jeudi 9 novembre 2017

Islamisme et politique 08.11.2017

L'affaire Ramadan, révélatrice du «nouvel» antisémitisme (31.10.2017)
Par Barbara Lefebvre
Publié le 31/10/2017 à 15h46
FIGAROVOX/ANALYSE - Les accusations de viol visant Tariq Ramadan ont déclenché un déferlement de réactions antisémites de ses fans, notamment contre ses victimes présumées. Le décryptage de Barbara Lefebvre.

Barbara Lefebvre est enseignante. Elle a contribué à l'ouvrage collectif Autopsie d'un déni d'antisémitisme. Autour du procès fait à Georges Bensoussan, L'Artilleur, 2017.

A ce stade de la procédure judiciaire, il est essentiel de respecter la présomption d'innocence. Tariq Ramadan est accusé par plusieurs femmes d'actes délictueux voire criminels, puisque le viol est un crime relevant d'une cour d'assises. Les faits sont graves et méritent mieux que des tweets délateurs comme on en a connus en France dans le sillage de l'affaire Weinstein. En l'occurrence quand une plainte est déposée par une victime, c'est qu'un conseil lui a assuré que les éléments avancés peuvent suffire à solliciter la justice pour faire valoir ses droits et demander réparation. Les pièces sont entre les mains des juges, ils se prononceront et n'ont pas besoin de péroraisons médiatiques.
En revanche, il y a dans cette affaire un arrière-plan qui mérite d'être commenté avec plus de vigueur. Seul le Monde, à cette heure, en a fait état de façon circonstanciée. C'est le déferlement antisémite des fans de Tariq Ramadan contre les victimes, en particulier Henda Ayari, la première à s'être courageusement exposée. Les réseaux sociaux libèrent la parole. En effet. En lisant les tweets et les posts Facebook des défenseurs du gourou frériste suisse, j'ai pensé à la Libre Parole, le principal quotidien antisémite français entre 1892 et 1924. Je n'aime pourtant pas comparer l'antisémitisme musulman avec celui de l'Europe des années 1890-1930. Il a des singularités qui puisent dans la théologie, l'histoire politique et culturelle pluriséculaire du monde arabo-musulman. Il mérite qu'on le regarde en face, qu'on l'étudie pour ce qu'il est au lieu de le réduire à un avatar de l'antisémitisme d'avant guerre.

La judéophobie est un élément de l'inconscient collectif musulman, un marqueur culturel identitaire, comme elle le fut dans la France du XIXè et du début du XXè sicèle. Mais l'humanité est bien faite: il existe des musulmans pratiquants ou non, croyants ou non, qui ont su déraciner de leurs cœurs et leurs esprits cet antisémitisme primaire qui gangrène les sociétés musulmanes. Les hommes sont pourvus d'un cerveau qui peut se déprendre de lui-même, par l'exercice de la raison, par l'effort de penser qui arrache les ferments d'une haine transmise par l'éducation familiale, institutionnelle ou populaire. La famille Merah en est un exemple: élevé par des parents antisémites obsessionnels, Abdelghani a su s'extraire de ce magma de haine où se complaisaient Abdelkader, Souad et Mohamed. On peut donc parler d'antisémitisme musulman sans viser tous les musulmans, comme on parlait de l'antijudaïsme chrétien sans oublier les chrétiens amis des juifs. L'antisémitisme est un phénomène qui a une réalité historique, sociale, culturelle. Un individu croit qu'en accusant les juifs de tous les maux de la terre ou de tous ses maux à lui, il trouve la réponse à ses problèmes, ses doutes, ses interrogations. Mais il n'a pas choisi le sujet juif au hasard, il a baigné dans une culture de préjugés qui a mis les juifs à cette place d'accusés éternels. Il faut être aveugle et sourd pour ne pas voir combien l'animosité antijuive irrigue les sociétés arabes contemporaines. Qu'on y parle alternativement «des juifs» ou «des sionistes», cela ne fait aucune différence. Mais la bien-pensance qui règne en France oblige à dire que seuls les islamistes sont antisémites, que l'antisionisme n'a rien à voir avec l'antisémitisme, que c'est l'antisémitisme occidental qui a été importé dans le monde arabe, et même depuis peu que les actes antisémites sont le fait de psychotiques. Négation de l'histoire. Aveuglement fatal.
Pendant ce temps les tweets se suivent, suintants de haine et de violence crue : ceux de Medhi Meklat hier, ceux des adeptes de Tariq Ramadan aujourd'hui.
De même que les historiens travaillent sur les commentaires des souscripteurs du Monument Henry, ils pourront un jour analyser les commentaires antisémites violents des défenseurs de Tariq Ramadan pour comprendre ce que fut l'imprégnation antisémite au sein d'une part de l'islam contemporain. Petit rappel historique d'abord: le Monument Henry concerne une levée de fonds organisée par la Libre Parole en décembre 1898 pour payer les frais de procédure de la veuve du lieutenant-colonel Henry, celui qui avait fabriqué les preuves pour accuser Dreyfus. Les 25 000 souscripteurs du Monument Henry étaient plus fiers que nos actuels tweeters intempestifs, à l'orthographe souvent désespérante: eux signaient de leur nom et pas d'un pseudonyme. Des historiens en ont même établi une sociologie, qui est finalement celle de l'antisémitisme français de l'époque. Un grand nombre d'entre eux ajoutèrent à leurs dons (131 000 francs au total!) des commentaires personnels qui révélaient l'étendue de l'antisémitisme populaire, son enracinement culturel.
De la même façon, avec des contours qui lui sont singuliers, l'antisémitisme est un point de convergence chez de nombreux musulmans qui vivent dans notre pays et cherchent à exprimer leurs rancœurs, leurs frustrations permanentes alimentées à la source d'une victimisation indéfiniment réactivée. Enquêtes et faits «divers» n'ont cessé de le démontrer. Cela grince aux oreilles de certains mais il faut le répéter, ce sont des faits, pas des élucubrations: en France depuis 2003 avec l'assassinat de Sébastien Sellam aux cris de «j'ai tué un juif, j'irai au paradis» jusqu'à Sarah Halimi en avril dernier battue à mort et défenestrée aux cris d'Allah akbar, les Français juifs qui ont été tués l'ont été uniquement parce qu'ils étaient juifs. Tous eurent face à eux des meurtriers se réclamant à des degrés divers de l'islam, certains invoquant la Palestine, d'autres Allah. Ce point aveugle de l'antisémitisme arabo-musulman, si on en dénonce l'imprégnation culturelle, peut vous valoir un procès dans la France d'aujourd'hui. Pendant ce temps les tweets se suivent, suintants de haine et de violence crue: ceux de Medhi Meklat hier, ceux des adeptes de Tariq Ramadan aujourd'hui. L'antisémitisme est un baromètre social. Beaucoup de Français non juifs ne sont apparemment toujours pas assez connaisseurs de l'histoire pour le mesurer.
Henda Ayari est ainsi à plusieurs reprises traitée de « pute » payée par « des juifs / sionistes » pour salir l'honneur de Tariq Ramadan.
Nous en sommes là. Il faudrait prendre le temps de citer des commentaires de souscripteurs du monument Henry pour les mettre en regard des ignominies qu'on lit au sujet des accusatrices de Ramadan. Le fond de haine est semblable, les identifiants sémantiques ont changé. D'une part ils se sont appauvris car le niveau argumentatif et lexical des auteurs de tweets est d'un niveau consternant, d'autre part l'obsession antisémite est désormais incarnée par le vocable antisioniste. Le complot sioniste imprègne chacun de ces tweets, cette obsession prend de telles proportions qu'on pourrait parler de pathologie collective. La croyance en un complot juif chez beaucoup d'esprits du monde musulman n'a pas attendu les écrits antijuifs de Sayid Qutb ou que Les Protocoles des Sages de Sion soient un best-seller dans le monde arabe. Le Coran médinois et les hadiths n'ont de cesse de présenter les juifs comme des menteurs et des comploteurs visant à atteindre spirituellement voire physiquement le prophète de l'islam. L'extermination de la tribu juive de l'oasis de Khaybar en 628, premier acte de guerre de Mohamed et ses troupes, est la réponse au prétendu complot juif... Le complotisme est complété dans les tweets concernés par les clichés rebattus sur les mœurs dissolues des hommes juifs lubriques, et de femmes juives à la cuisse légère. Henda Ayari est ainsi à plusieurs reprises traitée de «pute» payée par «des juifs / sionistes» pour salir l'honneur de Tariq Ramadan.
Ce volet de l'affaire Ramadan mériterait à tout le moins une réaction de l'intéressé. Pour l'instant, il se dit victime «d'une campagne de calomnie qui fédère assez limpidement [ses] ennemis de toujours» (post Facebook du 28 octobre) et adresse ses remerciements à ceux qui lui ont manifesté «soutien et affection». Peut-être n'a-t-il pas encore pris le temps de lire en détail tous les messages de «soutien» pour en mesurer la teneur? Peut-être n'a-t-il rien à dire au sujet de la dimension argumentative antijuive que ses soutiens ont choisie pour le défendre? Qui ne dit mot, consent, monsieur Ramadan.

Images de Daech sur Twitter : l'Assemblée lève l'immunité de Marine Le Pen (08.11.2017)

Par Pierre Lepelletier
Mis à jour le 08/11/2017 à 16h19 | Publié le 08/11/2017 à 16h04
LE SCAN POLITIQUE - La présidente du FN va être convoquée par la justice après avoir posté des photos d'exactions sur son compte Twitter en 2015.
Les photos de la décapitation du journaliste James Foley par l'Etat islamique postées sur le compte Twitter de Marine Le Pen en décembre 2015 avaient choqué. La présidente du FN devra finalement s'en expliquer devant la justice. Après une demande judiciaire, le bureau de l'Assemblée nationale a accepté mercredi de lever l'immunité parlementaire de Marine Le Pen. La plus haute instance collégiale de l'Assemblée composée de 22 députés ne s'est pas prononcée sur le fond du dossier mais davantage sur «le caractère sérieux, loyal et sincère» de la demande de la justice.
«Une décision de basse politique politicienne»
De son côté, Marine Le Pen a rapidement réagi dénonçant à l'AFP «une décision de basse politique politicienne.» La présidente frontiste a également fait part de son indignation sur Twitter: «Mieux vaut être un djihadiste qui rentre de Syrie qu'une députée qui dénonce les abjections de l'État islamique: on prend moins de risques judiciaires...», a-t-elle lancé.
Fin septembre, l'immunité parlementaire de Gilbert Collard, député proche du FN, avait été levée pour les mêmes raisons. La réaction de l'élu du Gard ne s'était pas faite dans la demi-mesure: le proche de Marine Le Pen avait annoncé déposer un recours au tribunal administratif pour faire annuler la décision, tout en déposant plainte contre l'Assemblée nationale.
Une attitude punie par le Code pénal
En décembre 2015, les deux élus s'étaient déjà justifiés, expliquant avoir posté ces photos pour protester contre «un parallèle ignoble» entre l'État islamique et le Front national, mis en avant par Gilles Kepel sur BFM TV. Après la vague d'indignation qui s'en était suivie, Marine Le Pen avait finalement préféré supprimer les photos de son compte Twitter.
Désormais attendus par la justice, Marine Le Pen et Gilbert Collard risquent gros. En France, le Code pénal punit en effet de trois ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende le fait «de diffuser (...) un message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine» lorsque ce message est «susceptible d'être vu ou perçu par un mineur».
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Samia Maktouf : «Notre République fait du mal aux victimes du terrorisme» (08.11.2017)

Par Christophe Cornevin
Mis à jour le 08/11/2017 à 18h44 | Publié le 08/11/2017 à 18h24
INTERVIEW - Avocate aux barreaux de Paris et de Tunis, Me Samia Maktouf défend plusieurs victimes des attentats commis en France depuis 2012.
L'avocate vient d'assister au procès d'Abdelkader Merah, dans lequel elle était partie civile. Elle publie Je défendrai la vie autant que vous prêchez la mort (Michel Lafon, novembre 2017), qui raconte son «combat» auprès des victimes.
LE FIGARO. - Alors que la France va commémorer les attentats du 13 novembre 2015, vous êtes critique sur la prise en charge des familles, en particulier par le fonds de garantie des victimes du terrorisme.
Samia MAKTOUF. - Au lendemain des attentats défilent dans mon cabinet les familles meurtries, «avec leur terrible cortège», comme aurait dit Malraux. Elles ont un immense besoin d'humanité, de cette humanité qui a tant manqué à ceux qui ont tué leurs enfants. Or, face à cela, le fonds de garantie est hélas dépassé par le nombre d'attentats qui se succèdent et ne se ressemblent pas. Chaque victime est unique et la réponse ne peut être apportée qu'au cas par cas. Les familles sont laissées en jachère, indemnisées au compte-gouttes. Au lendemain des attentats, le discours se voulait rassurant: des avances seraient versées, dans les trois jours… Mais une fois que le politique s'est tu, les victimes se sont retrouvées seules. Obtenir des indemnisations est devenu le parcours du combattant. Notre République fait du mal aux victimes du terrorisme.
«Faut-il qu'une personne soit tuée pour être considérée comme victime ? La refonte des lois est impérieuse car nous sommes passés des attentats ciblés à des attentats massifs et aveugles»
Me Samia Maktouf
À vos yeux, «le pire des supplices est de voir la réalité de cette souffrance remise en question» et vous parlez même d'un «climat de suspicion». N'est-ce pas un peu exagéré?
Pas du tout! Prenons un de mes clients: Omar, vigile au Stade de France, qui a sauvé des dizaines de vies en empêchant un des kamikazes d'entrer dans l'enceinte. Le terroriste s'est fait exploser devant lui. Lorsqu'il se présente au contrôle du fonds de garantie, Omar est encore hospitalisé en raison de ce que les médecins nomment le «syndrome de Verdun». Cela veut dire qu'il vit encore aujourd'hui dans l'instant de cet attentat qui lui a fait perdre connaissance. Pendant l'entretien, on lui demande de reprendre le travail sous prétexte que «cela pourrait lui faire du bien» ou encore d'expliquer les raisons de son état, ce qu'il est incapable de faire. Un médecin lui demande même s'il ne fait pas du «cinéma»! À ce moment, Omar, tentant de prouver sa bonne foi, sort de sa poche une décoration remise par le ministre de l'Intérieur. On lui rétorque: «Vous n'êtes pas là pour étaler vos décorations.» Ce n'est pas manquer de respect? On piétine un homme alors que l'on devrait le traiter en sauveur.
Vous dites que les lois sont encore inadaptées et demandez la mise en place d'un inédit préjudice «d'attente» pour les familles…
Cette proposition apparaît en effet dans un Livre blanc rédigé à l'initiative de l'ordre des avocats de Paris et à laquelle j'ai eu l'honneur de participer. Cette idée consiste à prendre en compte le drame de familles qui attendent pendant quatre jours, comme après le 13 novembre, avant de savoir si leur enfant est mort ou en train d'être soigné. Ce préjudice d'attente est évident car, aux yeux des parents, ces heures durent une éternité. Il y a aussi le préjudice «d'inquiétude» directement lié au traumatisme de l'attentat qui fait que tous les jours vous n'arrivez plus à vous lever, vous ne pensez qu'à cela sans pouvoir vivre comme n'importe quel être dans la société. Il a fallu attendre 2017 pour que ces textes soient enfin votés, même s'ils ne sont pas entrés en vigueur. Des familles endeuillées sont anéanties. C'est intolérable. Faut-il qu'une personne soit tuée pour être considérée comme victime? La refonte des lois est impérieuse car nous sommes passés des attentats ciblés à des attentats massifs et aveugles.
«Si l'exécution des djihadistes n'est plus taboue, le problème est qu'ils ont enfanté des citoyens français de père et de mère»
Samia Maktouf
Des grands-parents, que vous défendez pour certains, ont écrit à Emmanuel Macron pour demander à accueillir leurs petits-enfants revenant de Syrie. Ces derniers y seraient-ils mieux qu'en foyer spécialisé?
Si l'exécution des djihadistes n'est plus taboue, le problème est qu'ils ont enfanté des citoyens français de père et de mère. On ne peut pas se dégager de notre responsabilité au risque de les laisser grandir dans la terreur et d'en faire des bombes à retardement. Âgés de 2 ou 3 ans, ils sont encore récupérables et peuvent être confiés à leurs grands-parents, dans la douceur familiale, avec l'appui de pédopsychiatres et de travailleurs sociaux. C'est en les aidant que l'on va sauver au mieux notre société et notre avenir. Pas en poursuivant des politiques dites de «déradicalisation» coûteuses et conduisant à l'impasse. Penser qu'ouvrir treize centres ayant chacun coûté 5 millions d'euros au contribuable allait régler le problème, c'est ne rien comprendre aux racines du mal.
Laïque, vous êtes aussi de religion musulmane. Ce qui vous a aussi valu des menaces de mort…
Oui, ces menaces remontent à un procès tenu à Montpellier lors duquel je défendais Latifa Ibn Ziaten, la maman d'un des soldats assassinés par Mohamed Merah et elle-même menacée de mort. Une femme m'a demandé d'arrêter de plaider parce que j'étais «apostat». Je sais que les islamistes ne reculent devant rien mais je ne demanderai jamais de protection. Pour les combattre, je préfère leur faire face. C'est-à-dire continuer à vivre comme tous les jours, distribuer des livres pour faire sortir des ténèbres certaines proies faciles. Voilà où se trouve l'antidote.

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Rédacteur en chef adjoint, spécialiste sécurité et renseignement
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Luc Ferry : «Qu'est ce qu'être “objectif ”?» (08.11.2017)
Par Luc Ferry
Publié le 08/11/2017 à 16h54
CHRONIQUE - Ce qu'on doit considérer chez son interlocuteur, ce n'est pas ce qui l'anime plus ou moins consciemment, c'est l'idée elle-même, pas les méandres forcément obscurs par lesquels il en est arrivé à la formuler, mais ce qu'il dit.
La question concerne bien des métiers, à commencer par ceux des journalistes et des magistrats. Deux conceptions de l'objectivité se sont affrontées dans la pensée moderne. La première est développée dans les années 30 par la «Théorie critique», une doctrine philosophique fondée par deux penseurs allemands, Horkheimer et Adorno, des héritiers de Marx. Elle tient que l'objectivité consiste à expliciter les motifs qui sous-tendent inconsciemment ou non nos opinions et nos jugements de valeur ; la seconde est exposée dans la philosophie de Karl Popper, mais aussi dans l'éthique de la discussion de Jürgen Habermas, auquel Emmanuel Macron s'est récemment référé: au contraire de la première, elle place l'intersubjectivité, le dialogue et, par conséquent, la prise en compte du point de vue d'autrui au cœur de la recherche de l'objectivité.
Si on applique l'idée aux journalistes, on dira que quoi qu'ils en disent parfois, ils ont forcément leurs partis pris, leurs options politiques, l'essentiel étant dans cette première perspective de les tirer au clair et de les reconnaître publiquement.
Reprenons. C'est d'abord à Horkheimer qu'il revient d'avoir développé la première conception de l'objectivité dans un petit texte intitulé Théorie traditionnelle et Théorie critique. La Théorie critique, pour Horkheimer, trouve son apogée dans la psychanalyse et le marxisme. Comme dans ces doctrines, elle tente de parvenir à l'objectivité en dévoilant l'inconscient sous-jacent à ces symptômes que sont à ses yeux les opinions communes. Par opposition, la théorie traditionnelle est celle qui se croit naïvement pure, désintéressée, complètement autonome et impartiale par rapport aux intérêts économiques, car radicalement coupée de la société. La Théorie critique tente alors de lui faire prendre conscience du fait qu'en réalité elle est secrètement animée, voire inconsciemment téléguidée par des intérêts économiques et sociaux qui la poussent dans telle ou telle direction sans qu'elle s'en aperçoive. Si on applique l'idée aux journalistes, on dira que quoi qu'ils en disent parfois, ils ont forcément leurs partis pris, leurs options politiques, l'essentiel étant dans cette première perspective de les tirer au clair et de les reconnaître publiquement.
Pour Popper, cette vision de l'objectivité est à la fois inquisitoriale et absurde. En effet, si on la pousse jusqu'au bout, on tombe dans le scepticisme car, par définition même, jamais vous ne pourrez être absolument certain d'avoir tiré au clair tous les déterminants, tous les intérêts potentiellement cachés derrière une idée quelle qu'elle soit. On pourra toujours faire l'hypothèse qu'il y a encore des motivations inconscientes non mises au jour, à côté desquelles on est passé. Dans ces conditions, l'objectivité véritable ne consiste plus à essayer de tirer au clair l'inconscient social du commentateur, comme dans la Théorie critique, mais à poser clairement la question de savoir si le point de vue qu'on défend s'expose à la discussion publique, s'il peut être contesté, s'il offre vraiment les meilleurs arguments, etc. En quoi, dans la conception poppérienne de l'objectivité, on ne s'intéressera plus à la fameuse question soixante-huitarde, «d'où parles-tu?», on ne s'intéressera pas à l'origine sociale, à la position économique, historique, politique ou autre de la personne qui émet une opinion, mais à l'opinion en tant que telle. Ce qu'on doit considérer chez son interlocuteur, ce n'est pas ce qui l'anime plus ou moins consciemment, c'est l'idée elle-même, pas les méandres forcément obscurs par lesquels il en est arrivé à la formuler, mais ce qu'il dit. L'important, c'est la discussion qui va s'engager autour de son opinion et ce sont les tests qu'on inventera pour la falsifier, pour essayer de la réfuter, qui comptent désormais.
On peut détruire un raisonnement, une opinion, la réfuter sans détruire le bonhomme qui est derrière.
C'est en ce sens qu'on a affaire ici à une «objectivité sans sujet», ce qui signifie aussi quelque chose d'essentiel sur le plan moral, à savoir qu'on peut critiquer les idées sans critiquer les personnes qui les portent: on n'est pas obligé de se haïr, on n'est pas obligé de se détester parce qu'on est en désaccord, au contraire, on peut chercher ensemble à s'approcher autant que possible de la vérité. La discussion rationnelle, ou même seulement raisonnable, n'est pas la poursuite de la guerre par d'autres moyens, ni la continuation de la lutte des classes, voilà ce que veut dire Popper: on peut détruire un raisonnement, une opinion, la réfuter sans détruire le bonhomme qui est derrière, ce qui est in fine infiniment plus démocratique que la conception marxiste qui cherche toujours à disqualifier les idées des autres en les réduisant à de simples reflets symptomatiques des intérêts économiques inavouables et des tensions sociales qu'ils dissimulent.

