les actionnaires des sociétés concernées, eux, sont dans l'attente des conséquences réelles de cette arrestation présumée sur la valeur des actions du prince Al-Walid, qui pourrait se séparer d'une partie de ses investissements.

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Les Saoudiens arrêtés seront jugés (06.11.2017)
  • Par  Le Figaro.fr avec AFP 

  • Mis à jour le 06/11/2017 à 17:42 

  • Publié le 06/11/2017 à 17:21
Les dizaines de personnalités saoudiennes arrêtées dans le cadre d'une purge anticorruption sans précédent dans le royaume vont être jugées devant un tribunal, a indiqué aujourd'hui le procureur général.

Des princes, dont le célèbre milliardaire Al-Walid ben Talal, des ministres ainsi que des hommes d'affaires ont été appréhendés samedi lors d'une opération coup de poing qui fait suite à la mise en place d'une nouvelle commission anticorruption présidée par le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane.


«Toutes les personnes suspectées auront pleinement accès à tous les droits de la défense et les procès auront lieu de façon transparente», a affirmé dans un communiqué le procureur général Cheikh Saoud Al Mojeb. «D'importantes preuves ont déjà été recueillies et des interrogatoires détaillés ont eu lieu», a-t-il ajouté.

Selon Cheikh Saoud Al Mojeb, qui fait lui-même partie de la nouvelle commission anticorruption formée conformément à un décret royal, les autorités ont dû mener leur enquête «dans la discrétion» afin que personne «ne puisse échapper à la justice».

Selon la chaîne à capitaux saoudiens Al-Arabiya, 11 princes, 4 ministres et des dizaines d'ex-ministres ont été arrêtés, alors que la commission anticorruption a ouvert des enquêtes sur plusieurs affaires, pour certaines assez anciennes, dont une concerne les inondations meurtrières ayant dévasté en 2009 Jeddah (ouest).

Un responsable gouvernemental a fourni à l'AFP une liste de 14 personnalités de haut rang limogées ou arrêtées incluant le prince Al-Walid, l'une des personnalités les plus riches au monde.
Parallèlement aux arrestations, le chef de la puissante Garde nationale saoudienne, un temps considéré comme prétendant au trône, ainsi que le chef de la Marine et le ministre de l'Economie ont été abruptement limogés.

Tous ces changements interviennent au moment où le prince héritier Mohammed ben Salmane, 32 ans, tente de consolider son pouvoir et d'introduire des réformes économiques et sociales inédites dans le royaume ultraconservateur.

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Coca-Cola met en scène une Saoudienne au volant d'une voiture (06.11.2017)
Par Stéphanie O'Brien | Le 06 novembre 2017

En Arabie saoudite, les femmes ne pourront conduire qu'à partir de juin 2018. Une avancée sociétale sur laquelle surfe déjà le géant américain pour vanter les mérites de son célèbre soda.
En ce moment

Coca-Cola prend une longueur d’avance. Alors qu'en Arabie saoudite, les femmes ne seront autorisées à conduire qu'à compter de juin 2018, le géant américain met d'ores et déjà en scène une jeune femme au volant d'une voiture.

Dans sa publicité judicieusement intitulée «Change Has a Taste» («Le goût du changement»), la branche Coca-Cola Moyen-Orient montre une jeune femme en âge de conduire et à ses côtés, son père bienveillant. Ce dernier cède le volant à sa fille afin de lui apprendre les rudiments de la conduite. Comme tous les apprentis chauffeurs, elle a bien du mal à maîtriser le jeu de l’embrayage et de l’accélérateur.

Le goût du changement

Complice et patient, le père ouvre alors une bouteille de Coca-Cola et la pose sur la tableau de bord. Objectif : rouler sans renverser le soda. La fille échoue ; et son père de rattraper la bouteille au vol avant et de la lui offrir. Après quelques gorgées, la pilote en herbe retrouve confiance et redémarre sans caler. Reste à savoir si la société saoudienne recevra sans à-coup cette vision «à l'américaine» des relations père-fille et de la conduite.

En vidéo, la campagne "Change Has a Taste"

Coca-Cola : Change Has A Taste
Cette nouvelle publicité de la branche Moyen-Orient du groupe Coca-Cola salue les progrès récents vis-à-vis des femmes en Arabie Saoudite.

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Les médias traditionnels, remparts contre les fake news (05.11.2017)
Par Ingrid Vergara
Mis à jour le 05/11/2017 à 22h22 | Publié le 05/11/2017 à 18h34

En France, six personnes sur dix estiment que les médias traditionnels sont des sources fiables en matière d'information politique et électorale.

Dans un monde inondé par les fake news, les médias traditionnels sont de véritables valeurs refuges. C'est l'un des principaux enseignements de l'enquête sur la confiance dans les médias, menée par l'institut Kantar auprès de 8000 personnes en France, aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Brésil.

Si ces fake news, ces publications qui se font passer pour de l'information, font beaucoup de mal à la crédibilité des réseaux sociaux (58 % des sondés ont moins confiance), elles redonnent sa vraie valeur à la couverture de l'actualité en profondeur. Pour 72 % des personnes interrogées, les médias traditionnels représentent des contenus de confiance ; en France, six personnes sur dix estiment qu'ils sont des sources fiables en matière d'information politique et électorale. «On pouvait craindre que le phénomène affecte plus globalement la confiance des lecteurs dans les médias. Il n'en est rien. C'est un message fort de confiance renouvelée dans la presse traditionnelle, magazine et quotidienne», analyse Laurent Guillaume, directeur général de l'institut Kantar.

La presse écrite, une référence
«Notre étude montre qu'il y a un lien clair entre la confiance dans les médias et la volonté de payer, notamment chez les plus jeunes»
Laurent Guillaume, directeur général de l'institut Kantar.

La presse écrite - que ce soit sur papier ou en digital - demeure une référence: plus de trois quarts des personnes interrogées lui font confiance. Cette prime à l'information de qualité est une véritable opportunité pour les médias, qui travaillent sur leur stratégie de monétisation. «Notre étude montre qu'il y a un lien clair entre la confiance dans les médias et la volonté de payer, notamment chez les plus jeunes», ajoute Laurent Guillaume.

