samedi 25 novembre 2017

Islamisme et politique 24.11.2017

La «finance islamique», Nice et le Conseil d'État (24.11.2017)
Quand un antiracisme dévoyé s'immisce dans l'éducation (24.11.2017)
Éric Zemmour: «L'ambivalence macronienne, un discours moderniste et une pratique archaïque» (24.11.2017)
Paris : des résidents protestent contre la dégradation de leur quartier (24.11.2017
L'accès à l'électricité, crucial pour le développement des pays les plus pauvres (24.11.2017)
En Éthiopie, les bergers combattants de la vallée de l'Omo (24.11.2017)
Yémen: des centaines de migrants délibérément jetés dans la Mer Rouge (10.08.2017)
La mosquée de Genève licencie 4 Français fichés S (24.11.2017)
Égypte : carnage dans une mosquée du Nord-Sinaï
Cinq effets bénéfiques du café pour la santé (12.07.2017)
Le sommeil, un enjeu de santé méconnu (24.11.2017)
Astéroïdes, Lune, Mars... les start-up à l'assaut des ressources minières de l'espace (24.11.2017)
Nicolas Bouzou: «L'Europe peut rater la révolution de l'espace» (24.11.2017)
Anne-Sophie Letac : «M. le président, ne sacrifiez pas les lycées français de l'étranger !» (24.11.2017)
Natacha Polony : «Non-mixité, le racisme facturé au contribuable» (24.11.2017)
Égypte : carnage dans une mosquée du Nord-Sinaï (24.11.2017)
Après la mort, que deviennent nos données ? (21.11.2017)
Syrie: l'opposition cherche à s'unifier en vue des négociations de Genève (24.11.2017)
Des féministes interpellent Macron sur les violences faites aux femmes (23.11.2017)
Le cimetière de Prinçay dans la Vienne pourra garder sa croix (23.11.2017)
Occupation d'un gymnase à Paris: «Macron doit tenir ses engagements» (23.11.2017)
Immigration : le Sénat épingle la politique de Macron (23.11.2017)
Immigration : la politique d'intégration en souffrance et des risques sanitaires en vue (23.11.2017)
Au moins 184 morts dans l'attaque d'une mosquée dans le Sinaï égyptien (24.11.2017)
Attentat de Nice : la police municipale perquisitionnée (23.11.2017)
Contrairement à ses collègues Insoumis, Danièle Obono défend les stages «non-mixtes» (24.11.2017)
Romain Bail contre un «Sangatte normand» (24.11.2017)
Tsipras : «L'Europe ne peut plus prendre des décisions derrière des portes closes» (23.11.2017)
Zimbabwe : qui est Emmerson Mnangagwa, successeur de Robert Mugabe ? (22.11.2017)
L'Afrique se libère-t-elle progressivement de ses vieux dirigeants ? (24.11.2017)
Le Zimbabwe rêve d'une nouvelle ère (22.11.2017)
Zimbabwe : Mnangagwa prend officiellement la suite de Mugabe (24.11.2017)
Procès Dekhar : 25 ans de prison requis contre le tireur de Libération et de BMFTV (24.11.2017)
Le prince héritier saoudien qualifie le leader iranien de «nouvel Hitler» (24.11.2017)
Prières de rue : entre Clichy et les musulmans, quinze ans de jeu de dupes (24.11.2017)




La «finance islamique», Nice et le Conseil d'État (24.11.2017)
Une employée d'une agence Noorassur à Chelles (Seine-et-Marne) présente une documentation à une cliente. - Crédits photo : JOEL SAGET/AFP
France | Par Stéphane Kovacs
Mis à jour le 24/11/2017 à 20h23
Noorassur se bat en justice contre la municipalité pour ouvrir une de ses agences, après une première requête rejetée.
L'agence franchisée de «finance islamique» Noorassur n'est pas près d'ouvrir, à proximité du centre historique de Nice. Craignant un trouble à l'ordre public, la Ville n'avait pas autorisé l'inscription «Finance islamique» en grosses lettres sur l'enseigne, jugée ostentatoire. En juillet, la société avait saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice, qui avait rejeté son recours - l'affaire doit revenir au fond dans quelques mois. Face à cet écueil, elle a ensuite saisi le Conseil d'État. Mais après avoir examiné le dossier jeudi, le rapporteur public de la plus haute juridiction administrative a conclu de la même façon. La décision finale sera rendue dans deux à trois semaines.
Se fondant sur des «événements survenus à Nantes et à Chelles début 2016» (vitrine de l'agence brisée, menaces de mort), la municipalité de Nice n'avait pas donné suite à la demande d'installation d'une enseigne de Noorassur, formulée en février 2017. «La terminologie de cette enseigne  “Finance islamique”, c'est-à-dire respectant les principes de la charia, représente clairement une marque de communautarisme, que la Ville de Nice refuse sur son territoire, affirmait-elle dans un communiqué. Il n'existe pas de finance chrétienne ou de finance judaïque ; cette enseigne cible une partie spécifique de la population.»
«L'installation des enseignes mettant en avant les termes “Finance islamique” est de nature à créer un tel trouble»
L'arrêt du tribunal administratif
Le tribunal administratif avait reconnu que la décision du maire était «justifiée, proportionnée à la menace existante et ne fai(sai)t pas obstacle à l'exercice d'une activité professionnelle» : «L'attentat de Nice du 14 juillet oblige les autorités à tout mettre en œuvre pour éviter la survenance de troubles susceptibles de porter atteinte à la sûreté des habitants, soulignait-il. L'installation des enseignes mettant en avant les termes “Finance islamique” est de nature à créer un tel trouble».
Une banque «conforme à la charia»
Jeudi, le rapporteur public est allé dans le même sens. Pour le Conseil d'État, «le préjudice économique pour la société n'est pas suffisamment grave pour justifier l'urgence». Quant à l'effet discriminatoire de la mesure, il n'est pas évident. La société Noorassur n'a pas souhaité répondre au Figaro, mais a simplement tweeté: «Le combat continue!»
Car l'entreprise n'en a pas fini avec les problèmes judiciaires. «Un autre procès est en cours, précise-t-on à la mairie de Nice. L'agence a repeint sa façade en vert, sans avoir sollicité l'autorisation administrative requise, ni celle des Bâtiments de France. Un procès-verbal d'infraction à la législation sur l'urbanisme a été transmis au procureur de la République.» Afin de régulariser la situation, la société a déposé un dossier de déclaration préalable de travaux. Qui a été rejeté le mois dernier, à la suite de l'avis défavorable rendu par l'architecte des Bâtiments de France.
En attendant, la Ville continue de recevoir «de nombreuses plaintes de riverains» émus. «On a écrit à la mairie, car on ne peut pas accepter, dans ce quartier qui est l'un des plus vieux de Nice, l'ouverture d'une banque islamique!, s'insurge Jean-Michel Bidart, président du comité de défense des quartiers du Port. Une banque qui se dit “conforme à la charia”, avec une salle de prière à l'intérieur… Si ce n'est pas de la provocation! Si cette banque devait ouvrir, on serait prêt à manifester devant tous les jours.».

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Grand reporter, chargée des questions de société
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Quand un antiracisme dévoyé s'immisce dans l'éducation (24.11.2017)
Jean-Michel Blanquer: «Les mots les plus épouvantables du vocabulaire politique sont utilisés au nom soi-disant de l'antiracisme.» - Crédits photo : François BOUCHON/Le Figaro
France | Par Marie-Estelle Pech
Mis à jour le 24/11/2017 à 19h41
Gauche laïque et gauche communautariste se déchirent à propos du stage organisé par le syndicat SUD et un colloque controversé à l'université.
Ce dernier a déposé une plainte pour diffamation en cette fin de semaine contre SUD éducation 93. Les approches du syndicat «mettent gravement en cause l'institution scolaire», estime le ministre puisque ce stage propose d'analyser un supposé «racisme d'État» dans la société «et en particulier dans l'Éducation nationale». La présentation met notamment en cause «les programmes d'histoire servant le roman national, la surorientation dans les filières professionnelles des élèves descendant.e.s des immigrations en particulier postcoloniales, l'islamophobie et une instrumentalisation de la laïcité», a-t-il précisé. Très applaudi mardi devant l'Assemblée nationale, le ministre de l'Éducation s'est étonné: «On parle de non-mixité raciale, on parle de blanchité, on parle de racisé: (...) les mots les plus épouvantables du vocabulaire politique sont utilisés au nom soi-disant de l'antiracisme alors qu'en fait ils véhiculent évidemment un racisme».
SUD éducation qui a déploré dans un communiqué les «contresens» du ministre défend la non-mixité en tant «qu'outil de regroupement» des victimes de racisme
SUD éducation qui a déploré dans un communiqué les «contresens» du ministre défend la non-mixité en tant «qu'outil de regroupement» des victimes de racisme. Surtout, pour ce petit syndicat, il existe bien un «racisme d'État» en France puisque la Cour de cassation a condamné l'État pour des contrôles au faciès et «parce que les discriminations dans l'accès au logement sont établies».
La provenance de deux intervenants du stage qualifiés de «compagnons de route du Parti des Indigènes de la République (PIR)» par la Licra (Ligue contre le racisme et l'antisémitisme) a participé à la polémique sur les réseaux sociaux. Les idées du PIR, un mouvement controversé qui se présente comme antiraciste et décolonial, ont à nouveau fait parler d'elles, cette fois dans le monde universitaire. Auteur du livre Les Blancs, les Juifs et nous vers une politique de l'amour révolutionnaire et souvent taxée de sexisme, racisme ou d'homophobie, la porte-parole du PIR, Houria Bouteldja, avait été invitée par l'université de Limoges à un «séminaire d'études décoloniales», vendredi 24 novembre. Une invitation qui a suscité de vives réactions. Assumant d'abord cette sollicitation car «les séminaires de recherche doivent être l'occasion de discuter sans préjugés de l'ensemble des idées aujourd'hui présentes dans notre société», Alain Célérier, le président de l'université, a finalement annulé la venue de la conférencière, évoquant un «risque de trouble à l'ordre public». La ministre Frédérique Vidal a également appelé les universités «à la vigilance».

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Éric Zemmour: «L'ambivalence macronienne, un discours moderniste et une pratique archaïque» (24.11.2017)