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Éric Zemmour : «Dernière ligne de défense de l'homme avant le transhumanisme» (08.11.2017)
Par Eric Zemmour
Mis à jour le 08/11/2017 à 17h46 | Publié le 08/11/2017 à 15h58
CHRONIQUE - Les progrès technologiques et scientifiques et médicaux bouleversent notre conception de l'homme. Dans son livre Questions de conscience, Jean-François Mattei livre un regard de médecin et d'humaniste.

Questions de conscience. Jean-François Mattei. LLL. 270 p. 20 €
On l'avait laissé en polo noir dans son jardin un été caniculaire de 2003. Cette image désinvolte de ministre en vacances avait ruiné sa carrière politique, alors que la chaleur provoquait une hécatombe dans les maisons de retraite. Il eut beau s'expliquer, se justifier, rien n'y fit: la machine médiatique le broya. En lisant son dernier livre, près de quinze ans après, on se rend compte à quel point cette polémique, largement artificielle, fut un cruel contre-sens. Jean-François Mattei est à l'inverse de ce que ses adversaires politiques prétendirent alors. Pas un comptable cynique, mais un humaniste ; pas un technocrate sans affect, mais un chrétien empathique.
Mattei est avant tout un médecin. Un médecin à l'ancienne, plus intéressé par les hommes que par les machines. Un médecin que ses collègues, plus jeunes, trouveront peut-être désuet, ringard. Il incarne une certaine conception de la médecine, très française, qui repose sur la gratuité et l'égalité. Cette conception qu'il a mise en œuvre dans les premières lois sur les bioéthiques, dont il fut le rapporteur à l'Assemblée nationale, dès 1994. Une conception qui repose sur un humanisme chrétien pour qui «le corps est bien la personne qui l'habite» ; pour qui le corps n'est pas une marchandise ; pour qui tous les hommes sont égaux, car créatures divines, même si elles rejettent Dieu.
Les mythes les plus célèbres de l'humanité prennent consistance. Le Golem de la tradition talmudique est devenu «l'homme augmenté». Le rêve prométhéen d'immortalité s'appelle «transhumanisme»
Dans les discours, en tout cas hexagonaux, cette conception fait consensus. Dans la réalité, cette robe apparemment sans coutures de l'humanisme bien de chez nous est déchirée de partout. Déchirée par les assauts communs du progrès et de la liberté, du marché et des minorités, de l'argent et des lobbys, des frontières ouvertes et de l'individu roi, des juges et des marchands, des libéraux et des libertaires. Bref, des maîtres du monde depuis plusieurs décennies.
De la naissance à la mort, tout est cul par-dessus tête. Tout est dévoyé, voire nié. Un enfant ne nait plus dans les choux, mais sur catalogue. On meurt quand on l'a décidé. «Dans la dignité», proclame-t-on, comme si les autres, ceux qui refusaient ce «suicide assisté» n'étaient pas aussi dignes. Et d'ailleurs, bientôt, on ne mourra plus. Enfin, certains surhommes seront éternels, tandis que le reste, sous-humanité, trop pauvre, disparaîtra. «Les tyrannosaures ont disparu…», dit Hans Moravec, l'un des pionniers de l'intelligence artificielle.
Son questionnement éthique sur la dignité de la personne paraît bien faible face à la puissance des lobbys et du marché, des laboratoires pharmaceutiques et des patrons des Gafam qui, tels les nouveaux surhommes de notre temps, rêvent d'immortalité
Les mythes les plus célèbres de l'humanité prennent consistance. Le Golem de la tradition talmudique est devenu «l'homme augmenté». Le rêve prométhéen d'immortalité s'appelle «transhumanisme», et il est porté par le développement conjoint des nanotechnologies, des biotechnologies, de l'informatique et des sciences cognitives. L'eugénisme, c'est-à-dire la sélection des meilleurs, démonétisée par les expériences nazies, revient par le biais de la médecine prédictive. On ne sélectionne pas, on trie. On ne tue pas, on empêche de naître.
On interdit la gestation pour autrui, car le corps de la femme n'est pas une marchandise ; mais on reconnaît les enfants nés à l'étranger par cette méthode. On prétend refuser l'assistance médicale à la procréation pour tous les couples qui ne seraient pas stériles ; mais on marie les couples homosexuels au nom de l'égalité. On dénonce avec véhémence le droit à l'enfant, mais on passe commande d'enfants en Inde ou aux États-Unis. On a plein la bouche de «la dignité de la femme», mais on n'hésite pas à payer une pauvre Indienne pour qu'elle porte «notre» enfant.
Tartuffe règne en maître. Et notre humaniste à l'ancienne paraît bien désarmé. Il avoue lui-même son impuissance. Ainsi, il avait cru habile et utile de distinguer, dans sa loi de bioéthique, entre décision individuelle (libre) et stratégie collective (contrainte). Mais ce distinguo fut balayé: 95 % des couples choisirent d'interrompre la grossesse lorsqu'on découvrait que le fœtus était atteint de la trisomie 21…
Son questionnement éthique sur la dignité de la personne paraît bien faible face à la puissance des lobbys et du marché, des laboratoires pharmaceutiques, qui comptent leurs profits, et des patrons des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazone, Microsoft) qui, tels les nouveaux surhommes de notre temps, rêvent d'immortalité.
Mattei nous prie de nous interroger sur la nécessité de retrouver le sens de l'indisponible alors que des décennies de publicité et de consumérisme nous ont transformés en consommateurs capricieux et impérieux
La tradition humaniste permet à notre auteur d'accumuler des doutes, des réflexions, des citations. Il nous prie de nous interroger sur la nécessité de retrouver le sens de l'indisponible alors que des décennies de publicité et de consumérisme nous ont transformés en consommateurs capricieux et impérieux. Il se rassure comme il peut. Devant les limites que rencontre l'usage de l'ADN, il redécouvre la vieille intuition de Pascal qui avait déjà noté que «ce qu'on appelle nature est une culture, comme la culture est une seconde nature». Devant les prouesses des ordinateurs, qui battent les plus grands champions d'échecs, il songe qu'un ordinateur ne pourra jamais avoir de l'humour, manier l'ironie, qu'il n'est capable que d'accumuler des données quantitatives. Qu'il ne pourra jamais nous remplacer. Qu'un «robot ne sera jamais Antigone.»
Il s'accroche aux interrogations d'une éthique salvatrice qui n'est ni la morale ni le droit. Il dénonce le transhumanisme comme «un totalitarisme de la technique», mais il espère secrètement que ce seront justement les limites de la technique qui rendront impossibles les fantasmes de «téléchargement cérébral», qui permettrait de s'émanciper de notre corps. Il cite Einstein - «La science sans religion est boiteuse. La religion sans science est aveugle» - comme un exorciste d'autrefois exhibait une croix pour chasser le diable. On est d'accord avec lui mais on a l'intuition désolante que tout ce qui doit arriver arrivera. Ou plutôt que tout ce qui peut arriver arrivera.
À le lire, on a l'impression de voir les cavaliers polonais charger en 1939 les chars allemands. C'est courageux, c'est beau, mais leur seule chance de ne pas être massacré est que les chars tombent en panne d'essence.

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Charles Jaigu : «Les populistes, ces amis du peuple…» (08.11.2017)

Par Charles Jaigu
Mis à jour le 08/11/2017 à 18h48 | Publié le 08/11/2017 à 18h47
CHRONIQUE - L'historien Pascal Ory s'attaque à la fascination pour « le peuple souverain », qui est le point de départ du populisme. Il compare Lénine et Trump, Mélenchon et Mussolini. Osé, et souvent juste.
Il arrive de Chartres avec son sac à dos et les cheveux en bataille. À bientôt 70 ans, Pascal Ory a toujours l'air d'un jeune professeur rennais. Cet élève de René Rémond a pourtant abondamment publié sur l'histoire des idées politiques, la culture, la bande dessinée et le cinéma. Cette fois-ci, il a décidé d'ajouter une pointe de provocation en publiant un essai d'historien qui secoue l'interprétation officielle du populisme, mariage selon lui de la carpe droitière et du lapin gauchiste, contrairement à l'idée qu'il y aurait des populismes de droite - en grand nombre - ou de gauche, moins répandus.
Ainsi la date du 8 novembre lui donne-t-elle le prétexte d'un rapprochement entre deux moments politiques que personne ne songerait à rapprocher: la victoire de Lénine lors de la révolution dite d'Octobre et l'élection de Donald Trump à la Maison-Blanche. Lénine prit le pouvoir un 26 octobre selon le calendrier julien en vigueur au temps des tsars - mais notre calendrier grégorien indiquait le 8 novembre. Quatre-vingt-dix-neuf ans plus tard, on apprenait l'élection surprise du candidat républicain aux États-Unis, un 8 novembre aussi. Cette rencontre calendaire est le prétexte d'une longue digression qui fait la substance du livre: les modérés (Kerenski, Hillary Clinton), en cette nuit du 8 novembre, ont à chaque fois été balayés par les démagogues, ces tribuns qui savent plaire au «peuple», et qui se réclament de lui avec véhémence. Kerenski «a pourtant renversé le tsar en février», mais Lénine, le putschiste rouge sang, n'en a fait qu'une bouchée, piétinant dans la foulée le résultat des premières élections pluralistes de Russie, voulues par Kerenski. Elles avaient désigné une Assemblée constituante qui refusait de se soumettre aux soviets. Ce n'est pas l'objet du livre, mais les passages à ce sujet rétablissent - tout comme le livre de Stéphane Courtois L'Invention du totalitarisme (Perrin) - quelques vérités oubliées à propos de celui qui fut un dictateur aussi peu digne d'avoir son nom vissé dans les rues de la République que son successeur Joseph Staline.
L'analogie entre Lénine et Trump est évidemment provocatrice. Le président américain est un populiste démocratiquement élu. Il n'est pas un dictateur. Pascal Ory considère en fait le populisme comme une force polymorphe, qui peut se couler dans une forme totalitaire (Lénine, Mussolini, Hitler) ou démocratique (Chavez au Venezuela, Erdogan en Turquie, Modi en Inde et tant d'autres). Elle est coextensive à l'invention de la démocratie moderne à partir de la Révolution française. Et elle se caractérise par le refus du compromis, de la réforme négociée, du travail parlementaire, et la stigmatisation incendiaire des élites. Que ne fait-on pas en ton nom, peuple souverain! On dénonce encore et encore - parfois à juste titre, c'est là que cela se complique - les élites qui te trahissent. Le peuple est bien, en effet, «la grande invention de la modernité», et tout devient possible «en son nom». Il en est ainsi depuis qu'au XVIIIe siècle on détruisit la légitimité du prince représentant de Dieu sur terre. Ce peuple souverain est donc revendiqué par tous, prenant tour à tour le visage avenant du paysan catholique et pieux ou de l'ouvrier exploité et rebelle. Et aujourd'hui, selon le décompte qu'en a fait Ory, seule l'Arabie saoudite ignore la référence obligatoire au peuple dans sa Constitution. «Même en Iran et en Corée du Nord, le peuple est désigné comme source de la légitimité.»
« L'intelligentsia, le plus souvent de gauche, a toujours du mal à reconnaître cette collusion de deux radicalités a priori antinomiques»
Pascal Ory
Il y a mille formes du recours au peuple dans les doctrines et les discours ; les modérés l'invoquent au nom de la démocratie libérale, les radicaux pour détruire ces régimes bourgeois installés dans le juste milieu. Mais le populisme a une énergie particulière qui lui garantit une audience. La formule de son succès combine l'exercice brutal de l'autorité avec un appel à la radicalité du changement. C'est pourquoi Ory estime que «le populisme est une idéologie de synthèse qui permet à la droite radicale de trouver le chemin des classes populaires en adoptant un style de gauche». La nation, le peuple et la révolution viennent de la gauche. L'ordre et le charisme du chef viennent de la droite. «À chaque fois, la droite populiste croît sur le terreau d'une gauche radicale qui a échoué.»
Pourtant, par commodité, on parle souvent de populisme de gauche ou de droite. Le populisme de gauche dénonce la globalisation, les élites mais pas les immigrés: voyez le Parti de gauche, en France, et surtout Syriza, en Grèce, ou Podemos, en Espagne. Le populisme de droite se concentre sur le rejet des immigrés: le FN, les Démocrates suédois, le Parti du peuple danois, les Vrais Finlandais, le Jobbik hongrois, le FPÖ autrichien, le PVV néerlandais, la Ligue du Nord en Italie et l'AFD en Allemagne. Ory vise en réalité les théoriciens récents d'un nouveau populisme de gauche (Chantal Mouffe, proche de Mélenchon). Il leur oppose que dans le populisme les extrêmes se touchent toujours. Et c'est le début de la catastrophe. «Avant de devenir fasciste, Mussolini a commencé comme Jean-Luc Mélenchon», résume Ory, qui conclut: «L'intelligentsia, le plus souvent de gauche, a toujours du mal à reconnaître cette collusion de deux radicalités a priori antinomiques», en citant au passage les blanquistes qui rejoignirent le général Boulanger, ou Hitler qui fusionna brillamment les mots «national» et «socialiste». La tentation populiste est propre à toutes les démocraties, sauf peut-être la britannique, qui est protégée par sa solide tradition libérale parlementaire.

Peuple souverain de Pascal Ory, Gallimard, 250 p., 21 euros. - Crédits photo : Gallimard
La morale de cette fable, car il y en a une, est que ces aventures populistes, dont les leaders charismatiques prennent le pouvoir par les armes ou les urnes, aboutissent immanquablement au désastre. Désastre convulsif des fascismes en 1945, et désastre au ralenti des communismes en 1989. Échec en tout cas à accomplir la promesse d'un «peuple souverain». Quand eurent lieu les attentats de 2015 à Paris, Ory écrivit dans Ce que dit Charlieque les stratèges du terrorisme depuis deux siècles n'ont jamais gagné leur pari. On ne connaît pas en effet d'exemples d'attentats qui aient mené à l'effondrement d'une société. Ces échecs à répétition n'ont jamais empêché de nouvelles générations de s'y essayer à nouveau.
Il en va de même pour les populismes. À la fin, ce sont les fragiles démocraties libérales qui gagnent. Qui aurait parié sur elles en 1939? Qui aurait imaginé leur triomphe à la fin du XXe siècle? Aujourd'hui, elles sont à nouveau sur la défensive. Le contre-cycle populiste est-il à nouveau en route? «L'histoire n'a rien d'un long fleuve tranquille, elle est tragique, et tout peut à nouveau recommencer», avance Pascal Ory. Expliquer que l'aventure populiste finit toujours mal ne changera rien si l'Histoire a décidé de bégayer.

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Grand reporter au service politique du Figaro
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Le Pakistan, partenaire déterminant de la Corée du Nord dans sa quête atomique (08.11.2017)
Par Emmanuel Derville
Mis à jour le 08/11/2017 à 20h01 | Publié le 08/11/2017 à 19h40
La dynastie Kim aurait bénéficié du savoir-faire pakistanais en matière d'enrichissement de l'uranium. En échange, le régime de Pyongyang aurait aidé Islamabad à la fabrication de missiles.
À New Dehli
30 décembre 1993. La première ministre pakistanaise Benazir Bhutto arrive à Pyongyang en visite officielle. Au menu: l'achat de missiles balistiques Nodong avec des transferts de technologie pour les fabriquer. Le Pakistan est engagé dans une course aux armes nucléaires avec l'Inde et veut devancer son rival. Islamabad achète les missiles pour 210 millions de dollars. Aucune technologie nucléaire n'aurait été transférée à la Corée du Nord.
Quinze ans plus tard, le journaliste d'investigation Shyam Bhatia donne une autre version dans un livre. Il raconte que lors d'un entretien avec Benazir Bhutto en 2003, celle-ci lui aurait confié une histoire étonnante. Avant de partir pour Pyongyang en 1993, elle bourre les poches de son manteau de CD-Rom remplis d'informations sur la technologie d'enrichissement de l'uranium qu'elle donne aux autorités nord-coréennes. À cette époque, le programme nucléaire de Kim Il-sung a bien avancé sur le chemin du plutonium militaire, mais pas sur l'enrichissement de l'uranium, un domaine dans lequel les Pakistanais excellent.
Les autorités pakistanaises ont toujours démenti l'anecdote de Shyam Bhatia. D'après elles, après la vente des Nodong, des ingénieurs nord-coréens sont venus au Pakistan pour aider à la fabrication des missiles, avant de repartir une fois leur mission terminée. La coopération ne serait pas allée plus loin. C'était sans compter sur le docteur Abdul Qadeer Khan.
«J'ai mis la main sur les plans d'une charge atomique»
Ce scientifique arrive au Pakistan en 1975 après avoir travaillé aux Pays-Bas pour Urenco, consortium spécialisé dans la fabrication de centrifugeuses, machines essentielles à l'enrichissement de l'uranium. Doté d'un excellent réseau, il achète les outils nécessaires à l'enrichissement d'uranium auprès d'entreprises ouest-allemandes et suisses. Grâce à lui, la quête nucléaire du Pakistan progresse vite.
Au milieu des années 1990, Khan met ses connaissances et son carnet d'adresses à disposition des Nord-Coréens, leur explique où et comment se procurer le matériel pour enrichir de l'uranium. Islamabad a toujours nié avoir eu connaissance de ses agissements. En 2004, Khan est démis de ses fonctions. Le général Musharraf, qui a dirigé le pays entre 1999 et 2008, explique dans ses mémoires que Khan «a transféré deux douzaines de centrifugeuses P-I et P-II à la Corée du Nord (…) et leur a montré comment les utiliser». Une mine pour les scientifiques nord-coréens qui les fabriquent ensuite à des milliers d'exemplaires.
Mais Khan est sans doute allé plus loin. En 2003, l'inspecteur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Robert Kelly part en Libye, où Kadhafi a accepté de démanteler son programme nucléaire. Il découvre le matériel que Khan a vendu au régime libyen: «J'ai mis la main sur les plans d'une charge atomique avec toutes les instructions pour la mettre au point, raconte-t-il. Khan avait livré des centrifugeuses et ces plans faisaient partie de la transaction. À l'époque, il travaillait avec les Nord-Coréens et j'en déduis qu'il leur a donné la même chose. Cette charge de conception chinoise datait des années 1960, et c'était une base de travail pour mettre au point un système plus sophistiqué.» Et Robert Kelly de conclure: «Sans la technologie pakistanaise, le programme nord-coréen n'aurait pas progressé aussi rapidement.»

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Henda Ayari, l'accusatrice de Tariq Ramadan, cible de cyber-harceleurs (08.11.2017)

Par Stéphane Kovacs
Publié le 08/11/2017 à 20h39
L'ex-salafiste, qui a porté plainte contre le prédicateur suisse pour viol, subit une campagne d'insultes allant jusqu'à des menaces de mort. L'islamologue nie les accusations portées contre lui.
«Ils sont une armée contre moi!», s'émeut-elle. Insultes, intimidations, menaces de viol, de mort… depuis l'annonce de sa plainte pour viol, le 20 octobre, contre le prédicateur suisse Tariq Ramadan, c'est «une avalanche» de messages haineux que reçoit Henda Ayari, une ex-salafiste devenue militante féministe. Elle devrait porter plainte, ce jeudi à Rouen, contre ces cyber-harceleurs. «On rajoute, par ce cyber-harcèlement, une nouvelle épreuve à ma cliente, qui en a déjà tant subi!», s'indigne Maître Jonas Haddad, l'avocat d'Henda Ayari.
La fondatrice de l'association Libératrices accuse Tariq Ramadan de l'avoir violée dans un hôtel parisien, en marge d'un congrès de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), en mars 2012. Une enquête préliminaire a été ouverte fin octobre à Paris pour «viol, agression sexuelle, violences et menaces de mort». L'islamologue fait l'objet d'une deuxième plainte, déposée peu après, dans laquelle une autre femme dénonce des faits similaires.
Quatre anciennes élèves
D'autres victimes présumées se sont confiées, en Belgique et en Suisse. La Tribune de Genèvea notamment recueilli le témoignage de quatre anciennes élèves de Tariq Ramadan, alors qu'il enseignait le français et la philosophie à Genève entre 1984 et 2004. Trois ont dit avoir cédé à «l'emprise psychologique» de leur professeur et avoir eu des relations sexuelles parfois «très violentes» avec lui. La quatrième, 14 ans à l'époque, évoque le harcèlement auquel elle a dû faire face.
«Campagne de calomnie», balaie l'intéressé, tandis que ses avocats fustigent un «déferlement médiatique». «Toute personne qui tombe dans la diffamation en accusant un individu innocent d'avoir forniqué ou violé (…) et qui n'est pas accompagné de quatre témoins qui ont vu clairement la chose, s'expose à un terrible châtiment», a pour sa part averti Hani Ramadan, frère de Tariq et directeur du Centre islamique de Genève, dans un sermon diffusé sur Internet samedi, juste après les révélations de la Tribune de Genève.
À Rouen, c'est aussi un «déferlement» que subit Henda Ayari. «Je reçois des centaines de messages insultants depuis quinze jours!, dit-elle. Des coups de fils anonymes, des coups de sonnettes intempestifs chez moi… Ils vont jusqu'à faire des faux profils avec mes photos pour salir ma réputation!». Mais la quadragénaire, qui «commence à être blindée», «ne regrette pas d'avoir parlé»: «J'ai confiance en la police et la justice de mon pays!, clame-t-elle. Si ma voix peut aider d'autres femmes et leur donner le courage de parler, elles aussi, alors je ne me serai pas fait insulter et menacer pour rien… Mon but c'est que l'on brise un tabou, qu'on arrête de faire croire aux femmes qu'elles sont inférieures aux hommes, qu'il leur faut quatre témoins pour porter plainte. La peur doit changer de camp, et la honte aussi: normalement, les violeurs doivent aller en prison, et non plus être placés sur un piédestal!».
Ramadan mis en congé de l'université d'Oxford
Un piédestal qui commence à se fissurer. Ce mardi, Tariq Ramadan a été mis en congé de la prestigieuse université d'Oxford, où il enseigne. Ce congé «n'implique aucune présomption ou acceptation de culpabilité et permet au professeur Ramadan de répondre aux accusations extrêmement graves portées contre lui, qu'il nie catégoriquement, précise le communiqué, tout en répondant à notre principale préoccupation - répondre à la détresse accrue et compréhensible, et mettre en priorité le bien-être de nos étudiants et du personnel».