En France, 10 % des 18-34 ans sont prêts à payer pour accéder à de l'information de qualité contre 6 % des 35-54 ans et 3 % des plus de 55 ans. Le phénomène se vérifie dans les mêmes proportions dans les autres pays. .

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«Paradise papers» : face à l'évasion fiscale, la classe politique démunie (06.11.2017)
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 18:31 
  • Publié le 06/11/2017 à 17:24
LE SCAN POLITIQUE - Les récentes révélations ont mis en lumière des mécanismes planétaires d'optimisation fiscale. Les politiques peinent à réagir à ces scandales qui se multiplient, sur lesquels ils n'ont que peu de prise.

«Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c'est terminé.» En 2009, Nicolas Sarkozy, alors chef de l'État, le promettait. Les différentes affaires autour de l'évasion fiscale qui se sont succédées ces dernières années ont prouvé qu'il avait parlé un peu vite. Dernier scandale en date, les «Paradise Papers». Réalisée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) regroupant 96 médias de 67 pays, cette enquête met en lumière des mécanismes d'optimisation fiscale dont jouissent certaines multinationales et grandes fortunes mondiales.

Face à ces révélations qui se multiplient, les gouvernements successifs peinent à trouver une réponse efficace. La première raison est simple: bien qu'ils puissent paraître immoraux, ces montages financiers sont souvent... légaux. Difficile alors de s'opposer à un système qui correspond à la loi, à moins de la modifier. Mais là encore, la tâche s'avère complexe. Le système qui permet l'évasion fiscale est avant tout planétaire. Compliqué d'imaginer qu'un seul état puisse dicter ses règles au reste du monde.

Aucune réaction de l'exécutif

Pour l'instant, l'exécutif n'a pas encore réagi aux nouvelles révélations des «Paradise Papers». Preuve de son impuissance? Les partis d'opposition en ont quant à eux profité pour avancer certaines de leurs propositions. Dans un communiqué, le Front national a notamment remis à jour un engagement de la campagne de Marine Le Pen à la présidentielle. Celui-ci consistait à «créer une taxe sur l'activité réalisée en France par les grands groupes et les produits qui auraient été détournés, et en renforçant la coopération fiscale internationale.»

«Il convient également de priver d'accès aux marchés publics les multinationales qui pratiquent l'évitement fiscal et refusent de régulariser leur situation», affirme aussi le communiqué tout en rejetant la faute sur l'Union européenne: «La technostructure bruxelloise, toujours si prompte à réglementer tout et n'importe quoi, est ici absolument absente.»

Le maintien du «verrou de Bercy» critiqué

Lors d'une conférence de presse à l'Assemblée nationale lundi, Jean-Luc Mélenchon et les députés de la France Insoumis ont quant à eux tenu à rappeler que tous leurs amendements contre la fraude fiscale avaient été rejetés lors de l'examen du projet de loi de la moralisation de la vie publique en juillet. Parmi eux: la suppression du «verrou de Bercy», cette mesure qui oblige la justice à attendre l'accord du ministère des Finances pour pouvoir enquêter lorsqu'il y a un soupçon de fraude fiscale.
L'amendement, soutenu par tous les groupes d'opposition, a finalement été rejeté par la majorité présidentielle. «Ceci a été repoussé après débats en séances. C'est donc en pleine connaissance de cause qu'on a mis là un frein de lutte contre l'évasion et la fraude fiscale», a tonné Jean-Luc Mélenchon.

De son côté, le Parti socialiste a préféré se réjouir des avancées de la lutte contre l'évasion fiscale de ces dernières années, vantant le bilan de François Hollande. «C'est sous son quinquennat qu'une véritable politique de lutte contre l'évasion fiscale a été mise en place. Grâce aux mesures prises depuis 2012, tant au niveau international que national, 8 milliards d'euros ont été recouvrés par les services fiscaux», affirme le communiqué, tout en appelant Emmanuel Macron «à ne pas relâcher l'effort et à poursuivre, avec ses partenaires internationaux et en France, la lutte menée avec efficacité depuis 2012.» Quant aux Républicains, ils n'ont pour l'instant pas réagi.

VIDEO - Que sont les «Paradise Papers»?

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Qui est Appleby, le cabinet au coeur des «Paradise papers» ? (06.11.2017)
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 11:32 
  • Publié le 06/11/2017 à 09:50
VIDÉO - Basé aux Bermudes, ce cabinet d'avocats britannique réputé est à l'origine de près de 7 millions de documents sur les 13,4 millions que constituent les «Paradise papers».
La reine Elizabeth II, le secrétaire d'État au commerce Wilbur Ross, le gendre de Vladimir Poutine... La liste des personnalités citées dans les «Paradise papers» donne le tournis. Plus d'un an après les «Panama papers», cette enquête journalistique internationale lève le voile sur des circuits d'optimisation fiscale. Pour réaliser ce travail titanesque, le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), regroupant 96 médias de 67 pays, s'est appuyé sur la fuite de 13,4 millions de documents financiers, provenant notamment d'une société, Appleby.

Dans le détail, 6,8 millions de fichiers proviennent de ce cabinet d'avocats britannique basé aux Bermudes. Les fichiers restants viennent d'un autre cabinet basé à Singapour, AsiaCity Trust, et «des registres commerciaux de dix-neuf juridictions offshores», peut-on lire sur franceinfo, qui a participé à l'enquête. Sur son site internet, Appleby se présente comme «l'un des plus grands fournisseurs de services offshore légaux». La société dispose de bureaux sur l'île de Man, l'île Maurice et les Seychelles, notamment.