- Crédits photo : Jean-Christophe MARMARA
Vox Politique | Par Eric Zemmour
Publié le 24/11/2017 à 06h00
CHRONIQUE - Dans sa pratique du pouvoir, Emmanuel Macron retrouve l'esprit de la Ve République gaullo-pompidolienne. Tout part du chef, élu au suffrage universel ; et le chef, c'est le président de la République.
Alexandre Sanguinetti fut secrétaire général de l'UDR au temps du pompidolisme triomphant dans les années 1970. Lorsqu'on traitait le parti gaulliste (et le groupe à l'Assemblée nationale) de «parti godillot», parce qu'il était soumis sans états d'âme au président de la République, il rétorquait, goguenard: «Le godillot est une très bonne chaussure.» Christophe Castaner devrait faire un tour dans une boutique de chaussures de marche et revisiter les œuvres complètes de Sanguinetti.
Castaner est notre Sanguinetti. Patron d'un parti dont le vrai chef est le président de la République. Désigné par lui et non élu par la base. Refusant tout débat et encore plus tout courant au sein d'un mouvement monolithique. Castaner a réinventé le mouvement gaulliste qui, comme En marche!, réfutait l'appellation de parti.
Macron a tiré les leçons des échecs de ses deux prédécesseurs. Le quinquennat de Hollande a été pourri par la rébellion des frondeurs à l'Assemblée nationale ; et le président de la République n'a jamais pu tomber sa veste de premier secrétaire du PS, soucieux sans cesse de trouver la synthèse entre les différents courants. On a cru que Nicolas Sarkozy était émancipé de ce genre de contrainte. C'était une illusion. Sarkozy était autoritaire dans la forme ; mais il cherchait toujours à rassembler ce qu'on ne pouvait pas rassembler, c'est-à-dire la droite et le centre, liés par des intérêts électoraux au sein de ce monstre partisan que lui avait légué Alain Juppé: l'UMP. Sur l'autel du «rassemblement de la famille», Sarkozy sacrifiera l'esprit de sa campagne de 2007. Et sa réélection.
Il est amusant de voir les élus d'En marche !, pour beaucoup anciens socialistes blanchis sous le harnais du « débat » et de la « participation », défendre la culture du chef qu'ils abhorrent partout ailleurs, à l'école ou dans l'entreprise
Macron retrouve l'esprit de la Ve République gaullo-pompidolienne. Tout part du chef, élu au suffrage universel ; et le chef, c'est le président de la République. Pas de démocratie, pas de débats, pas de courants, pas de clans. C'est le grand retour de la verticalité, de la hiérarchie. De l'ordre. C'est un grand moment réactionnaire dans une époque progressiste vouée au débat et au consensus. Il est amusant de voir les élus d'En marche!, pour beaucoup anciens socialistes blanchis sous le harnais du «débat» et de la «participation», défendre la culture du chef qu'ils abhorrent partout ailleurs, à l'école ou dans l'entreprise. C'est toute l'ambivalence macronienne: un discours moderniste et une pratique archaïque. Un éloge de la participation, de l'ouverture, de la spontanéité ; un gouvernement des meilleurs hyperconcentré.
Macron est fidèle à l'esprit de la Ve République, mais pas à l'esprit de sa campagne. Fidèle à la technostructure d'élite qui l'a formé, pas à la base sociologique de ses électeurs. Ceux-ci sont les cocus de l'histoire Macron, comme les ouvriers furent les cocus du mitterrandisme, et les pieds-noirs, ceux du gaullisme. Mais la société que Macron promeut- société ouverte, égalitaire, liquide, sans hiérarchie ni racines-est le contraire absolu de son mode de gestion politique. Une contradiction majeure qui risque de faire sauter le quinquennat aux premières tempêtes. En Mai 68, Sanguinetti ne défilait pas dans la rue avec les étudiants.
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Paris : des résidents protestent contre la dégradation de leur quartier (24.11.2017)
Les résidents du quartier autour de la salle de shoot veulent des actions de la mairie. Ici, photo d'illustration. - Crédits photo : Jean-Christophe MARMARA/Le Figaro
France | Par Pauline Dumonteil
Publié le 24/11/2017 à 19h00
Drogue, alcoolisme, vols... Diverses associations de riverains du Xe arrondissement appellent à une marche citoyenne pour dénoncer la dégradation de leur environnement. Parmi eux, les résidents du quartier de la salle de shoot, à bout de nerfs.
Les habitants et commerçants des quartiers situés entre les gares du Nord et de l'Est et jusqu'à la Porte Saint-Denis organisent samedi une marche citoyenne en direction de la mairie du Xe arrondissement. Différents collectifs de riverains ont appelé à une marche citoyenne pour exprimer leur «ras-le-bol» face à la dégradation de leurs conditions de vie. En filigrane, c'est aussi l'occasion de protester contre l'installation de la première salle de consommation à moindre risque (SCMR) de France, ouverte dans la controverse il y a plus d'un an. Depuis, les toxicomanes peuvent consommer en toute sécurité dans ce qui est appelé plus communément «la salle de shoot» installée près de l'hôpital Lariboisière et de la gare du Nord. La municipalité se targue d'une «première année positive» mais les habitants du quartier ne décolèrent pas.
Les résidents ont formé le collectif «Riverains Lariboisière-Gare du Nord» au moment de l'installation de la salle de shoot, gérée par l'association Gaïa. Aujourd'hui, il est composé de 150 personnes. Sur les réseaux sociaux, ils dénoncent la saleté des rues, la consommation de drogues sur l'espace public, l'alcoolisme et le trafic engendré par la salle. «Les gens ont déserté le quartier», déplore Pierre, qui habite rue Ambroise Paré en face de l'espace Gaïa. «Les commerçants ferment faute de clients. Pourtant, on est à deux pas de la gare du Nord. Mais les touristes rebroussent vite chemin quand ils voient l'état de notre quartier», ajoute-t-il. Impliqué dans le collectif depuis le début, c'est de sa rue que démarrera la marche citoyenne. Elle finira à la mairie du Xe arrondissement, où la maire, Alexandra Cordebard, en poste depuis à peine plus d'un mois, recevra une délégation.
Dégradation de l'état des rues
«J'invite les habitants à se souvenir de la situation avant l'implantation de la salle».
Alexandra Cordebard, maire du 10e arrondissement
«Je partage le sentiment d'insatisfaction des riverains du nord du Xe quant à l'état global de leur quartier», explique Alexandra Cordebard au Figaro. «Le constat que je ne partage pas avec eux c'est que la situation se dégrade. En fait, elle ne s'améliore pas assez vite. J'invite les habitants à se souvenir de la situation avant l'implantation de la salle», ajoute-t-elle, précisant que c'est pour cette raison que l'espace Gaïa a été implanté dans ce quartier. Thomas Dusouchet, directeur adjoint de l'association Gaïa Paris, travaille dans le quartier depuis 10 ans. «Avant, derrière un muret se trouvait la plus grande salle de consommation de France. Depuis, ce lieu a été condamné, répartissant ainsi la population dans l'espace public. Je pense que c'est la visibilité qui n'est plus la même», affirme-t-il. «En 2015, on dénombrait 2000 toxicomanes. En un an, à la SCMR, 800 personnes différentes se sont présentées. C'est moitié moins», continue-t-il.
Un point de vue non partagé par les riverains. «J'habite ici depuis plus de 20 ans. Certes, ce n'était pas un quartier parfait. Mais maintenant j'ai honte, je n'invite plus mes amis», assure Pierre. «Il y a clairement un avant et un après l'ouverture de la salle», abonde Thierry, un voisin. 165 consommations sont comptabilisées en moyenne chaque jour, selon un bilan réalisé 11 mois après l'ouverture. L'un des objectifs de la salle était de diminuer ces pratiques sur la voie publique. Mais les riverains assurent qu'ils n'en ont jamais vu autant. Ils prennent pour preuve les dizaines de seringues retrouvées dans les rues alentour.
«Il y a toujours trop de seringues à partir du moment où il y en a une seule, je suis d'accord», avoue la maire du Xe arrondissement. «Mais c'est un mensonge de dire qu'il y en a plus». Selon la mairie de Paris, leur nombre a diminué de 60% depuis l'ouverture de la SCMR. L'espace Gaïa ouvre ses portes de 13h30 à 20h30. Des horaires qui correspondent aux besoins des consommateurs, selon un questionnaire réalisé par l'association à la tête de la salle.
«On ne peut pas installer une structure comme celle-ci en plein centre de Paris, dans un lieu résidentiel, au milieu d‘écoles».
Un résident
Les associations de riverains qui marcheront samedi protestent contre l'insécurité qui règne dans leur quartier. Si le trafic de drogue est présent dans toute la capitale, certains affirment que celui dans le Xe est lié à la salle. Car l'association Gaïa fournit aux toxicomanes du matériel stérile mais pas les produits injectés. «Maintenant, il y a de grosses voitures qui stationnent dans nos rues. C'est un point de vente idéal pour les dealers», affirme un membre du collectif de riverain, qui parle aussi des bagarres régulières. La présence policière a été renforcée et pas seulement aux alentours de la salle. 4303 personnes ont fait l'objet d'un contrôle de police, dont 1098 réalisés à proximité de l'espace Gaïa, selon le bilan des 11 mois. «Il n'y a aucune complaisance envers les dealers. Notre lutte contre le trafic de drogue est acharnée», affirme Alexandra Cordebard.
«Je ne suis pas contre cette salle. Ce sont des gens malades, il faut les prendre en charge», affirme un résident. «Mais on ne peut pas installer une structure comme celle-ci en plein centre de Paris, dans un lieu résidentiel, au milieu des écoles». La maire du Xe arrondissement milite pour que soient ouvertes d'autres salles afin de répartir l'offre. «Les personnes qui fréquentent la salle étaient déjà là avant. Un drogué ne fait pas 30 minutes de RER pour prendre sa dose. Il n'y a pas de phénomène de concentration», affirme Thomas Dusouchet de l'association Gaïa.
À la mairie de Paris, on assure que les riverains sont globalement satisfaits de l'espace Gaïa. «Les mécontents sont minoritaires mais très actif sur les réseaux sociaux», ajoute-t-on. «C'est insultant d'entendre la mairie dire qu'on fait une fixette, qu'on doit s'adapter», déplore un riverain. «Dans l'état actuel, qui peut dire, j'ai envie de vivre ici? Personne».
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L'accès à l'électricité, crucial pour le développement des pays les plus pauvres (24.11.2017)
Des élèves font leurs devoirs à la lueur d'une ampoule alimentée par la batterie d'une voiture, au Darfour, dans l'ouest du Soudan, en août. - Crédits photo : Mohamed Nureldin Abdallah/REUTERS
Conjoncture | Par Anne Cheyvialle
Mis à jour le 24/11/2017 à 19h11
INFOGRAPHIE - Jusqu'à 40 milliards de dollars par an sont nécessaires pour électrifier les 47 États les plus démunis, selon l'ONU.
Le défi est de taille. Dans les pays les plus pauvres, 557 millions d'habitants n'ont toujours pas accès à l'électricité, soit 62% de la population et jusqu'à 82% dans les zones rurales. Et plus de deux tiers de la production d'énergie proviennent de sources traditionnelles, bois et déchets végétaux et d'animaux, utilisés pour le chauffage et la cuisine. «Cela nécessite beaucoup d'efforts, d'investissement pour ramasser le bois, et entraîne des problèmes de santé car cette énergie produit des émissions toxiques», souligne Rolf Traeger, expert à l'ONU.
La Conférence des nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) alerte dans un rapport sur l'urgence énergétique comme vecteur de transformation des économies. Dans le monde, environ 1,1 milliard de personnes n'ont pas accès à l'électricité, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), dont 250 millions en Inde, mais le rapport de la Cnuced porte sur les 47 pays les moins avancés (PMA).
Dans les PMA, deux tiers de la ­demande d'énergie provient des ménages, ce qui reflète le sous-développement de l'industrie ou des transports
Pour parvenir à un accès universel «fiable, durable et moderne» d'ici à 2030, l'un des objectifs de développement durable fixé par les Nations unies, il faudrait investir entre 12 et 40 milliards de dollars (entre 10 et 33,5 milliards d'euros) par an dans les seuls PMA. Ces pays, dont 33 sur le continent africain, se définissent selon trois critères: le PIB par habitant (seuil fixé à 1240 dollars), un indice agrégé de capital humain (nutrition, santé, éducation) et le degré de vulnérabilité (aux chocs naturels et économiques). Le taux de pauvreté absolue dépasse 50% dans ces pays.
Dans les PMA, deux tiers de la demande d'énergie provient des ménages (contre 19% dans les pays riches), ce qui reflète le sous-développement de l'industrie ou des transports. «L'approche doit être équilibrée entre les ménages et les entreprises», explique Rolf Traeger, qui insiste sur le cercle vicieux: des défaillances du secteur électrique freinent le développement de l'industrie et de l'entreprise.
Potentiel solaire
Selon les enquêtes, 42% des sociétés identifient le manque d'accès à l'électricité comme l'obstacle majeur à leur activité. Elles subissent dix coupures par mois en moyenne, d'une durée de cinq heures, entraînant une perte de chiffre d'affaires de 7%. Dans certains cas, comme le Malawi ou la République démocratique du Congo, liés au secteur des mines très énergivore, l'impact sur le PIB atteint 6%. D'où l'importance des investissements, souligne le rapport, pour générer de nouvelles activités dans l'agriculture, l'industrie et les services, créer des emplois et des revenus.
Selon les enquêtes, 42% des sociétés identifient le manque d'accès à l'électricité comme l'obstacle majeur à leur activité
«Le secteur privé rechigne souvent à investir sur de grands projets hydroélectriques ou thermiques qui requièrent de grandes masses de capitaux pour un retour sur investissement de trente à cinquante ans», détaille l'économiste. Et ce d'autant plus dans ces zones où le risque géopolitique est élevé, à l'image du Yémen, du Tchad ou de la Somalie. Ils n'y vont qu'accompagnés de l'État national et des grands bailleurs.
Il faut un mix entre investissements étrangers, financement public, marchés de capitaux internes et externes, aide publique au développement -enveloppe annuelle actuelle de 3 milliards jugée trop restreinte- et épargne de la diaspora. L'Éthiopie par exemple a mobilisé les fonds de sa diaspora pour acheter des obligations d'État afin de financer la construction du «barrage de la renaissance».
Pour cette région, essentiellement en zone intertropicale, l'éolien et surtout le solaire ont un énorme potentiel, souligne la Cnuced. Moins coûteux et rentable plus rapidement, le photovoltaïque permet d'électrifier des petites unités. Là encore, il n'y a pas de solution unique; il faut panacher, s'adapter aux conditions locales. L'ONU a fait ses comptes pour un accès universel en 2030: de grandes installations et lignes de transmission couvriraient 322 millions d'habitants, des mini-réseaux desserviraient 341 millions de personnes et des petites solutions locales alimenteraient une population plus isolée et dispersée de 114 millions.

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En Éthiopie, les bergers combattants de la vallée de l'Omo (24.11.2017)

Les pasteurs suris veillent jour et nuit sur leur troupeau, convoité par les prédateurs et les villages ennemis. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
International | Par Julien Harel
Publié le 24/11/2017 à 16h13
REPORTAGE - Pasteurs semi-nomades, les Suris d'Ethiopie entretiennent depuis des siècles leur culture guerrière pour défendre territoire et mode de vie.
Méconnaissable. En quelques semaines, l'environnement des Suris a changé radicalement. Leur territoire dans la vallée de l'Omo, au sud-ouest de l'Ethiopie, s'est transformé en un paysage luxuriant, les arbres et les herbages ont repris une teinte émeraude. La saison des pluies a apporté une relative abondance de nourriture pour le millier de zébus que possède la tribu. Un soulagement après la sécheresse. Une végétation abondante est primordiale pour leur troupeau, surveillé de près par les hommes armés de fusils d'assaut pour se défendre de la convoitise de leurs voisins et ennemis ancestraux, les Mursis et les Nyangatoms. Les Suris sont des éleveurs, mais aussi des guerriers.
Aujourd'hui est un jour particulier. Les bergers abandonnent leur troupeau pour se rendre dans un lieu situé à plusieurs heures de marche par-delà les collines de la vallée de l'Omo. Les anciens ont organisé un donga, combat traditionnel où les guerriers suris de différents villages s'affrontent pour la gloire, la richesse et les faveurs des femmes.
Au donga, les pasteurs deviennent guerriers

Les peintures de guerre suries ont pour but d'impressionner l'adversaire. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
Avant de partir, chacun se taille un bâton d'environ 2 mètres de long dans du bois dur - le plus souvent de l'acacia. Vient ensuite la décoration des corps. Au bord de la rivière, les combattants s'immergent dans l'eau, s'enduisent mutuellement d'argile sur laquelle ils tracent des motifs, entremêlement lignes et courbes qui, en séchant, deviennent de vraies peintures de guerre. Couvert ainsi de la tête au pied, le groupe entame une marche rythmée de chants et de danses pour rejoindre le lieu du combat. Celui-ci est demeuré secret jusqu'au dernier moment: jugés trop violents, les dongas sont officiellement interdits par le gouvernement éthiopien.
Malgré cela, des centaines de Suris sont au rendez-vous. Chaque groupe arbore son drapeau et approche d'un pas lent et provocateur. Il s'agit de montrer sa bravoure et son mépris du danger devant les autres. Surtout devant les femmes présentes. Et pour cause: c'est notamment pour elles que vont se battre les hommes. Les vainqueurs auront en effet le droit de désigner celle qu'ils convoitent pour l'inviter auprès d'eux. Si l'heureuse élue accepte cette attention, elle remet au guerrier un bracelet de perles, signe que portera fièrement son champion.

Au milieu de la mêlée, chaque combattant choisit son adversaire. Lorsque celui-ci est à terre, le duel est terminé. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
Les combats sont une épreuve de force et de bravoure
Mais, avant cela, il faut combattre. Lorsque le coup d'envoi est donné, un grand cercle se forme, les bâtons qui pointent au-dessus des têtes formant une forêt de piques blanches. S'avancent ceux qui veulent s'affronter. Certains sont équipés de protections tressées de couleurs vives pour couvrir les bras, les jambes ou la tête. D'autres n'ont sur leur peau que leurs peintures de guerre. Pour les Suris, moins l'on porte de tissus au combat, plus on est courageux. Et il faut posséder une bonne réserve de bravoure pour endurer la douleur que procurent les coups de bâton.
Au signal, les combats commencent. Au milieu des encouragements de l'assistance, on peut entendre le bruit des bois qui s'entrechoquent et le son mat des coups qui font mouche, laissant des bosses et des marques sanglantes. Heureusement, les règles sont strictes et respectées à la lettre: il est interdit de toucher les organes génitaux ou de frapper un homme à terre. Ce qui n'empêche pas les lésions, plus ou moins graves. Parfois même, la mort d'un combattant.
Pour espérer épouser une femme, il n'en faut pas moins satisfaire aux ­exigences de sa famille, c'est-à-dire payer une dot d'une trentaine de zébus
Cette fois, les Suris reviennent au village au complet, sans blessures importantes. Tant mieux pour les récoltes, car tous les hommes valides doivent aider à rentrer les derniers épis. C'est donc plus loin dans la vallée que se rendent les pasteurs, jusqu'au village de Tawar, où vivent 120 familles (environ 1 100 personnes), dans des huttes de bois et de terre. L'occasion de retrouver ses proches et, pour les hommes mariés, leur épouse.

Le labret, ce plateau incorporé dans la lèvre niférieure, est le signe d'une femme mariée. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
Les femmes suries tiennent un rôle important et jouissent d'une vraie liberté, du moins jusqu'à leur mariage. Avant cela, une jeune femme peut fréquenter le ou les hommes de son choix, en évitant malgré tout la surveillance de ses frères ou de son père. Malheur à l'homme surpris en sa compagnie: il encourt, lui, une bonne correction. Ce qui ne rebute pas les plus téméraires. Pour espérer épouser une femme, il n'en faut pas moins satisfaire aux exigences de sa famille, c'est-à-dire payer une dot d'une trentaine de zébus. L'importance du bétail n'en est que plus évidente.
Une fois mariées, les femmes ne peuvent plus adresser la parole à d'autres hommes que leur mari. Elles arborent désormais un plateau, ce disque de métal incorporé dans la lèvre inférieure, signe de respectabilité. Le labret n'est cependant pas obligatoire pour les épouses: à elles de choisir si elles souhaitent ou non le porter. Les hommes, eux, débattent encore au sujet de l'esthétisme de la chose, les uns l'estimant indispensable pour souligner le rang élevé de leur future épouse, les autres laissant le libre choix à leur dulcinée. «Je ne pense pas que j'en porterai un. J'ai peur de la douleur lorsque la lèvre est percée», confie Nabolochichi, une jeune femme en train de moudre de la farine. A l'aide d'une pierre plate, elle frotte sans relâche les grains, effort réservé aux femmes du village, responsables de la nourriture de leur famille.
Le lien ­entre les hommes et les bêtes sur lesquelles ils veillent est d'une force singulière (...) Là où nous ne voyons qu'un troupeau, eux voient leur vie tout ­entière, leur honneur de guerrier et la richesse de leur lignée
Pour les jeunes hommes qui gardent le bétail dans les enclos, la vie est différente. Au premier abord, la présence d'abris faits de branches et de feuillage suggère que les bergers y dorment. En vérité, ils sont construits pour les veaux. Les Suris, eux, dorment à la belle étoile, sur des peaux de vache disposées à même le sol. Et s'il pleut? Qu'importe, «ce sera comme prendre une douche», lance en souriant, Barkalinia, un jeune berger de 16 ans qui allume le feu au milieu des zébus, pour leur apporter un peu de chaleur durant la nuit.
L'obscurité se teinte à présent de la lueur orangée des brasiers, les mugissements s'éteignent peu à peu tandis que la voie lactée étale sa splendeur. Ce campement éphémère est à la fois le «coffre-fort» de la tribu, puisque chacun y fait garder son bétail, mais aussi un lieu d'éducation et de fraternité. C'est à partir de l'âge de 10 ans que l'on peut espérer accéder à l'endroit où les bergers vivent en permanence. Ici, on apprend à s'occuper des animaux et à combattre pour le donga. On parle des femmes, des traditions, des voisins ennemis. La vie en communauté crée des liens forts entre les jeunes gens qui voient, dans cette vie isolée à plusieurs heures du village, le summum de la liberté.