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Lille va tester la police de sécurité du quotidien (08.11.2017)
Par Marie Tranchant
Mis à jour le 08/11/2017 à 20h45 | Publié le 08/11/2017 à 20h24
La ville de Martine Aubry, devenue une « plaque tournante du trafic de drogue », fera partie des sites pilotes dès janvier.
À Lille
Tous les élus ne sont pas dans le répertoire du ministre de l'Intérieur. Mais la maire de Lille le connaît bien. Fin août, Martine Aubry confiait à La Voix du Nord: «Gérard Collomb m'a appelée ce matin pour me dire que Lille sera expérimentale pour la police du quotidien.» La PSQ (police de sécurité du quotidien) annoncée par Emmanuel Macron a pour objectif de «remettre du personnel en tenue ou en civil sur la voie publique, précisait ce mercredi Luc-Didier Mazoyer, directeur départemental de la sécurité publique du Nord, à l'occasion d'une conférence de presse donnée conjointement avec le préfet du Nord. Ses missions concerneront à la fois la prévention et la répression. Chaque fois qu'on a distingué les deux, ça a été un échec.»
Et si cette nouvelle police reste encore floue, elle n'en suscite pas moins espoirs et attentes des forces de police comme des autorités locales, en particulier dans le Nord, candidat de la première heure pour faire partie des sites expérimentaux qui testeront le dispositif dès début 2018. Sur ce point, Michel Lalande, le préfet du Nord, est confiant: «Je n'ai aucun doute que le Nord sera choisi pour l'expérimentation car les enjeux du département le justifient (…). En 2017, on est à un tournant. Depuis deux ans, les événements ont pris une ampleur inédite. Mais la menace terroriste ne fait pas disparaître le besoin de sécurité dans ce qu'il a de plus quotidien.»
«Avoir du temps pour le contact»
Avant la phase concrète, c'est bien celle de concertation - qui durera jusqu'au 20 décembre - que lançaient officiellement mercredi les autorités nordistes. Pas d'annonces, mais une volonté réaffirmée de participer activement à cette étape préliminaire. Chaque policier et gendarme recevra un questionnaire pour donner son avis et des réunions seront organisées par les préfets avec élus, sociétés de sécurité privée, syndicats de police, etc. Il y sera question de rapprocher les forces de police des habitants (2,6 millions dans le Nord), ou encore de trouver comment «avoir du temps pour le contact», qui se situe «dans l'ADN des gendarmes», selon Philippe Mirabaud, commandant du groupement de gendarmerie départementale du Nord.
« De quelques points de deal il y a dix ans, Lille est devenue aujourd'hui une véritable plaque tournante (…). La situation n'est plus tenable »
Martine Aubry
À Lille, les besoins se font sentir. Comme partout, vols, circulation de quads, incivilités peuvent pourrir le quotidien des habitants. Mais, ici, c'est le trafic de stupéfiants qui gangrène le plus certains quartiers de la ville. «La drogue est au cœur de notre mobilisation, avec tout de même quelques résultats», précisait mercredi Michel Lalande. Dans un courrier adressé à Gérard Collomb le 29 mai, au lendemain d'un règlement de comptes mortel, Martine Aubry écrivait: «De quelques points de deal il y a dix ans, Lille est devenue aujourd'hui une véritable plaque tournante (…). La situation n'est plus tenable.» Le 18 août, elle posait officiellement la candidature de Lille comme ville pilote pour la PSQ.
Le dialogue, «une méthode de travail»
Reste la question des moyens. 10. 000 créations de postes de policiers et de gendarmes ont été annoncées par le gouvernement d'ici à 2022 au niveau national, mais la répartition de ceux-ci n'a pas été précisée. Le département du Nord compte 3544 policiers de voie publique, 38 commissaires de police et environ 150 officiers de police de tous grades. Pour le préfet du Nord, il ne s'agit pas seulement d'effectifs mais de «méthode de travail». «Il faut trouver comment arriver à gagner en productivité», préconise-t-il.
Et cela ne pourra pas se faire sans une simplification de la procédure pénale, martèlent les responsables des autorités nordistes. Les policiers de terrain sont du même avis: «Il y a des missions qui pourraient être reprises par d'autres ministères, estime Arnauld Boutelier, secrétaire régional adjoint du syndicat Alliance. Nous sommes pour que la police soit plus proche du citoyen, mais il faut nous en donner les moyens.» Le syndicaliste se dit dans l'attente: «Effectifs réels, missions, préoccupations» restent encore trop flous à ses yeux. Autant de sujets qui seront abordés pendant cette phase de concertation.

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Menaces sur Internet : vers un renforcement des sanctions (08.11.2017)
Par Paule Gonzalès
Mis à jour le 08/11/2017 à 19h35 | Publié le 08/11/2017 à 18h38
VIDÉO - La garde des Sceaux, Nicole Belloubet, s'est engagée à proposer rapidement un dispositif législatif. Il pourrait s'inspirer de la loi allemande.
Un modèle à l'allemande de toute urgence. Alors que monte la polémique sur les nouvelles menaces de mort proférées sur la Toile à l'encontre de Charlie Hebdo , après sa une sur Tariq Ramadan, le gouvernement promet de «renforcer notre arsenal législatif».«Ce qui se passe à Charlie Hebdo mérite des sanctions, on ne peut pas laisser des menaces être proférées de cette manière sans qu'il y ait des sanctions effectives», a déclaré Nicole Belloubet sur LCI mercredi, reprenant en écho la position du premier ministre, Édouard Philippe.
«Sous l'impulsion de la Cour européenne de justice, certains de ces opérateurs ont affirmé mettre en place des procédures de filtrage»
Un magistrat expert du dossier
Le 30 juin dernier, le Parlement allemand a voté une loi permettant d'infliger jusqu'à 50 millions d'euros d'amendes aux opérateurs de réseaux sociaux et jusqu'à 5 millions d'euros d'amendes à leurs représentants légaux lorsque ces derniers ne retirent pas assez vite - dans les 24 heures - les publications racistes, antisémites et incitant à la violence signalées par les usagers. Un autre délai de sept jours est prévu pour les propos les moins outranciers mais jugés inacceptables.
En mai dernier, lors du G7 de Taormine (Sicile), une déclaration contre le terrorisme avait été signée, appelant les acteurs d'Internet à se mobiliser davantage dans la lutte contre «les contenus terroristes». Depuis, un plan d'action franco-britannique est en cours d'élaboration autour de cinq axes de travail, dont l'amélioration du retrait des contenus illicites, le soutien à la production d'un contre-discours, la garantie de l'accès aux données de trafic et de localisation à des fins d'investigation, ainsi que leur conservation, l'accès aux données chiffrées et enfin l'amélioration de la coopération en matière de preuves numériques.
«Exiger une identité pour les inscriptions sur les réseaux»
«Quelle pour­suite peut-on engager contre un “Nabu­cho­do­nosor352” à qui il est quasiment impossible de remonter, alors que nous faisons face à la viralité et l'immédiateté?»
Fabrice Lorvo, avocat
La ministre de la Justice s'est engagée à proposer un dispositif législatif d'ici au printemps, précisant que l'exemple allemand méritait «d'être suivi». C'est le pire des scénarios pour les grandes entreprises américaines comme Facebook, Twitter ou Google, dont la culture juridique est «celle d'une liberté d'expression quasi infinie», souligne ce magistrat expert du dossier. «Sous l'impulsion de la Cour européenne de justice, certains de ces opérateurs ont affirmé mettre en place des procédures de filtrage. Mais les “blind tests” réalisés par diverses associations de lutte contre les discriminations prouvent que le résultat n'est pas satisfaisant. Pourtant, ils savent très bien bloquer les images sexuelles, poursuit-il, tout en reconnaissant certaines difficultés techniques. Vous pouvez couper autant de comptes que vous voulez, il peut s'en recréer tout autant instantanément et le filtrage par mots clés n'est pas très efficace.»
«Quand un instrument de la liberté n'est pas régulé, il finit par entraîner la perte de la démocratie. L'une des solutions auxquelles viendront forcément nos démocraties, c'est de faire sortir le numérique de la logique de l'anonymat en exigeant que soit fournie une identité pour les inscriptions sur les réseaux. On ne pourra pas lutter contre les abus de la liberté d'expression sur les réseaux sociaux sans une identification immédiate de ceux qui postent et sans une coopération des sociétés gestionnaires», insiste l'avocat Fabrice Lorvo, spécialiste de ces questions.
Et d'interroger: «Quelle poursuite peut-on engager contre un “Nabuchodonosor352” à qui il est quasiment impossible de remonter, alors que nous faisons face à la viralité et l'immédiateté?Les délits d'apologie du terrorisme et d'incitation au meurtre existent et sont sévèrement punis, c'est, comme dit la ministre, l'effectivité de la sanction qui fait défaut.»

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journaliste
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Huit personnes interpellées après l'incendie de la gendarmerie de Meylan (08.11.2017)
Par Le figaro.frAFP agence et agence ReutersMis à jour le 08/11/2017 à 14h32 | Publié le 08/11/2017 à 13h37
Les personnes placées en garde à vue ne seraient pas liées aux milieux libertaires d'ultra-gauche qui avaient revendiqué deux incendies volontaires, mais plutôt à ceux de la délinquance.
L'enquête sur l'incendie volontaire à la gendarmerie de Meylan le 26 octobre en Isère progresse. Après de nombreuses investigations, la section de recherches de Grenoble a arrêté ce mercredi matin huit personnes à Meylan, Grenoble et La Tronche. Les gendarmes soupçonnent ces individus, qui ont été placés en garde à vue, d'être aussi impliqués dans l'incendie du garage et de locaux techniques de la caserne du groupement de gendarmerie de l'Isère, qui s'était déclaré dans la nuit du 21 septembre à Grenoble.
Ces interpellations auraient finalement été réalisées dans «les milieux de la petite délinquance» et non dans les milieux libertaires d'ultra-gauche qui avaient revendiqué les deux incendies volontaires, selon plusieurs médias, dont Le Dauphiné Libéré . Sur ces deux affaires, les enquêteurs avaient effectué des prélèvements sur les lieux des sinistres et examiné les enregistrements de caméras de vidéosurveillance. Pour l'heure, on ignore encore comment et pourquoi la gendarmerie a remonté la piste de la petite délinquance, et si elle a, de fait, écarté celle de l'ultra-gauche. Contacté par Le Figaro, le procureur de Grenoble n'a, pour le moment, pas donné suite.
Après l'incendie de Meylan qui avait détruit quatre voitures et une moto dans l'enceinte de la gendarmerie, la piste de l'ultra-gauche avait été évoquée. Un groupe féministe avait en effet publié un long texte sur le site indymedia.org, chambre d'écho des positions les plus radicales chez les anarco-libertaires, dans lequel il revendiquait l'attaque. Ces femmes affirmaient vouloir «lutter contre le sexisme» et «contre le genre» et expliquaient leur action par une «envie de revanche». Le mode opératoire y était même détaillé: ce groupe non identifié expliquait notamment avoir cadenassé l'accès au parking de la gendarmerie, notamment pour «faire une blague aux pompiers», et disait avoir utilisé dix litres d'essence. «Nous avons ciblé les voitures privées des flics, au détriment des quelques sérigraphiées, parce qu'on avait envie de s'attaquer» à «leurs biens personnels [plutôt] qu'à leurs outils de travail», ajoutaient-elles.
Inquiétude du procureur de Grenoble
Cette revendication s'achevait en forme de dédicace, adressée notamment «aux deux personnes incarcérées (dans) l'affaire de la voiture de flics brûlée», à Paris en mai 2016. C'est sur ce même site Internet que l'incendie du garage de la caserne du groupement de gendarmerie de l'Isère et des locaux techniques, en date du 21 septembre, avait été revendiqué. De même, des faits similaires perpétrés à Limoges avaient figuré sur ce site peu de temps avant.
Après le second incendie, le procureur de la République de Grenoble, Jean-Yves Coquillat, avait jugé «particulièrement inquiétant» que les gendarmes et leurs familles aient été «directement visés». «On n'est pas passé loin d'un drame», avait assuré le magistrat en mettant en garde contre une escalade «inquiétante» après plusieurs actions similaires autour de Grenoble ces derniers mois. En effet, ces deux incendies s'ajoutent à une série de précédentes attaques contre des institutions publiques dans la région revendiquées par la mouvance anarcho-libertaire, traditionnellement très implantée à Grenoble.
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Macron inaugure le Louvre d'Abu Dhabi (08.11.2017)

Par François-Xavier Bourmaud
Mis à jour le 08/11/2017 à 21h20 | Publié le 08/11/2017 à 20h08
VIDÉO - En déplacement aux Émirats arabes unis, le chef de l'État a mené une charge contre l'obscurantisme religieux.
Envoyé spécial à Abu Dhabi
Quelques visiteurs sont déçus. De loin, de près, de côté ou par en dessous, difficile de saisir avec un smartphone l'immensité du dôme de métal qui recouvre le Musée du Louvre. Pas celui de Paris, celui d'Abu Dhabi, à près de 7000 kilomètres de là. Celui qu'Emmanuel Macron a inauguré mercredi à l'occasion de sa visite officielle aux Émirats arables unis, sa première dans un pays du Golfe. Tout un symbole pour ce président qui les adore et qui, une fois de plus, en a joué jusqu'à l'usure.
Initié par Jacques Chirac dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, lancé par Nicolas Sarkozy, ce projet de «Louvre du désert» devait voir le jour en 2012, sous François Hollande. Un dôme de métal monumental donc, en forme de moucharabieh pour ne laisser passer que quelques rayons de lumière en fonction de l'heure de la journée. En dessous, l'architecte Jean Nouvel a bâti une médina, 26 bâtiments blancs qui abritent les œuvres d'art.
«Un pont entre l'Occident et l'Orient»
Le Louvre et douze autres musées français en ont loué près de 600 à leur cousin d'Abu Dhabi. «Pour un pays comme la France, se séparer, même sous forme de prêt, de quelques-unes de ses plus belles œuvres, cela ne va pas de soi. C'est même de la torture», a plaisanté Emmanuel Macron. Sans doute. Mais les œuvres sont donc exposées à Abu Dhabi où elles jouxtent les collections d'art islamique, byzantin, précolombien ou asiatique. «L'idée consiste à créer ce pont entre l'Occident et l'Orient, à faire dialoguer les cultures et les civilisations à travers ce musée», explique-t-on à l'Élysée.
Le projet avait pris du retard. Et c'est donc finalement à Emmanuel Macron qu'est revenue la tâche de prononcer le discours inaugural.
Accompagné de son épouse, Brigitte, le chef de l'État a visité plusieurs salles du musée avant de prendre la parole devant un parterre de dignitaires locaux, dont Cheikh Mohammed Ben Zayed al-Nahyan, le prince héritier de l'Émirat. Mais si Emmanuel Macron a salué l'architecture du lieu, il a surtout profité de son discours pour se livrer à une charge virulente contre l'obscurantisme religieux. «Vous êtes le point névralgique où se rencontrent le monde occidental et l'oriental. Vous tenez ce point d'équilibre entre les continents européen, africain et asiatique, a-t-il lancé en expliquant que, de par leur position géographique, les Émirats arabes unis se trouvaient surtout «au cœur des tensions géopolitiques qui secouent le monde». Une allusion à la montée des tensions entre l'Arabie saoudite et l'Iran voisins mais pas seulement.
«De manière indétricotable, irréductible, nos religions sont liées. Ceux qui font croire que l'islam se construit en détruisant les autres monothéismes sont des menteurs et vous trahissent» 
Emmanuel Macron
Car au fil de son discours, les propos d'Emmanuel Macron se sont ensuite tournés vers la religion. Ou plutôt les religions, les trois monothéismes dont il a rappelé qu'ils étaient nés dans cette région. «De manière indétricotable, irréductible, nos religions sont liées. Ceux qui font croire que l'islam se construit en détruisant les autres monothéismes sont des menteurs et vous trahissent», a assuré Emmanuel Macron, provoquant des applaudissements dans l'assistance.
Les Émirats arabes unis sont aussi l'un des premiers alliés de la France dans la région dans la lutte contre le terrorisme. Au-delà de la coopération policière, elle passe donc aussi pour le chef de l'État par la culture et l'éducation.
Jeudi, avant de se rendre à Dubaï pour la deuxième étape de son voyage, Emmanuel Macron se rendra d'ailleurs à l'université de Paris-Sorbonne Abu Dhabi. Pour marteler à nouveau son message, celui de la responsabilité de la génération de dirigeants à laquelle il appartient d'engager la lutte «contre l'obscurantisme et pour l'intelligence». Au Louvre, pour achever son discours, Emmanuel Macron l'a assuré: «Ici commence le combat d'une génération pour notre jeunesse, contre tous les replis et les discours de haine.»

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Grand reporter au service politique du Figaro
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Al Andalus, l'invention d'un mythe, de Serafin Fanjul: contes, légendes, clichés et réalité d'une civilisation
Le bataille de Guadalete (ou de la Barbate) entre le 19 et le 26 juillet 711, gravure du XIXe siècle.
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Par Paul-François Paoli
Mis à jour le 26/10/2017 à 10h35 | Publié le 26/10/2017 à 06h01
Dans son essai Al Andalus, l'invention d'un mythe, Serafin Fanjul déconstruit le mythe romantique d'un islam éclairé dans l'Espagne médiévale.
Nous avons tous entendu parler d'al-Andalus, mais qui sait précisément ce que recouvrent ces deux mots magiques? Un paradis perdu au cœur d'un Moyen Âge obscur où musulmans, juifs et chrétiens devisaient à l'ombre de la grande mosquée de Cordoue. Une sorte d'anti-Daech en somme… Mais les historiens sont méchants. Voilà que le rêve se dissipe et qu'une autre réalité apparaît. Avec Al Andalus, l'invention d'un mythe, Serafin Fanjul ne va pas se faire que des amis, en Espagne évidemment mais aussi en France. «Les hommes croient ce qu'ils désirent», disait Jules César. Le mythe d'al-Andalus est calqué sur le désir que naisse ou renaisse ce fameux «islam des Lumières» que tant d'esprits appellent de leurs vœux. N'a-t-il pas existé dans une Hispanie conquise au VIIIe siècle par quelques dizaines de milliers de guerriers arabes et berbères venus d'Afrique du Nord qui créèrent une civilisation inédite à laquelle coopérèrent les trois religions du Livre?
«Les femmes semblent exclusivement destinées à donner le sein aux enfants. Cet état de servitude a détruit en elles la faculté de parvenir à de grandes choses (…)»
Averroès, médecin et philosophe arabe d'origine espagnole
À travers 700 pages d'une terrible précision, Fanjul, docteur en philologie sémitique, professeur de littérature arabe et ancien directeur du Centre culturel hispanique du Caire, broie la légende d'un multiculturalisme précoce et éclairé. Il défait un mythe qui doit beaucoup au romantisme et à son exotisme de pacotille. Antifranquiste, Serafin Fanjul n'est pas précisément un militant de l'Espagne catholique. Armé d'une immense érudition, il s'est intéressé de près à ce que disent les chroniques de l'époque et les a confrontées aux clichés ambiants. Le résultat est à la fois comique et salutaire. Car on rit dans ce livre qui n'est pourtant pas facile à lire, surtout pour nous Français qui connaissons mal l'histoire de l'Espagne.  «La cohabitation de toutes les races et de toutes les religions avait créé une atmosphère morale pure et exquise (…) il s'agissait de la même civilisation que celle qui régnait dans la Bagdad des Mille et Une Nuits, mais dépourvue de tout ce que l'Orient a pour nous d'obscur et de monstrueux. L'air subtil et rafraîchissant de la Sierre Morena l'avait occidentalisée», écrit l'arabiste Garcia-Gomez en 1959.
Tueries et pogroms
http://i.f1g.fr/media/figaro/127x200/2017/10/26/XVM953b7a46-b5a7-11e7-b618-0efa88aa17ce-127x200.jpg
- Crédits photo : serafin
À propos de cohabitation, Fanjul nous rappelle la longue et fastidieuse liste des tueries de chrétiens sans oublier les pogroms qui ont essaimé l'histoire d'al-Andalus entre la conquête arabe et sa reconquête par les rois catholiques qui se termine par la prise de Grenade en 1492. Il nous rappelle ce en quoi consistait le statut de dhimmi pour un non-musulman: par exemple, ne pas parler à voix haute à un musulman ou ne pas construire une maison plus haute que la sienne. Al-Andalus, paradis sensuel, comme se complut à l'imaginer Théophile Gautier?
Fanjul nous remémore qu'elles étaient les prescriptions d'un islam devenu très rigoriste sous l'influence des Almohades. Interdiction de tous les jeux, notamment les dames et les échecs, prohibition de la musique et relégation des femmes. Les islamistes n'ont rien inventé. Les femmes? Voilà ce qu'en dit Averroès qui fut d'ailleurs mis au ban: «Elles semblent exclusivement destinées à donner le sein aux enfants. Cet état de servitude a détruit en elles la faculté de parvenir à de grandes choses (…) leur vie passe comme celle des plantes, au service de leurs maris. C'est de là que vient la misère qui dévore nos villes, étant donné qu'elles sont deux fois plus nombreuses que les hommes.» 
Al-Andalus, paradis de l'échange interreligieux? Il y eut, à certaines périodes et dans certains lieux, des échanges cordiaux mais ils ne furent pas la règle, plutôt l'exception. Ce dans un monde où les mariages mixtes étaient rares du fait de l'impureté présumée des autres communautés. «Les tentatives de rapprochement doctrinal pacifique sont anciennes chez les chrétiens tandis qu'elles brillent par leur absence chez les musulmans, mais cela ne signifie pas que les chrétiens aient été fondamentalement meilleurs.» Fanjul fait preuve dans ce livre d'un esprit voltairien, le sarcasme en moins. Il conclut: «Ce que l'islam a perdu n'est en rien un paradis originel (…) Que les musulmans réfléchissent donc et ne nous impliquent pas dans leurs frustrations et leurs échecs: ce sont les leurs avant toute chose.»
«Al Andalus l'inventiond'un mythe», de Serafin Fanjul, traduit de l'espagnol par Nicolas Klein, L'Artilleur, 708 p., 28 €.