Née à la fin du XIXe siècle, sous l'impulsion de Reginald Woodfield Appleby - un avocat britannique -, l'entreprise s'est en effet implantée dans dans dix pays au fil des âges. «En 1979, la firme a commencé son expansion pour devenir une institution mondiale, avec plus de 700 employés», explique la chaîne de télévision australienne ABC. Objectif affiché: bénéficier d'un droit fiscal particulièrement avantageux dans ces territoires. Un principe qui est toujours d'actualité puisque, selon des documents révélés par l'ICIJ datant de 2013, Appleby étudiait la possibilité d'ouvrir de nouveaux bureaux aux îles Cook et au Vanuatu. À titre indicatif, le dernier bureau a été ouvert à Shanghai, en 2012, si l'on se fie à la frise chronologique disponible en ligne.

De nombreux clients domiciliés aux États-Unis

«À chaque bureau son expertise, en fonction des avantages fiscaux de chaque territoire: à l'île de Man, on conseille les détenteurs d'avions privés tandis que Jersey est le paradis des opérateurs de jeux en ligne», détaille ainsi franceinfo. Le cabinet Appleby offre ainsi une large palette de services, aussi bien pour les entreprises que les particuliers. Là encore, la liste est longue: créations de sociétés-écrans pour échapper à la TVA, constitution de «trusts familiaux pour gérer des fortunes ou des héritages» sans être imposé, etc. «Les gens d'Appleby ont très bonne réputation, ils sont très pros, très bons», abonde un avocat genevois dans les colonnes du journal suisse Le Tempsdans un article datant de mercredi dernier. «Mais ce ne sont pas de simples administrateurs de sociétés offshore, c'est plus sophistiqué. Ils font du réglementaire, des produits dérivés pour les fonds, des services pour entreprises, contrats d'actionnaires, holdings, fonds irlandais…».

Dans les faits, le cabinet est divisé en deux branches depuis janvier 2016, dont l'une fiduciaire - baptisée «Estera» et revendue à des associés - qui gère notamment les actifs de riches particuliers, explique Le Monde . «Contactées par Le Monde et ses partenaires, les deux firmes se sont d'ailleurs défendues de manière similaire en affirmant “respecter toutes les régulations”, ne pas faire “de conseil fiscal”», détaille le quotidien du soir.

Les clients? Les PEP, ou «politically exposed persons» - personnalités politiques exposées - notamment, peut-on lire sur le site de la BBC. Autrement dit, il s'agit des personnalités politiques, des diplomates ou de personnes venant du milieu judiciaire. Au total, 150 politiciens et chefs d'entreprise sont cités comme clients d'Appleby dans les «Paradise papers». Parmi les entreprises clientes, on recense notamment Credit Suisse, HSBC et le groupe Barclays, selon le site The Lawyer. Dans les faits, les clients sont majoritairement domiciliés aux États-Unis (31.180 adresses de clients, dixit la BBC). «Il y avait 14.434 adresses britanniques et 12.017 aux Bermudes», détaille le média anglais. «Ensuite, c'est aux îles Caïmans qu'on trouve le nombre le plus important, puis Hong Kong, la Chine, le Canada, l'île de Man, la Suisse et les îles Vierges».

Si Appleby est aujourd'hui sous le feu des projecteurs, ce n'est pas la première fois que ces agissements sont dénoncés. En 2010, une association britannique, Tax Justice Network, pointait déjà du doigt l'opacité des pays dans lesquels le cabinet s'était installé, rappelle franceinfo. En 2013, ce sont les autorités financières des Bermudes qui regrettaient le manque de rigueur dans le contrôle sur la provenance des fonds. «De 2005 à 2015, plus d'une douzaine d'audits ont relevé des manquements dans les contrôles internes du cabinet, sur ses sites de l'île de Man, des îles Caïmans, des îles Vierges britanniques, aux Bermudes et à Londres», renchérit Le Monde.

Sans plus attendre, et avant même que les «Paradise papers» ne soient révélés, Appleby s'est empressé de publier un communiqué la semaine dernière, démentant tout comportement illégal. «Nous prenons la confidentialité de nos clients très au sérieux et nous sommes déçus que les médias aient choisi d'utiliser des informations qui proviennent d'une source obtenue illégalement», indique l'entreprise. «Nous prenons toute allégation d'acte répréhensible, implicite ou autre, très au sérieux. (...) Appleby a mené une enquête minutieuse et approfondie sur les allégations et nous sommes convaincus qu'il n'y a aucune preuve d'actes répréhensibles, que ce soit de notre part ou de la part de nos clients».

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«Paradise papers»: nouvelles révélations sur les milliards des paradis fiscaux (05.11.2017)
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 12:54 
  • Publié le 05/11/2017 à 22:08
VIDÉO - Le premier ministre canadien Justin Trudeau, la reine Elisabeth II ou encore des proches du président américain Donald Trump font partie des personnalités citées dans cette nouvelle enquête du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), déjà à l'origine des «Panama Papers».

Dix-huit mois après les «Panama Papers», place aux «Paradise Papers». Quelques 381 journalistes, représentant 96 médias internationaux (dont Radio France et Le Mondeen France, Süddeutsche Zeitung en Allemagne, le Guardianau Royaume-Uni et le New York Times aux États-Unis) ont épluché pendant plusieurs mois plus de 13 millions de documents issus pour moitié du cabinet-conseil britannique Appleby, installé aux Bermudes et dans dix autres paradis fiscaux, obtenus par le journal allemand Süddeutsche Zeitung.

Leurs investigations mettent en lumière des schémas sophistiqués d'optimisation fiscale, souvent légaux, mais grâce auxquels des milliards de dollars d'impôts impayés échappent aux finances des États. Parmi les personnalités mises en cause, des politiques (des proches du président américain Donald Trump ou du premier ministre canadien Justin Trudeau, la reine d'Angleterre...), des stars du show-business (Madonna, Bono, le chanteur de U2...), ou des sociétés telles que Apple, Facebook ou Twitter...

Appleby, qui se présente comme «l'un des plus grands cabinets d'avocats offshore», avait annoncé fin octobre s'attendre à voir publiées des informations financières pouvant concerner certaines des personnes les plus riches de la planète, après un «incident» informatique.