Le territoire des Suris se situe dans la Région des nations. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
On s'y nourrit du lait des zébus, et parfois de leur sang. Pas question pour autant de tuer une bête pour cela, acte très symbolique réservé aux funérailles d'un membre de la tribu. L'un des bergers se contente de percer une veine du cou grâce à une flèche pendant qu'un autre maintient l'animal, puis récolte l'équivalent d'un litre de sang. Le zébu retourne ensuite au sein du troupeau, légèrement affolé, certes, mais bien vivant, tandis que son sang est offert aux femmes affaiblies qui viennent jusqu'au camp pour boire le liquide sombre.
Le lien entre les hommes et les bêtes sur lesquelles ils veillent est d'une force singulière. Entre eux règnent une harmonie et une profonde bienveillance. Il n'est pas rare de voir une vache témoigner son affection à l'un de ses protecteurs par un coup de langue. Les Suris leur vouent un amour peu commun. Ils les connaissent, les soignent, les débarrassent des tiques qui se fixent sur les pis et sont capables de reconnaître un animal particulier au milieu de centaines de ses semblables. Là où nous ne voyons qu'un troupeau, eux voient leur vie tout entière, leur honneur de guerrier et la richesse de leur lignée.

Pour ces pasteurs, la moindre bête est importante. le troupeau est leur héritage, leur richesse, leur raison de vivre. - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
Pour défendre ce trésor, ils sont armés de vieux fusils d'assaut kalachnikovs. Et, depuis la dernière attaque qu'ils ont subie, leur vigilance a redoublé. En juillet dernier, alors que beaucoup étaient en chemin pour participer à un donga, des Nyangatoms ont attaqué le troupeau, moins bien gardé qu'à l'accoutumée. Surpris, les Suris n'ont eu d'autre choix que d'abandonner et de se mettre à l'abri.
Les Bumes, nom que les Suris donnent aux Nyangatoms, ont emporté avec eux des zébus, couvrant leur fuite par des rafales d'armes automatiques. Les bergers, partis plus tard à la poursuite des voleurs, réussiront finalement à récupérer leurs animaux. Mais cette attaque a laissé une cicatrice encore ouverte dans l'esprit de la tribu. Se faire voler ainsi est une insulte d'autant plus grave qu'une paix avait été négociée quelques mois plus tôt. Certains ne parlent que de se venger des Bumes et de les attaquer à leur tour. Mais d'autres ne sont pas aussi va-t-en-guerre, d'autant que les munitions manquent.
La vallée de l'Omo est aujourd'hui leur dernier refuge
La rivalité tribale traditionnelle n'est pas la seule raison de cette attaque. Les Bumes, dont le territoire se situe à une centaine de kilomètres, ont dû céder une partie de leurs terres au gouvernement éthiopien au nom de l'unification culturelle du pays.
La basse vallée de l'Omo est en effet l'un des derniers refuges pour ces ethnies qui refusent d'abandonner leurs traditions et leurs différents dialectes. Inévitablement, la perte de territoire entraîne un manque de pâturages, de terres cultivables pour le maïs et le sorgho et provoque des tensions pour l'accès aux points d'eau. Les Bumes, à l'est, et les Mursis, à l'ouest, empiètent sur les terres des Suris, favorisant un climat de frictions permanentes où razzias et disputes se multiplient.

Les pasteurs suris veillent jour et nuit sur leur troupeau, convoité par les prédateurs et par les villages ennemis. - Crédits photo : Jean Michel Turpin
Le réchauffement climatique bouleverse les habitudes agricoles
Pour l'heure, les Suris sont relativement épargnés par les programmes du gouvernement. A la différence de leurs voisins, leur territoire n'a pas bougé - du moins en superficie - et leurs bêtes ont toujours de quoi se nourrir. En contrepartie, l'accès à l'éducation pour les enfants est très difficile, aucune infrastructure scolaire n'étant assez proche. Autour de leurs maisons se concentrent les cultures, principalement du maïs et du sorgho, une graminée cultivée en Ethiopie depuis l'Antiquité. Ces plants assurent la subsistance du village, constituant la base de l'alimentation. Les femmes stockent les récoltes dans les greniers des huttes. Pour éloigner les insectes, on allume des feux dans les habitations. En montant jusqu'au grenier, la fumée empêche les nuisibles de venir grignoter les céréales que les femmes transforment en farine.
Cette année, comme les précédentes, la récolte n'est pas très bonne. La grande sécheresse qui sévit dans tout le pays depuis plusieurs saisons ne gorge pas la terre de suffisamment d'eau pour satisfaire tous les plants. Même à cette altitude, l'humidité est bien en deçà de la normale. La faute sans doute au réchauffement climatique, qui bouleverse les habitudes agricoles et complique encore un peu plus les conflits de territoire. Pour cette année en tout cas, le village a engrangé assez de grain pour tenir la famine à l'écart. Mais pas la faim, qui vient si souvent rappeler la fragilité de leur mode de vie traditionnel.

À la télévision

Frédéric Lopez, Kev Adams et son équipe - Crédits photo : Jean Michel TURPIN
Pour la 21e édition de «Rendez-vous en terre inconnue», l'émission aux 5 millions de téléspectateurs, Frédéric Lopez et son équipe ont emmené leur plus jeune invité à ce jour, Kev Adams, à la rencontre des Suris d'Ethiopie. Deux semaines en immersion totale sur les plateaux de l'Omo pour vivre et faire découvrir le quotidien de leurs hôtes.
De la garde du troupeau à la récolte du sorgho, en passant par le spectaculaire donga, le jeune humoriste, d'abord effrayé, se trouvera finalement, avec ces hommes et ces femmes si libres, plus de points communs qu'il n'aurait pu le penser. Une aventure à suivre sur France 2 le 5 décembre prochain.
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Yémen: des centaines de migrants délibérément jetés dans la Mer Rouge (10.08.2017)

Les immigrants affluent massivement au Yémen ces dix dernières années. Ici, un groupe entré illégalement en voie d'expulsion à Aden en 2016. - Crédits photo : SALEH AL-OBEIDI/AFP
International | Par Fanny Laurent
Mis à jour le 10/08/2017 à 22h38
VIDÉO - Dix-neuf migrants africains sont morts après avoir été jetés à la mer par des passeurs au large du Yémen. Ce drame se rajoute à celui de mercredi qui a vu périr cinquante migrants issus de la même région selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Dix-neuf Somaliens et Ethiopiens ont probablement péri noyés au large du Yémen ce jeudi lorsqu'un passeur de migrants a forcé les 180 passagers de son embarcation à se jeter à la mer, rapporte l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
La veille, un premier drame s'est déjà déroulé dans la même zone maritime au large du Yémen, avec environ cinquante victimes dont vingt-neuf avaient été découvertes dans des tombes creusées à la hâte sur la plage. «Les survivants ont dit à nos collègues sur la plage que les passeurs leur avaient demandé de se jeter à la mer après avoir vu ce qui semblait être des représentants des autorités», a indiqué Laurent de Boeck, chef de mission de l'OIM, en parlant de l'incident de jeudi. L'organisation internationale a indiqué travailler étroitement avec le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) pour donner une sépulture aux morts et soigner les survivants.
L'autre route maritime des migrations
Les migrants sont majoritairement issus des pays qui composent la Corne d'Afrique (Éthiopie, Erythrée, Somalie et Djibouti). Ils affluent massivement au Yémen ces dix dernières années alors que c'est un pays pauvre, classé au dernier rang en termes d'IDH au niveau mondial et déchiré par une guerre civile depuis trois ans. Plus de 10.000 morts, une dizaine de pays impliqués, le Yémen est devenu le théâtre de la féroce lutte d'influence entre l'Arabie Saoudite et l'Iran, entre Sunnites et Chiites. Au nord, à Sanaa, se mêlent rebelles houthistes et fidèles de l'ex-président Saleh. Dans le Sud siège un autre gouvernement, reconnu celui-ci par la communauté internationale et par une coalition de pays dirigée par l'Arabie Saoudite. Ces troubles internes font le jeu des groupes terroristes, à commencer par al-Qaida dans la péninsule arabique.
En réalité, ce sont ses voisins, les pays du Golfe plus riches, que les migrants cherchent à tout prix à atteindre pour trouver du travail. Malheureusement, leur voyage s'interrompt généralement au Yémen où ils se retrouvent entassés dans des camps pour une durée indéterminée. L'ONU estime que le pays, où une épidémie de choléra a déjà fait plus de 1.900 morts, est le théâtre de la «plus grave crise humanitaire dans le monde».
Entre 2008 et 2016, plus de 345 000 migrants et demandeurs d'asile sont arrivés au Yémen par la Mer Rouge selon les chiffres du Secrétariat Régional Mixte des Migrations (RMMS). Ils venaient de la ville littorale de Obock, de la République de Djibouti. Plus de 80% d'entre eux étaient éthiopiens, le reste des voyageurs était somaliens et érythréens.
Détroussés et torturés
Les migrants éthiopiens sont particulièrement touchés par ce gigantesque trafic d'êtres humains. Il y a plusieurs étapes à franchir avant d'arriver au Yémen et chacune d'entre elles exige un paiement. «Tout le long du trajet, certains passeurs mentent et augmentent leurs prix. Si les voyageurs n'ont pas assez d'argent pour payer la prochaine étape, ils finissent dans des camps où ils sont généralement détroussés, torturés, voire violés jusqu'à ce que ces passeurs-là soient payés et que les migrants finissent dans les mains d'un autre trafiquant», indique Michael Kirby Smith, photojournaliste qui travaille avec l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch.
«C'est choquant et inhumain. La souffrance des migrants sur cette route est immense. Beaucoup de jeunes gens paient les passeurs avec l'espoir d'avoir une vie meilleure», s'insurge un des responsables de l'OIM.
L'organisme estime à 55.000 le nombre de migrants, dont un tiers de femmes, arrivés au Yémen en provenance de la Corne de l'Afrique depuis le début de l'année. Plus de 30.000 de ces nouveaux migrants n'ont même pas 18 ans.

À voir également: Des gardes-côtes espagnols interceptent un passeur à jet ski.
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Fanny Laurent

La mosquée de Genève licencie 4 Français fichés S (24.11.2017)
Par Le Figaro.fr avec AFP
Mis à jour le 24/11/2017 à 12h41 | Publié le 24/11/2017 à 12h22
La mosquée de Genève a licencié 4 de ses employés fichés S (sûreté de l'Etat) en France, dont deux imams et un agent de sécurité, a rapporté aujourd'hui un média suisse. Le directeur général de la Fondation culturelle islamique de Genève (FCIG) le Saoudien Ahmed Beyari, qui gère la mosquée, «a adressé des lettres de licenciement aux quatre salariés, tous de nationalité française», écrit en une La Tribune de Genève.
«Nous avons licencié quatre employés. Les deux imams fichés S en France, selon les médias, et ayant une autorisation de travail en Suisse. L'employé de la sécurité aussi fiché S en France, selon les médias, et ayant une autorisation de travail en Suisse. Et un quatrième pour une autre raison», déclaré Ahmed Beyari dans les colonnes du quotidien. M. Beyari n'a pas expliqué les raisons de ce licenciement, mais La Tribune affirme que cet employé est également fiché S.
Des enquêtes des médias suisses avaient révélé en 2015 et 2016 que deux des trois imams de la Grande Mosquée étaient fichés S, ainsi qu'un des agents de sécurité. Contactée par l'AFP, la direction de la mosquée n'était pas en mesure de répondre immédiatement aux questions.

Égypte : carnage dans une mosquée du Nord-Sinaï (24.11.2017)

Par Jenna Le Bras
Mis à jour le 24/11/2017 à 23h31 | Publié le 24/11/2017 à 20h01
INFOGRAPHIE - En Égypte, des hommes armés ont attaqué une mosquée en pleine prière du vendredi, faisant plus de 200 morts et 120 blessés.
Le Caire

C'est un carnage, comme l'Égypte n'en avait pas vécu depuis très longtemps. Vendredi, en pleine prière hebdomadaire, la terreur a frappé le petit village de Bir al-Abed, à 40 km d'al-Arish, dans la province du Nord-Sinaï.
Alors que de nombreux fidèles se recueillaient dans ce petit lieu de culte majoritairement fréquenté par la communauté soufie - une branche hétérodoxe de l'islam - plusieurs hommes armés ont encerclé la mosquée avec des 4 × 4 avant d'y poser une bombe puis de tirer sur les survivants qui tentaient de s'échapper.
Le bilan est terrible: vendredi soir, il atteignait 235 morts et plus de 109 blessés. C'est l'attentat le plus meurtier en Egypte depuis l'attentat à la bombe contre un Airbus A321 russe en 2015. Revendiquée par l'Etat islamique, l'attaque avait coûté la vie aux 224 occupants de l'appareil, peu après son décollage de Charm el-Cheikh, une station balnéaire du Sinaï.
Vendredi, les images des corps meurtris des victimes, dissimulés sous des couvertures, étaient diffusées en boucle sur les télévisions égyptiennes dès le début d'après-midi. Le drame a provoqué l'émoi dans le pays: alors que les hôpitaux de la région étaient en alerte maximale pour prendre en charge les blessés, de nombreux Égyptiens se sont pressés dans les centres hospitaliers pour donner leur sang.
Ce n'est pas la première fois qu'un lieu de culte musulman est pris pour cible dans le pays. En 2013 déjà, une explosion avait frappé le sanctuaire d'un cheikh dans le village d'al-Mazar près de Bir al-Abed, où l'attaque de vendredi a eu lieu. L'année dernière, plusieurs religieux avaient également été exécutés par l'EI dans la région, provoquant un exode massif de la communauté soufie de l'autre côté du canal de Suez.
L'ampleur de cet attentat est néanmoins sans précédent. Si celui-ci n'a pas été revendiqué, les soupçons se portent sur Wilayat Sinai, la branche égyptienne de l'organisation de l'État islamique, très active dans le Nord-Sinaï et de plus en plus puissante sur tout le territoire égyptien. «À ce stade, la revendication est devenue une formalité», explique Oded Berkovitz, directeur régional du renseignement et analyste pour MAX Security. «Jusqu'à présent, Wilayat Sinai évitait d'infliger des pertes massives aux civils musulmans en Égypte et se singularisait à ce titre d'autres groupes, mais il a néanmoins pour cible privilégiée la communauté soufie qu'elle considère comme apostate et idolâtre, ainsi que les civils suspectés de coopérer avec le régime égyptien et l'armée. Il y a donc peu de doutes sur l'origine de cette attaque», note-t-il.
Le gouvernement égyptien a néanmoins décrété un deuil national de trois jours
Autre ennemi prioritaire de l'EI, mais aussi de l'ensemble des groupes terroristes présents dans cette zone: les forces de sécurités égyptiennes. C'est donc d'une pierre deux coups pour les responsables de cette attaque, alors que, ce vendredi, des fidèles mais aussi de nombreux conscrits étaient présents dans la mosquée au moment de l'assaut. «En l'absence d'information claire il est difficile d'établir la cause exacte du choix de ce lieu, mais il est vraisemblable que ce soit une combinaison de ces deux paramètres», estime l'analyste.
Autre raison probable du choix de cette cible: l'annonce, l'été dernier, de plusieurs tribus bédouines puissantes (les Tarabins et les Sawarkas) de leur intention de collaborer avec les autorités égyptiennes pour combattre le terrorisme. Un ralliement que militants extrémistes et petits trafiquants avec la bande de Gaza toute proche avaient peu goûté.
De son côté, le gouvernement égyptien a néanmoins décrété un deuil national de trois jours. Le président Abdel Fattah al-Sissi a également présidé en urgence une réunion à huis clos à laquelle ont assisté ses ministres de la Défense et de l'Intérieur et les chefs des services de renseignements généraux et militaires. Il a promis de répondre avec une «force brutale» à l'attaque. «Les forces armées et la police vengeront nos martyrs et ramèneront la sécurité et la stabilité avec force très prochainement», a-t-il déclaré lors d'un discours télévisé très ferme. Le passage frontalier entre l'Egypte et la bande de Gaza, qui devait rouvrir samedi, restera fermé jusqu'à nouvel ordre, a indiqué un responsable palestinien.
Sur les réseaux sociaux, mais aussi à la télévision égyptienne, les critiques contre le régime actuel, accusé d'être inefficace et dépassé, se font d'ailleurs de plus en plus vives. Mais certains commentateurs pro-régime n'ont pas hésité à défendre les autorités en affirmant que «la zone attaquée est moins fournie en forces de sécurité que d'autres zones de la région» car «beaucoup plus loin d'al-Arish que ce que les médias déclarent.»