Rémi Brague, historien de la philosophie et spécialiste de l'islam.
Rémi Brague, historien de la philosophie et spécialiste de l'islam. - Crédits photo : Jean-Christophe MARMARA/Le Figaro
Rémi Brague: «L'importance de l'héritage arabe en Espagne est exagérée»
L'historien de la philosophie et spécialiste de l'islam a lu l'essai de Serafin Fanjul.
LE FIGARO. - Dans son livre, Serafin Fanjul déconstruit ce qu'il appelle le «mythe d'al-Andalus». Sur quoi repose celui-ci?
Rémi BRAGUE. - D'abord, une précision sur le mot: al-Andalus n'est pas l'Andalousie actuelle, qui est une des provinces de l'Espagne, correspondant en gros à la vallée du Guadalquivir, à l'extrême sud de la Péninsule. Le mot arabe désigne tout ce qui, à partir de 711, y est passé sous domination islamique. Elle s'est étendue loin vers le nord, puisque seules y échappaient les Asturies, le Pays basque et navarrais, la Catalogne. Puis elle a reculé par à-coups, jusqu'à la fin du royaume de Grenade en 1492. Le mythe a plusieurs aspects. Pour simplifier, distinguons-en trois. Il y a d'abord l'idée d'un niveau de civilisation matérielle et de culture exceptionnel dans l'ensemble de la population; puis celle d'une coexistence harmonieuse entre juifs, chrétiens et musulmans dans un climat de tolérance, la «convivencia» tant chantée; enfin, la thèse d'Américo Castro selon laquelle les cultures juive et islamique auraient exercé une influence décisive et durable sur l'Espagne. Fanjul attaque ces trois dimensions du mythe, mais insiste surtout sur la dernière, sans pour autant imaginer une continuité parfaite entre toutes les étapes de l'histoire espagnole, et sans non plus ménager ses sarcasmes contre la légende franquiste d'une Espagne éternelle.
«La mythification du passé sert de compensation à des peuples dont la situation présente est peu brillante»
Rémi Brague
En quoi ce mythe est-il une «chimère» aux yeux de l'auteur?
Tout simplement en ce qu'il ne repose sur rien, ou presque: tout au plus des cas isolés, des exceptions censées représenter la règle. Quant au niveau culturel de l'Andalus, il signale de pures galéjades: treize mille mosquées à Cordoue! Quant à l'importance prétendue de l'héritage arabe, elle est exagérée: ainsi, les mots d'origine arabe représentent 0,50 % du vocabulaire espagnol, et aucun ne concerne la vie intellectuelle ou spirituelle. Les anachronismes abondent: on attribue aux Arabes le figuier dit de Barbarie, venu du Mexique, l'arc outrepassé, attesté au IIIe siècle romain, byzantin et wisigoth (269), le patio des maisons sévillanes, qui date de la Renaissance, ou la mantille, de la fin du XVIIIe siècle. Dans beaucoup de cas, on est en présence du phénomène répandu de l'«invention des traditions» chère à l'historien britannique Eric Hobsbawm: ce que l'on croit ancestral et «typique» ne remonte pas plus haut que le XIXe siècle.
Sur la convivencia, Fanjul dit l'essentiel: elle ressemblait plutôt à l'apartheid sud-africain; les communautés ne se mêlaient pas et se haïssaient souvent. Mais ce n'était pas son principal propos. Là-dessus, je renvoie au gros livre de Fernandez-Morera, The Myth of the Andalusian Paradise (2016).
Selon Fanjul, l'idéalisation d'al-Andalus est fondée sur un mélange d'ignorance et d'idéologie mi-victimaire, mi-exotique. Êtes-vous d'accord avec cette analyse?
L'ignorance des choses espagnoles est monumentale en France, où la proximité des langues nous donne l'illusion de la familiarité.
L'exotisme est double. Il est d'abord chronologique, c'est le rêve, partagé aussi par bien des Espagnols, d'une sorte de paradis perdu. Pour les autres Européens, un second exotisme, spatial, s'y superpose. Depuis longtemps, l'Espagne abrite plusieurs de nos fantasmes. Esthétiques, d'abord: castagnettes et toreros. Mais surtout moraux. Ce fut d'abord la «légende noire», répandue aux XVIe et XVIIe siècles par des plumitifs à la solde des dirigeants anglais, français et hollandais, légitimant le pillage des galions qui portaient en Espagne les métaux précieux de l'Amérique. Elle fut reprise au XVIIIe par des gens qui n'avaient jamais franchi les Pyrénées. Puis, au XIXe siècle, on eut l'image d'un peuple si pittoresque resté primitif et au sang chaud, celui d'Hernani et de Carmen. Fanjul cite des phrases à se tordre: Mérimée croyant arabes des monuments gothiques ou baroques; Gautier disant en 1840 que l'Espagne catholique n'existe plus.
Le ressort psychologique de la victimisation est puissant: la mythification du passé sert de compensation à des peuples dont la situation présente est peu brillante.
«Les intellectuels musulmans ont des opinions très ­variées, comme leurs équivalents d'autres religions. Certains font d'al-Andalus un slogan à multiples fonctions»
Rémi Brague
Quel statut a al-Andalus aux yeux des intellectuels musulmans? Celui d'un paradis perdu de l'islam, ou d'un projet d'avenir non seulement pour l'Espagne, mais aussi pour l'Europe?
La perte de territoires jadis dominés est pour beaucoup de musulmans l'objet d'une mémoire douloureuse, bien plus que ne l'est pour les chrétiens le passage à l'islam de régions qui avaient pourtant été le berceau du christianisme, comme la Turquie et le Proche-Orient. Les intellectuels musulmans ont des opinions très variées, comme leurs équivalents d'autres religions. Certains font d'al-Andalus un slogan à multiples fonctions. Après l'échec d'Alexandrie et de la Bosnie, il sert à présenter le visage d'un islam bigarré et tolérant. Chez certains exaltés, il alimente le rêve de la reconquête d'une terre autrefois soumise, d'une contre-reconquista, donc. Ce sont eux qui demandent qu'on leur «rende» la mosquée-cathédrale de Cordoue, d'ailleurs elle-même construite sur les ruines d'une église…
Serafin Fanjul est à la fois philologue et professeur de littérature arabe. Comment jugez-vous ce livre sur le plan de l'érudition? Vous a-t-il fait découvrir des éléments que vous ignoriez?
Fanjul a enseigné à la Complutense de Madrid, sans doute la meilleure université d'Espagne, la langue et la littérature arabes, dont il a traduit plusieurs chefs-d'œuvre. Or, curieusement, l'accent du livre porte moins sur les textes arabes que sur l'histoire de l'Espagne. Je ne suis nullement spécialiste de ces questions et ne me risquerai pas à juger. En tout cas, le livre m'a appris mille choses dont je n'avais pas la moindre idée, mille petits faits historiques ou détails de vie quotidienne: habillement, cuisine, architecture. Sans compter un réjouissant sottisier d'auteurs français, espagnols, italiens.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du 26/10/2017. Accédez à sa version PDF en cliquant ici
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Edgar Morin sur Tariq Ramadan : "J’ai horreur du lynchage médiatique" (07.11.2017)
Edgar Morin (Photographie ©DRFP/Leemage)
TRIBUNE EXCLUSIVE. Le philosophe a cosigné deux ouvrages avec l’intellectuel musulman, aujourd'hui accusé de viols et d'agression sexuelle.
Par Edgar Morin
Le sociologue et philosophe humanisme Edgar Morin a dialogué à deux reprises sur les grands problèmes contemporains, l'islam et la spiritualité avec Tariq Ramadan.
J’ai connu Tariq Ramadan quand il est venu me proposer un livre de dialogue sur les grands problèmes contemporains. Il avait la réputation d’être un défenseur rigoriste de l’islam. Il m’a paru intelligent et cultivé. J’ai accepté le challenge pensant que j’allais effectuer un match intellectuel avec un boxeur de ma catégorie.
J’étais donc et reste très content de contribuer à établir un pont entre des cultures ou modes de pensée qui ne se comprennent pas et ne communiquent pas et où, même, l’incompréhension progresse de part et d’autre.
Pour moi, l’islam comme le christianisme a produit dans l’histoire le meilleur et le pire, encore que, dans le passé, c’est le christianisme qui ait manifesté la pire intolérance. Mais ma pensée s’est toujours opposée à la réduction au pire.
Lors de nos entretiens enregistrés, mon épouse avait tenu à y participer en l’interrogeant sur sa position par rapport à l’égalité des femmes, ce sur quoi il avait développé une réponse en accord avec nos principes.
Au cours de notre débat, il se montra partisan d’un islam européen acceptant la démocratie et l’égalité des femmes, et partisan d’un humanisme, différent par sa source religieuse, mais semblable au mien. Le livre s’intitula "Au péril des idées" (1).

Webedia embarassé par son site jeuxvideo.com (06.11.2017)

Par Lucie Ronfaut
Mis à jour le 06/11/2017 à 19h41 | Publié le 06/11/2017 à 19h13
Le site, qui héberge des forums de discussion, est au centre d'une violente polémique sur la modération en ligne. Webedia tente d'apaiser la crise.
On a connu meilleur cadeau d'anniversaire. Jeuxvideo.com, acteur historique du web français, fête cette année ses 20 ans. Il est aussi depuis quelques jours au centre d'une large polémique qui embarrasse son propriétaire, le groupe Webedia. Plusieurs personnalités, notamment des militants féministes et la journaliste Nadia Daam, ont été victimes d'une opération de harcèlement orchestrée par des membres de forums de discussion hébergé par jeuxvideo.com. L'affaire a provoqué les critiques de Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes. Europe 1, où Nadia Daam est chroniqueuse, a porté plainte. Plusieurs annonceurs ont également annoncé la suspension de campagnes de publicités diffusées sur le site.
Des problèmes réguliers
Webedia a racheté jeuxvideo.com en 2014, pour 90 millions d'euros. Ce site, créé en 1997, se spécialise dans le divertissement et l'information dans le domaine des jeux vidéo. Il est aussi connu pour héberger des forums de discussion. Ces derniers sont divisés en plusieurs catégories, sur le thème des jeux vidéo et de l'informatique. Il existe aussi plusieurs forums où l'on peut parler de tout, appelés les «blabla». L'un d'entre eux, le «forum Blabla 18-25 ans», fait régulièrement polémique. Connu pour son humour décalé, et parfois haineux, certains de ses membres ont mené de nombreuses opérations de harcèlement visant des personnalités. Récemment, ce sont les créateurs d'une initiative contre le harcèlement de rue qui en ont été victimes. En dénonçant ces agissements dans une chronique sur Europe 1, la journaliste Nadia Daam a elle aussi subi des menaces de mort, de viol, ainsi que des tentatives d'intrusion à son domicile.
Les débordements réguliers de ces forums sont devenus un problème pour la réputation de Webedia, fleuron du Web français. Le jeu vidéo est un pilier essentiel du groupe de média, qui a réalisé plus de 220 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2016. Sa vingtaine de marques attire plus de 26 millions de visiteurs uniques mensuels en France, dont 4,8 millions rien pour le site jeuxvideo.com. Ses forums drainent près de 200.000 messages par jour. Comme d'autres acteurs en ligne, tel Facebook ou YouTube, jeuxvideo.com est souvent critiqué pour ses problèmes de modération. Webedia est soumis au statut d'hébergeur en ligne, défini par la loi du 21 juin 2004 sur la confiance en l'économie numérique. Il a seulement pour obligation de réagir si un contenu manifestement illégal lui est signalé par des internautes. Jusqu'ici, six salariés de Webedia contrôlaient les forums de jeuxvideo.com: ils assuraient des fonctions de modérateurs, mais aussi d'animation de la communauté sur les réseaux sociaux. Ils sont appuyés par des centaines de bénévoles, enrolés parmis les membres des forums. Depuis le début de la polémique, Webedia a annoncé que douze salariés seraient désormais responsables de la modération, aidés de trois personnes en charge de la technique.
Une réunion avec les autorités
«Il incombe à chacun des acteurs de s'interroger sur ses responsabilités pour contribuer à limiter les formes de haine sur Internet», a déclaré vendredi Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes. Cette dernière doit bientôt organiser une réunion sur le sujet du harcèlement avec plusieurs plateformes en ligne. Elle a aussi interpellé le réseau social Twitter, où ont également été publié de très nombreux messages haineux. Webedia, de son côté, a assuré condamner ces «actes de haine et de violence» et a pris des mesures préventives, comme la fermeture automatique des discussions sur cette polémique. Il doit aussi se joindre aux procédures judiciaires engagées dans cette affaire, comme la plainte déposée par Europe 1.
Pas suffisant pour certains internautes, qui dénoncent le peu de moyen investi par Webedia dans la modération. Ce week-end, plusieurs annonceurs de jeuxvideo.com et de Webedia ont été interpellés sur les réseaux sociaux pour cesser d'y afficher des publicités. Cette initiative a poussé l'entreprise à contacter ses partenaires ce week-end. «Nous dénonçons les appels à la haine et à la violence, qu'ils aient eu lieu sur le forum Blabla 18-25 de jeuxvideo.com comme sur tous les autres réseaux sociaux qui sont en cause», a-t-elle écrit, dans un mail qu'a pu consulter le Figaro. «Mais nous dénonçons avec la même force les messages postés sur Twitter qui interpellent les annonceurs du site jeuxvideo.com, ainsi que la pression exercée par certains pour obtenir une réaction de leur part. Ces messages, dénigrant pour certains, diffamatoires et injurieux pour d'autres, créent une confusion inacceptable et impliquent injustement les valeurs du groupe.» Lundi soir, au moins quatre entreprises avaient annoncé le retrait de leurs campagnes publicitaires sur jeuxvideo.com: Barilla, l'application Spotify, l'assureur Apicil et la Française des jeux.
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Nicos Anastasiades: «Nous attendons de la France un soutien à notre droit d'explorer nos ressources» (06.11.2017)

Par Fabrice Nodé-Langlois
Mis à jour le 07/11/2017 à 10h43 | Publié le 06/11/2017 à 18h03
INTERVIEW - Avant d'être reçu lundi après-midi par Emmanuel Macron à l'Élysée, le président chypriote en fonction depuis février 2013, a rencontré dimanche ­Patrick Pouyanné, le PDG de Total. Au menu de ces deux rendez-vous, les enjeux gaziers, cruciaux pour l'avenir de l'île.
LE FIGARO. - Avec votre potentiel gazier, voyez-vous Chypre comme le futur Qatar de la Méditerranée?
Nicos ANASTASIADES. - Nous sommes dans une phase délicate où je me garderai de susciter de trop grands espoirs. Les explorations en cours nous diront si nous deviendront un «hub» énergétique ou pas. Ce ne sont pas les seules découvertes dans la zone économique exclusive (ZEE) maritime de Chypre qui sont en jeu mais la coopération avec les autres pays de la région dotés de ressources en gaz. Chypre est le seul pays de la région qui discute avec tous ses voisins, Israël, l'Égypte, le Liban. Nous étudions la possibilité d'exporter ce gaz de la Méditerranée orientale vers l'Europe.
Qu'est-il ressorti de votre rendez-vous avec Patrick Pouyanné, de Total?
Total a annoncé que d'ici fin 2017-début 2018 il ferait, avec Eni, un nouveau forage dans le bloc 6, dans notre ZEE.
«»Chypre est le seul pays de la région qui discute avec tous ses voisins, Israël, l'Égypte, le Liban. Nous ­étudions la possibilité d'exporter ce gaz de la Méditerranée orientale vers l'Europe»
Nicos Anastasiades, président de Chypre
Et pourtant, son forage dans une autre zone (le bloc 11) s'est révélé décevant, l'été dernier…
Oui, décevant s'agissant des quantités, mais ses résultats sont très prometteurs pour les futurs forages, ils confirment la présence d'hydrocarbures dans la ZEE de Chypre, dans le prolongement du gisement de Zohr, en Égypte.
Quand aurez-vous une idée plus précise de vos réserves gazières?
À la fin 2018, nous aurons le tableau complet. Nous étudions plusieurs scénarios pour commercialiser le gaz: le gazoduc East Med vers la Grèce, un lien vers l'Égypte, un terminal de gaz naturel liquéfié. Nous discutons sur des coopérations entre les champs d'Aphrodite (Chypre), Zohr (Égypte) et Leviathan (Israël). Ces scénarios ne sont pas exclusifs. Les décisions que nous prendrons dépendront des quantités découvertes. Si nous travaillons ensemble, nous aurons plus de volumes à commercialiser. Nous avons fait des progrès sur la délimitation de la ZEE avec l'Égypte, le Liban et Israël.
«Je voudrais souligner que la coopération énergétique et les partenariats tripartites avec les pays voisins ne sont dirigés contre aucun pays tiers»
Nicos Anastasiades, président de Chypre
Depuis que les compagnies internationales explorent vos eaux, avez-vous été informé de pressions de la part de la Turquie, qui ne reconnaît pas l'existence légale de Chypre?
Ce qui nous intéresse, ce sont les résultats. Bien sûr, «ils» (les Turcs, NDLR) émettent des protestations, «ils» violent parfois notre ZEE. Mais la présence dans notre zone des grandes compagnies internationales Total, Eni, ExxonMobil ou Qatar Petroleum est la meilleure réponse.
Je voudrais souligner que la coopération énergétique et les partenariats tripartites (Chypre avec la Grèce face à un troisième pays comme Israël ou le Liban, NDLR) avec les pays voisins ne sont dirigés contre aucun pays tiers. Ils reposent sur des principes et des valeurs communs comme l'application du droit international. L'objectif commun est de promouvoir la paix, la stabilité, la sécurité et la prospérité dans la Méditerranée orientale.
Qu'attendez-vous du président Emmanuel Macron sur ces enjeux énergétiques?
Le soutien à notre souveraineté, à notre droit d'explorer nos ressources naturelles.
Les derniers pourparlers sur la réunification de Chypre ont échoué en juillet dernier. Comment voyez-vous la suite?
Les Turcs sont allés à Genève pour maintenir le système du «Traité de garantie», que le secrétaire général de l'ONU a qualifié lui-même d'obsolète. Ce système donne un droit d'intervention et à la présence militaire turque (dans la partie nord de Chypre, occupée depuis 1974). Des pourparlers pourraient reprendre seulement si la Turquie était prête à abandonner ce statu quo inacceptable. La Turquie est en train de renforcer son protectorat dans la partie occupée de l'île.

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L'Europe navigue entre les intérêts gaziers russes et américains (06.11.2017)
Par Armelle Bohineust
Publié le 06/11/2017 à 17h52
L'Allemagne est prête à renforcer la place du géant russe Gazprom, qui fournit déjà, à des tarifs très compétitifs, plus du tiers du gaz consommé en Europe. La Pologne, quant à elle, au nom de l'indépendance énergétique, préfère importer du gaz américain, même s'il est plus cher.
Loin des eaux du Levant, pour le moment surtout riche de promesses, la véritable guerre du gaz en Europe se joue au nord du continent. En scène:Gazprom et ses alliés, notamment l'Allemagne, prêts à renforcer l'écrasante prédominance du géant public russe, qui fournit déjà, à des tarifs très compétitifs, plus du tiers du gaz consommé en Europe.
Face à eux, les tenants de l'indépendance énergétique, à commencer par la Pologne, qui préfère importer du gaz américain, même s'il est plus cher. Au centre: la Commission de Bruxelles, partagée, mais soucieuse de ne pas revivre les conflits qui ont opposé de 2006 à 2009 la Russie à l'Ukraine - alors zone de transit obligatoire pour 40 % du gaz exporté vers l'Europe.
De tous côtés, les manœuvres se multiplient. La dernière en date émane de Bruxelles qui a annoncé, fin septembre, son intention de mettre en place une réglementation identique pour tous les gazoducs transitant en Europe. Une façon, redoutent les partisans de Nord Stream 2, de retarder la mise en service de ce futur gazoduc. Détenu par Gazprom et financé par les industriels européens Engie, Shell, OMV, Uniper (E.ON) et Wintershall (BASF), celui-ci longera le pipeline Nord Stream 1, reliant la Russie à l'Allemagne en passant par la mer Baltique. Et il augmentera de 55 milliards de mètres cubes, soit un tiers, la capacité d'exportation de gaz russe vers l'Europe. «Notre gazoduc devrait obtenir ses permis de construire en Russie, Finlande, Suède, Danemark et Allemagne à la fin du premier trimestre 2018. Il sera opérationnel fin 2019», assure Sebastian Saas, porte-parole de Nord Stream 2.
Le faible prix du gaz russe
L'Allemagne, qui doit remplacer la production de ses centrales nucléaires et réduire sa consommation de charbon, tient beaucoup à ce nouveau tuyau. Ses promoteurs arguent qu'il permet de contourner l'Ukraine et qu'il répondra aux besoins croissants de l'Europe, alors que la production des autres grands fournisseurs (Norvège, Pays-Bas, Algérie) décline ou stagne. Enfin, son atout majeur est le faible prix du gaz russe.
Mais la bataille n'est pas qu'économique. Décidée à être autonome face à son vieil ennemi, la Pologne a construit un terminal de regazéification à Swinoujscie, sur la mer Baltique, pour recevoir du gaz naturel liquéfié (GNL), par bateaux. Avec un objectif très ambitieux: ramener à zéro dans cinq ans ses achats de gaz russe qui couvrent aujourd'hui les trois quarts de sa consommation. En visite à Varsovie en juillet, Donald Trump a bondi sur l'occasion et proposé de «signer un contrat avec la Pologne dans le quart d'heure». Simultanément, le Sénat américain a menacé de sanction toute entreprise qui participerait à la construction du gazoduc Nord Stream 2.
Le président du Conseil européen, Donald Tusk, rappelle régulièrement que l'un des objectifs clés de l'Union est de diversifier ses sources d'énergie. Or, ­naviguer entre les intérêts américains et russes est délicat.
Une ingérence américaine «assez spectaculaire et inacceptable», avait commenté Isabelle Kocher, la patronne d'Engie. Pour sa part, le président du Conseil européen, Donald Tusk, rappelle régulièrement que l'un des objectifs clés de l'Union est de diversifier ses sources d'énergie. Or, naviguer entre les intérêts américains et russes est délicat.
Le terminal polonais a beau être opérationnel depuis un an et recevoir déjà du gaz qatarien, il attend toujours un contrat de long terme avec Cheniere Energy, le principal exportateur américain. Ce n'est pourtant pas faute de munitions. Grâce à l'essor du gaz de schiste, les Américains sont les premiers producteurs mondiaux de gaz naturel et seront bientôt exportateurs nets. Mais l'Europe où aucun grand contrat n'est signé - quoi qu'ait souhaité Donald Trump - ne sera pas leur premier débouché. «Nous allons multiplier par près de deux nos capacités d'exportation à l'horizon 2019. Mais nous visons l'Asie ou l'Amérique latine en priorité, détaille Éric Bensaude, directeur commercial GNL de Cheniere. Faute de gazoducs en Asie, le GNL n'y pas de concurrent. Les prix y actuellement supérieurs de 25 % au gaz européen».
Le géant russe s'implante moins facilement que prévu en Asie et il ne peut se permettre de voir chuter ses ventes en Europe, qui absorbe 80 % de ses exportations.
La partie n'est pas simple pour les adversaires de Gazprom. Le géant russe s'implante moins facilement que prévu en Asie et il ne peut se permettre de voir chuter ses ventes en Europe, qui absorbe 80 % de ses exportations. Il est donc disposé à casser ses prix pour conserver ses parts de marché. La Lituanie, qui achète 100 % de son gaz à Moscou, a su en profiter. Elle a aussi construit un terminal de régazéification. Elle ne l'utilise pas mais la seule perspective de rompre le monopole de son fournisseur russe lui a permis de négocier une baisse de prix de 25 %.
Résultat, le GNL importé n'est pas très compétitif en Europe. «En 2016, les terminaux de régazéification de GNL en Europe n'ont été utilisés qu'au quart de leur capacité», soulignent les experts de l'Ifri. Le vice-président de Gazprom Alexander Medvedev a d'ailleurs martelé au printemps qu'une guerre des prix n'était «pas utile». Le gaz russe peut, en effet, miser aussi bien sur ses coûts de production très faibles que sur les volumes. «À lui seul, le gazoduc Nord Stream 1, en service depuis 2012, peut transporter (en un an) autant de gaz que 600 à 700 navires méthaniers (transportant du GNL)», affirme Sebastian Saas. «L'objectif de Cheniere n'est pas de déclasser Gazprom», relativise de son côté Éric Bensaude. Le groupe américain ne développera les livraisons en Europe que s'il y trouve un intérêt économique. L'empire Gazprom n'est pas menacé à brève échéance sur le Vieux Continent.