La reine Elisabeth II possèderait ainsi une société qui gère ses biens, baptisée Duché de Lancaster, qui a investi 7,5 millions de dollars dans un fonds aux îles Caïmans en 2005. Ce fonds aurait lui-même investi dans un fonds qui contrôle une société baptisée «Brighthouse». Or, cette dernière est sous le feu des critiques au Royaume-Uni pour vendre aux ménages les plus défavoriés de l'électroménager, de l'ameublement et d'autres biens de consommation adossés à des prêts aux taux usuriers de 99,9 %.

Le premier ministre canadien Justin Trudeau est également cité. Et notamment un de ses amis proches, le milliardaire Stephen Bronfman, qui avait levé plus de 27 millions de dollars pour sa campagne pour les élections législatives de 2015. À travers sa société Claridge, l'homme d'affaires aurait investi dans une structure financière opaque aux îles Caïman qui est soupçonnée d'avoir soustrait des millions de dollars aux caisses de l'État canadien. Cette révélation fait tache pour le premier ministre canadien qui a fait de la lutte contre les paradis fiscaux l'une de ses priorités.

Le secrétaire américain au Trésor, Wilbur Ross, entretiendrait toujours des liens d'affaires étroits avec des proches du président russe, Vladimir Poutine, en dépit des sanctions qui frappent ce pays. Le ministre du Commerce de Donald Trump aurait ainsi gardé des participations dans une société de transport maritime de gaz liquéfié, Navigator Holdings, qui fait des affaires avec un oligarque russe visé par des sanctions américaines, ainsi qu'avec un gendre de Vladimir Poutine. Selon le New York Times, Wilbur Ross aurait réduit sa participation personnelle dans cette société lors de sa prise de fonctions en février, mais en contrôle toujours, via des entités offshore, 31%.

Facebook et Twitter apparaissent également dans les «Paradise Papers», car les deux sociétés auraient perçu des financements substantiels en provenance d'institutions publiques russes ayant des liens avec Vladimir Poutine, via un associé de Jared Kushner, le beau-fils de Donald Trump. Yuri Milner, le magnat russe qui auraient fait les investissements détiendrait également des actions dans une société co-détenue par Jared Kushner, qui est également un conseiller du président américian. Ces révélations sont de nature à alimenter le débat sur l‘immixtion de la Russie dans l'élection présidentielle américaine de 2016, et le rôle des médias sociaux.

Les premières réactions n'ont pas tardé ce lundi. Berlin a même salué les révélations. «Pour le gouvernement allemand, j'aimerais dire que cette publication et le travail effectué par les médias sont bienvenus car ils jettent une lumière sur les structures, les acteurs et les bénéficiaires de mondes fiscaux parallèles», a dit le porte-parole du gouvernement Steffen Seibert. Un porte-parole du ministère allemand des Finances a déclaré qu'il serait utile que ces Paradise Papers soient mis à disposition du fisc allemand. Au Royaume-Uni, un porte-parole de Theresa May a indiqué que l'autorité fiscale britannique avait demandé l'autorisation de consulter les documents. «Il est important de signaler que les investissements offshore ne sont pas automatiquement des actes répréhensibles, mais le HMRC (Her Majesty's Revenue and Customs) a demandé à voir ces documents, en urgence», a-t-il spécifié. À Bruxelles également, les «Paradise papers» n'ont pas tardé à faire réagir et se sont même invités à l'ordre du jour. Selon les officiels de l'Union européenne, cités par Reuters, les ministres de l'Économie et des finances devraient se réunir mardi pour mettre en place une liste noire des paradis fiscaux dans le monde. En théorie, celle-ci devrait être complétée d'ici la fin de l'année.

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Paradise Papers : l'étonnant montage de Lewis Hamilton pour contourner la TVA (06.11.2017)
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 18:34

Crédits photo : Sutton/Sutton / Panoramic

LE SCAN SPORT - Le néo-quadruple champion du monde de Formule 1 a vu son nom apparaitre dans la liste de l'enquête des «Paradise Papers», pour optimisation fiscale d'un montant de 3,7 millions d'euros autour de «son» jet-privé.

Rapide au volant de sa monoplace grise ou à l'arrière de son jet-privé rouge, Lewis Hamilton a été rattrapé par les «Paradise Papers», nouvelle enquête du Consortium international des journalistes d'investigation sur l'optimisation fiscale, déjà à l'origine des «Panama Papers». En cause, un montage financier permettant au Britannique de s'exonérer le paiement de la TVA de son jet-privé de 22 millions d'euros. Puisque, selon l'émission de France 2, Cash Investigation, affiliée à l'enquête, si le pilote Mercedes utilise à sa guise l'appareil, officiellement l'aéronef ne lui appartient pas. Il est la propriété d'une société enregistrée aux îles Vierges qui le loue à une entité basée sur l'île de Man, qui, elle-même le loue à nouveau à une autre société avant que Lewis Hamilton ne s'en serve.

Rien d'illégal pour les avocats d'Hamilton

Toujours selon des éléments de Cash Investigation, les sociétés précitées appartiennent toutes au quadruple champion du monde de F1. Ainsi, un tel montage permet à Lewis Hamilton d'économiser 3,7 millions d'euros de TVA, puisque la législation fiscale exonère l'achat d'un avion par une entreprise quand celle-ci souhaite en faire un usage commercial, alors que l'usage de loisir est imposé. Désireux d'entendre le pilote sur ce tour de passe-passe, l'émission a contacté ses avocats qui ont réfuté tout caractère illégal: «Il est parfaitement légal pour une personne imposable de choisir la location plutôt que l'achat pour réduire la TVA. Le but principal étant d'obtenir un avantage fiscal».

VIDEO - Que sont les «Paradise Papers»?


Le monde des paradis fiscaux en cinq questions (06.11.2017)

LE SCAN ÉCO - Les paradis fiscaux sont de véritables repaires de la «finance de l'ombre». Aussi décriés qu'ils sont protégés, ils cristallisent les dérives du système bancaire.
• Qu'est-ce qu'un paradis fiscal?

Pas de définition juridique. Il n'existe pas de définition juridique d'un paradis fiscal. Dans un document datant de 1998, l'OCDE retient quatre critères majeurs pour identifier un tel territoire: un taux d'imposition nul ou insignifiant, un manque de coopération dans l'échange d'informations avec d'autres pays, un manque de transparence législative, légale ou administrative et enfin des activités autres que financières très limitées.