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Cinq effets bénéfiques du café pour la santé (12.07.2017)

  • Mis à jour le 23/11/2017 à 11:07 

  • Publié le 12/07/2017 à 11:10
Boire trois à quatre cafés par jour réduit les risques de morts précoces et permet de prévenir certaines maladies.
Long ou serré, le café est bon pour la santé! C’est ce que révèle une étude menée à l’université de Southampton sous la direction de Robin Pool, spécialiste de santé publique, publiée mercredi 22 novembre dans la revue British Medical Journal. Elle compile les résultats de plus de 200 études précédentes (méta-analyse). Les scientifiques recommandent de boire trois à quatre tasses de café par jour (sauf pour les femmes enceintes ou les individus sujets aux fractures), pour réduire les risques de diabètes, de maladies du foie, de démence, voire de la survenance certains cancers.
Cette publication n’est pas la première à démontrer les influences bénéfiques du café. Depuis une dizaine d’années de nombreuses études ont confirmé les effets positifs du café sûr, entre autres, la prévention du cancer ou des maladies cardio-vasculaires.
● Vivre plus longtemps
Une étude américaine publiée le 11 juillet 2017 révélait que les personnes qui buvaient une tasse de café par jour avaient un risque réduit de 12% de décéder pendant la durée de l’étude par rapport à celles n’en buvant pas, un niveau qui a atteint 18% pour celles consommant trois tasses par jour. Les causes des décès avaient été pondérés en fonction du tabagisme et d’autres facteurs confondants.
Même constat pour une étude européenne, publiée en même temps que l’étude américaine. En analysant les données de 520.000 participants de plus de 35 ans pendant 16 ans, les chercheurs arrivent également à la conclusion que les consommateurs d’environ trois tasses de café par jour, y compris décaféiné, semblent jouir d’une plus longue espérance de vie que ceux qui n’en boivent pas.
Pour le professeur Elio Riboli, chef de la faculté de santé publique de l’Imperial College à Londres qui a participé à ces travaux: «Bien que davantage de recherches soient nécessaires, nous pouvons dire que les résultats de cette grande étude européenne confirment les conclusions de précédentes recherches dans le monde.»
● Prévenir le cancer
La consommation modérée de café (3 à 4 tasses par jour) protège contre le développement de nombreux cancers. «Globalement, les effets du café divergent selon les cancers. Dans certains cas, le café n’a aucun effet, mais dans d’autres, il est protecteur. Il n’y a pas de cas où le café est un facteur aggravant le risque de développer un cancer», explique le Dr Astrid Nehlig, directrice de recherche à l’Inserm et auteur du livre «Café et santé, tout sur les multiples vertus de ce breuvage».
Dans une étude publiée en 2011 dans Cancer Epidemiology, Biomarkers & Prevention, par exemple, des chercheurs d’Harvard affirment que boire 4 tasses ou plus de café par jour est lié à une réduction de risque de 25% de développer un cancer de l’endomètre. Boire entre 2 et 3 tasses par jour réduit ce risque de 7%. De même, en 2013, l’Association américaine de gastro-entérologie soulignait que 3 tasses de café par jour réduisent de moitié le risque de développer un cancer du foie.
De nombreux autres cancers ont fait l’objet d’études similaires et le café réduit le risque de développer un cancer du sein, de la prostate, du pancréas, de la peau, etc.
● Réduire les maladies cardio-vasculaires
«Dès la première tasse, il y a également une légère réduction du risque de développer des problèmes cardiovasculaires. Et cet effet est avéré entre 3 et 5 tasses par jour», explique le Dr Nehlig. Dans l’étude publiée par la revue Annals of Internal Medicine, menée aux États-Unis sur plus de 185.000 adultes, les auteurs ont constaté un lien entre une plus grande consommation de café et un risque plus faible de mortalité résultant d’une maladie cardio-vasculaire, telle qu’un infarctus ou un arrêt cardiaque.
● Moins de diabète de type II
Le café, consommé cette fois en grande quantité, a aussi des bienfaits sur le diabète de type 2. Une méta-analyse publiée en 2014 dans Diabetes Care et portant sur plus d’un million de participants, concluait que «consommer 6 tasses par jour était associé à une diminution d’un tiers du risque de développer un diabète de type 2.» En fonction du métabolisme de chacun, il est cependant recommandé de ne pas dépasser 4 tasses quotidiennes (environ 400 mg de café par jour) et même une consommation peu élevée de café, de 2 tasses par jour, réduit déjà le risque de développer un diabète de type 2.
● Lutter contre les maladies neurodégénératives
Enfin, des études ont montré les effets positifs sur des maladies du vieillissement, comme Parkinson ou Alzheimer. Un article publié en 2010, comparant les résultats de 26 études, indique que les buveurs de café ont moins de risques de développer un Parkinson que les non-buveurs. Plus la consommation est importante, moins les symptômes (tremblements, rigidité musculaire etc.) seront étendus.
La protection contre les maladies neurodégénératives serait attribuable à la caféine. À l’inverse de la protection contre les autres pathologies, souvent liée à l’action des antioxydants. «Très schématiquement, la caféine va avoir des effets positifs sur toutes les maladies liées au cerveau (comme Alzheimer ou Parkinson) et les antioxydants seront bénéfiques pour quasiment tous les autres organes, surtout dans les cas de cancers», conclut le Dr Astrid Nehlig.
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Le sommeil, un enjeu de santé méconnu (24.11.2017)


Par Cyrille Vanlerberghe. Mis à jour le 24/11/2017. Publié le 24/11/2017 à 19:10.
Le Pr Pierre Philip présente dimanche au Forum du CNRS à Paris les dernières connaissances sur le repos, et son importance cruciale pour le bon fonctionnement de notre organisme.
Votre médecin généraliste vous a-t-il déjà prescrit de bonnes nuits, avec au moins huit heures de sommeil? À l’heure où les campagnes de santé publique insistent autant sur l’importance d’une bonne hygiène de vie, avec une alimentation équilibrée («au moins 5 fruits et légumes par jour») et une activité physique régulière («au moins 10.000 pas par jour»), le sommeil mériterait d’avoir aussi sa place dans les politiques publiques de prévention.
Car les recherches modernes en neurobiologie sur le sommeil montrent son importance, pour le bon fonctionnement de notre cerveau, mais aussi pour celui du reste du corps. «On se rend compte depuis quelques années à quel point le sommeil a un rôle crucial pour de nombreuses fonctions biologiques de l’organisme, jusqu’à jouer sur l’efficacité du système immunitaire», explique le Pr Pierre Philip, directeur de l’unité de recherche sommeil, addiction et neuropsychiatrie à Bordeaux (CNRS/Université de Bordeaux*). Les effets du repos pour notre cerveau, et notamment pour l’apprentissage et la mémorisation, sont désormais des phénomènes bien connus. «Le sommeil lent profond consolide les souvenirs d’actions récentes, comme ce que j’ai fait cette semaine, alors que le sommeil paradoxal est plus lié aux émotions et consolidera plutôt le souvenir que j’ai du baiser de ma première fiancée», rappelle le Pr Philip. Des phénomènes parfaitement identifiés et localisés dans le cerveau en temps réel grâce notamment aux techniques d’IRM fonctionnelles.
De nombreux problèmes de santé
Les effets de la phase de repos nocturne sur le fonctionnement du corps sont complexes, mais il est désormais incontestable qu’elle a un rôle protecteur contre l’inflammation, qui peut être à l’origine de nombreux problèmes de santé. Pendant la nuit, la mise en veille de notre cerveau active des processus biologiques qui aident à faire le ménage dans les cellules de l’organisme, notamment en permettant d’éliminer des protéines qui sont à l’origine de l’inflammation, un phénomène de réponse de l’organisme qui peut être lié à des risques accrus d’obésité, de maladies cardio-vasculaires ou de maladies auto-immunes. En cas de déficit de sommeil, le «nettoyage» des cellules est moins efficace, et les risques pour la santé peuvent devenir réels.
«Le sommeil doit clairement devenir un enjeu de santé publique pour les autorités»
Pr Pierre Philip, directeur de l’unité de recherche sommeil, addiction et neuropsychiatrie à Bordeaux
De manière assez logique, les troubles du sommeil peuvent aussi avoir des effets néfastes sur le cerveau lui-même. «On remarque des atteintes spécifiques du sommeil chez des patients souffrant de troubles cognitifs légers, la phase qui précède des démences plus sévères», explique le Pr Philip.
«Le sommeil doit clairement devenir un enjeu de santé publique pour les autorités, plaide le spécialiste bordelais. Et c’est un enjeu d’autant plus important qu’on voit dans nos études que les Français dorment de moins en moins longtemps.» À cause des écrans et autres distractions, la durée du sommeil a diminué en moyenne de 1 heure et 15 minutes en quinze ans dans notre pays. Une dette qui n’est pas sans conséquence pour l’état de santé.
* Le Pr Philip fera le point sur les connaissances sur le sommeil au Forum du CNRS, dimanche 26 novembre à la Cité universitaire, à Paris. Une manifestation dont Le Figaro est partenaire.
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Astéroïdes, Lune, Mars... les start-up à l'assaut des ressources minières de l'espace (24.11.2017)

Par Tristan Vey
Publié le 24/11/2017 à 19h53
FOCUS - La poursuite de la conquête spatiale passera par la mise en valeur des ressources sur les planètes ou sur des astéroïdes. Les projets fusent.
Envoyé spécial à Luxembourg
Si l'être humain veut conquérir l'espace, il n'aura pas d'autre choix que d'en exploiter les ressources. Ce constat se fonde sur une équation simple: envoyer un litre d'eau à bord de la Station spatiale internationale, à 400 km d'altitude, coûte aujourd'hui 10.000 euros environ. Sur la Lune, la bouteille dépasse déjà le million. On ose à peine imaginer le prix de la gorgée à la surface de Mars… Si les agences spatiales souhaitent établir des bases sur ces astres, il faudra donc trouver une solution pour limiter au maximum les ravitaillements depuis la Terre.
Qu'elles soient attirées par l'appât du gain ou leur rêve de voir l'humanité coloniser le Système solaire, plusieurs entreprises ont d'ores et déjà commencé à se pencher très sérieusement sur ce marché prometteur. S'inspirant du droit de la haute mer, les États-Unis ont légiféré fin 2015 afin d'autoriser les entreprises américaines à s'arroger le droit de propriété des ressources qu'elles extrairaient dans l'espace, sur un astéroïde ou sur la Lune, sans pour autant s'approprier le lieu d'extraction (ce qui serait contraire au droit international, lire ci-dessus).
Le Grand-Duché spatial
Avec malice, le Luxembourg s'est doté d'un cadre juridique similaire cet été, mais ouvert aux entreprises du monde entier. Il suffit que les entreprises justifient d'une partie de leur activité sur son sol pour bénéficier de cette protection. Deux des principaux acteurs de ce secteur émergent, le japonais iSpace et l'américain Planetary Resources, ont par exemple été séduits, créant une émulation très attractive pour de nombreuses start-up, présentes lors de la première conférence NewSpace organisée la semaine passée dans le Grand-Duché.

Composés notamment de fer, de nickel ou de silicate, les fragments d'astéroïdes sont convoités par les scientifiques. - Crédits photo : NASA/JPL-Caltech
«Ce type de loi est très important pour rassurer les investisseurs potentiels», appuie Peter Marquez, vice-président de Planetary Resources qui emploie déjà plus d'une soixantaine de personnes dans le monde. «Nous avons quatre personnes au Luxembourg, mais nous espérons qu'elles seront 40 à 50 en 2020. Nous pensons effectuer notre première extraction opérationnelle sous pavillon luxembourgeois d'ici à une dizaine d'années. Nous n'avons pas de montant exact mais nous pensons que cela correspond à un investissement d'un milliard environ. Ce sont des montants et des durées assez courants dans le monde de l'industrie minière.»
Avant d'en arriver là, l'entreprise doit franchir plusieurs paliers. Un démonstrateur sera envoyé en orbite basse par un lanceur indien dans les semaines à venir pour tester la technologie radar nécessaire à la cartographie des ressources en eau. L'entreprise espère envoyer une première constellation de six satellites dès 2020. Six astéroïdes doivent être visités par la flotte, consécutivement, jusqu'en 2023 pour établir une carte de leurs ressources.
Carburant extraterrestre
«Ce type de données pourrait d'ailleurs représenter le premier réel débouché pour toutes ces sociétés», anticipe Jean-Jacques Dordain, ex-directeur de l'Agence spatiale européenne (ESA) qui conseille aujourd'hui le Luxembourg sur ce dossier. L'entreprise japonaise iSpace (40 employés, 5  au Luxembourg) fait un pari similaire, mais sur la Lune. «Nous pensons envoyer ces prochaines années une centaine de petits rovers pour cartographier les zones les plus viables sur le plan économique», détaille son fondateur, Takeshi Hakamada.
Un premier éclaireur doit partir dès cet hiver, à bord d'une fusée indienne également. S'il parvient à se poser, à rouler 500 mètres et à transmettre des images haute définition, il pourrait déjà empocher le prix de 20 millions de dollars mis en jeu dans le cadre du Google Lunar X Prize. «Mais nous n'avons pas besoin de cet argent», assure le jeune entrepreneur. «Si nous arrivons à démontrer nos capacités d'extraction, les gouvernements suivront. La priorité, c'est l'eau. Sans cela, l'humanité ne pourra jamais coloniser l'espace.»

Un astronaute se prépareà en prélèver un échantillon. (vue d'artiste et image de synthèse). - Crédits photo : NASA
Pour le moment, il faut bien le dire, le marché est inexistant. Mais le jeune homme peut compter sur un allié de circonstance: le directeur de l'ESA, Jan Woerner. Ce dernier défend avec ferveur un vaste projet international de village lunaire. «Ce n'est pas un rêve, cela va devenir une réalité et beaucoup plus vite que vous ne l'imaginez», assure-t-il. «Nous devons changer de paradigme.» L'objectif est de réunir entreprises privées, ONG, universités et gouvernements du monde entier au sein d'un grand projet collaboratif «ouvert» sans budget fixe, ni programmation définie - une première dans l'histoire spatiale.
Les futurs mineurs de l'espace espèrent voir mûrir dans la décennie un second marché. Il pourrait en effet être plus économique pour les grandes agences spatiales de remplir les réservoirs de leurs sondes en orbite avec l'hydrogène ou l'oxygène liquide obtenu à partir d'eau extraterrestre que de les faire décoller avec tout leur combustible. Un scénario par exemple évoqué par United Launch Alliance pour se rendre sur Mars. La stratégie envisagée par le fondateur de SpaceX, Elon Musk, pour envoyer ses vaisseaux hypothétiques vers la planète rouge pourrait bénéficier de tels ravitaillements spatiaux. De même que les satellites dont la durée de vie pourrait ainsi être prolongée. C'est peut-être d'ailleurs à cette seule condition que l'espace pourrait vraiment devenir le théâtre d'une «ruée vers l'eau».

● L'eau, nouvel or bleu

- Crédits photo : 69293444/foto_images - stock.adobe.com
L'eau est la ressource prioritaire. Omniprésente à des concentrations diverses sur la Lune et dans les astéroïdes, elle est indispensable à la survie de futurs colons, que ce soit pour boire ou irriguer d'éventuelles cultures. Son électrolyse, en utilisant l'énergie solaire par exemple, permettrait aussi de fournir de l'hydrogène et de l'oxygène. De quoi respirer mais aussi alimenter en combustible les vaisseaux spatiaux qui se rendront vers Mars ou plus loin dans le Système solaire. Ce marché du ravitaillement pourrait d'ailleurs être le premier débouché des pionniers de cette industrie. Il sera vraisemblablement plus économique de faire le plein en orbite terrestre que de décoller avec les réservoirs remplis.
● Un nouvel âge du fer

- Crédits photo : LEVENT KONUK/uwimages - stock.adobe.com
Les astéroïdes sont riches en métaux communs, à commencer par le fer et le nickel. Pour s'établir dans «outre-Terre», l'homme pourrait utiliser ces matières premières pour réaliser de grandes structures en utilisant des techniques d'impression 3D. Cette technologie pourrait aussi être déployée sur la Lune pour construire des bâtiments à partir de matériaux locaux.
● De l'hélium-3 à profusion

- Crédits photo : igor terekhov/terex - stock.adobe.com
Très abondant dans l'Univers et sur la Lune, l'hélium-3 est quasi absent sur Terre. Ce serait pourtant un carburant de choix pour la fusion nucléaire. Il faudrait néanmoins pouvoir le ramener sur Terre à moindre coût. Tout en espérant que les technologies de fusion nucléaire, encore loin d'être maîtrisées, arrivent à maturité. Ce gaz reste donc à court et moyen terme un marché très hypothétique.
● Le platine pas si rare

- Crédits photo : Bjoern Wylezich/Björn Wylezich - stock.adobe.com
Les astéroïdes regorgent de platine, un métal noble en phase d'épuisement sur Terre, mais abondamment utilisé dans les pots catalytiques par exemple. Ils contiennent également des «terres rares», des métaux plus précieux encore, omniprésents dans les nouvelles technologies (ordinateurs, smartphones). Leur extraction s'annonce très complexe et coûteuse.

