Selon Sami Aldeeb, le livre saint des musulmans comprend quelques 2000 inexactitudes relatives à la langue arabe. Il les relève dans une page Facebook très fréquentée.
Comme il est infalsifiable, est-ce lui-même qui est faux ? Produisant, alors, des générations de "paumés"...
Difficile d’imaginer plus ferré sur le Coran que Sami Aldeeb. Il en possède des dizaines de versions en différentes langues. Il l’a traduit lui aussi en plusieurs langues, notamment en français, en plaçant les sourates (chapitres) par ordre chronologique, alors que le Coran standard les classe par ordre de grandeur, des plus longues aux plus courtes, à quelques exceptions près. Sami Aldeeb a aussi réalisé une édition arabe en respectant la chronologie établie par Al-Azhar.
On imagine notre spécialiste un lorgnon sur le nez, plongé à journée faite dans un clair-obscur favorable à cette étude austère. Eh bien non, il adore plaisanter, caresse son chat avec amour, jouit des fleurs de son jardin, taille ses haies. Mais il poursuit son ouvrage avec une persévérance digne de son sujet. Le plus stupéfiant, c’est que cette ascèse n’est pas due à un amour immodéré du Coran, mais au contraire à la conviction que ce texte est des plus dangereux pour l’humanité . Ainsi, son défi d’aujourd’hui consiste à en relever les erreurs linguistiques et stylistiques, afin de lui enlever son aura de sacralité .
Sami Aldeeb a créé pour l’occasion une page Facebook en arabe. « Quelque 5000 membres sont inscrits. Je publie chaque jour deux erreurs et après chaque dizaine un texte commenté dans un forum arabe. » Parmi les « adhérents » : des professeurs d’université, des imams, des étudiants, des chrétiens, de simples croyants ou athées… qui font beaucoup de commentaires.
Des grammairiens ont corrigé l’orthographe défectueuse du Coran et créé une version moderne correcte, mais ce n’est pas le Coran de référence . On peut ainsi relever trois étapes majeures dans l’écriture du "livre saint" :
La version squelettique originelle ne contient pas les points et les accents sur ou sous les lettres. Sans ces accents et ces points, un mot peut être lu de diverses manières avec des sens totalement différents.
La version officielle, dont la plus importante fut fixée au Caire en 1923 . Des points et des accents ont été ajoutés afin d’éviter une lecture erronée. Il est interdit de la modifier . Malgré cela, certains passages restent d’accès difficile. Cette version est appelée Coran du Calife Othmane (qui aurait donné l’ordre de la compiler), mais il n’existe aucun manuscrit d’origine. "Pour la petite histoire, le Calife Othmane a été assassiné par les plus proches compagnons de Mahomet, dont une de ses femmes, Aïcha. Ils l’accusaient entre autre d’avoir falsifié le Coran, et il a été enterré dans le cimetière des juifs à Médine."
Une version avec l’orthographe usuelle utilisée dans les écrits arabes depuis un millier d’années. Cette version du Coran ne se trouve que sur internet, et c’est la seule dont le texte peut faire l’objet de recherches par les moteurs de recherche ou dans Word.
Dans sa version arabe du Coran, Sami Aldeeb a placé en regard, sur la même page, ces trois versions. « Un technicien musulman a créé pour moi des polices qui permettent de reproduire la version originale, sans accents et sans points, comme on la trouve dans les anciens manuscrits du Coran. C’est unique au monde ! »
Ce jour-là, la taille de la haie a passé avant l’autopsie du Coran.
Aucune des versions ne comporte de ponctuation moderne (points, virgules, etc.), mais de minuscules signes, à peine visibles, au-dessus de certains mots. On en compte une dizaine. Que signifient-ils ? « Obligation de s’arrêter (dans la lecture), interdiction de s’arrêter, il est préférable de ne pas s’arrêter, on peut s’arrêter ou non, une lettre a été ajoutée, mais elle ne doit pas être prononcée, etc. Mais les théologiens ne sont pas d’accord entre eux sur l’emplacement de ces signes. » (1) Un même verset peut occuper une demi-page sans ponctuation, avec plusieurs phrases. Certains s’arrêtent abruptement et sont complétés dans un autre verset. Parfois aussi, un verset traite d’un sujet, le deuxième d’un autre et le troisième revient au premier.