Des activités variées. Sur la base de ces critères, Esther Jeffers et Dominique Plihon, respectivement maître de conférence à Paris 8 et professeur à Paris 13, ont estimé à plus de cent le nombre de paradis fiscaux dans le monde. «Ils ont des activités différentes, expliquent-ils. Certains attirent les multinationales par un taux d'imposition sur les sociétés défiant toute concurrence. D'autres sont des paradis réglementaires, où la création de sociétés holdings opaques est aisée. Il y a aussi les paradis bancaires, où le secret bancaire permet aux particuliers et aux entreprises d'échapper aux contrôles fiscaux de leur pays d'origine.»

Offshore (adj. inv.) : se dit du secteur bancaire établi à l'étranger et non soumis à la législation nationale
Larousse

Un paradis fiscal offre toute une batterie de services financiers offshore. Cela signifie qu'il accorde des facilités bancaires à des personnes non résidentes, qui peuvent y avoir accès depuis un pays tiers. Les activités offshore ne sont pas forcément illégales. Par exemple, en France, détenir un compte bancaire offshore, c'est-à-dire à l'étranger, est parfaitement légal. Il faut simplement le déclarer au fisc. En revanche, détenir un compte offshore pour échapper à l'impôt est illégal.


Une forte collusion entre politique et finance. Un autre marqueur, et non des moindres, des paradis fiscaux consiste en la collusion entre intérêts financiers et pouvoir politique. Comme le rappelle le Guardiandans un article sur la question, bien souvent, l'opposition politique au système offshore n'existe pas ou plus. Ce qui aboutit souvent à un système d'imposition à deux vitesses: un taux nul ou anecdotique pour les non résidents et un taux bien plus élevé pour les résidents, qui constituent alors la principale voire la seule source de revenus du pays.

• Où se trouvent les paradis fiscaux?

Parmi les États membres de l'Union Européenne, chacun a sa propre liste des paradis fiscaux, en fonction des exigences de partage d'information, mais aussi des contentieux avec les États à risques. L'Union Européenne publie une carte actualisée des pays qualifiés de paradis fiscaux par ses membres. Selon cette carte interactive disponible ici, et actualisée au 31 décembre 2016, la France liste les pays suivants à des fins fiscales: le Botswana, le sultanat de Brunei, le Guatemala, les Îles Marshall, le Panama et deux des plus petits États du monde, la République de Nauru, et Nioué.

De son côté, le Forum global sur la transparence et l'échange d'informations fiscales -sous l'égide de l'OCDE- classe ses 127 pays membres selon leur degré de coopération financière. Chaque pays membre remplit un questionnaire sur la transparence dont font preuve les autres pays membres, l'ensemble des réponses constituant une sorte d'audit. La dernière mise à jour date de septembre 2017. Aujourd'hui, seul Trinidad-et-Tobago est classé comme «non conforme», et six juridictions sont considérées comme étant «partiellement conformes» (les îles d'Anguilla et de Curaçao, l'Indonésie, les Îles Marshall, Saint-Martin et la Turquie).


• Sur quels critères sont établies ces listes?

La liste de la Commission européenne a été établie à partir des listes de quinze pays (l'Allemagne, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, le Portugal et la Slovénie). Chaque pays possède ses propres critères, parmi la coopération en matière financière, l'absence d'un taux d'imposition significatif ou d'autres critères divers.

Le Forum global sur la transparence retient lui une série de critères précis mais uniquement dans le domaine de la coopération financière. Le taux d'imposition n'entre par exemple pas en ligne de compte. Dix critères différents permettent de déterminer si un pays est coopératif ou non, dans trois catégories distinctes: la disponibilité des informations bancaires, leur facilité d'accès et la possibilité de les échanger (voir le détail des critères).

• Pourquoi les paradis fiscaux posent-ils problème?

Tout d'abord, l'opacité en vigueur dans ces juridictions cache bien souvent le financement d'activités criminelles, allant du blanchiment d'argent sale au trafic de drogue, voire au terrorisme.

Les paradis fiscaux représentent également un manque à gagner conséquent pour les autres États. Ils n'intéressent pas seulement de riches contribuables soucieux d'échapper à l'impôt. Ils drainent également -et surtout- de nombreux fonds spéculatifs et de grandes entreprises, qui y trouvent un moyen d'alléger leur fardeau fiscal dans leur pays d'origine, ou dans certains pays où ils offrent leurs services. La question de la taxation des géants américains de la haute technologie est donc liée. Lorsque l'on sait que près de 50% des flux internationaux de capitaux transitent selon le FMI par un paradis fiscal, on imagine mieux l'ampleur de cette évasion fiscale.

• Où en est-on dans la lutte contre les paradis fiscaux?

L'OCDE coordonne au niveau mondial les politiques de lutte contre l'évasion fiscale et le financement

Les listes de paradis fiscaux, des documents soumis aux lobbies

d'activités criminelles. Le Forum global sur la transparence et l'échange d'informations fiscales tient ainsi plusieurs fois par an des séminaires dans des pays souhaitant renforcer la lutte contre l'opacité fiscale. Le dernier a eu lieu à Genève en juillet dernier. Le Forum poursuit en parallèle son travail d'évaluation de la transparence de ses pays membres, les accompagnant dans leurs démarches pour renforcer la coopération bancaire et fiscale.

Néanmoins, la notion même de paradis fiscal reste soumise à de puissants lobbies. Et les pays qui figurent sur l'une ou l'autre des «listes noires» de la Commission ou de l'OCDE cherchent à tout prix à en sortir. Au moment de la diffusion de la liste de la Commission, certains pays s'étaient étonnés d'y être mentionnés, alors même qu'ils s'étaient engagés à échanger des données sur les contribuables étrangers... comme l'exigeait l'OCDE. L'Irlande a renoncé sous la pression de ses voisins à certains des avantages fiscaux qu'elle octroyait aux grandes entreprises. La City de Londres, qu'Esther Jeffers et Dominique Pilhon désignent comme «le plus grand paradis fiscal» puiqu'elle abriterait à elle seule 55% des dépôts offshore, n'a jamais été inquiétée. Un petit coin de paradis protégé par un puissant parapluie de lobbies.