Le droit international contourné
L'article 2 du traité de l'ONU sur l'espace de 1967 stipule très clairement que «l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, ne peut faire l'objet d'appropriation nationale par proclamation de souveraineté, ni par voie d'utilisation ou d'occupation, ni par aucun autre moyen». C'est ce texte que les législations américaine et luxembourgeoise tentent de contourner en prenant exemple sur la haute mer: les pêcheurs ont le droit de s'approprier le poisson remonté dans les eaux internationales. Cette interprétation unilatérale du droit international par les deux États est controversée.

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Nicolas Bouzou: «L'Europe peut rater la révolution de l'espace» (24.11.2017)
Par Jacques-Olivier Martin
Publié le 24/11/2017 à 10h00
INTERVIEW VIDÉO - Invité du «Grand Témoin-Le Figaro», l'économiste explique que les ressources extraterrestres attisent les convoitises. L'économie de l'espace est promise à un très fort développement.
Que représente aujourd'hui l'économie de l'espace?
Il existe deux espaces. L'un est public, c'est l'espace de la conquête spatiale, avec par exemple Thomas Pesquet qui s'installe pendant six mois dans la station spatiale ISS. L'autre, privé, est déjà bien réel. Il est incarné principalement par les satellites aux très nombreuses applications qu'il s'agisse de la télévision, du téléphone, de l'Internet, la météo, le GPS et bien d'autres domaines encore que l'on ne soupçonne pas forcément. L'agriculture de précision est un bon exemple: l'analyse des cultures est réalisée par des images satellites. En quelques chiffres, l'économie privée de l'espace représente à peu près 250 milliards d'euros de chiffre d'affaires, soit trois fois plus que les budgets publics. Cet écart va rapidement se creuser.
Pourquoi?
Parce que l'environnement de l'espace est en plein bouleversement. Dans son fonctionnement tout d'abord. Au milieu des années 1990, insatisfaite du programme de la navette spatiale extrêmement coûteux et peu efficace, la Nasa a changé son approche et a décidé de contracter avec des entreprises privées en matière de lanceurs notamment. Ce changement a ouvert la porte au privé et a permis l'émergence de Space X, la société d'Elon Musk. Le deuxième choc est technologique. Les nouvelles entreprises du spatial accélèrent l'innovation dans un domaine qui a longtemps privilégié l'efficacité au changement. Ne perdons pas de vue que Thomas Pesquet est parti vers l'ISS dans une capsule Soyouz, un engin qui a assez peu évolué depuis un demi-siècle. Musk a osé rompre et faire le pari d'un lanceur réutilisable. Beaucoup ont souri, il est pourtant en passe de relever ce défi technologique aux conséquences économiques très importantes: la réduction du prix de l'accès à l'espace. Ces dernières années, nous assistons également à la diminution de la taille des satellites, synonyme là encore de baisse des coûts et de démocratisation de l'économie spatiale.
«Aux États-Unis, les sociétés de capital-risque investissent des milliards de dollars dans des start-up qui travaillent sur la conquête de l'espace.»
Nicolas Bouzou
Faut-il croire à l'exploitation des ressources de l'espace?
L'avantage de l'espace est qu'il est infini. De fait les entrepreneurs de la Silicon Valley sont nombreux à penser qu'il est normal de vouloir exploiter les ressources de l'espace. L'écosystème permettant de passer du rêve à la réalité se met en place. Aux États-Unis, les sociétés de capital-risque investissent des milliards de dollars dans des start-up qui travaillent sur la conquête de l'espace. Jeff Bezos apporte un milliard chaque année à sa société spatiale Blue Origin. Sur quoi travaillent-ils? L'hélium 3, une source d'énergie présente sur la lune qui a l'avantage de ne pas polluer, attise les convoitises. Certaines start-up envisagent d'exploiter les matières rares des astéroïdes. À 10 ou 20 ans, ces projets fous pourraient devenir réalité. Grâce à l'intelligence artificielle, les robots seront plus performants et partiront exploiter l'espace, bâtiront des habitations extraterrestres. L'homme ne viendra s'y installer que dans un second temps.
Pourquoi l'installation sur Mars attise autant les convoitises?
L'homme est déjà allé sur la lune, un satellite qui n'est qu'un morceau de terre difficilement habitable. Mars, c'est tout autre chose. Son potentiel semble considérable. C'est une autre terre totalement inconnue sur laquelle il y a eu de l'eau et donc potentiellement plus adaptée à une conquête durable. Après soyons réalistes, cette conquête est freinée par le coût vertigineux d'une implantation durable et son éloignement qui aujourd'hui permet difficilement d'envisager un retour sur Terre. Au passage, cette conquête éloignera l'homme de la Terre et répondra à une question fondamentale: que sommes-nous profondément, plutôt des terriens attachés à leur planète, ou plutôt des humains? Elon Musk fait le pari que nous sommes plutôt des humains capables de nous arracher à nos origines. L'homme il est vrai a de tout temps lutté contre les deux déterminismes que sont le temps et l'espace, en investissant beaucoup dans la santé et dans le transport pour s'affranchir de l'idée qu'il est mortel et de pouvoir quitter la Terre. C'est pour cela que la conquête spatiale nous fascine tant.
Musk assure pouvoir habiter Mars avant la fin de la prochaine décennie. Qu'en pensez-vous?
(Rire) Pour nous sensibiliser à des projets fous, Elon Musk a tendance à se tromper sur le calendrier. C'est bien normal.
«L'Europe a un système spatial soviétique, condamné à plus ou moins longue échéance.»
Nicolas Bouzou
Nasa, Musk, start-up américaines… L'Europe serait-elle la grande absente de cette révolution annoncée?
L'Europe peut rater la révolution de l'espace. Elle a longtemps méprisé Musk et Space X et a acquis un retard en matière d'innovation et de fonctionnement. Il est temps de changer d'approche. À vouloir une fiabilité à 100%, on se coupe des innovations disruptives et de baisse des coûts d'accès à l'espace. Avec le projet Ariane 6, cela devrait changer. Mais, il faut aller plus loin. À l'instar de la Nasa, que l'Agence spatiale européenne devienne un acheteur et fasse jouer la concurrence très créative et disruptive. Nous devons bâtir un écosystème comparable à celui de la Silicon Valley qui associe recherche, nouvelles technologies et capital-investissement. L'Europe a un système spatial soviétique, condamné à plus ou moins longue échéance.
Face à de telles perspectives économiques, faut-il réglementer l'espace?
Dans la tradition de John Locke, je considère qu'il faudra mettre en place des droits de propriété. Que celui qui s'installe sur un astéroïde et décide de l'exploiter en ait la propriété, comme ce fut le cas lors de la conquête de l'Ouest américain. Il est nécessaire qu'une autorité s'empare du sujet, assure la gouvernance et édicte des règles. Mais je n'en fais pas un préalable au développement économique de l'espace. L'absence de règles ne freine pas actuellement le développement de l'économie de l'espace.
Doit-on redouter que l'enjeu économique attise les tensions entre États?
C'est un peu tôt pour le dire, mais là encore je veux être confiant. L'espace est grand, infini et donc sans frontières, ce qui réduit le risque de conflits.
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Anne-Sophie Letac : «M. le président, ne sacrifiez pas les lycées français de l'étranger !» (24.11.2017)

Par Anne-Sophie Letac
Publié le 24/11/2017 à 17h29
TRIBUNE - L'agrégée d'histoire déplore les coupes budgétaires visant l'enseignement français de l'étranger, vecteur du rayonnement de l'excellence française.
Emmanuel Macron semble entretenir un lien particulier avec le vicomte François-René de Chateaubriand, ou du moins croiser régulièrement la route de celui-ci. Avant que son épouse Brigitte n'entretienne des conversations vespérales avec Stéphane Bern sur le sujet de savoir comment faire aimer le héraut du romantisme dans les collèges, Laurent Fabius citait déjà Chateaubriand dans son discours de passation de pouvoir de mai 2017 lorsqu'il affirmait: «Pour être l'homme de son pays, il faut être l'homme de son temps» et rattachait aussitôt le jeune président à la lignée des hommes de leur temps par ses choix, sa formation, son parcours et son état civil.
Durant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait lui-même vanté l'excellence de l'enseignement français à l'étranger en citant en exemple deux joyaux de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (Aefe), les prestigieux lycées Charles-de-Gaulle à Londres et… Chateaubriand à Rome, ce qui avait certainement contribué à lui assurer une large majorité de voix auprès des Français de l'étranger aux élections présidentielle et législatives.
La suppression de 33 millions d'euros de crédit de l'Aefe pour l'exercice 2017 va entraîner la disparition de 180 postes de professeurs résidents
Dans un discours du 2 octobre 2017, le président confirmait: «La France est un pays qui porte l'universalité dans ses gènes, qui ne se comprend, ne s'explique, n'est à hauteur de son Histoire et de son destin que lorsqu'elle se vit justement au contact du reste du monde. À ce titre, les Françaises et Français de l'étranger participent de ce destin français.» Dans le même discours, il affirmait comprendre «le souci majeur de nos compatriotes de l'étranger d'offrir à leurs enfants un enseignement de qualité qui conserve un lien fort avec la France», et insistait à juste titre sur un point crucial: le fait que la «capacité de rayonner, l'attractivité de la France, notre capacité à faire des affaires ou des échanges culturels» soient assurées par un réseau d'enseignement Aefe de qualité qui attire les enfants étrangers dans les lycées français.
Si le discours d'Emmanuel Macron possède toutes les caractéristiques du romantisme - engagement politique, lyrisme, goût pour le rêve, et recherche de la couleur locale -, on peut craindre qu'il n'en adopte aussi les aspects plus sombres, la fascination pour les ruines et le caractère échevelé. En effet, le lyrisme se brise en retombant sur une dure réalité, celle de la suppression de 33 millions d'euros de crédit de l'Aefe pour l'exercice 2017, le président ayant promis de maintenir le budget après 2018, ce qui signifie en conserver les coupes sombres. Ceci entraîne la suppression de 180 postes de professeurs résidents pour 2018 dans les 492 établissements du réseau français, et de lourdes menaces pour les années suivantes. Au lycée Chateaubriand de Rome, certains professeurs chevronnés perdent déjà leur poste.
Pour 33 millions d'économie, autrement dit pour un plat de lentilles loin de compenser l'exonération des yachts de l'ISF, on déséquilibre un système d'excellence qui fonctionne parfaitement
Certes, le Français de l'étranger est vu comme un privilégié affligé de problèmes de riches. Or, le Français de l'étranger, c'est aussi le professeur français qui parle plusieurs langues, qui a pris le risque de quitter un relatif confort pour s'expatrier avec les difficultés familiales qui en découlent, qui reçoit un traitement de résident et non plus d'expatrié, autrefois lucratif mais en voie de disparition, et qui scolarise ses enfants à ses propres frais, alourdis d'année en année, dans les lycées français, bref, qui s'installe dans un pays en prenant un engagement personnel.
Pour 33 millions d'économie, autrement dit pour un plat de lentilles loin de compenser l'exonération des yachts de l'ISF, on déséquilibre un système d'excellence qui fonctionne parfaitement. Ce plan social déguisé, cette braderie coûtera bien plus cher qu'elle ne rapporte au rayonnement français, à l'efficacité de l'État, très cher aussi à l'image européenne de la France, les lycées français créant de remarquables cultures bilatérales franco-italiennes, espagnoles ou britanniques.
Pire, on introduit au ministère des Affaires étrangères dont dépend l'Aefe les défauts de la culture de l'Éducation nationale, l'idée que les «profs» sont interchangeables. On remplace les résidents par des contrats locaux peu payés par le pays d'accueil - un peu plus du smic en Italie, par exemple - qui feront fuir les professeurs français, sans aucun gage sur la formation intellectuelle des futures recrues, sans certitude même qu'elles parlent français. Rappelons enfin qu'un professeur de lycée français à l'étranger bénéficie d'une reconnaissance pour son travail, d'un certain prestige qui stimule sa motivation. Les coupes budgétaires et les départs de professeurs non renouvelés sont un signal profondément négatif et régressif alors que le système éducatif français a plus que jamais besoin de signaux positifs et encourageants.
À la fin de son discours du 2 octobre, le chef de l'État suggère «le développement de solutions innovantes» comme les Mooc, enseignement numérique à distance, mais ceux-ci ne remplaceront jamais la présence française à l'étranger. Le vrai courage serait d'écouter Chateaubriand lorsqu'il dit: «Le péril s'évanouit lorsqu'on ose le regarder», et d'empêcher concrètement et positivement que le rayonnement français ne relève un jour des Mémoires d'outre-tombe.

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Natacha Polony : «Non-mixité, le racisme facturé au contribuable» (24.11.2017)

Par Natacha Polony
Publié le 24/11/2017 à 16h45
CHRONIQUE - La proposition par SUD-éducation 93 de séparer, lors d'un stage, les enseignants blancs des «racisés» est un crachat à la démocratie, qui plus est payé par les citoyens, condamne notre chroniqueuse.
Quel est le rôle d'un professeur, fonctionnaire de la République? Cette question en apparence anodine peut devenir vertigineuse si l'on met en regard la lettre envoyée par Jules Ferry le 27 novembre 1883 à tous les instituteurs de France, expliquant à ces hommes que leur «honneur» sera d'avoir formé des gens honnêtes, ayant le goût de l'effort et le respect d'autrui, et le programme du stage proposé les 18 et 19 décembre prochain par le syndicat SUD-éducation 93, avec ateliers «en non-mixité» (interdits aux Blancs, donc) pour partager l'expérience de discrimination des «personnes racisées» et réflexions sur le «racisme systémique» et la «vision coloniale» de l'institution scolaire.
Le ministre de l'Éducation nationale a annoncé avoir porté plainte pour diffamation, au titre de l'article 40 du Code de procédure pénale, qui permet à un «officier public ou fonctionnaire» de dénoncer un délit constaté dans le cadre de ses fonctions. Le choix de la procédure n'est pas anodin. Il met l'accent sur le fait que les gens qui organisent ce genre de stage sont des fonctionnaires. Mieux, ils le font dans le cadre du droit à la formation des professeurs, qui viennent donc assister à ces réunions sur le temps scolaire, au frais du contribuable.
La question se pose : un fonctionnaire peut-il décider en toute conscience de véhiculer la haine de la République ?
Car tel est bien l'élément majeur, dans cette pitoyable affaire, à laquelle le syndicat SUD n'oppose d'autre réponse que la dénonciation d'un «agenda commun» entre l'extrême droite et le ministre: alors que le système scolaire français est le plus inégalitaire de tous les pays de l'OCDE, qu'il échoue à donner aux enfants défavorisés les armes intellectuelles minimales pour s'intégrer dans la société, les condamnant à l'ignorance et à la dépendance, l'urgence pour un syndicat enseignant est de diffuser l'idée que les causes de ce naufrage seraient à chercher dans une ségrégation digne des grandes heures de l'apartheid.
L'urgence ne serait pas de comprendre pourquoi un quart des élèves (et bien davantage dans le 93) arrive en 6e avec des lacunes terribles, mais de leur mettre dans le crâne qu'ils sont des victimes de l'oppression postcoloniale et de déconstruire à leurs yeux l'insupportable «récit national» français.
On ne voit pas bien au nom de quoi la République devrait tolérer que l'argent des contribuables serve à diffuser ce genre d'idéologie qui (...) justifie par avance la violence dont ils pourraient faire preuve
On se rassurera en estimant que ces délires sont largement minoritaires, que l'immense majorité des enseignants est indignée. Mais la question se pose: un fonctionnaire peut-il décider en toute conscience de véhiculer la haine de la République? Ce qui n'était que choquant et déloyal jusqu'à présent devient criminel dans un pays où des jeunes gens traduisent leur haine et leur ressentiment en tirant à la kalachnikov sur d'autres jeunes gens.
Et l'on ne voit pas bien au nom de quoi la République devrait tolérer que l'argent des contribuables serve à diffuser ce genre d'idéologie qui, non seulement enferme des enfants issus de l'immigration dans une position qui leur interdit de jamais s'intégrer à cette société, mais surtout justifie par avance la violence dont ils pourraient faire preuve. On se souvient du sociologue Geoffroy de Lagasnerie, expliquant après l'attentat du Bataclan la discrimination dont seraient victimes les jeunes «des minorités ethniques» aux terrasses des cafés, et concluant: «Ils ont plaqué des mots djihadistes sur une violence sociale qu'ils ont ressentie quand ils avaient 16 ans.»
Il n'est parfois plus temps de s'indigner, mais de se révolter contre ce crachat lancé à la démocratie, qui plus est, un crachat facturé aux citoyens
En 2011 avait été introduite dans les concours d'enseignement une épreuve intitulée «agir en fonctionnaire de l'État et de manière éthique et responsable». Certains s'étaient inquiétés d'une volonté de caporalisation des professeurs, d'une forme de contrôle idéologique exercé sur eux. Et sans doute l'éthique et le sens de la responsabilité ne se définissent-ils pas dans des cours et des examens. Mais les pratiques du SUD-éducation montrent à tout le moins que la préoccupation était légitime. D'autant qu'on trouve parmi les intervenants dudit stage une professeur en ESPE, École supérieure du professorat et de l'enseignement, chargée, donc, de la formation des jeunes enseignants. La liberté syndicale n'a pourtant jamais eu pour objet de supprimer le devoir de réserve des fonctionnaires.
On comprend donc que des gens qui haïssent l'idée même de nation, et se fixent pour but de déconstruire le sentiment d'appartenance commune, utilisent leur statut de fonctionnaire pour miner l'institution qu'ils sont censés servir et transformer leurs élèves les plus défavorisés en cobayes de leurs projets politiques. Pire, ils sont à ce point persuadés d'être des résistants à un ordre quasi fasciste qu'il ne leur vient pas à l'esprit qu'ils s'asseyent ainsi sur les principes les plus élémentaires de la démocratie. SUD-éducation, comme tous les syndicats, bénéficie de postes détachés, en une période où les professeurs manquent devant les classes. Il utilise l'argent public pour financer ce genre de stage quand la formation continue des enseignants est un désert. Il n'est parfois plus temps de s'indigner, mais de se révolter contre ce crachat lancé à la démocratie, qui plus est, un crachat facturé aux citoyens.