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HLM : l'exécutif réfléchit à plus sanctionner les maires récalcitrants (06.11.2017)

Par Jean-Yves Guérin
Mis à jour le 06/11/2017 à 20h47 | Publié le 06/11/2017 à 19h33
Un rapport suggère de quadrupler les amendes des villes qui ne bâtissent pas assez de HLM.
Nouveau coup de semonce pour les villes qui ne respectent pas les quotas de HLM (20 à 25 %) imposés par la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbains). La commission de suivi de ce texte dirigée par l'ex-ministre Thierry Repentin vient de recommander au gouvernement de sanctionner plus fermement les 233 mauvais élèves qu'il a repérés. Des maires qui font tout pour construire le moins possible de logements sociaux.
Les résultats de la loi Duflot dans ce domaine ne sont pas probants
Dans cette liste, on trouve Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne), Saint-Didier-au-Mont-d'Or (Rhône), Saint-Raphaël (Var). Les sanctions envisagées: quadrupler les amendes pour les villes contrevenantes et priver le maire de son droit d'attribuer des logements sociaux à ses administrés.
Rien de très nouveau: la loi Duflot sur la mobilisation du foncier public du 18 janvier 2013 avait déjà quintuplé les pénalités financières. «Mais cela est laissé à la libre appréciation des préfets qui sont plus ou moins déterminés pour sanctionner fortement un maire, affirme Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice PS de Paris qui siège dans cette commission de suivi de la loi SRU. C'est la raison pour laquelle il est utile que nous remobilisions les préfets à ce sujet.»
De fait, les résultats de la loi Duflot dans ce domaine ne sont pas probants. Sur les 219 villes qui n'avaient pas rempli leurs obligations concernant les quotas de HLM sur la période 2012-2015, seulement cinq ont vu leur pénalité quintuplée et 48 ont encaissé une hausse de leur amende de 100 % à un peu moins de 400 %. Dommage, selon Thierry Repentin car les amendes permettent d'améliorer la situation. «80 % des communes sanctionnées financièrement entre 2011 et 2013 ont beaucoup mieux respecté leurs obligations de quotas de HLM entre 2014 et 2016», déclare-t-il.
Colère à Saint-Maur
Le gouvernement va-t-il s'emparer du sujet ou noyer le poisson comme beaucoup de ses prédécesseurs? Difficile de trancher. «Ce sont les préfets qui sont en capacité d'augmenter ces amendes, se contente-t-on de déclarer au secrétariat d'État à la Cohésion des territoires. Pour l'instant, il n'y a pas eu d'arbitrage sur le montant des pénalités.»
La perspective de sanctions plus fortes pour les maires récalcitrants ne fait pas l'unanimité
Sans attendre la position du gouvernement, les élus dans le viseur se défendent. «Ma commune est entièrement urbanisée, affirme Sylvain Berrios, maire de Saint-Maur. Je ne vais pas détruire 25 % des logements privés pour y construire 25 % de HLM.» Révolté par la brutalité de la menace, cet élu contre-attaque: «C'est la ville qui garantit financièrement la construction de HLM, explique-t-il. Si je ne peux plus attribuer de logements sociaux, pourquoi continuerai-je à accorder cette garantie?» De fait, plus que la pénalité financière, c'est la perspective de ne plus être associé à l'attribution de logements sociaux qui effraie le plus les premiers édiles. Car, à tort ou à raison, ce pouvoir est perçu comme un moyen d'avoir des obligés dans sa commune.
D'ailleurs, la perspective de sanctions plus fortes pour ces maires récalcitrants ne fait pas l'unanimité même dans le monde du logement social. «La politique du bâton n'a pas permis d'obtenir beaucoup de résultats en matière de HLM, estime Jean-Louis Dumont, président de l'USH (Union sociale pour l'habitat). C'est la raison pour laquelle je n'y suis pas favorable.»
«En plus, il est compliqué de sanctionner une commune alors qu'aujourd'hui le PLH (Plan local de l'habitat) est décidé au niveau de l'intercommunalité», souligne Yannick Borde, président de Procivis, un gros opérateur du logement social.

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Journaliste
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Emmanuel Macron, le chantre de la société des individus (06.11.2017)

Par Arnaud Benedetti
Publié le 06/11/2017 à 19h20
FIGAROVOX/TRIBUNE - Arnaud Bénédetti décrypte les six premiers mois d'Emmanuel Macron à l'Elysée. Pour lui, le Président de la République a impulsé une révolution bourgeoise et individualiste.


- Crédits photo : Le Figaro
Arnaud Benedetti est professeur associé à l'Université Paris-Sorbonne, coauteur de Communiquer, c'est vivre (entretiens avec Dominique Wolton, éd. Cherche-Midi, 2016), et auteur de La fin de la Com' (éditions du Cerf, 2017).

Mélenchon déprimé, Le Pen démonétisée, Wauquiez vilipendé, des socialistes cornérisés, tout se passe comme si «les sanglots longs des violons de l'Automne «avaient pétrifié toutes les formes d'opposition politique dans ce pays.
On envisageait la rue? Celle-ci, nonobstant quelques mobilisations sporadiques, est restée calme.
On envisageait des transports bloqués? Rien n'est venu paralyser le pays, ni les routiers, encore moins les cheminots.
D'aucuns suggèrent un mouvement étudiant, mais le mot de «sélection» , épouvantail totémique de bien des gouvernements, parait désormais accepté par une majorité de français et ne plus effrayer les jeunes entrants à l'Université.
Le président de la République a pour l'instant déminé une rentrée qui lui permet de décliner sans trop d'encombres un programme que les électeurs n'ont même pas plébiscité.
Force est de constater qu'avec sa ligne assumée, son usage des symboles de l'autorité, de la distance, du surplomb, et une communication de tous les instants, dosée entre la verticalité de la fonction et la proximité de la personne, le président de la République a pour l'instant déminé une rentrée qui lui permet de décliner sans trop d'encombres un programme que les électeurs n'ont même pas plébiscité, optant plus par défaut que par adhésion pour le marcheur.
Le paradoxe veut que les Français aient choisi Macron et non le macronisme. Mais ce faisant , c'est bien le macronisme, quintessence des bourgeoisies de droite et de gauche enfin fédérées, qui applique sa politique dans les veines profondes du pays .
Toute la question consiste à comprendre comment Macron est devenu en cet automne «le point de coordination tacite» ou s'agrègent les bourgeoisies et où se diluent et s'effilochent, pour l'instant, les élans protestataires en autant de mouvements velléitaires.
L'essence du macronisme repose sur trois piliers qui, à ce stade, contribuent à sa stabilité automnale.
Le style d'abord de son leader qui a fait de l'apparence, plus que ses prédécesseurs, la vitrine de sa politique.
Macron rassure les bourgeois. Il les consolide dans cette croyance que gouverner c'est aussi obéir à des codes, à des usages, c'est-à-dire à une épure qui avait été quelque peu malmenée ces deux derniers quinquennats. Le bourgeois a reproduit de l'aristocratie de cour l'exigence de l'étiquette et du respect des formes. Il se déploie dans un «entre soi» où le regard jauge, évalue, contrôle.
Macron récite l'histoire d'une bourgeoisie éclairée, sûre de son fait, déterminée à ne pas se laisser déposséder du pouvoir.
Macron récite l'histoire d'une bourgeoisie éclairée, sûre de son fait, déterminée à ne pas se laisser déposséder du pouvoir; il en incarne la posture, plus gentilhomme parfois que bourgeois, mais aussi trivialement bourgeois quand il laisse transparaître son agacement lorsque l'on proteste un peu bruyamment contre sa politique. C'est un fait que le bourgeois n'aime pas «le bordel «. Le désordre l'offusque et Macron sait parfaitement mettre en scène son indignation.
Mieux: il décomplexe le bourgeois qui ne doit pas avoir honte de son statut, y compris dans le face-à-face avec le «populo». Il n'hésite pas à dire au chômeur de «bosser «pour se payer un costume , et il n'est pas «le père Noël «quand il débarque à Cayenne, dans cette Guyane où le taux de chômage atteint 20 %.
Macron libère les consciences embourgeoisées, les réinstalle dans le confort de leur morale et de leur vision du monde. Il est tout à la fois le héros et le héraut d'une révolution, non pas conservatrice, mais bourgeoise. Il restaure l'habitus de la bourgeoisie dans une société où l'envie, la frustration, le ressentiment constituent de puissants moteurs politiques.
Et c'est là le deuxième facteur de l'apaisement apparent dont semble bénéficier le macronisme en ce début de mandat. Il martèle une conception de la société dont le leitmotiv, à la manière d'un Guizot exhortant les Français du XIXème siècle à s'enrichir par le travail et par l'épargne, consiste à les enjoindre de réussir.
«Réussissez «clame Macron ; et surtout exige-t-il de ses concitoyens de renoncer à toute forme de jalousie à l'encontre de la réussite de leur voisin. Ainsi propose-t-il de rompre avec une culture de la culpabilisation du succès, vieil héritage catholique d'un pays laïque dont l'inconscient religieux ne cesse de se manifester, y compris parfois parmi les plus hostiles à la religion!
Macron est ce président qui incite chacun d'entre nous à procéder sur terre à son salut. Il est le chantre de «la société des individus «pour reprendre le titre d'un ouvrage de Norbert Elias. Cet engagement, répété implicitement ou explicitement, constitue le fil rouge de la doxa macroniste. Il contredit existentiellement toute une sensibilité égalitaire, sidère par son caractère assumé et, prenant à contre-pied une société lassée des mobilisations catégorielles, impose son culot en flattant aussi l'individualisme, cette autre dimension de la sociologie française ...
La communication du président théorise le mouvement - «En Marche «; illustre celui-ci en suggérant l'exemple
Toute la philosophie politique du macronisme vise à promouvoir l'individu, l'individuel, l'individualisme comme moteur de la cohésion sociale.
de Macron comme modèle de réussite individuelle - les initiales du président «E M» rappellent cette convergence entre le slogan et le leader ; reproduit à satiété ce que le publicitaire Rosser Reeves conceptualisa au milieu du siècle dernier dans la notion de «Unique selling proposition «ou «proposition unique de vente».
Toute la philosophie politique du macronisme vise à promouvoir l'individu, l'individuel, l'individualisme comme moteur de la cohésion sociale. De quoi s'agit-il au fond si ce n'est, au prix d'un raisonnement où le sophisme le dispute à une vision trivialement mathématique du social, de considérer que la somme des réussites individuelles est ce qui soude et fait sens pour la société ... C'est ce parti pris, philosophiquement libéral, que le jeune président promeut à un moment de grande fatigue collective.
Bourgeoise, individualiste, la politique du jeune chef de l'Etat s'accompagne d'une pratique du pouvoir dont la discrétion frôle la méfiance et l'obsession du secret. Réalité que confirme, entre autres, la clause de confidentialité que vient de faire signer à ses collaborateurs le président ...
À l'instar d'Auguste Comte qui observait que l' «on ne rentre pas dans les cuisines de la science» , Emmanuel Macron exige du pouvoir qu'il se fabrique dans le silence et la pénombre.
C'est là le troisième pilier de la foi macroniste. Pas de dévoilement inutile: un rideau s'interpose entre la société et le Prince, quand bien même celui-ci orchestrerait avec une régularité de métronome sa présence au monde. La communication du président explicite des valeurs mais conserve cette énigme qui incite à s'interroger, à susciter une fascination implicite par le non-dit qu'elle suggère.
Communiquer, c'est aussi savoir se taire et ne pas montrer. Le bourgeois est un individu secret . Par nature, par conviction et par intérêt. La métaphore du moment en quelque sorte mais qui ne constitue pas pour autant la vérité de demain.
L'opinion n'est pas domestiquée, ni conquise ; elle attend. C'est l'expectative d'abord qui se lit dans le regard des Français ...
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Visite surprise de députés dans des prisons françaises (06.11.2017)
Par Paule Gonzalès
Mis à jour le 06/11/2017 à 20h06 | Publié le 06/11/2017 à 19h48
Une quarantaine de parlementaires ont contrôlé ce lundi simultanément et de manière inopinée une trentaine d'établissements pénitentiaires, afin de préparer la future loi de programmation sur la justice.
Opération coup de poing. La commission des lois met la prison au cœur de sa réflexion. Une quarantaine de parlementaires, tout bords confondu, a accepté lundi de visiter simultanément une trentaine d'établissements pénitentiaires dans toute la France, allant de la maison d'arrêt à la maison centrale. Une opération qui se situe en amont de l'audition, dans quinze jours, d'Adeline Hazan, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, et qui détonne dans le travail parlementaire.
«Cela nous permet de livrer à un instant donné une photo du monde pénitentiaire au plan national», souligne Yaël Braun-Pivet, la présidente de la commission des lois, à l'initiative de cette démarche. Pour Philippe Gosselin, député «LR» de la Manche et vice-président de la commission des lois, «cette méthode, qui permet d'être en amont des textes sur la justice qui arriveront au printemps prochain, nous permettra peut-être de dépasser quelques dogmes et idées reçues et de dépasser la ligne de partage entre laxisme et sécuritarisme».
«Je souhaitais que cette législature puisse s'insérer dans ce débat sur la surpopulation carcérale, alors que le gouvernement fait de la prison et de la peine l'un des cinq piliers de la réforme de la justice, prévient la député des Yvelines qui était à Bois D'arcy, lundi matin. Avoir un regard différencié au plus près de la réalité me semblait important. Cette opération peut déboucher sur de nouvelles auditions, une mission ou des préconisations. Et nous pourrons la renouveler sur d'autres thématiques comme la police, les étrangers ou les mineurs.» Après sa visite en détention, elle avoue que «les conditions immobilières et de surpopulation carcérale - 200 % - sont telles que l'on s'étonne de l'absence de tensions entre surveillants et surveillants et détenus. Cela démontre un travail de la direction et des personnels remarquables.»
Des conditions indignes
Dans le même temps la présidente de la commission des lois milite pour des établissements plus différenciés. «Si l'on pouvait créer des établissements plus ouverts, on pourrait alléger la surpopulation de 10.000 détenus», souligne-t-elle. Même perception d'Alexandra Louis, députée LRM des Bouches-du-Rhône qui a pu juger de la différence entre les deux établissements des Baumettes, l'historique et le moderne, ouvert en mai dernier. «La peine de prison ne peut avoir de sens et être efficace que si les conditions d'incarcération sont dignes. Il faut mettre les moyens pour conquérir cette dignité et pour responsabiliser les détenus mais aussi réfléchir aux alternatives à l'incarcération», affirme cette ancienne avocate pénaliste.
De son côté, Vincent Bru, député MoDem des Pyrénées-Atlantiques, qui visitait l'établissement de Bayonne, insiste sur «la nécessité de construire 15.000 places de prison et de mettre l'accent sur des prisons qui soient des lieux de formation». «J'ai voulu participer à cette opération, pour que le regard de l'opposition s'exprime et apporte un contre-point au prochain discours d'Adeline Hazan devant la commission», souligne quant à lui Raphaël Schellenberger, député LR du Haut-Rhin qui était lundi matin à la maison centrale de Ensishein, un établissement accueillant des profils lourds comme Francis Heaulme. «Il existe trop souvent un postulat négatif vis-à-vis de l'administration pénitentiaire. Cette année, cet établissement a connu deux prises d'otages et alors que nous sommes fouillés à l'entrée du moindre stade, les fouilles des détenus sont ici interdites. De plus, nous avons un énorme problème de suivi psychiatrique, surtout post-peine.» Une question qui revient comme une antienne inquiétante par tous les députés, qui entendent bien évoquer la question avec Adeline Hazan dans quinze jours.

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journaliste
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À Pantin, les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse tentent de remettre les mineurs sur les rails (06.11.2017)

Par Paule Gonzalès
Mis à jour le 06/11/2017 à 19h25 | Publié le 06/11/2017 à 19h10
REPORTAGE - Ces ateliers sont le dernier recours quand tout a échoué et que plus aucune structure ne peut les accepter.
Penché sur son établi impeccable, Kevin démonte méticuleusement une manette de jeu vidéo. Manuel Sorin, l'éducateur qui anime l'atelier d'informatique «De Clic» du service de réinsertion de Pantin, explique: «C'est une façon de canaliser nos pulsions de destruction en en faisant quelque chose de raisonné. Les composants sont jetés s'ils sont endommagés ou réutilisés pour nos projets informatiques.» «Je ne détruis pas, je trie», commente Kevin sans trop se retourner. Dans quelques jours, il rejoindra une formation pour préparer aux écoles de jeux vidéo. «Je programme depuis que je suis tout petit.» À 16 ans, il présente un profil pénal lourd impliqué dans des faits de hacking de haute volée.
La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) de Seine-Saint-Denis, et son service de réinsertion et de «milieu ouvert», accueille et suit en permanence 1080 jeunes, allant du nourrisson «aux jeunes adultes». «10 % de ces jeunes sont désormais des mineurs non accompagnés que l'on voit surtout au pénal et que nous perdons car ils restent peu dans nos structures et reprennent leur errance. Ils sont souvent jugés par défaut», souligne André Vaysse, directeur des services éducatifs auprès du tribunal pour enfants de Bobigny. À cela, il faut ajouter cinq mineurs de retour de Syrie, dont un suivi au pénal.
«Ils sont là quand tout a échoué et que plus aucune structure ne peut les accepter. Arriver à l'heure, dire bonjour, téléphoner pour excuser une absence, c'est déjà énorme»
Mallek Ferguenis, responsable de l'unité éducative qui gère les activités de jour
«Notre structure de réinsertion est le dernier rempart de ces jeunes contre l'inactivité», explique Mallek Ferguenis, responsable de l'unité éducative qui gère les activités de jour. «Ils sont là quand tout a échoué et que plus aucune structure ne peut les accepter. Arriver à l'heure, dire bonjour, téléphoner pour excuser une absence, c'est déjà énorme. Ce ne sont que des cas très durs.» Comme ce jeune Tamoul déscolarisé depuis l'âge de 12 ans et enrôlé dans un gang. Il sort de neuf mois d'incarcération pour des faits graves. Renié par sa famille qui ne comprend pas sa descente dans la délinquance, il est pour l'instant accueilli par un tiers de confiance. Il est assis dans la cour des ateliers, parfaitement immobile dans sa combinaison de peintre, le regard dans le vide. «Ça ira mieux dans deux mois», sourit Jean-François.
Depuis le matin, ils enduisent un mur et le préparent à la peinture. Il y a quelques jours, les ateliers ont été vandalisés, la voiture de l'atelier auto-école incendiée et l'on pouvait lire sur les murs, sans faute d'orthographe: «Nique la justice» et «Le travail ne rend pas libre». Le détournement de mauvais goût de la cynique devise du camp d'Auschwitz a sans doute échappé aux jeunes, mais l'émoi a été à la hauteur de leur implication dans ces ateliers de la dernière chance où tout repose sur le volontariat. «S'ils décident un matin de ne plus venir, nous ne pouvons pas les contraindre et nous perdons leur trace parfois définitivement.»
Impossible donc de mesurer l'impact et l'efficacité de l'action menée. Ces ateliers sont donc le dernier fil ténu entre ces profils tous très lourds pénalement et une société avec laquelle ils ont rompu toutes les amarres depuis bien longtemps, quand plus aucune structure ne peut les prendre en charge. C'est surtout une goutte d'eau dans la mer car seulement une cinquantaine de jeunes sont accueillis chaque année au centre de Pantin et 180 sur tous les ateliers de Seine-Saint-Denis.
«Dans tous les cas, nous n'avons à faire qu'à des parcours de vie dévastée»
Alice Auriol, l'une des éducatrices de Seine-Saint-Denis.
De son côté, la mission des services de milieu ouvert consiste à épauler les magistrats à travers les rapports éducatifs et le suivi au civil des jeunes enfants dans le cadre de la protection de l'enfance. Mais «notre public relève à 80 % du pénal, c'est-à-dire des jeunes en conflit avec la loi», comme on le dit pudiquement en langage PJJ, rappelle un éducateur.
Les domaines d'intervention de ces éducateurs sont si larges qu'il est difficile d'en comprendre la cohérence. Il y a certes la définition des mesures éducatives les plus adaptées par rapport aux profils, avant ou après une sentence. Certaines d'entre elles se poursuivront sur cinq ou sept ans. Une éternité à l'aune de l'enfance et de l'adolescence. Mais il y a aussi le contrôle des plus coercitives des mesures (comme dans le cas d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve) ou encore de définir ce que sera «l'après» d'une incarcération. «Dans tous les cas, nous n'avons à faire qu'à des parcours de vie dévastée», rappelle Alice Auriol, l'une des éducatrices de Seine-Saint-Denis.
Entre-temps, l'éducateur mué en assistant social effectuera les démarches administratives, renouera avec les parcours de santé, tentera de rescolariser certains, suivra les placements, ira faire les visites dans les familles ou en détention et sera présent aux audiences…
«Nous gérons les urgences et ce sont trop souvent ceux qui font le plus de bruit et pas forcément ceux qui en ont le plus besoin et qui vivent les situations les plus traumatiques»
Thomas Danglot, éducateur
Au centre de Pantin qui intervient également sur les communes de Bobigny et de Bondy, ce sont 250 jeunes suivis par une dizaine d'éducateurs qui n'agissent que sur mandat du magistrat. En Seine-Saint-Denis, le stock est tel qu'un jeune peut attendre jusqu'à un an avant d'être pris en charge. «Nous gérons les urgences et ce sont trop souvent ceux qui font le plus de bruit et pas forcément ceux qui en ont le plus besoin et qui vivent les situations les plus traumatiques», souligne Thomas Danglot, éducateur qui a dix-sept ans de métier derrière lui.
À cette urgence s'oppose le temps de l'investigation, de la mise en confiance et des mots. Quand les cas sont simples, une dizaine de rencontres sont nécessaires pour démêler les parcours familiaux souvent faits de misère et de violence et débouchant sur de la petite et de la moyenne délinquance. Pour les cas les plus complexes, entre 30 et 50 rencontres sont parfois nécessaires. «Le face-à-face, ça ne marche pas. En revanche, une balade en voiture, un peu de musique, c'est parfois utile», sourient Alice Auriol et Thomas Danglot qui avouent «combien ce travail est difficilement perceptible» en termes de résultats mais néanmoins incontournable.