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Harvey Weinstein : Asia Argento encourage Uma Thurman à prendre la parole (06.11.2017)
Par Chloé Friedmann | Le 06 novembre 2017

«Chère Uma Thurman, (...) nous avons besoin de ta voix puissante», a tweeté l'actrice italienne en faisant référence à la réaction, étonnante, de l'interprète de Kill Bill à l'affaire Harvey Weinstein.

Asia Argento, déjà à l'origine de la publication de la liste exhaustive des 93 victimes de Harvey Weinstein, espère-t-elle recueillir un nouveau témoignage contre le producteur américain ? Sur Twitter, l'actrice italienne a, en tout cas, encouragé Uma Thurman à parler.

«Chère Uma Thurman, que la paix soit avec toi et ton âme, écrit Asia Argento le 4 novembre. Nous avons besoin de ta voix puissante», écrit-elle sur son compte officiel

Dear #UmaThurman may peace be with you and your soul. We need your strong voice, it truly is commanding https://m.youtube.com/watch?v=Rs4gK8DuuWY&feature=youtu.be …


"J'attends de me sentir moins en colère"

Ce post fait référence à la réaction, pour le moins intriguante, de Uma Thurman au scandale Weinstein. Interrogée sur cette affaire au retentissement mondial par une journaliste de l’émission «Access Hollywood», le 18 octobre dernier, l’interprète de Beatrix Kiddo dans Kill Billavait en effet préféré éluder la question.

Venue assurer la promotion de la comédie musicale The Parisian Woman, à New York, l’actrice américaine avait refusé de s’exprimer au débotté sur les accusations de harcèlement et d’agression sexuels qui secouent le monde du cinéma. «Je n'ai pas de déclaration toute prête à vous faire, parce que je ne suis pas une enfant, et j'ai appris que quand je parle sous le coup de la colère, je regrette généralement ma manière de m'exprimer, a-t-elle expliqué froidement. Donc j'attends de me sentir moins en colère. Et quand je serai prête, je dirai ce que j'ai à dire.»

Ses propos suggèrent que l’actrice a, elle aussi, un passif avec Harvey WeinsteinUma Thurmana côtoyé à plusieurs reprises le producteur américain, notamment dans le cadre des films réalisés par Quentin Tarantino, ami proche du magnat de Hollywood, et dans lesquels elle joue.

Les femmes sexuellement harcelées par Harvey Weinstein
En images


En vidéo, la chute de Harvey Weinstein, magnat du cinéma

Harvey Weinstein : la chute d'un magnat du cinéma

Accusé d'attouchements, de harcèlement et de viol, le producteur hollywoodien Harvey Weinstein a été licencié.

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«Écriture inclusive : l'idéologisation du langage fait déjà des ravages au Québec» (06.11.2017)


Mis à jour le 06/11/2017 à 16h09 | Publié le 06/11/2017 à 16h03

TRIBUNE - Mathieu Bock-Côté, figure de la vie intellectuelle québécoise*, explique pourquoi l'écriture inclusive se répand à la vitesse d'un feu de forêt.

Au premier regard, la querelle de l'écriture inclusive peut sembler loufoque. On veut croire qu'elle confirme le basculement d'un certain féminisme dans un monde parallèle et on aime mieux s'en moquer en brocardant le féminisme radicalisé, comme si l'humour pouvait en venir à bout. Mais nul besoin d'être devin pour comprendre que cette mode va peu à peu s'étendre.

Le progressisme domine l'époque: les revendications militantes qui, la veille encore, semblaient marginales, se normalisent très rapidement, surtout lorsqu'elles bénéficient de la complaisance des médias et des sciences sociales militantes. L'écriture inclusive progresse dans les manuels scolaires et trouve un écho dans la langue de l'administration. Elle sera intégrée dans le prochain logiciel de traitements de texte de Word. Demain ou après-demain, les grandes entreprises s'y rallieront par souci de «modernité».

Les revendications militantes qui, la veille encore, semblaient marginales, se normalisent très rapidement, surtout lorsqu'elles bénéficient de la complaisance des médias et des sciences sociales militantes

Il suffit de traverser l'Atlantique et de jeter un œil au Québec pour voir à quel rythme se répand l'écriture inclusive lorsqu'elle ne rencontre pas d'obstacles à son déploiement, alors que la Belle Province sait pourtant résister avec un certain panache et beaucoup de courage à l'impérialisme d'un anglais mondialisé auquel plusieurs voudraient concéder un monopole sur la «modernité». Il y a quelques mois encore, au Québec, cette manière de hachurer les mots et d'enlaidir la langue était à peu près invisible publiquement, sinon chez l'avant-garde autoproclamée du féminisme militant.

En quelques mois, pourtant, cette mode s'est répandue et personne n'ose vraiment s'y opposer de peur de passer pour réactionnaire et antiféministe, ce qui peut d'un coup détruire une réputation. Dans les milieux qui se veulent de gauche, l'écriture inclusive se diffuse. On en trouve même parmi les intellectuels et les journalistes pour en faire usage, comme s'ils envoyaient un signe ostentatoire d'adhésion aux nouvelles exigences de la respectabilité. Voyons-y un signe de soumission maquillé en faux bon sens.

C'est la grande force des doctrines radicales : elles misent sur l'intimidation idéologique qui paralyse leurs adversaires et les pousse dans une attitude de non-résistance

C'est la grande force des doctrines radicales: elles misent sur l'intimidation idéologique qui paralyse leurs adversaires et les pousse dans une attitude de non-résistance, comme s'ils étaient convaincus de leur défaite inévitable. De ce point de vue, le rappel à l'ordre de l'Académie française était non seulement méritoire mais vital. Toutefois il ne suffit pas de défendre le génie de la langue française devant un féminisme prêt à soumettre l'intégralité du réel à sa grille idéologique: partout, il y aurait la guerre des sexes.