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Égypte : carnage dans une mosquée du Nord-Sinaï (24.11.2017)

Par Jenna Le Bras
Publié le 24/11/2017 à 20h01
Des hommes armés ont attaqué une mosquée en pleine prière du vendredi, faisant 235 morts et 120 blessés.

C'est un carnage, comme l'Égypte n'en avait pas vécu depuis très longtemps. Vendredi, en pleine prière hebdomadaire, la terreur a frappé le petit village de Bir al-Abed, à 40 km d'al-Arish, dans la province du Nord-Sinaï.
Alors que de nombreux fidèles se recueillaient dans ce petit lieu de culte majoritairement fréquenté par la communauté soufie - une branche hétérodoxe de l'islam - au moins deux hommes armés ont encerclé la mosquée avec des 4 × 4 avant d'y poser une bombe puis de tirer sur les survivants qui tentaient de s'échapper.
Le bilan est terrible: vendredi soir, il atteignait 235 morts et plus de 120 blessés. «C'est, à ce jour, la deuxième attaque terroriste la plus grave de l'histoire égyptienne depuis l'attentat qui a coûté la vie à 224 personnes dans le crash d'un avion russe en octobre 2015», note Oded Berkovitz, directeur régional du renseignement et analyste pour MAX Security, spécialiste de la zone. «Le bilan étant en constante hausse, on peut s'attendre à ce que cette attaque soit la plus grave que l'Égypte ait connue», affirme d'ailleurs le spécialiste.
Les images des corps meurtris des victimes, recouverts de couvertures étaient diffusées en boucle sur les télévisions égyptiennes dès le début d'après-midi. Un drame qui a provoqué l'émoi dans le pays: alors que les hôpitaux de la région étaient en alerte maximale pour prendre en charge les blessés, de nombreux Égyptiens se sont pressés dans les centres hospitaliers pour donner leur sang.
Un attentat sans précédent
Ce n'est pas la première fois qu'un lieu de culte musulman est pris pour cible dans le pays. En 2013 déjà, une explosion avait frappé le sanctuaire d'un cheikh dans le village d'al-Mazar près de Bir al-Abed, où l'attaque de vendredi a eu lieu. L'année dernière, plusieurs religieux avaient également été exécutés par l'EI dans la région, provoquant un exode massif de la communauté soufie de l'autre côté du canal de Suez.
L'ampleur de cet attentat est néanmoins sans précédent. Si celui-ci n'a pas été revendiqué, les soupçons se portent sur Wilayat Sinai, la branche égyptienne de l'organisation de l'État islamique, très active dans le Nord-Sinaï et de plus en plus puissante sur tout le territoire égyptien. «À ce stade, la revendication est devenue une formalité, explique Oded Berkovitz.  jusqu'à présent, Wilayat Sinai évitait d'infliger des pertes massives aux civils musulmans en Égypte et se singularisait à ce titre d'autres groupes, mais il a néanmoins pour cible privilégiée la communauté soufie qu'elle considère comme apostate et idolâtre, ainsi que les civils suspectés de coopérer avec le régime égyptien et l'armée. Il y a donc peu de doutes sur l'origine de cette attaque», note-t-il.
«Les forces armées et la police vengeront nos martyrs et ramèneront la sécurité et la stabilité avec force très prochainement»
Abdel Fattah al-Sissi, président égyptien
Autre ennemi prioritaire de l'EI, mais aussi de l'ensemble des groupes terroristes présents dans cette zone: les forces de sécurités égyptiennes. C'est donc d'une pierre deux coups pour les responsables de cette attaque, alors que ce vendredi, des fidèles mais aussi de nombreux conscrits étaient présents dans la mosquée au moment de l'assaut. «En l'absence d'information claire il est difficile d'établir la cause exacte du choix de ce lieu, mais il est vraisemblable que ce soit une combinaison de ces deux paramètres», estime l'analyste.
Autre raison probable du choix de cette cible: l'annonce, l'été dernier, de plusieurs tribus bédouines puissantes (les Tarabins et les Sawarkas) de leur intention de collaborer avec les autorités égyptiennes pour combattre le terrorisme. Un ralliement que militants extrémistes et petits trafiquants avec la bande de Gaza toute proche avaient peu goûté.
De son côté, le gouvernement égyptien a néanmoins décrété un deuil national de trois jours. Le président Abdel Fattah al-Sissi a également présidé en urgence une réunion à huis clos à laquelle ont assisté ses ministres de la Défense et de l'Intérieur et les chefs des services de renseignements généraux et militaires. Il a promis de répondre avec une «force brutale» à l'attaque. «Les forces armées et la police vengeront nos martyrs et ramèneront la sécurité et la stabilité avec force très prochainement», a-t-il déclaré lors d'un discours télévisé très ferme.
Sur les réseaux sociaux, mais aussi à la télévision égyptienne, les critiques contre le régime actuel, accusé d'être inefficace et dépassé, se font d'ailleurs de plus en plus vives. Mais certains commentateurs pro-régime n'ont pas hésité à défendre les autorités en affirmant que «la zone attaquée est moins fournie en forces de sécurité que d'autres zones de la région» car «beaucoup plus loin d'al-Arish que ce que les médias déclarent.»

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Après la mort, que deviennent nos données ? (21.11.2017)
Par Elisa Braun
Mis à jour le 22/11/2017 à 10h06 | Publié le 21/11/2017 à 17h06
INFOGRAPHIE - Notre patrimoine numérique, les traces que nous laissons chaque jour sur Internet ne disparaissent pas à notre décès. Qu'advient-il de ces informations ? Qui décide de leur sort ?
Il y aura en 2098 plus de morts que de vivants sur Facebook, selon les estimations de Hachem Sadikki, statisticien de l'université du Massachusetts. Même s'il est difficile d'affirmer que Facebook existera toujours à la fin du siècle et d'imaginer ce qu'il serait alors, ce type de projection interpelle. Comment organiser la gestion post-mortem des comptes sur les réseaux sociaux et plus largement, de l'ensemble des services Web que nous utilisons de notre vivant ?
Certaines entreprises ont pris en main cette question délicate. La suppression d'un compte LinkedIn, Snapchat ou Twitter est ainsi possible à la requête d'un proche, parfois à condition de fournir un certificat de décès. Facebook permet également à chaque utilisateur de désigner un «contact légataire», une personne qui pourra supprimer le compte de son titulaire en cas de décès ou bien gérer son «profil mémorial». Elle pourra écrire un avis de décès sur le profil du défunt afin d'informer ses amis, changer la photo de profil et répondre aux demandes de contact. Les messages privés du mort resteront en revanche inaccessibles. «Les vivants ont toujours gardé des traces du mort, et bien souvent, les nouvelles techniques sont utilisées pour communiquer avec les morts et en garder des traces. C'est un invariant sociologique et, par exemple, l'un des premiers usages de la photographie», explique le socio-anthropologue Martin Julier-Costes au site Regard sur le numérique. Selon ce chercheur du programme Eneid-Éternités numérique, financé par l'Agence nationale de recherche, le Web regorge même de traces des défunts. Bien avant Facebook, il existait par exemple des cyber-cimetières à la mémoire de disparus sur des sites Internet dédiés.
Un testament numérique
Entre le droit de mémoire des vivants et le droit des défunts à la vie privée, l'équilibre est parfois difficile à trouver pour les familles. Tout comme pour le don d'organe ou l'incinération, mieux vaut donc en discuter au préalable, d'autant que de nombreux outils permettent d'anticiper la «mort numérique».
La France est ainsi l'un des premiers États à avoir entériné la notion dans la loi Lemaire d'octobre dernier. Selon le texte, «toute personne peut définir des directives relatives à la conservation et à la communication de ses données à caractère personnel après son décès». À chaque Français donc de proposer une directive générale («s'il m'arrive quelque chose, je souhaite que mes données soient transmises à un tel ou bien effacées») ou bien particulière («je souhaite que mon compte Facebook soit maintenu mais que mes comptes Google soient effacés»).

La loi ne suffit pas toujours pour faire valoir ses dernières volontés
La loi ne suffit pas toujours pour faire valoir ses dernières volontés. Lors de leur congrès au mois de septembre dernier, les notaires français ont donc proposé de faire figurer ces directives relatives aux données numériques dans un testament déposé chez le notaire. «Le testament, qui permet directement d'appliquer les dernières volontés du défunt, peut être enregistré pour environ 10 euros - il faut seulement y ajouter les frais de conseil du notaire pour les cas plus complexes», précise Mathieu Fontaine, notaire et responsable de la commission numérique pour le Conseil supérieur du notariat. Il est ainsi possible de programmer avec certitude l'inactivation de ses comptes sur les réseaux sociaux ou la suppression définitive de ses données sur tous les services en ligne. Les mots de passe et identifiants de banques en ligne peuvent également être visés par ces dispositions, même si les capitaux des comptes sont soumis aux règles de l'héritage. «Les notaires ne sont pas forcément attendus sur les questions numériques, mais à titre personnel, je considère que mes données m'appartiennent et qu'elles peuvent à ce titre constituer un patrimoine», note ainsi Mathieu Fontaine.
Anticiper l'inévitable évite certaines déconvenues. Un couple canadien a ainsi eu la mauvaise surprise en 2013 de voir apparaître des photos de leur fille décédée sur une campagne publicitaire pour un site de rencontre. Facebook avait en effet revendu les photos de la défunte à une firme commerciale. «En France, cela est heureusement impossible avec la loi Lemaire», explique Mathieu Fontaine. Le notaire appelle toutefois à la vigilance, puisque la mort numérique reste à maints égards un angle mort du droit. La question est ainsi totalement absente du nouveau règlement pour la protection des données personnelles (RGPD) qui entrera en vigueur d'ici à mai 2018.

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Syrie: l'opposition cherche à s'unifier en vue des négociations de Genève (24.11.2017)
Par Georges Malbrunot
Mis à jour le 24/11/2017 à 14h00 | Publié le 24/11/2017 à 13h21
Les anti-Assad peinent à aplanir leurs divergences, avant de se rendre à partir de mardi à Genève pour relancer les négociations, sous l'égide de l'ONU, en vue d'une transition du pouvoir à Damas.
D'accord pour une délégation unique d'opposants, mais sans renoncer à exiger le départ de Bachar el-Assad au début de la transition en Syrie. Les 140 représentants des différents camps de l'opposition syrienne cherchaient vendredi à Riyad à s'entendre pour envoyer une délégation unifiée aux négociations qui vont s'ouvrir le 28 novembre à Genève avec le gouvernement, sous l'égide des Nations unies.
Ce serait la première fois que l'opposition s'afficherait ainsi unie aux pourparlers de Genève. Jusqu'à maintenant, trois groupes refusaient de composer une délégation unique: le Haut comité pour les négociations (HCN), soutenu par l'Arabie saoudite, un groupe dit du Caire proche de l'Égypte et un troisième, inspiré par la Russie.
Tout n'est cependant pas bouclé. Les 140 opposants doivent encore se mettre d'accord pour choisir 50 de leurs membres qui iront à Genève. Les pro-Russes réclament avec le groupe du Caire un tiers des membres de la délégation, mais le HCN n'est prêt à leur concéder que 8 sièges seulement. Par ailleurs, sur quelle plate-forme entameront-ils les discussions face au gouvernement syrien? L'incertitude planait encore vendredi.
Le départ de Bachar el-Assad exigé
Une chose paraît acquise: dans leur déclaration finale, les participants à la réunion de Riyad «ont souligné que (la transition) ne pourrait avoir lieu sans le départ de Bachar el-Assad et de sa clique au début de la période de transition».
Le départ de Assad du pouvoir a été au cœur des précédents échecs des négociations entre représentants du régime et l'opposition. Avant la rencontre de Riyad, des rumeurs avaient laissé entendre que les opposants auraient adouci leur position sur ce point clé du départ de Assad, qui n'est plus réclamé par de nombreux pays occidentaux, y compris la France, soutien actif des opposants syriens.
Après avoir assisté à la réunion des opposants à Riyad, l'émissaire onusien en charge de la Syrie, Staffan de Mistura, est parti ce vendredi pour Moscou. La Russie, principal acteur sur le terrain militaire en Syrie, a intensifié ses efforts pour relancer les négociations politiques en vue de parvenir à une transition en Syrie. Vladimir Poutine, qui s'est entretenu en début de semaine à Sotchi avec Bachar el-Assad puis avec ses alliés iraniens et turcs, a appelé à l'organisation d'un congrès des représentants du peuple syrien à Sotchi, toujours, mais à une date qui n'a pas été déterminée.
Certains interprètent cette initiative comme une façon de concurrencer le processus de Genève sous l'égide de l'ONU. Poutine, qui a reçu le roi saoudien Salman, tenait à une délégation unique de l'opposition à Genève, afin que les pourparlers puissent s'engager directement entre les deux camps, sans la médiation de Mistura. La composition de la délégation unique de l'opposition - en particulier le poids de chacune de ses composantes - fournira une indication sur le ton que les anti-Assad adopteront à partir de mardi à Genève.
Les précédents rounds de pourparlers avaient buté sur la dispersion des opposants. Cet obstacle paraît avoir été surmonté. Reste à attendre la plate-forme sur laquelle les anti-Assad se mettront d'accord en vue d'affronter la délégation gouvernementale syrienne à Genève.
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Des féministes interpellent Macron sur les violences faites aux femmes (23.11.2017)
Par Etienne Jacob
Publié le 23/11/2017 à 21h11
Alors que le chef de l'État prononcera, samedi, son discours sur les violences faites aux femmes, cinq militantes organisent un rassemblement, ce vendredi matin, place de la République, à Paris. Elles réclament «des actions précises, des moyens ambitieux et des résultats rapides».
Les féministes attendent Emmanuel Macron au tournant. Avant même son discours prévu ce samedi 25 novembre sur les violences faites aux femmes, cinq militantes appellent à manifester, ce vendredi. Laure Salmona, Fatima Benomar, Madeline Da Silva, Caroline De Haas et Clémentine Vagne sont chacune à l'origine de pétitions réclamant un plan sur les violences sexuelles, le viol des enfants ou encore la formation des policiers sur le harcèlement de rue. Elles ont réuni plus de 780.000 signatures à ce jour. Ce vendredi matin, elles se rassembleront dès 11 heures, place de la République, à Paris. Des actions auront également lieu sur les réseaux sociaux, avec la publication d'une vidéo (voir ci-dessous) et le lancement d'un hashtag (#SoyezauRDV).
L'objectif de cette opération est d'«interpeller le président de la République», indique au Figaro Fatima Benomar, membre de l'association féministe Les Effrontées. «On craint que son discours ne présente aucune proposition chiffrée ou financée. Au début du quinquennat, on nous a dit que les violences faites aux femmes seraient la grande cause nationale. Nous, pour l'instant, on ne voit pas ça du tout», déplore-t-elle.