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Renaud Girard : «Quels défis pour l'Amérique en Asie ?» (06.11.2017)
Par Renaud Girard
Publié le 06/11/2017 à 20h25
CHRONIQUE - Le président des États-Unis sait qu'il a deux grands défis stratégiques à relever en Asie : résoudre le problème que pose à l'Amérique la Corée du Nord, et trouver un modus vivendi avec la Chine, dont l'expansionnisme maritine remet en cause la suprématie navale que les États-Unis exercent en Asie.
Japon, Corée du Sud, Chine, Vietnam, Philippines. Du 5 au 14 novembre 2017, Donald Trump aura consacré un très long voyage à l'Asie, le plus long qu'ait effectué un président américain depuis un quart de siècle. Il aura, à cette occasion, participé à deux grandes réunions multilatérales, le dîner de gala à Manille du 50e anniversaire de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (Asean, dix pays: Brunei, Birmanie, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam) et le sommet à Hanoï de l'Asie de l'Est, où aux membres de l'Asean s'ajoutent les grandes puissances nucléaires asiatiques (Chine, Russie, Inde) ainsi que le Japon, la Corée du Sud, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Il se sera entretenu en tête-à-tête, parfois à plusieurs reprises, avec tous les grands leaders de cette région, qui est économiquement la plus dynamique de la planète.
Le président des États-Unis sait qu'il a deux grands défis stratégiques à relever en Asie, l'un à court terme, l'autre à long terme. À court terme, il lui faut résoudre le problème que pose à l'Amérique et à ses alliés historiques, Japon et Corée du Sud, l'accélération de la menace balistique nucléaire en provenance du régime communiste de la Corée du Nord. À long terme, il lui faut trouver un modus vivendi avec la Chine, dont l'expansionnisme maritime non seulement remet en cause la suprématie navale que les États-Unis exercent en Asie depuis leur victoire sur le Japon impérial en 1945, mais aussi commence à sérieusement inquiéter les puissances riveraines des mers de Chine orientale et méridionale.
Kim Jong-un n'est ni le Saddam Hussein de 2003 ni le Kadhafi de 2011
Trump a affirmé qu'il serait inacceptable pour les États-Unis de voir la Corée du Nord se doter d'armes atomiques opérationnelles. Mais elle est en train de le faire et les États-Unis n'auront très bientôt pas d'autre choix que d'accepter cette nouvelle réalité stratégique. Car personne de sérieux à Washington, au Pentagone comme au département d'État, ne suggère des frappes préventives contre la Corée du Nord. Son jeune dictateur, Kim Jong-un, n'est ni le Saddam Hussein de 2003 ni le Kadhafi de 2011. En cas de guerre préventive contre son régime, il semble avoir les moyens d'infliger des représailles très substantielles contre la Corée du Sud et contre le contingent de 30.000 soldats américains qui y stationne. Le président Moon, comme l'écrasante majorité des parlementaires sud-coréens, ne veut surtout pas d'une guerre préventive américaine, qu'il juge beaucoup trop dangereuse pour sa population civile.
Trump face à la désunion de ses alliés
La Corée du Sud sait que si son voisin du Nord s'effondre économiquement et politiquement, c'est elle qui en subira les principales conséquences
En revanche, de plus en plus de Coréens du Sud souhaitent que leur pays devienne une puissance nucléaire. C'est inquiétant pour la non-prolifération que recherche l'ONU depuis les années 1960, mais il serait injuste de reprocher aux Coréens du Sud de vouloir se doter, face à une menace nucléaire avérée, de moyens de dissuasion équivalents. Dès lors que les missiles nucléaires nord-coréens intercontinentaux seront capables de frapper directement le territoire nord-américain, qui pourrait garantir à la population sud-coréenne que l'Amérique serait prête à sacrifier pour elle ses villes de Los Angeles ou de San Francisco? Recevant le président américain à Tokyo, le premier ministre japonais, Shinzo Abe, a suggéré un renforcement drastique des sanctions commerciales et financières contre le régime de Pyongyang. À Séoul, les élites sont plus prudentes, car la Corée du Sud sait que si son voisin du Nord s'effondre économiquement et politiquement, c'est elle qui en subira les principales conséquences. Trump va en fait devoir relever le défi de la désunion de ses deux alliés japonais et coréen. L'occupation japonaise de la péninsule coréenne (1910-1945) a laissé des traces profondes dans l'inconscient collectif coréen. En Europe continentale, les deux plus puissants alliés de l'Amérique, ennemis entre eux naguère, sont devenus les meilleurs amis du monde. En Asie, ce n'est pas le cas.
À long terme, l'Amérique devra obtenir de la Chine qu'elle précise ses ambitions territoriales et d'influence en Asie et dans le Pacifique. En 2010, alors que les incidents navals se multipliaient en mer de Chine méridionale, les autorités de Pékin expliquaient urbi et orbi qu'aucune médiation internationale n'était nécessaire et que la Chine allait traiter ces problèmes de souveraineté maritime par des conversations exclusivement bilatérales. Pékin proclamait alors que la présence américaine en Asie n'était plus légitime. Le résultat contraire advint: tous les pays riverains demandèrent aux États-Unis de revenir! Dans le rapport sino-américain, qui est le «Grand Jeu» du XXIe siècle, les États-Unis souffrent de l'absence d'une stratégie de très long terme, telle que celle que Xi Jinping a dessinée avec ses Routes de la soie. Mais ils ont de vrais amis en Asie de l'Est, alors que la Chine n'en a pas…

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Chroniqueur chargé des questions internationales
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Hakim El Karoui : «Il n'y aura pas d'identité européenne si nous ne désignons pas nos adversaires» (06.11.2017)
Par HAKIM EL KAROUI
Publié le 06/11/2017 à 17h33
ANALYSE - Les peuples des nations d'Europe n'éprouveront le sentiment d'une identité commune qu'en défendant ensemble leurs intérêts face à la Chine et aux États-Unis, argumente l'essayiste*.

L'essayiste Hakim el Karoui. - Crédits photo : dessins clairefond
Emmanuel Macron a développé dans deux grands et beaux discours sa vision de l'avenir de l'Europe. Le président de la République a estimé que les évolutions institutionnelles doivent conduire à plus de cohésion économique et de convergence politique. Or, s'il est certain que l'Europe manque d'unité et d'un projet commun, ce n'est probablement pas à cause de manquements institutionnels.
La première difficulté tient aux spécialisations économiques divergentes des différents pays qui composent l'Europe. La deuxième difficulté est encore plus redoutable: l'Europe n'a pas d'identité commune. Dans «Qu'est-ce qu'une nation?», sa conférence si souvent citée, Renan précisait malicieusement: «Les nations ne sont pas quelque chose d'éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La confédération européenne, probablement, les remplacera.» Reste à définir ce qu'est l'Europe, une Europe qui se trouve d'une certaine manière dans la situation des futurs États-Unis d'Amérique en 1776. Mais ces treize États américains bénéficiaient d'une unité linguistique et culturelle, à défaut d'homogénéité économique et sociale. L'Union européenne, elle, demeure une mosaïque culturelle, marquée par des siècles de guerre, outre des systèmes économiques qui divergent.
«L'identité collective ne peut être que politique»
Peut-on alors calquer sur l'Europe le processus de construction des symboles nationaux utilisés, par exemple, en France? Puisque les symboles de l'identité française ont été fabriqués au XIXe siècle (La Marseillaise, le 14 Juillet, Victor Hugo écrivain national), pourquoi ne pas en faire de même avec l'Europe? C'est ce à quoi s'est attaché le philosophe Dolf Sternberger, qui introduisit le concept de «patriotisme constitutionnel , raison civique qui conduit les citoyens à s'identifier à la démocratie et à vouloir la défendre contre ses ennemis. Être «ami de la Constitution», c'était être prêt à défendre l'État de droit contre ceux qui le menacent (en l'occurrence, le nazisme ou le fascisme). Jürgen Habermas - que cite souvent Emmanuel Macron - en proposa une redéfinition au milieu des années 1980 et précisa ensuite souvent ses idées sur la question. Selon lui, une fois écarté le recours à la religion ou à la tradition comme source de légitimation, l'identité collective ne peut être que politique, et plus précisément démocratique - axée sur la défense des droits et des libertés. Et seule la raison peut forger l'identité commune à partir de la communication et de la délibération intersubjectives. L'histoire et la culture passent au second plan. Habermas ajouta ainsi une forte dimension universaliste à la conception originelle du patriotisme constitutionnel. Cette idée a rapidement été transplantée au niveau européen, sous forme de «patriotisme constitutionnel européen». François Mitterrand se présentant au Parlement européen en déclarant «Moi, Européen de France» avait fait sienne cette ambition identitaire.
«Avoir des opposants communs est un moyen infaillible de souder un groupe»
Et puis, et puis… rien. L'histoire des nations européennes n'est pas faite pour aboutir à l'Union européenne. Les nations ont réaffirmé leur prééminence, les peuples ont résisté. Les non français et néerlandais au référendum de 2005le Brexit en 2016 ont confirmé l'échec populaire du projet européen. Il n'existe pas de téléologie européenne. Dès 1999, Gérard Bossuat rappelait: «Il n'y a pas d'identité latente, il n'y a que des identités affirmées. Seuls les peuples peuvent manipuler l'histoire pour en faire des drapeaux.»
Faut-il faire son deuil alors de cette belle ambition? Non probablement. Mais, alors, comment donner aux peuples européens la capacité de s'approprier une identité européenne? En tirant les conclusions de la nouvelle réalité du monde. Les Européens ont longtemps cru qu'ils étaient le monde parce qu'ils
le gouvernaient - l'Europe d'abord, les États-Unis ensuite, l'enfant de l'Europe qui a réussi. Désormais, les Européens doivent comprendre qu'ils sortiront de l'histoire si l'Europe n'existe pas. Le Vieux Continent doit aussi accepter le fait qu'il a sinon des ennemis au moins des adversaires: l'islamisme radical bien sûr, mais aussi, d'une manière plus pacifique, la Chine et les États-Unis qui veulent la museler. Avoir des opposants communs est un moyen infaillible de souder un groupe. C'est pourquoi les manuels d'histoire de la IIIe République - outils majeurs de la construction de l'identité nationale - faisaient la part belle aux glorieuses défaites qui provoquaient chez les Français des regains d'énergie collective. Appelons cela, pour être optimiste, la source de l'énergie pour un rebond européen.
On le voit, l'identité européenne ne sera pas positive: le «patriotisme constitutionnel» ne fonctionnera pas.
La conscience d'une appartenance commune passera par la confrontation avec la réalité du monde, de ses rapports de force et des risques que courent aujourd'hui les Européens. D'où l'importance des discussions
en cours avec la Chine sur l'économie de marché. D'où l'importance d'avoir une «politique de l'islam» élaborée au niveau européen. D'où, enfin, la nécessité de répondre moins à Donald Trump qu'à la volonté
de régulation du monde par le droit américain qui a saisi l'administration fédérale aux États-Unis depuis au moins dix ans. Trois beaux sujets pour l'Europe!
* Conseiller en stratégie. Hakim el Karoui a publié, en particulier, «Réinventer l'Occident. Essai sur une crise économique et culturelle» (Flammarion, 2006).

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Amine El Khatmi: «Derrière l'affaire Sonia Nour, la banalisation du discours ‘indigéniste'» (05.10.2017)

Par Amine El Khatmi
Mis à jour le 06/10/2017 à 11h12 | Publié le 05/10/2017 à 18h18
FIGAROVOX/TRIBUNE - Amine El Khatmi revient sur les propos de Sonia Nour, qualifiant de «martyr» le terroriste de Marseille. Un discours «islamo-indigéniste» qui se répand en banlieues avec la complaisance de certains élus.

Amine El Khatmi est conseiller municipal d'Avignon et Président du Printemps républicain.