Selon cette interprétation, il faudrait démonter systématiquement la «domination masculine». La langue française serait fondamentalement sexiste et relaierait un imaginaire qui justifierait l'infériorisation des femmes jusque dans les plis les plus intimes du vocabulaire. Il faudrait donc déconstruire le français pour mieux le reconstruire. À en croire ce féminisme radical, une cause aussi noble justifierait une confusion temporaire dans le rapport à la langue française, le temps qu'on s'habitue à la nouvelle graphie. Encore et toujours, nous affirme-t-on, il faut tuer le vieux monde.

Sous la pression du politiquement correct, la langue n'a plus pour vocation de décrire le plus finement possible le réel. Elle devient un pur lieu de rapport de pouvoir où les minorités sont censées prendre leur revanche sur l'histoire

La question de l'écriture inclusive nous invite, plus largement, à méditer sur l'idéologisation du langage. Sous la pression du politiquement correct, la langue n'a plus pour vocation de décrire le plus finement possible le réel. Elle devient un pur lieu de rapport de pouvoir où les minorités sont censées prendre leur revanche sur l'histoire.

Le souci pour la littérature et ce qu'elle peut représenter est écrasé: la seule littérature admise, à terme, sera «pédagogique» et devra véhiculer les bonnes valeurs, celles jugées conformes à l'idéal diversitaire. Dans cet esprit, on ne lit plus les œuvres avec une forme de piété littéraire mais avec le souci d'y déterrer les préjugés qu'elles relaieraient. La psychologie du lecteur postmoderne n'est pas celle d'un admirateur mais d'un inquisiteur méticuleux fier d'épingler les vieux maîtres pour des crimes idéologiques dont ils ne soupçonnaient même pas l'existence.

On en revient inévitablement à Orwell qui, dans 1984, a proposé une très fine réflexion sur la perversion du langage par le totalitarisme. Si peu à peu, on parvient à proscrire certains mots, à les effacer de la conscience, de l'usage ou du dictionnaire, on parviendra aussi à rendre inexprimable la réalité qu'ils désignaient. La réalité deviendra tout simplement impossible à conceptualiser, à nommer, à représenter. Cette police du langage règne déjà avec la multiplication dans l'espace public des surveillants qui nomment dérapage toute forme d'écart par rapport au politiquement correct.

Des «jeunes» aux «incivilités» en passant par les «migrants», l'euphémisation du langage avec des termes visant à dissimuler le réel en neutralisant sa représentation se sont multipliés au point de devenir la norme

Les mots proscrits se sont multipliés. Certains autres sont tombés en désuétude, non parce qu'ils ne référaient plus à la réalité, mais parce que mentionner cette réalité peut valoir l'ostracisme à celui qui s'y risque. Des «jeunes» aux «incivilités» en passant par les «migrants», l'euphémisation du langage avec des termes visant à dissimuler le réel en neutralisant sa représentation se sont multipliés au point de devenir la norme.

L'écriture inclusive, pour sa part, entend moins assurer la visibilité du féminin dans la langue française, ce qui va de soi et s'inscrit dans le mouvement de son évolution naturelle, qu'elle n'entend prendre le contrôle du langage idéologiquement en lui refusant sa part de mystère et son génie. Les tenants du politiquement correct supposent que la langue est absolument transparente, et qu'on peut la déconstruire et reconstruire au gré de nos désirs politiques en suivant les consignes de l'ingénierie linguistique. La maîtrise absolue du langage et de ses codes donne l'impression de la maîtrise absolue de la pensée. C'est un fantasme de toute-puissance quasi totalitaire qui s'exprime par-là et qui ne tolère aucunement la dissidence, dans laquelle on ne veut voir qu'un résidu du passé. L'écriture inclusive veut vider la langue française de ses charmes, de ses nuances et des mots qui ne se laissent pas enrégimenter dans son combat. Faut-il être surpris? Il suffit aujourd'hui de défendre la grammaire et le dictionnaire pour être classé parmi les conservateurs. On devrait s'en faire un honneur.

Sociologue et chargé de cours à HEC Montréal. Le récent ouvrage de Mathieu Bock-Côté «Le Multiculturalisme comme religion politique» (Éditions du Cerf, 2016) a été salué par la critique.

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Macron aux Émirats, seul «partenaire de confiance» (06.11.2017)
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 17:55 
  • Publié le 06/11/2017 à 17:29
En choisissant Abou Dhabi pour son premier déplacement dans le Golfe, le chef de l'État souligne une convergence antiterroriste.

Nicolas Sarkozy avait misé sur le Qatar. François Hollande, sur l'Arabie saoudite. Emmanuel Macron, lui, semble parier sur les Émirats arabes unis (EAU), mais avec moins d'enthousiasme. Le chef de l'État effectue sa première visite mercredi et jeudi dans le Golfe à Abu Dhabi et Dubaï, où le point fort sera l'inauguration du Musée du Louvre.

«Sur la lutte antiterroriste, il y a en effet des échanges anciens qui se sont approfondis avec les Émirats, des relations qui traduisent la confiance dans ce partenariat avec eux»
L'Élysée
«Les Émirats sont un partenaire de confiance», explique-t-on à l'Élysée. Pendant la campagne et après son élection, Macron a critiqué l'Arabie saoudite et le Qatar, mais pas les EAU. Il a répété vouloir être «sans complaisance» avec Riyad et Doha sur la question du financement du terrorisme islamiste. Contrairement à ses prédécesseurs plutôt discrets sur cette question, le chef de l'État demande, notamment au Qatar, de montrer que l'argent qui finance des groupes terroristes vient d'«individus privés» sans lien avec les autorités. Rien de tel avec Abu Dhabi. Devant des diplomates, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU à New York, Emmanuel Macron a expliqué pourquoi les EAU étaient singuliers par rapport à leurs voisins qatarien et saoudien. «On soutient les Émirats parce qu'ils sont, comme nous et comme l'Égypte, engagés clairement dans la lutte anti-djihadiste», a dit le président, qui a reçu il y a quinze jours le président Abdel Fattah al-Sissi.