Visuel réalisé par la féministe Clémentine Vagne. - Crédits photo : Visuel réalisé par la féministe Clémentine Vagne
Les féministes exigent ainsi «des actions précises, des moyens ambitieux et des résultats rapides», écrivent-elles dans un communiqué. Elles réclament notamment «un engagement financier massif pour en finir avec les violences», «une formation obligatoire de l'ensemble des professionnelles en contact avec les femmes victimes», «des moyens pour que les services de protection de l'enfance, débordés, puissent prendre en charge les enfants victimes», «un brevet de la non-violence qui permette dès le plus jeune âge d'apprendre le respect et le consentement», ou encore «des actions pour en finir avec les violences sexuelles au travail». Selon un rapport de la mission interministérielle de l'Observatoire national des violences faites aux femmes (MIPROF) révélé mercredi par Le Figaro , «une femme a été tuée tous les trois jours par son partenaire ou ex-partenaire en 2016».
Pour Fatima Benomar, le bannissement de l'écriture inclusive et la récente proposition de loi concernant la garde alternée en cas de séparation ne sont pas de bons signaux lancés par le gouvernement. «On multiplie les trahisons. On demandait un grand ministère dédié à notre cause, mais on ne l'a pas eu. On devait avoir une première ministre, au final, on se retrouve avec un chef du gouvernement à la littérature particulièrement machiste. Sous Hollande, nous avions une réunion une fois par mois avec la ministre Laurence Rossignol. Pour l'heure, nous n'avons toujours pas rencontré Marlène Schiappa», regrette-t-elle.
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Le cimetière de Prinçay dans la Vienne pourra garder sa croix (23.11.2017)
Par Stéphane Kovacs
Publié le 23/11/2017 à 17h03
Le tribunal administratif de Poitiers a validé jeudi la présence d'une croix sur le portail du cimetière de ce village de la Vienne, contestée par le fils d'un défunt.
Le portail du cimetière de Prinçay pourra donc garder sa croix. Le tribunal administratif de Poitiers, annonce La Nouvelle République, a validé jeudi la présence d'une croix sur le portail du cimetière de ce village de la Vienne, contestée par le fils d'un défunt. C'est sans doute la fin d'une longue querelle byzantine entre cet homme, un retraité habitant Périgueux, et la municipalité de Prinçay. En 2014, Philippe Bonn, dont le père a été inhumé en 2002 dans ce cimetière, assigne la municipalité en justice, exigeant le retrait de la croix. Sa motivation: son «attachement», clame-t-il, à la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l'État.
La loi de 1905 autorise l'entretien, la restauration voire le remplacement des signes religieux existant préalablement à la loi
Y avait-il une croix sur l'ancien portail en bois, «tout déglingué», de ce cimetière en 2002, lors des obsèques de son père? Philippe Bonn ne s'en souvient plus. «Reste qu'en 2012 ou 2013, quand je suis allé sur sa tombe, raconte-t-il, la commune avait changé le portail, qui est maintenant en métal et surmonté d'une croix.» Le tribunal administratif avait pris l'avis du Conseil d'État avant de statuer. Dans cet avis rendu en juillet, les Sages avaient précisé que la loi de 1905 autorise l'entretien, la restauration voire le remplacement des signes religieux existant préalablement à la loi. Or, un courrier de la préfète l'atteste, ce cimetière existait déjà en 1859, et tous les cimetières créés avant la loi de 1905, affirme-t-elle, comportaient une croix à leur entrée.
«Rassurer d'autres collectivités»
Début novembre, le rapporteur public avait préconisé de rejeter la demande de Philippe Bonn. Il a donc été suivi. «On est très content de cette décision pragmatique, même si ce n'est pas une grosse surprise, indique Me Romain Bernier, avocat de la mairie de Prinçay. S'il n'y a pas d'appel, cela va créer une jurisprudence, donc rassurer d'autres collectivités qui sont dans le même cas. Mais attention! Cette décision n'est pas transposable aux croix des cimetières postérieurs à 1905.»
Philippe Bonn a été condamné à indemniser la commune pour ses frais de justice, à hauteur de 1200 euros. Il dispose de deux mois pour faire appel. Il n'a pas encore pris sa décision, attendant, dit-il, «de prendre connaissance officiellement du jugement et de ses attendus pour (s)e prononcer».
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Occupation d'un gymnase à Paris: «Macron doit tenir ses engagements» (23.11.2017)
Par Esther Paolini
Publié le 23/11/2017 à 17h31
REPORTAGE - Depuis jeudi, l'association Droit au Logement occupe un gymnase à proximité de l'Élysée. Elle souhaite interpeller l'État sur la situation de 150 personnes, mal logées ou sans abri. Plusieurs d'entre elles sont des rescapés de l'assaut du Raid à Saint-Denis contre les terroristes du 13 novembre.
«Un toit c'est un droit.» La banderole prend tout l'espace du mur du gymnase. Sur les tatamis, plusieurs dizaines de personnes, assises en tailleur, attendent. «Emmanuel Macron s'était engagé à ne plus voir personne dans la rue. On attend qu'il respecte ses engagements», lance Anissa Sahni, une bénévole du Droit au Logement (DAL). Depuis jeudi, l'association occupe le gymnase de la rue Roquépine, dans les quartiers chics du VIIIe arrondissement de Paris, à quelques mètres de l'Élysée. Une action coup de poing pour dénoncer les conditions de vie d'environ 150 personnes, sans abri ou mal-logées.
Avec l'arrivée du froid, la situation de plusieurs ménages est devenue une «urgence», selon Anissa Sahni. «Certains dorment dans leur voiture, d'autres sont hébergés chez des amis mais ce sont des solutions provisoires.» Cinq hommes présents sont des victimes collatérales des attentats. Ils ont perdu leurs logements lors de l'assaut du Raid à Saint-Denis, lancé contre la planque des terroristes du 13 novembre. Alors que l'immeuble a été complètement détruit, la moitié des ménages a été relogée depuis. 27 familles ont été placées dans des résidences sociales.
Dans certains cas, elles sont entassées dans de petits appartements, comme témoigne un rescapé, Leandro Mendos Dos Sandos: «Mes trois enfants dorment dans la même chambre.» Ce père de famille raconte qu'ils ont d'abord été placés dans un premier logement «au dix-huitième étage d'une tour». Une situation compliquée alors que sa femme souffre de «graves troubles respiratoires depuis l'assaut». Un second sinistré, Noureddine Touil, explique qu'il a d'abord été logé dans un hôtel, «comme tous les autres célibataires». Mais depuis trois mois, «l'hôtel n'était plus payé pour nous héberger. On nous a demandé de partir.» Ces dernières semaines, l'homme de 33 ans dort tour à tour dans sa voiture, sur le canapé d'un ami ou dans une tente, dehors.
«La loi est censée les protéger»
Entre deux distributions de sandwiches, la représentante de la DAL raconte la situation, tout aussi complexe, des «Expulsés de Montreuil». Il s'agit de 25 personnes dormant sur le trottoir après avoir été chassées de leur logement. Ces familles, avec des enfants en bas âge, ont été victimes d'une escroquerie au bail sur un bâtiment appartenant à la Ville. Depuis le 6 octobre, elles campent devant leur immeuble, espérant faire revenir la mairie sur sa décision.
Plus globalement, l'association souhaite interpeller l'État sur le cas de plusieurs dizaines de personnes bientôt expulsées, comme des familles vivant dans des logements insalubres. Anissa Sahni rappelle que «la loi est censée les protéger». Elle attend donc le respect de la législation, en particulier de la loi DALO, qui assure aux personnes mal logées une protection prioritaire. La DAL demande également que soit appliqué le Droit de réquisition pour les bâtiments vides et exige un rendez-vous avec la Ville pour s'assurer qu'elle tienne ses engagements.
Obstiné, Noureddine Touil dit «garder espoir». «On sait que la France est un pays de droit, mais tant que la situation ne bouge pas, moi je ne bougerai pas d'ici non plus.» Un appel qui semble t-il a été entendu: ce jeudi après-midi, à l'issue d'une réunion à la préfecture de Bobigny avec les sinistrés de Saint-Denis, regroupé en «comité des sinistrés du 48 rue de la République», une propositon de relogement a été faite aux cinq habitants de Saint-Denis qui se trouvaient à la rue. Pour les autres, aucune solution n'a été pour le moment annoncée.
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Immigration : le Sénat épingle la politique de Macron (23.11.2017)
Par Jean-Marc Leclerc
Mis à jour le 23/11/2017 à 17h48 | Publié le 23/11/2017 à 06h00
INFOGRAPHIE - Un avis de la Commission des lois du Sénat critique l'action du gouvernement sur l'immigration et prédit qu'il «sera dans l'incapacité de tenir ses engagements en matière d'éloignement» des clandestins.
Soixante pages d'un rapport poil à gratter, truffé de chiffres, de graphiques… Le point budgétaire du sénateur LR du Rhône François-Noël Buffet, est impitoyable. Il justifie le rejet par la commission des lois de la Haute Assemblée, présidée par Philippe Bas, des crédits de la mission «Immigration, asile et intégration» du projet de loi de finances pour 2018. Dans ce document révélé par Le Figaro, les sénateurs dénoncent l'«écart entre les annonces du gouvernement et ses actes». Voici pourquoi…
● Encore moins d'éloignements financés que sous Hollande
«Dans le projet de loi de finances pour 2018, environ 14.500 éloignements forcés sont budgétés, soit moins que sous le mandat de François Hollande (15.161 éloignements forcés en 2014, 15.485 en 2015)», regrette le sénateur Buffet. Certes, le gouvernement a communiqué le 12 juillet dernier sur un «plan» pour «garantir le droit d'asile et mieux maîtriser les flux migratoires». Mais Philippe Bas estime, de son côté, que «si le président de la République a annoncé, le 15 octobre 2017, son intention d'expulser les étrangers en situation irrégulière ayant commis un délit, son gouvernement n'y consacre pas les moyens nécessaires». Les crédits consacrés à la lutte contre l'immigration irrégulière sont en baisse de 7 %.
● La circulaire Valls a contribué à l'augmentation de 30 % des régularisations
«Derrière la fermeté de son discours, le gouvernement n'envisage pas d'abroger la circulaire Valls du 28 novembre 2012, qui a pourtant contribué à l'augmentation des régularisations d'étrangers en situation irrégulière de plus de 30 % en cinq ans», relève le rapport Buffet. Par ailleurs, il indique qu'«en 2016, 227.923 titres de séjour ont été accordés à des étrangers souhaitant résider durablement en France, soit une augmentation de 4,78 % par rapport à 2015. L'immigration régulière de longue durée est principalement familiale (38,83 % du flux en 2016) et étudiante (32,17 %). L'immigration de travail reste marginale (10 %).»
● L'immigration irrégulière aurait littéralement explosé en cinq ans
Le rapport précise: «Seul le nombre de bénéficiaires de l'aide médicale d'État (AME) peut donner une indication pertinente: il s'établit à 311.310 personnes au 31 décembre 2016, soit une hausse de près de 49 % par rapport au 31 décembre 2011. Dans les faits, le nombre d'étrangers en situation irrégulière est probablement nettement supérieur (notamment parce que l'AME est attribuée sous condition de résidence stable et ininterrompue en France pendant trois mois).»
● 75.000 expulsables sont restés en France rien que l'an dernier
«92.076 mesures d'éloignement ont été prononcées en 2016 et seules 18 % d'entre elles ont été réellement exécutées, soit par un éloignement spontané, soit par un éloignement aidé, soit par un éloignement forcé. Pour cette seule année 2016, 75.587 personnes se sont maintenues sur le territoire français malgré la mesure d'éloignement prononcée à leur encontre.» Il n'y aurait aucun suivi des déboutés du droit d'asile (53.600 personnes pour la seule année 2016).
● La justice annule un placement en rétention de clandestin sur cinq
Une loi votée sous François Hollande ne laisse plus que 48 heures à la police pour étayer les dossiers de rétention. Résultat: «En 2017, 19,30 % d'étrangers placés en centre de rétention administrative (CRA) ont été libérés dès les quarante-huit premières heures de rétention, alors qu'en 2016 seuls 6,35 % des retenus avaient été libérés pendant les soixante-douze premières heures de rétention.» En clair, la justice libère trois fois plus qu'avant.

Immigration : la politique d'intégration en souffrance et des risques sanitaires en vue (23.11.2017)

Par Jean-Marc Leclerc
Mis à jour le 23/11/2017 à 21h03 | Publié le 23/11/2017 à 19h19
Se fondant sur un rapport, Philippe Bas, président de la commission des lois de la Haute Assemblée, pointe la faiblesse des formations linguistiques et le manque de contrôles médicaux.
«La politique d'intégration est en grande souffrance». Tel est le sentiment du sénateur Les Républicains de la Manche, Philippe Bas, par ailleurs président de la commission des lois de la Haute Assemblée. Ancien secrétaire général de l'Élysée sous Chirac, ce personnage public respecté pour son sens de l'État et des nuances, estime que «la politique migratoire du gouvernement est aujourd'hui faite de demi-mesures alors que les migrations en provenance des pays en crise continuent de progresser».
Son collègue François-Noël Buffet, sénateur LR du Rhône, lui apporte, dans son dernier avis sur le projet de loi de finance 2018, de sérieux arguments. Le rapport Buffet précise, par exemple, que «le contrat d'intégration républicaine (CIR) est un échec: près de 40 % des étrangers qui suivent ses formations linguistiques n'atteignent pas le niveau de français requis». Par ailleurs, «les visites médicales proposées aux étrangers primo-arrivants ont été réduites de 76 % entre 2015 et 2017, ce qui pose un grave problème de santé publique, notamment dans les universités».
L'asile, axe majeur
L'«intégration tranquille» est pourtant censée constituer l'une des marques de fabrique de la nouvelle politique promue par Emmanuel Macron en matière d'immigration. Elle est conçue comme le pendant de sa fermeté affichée contre l'immigration irrégulière.
La commission des lois du Sénat porte donc un regard assez désabusé sur ce dossier. Certes, le sénateur Buffet concède que l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a naturellement vocation à animer concrètement cette action publique. Il rappelle que cet organisme est «notamment responsable de la mise en œuvre du contrat d'intégration républicaine, du contrôle médical des étrangers admis au séjour, du regroupement familial et de l'accompagnement administratif des entreprises recrutant un salarié étranger».
Seulement voilà: selon lui, «l'asile est devenu l'axe majeur de l'action de l'OFII, celui qui concentre les réflexions stratégiques et les nouveaux moyens alloués. Les missions de l'office changent de nature, ce qui semble fragiliser sa fonction historique d'intégration des étrangers primo-arrivants». Pour les conservateurs du Sénat, en matière d'intégration, il faudrait quasiment tout revoir.