«Martyr». 6 lettres. 6 petites lettres ont suffi, hier, à déclencher l'une de ces mémorables polémiques dont Twitter a le secret.
«Martyr» donc. Sonia Nour était jusqu'alors l'une des collaboratrices du Maire communiste de La Courneuve, Gilles Poux.
La jeune trentenaire, ancienne de l'UNEF est, à l'image de la plupart des gens de sa génération, une utilisatrice frénétique des réseaux sociaux sur lesquels elle commente l'actualité et donne son avis sur divers sujets.
«Martyr », le mot ne passe pas. Et pour cause. Fréquemment utilisé par la propagande du prétendu Etat Islamique, le terme renvoie à la notion de « héros », celui qui s'est « sacrifié».
Hier, c'est en s'exprimant sur l'odieux assassinat perpétré dimanche contre deux de nos compatriotes à Marseille que la militante communiste a déclenché un scandale ; «Quand un martyr égorge une femme et poignarde une autre, là ça fait du bruit. Terrorisme, du sang, civilisation, bla bla bla… Par contre, que le terrorisme patriarcal nous tue tous les deux jours, on l'entend moins votre grande gueule» écrit-elle.
«Martyr», le mot ne passe pas. Et pour cause. Fréquemment utilisé par la propagande du prétendu Etat Islamique, le terme renvoie à la notion de «héros», celui qui s'est «sacrifié, a donné sa vie pour la cause», en l'occurrence l'islamisme dans le présent cas.
L'apologie du terrorisme n'est pas loin, la glorification du terroriste transformé en héros évidente. Elles sont insupportables.
Insupportables pour les familles des deux victimes de Marseille d'abord, qui, en plus de l'immense chagrin provoqué par la perte d'un enfant, doivent endurer les commentaires crétins de Mme Nour et de ses nombreux défenseurs désertés par la décence et tentant de relativiser et de justifier l'injustifiable.
Insupportables pour les autres familles des victimes et les blessés des attentats précédents qui doivent bien peiner à comprendre - et nous avec eux - ce qu'il y a d'héroïque à lancer un camion sur une foule sans défense, à décimer la rédaction d'un journal ayant des crayons comme seules armes ou à tirer une balle dans la tête d'un enfant de 4 ans dans la cour d'une école juive à Toulouse.
Le propos de Sonia Nour, s'il est incontestablement choquant, ne doit pas pour autant surprendre. La jeune femme se présente sur la biographie de son compte Twitter comme une «militante décoloniale», autrement dit une sympathisante des idées et des thèses défendues par les Indigènes de la République.
La représentante de ce mouvement raciste, antisémite et homophobe, Houria Bouteldja, n'hésitera d'ailleurs pas à monter au créneau pour défendre la jeune collaboratrice, dénonçant «des méthodes expéditives et lâches, d'une indignité insondable».
Dans un autre message posté sur le réseau social, Nour étrille la France dans un réquisitoire d'une violence
La logorrhée indigéniste est parfaitement reconnaissable ; victimisation à outrance, détestation de la France présentée comme un pays « structurellement raciste et islamophobe ».
inouïe, accusant notre pays d'être «raciste, patriarcal, psychophobe, bourgeois, communautaire, consanguin et maltraitant», avant de lancer en guise de conclusion dans un dernier élan de finesse que cette France, elle «l'emmerde».
La logorrhée indigéniste est parfaitement reconnaissable ; victimisation à outrance, détestation de la France présentée comme un pays «structurellement raciste et islamophobe» et obsession autour du passé colonial pouvant servir de prétexte pour justifier les attentats et le terrorisme.
Dans le présent cas, la réaction ferme et immédiate du Maire PCF de la ville qui a décidé de suspendre sa jeune collaboratrice et de la convoquer devant un conseil de discipline, est remarquable.
Elle l'est d'autant plus que si la famille communiste compte en son sein de fervents républicains, elle est également le lieu de convergence d'élus et responsables politiques qui cachent de moins en moins leur proximité avec les Indigènes de la République, quand ce n'est carrément pas avec les promoteurs de l'Islam politique et de l'islamisme.
En la matière, celle qui fait preuve de la plus grande constance est sans doute la députée Clémentine Autain qui s'est, par exemple, mobilisée de manière très active pour contrer le témoignage de ces femmes se plaignant de ne pouvoir accéder à certains bars de Sevran.
Alors que la féministe qu'elle prétend être aurait dû spontanément se ranger aux côtés de ces femmes et faire sien leurs combats, Mme Autain s'est lancée dans une campagne de dénigrement à leur encontre, les accusant de mentir et allant jusqu'à poser devant les photographes dans l'un des bars en question pour prouver que «non, les femmes ne sont pas interdites dans les PMU de Sevran».
Le même schéma s'est reproduit quelques semaines plus tard à La Chapelle-Pajol lorsque des habitantes du quartier ont dénoncé le harcèlement dont elles se disaient victimes.
Au prétexte que les auteurs supposés des faits étaient des migrants et des «racisés» et que dénoncer leurs agissements contribuerait à accroitre le racisme à leur encontre, certaines féministes ont préféré charger les plaignantes accusées d'être des «militantes de droite» et des «menteuses», l'ancienne porte-parole d'Osez le féminisme, Caroline de Hass, poussant même le ridicule jusqu'à proposer l'élargissement des trottoirs pour éviter qu'hommes et femmes ne se croisent.
Il faut se borner à ne pas voir la réalité du terrain pour contester le fait que dans certains quartiers des pans entiers de l'espace public sont interdits aux femmes au nom d'un islam rigoriste.
Pourtant, il faut n'avoir ni lucidité ni clairvoyance et surtout ne rien connaitre de la réalité du terrain - ou plutôt se borner à ne pas vouloir la voir - pour contester le fait que dans certains de nos quartiers, des pans entiers de l'espace public sont interdits d'accès aux femmes au nom d'une conception rigoriste et conservatrice de l'Islam.
Mais pour Mme Autain, dont le mouvement Ensemble! avait appelé à une réunion avec le très sulfureux Tarik Ramadan, la défense des droits des femmes devient secondaire lorsqu'il s'agit de relativiser des comportements qui sont pourtant contraires aux valeurs de notre pays et à l'idée même que nous nous faisons de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Mais Clémentine Autain n'est pas la seule à se distinguer par sa complaisance et son déni. La nouvelle députée de Seine-Saint-Denis Danièle Obono a provoqué un tollé ce week-end suite à son passage sur le plateau d'une émission politique de BFM TV.
Interrogée pour savoir si un employé masculin de la RATP refusant de prendre son service dans un bus conduit par une femme avant lui pouvait être considéré comme étant radicalisé, Mme Obono a commencé par expliquer qu'elle ne savait pas bien ce que signifiait ce terme, avant de conclure que le comportement de cet employé pouvait relever du sexisme et n'avoir aucun rapport avec la religion.
Questionnée dans la même émission sur le fait de savoir si l'interdiction du port de la burqa dans l'espace public était une décision légitime, la députée insoumise s'est montrée incapable d'avancer une réponse claire.
A Saint-Denis, c'est un élu municipal apparenté au groupe communiste qui fait régulièrement parler de lui. Obsédé par le conflit israélo-palestinien, Madjid Messaoudène ne manque aucune occasion pour critiquer Israël.
Si la critique de la politique menée par le gouvernement d'un Etat est parfaitement légitime - et même nécessaire dans le cas de l'actuel gouvernement israélien - le caractère pavlovien de cette critique, drapée sous les habits de l'antisionisme, cache en réalité une détestation irrationnelle des juifs.
La crainte de froisser un supposé électorat musulman à des fins électoralistes est évidente. Mais ce n'est rendre service ni à la République, ni aux musulmans que d'accepter de telles dérives.
En 2012, au soir de la virée meurtrière de Mohamed Merah dans la cour de l'école juive Otzar Hatorah, Messaoudène s'est fait remarquer par une série de tweets particulièrement ambigus et choquants ; «la campagne du PS suspendue aujourd'hui. Ce qui s'est produit à Toulouse est ignoble mais attention à ne pas avoir d'indignation sélective», «Pas de déplacement de Guéant ni Sarko lors du meurtre des militaires maghrébins, ni de suspension de campagne du PS. Deux poids…» ou encore «l'émission Mots Croisés annulée, à ce rythme on devrait aussi tous arrêter de respirer, de manger et surtout de réfléchir»…
Des propos d'autant plus inacceptables qu'ils émanent d'un élu de la République, tirant sa légitimité du suffrage universel.
Pourtant, le Maire de Saint-Denis qui connait les engagements de son élu n'a jamais pris ses distances avec lui.
De manière générale, les appareils politiques locaux comme nationaux restent le plus souvent inertes face à ces dérapages ouvertement antirépublicains de la part de certains de leurs cadres et élus.
La crainte de froisser un supposé électorat musulman dont le basculement peut dans certains territoires s'avérer décisif pour remporter le scrutin est évident. Mais ce n'est rendre service ni à la République, ni aux musulmans que d'accepter de telles dérives.
Ce n'est pas rendre service à la République que d'introduire l'idée qu'elle serait une addition de clientèles électorales vivant les unes à côté des autres et dont il faudrait satisfaire toutes les revendications alors que la défense du commun n'a jamais été aussi nécessaire et vitale que dans la période que nous traversons.
Ce n'est pas rendre service aux musulmans que d'imaginer qu'ils constitueraient un groupe homogène et uniforme, prêt à se vendre en bloc au politique le plus offrant. Prétendre combattre le racisme et essentialiser les citoyens de cette manière en fonction de leur conviction religieuse réelle ou supposée est une ineptie.
Le Printemps Républicain continuera à se battre contre ces dérapages.
Si les partis politiques traditionnels se refusent pour l'heure à assumer leurs responsabilités en la matière, nous continuerons à œuvrer pour que la réponse vienne des citoyens, de ces millions de français qui refusent de voir leur pays fracturé par la tenaille identitaire et qui placent le triptyque de notre devise républicaine au-dessus de tout.
Le combat ne fait que commencer. Mais il est aussi exaltant que prometteur.
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Danièle Obono critiquée pour sa défense d'une responsable des indigènes de la République (06.11.2017)
Par Le Scan Politique
Mis à jour le 06/11/2017 à 14h55 | Publié le 06/11/2017 à 09h19
LE SCAN POLITIQUE - La députée La France insoumise de Paris a qualifié dimanche Houria Bouteldja de «camarade». La porte-parole du Parti des indigènes de la République est accusée de favoriser l'antisémitisme.
«Je respecte la militante antiraciste. C'est dans le mouvement antiraciste que je l'ai connue, c'est dans ces luttes-là que l'on s'est battues», a lancé ce dimanche la députée Danièle Obono, au micro de Radio J. La députée de la France insoumise évoquait alors ses rapports avec la porte-parole du Parti des indigènes de la République (PIR), Houria Bouteldja. Cette dernière est notamment accusée de favoriser l'antisémitisme pour avoir déclaré en 2015 que «les juifs sont les boucliers, les tirailleurs de la politique impérialiste française et de sa politique islamophobe». Interrogée sur caractère potentiellement raciste de cette tirade, Danièle Obono a répondu: «Je ne sais pas».
Confrontée cette fois à une photo de Houria Bouteldja où figure la mention «les sionistes au Goulag», la députée LFI a cette fois jugé qu'il s'agissait d'un propos qui n'était «pas acceptable» et d'une photo de «mauvais goût»?. «Houria Bouteldja, je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'elle dit, mais c'est une militante antiraciste (...) Je considère Houria Bouteldja comme une camarade, parce qu'elle fait partie de ce mouvement-là. Et dans ce mouvement-là, on se bat sur la question de l'égalité», a précisé l'ancienne militante du NPA, qui plaide pour ne «pas réduire tous ces militants anti-raciste à des antisémites».
Alors que le Parti des indigènes de la république, fondé en 2005 avec une visée de «déconstruction post-coloniale», est régulièrement critiqué par les associations antiracistes pour ses propos radicaux, plusieurs élus se sont ému de la mansuétude affichée par Danièle Obono. Cette dernière fait déjà l'objet d'accusations de dérive «islamo-gauchiste», portées notamment par Manuel Valls. «Un opportuniste qui se sert de tous les moyens pour faire parler de lui», a rétorqué l'élue insoumise. Elle a par ailleurs pris de franches distances avec l'humoriste controversé Dieudonné, qu'elle a qualifié de «raciste et antisémite», tout en déplorant l'interdiction de ses spectacles.
Ces prises de position ont déplu, y compris au sein de la France insoumise. Le politologue Thomas Guénolé, membre du mouvement, a épinglé, sur les réseaux sociaux, des propos n'ayant «aucun rapport avec le projet de la France insoumise». «Donc, ils n'engagent qu'elle», fait-il savoir. En mars 2016, ce dernier avait déjà «affronté» Houria Bouteldja sur le plateau de l'émission «Ce soir ou jamais », et l'avait qualifiée de «raciste, misogyne, homophobe».
Obono prend ses distances avec le PIR
Les adversaires de la France insoumise n'ont pas manqué de se saisir de cette nouvelle polémique. Ainsi, le député PS Olivier Dussopt a-t-il relevé que «c'était bien la peine de réfuter la proximité avec le PIR». Du côté de la République en Marche, Aurore Bergé a jugé que cette sortie prouvait que les élus LFI sont «les amis des indigènes de la République. De leurs thèses. De leurs haines». Le FN non plus n'est pas resté sur le banc de touche, avec cette sortie du sénateur David Rachline: «Après “nique la France”, que pense Mélenchon du soutien de son acolyte Obono à celle qui qualifie les Français de souche de «sous-chiens»?»
La polémique a pris des proportions telles que la députée Obono a décidé" de réagir sur sa page Facebook ce lundi. «Je ne suis pas et n'ai jamais été membre du PIR. Je suis en profond désaccord avec leurs thèses. Mon mouvement est la France Insoumise, riche de citoyen·ne·s venu·e·s de combats et d'horizons différents. Je continuerai à défendre nos propositions et nos idées à l'Assemblée nationale et en dehors», indique l'élue parisienne. «Celles et ceux qui suivent mon activité parlementaire peuvent témoigner du travail effectué sur tout un ensemble de dossiers. Je ne refuserai jamais le débat argumenté et contradictoire, mais je refuse que tout propos nuancé devienne motif de provocation. Le débat démocratique vaut mieux que cela», poursuit-elle. Avant de faire savoir, à destination de ceux qui s'interrogeraient sur le sens de son engagement: «Mon seul programme est celui de la France Insoumise, l'Avenir en commun. J'en ai coordonné les livrets thématiques. Je souscris à l'ensemble du programme sans exclusive. C'est celui sur lequel j'ai été élue députée de la 17ème circonscription de Paris».
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Plus de troubles cardiovasculaires après les attentats ? (07.11.2017)
Une étude a évalué le nombre d’hospitalisations pour maladies cardiovasculaires dans les 15 jours ayant suivi les attentats de janvier et novembre 2015 et celui de juillet 2016 à Nice.
Les attentats sont-ils mauvais pour le cœur? Peu après les attentats de janvier 2015 (Charlie Hebdo, Montrouge, magasin Hyper Casher), une clinique de Toulouse avait signalé une augmentation de 75% des hospitalisations pour maladies cardiovasculaires. Toutefois, une étude publiée mardi par Santé Publique France montre que cette hausse ne se vérifie pas au niveau national.
Les chercheurs ont passé au peigne fin les données des hôpitaux français enregistrées entre 2009 et 2016. Sur cette période, plus de 3,8 millions d’hospitalisations ont eu lieu pour syndrome coronarien aigu, infarctus du myocarde et accident vasculaire cérébral, dont environ 15% en Ile-de-France. Une fois retranchées les variations habituelles, tel que l’effet saisonnier (plus d’hospitalisations en hiver), les chercheurs ont scruté d’éventuelles variations inhabituelles dans les jours suivants les attentats.
«Notre étude n’a pas mis en évidence d’augmentation significative du nombre d’hospitalisations quotidiennes pour ces trois maladies dans les 15 jours ayant suivi les attentats de janvier et novembre 2015 et celui de juillet 2016», écrivent les auteurs. Et ceci «ni dans les zones géographiques où s’étaient produits les attentats, ni en dehors». Selon eux, le stress généré par les attentats et leur suivi médiatique ne seraient «pas suffisants pour déclencher un événement cardiovasculaire aigu».
Comment expliquer ce résultat, totalement contradictoire à celui présenté par la clinique toulousaine? Les chercheurs de Santé Publique France ont leur petite idée...: «Compte tenu du faible nombre de patients hospitalisés dans cette étude (moins de 10 cas/jour en moyenne) et de l’approche essentiellement descriptive adoptée, ce résultat pourrait souffrir d’un manque de robustesse», affirment-ils.
Le stress comme déclencheur
Pourquoi les chercheurs s’intéressent-ils au lien entre attentats et maladies cardiovasculaires? «Un stress émotionnel aigu est un déclencheur reconnu de pathologies cardiovasculaires», rappellent les chercheurs. Lorsqu’un stress survient brutalement, le corps reçoit une décharge d’hormones, les catécholamines. Celles-ci peuvent entraîner une augmentation ou des troubles du rythme cardiaque, une élévation de la pression artérielle ou encore une ischémie par élévation brutale de la consommation d’oxygène. Autant d’événements qui peuvent concourir à la survenue d’un problème cardiovasculaire.
Après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, plusieurs études ont rapporté une augmentation des troubles du rythme cardiaque. Les résultats concernant les hospitalisations pour maladies cardiovasculaires étaient, eux, plus contrastés. Aucune augmentation de la mortalité n’avait été observée. Par contre, notent les auteurs de l’étude, «une augmentation de l’incidence et de la mortalité par maladies cardiovasculaires a déjà été rapportée dans diverses situations ayant généré un stress émotionnel aigu (catastrophes naturelles, événements sportifs majeurs, guerres ou attentats terroristes).»
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Pour le «Frexit» et le mariage pour tous : Philippot dévoile la «charte» des Patriotes (07.11.2017)
Par Pierre Lepelletier
Publié le 07/11/2017 à 12h53
LE SCAN POLITIQUE - En prônant dans la sortie de l'Union européenne et une ouverture sur les questions de société, Florian Philippot veut placer son nouveau parti comme une alternative au Front national de Marine Le Pen.
Il ne l'a jamais caché. Depuis qu'il a démissionné du Front national pour lancer Les Patriotes, Florian Philippot entend bien faire de la concurrence à son ancienne famille politique. Un peu plus d'un mois après la création de son nouveau parti, l'ex-bras droit de Marine Le Pen a voulu accélérer en dévoilant la «charte des Patriotes.» Décliné en 26 points, le texte fondateur aux allures de programme électoral, a été dévoilé mardi sur le site internet du parti.
Le «Frexit» comme fer de lance
«Ce n'est pas un projet, c'est une philosophie. La charte fixe des grands principes sur lesquels viendront se bâtir les grands projets», a expliqué à l'AFP Florian Philippot. Parmi eux, un tient particulièrement à cœur à l'eurodéputé: la sortie de la France de l'Union européenne. Au Front national, l'ancien bras droit de Marine Le Pen n'avait jamais réussi à imposer ce sujet qu'il juge pourtant prioritaire. Les nombreuses ambiguïtés et renoncements de Marine Le Pen sur la question avaient notamment précipité sa démission.
Désormais cavalier seul avec son nouveau parti, Florian Philippot entend bien défendre ouvertement son idée du «Frexit». «Sans souveraineté, le politique retrouve sa finalité d'action. En se libérant de l'Union européenne, la France pourra de nouveau coopérer avec toutes les nations du monde», promet notamment la charte.
Les Patriotes «respectent» le mariage pour tous
Le président des Patriotes compte bien aussi se différencier du Front national sur les questions de société. La charte du parti se montre davantage ouverte que la ligne portée aujourd'hui par Marine Le Pen. «Le gouvernement doit se concentrer sur les grands problèmes de la nation et laisser à la société le soin de définir son modèle de société», rapporte la charte qui va même jusqu'à approuver la loi Taubira: «Selon cette philosophie, Les Patriotes respectent les derniers choix de société comme le mariage pour tous.»
La posture employée par Florian Philippot pour évoquer l'immigration peut également surprendre tant le sujet, pourtant omniprésent au FN, est mis de côté chez Les Patriotes. D'ailleurs, dans la charte, le thème de l'immigration n'arrive qu'en 21e position, derrière l'égalité entre les hommes et les femmes, l'écologie ou encore le droit des animaux. «Nous avons parlé de l'immigration de manière très sérieuse, se défend-il pour autant. Il faut réduire considérablement l'immigration massive, mais il n'y a pas besoin d'excès verbaux», a-t-il répliqué mardi sur RTL en visant sans le nommer son ancien parti. Une attitude plus modérée sur les sujets sociétaux qui a pour objectif de ringardiser le Front national: «Nous avons voulu être connectés avec la France de 2017», assure Philippot.
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Commémoration du 13 novembre : Emmanuel Macron va se rendre sur les lieux des attentats (07.11.2017)
Par Le Scan Politique
Publié le 07/11/2017 à 08h55
LE SCAN POLITIQUE - Le chef de l'État ira lundi sur le parvis du Stade de France et sur les terrasses touchées par les attaques meurtrières du commando terroriste, avant de rejoindre la salle du Bataclan.
«L'État ne vous abandonnera pas», avait assuré Emmanuel Macron le 14 juillet aux victimes du terrorisme, un an après l'attentat tragique de Nice. «Des vies fauchées», «des bonheurs brisés», auxquels le président de la République rendra à nouveau hommage lundi prochain, deux ans après les attaques du 13 novembre, à Paris, qui avaient fait 130 morts et de 413 blessés.
Selon les informations de RTL, confirmées au Figaro, Emmanuel Macron se rendra sur chaque lieu touché par les attaques revendiquées par Daech. Le président de la République ira d'abord à Saint-Denis, sur le parvis du Stade de France, avant de se rendre sur les terrasses du Petit Cambodge, du Carillon et de La Belle Équipe, dans les Xe et XIe arrondissements de Paris. Enfin, le chef de l'État rejoindra la salle de concert du Bataclan, toute proche, où 90 personnes ont perdu la vie.
Hollande et Macron réunis?
Selon la radio, l'hommage sera sobre, sans prise de parole. Une gerbe de fleurs sera simplement déposée sur les différents lieux de commémoration, suivie d'une minute de silence. Un rassemblement public organisé par les familles des victimes aura ensuite lieu devant la mairie du XIème arrondissement.
Selon RTL, François Hollande participera également aux commémorations, une information que l'Elysée ne confirme pas. Les apparitions communes de François Hollande et Emmanuel Macron, dont les relations sont tendues, sont rares depuis la passation de pouvoirs. Les deux hommes s'étaient affichés ensemble pour célébrer l'attribution des Jeux olympiques à Paris, en septembre dernier, mais ils ne se sont pas revus depuis.
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Les forains reprennent les blocages pour faire plier la mairie de Paris (06.11.2017)

Par AFP agence et Luc LenoirMis à jour le 07/11/2017 à 12h55 | Publié le 06/11/2017 à 07h27
VIDÉO - Le bras de fer continue entre la ville et Marcel Campion, qui veut imposer son marché de Noël sur les Champs-Élysées. Ce mardi matin, des camions recommencent les blocages, notamment sur le périphérique. Le leader des forains accuse Anne Hidalgo d'être «dérangée mentalement».
Les forains ne rendent pas les armes. Pour protester contre la suppression de certaines fêtes foraines dans la capitale et la suppression du marché de Noël des Champs-Élysées, ils mènent ce mardi matin une nouvelle opération escargot aux abords de Paris. Peu avant 8h, une quarantaine de véhicules de forains ralentissaient la circulation sur l'A13 et l'A4 en direction de Paris, ainsi que sur le périphérique, a indiqué une source policière à l'AFP. Quelques 387 kilomètres de bouchons étaient recensés en région parisienne à 8h contre 270 habituellement, selon le site d'information routière Sytadin. La circulation était coupée sur l'A13 à hauteur de Chambourcy (Yvelines) et des barrages filtrants perturbaient la circulation sur l'A4 et l'A104 dans le sens province-Paris au niveau de Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) et de Villeparisis (Seine-et-Marne), a précisé le site.
Pour Marcel Campion, Anne Hidalgo est «dérangée mentalement»
Interrogé ce matin par Jean-Pierre Elkabbach sur CNews, le leader forain Marcel Campion est revenu sur l'événement. Sur la méthode retenue, d'abord. Marcel Campion a comparé les bouchons à «l'occupation d'une usine par ses ouvriers», l'espace public étant le «lieu de travail» des forains. Le truculent personnage, souvent affublé du surnom de «roi des forains», a également contre-attaqué sur son image de «magouilleur», renvoyant l'accusation à l'équipe municipale, qui a voté la fin du marché de Noël: «je n'ai jamais été condamné, mais eux, ce sont tous des combinards, qui vont débarrasser le plancher». Dans son viseur également, l'ouverture en mai prochain d'un grand parc d'attraction dans le Bois de Boulogne au Jardin d'acclimation. Ce parc de loisirs de l'ouest parisien, propriété de la mairie de Paris et dont le groupe de luxe LVMH et la compagnie des Alpes sont concessionnaires, doit devenir le deuxième parc de loisirs français, derrière Disneyland Paris. «Monsieur Arnault (PDG de LVMH, ndlr) va devenir le premier des forains de Paris», a ironisé Marcel Campion, lui intimant de «rester dans le luxe».
Le forain est allé encore plus loin en détaillant sa relation déteriorée avec la maire de Paris: «Anne Hidalgo est dérangée mentalement, elle me faisait des bises pendant 4 ans et maintenant elle nous chasse». Il a enfin protesté contre la volonté du 12ème arrondissement de réduire de moitié la superficie de la Foire du trône d'avril-mai, rappelant que l'évènement est millénaire.
Un référé déposé dans la matinée
En réponse, Jean-François Martins, adjoint à la mairie de Paris, en charge du tourisme, s'est attaqué à la prestation «décevante» des précédents marchés de Noël pour justifier la fin temporaire de l'évènement. Ce dernier n'a pas précisé les intentions de la municipalité, soulignant simplement la nécessité de «monter en qualité» sur le marché de Noël. «On veut un marché de Noël de qualité, on doit faire travailler les Parisiens» a-t-il expliqué, citant les pâtissiers et d'autres professions à mettre en avant pour remplacer les «churros à 15 euros» proposés les éditions précédentes. «Le chantage n'est pas une méthode», avait déjà dénoncé hier la Ville, affirmant qu'«il n'y aura pas de marché forain en décembre sur les Champs-Élysées».
Samedi après-midi, le préfet de police avait opposé une fin de non-recevoir à Marcel Campion, à l'issue d'une troisième réunion en quatre jours en ses murs. «La décision de la ville de Paris, sauf à ce qu'un juge en décide autrement, a force exécutoire. Les forains et commerçants qui pensent installer le marché de Noël doivent s'y conformer», avait fait valoir Michel Delpuech devant la presse. La société de Marcel Campion, Loisirs Associés, a déjà introduit un recours au fond devant le tribunal administratif de Paris et a décidé de déposer un référé ce mardi pour solliciter en urgence du juge la suspension de la décision municipale. «Si la justice est loyale, vous verrez qu'on va gagner», a assuré Marcel Campion.
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Fusillade au Texas : Devin Patrick Kelley, un homme asocial et violent (07.11.2017)
Par Guillaume Descours et AFP, Reuters AgencesMis à jour le 07/11/2017 à 14h39 | Publié le 07/11/2017 à 11h08
Ancien militaire renvoyé de l'US Air Force, le tueur, un jeune homme de 26 ans, se déchaînait notamment sur les réseaux sociaux contre la religion et les croyants.
Dimanche, il a pénétré dans l'église de Sutherland Springs vêtu de noir, portant un gilet pare-balles et un fusil d'assaut, de type AR-15. Devin Patrick Kelley, 26 ans, est l'auteur de la pire tuerie par balles de l'histoire du Texas. Il a abattu 26 paroissiens avant de se suicider après une course-poursuite en voiture.