D’après le spécialiste, « le Coran dont nous disposons aujourd’hui ne représente même pas un tiers de l’originalselon les auteurs musulmans classiques. Le reste s’est volatilisé . Il y a donc des versets tronqués . »
Fautes de grammaire, erreurs de style
Dans son édition arabe du Coran, Aldeeb relève deux catégories d’inexactitudes :
Les erreurs linguistiques (environ 300), non conformes à la grammaire arabe. Exemple : « Venez donc tous deux chez Pharaon, puis dites : Nous sommes l’envoyé du Seigneur du monde. » (26:16) Il faudrait écrire : « Venez donc tous deux chez Pharaon, puis dites : Nous sommes les envoyés du Seigneur du monde. »
Les erreurs stylistiques (environ 1700) : ordre erroné des mots, phrases lacunaires, absence de lien entre les phrases du même verset ou entre un verset et le suivant, utilisation de mots inappropriés, etc. Exemple de faute stylistique : « Il a ressenti une crainte en lui-même Moïse » (20:67) au lieu de « Moïse a ressenti une crainte en lui-même ».
Pourquoi les théologiens n’ont-ils pas corrigé ces erreurs ? « Parce que le Coran est un texte sacré, parfait, dont rien ne peut être changé . Si vous dites qu’il y a une erreur, cela signifie que Dieu ne sait pas l’arabe , et donc que le livre ne provient pas de Dieu. Par conséquent, il est impossible, par exemple, d’organiser une conférence ou un séminaire sur ce sujet dans une université musulmane. Le Coran dit : « Nous avons révélé le Coran et nous l’avons sauvegardé » et affirme qu’il a été révélé « en langue arabe manifeste », « sans tortuosité ». Mettre en doute la perfection de la langue du Coran, c’est toucher au socle du dogme. Pourtant, environ 20% des mots et expressions du Coran ne sont pas compréhensibles pour 99% des universitaires arabes musulmans. »
Une édition téléchargée 33.000 fois
Cette version, l’une des plus complètes existant, comprend de nombreuses indications en bas de page, par exemple les versets abrogeants/abrogés.(2) « Pour certains spécialistes, 9 versets sont abrogés, pour d’autres 350. J’indique aussi les sources de ce qui a été emprunté à la Bible. Le Coran est le plus grand plagiat de l’histoire . Il est écrit à partir de sources juives et chrétiennes (Ancien et Nouveau Testament), de légendes et d’écrits apocryphes. »
S’ajoutent encore ce qu’on appelle « les causes de la Révélation ». Le Coran répond à des questions qui ne sont pas posées et omet souvent de donner des détails pourtant nécessaires. Par exemple, les versets 1-5 et 36-40 (sourate 33) interdisent l’adoption sans trop d’explications. Et ils indiquent le prénom du fils adoptif de Mahomet , mais pas le prénom de sa femme, que Mahomet a épousée après répudiation. « Pour ces ‹causes de la révélation›, des ouvrages classiques spécialisés exposent dans quelles circonstances ces versets auraient été révélés. Remarquez que les versets qui séparent ces deux passages sur l’interdiction d’adopter – du n° 6 au n° 35 –n’ont aucune relation avec le thème. C’est un exemple du désordre coranique . »
Accessible gratuitement sur Internet, sa version arabe a déjà été téléchargée 33.000 fois.
(1) Vous pouvez les voir agrandis ici : http://www.alukah.net/sharia/0/47675/ . Ils sont entre parenthèses.
(2) Un verset est dit abrogé lorsqu’une révélation ultérieure, dite abrogeante, le modifie ou l’invalide. Ces deux types de versets figurent généralement dans le Coran sans mention particulière. Il faut en principe consulter des ouvrages spécialisés pour les connaître.
P.S. Sami Aldeeb est aussi responsable du blog « Savoir ou se faire avoir » qu’il anime avec une petite équipe. Il reprend des articles concernant principalement l’islam. Les informations proviennent de nombreuses sources, en français, anglais, parfois allemand. A découvrir !