David MOTADEL
Au plus fort de la Seconde Guerre mondiale, après les premiers revers militaires subis en Union soviétique et l’enlisement dans des territoires abritant de nombreux musulmans – l’Afrique du Nord, le Caucase, les Balkans et la Crimée –, les dirigeants nazis ont cédé à une sorte d’urgence stratégique. Ainsi ont-ils mis de côté certains de leurs préjugés racistes et tenté d’instrumentaliser l’«islam» – religion que Hitler et Himmler, notamment, admiraient car ils la jugeaient «autoritaire», «fanatique» et «conquérante» – pour en faire une force politique ralliée à leur cause.
Les musulmans sont donc devenus la cible d’une propagande acharnée et sophistiquée, quoique totalement ignorante des cultures et contextes régionaux. Mais en postulant l’unité du monde musulman, en manipulant les textes sacrés ou en tentant de faire passer Hitler pour une figure centrale de l’eschatologie islamique, la machine de guerre nazie a fabriqué de toutes pièces un islam imaginaire...
Fondé sur des sources inédites issues de quatorze pays, ce livre démonte avec précision la thèse d’une proximité idéologique entre nazis et musulmans à l’égard des juifs. Si des dizaines de milliers de soldats musulmans se sont effectivement enrôlés dans la Wehrmacht et la SS, ils l’ont presque toujours fait pour échapper à une misère plus grande encore, aux menaces de la violence nazie ou pour se venger de leurs anciens oppresseurs.
David Motadel est professeur d’histoire à la LES (London School of Economics and Political Science). Il est l’auteur de Islam and Nazi Germany’s War (Harvard University Presse, 2014), récompensé par le Fraenkel Prize et a dirigéIslam and the European Empires (Oxford University Press, 2014, Paperback, 2016. En 2018, il a reçu le prix Philip-Leverhulme Prize pour l’histoire. Il est cette année (jusqu’en juin 2019) professeur invité à Sciences Po-Paris pour poursuivre ses recherches.
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