Devin Patrick Kelley.- Crédits photo : ERIC BARADAT/AFP
Ses motivations restent floues mais son profil se dessine plus précisément. Sur les photos diffusées par la presse américaine, on découvre un homme de type caucasien, aux cheveux courts. Ancien militaire, caporal dans l'US Air Force, il avait été recruté en 2010 pour travailler comme logisticien dans une base de l'armée de l'air, au Nouveau Mexique. Mais sa carrière militaire ne dure pas. En 2012, il est traduit en cour martiale pour des violences envers son épouse et pour avoir fracturé le crâne du jeune enfant de celle-ci. Il est condamné à un an de détention et dégradé puis renvoyé. En 2014, il tente d'obtenir en appel une révision de cette condamnation, sans succès.
Selon la loi fédérale, l'ancien caporal reconverti en agent de sécurité n'avait pas le droit d'acheter ou de posséder une arme à feu. Comment a-t-il donc pu se procurer son fusil semi-automatique, qu'il aimait afficher sur les réseaux sociaux? C'est à l'origine une erreur de l'armée, qui n'avait pas informé le FBI de la condamnation du tireur. «Le délit de violence conjugale de Kelley n'a pas été inscrit au registre du Centre national d'information criminelle (NCIC)», a indiqué lundi soir l'armée de l'air américaine, précisant avoir ouvert une enquête. Le Pentagone est normalement tenu de communiquer au FBI toute condamnation par une cour martiale, pour son inclusion dans les registres du NCIC.
Violent... notamment envers les animaux
Le militaire déchu déménage ensuite plusieurs fois avec sa nouvelle femme Danielle Shields. Dans le Colorado d'abord, où son casier judiciaire mentionne des accusations de mauvais traitements envers des animaux. Il est de nouveau mis en cause en 2014 pour des faits de violences sur un animal. Ses voisins avaient alerté la police pour signaler qu'il brutalisait son chien. L'affaire a été classée après le paiement d'une amende.
«La seule chose étrange à son sujet est qu'on entendait beaucoup de tirs venant de son côté de la route, souvent la nuit»
Mark Moravitz, un voisin du tireur.
Décrit par les personnes qui le connaissaient comme athée, il exposait sa frustration sur les réseaux sociaux. Sur Facebook, il prenait régulièrement pour cible la religion, l'Église et les croyants. Plusieurs de ses anciens camarades de classe ont expliqué avoir pris leurs distances. Ils se souviennent d'un adolescent agité et solitaire. Certains d'entre eux estiment que Kelley souffrait déjà de problèmes de santé mentale lorsqu'il était adolescent. «Je sais que ses parents lui donnaient de grandes doses de médicaments lorsqu'on était au collège», a raconté Reid Mosis, un jeune homme de 26 ans qui l'a côtoyé pendant quatre ans.
Courtney Kleiber, une autre camarade de classe de Kelley au collège et au lycée, a expliqué sur Facebook qu'elle avait constaté une transformation chez lui. Un basculement progressif de l'enfant «normal» au jeune homme empreint de problèmes émotionnels ou mentaux. «Au fil des années on l'a vu se transformer en quelque chose qu'il n'était pas, écrit Kleiber sur Facebook.
Le couple revient finalement s'installer à New Braunfels, au Texas. Une ville située à une cinquantaine de kilomètres de Sutherland Springs. Mark Moravitz, un de ses voisins, interrogé par la chaîne locale KSAT, décrit un «gars normal, sans rien de particulier», dans une région où posséder des armes est affaire courante. «La seule chose étrange à son sujet est qu'on entendait beaucoup de tirs venant de son côté de la route, souvent la nuit», explique-t-il.
Les enquêteurs tentent à présent d'établir pourquoi Devin Patrick Kelley a ciblé cette église. Une des principales pistes est le «différend familial». Les ex-beaux-parents du jeune homme se rendaient de temps en temps à l'office. Dimanche, ils ne s'y trouvaient pas.
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Dix personnes arrêtées lors d'opérations antiterroristes (07.11.2017)
Par Jean Chichizola et Le figaro.frMis à jour le 07/11/2017 à 13h46 | Publié le 07/11/2017 à 11h25
Des opérations antiterroristes ont été menées mardi dans les Alpes-Maritimes, dans la région parisienne, et en Suisse, afin de déjouer un attentat potentiel.
Dix personnes ont été interpellées mardi matin en région parisienne, dans le sud de la France et en Suisse, dans le cadre d'une opération antiterroriste. Elles participaient à un groupe de discussion de la messagerie cryptée Telegram, fréquemment utilisée par les djihadistes, dans lequel elles auraient tenu des propos inquiétants. Neuf individus, âgés de 18 à 65 ans, majoritairement connus des services de renseignement, ont été arrêtés à Aix-en-Provence, à Menton ainsi que dans le Val-de-Marne et en Seine-Saint-Denis. Une ressortissante colombienne de 23 ans a par ailleurs été interpellée lors des perquisitions dans les cantons de Neuchâtel et de Vaud. Un second prévenu visé par la procédure pénale ouverte en Suisse a, lui, été arrêté en France. Une équipe commune d'enquête avait été mise en place avec les autorités suisses et les forces de police des deux pays ont été impliquées dans chacune des opérations menées des deux côtés de la frontière.
Selon nos informations, l'opération est menée dans le cadre d'une information judiciaire ouverte le 19 juillet pour des faits susceptibles d'être qualifiés d'«association de malfaiteurs terroriste criminelle et provocation directe à la commission d'un acte de terrorisme par un moyen de communication au public en ligne». Les investigations, confiées à la Sous direction antiterroriste de la police judiciaire et à la DGSI, ont permis d'identifier un individu en Suisse qui avait une activité particulièrement soutenue sur les réseaux sociaux. Elles ont par ailleurs mis en évidence qu'il avait, dans ce cadre, des contacts avec des individus demeurant en France avec qui il évoquait notamment des projets d'actions violentes aux contours mal définis à ce stade. Les perquisitions et les auditions, qui ne font que commencer, visent à permettre de préciser les contours des projets qu'ils nourrissaient. Selon l'AFP, aucune arme n'a été retrouvée à ce stade côté français.
L'homme arrêté en Suisse serait aussi en lien sur les réseaux sociaux avec un adolescent de 13 ans, soupçonné de préparer une attaque djihadiste au couteau, selon l'AFP. Ce jeune Français avait été arrêté en région parisienne la nuit précédant la fête de la musique le 21 juin, ont précisé à l'agence des sources proches du dossier, et il avait été mis en examen par un juge antiterroriste et écroué. Né en septembre 2003 et originaire de Vitry-sur-Seine, au sud de Paris, il «était sur le point de passer à l'acte», a indiqué l'une des sources. «Une photo de lui avait été trouvée sur les réseaux sociaux, tenant une feuille proclamant son allégeance» à l'État islamique, ont-elles précisé.
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«Paradise papers» : Apple accusé d'avoir dissimulé 128 milliards de dollars (07.11.2017)
Par Elsa Trujillo
Mis à jour le 07/11/2017 à 14h31 | Publié le 07/11/2017 à 13h31
Apple est à nouveau pointé du doigt pour ses techniques d'optimisation fiscale. L'entreprise assure en réponse avoir payé l'ensemble de ses impôts.
L'île de Jersey, un havre de paix pour Apple. La multinationale aurait déplacé en 2015 le domicile fiscal de sa filiale internationale de l'Irlande à Jersey, où le taux d'imposition est nul. L'information provient de documents obtenus par le journal allemandSüddeutsche Zeitung dans le cadre des Paradise Papers, une large enquête qui lève le voile sur les pratiques d'optimisation fiscales de grands groupes et célébrités du monde entier. En tout, Apple aurait ainsi accumulé 128 milliards de dollars (soit plus de 110 milliards d'euros) de profits, non imposables aux États-Unis.
Apple a été prompt à réagir. Dans un communiqué publié lundi soir, l'entreprise indique avoir payé plus de 35 milliards de dollars d'impôts ces trois dernières années. «Apple croit en la responsabilité de chaque entreprise de payer ses impôts et, en tant que plus important contribuable au monde, Apple paie chaque dollar dû dans chaque pays du monde», est-il mentionné. L'entreprise justifie ses montages par la volonté de payer l'essentiel de ses impôts aux États-Unis et assure que le changement de siège de présente «pas d'avantage fiscal». Un discours habituel de l'entreprise pour justifier ses pratiques. Apple milite depuis plusieurs années pour une réforme de la politique fiscale aux États-Unis, qu'elle estime injuste. «Nous devons payer des impôts là où nous créons de la valeur. Or, nous faisons la majorité de notre recherche et développement aux États-Unis et y payons nos impôts», expliquait Tim Cook, PDG d'Apple, au Figaro en début d'année. «En revanche, si nous décidions de rapatrier nos réserves de cash aux États-Unis, nous serions taxés à hauteur de 40 %. Nous espérons qu'à un moment donné, une réforme permettra de le faire à un taux plus réduit.»
De l'Irlande à Jersey
Les pratiques d'optimisation fiscale d'Apple sont suivies de près depuis plusieurs années. Dès 2013, des parlementaires américains, des responsables irlandais et la Commission européenne se sont intéressés de près aux montages fiscaux du géant américain, rapporte le New York Times. Plusieurs filiales de l'entreprise et son siège européen se situaient alors en Irlande, pays à la fiscalité particulièrement avantageuse.
Sous la pression d'autres pays européens, l'Irlande s'est vue forcée, mi-2014, de mettre fin aux techniques d'optimisation fiscale déployées dans le pays par Apple, ainsi que par d'autres multinationales. Apple aurait alors consulté le cabinet international d'avocats Appleby, basé aux Bermudes, pour évoquer la possibilité d'établir certaines de ses filiales dans un paradis fiscal. Les Îles Vierges britanniques, les îles Caïmans, l'île de Man, les îles Anglo-Normandes de Guernesey et de Jersey auraient alors été alors mentionnées. Apple a finalement misé sur Jersey en 2015. Son siège social européen, lui, se trouve toujours en Irlande.
Le questionnaire envoyé par Apple et récupéré par le journal allemand Süddeutsche Zeitung. - Crédits photo : Paradise Papers.
Les pratiques d'Apple en Irlande ont depuis été sanctionnées par la Commission européenne. En août 2016, après trois ans d'enquête, l'institution a imposé à l'Irlande de réclamer 13 milliards d'euros d'avantages fiscaux à Apple. Le groupe aurait bénéficié de tels «avantages fiscaux» entre 1991 et 2007. L'Irlande a fait appel de cette décision. Début octobre, l'Union européenne a attaqué en justice les autorités irlandaises pour ne pas avoir récupéré ces sommes auprès d'Apple.
Apple n'est pas la seule entreprise de nouvelles technologies à avoir été citée dans l'enquête des Paradise Papers. C'est aussi le cas de Facebook ou de Twitter, soupçonnés d'avoir été financés indirectement par des sociétés proches du gouvernement russe. L'entreprise de Mark Zuckerberg est également accusée d'avoir eu recours aux services du cabinet Appleby, déjà cité dans l'affaire Apple, pour gérer des sociétés offshore.
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En Europe, l'introuvable «liste noire» des paradis fiscaux (06.11.2017)

Par Jean-Jacques Mével
Mis à jour le 06/11/2017 à 20h40 | Publié le 06/11/2017 à 19h34
Les 2,6 téraoctets de chiffres et de données - soit 11,5 millions de fichiers - obtenus par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) ont «choqué» l'Union européenne et justifié l'appel à des «sanctions dissuasives».
Correspondant à Bruxelles
La comédie peut paraître répétitive, mais elle va se rejouer ce mardi, selon un scénario éprouvé: avec les révélations massives des Paradise Papers, les ministres des Finances de l'UE ont décidé d'ajouter à leur rendez-vous mensuel le sujet des paradis fiscaux et de l'évasion des superriches. Comme il y a dix-huit mois dans l'affaire des Panama Papers. Et comme auparavant après le scandale Luxleaks.
Provenant du cabinet d'avocats britannique Appleby, les 2,6 téraoctets de chiffres et de données - soit 11,5 millions de fichiers - obtenus par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) ont «choqué» l'Union européenne et justifié l'appel à des «sanctions dissuasives». Mais elles n'ont pas pu surprendre les 28 capitales qui patinent depuis deux ans au moins sur l'établissement d'une «liste noire» commune des paradis fiscaux. À Bruxelles, l'indignation est débordante, mais les progrès restent millimétriques. Après avoir annoncé la fameuse liste noire pour l'été 2016, Pierre Moscovici se doit remettre à l'ouvrage. «Les Paradise Papers nous offrent sur un plateau l'occasion d'attaquer l'évasion fiscale, dit le commissaire en charge de la fiscalité. Si nous n'agissons pas maintenant, l'occasion risque d'être manquée!» Ce ne serait pas la première…
Il est question de sceller le fameux inventaire des «trous noirs» de la fiscalité d'ici à la fin de l'année. Aujourd'hui, les 28 ministres se borneront à en discuter sans conclure, prévient un familier du débat. À ce jour, il n'existe qu'une seule liste noire officielle des «juridictions non coopératives», comme on dit dans le jargon: celle établie par l'OCDE, à Paris. Elle ne recense qu'un seul pays resquilleur: Trinité-et-Tobago, entre le Venezuela et les Antilles.
Soupir de soulagement
Entre Européens, la danse des ministres consiste jusqu'ici à faire trois pas en avant, deux pas en arrière. Le principe d'une liste unique propre à l'UE est acquis, celui de sanctions contre les pays qui seraient montrés du doigt se précise à chaque scandale. Mais le champ d'application n'a cessé de se réduire comme une peau de chagrin: en matière de fiscalité, la règle de l'unanimité s'impose, ce qui confère à chacun un droit de veto pour protéger ses intérêts.
Pour ne vexer personne, les ministres ont d'abord décidé qu'aucun des pays membres de l'UE ne se retrouverait au ban de l'infamie. Le Luxembourg, Malte et l'Irlande ont poussé un soupir de soulagement, la Belgique et les Pays-Bas aussi. Les ministres des Finances ont ensuite posé la règle qu'un pays ne taxant en rien les bénéfices ne sera pas nécessairement considéré comme un paradis fiscal. Même à l'intérieur de l'UE. Après avoir voté le Brexit, le Royaume-Uni a réussi à mettre provisoirement à l'abri ses territoires à basse fiscalité, dont certains se retrouvent sans surprise dans les Paradise Papers: l'île de Man, les Anglo-Normandes, les Bermudes ou encore les Caïmans.

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Paradise papers : une dizaine de groupes mis en cause (07.11.2017)
Par Le figaro.fr et AFP agenceMis à jour le 07/11/2017 à 12h33 | Publié le 07/11/2017 à 11h17
L'équipementier sportif Nike ainsi que le géant technologique Apple et d'autres groupes ont été clients des paradis fiscaux, révèlent les quotidiens Süddeutsche Zeitung, Le Monde ainsi que franceinfo, ce mardi.
Le pilote Lewis Hamilton, le chanteur Bono... La liste de personnalités citées dans les «Paradise papers» s'allonge, tout comme celle des entreprises. Pour rappel, ces révélations sont issues des fuites de 13,4 millions de documents financiers, provenant notamment du cabinet d'avocats britanniques, Appleby.
● Facebook et Twitter
Le cas de ces deux mastodontes est spécifique. Selon les révélations des «Paradise papers», deux sociétés publiques russes, la banque VTB - deuxième plus grande du pays - et le géant gazier Gazprom auraient respectivement investi dans Twitter et Facebook. Pour ce dernier, une branche de Gazprom aurait plus précisément investi par l'intermédiaire d'une compagnie offshore dans un instrument de placement qui possédait des parts de Facebook. Deux opérations liées au milliardaire et investisseur russe Iouri Milner. Interrogés par la presse, des hommes politiques russes ont minimisé ces fuites, assurant que tout était légal et dénué de motivations politiques.
● Apple
Tout comme l'équipementier sportif, le géant technologique a utilisé un vide dans le droit fiscal irlandais. Résultat, il n'a payé aucun impôt dans le monde, économisant ainsi avant 2013 la somme de «10 milliards de dollars», soutient le New York Times. Alors que le groupe américain avait établi des filiales et son siège européen en Irlande - où l'impôt sur les sociétés est particulièrement bas - les choses se sont corsées en 2013. Des parlementaires américains se sont en effet penchés sur les montages de la marque à la pomme. Sous la pression d'autres gouvernements, l'Irlande avait ensuite durci ses lois fiscales.
Sur les conseils d'Appleby, Apple avait alors, dans le plus grand des secrets, décidé de chercher des cieux plus favorables et jeté son dévolu sur l'île de Jersey, détaille le quotidien new-yorkais. 70% des profits de l'entreprise sont ainsi réalisés dans des paradis fiscaux. Sans attendre, la firme américaine a vivement réagi, affirmant avoir respecté toutes les lois. «Nous sommes le plus gros contribuable du monde (...) avec plus de 35 milliards d'impôts sur les sociétés payés ces trois dernières années», a-t-elle affirmé. Apple reconnaît que «parmi ces changements, (sa) filiale détenant ses liquidités à l'étranger a été domiciliée à (...) Jersey» mais que ce choix était «spécifiquement» motivé par la volonté de «s'assurer que ses obligations fiscales et ses paiements aux États-Unis n'étaient pas réduits», sous-entendu par une éventuelle hausse de son imposition ailleurs.
 Nike
Des «montages fiscaux agressifs». C'est ainsi que le quotidien Le Mondedésigne la stratégie d'optimisation fiscale pour laquelle l'équipementier sportif a opté. Nike a en effet bénéficié d'une faille juridique dans le droit néerlandais, lui permettant de réduire son taux d'imposition à 2% seulement, en Europe - contre 25% pour la moyenne des entreprises européennes. Dans le détail, l'Américain a ainsi créé deux sociétés au Pays-Bas, concentrant «tous les revenus européens» issus des ventes du géant de la chaussure: Nike European Netherlands BV (aussi appelée «NEON») et Nike Retail BV. En conséquence, il a pu échapper «à la taxe sur les bénéfices dans les pays où il vend effectivement les chaussures».
Le montage financier va même plus loin, puisque des sociétés offshore ont été créées aux Bermudes. Nike versait à celles-ci des centaines de millions d'euros pour «s'acheter le droit d'utiliser le “Swoosh” et le “Just do it”. «Si l'opération est absolument artificielle - Nike se paie à lui-même le droit d'utiliser sa marque -, elle permet (...) d'“assécher” artificiellement ses profits et donc de baisser ses impôts, tout en constituant un trésor avec ces “royalties”», explique le quotidien du soir. Mis en place en 2014, ce schéma a permis de récupérer près de 7,5 milliards d'euros de recettes. «Nike a ainsi pu amasser des bénéfices de plus de 12 milliards de dollars dans des paradis fiscaux qui ont à peine été soumis à l'impôt», complète la Süddeutsche Zeitung.
● Uber
La société américaine de VTC aurait également utilisé les services d'Appleby. Objectif, créer une société commanditaire aux Pays-Bas en 2013, baptisée «Uber International C.V», ce qui confirme les informations du site américain Fortunedans un article datant du 22 octobre dernier. Ce type de société aurait ainsi permis à Uber de transférer une partie de la propriété de ses filiales étrangères vers cette entité, et de parvenir un accord avec les autorités néerlandaises pour diviser les profits de Uber sur la propriété intellectuelle. «À partir de [la mi-juin], la quasi-totalité de ses revenus réalisés en dehors des États-Unis étaient dès lors protégé de tout impôt américain», soutient le magazine économique.
● Whirlpool
Selon les informations du Monde , révélées ce mardi, l'entreprise américaine «fait circuler des centaines de millions d'euros de cash entre des sociétés boîtes aux lettres dans des paradis fiscaux». Dans le détail, cette stratégie d'optimisation fiscale repose sur une multiplicité de holdings financières «sans bureaux ni employés», domiciliées dans des paradis fiscaux, et notamment dans le Delaware - un État américain connu pour ses lois fiscales très avantageuses. Ce système a permis à Whirlpool de ne payer que 209 millions de dollars d'impôts sur un peu plus d'un milliard de dollars de bénéfices, en 2015. «En tant que compagnie cotée en bourse, nous avons la responsabilité envers nos actionnaires de gérer au mieux nos opérations mondiales et fournir du retour sur investissement», justifie l'entreprise. «Ce sont des activités d'optimisation fiscale et financières normales. (...) Whirlpool respecte toutes les lois et régulations applicables dans les pays ou nous opérons».
●  Glencore
L'affaire avait déjà été mise en lumière par l'ONG Global Witness. Le géant suisse des matières premières est à nouveau pointé du doigt dans le cadre du rachat de la mine de cuivre de Katanga, en République démocratique du Congo, peut-on lire sur le site de l'ICIJ. Dans les faits, Glencore aurait fourni à Lora Enterprises - basée aux îles Vierges britanniques et détenue par son partenaire, Dan Gertler, un influent homme d'affaires à la réputation sulfureuse - un prêt de 45 millions de dollars en 2008. Objectif affiché, permettre à cet Israélien de participer à une augmentation de capital et devenir principal partenaire. Cet accord a permis à Dan Gertler de réduire le droit d'exploitation de la mine à 140 millions de dollars en deux ans. Les autorités congolaises auraient ainsi perdu 350 millions de dollars.
● Dassault Aviation
Le groupe aéronautique Dassault Aviation * aurait aidé ses clients à «s'exonérer du paiement de la TVA [NDLR: d'un taux de 20%] sur leurs avions Falcon», soutient Le Monde . L'enregistrement d'appareils à l'île de Man permet en effet de bénéficier d'un remboursement de TVA. Ce système aurait ainsi permis à un riche homme d'affaires russe d'économiser «près de 18,5 millions d'euros», par le biais de sociétés offshore notamment.L'entreprise a indiqué à franceinfo que «pour répondre aux besoins de financement de ses clients et dans un contexte de crise financière, la société Dassault Aviation a mis en place de 2008 à 2012 des structures de financement de Falcon à l'Ile de Man», démentant tout fraude et ajoutant «avoir effectué les vérifications et formalités nécessaires, en accord avec les lois et réglementations en vigueur».. «Toutes ces opérations ont été réalisées de façon transparente vis-à-vis des autorités fiscales et nous en répondons régulièrement auprès de celles-ci», souligne Dassault Aviation dans un communiqué adressé à franceinfo.
● Wells Fargo
Le scandale de «Paradise papers» éclabousse également les secteurs bancaire et de l'aviation aux États-Unis, rapporte le New York Times . Selon plusieurs documents, «des services offerts par la banque de l'Utah, Wells Fargo et d'autres entreprises américaines étaient destinés aux riches propriétaires de jets privés en Russie, en Afrique et au Moyen-Orient». «Les banques ont aidé à la création de trusts [NDRL: un “trust” désigne ici l'acte par lequel la propriété d'un avion est confiée à un fiduciaire qui satisfait les conditions de l'agence gouvernementale de l'aviation américaine, FAA, au nom du véritable propriétaire] permettant à des étrangers, qui auraient été inéligibles autrement, d'enregistrer leurs jets aux Etats-Unis, ce qui peut augmenter la valeur [de l'appareil] à la revente», détaille l'ICIJ sur son site. «Akin Gump a ainsi aidé une monarchie arabe à obtenir un remboursement de la TVA sur les jets qu'elle voulait transformer en avions espions. Ernst & Young a collaboré avec Appleby sur des problématiques d'impôts».
● Le groupe Louis-Dreyfus
Selon les informations de franceinfo, le groupe de négoce aurait en effet monté une structure, par le biais «d'une filiale aux îles Caïmans, où le taux d'imposition sur les sociétés est de 0% à 23% dans l'Union européenne». Contactée par les journalistes de Cash Investigation, le géant des matières premières n'a pas répondu davantage. «Le groupe Louis Dreyfus n'est pas tout seul dans cette filiale», nuance le média français. «Pour investir dans le soja au Brésil, la multinationale s'est associée avec le groupe Amaggi, un empire familial longtemps dirigé par Blairo Maggi, aujourd'hui ministre de l'Agriculture au Brésil, mais personnage controversé mis en cause dans plusieurs affaires de corruption». Le ministre de l'Agriculture Blairo Maggi a pour sa part affirmé dans un communiqué «ne pas être un bénéficiaire direct» de la société Amaggi Louis Dreyfus Zen-Noh International Ltda».
* Le groupe Dassault est propriétaire du Figaro
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