«Sur la lutte antiterroriste, il y a en effet des échanges anciens qui se sont approfondis avec les Émirats, des relations qui traduisent la confiance dans ce partenariat avec eux», insiste-t-on à l'Élysée. Au prince Mohammed Ben Zayed, l'homme fort des EAU, qu'Emmanuel Macron a déjà reçu à l'Élysée en juin, le président «reparlera» de son projet d'organiser l'an prochain à Paris une conférence sur le financement du terrorisme. «Nous comptons demander une contribution active aux Émirats», dit-on à l'Élysée. Si les EAU combattent effectivement les islamistes, pendant longtemps, les banques de Dubaï ont été, elles aussi, accusées d'abriter des financiers du terrorisme.

Emmanuel Macron n'a pas vraiment d'atomes crochus avec le Golfe. «Il n'ignore pas que dans l'opinion l'image de ces pays n'est pas bonne», relève un homme d'affaires, qui échoua à l'attirer à Abu Dhabi pendant sa campagne électorale. L'ancien ministre de l'Économie n'ignore pas que la diplomatie économique de Laurent Fabius, aux Affaires étrangères entre 2012 et 2016, a été décevante en termes de contrats signés. Mais peut-il se désintéresser de cette région qui abrite les seuls gisements de croissance au Moyen-Orient au moment où l'Arabie est en pleine mutation? Probablement pas.

Paris souhaite que le dialogue reprenne

Mais les EAU, comme leur allié saoudien, sont très attentifs à son positionnement par rapport à leur ennemi iranien. «Macron peut-il se rendre en visite officielle en Iran avant d'aller en Arabie saoudite?», s'inquiétait une journaliste d'un quotidien saoudien au briefing de l'Élysée précédant ce voyage. Les EAU, comme l'Arabie, le prendraient mal. Régulièrement, le chef de l'État rappelle que la France doit avoir une position équilibrée entre Saoudiens et Iraniens, en guerre ouverte au Moyen-Orient. La crise du Golfe, déclenchée par Riyad et Abu Dhabi, qui accusent Doha de soutenir l'Iran et le terrorisme, sera également au menu de la visite.

Paris souhaite que le dialogue reprenne, mais Riyad refuse. Abu Dhabi avait trouvé «très grave» l'appel lancé début septembre par Macron à lever les sanctions que Riyad et Abu Dhabi imposent, depuis juin, au Qatar. «Mais un message passé ensuite à Abu Dhabi insistant sur le volet humanitaire du geste du président les a rassurés», confie un diplomate. À New York, Macron avait dit espérer que les EAU se distancient de l'Arabie. Un vœu pieux. Face au poids lourd saoudien, Abu Dhabi n'en a pas les moyens. Le chef de l'État le constatera sur les rives du Golfe, où l'amitié émiro-saoudienne est au contraire martelée.

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Egypte: un militant des droits de l'Homme lance sa campagne présidentielle (06.11.2017)
  • Par  Le Figaro.fr avec AFP 
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 20:00 
  • Publié le 06/11/2017 à 19:51
L'avocat défenseur des droits de l'Homme Khaled Ali,célèbre pour avoir mené une bataille judiciaire contre le régime du président Abdel Fattah al-Sissi, a lancé aujourd'hui sa campagne pour l'élection présidentielle en Egypte, prévue au printemps 2018.

Candidat à la présidentielle de 2012, ce militant de gauche de 45 ans, figure populaire de la révolution du 25 janvier 2011, s'était opposé au transfert de deux îles à l'Arabie Saoudite.

«Nous nous préparons à ces élections sans illusion quant à l'intégrité de l'adversaire ou l'équité du contexte dans lequel se déroulera le processus électoral», a-t-il déclaré  lors d'une conférence de presse.
Khaled  Ali a toutefois précisé qu'il annoncerait sa décision finale au sujet de sa candidature après consultation de «toutes les forces politiques égyptiennes». Il pourrait aussi bien présenter une candidature collective ou se retrancher derrière un boycott général.

Plus tôt lundi, il avait annoncé sur Facebook que les forces de sécurité avaient mené un raid dans l'imprimerie où se trouvaient les tracts de sa campagne, et saisi une partie des documents.

Connu pour son engagement au sein d'ONG et de son parti laïque Pain et Liberté, l'avocat s'est imposé comme la figure principale de l'opposition au régime du président Sissi, qui dirige le pays depuis 2014.

Grèce: tirs contre le siège du Parti socialiste (06.11.2017)
  • Par  Le Figaro.fr avec AFP 
  • Mis à jour le 06/11/2017 à 20:05 
  • Publié le 06/11/2017 à 20:02
Un inconnu a tiré lundi soir contre les forces anti-émeutes gardant le siège du parti socialiste grec d'opposition Pasok, dans le centre d'Athènes, sans faire de blessés, a indiqué une source policière.
L'enquête sur cette attaque, survenue à une heure animée, a été confiée à la brigade antiterroriste grecque, alors que des actions de ce type visent sporadiquement des cibles politiques ou économiques en Grèce, imputées à la mouvance extrémiste locale anti-autoritaire.

Un policier a indiqué avoir vu un inconnu viser dans sa direction, et avoir eu le temps de donner l'alarme et de se mettre à l'abri avant les tirs. La police a bouclé la zone et retrouvé trois douilles, tandis qu'un des tirs a brisé la vitre d'une boutique proche, selon la même source.

L'attaque est intervenue alors que de nombreux cadres du parti se trouvaient dans le bâtiment, avant le débat télévisé qui devait opposer dans la soirée les candidats à la direction du Pasok, en pleine procédure d'élections primaires.

Au pouvoir pendant des décennies en Grèce, ce parti est désormais la troisième force parlementaire grecque, après avoir été laminé après le déclenchement de la crise de la dette en 2010

Son siège, situé dans le quartier contestataire d'Exarchia a déja été visé par le passé par des tirs, et est régulièrement la cible d'attaques au cocktail molotov.


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