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Au moins 184 morts dans l'attaque d'une mosquée dans le Sinaï égyptien (24.11.2017)


Par Le Figaro.fr avec agences
Mis à jour le 24/11/2017 à 15h10 | Publié le 24/11/2017 à 13h28
Au moins 184 personnes ont été tuées et des dizaines d'autres blessées dans un attentat à la bombe perpétré contre une mosquée dans le nord du Sinaï en Egypte, rapporte l'agence de presse égyptienne Mena, aujourd'hui.
L'attaque s'est produite dans un village proche d'Al-Arish, la capitale de la province du Nord-Sinaï.
L'agence, citant une source officielle, fait également état de fusillades lors de cette attaque. Pour l'heure (vendredi après-midi, heure de Paris), cette attaque n'a pas été revendiquée. Elle pourrait être la plus meurtrière depuis trois ans dans la région.
Le gouvernement égyptien annonce trois jours de deuil national à la suite de cette attaque. 
Depuis 2013 et la destitution par l'armée du président islamiste élu Mohamed Morsi, des groupes jihadistes dont la branche égyptienne de l'organisation Etat islamique (EI) attaquent régulièrement les forces de sécurité égyptiennes dans le nord du Sinaï.
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Attentat de Nice : la police municipale perquisitionnée (23.11.2017)
Par Christophe Cornevin
Mis à jour le 24/11/2017 à 08h26 | Publié le 23/11/2017 à 19h06
Les juges, qui ont placé des documents sous scellé, cherchent à comprendre comment le chauffeur du camion qui a foncé sur la foule a pu effectuer douze passages sur la promenade des Anglais, sans être repéré, quelques jours avant l'attentat.
Objet d'une âpre polémique ayant opposé le ministre de l'Intérieur de l'époque, Bernard Cazeneuve, et Christian Estrosi, premier adjoint à la sécurité redevenu maire de Nice, l'enquête sur les dysfonctionnements présumés à l'origine de l'attentat, qui a fait 86 morts le 14 juillet 2016 à Nice, connaît de nouveaux développements.
Agissant dans le cadre d'une enquête ouverte contre X pour «mise en danger de la vie d'autrui (risque immédiat de mort ou d'infirmité) par violation manifestement délibérée d'une obligation réglementaire de sécurité et de prudence», les juges d'instruction niçois Alain Chemama et Chantal Russo se sont rendus, comme l'a révélé Le Parisien, le 26 octobre 2017 au Centre de supervision urbaine (CSU) de la police municipale. Objectif? Visualiser la salle dans laquelle se trouvent les écrans de surveillance et d'en comprendre son fonctionnement. Avec cette question: pourquoi la vidéoprotection de la ville, volontiers présentée comme l'une des plus sûres avec ses 1836 caméras disséminées un peu partout, n'a-t-elle rien détecté?
Les passages suspects du camion
En effet, il est apparu au gré des investigations que le camion blanc de 19 tonnes au volant duquel Mohamed Lahouaiej Bouhlel a semé la mort a effectué au moins douze passages sur la promenade des Anlais entre le 11 et le 14 juillet, dont onze «repérages» potentiels. Ils ont été effectués à une fréquence de trois par jour, pendant lesquels le chauffeur-livreur se revendiquant de Daech a fait des demi-tours, des allers et venues ainsi des arrêts sur les trottoirs en mettant les warnings.
Dans le cadre d'un «transport sur les lieux et de perquisition» que confirme Le Figaro, les magistrats se sont rendus au quatrième étage de l'immeuble, ils ont emprunté un couloir menant par un accès sécurisé à la salle contenant douze écrans «géants» devant lesquels s'affairaient sept fonctionnaires municipaux disposant de «joysticks» permettant d'orienter et de zoomer afin de consigner des notes sur un carnet. Après avoir pris des photos pour figer les lieux, les deux juges, accompagnés de représentants de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), se sont fait détailler par le menu le fonctionnement «H24» du CSU par un brigadier-chef principal.
Outre la répartition des caméras, l'affectation des écrans aux agents chargés de la surveillance ou encore le processus et les techniques censées détecter les «anomalies», les magistrats se sont aussi renseignés sur l'extraction des images et leur mode de transmission à la police nationale. Les multiples passages suspects du camion «non relevés et en tout cas non signalés» sur la Promenade ont été aussi évoqués, d'autant que le périmètre est normalement interdit à la circulation des véhicules de plus de 3,5 tonnes… Avant de quitter les lieux peu après 11 h 30, les deux juges se sont fait remettre puis ont placé immédiatement sous scellés des documents, dont la liste des agents de permanence le soir du carnage.
«Visite technologique»
Alors que la mairie a réfuté le terme de «perquisition», Christian Estrosi préférait parler jeudi matin sur France Info de «visite technologique». L'édile a estimé que les juges ne faisaient que leur travail. «Et j'ai le sentiment qu'ils le font bien», a-t-il ajouté. «Ils nous ont demandé des documents que nous sommes en train de rassembler sur le fonctionnement des caméras, leur positionnement», ont précisé ses services qui jugent «tout à fait normal dans le cadre de l'instruction que l'enquête soit menée». Considérant que «l'avancée de l'instruction constitue une lueur d'espoir», Me Samia Maktouf, conseil de victimes, estime que «l'administration niçoise doit la vérité aux familles». «Il est inconcevable qu'on ait laissé circuler le camion dans une zone interdite aux utilitaires et que personne n'ait pu donner l'alerte après autant de passages filmés», martèle l'avocate, qui «ne peut s'empêcher des parallèles avec les dysfonctionnements de l'affaire Merah».
À la suite d'une plainte déposée avec constitution de partie civile par la famille du petit Yannis, garçon de 4 ans qui a perdu la vie dans l'attentat, une information judiciaire est ouverte depuis le 5 avril à Nice pour faire la lumière sur les mesures de sécurité prévues pour le traditionnel feu d'artifice, baptisé Prom'Party et qui avait attiré plus de 30.000 spectateurs. Au total, une centaine de personnes se sont constituées partie civile. Il s'agit de «gens qui donc considèrent qu'ils ont subi un préjudice qui résulterait de la faute prétendue des organisateurs et des responsables de la sécurité dans l'organisation même de la Prom'Party, indépendamment de l'attentat», rappelait récemment le parquet. Manifestement, les deux juges niçois semblent déterminés à aller jusqu'au bout de leur enquête.

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Contrairement à ses collègues Insoumis, Danièle Obono défend les stages «non-mixtes» (24.11.2017)
Par Pierre Lepelletier
Mis à jour le 24/11/2017 à 12h30 | Publié le 24/11/2017 à 12h14
LE SCAN POLITIQUE - En défendant les stages en non-mixité raciale organisés par le syndicat d'enseignants Sud-Education 93, la députée de la France insoumise va à l'encontre de son mouvement.
Elle est une des voix dissonantes de la France insoumise. Après des propos polémiques sur laïcité ou sur sa supposée proximité avec le Parti des indigènes, Danièle Obono s'est attirée les foudres d'une bonne partie de la classe politique. Jusqu'ici, la députée insoumise a toujours été soutenue par les siens. Dimanche dernier sur BFM TV, c'est même Jean-Luc Mélenchon qui est monté au créneau pour défendre sa protégée. «Danièle Obono est une personnalité tout à fait clair sur le thème de la laïcité. Elle ne veut pas en tant que femme, qui vient du continent africain être instrumentalisée, contre telle ou telle communauté», a fustigé le patron des Insoumis.
«La pratique de la non-mixité n'est pas dangereuse»
Pour l'instant, la France insoumise fait donc bloc derrière Danièle Obono. Mais jusqu'à quand? Vendredi, la députée LFI a remis une pièce dans la machine à polémiques. L'élue de Paris a défendu sur Sud Radio les stages en non-mixité raciale organisés par le syndicat d'enseignants, Sud-Education 93 et critiqués par l'ensemble de la classe politique. «La pratique de la non-mixité n'est pas dangereuse dans le sens où c'est une pratique qui répond à des besoins de catégorie. Les personnes victimes de violence sexiste, par exemple, peuvent éprouver le besoin de discuter avec des personnes de confiance qui partagent les mêmes problèmes. Dans ce cas-là, c'est plus un outil pédagogique pour pouvoir libérer plus facilement la parole», a-t-elle avancé.
«Si on veut traiter la question du racisme, ce n'est pas en triant les gens à l'entrée»
Adrien Quatennens, député LFI du Nord
Le ministre de l'Éducation nationale Jean-Michel Blanquer, très remonté contre l'initiative syndicale, a fait part de son intention de porter plainte contre Sud-Education 93 après avoir employé le terme de «racisme d'État». Il a également estimé que ce genre de réunion «ne pouvait pas avoir sa place dans l'éducation nationale». «Le ministre devrait peut-être se renseigner un peu plus. Dans l'Histoire des mouvements sociaux, ces formes d'actions existent», a souligné la députée en réaction à ces propos.
La prise de position de Danièle Obono rentre en contradiction avec la ligne portée par ses collègues Insoumis. Mercredi sur LCP, le député de la France insoumise de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière avait déjà condamné l'initiative. «Si on rentre dans un système, fût-ce au nom du fait qu'il y a des discriminations qu'il faut combattre, où des réunions sont ouvertes à certains et pas d'autres, je crois que nous avons perdu», a-t-il estimé. «Si on veut traiter la question du racisme, ce n'est pas en triant les gens à l'entrée d'une réunion syndicale», avait également tonné le député du Nord Adrien Quatennens. Loin donc du discours porté par sa collègue insoumise.
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Romain Bail contre un «Sangatte normand» (24.11.2017)

Par Cyril Hofstein
Publié le 24/11/2017 à 04h00
Dépassé par l'arrivée constante de migrants en quête d'un passage clandestin vers l'Angleterre, le maire de Ouistreham en appelle à une aide supplémentaire de l'Etat.
Si seulement un Français sur deux semble capable de citer spontanément le nom de son édile, selon un sondage Ifop diffusé à l'occasion du congrès des maires qui vient de se dérouler à Paris, celui du premier magistrat de Ouistreham Riva-Bella (Calvados) est sur toutes les lèvres. Et pour cause: Romain Bail, arrivé à la tête de la cité balnéaire en 2014, se bat depuis des mois pour éviter que sa ville de 10.000 habitants, célèbre pour avoir été l'une des plages du débarquement du 6 juin 1944, devienne un «Sangatte normand». Confronté à l'arrivée régulière de nombreux migrants qui espèrent encore gagner l'Angleterre via la gare maritime, le jeune élu (LR) âgé de 33 ans en appelle désormais à la responsabilité de l'Etat. «Entre 120 et 200 candidats à l'exil outre-Manche, dont de nombreux mineurs, errent en ce moment dans la commune. J'ai pleinement conscience du drame humain, des terribles épreuves que la plupart de ces personnes en grande difficulté ont traversées pour venir jusqu'ici, reconnaît Romain Bail. Mais il faut absolument éviter qu'elles s'installent durablement comme cela a été le cas à Calais pendant des années. Cette situation n'est pas acceptable. Il n'y a pas un jour sans que le sujet soit abordé dans la rue comme à la mairie. La Ville ne peut pas assumer cela toute seule. Il y a un abandon de l'Etat et cela crée des tensions et une psychose chez les Ouistrehamais. Je préférerais plutôt me consacrer aux autres problèmes des habitants et au grand projet de Centre des relations franco-britanniques qui doit voir le jour en 2019…»
Desservi par des navires exploités par la compagnie Brittany Ferries vers Portsmouth (Royaume-Uni), le port de Caen-Ouistreham voit passer environ un million de passagers par an. Malgré les barbelés, les hautes protections d'acier et les escadrons de gendarmerie mobile qui en gardent aujourd'hui l'entrée, ce terminal figure en bonne place sur les cartes des filières clandestines qui, après l'évacuation de la «jungle» de Calais l'année dernière, continuent à profiter de la détresse de ceux qui veulent à tout prix rejoindre ce qu'ils croient être un nouvel eldorado. «On estime à quelques dizaines seulement le nombre de migrants qui réussissent chaque année à monter sur les ferrys, explique Romain Bail. Un chiffre dérisoire qui entretient cependant l'espoir et le mythe d'un passage possible. Si rien n'est fait pour enrayer la situation, Ouistreham Riva-Bella risque de s'enliser dans des difficultés qui la dépassent. Nous n'avons ni les compétences, ni les moyens, ni même la solution pour lutter contre une situation d'urgence qui doit être résolue au niveau international.» En attendant, le froid s'installe et avec lui passeurs et migrants.
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Tsipras : «L'Europe ne peut plus prendre des décisions derrière des portes closes» (23.11.2017)
Par Alexia Kefalas et Fabrice Nodé-LangloisMis à jour le 23/11/2017 à 19h20 | Publié le 23/11/2017 à 18h25
INTERVIEW EXCLUSIVE - Le premier ministre grec évoque sa relation avec Emmanuel Macron et lance un appel aux investisseurs.
Le premier ministre grec, Alexis Tsipras, était à Paris jeudi pour recevoir deux récompenses: le prix du courage politique remis par la revue Politique internationale et le prix de l'engagement européen remis à la Maison du barreau de Paris. Dans un entretien exclusif au Figaro, le leader du parti de la gauche radicale Syriza expose ses convergences de vue sur l'Europe avec Emmanuel Macron. Il répond aux inquiétudes des Européens sur les investissements chinois en Grèce et rappelle qu'Athènes ne peut pas, seul, trouver la solution à la crise des réfugiés.
LE FIGARO. - Vous êtes venu à Paris officiellement pour recevoir deux prix. Rencontrerez-vous tout de même Emmanuel Macron?
Alexis TSIPRAS. - Oui, ce vendredi matin. Mais j'ai une communication régulière et continue avec le président Macron même si nos opinions ne sont pas toujours similaires. Nous avons la même vision, les mêmes convictions. Cette relation étroite perpétue la tradition de solidarité entre nos deux pays.
Il y a deux ans et demi, la Grèce a failli sortir de la zone euro. Votre pays est depuis sept ans sous la tutelle financière de l'Union européenne et du FMI. Pensez-vous que, comme prévu, la Grèce pourra se passer de ce programme d'aide financière à partir de l'été prochain?
La Grèce a payé un tribut très lourd à la crise européenne et le peuple grec en particulier a fait de lourds sacrifices ces sept dernières années. Il y a eu des erreurs tant du côté grec que du côté européen. Et nous avons aussi durement payé pour cela.
Lorsque j'ai été élu pour la première fois en janvier 2015, porté par la volonté du peuple, c'était avec le mandat clair de prendre une autre direction pour la Grèce et pour l'Europe. Rappelez-vous comment les négociations du premier semestre 2015 ont été dures. Certains pensaient que les Grecs devaient être punis. Mais nous avons pu éviter le pire et rester dans le noyau dur de la zone euro. Nous avons collectivement évité les divisions en Europe et donné tort à ceux qui avaient préparé ce genre de scénario.
Deux ans plus tard, la croissance revient, à 2 % en 2017, et pour 2018, les prévisions sont à 2,5 %. Nous avons réduit les injustices sociales. Et nous travaillons dur avec nos partenaires européens et avec toutes les forces vives grecques pour que cette «aventure» prenne fin en août 2018. Pour la première fois, je crois que ce n'est plus un rêve.
Les créanciers ont promis de faire un geste pour alléger la dette, abyssale, à 180 % du PIB. Attendez-vous un soutien particulier de Paris sur ce point?
Nous avons déjà un accord très précieux, sorti de l'Eurogroupe du 15 juin 2017. La proposition française de lier notre capacité de remboursement à notre croissance nous permet, ainsi qu'à nos créanciers, de considérer la dette différemment: nous retrouvons nos capacités d'investissement, de soutien à la croissance et surtout nos marges de manœuvre liées à l'excédent primaire budgétaire. Après cet accord du 15 juin 2017, nous avons besoin de ce même courage politique pour rendre ces mesures plus claires et poursuivre nos discussions avec nos créanciers. L'Union européenne et le Fonds monétaire international ne sont pas toujours d'accord, mais nous pensons que la bonne volonté prévaudra, que la solution n'infléchira pas la bonne trajectoire de la Grèce. Nous voulons une restructuration de la dette, nous devons ramener la confiance des investisseurs et des marchés.
«Je considère que la présence d'Emmanuel Macron au Conseil européen est l'occasion de prendre des décisions courageuses pour approfondir l'Europe»
Emmanuel Macron a choisi Athènes pour prononcer, le 7 septembre dernier, un discours important sur l'Europe. Quels sont les désaccords avec votre propre vision? Ce jour-là, vous avez cité Marx…
Oui, c'est vrai. Mais je pense qu'Emmanuel Macron a également lu Karl Marx, comme nombre d'entre vous. Emmanuel Macron et moi avons des points de départ politique et idéologique différents mais je suis convaincu que nous partageons la même vision.
L'Europe doit devenir plus attirante pour les jeunes, lui proposer des projets. Les institutions européennes doivent devenir plus démocratiques. Nous ne pouvons plus prendre toutes les décisions derrière des portes closes. L'Europe ne peut pas être un forum de discussions de technocrates ou de leaders politiques où à la fin, le plus puissant et le plus convaincant impose sa décision, c'est-à-dire, ne nous cachons pas, l'Allemagne.
Nous avons aussi la vision commune que l'Europe ne peut pas avancer avec chauvinisme et nationalisme. Il faut à la fois protéger et partager nos souverainetés. Emmanuel Macron est proeuropéen, nous sommes tous proeuropéens. Sur certains points, il suit une autre trajectoire que la mienne mais je respecte ses opinions. Aujourd'hui, je considère que la présence d'Emmanuel Macron au Conseil européen est l'occasion de prendre des décisions courageuses pour approfondir l'Europe.
Vous appelez les entreprises françaises et européennes à investir en Grèce, mais pendant ce temps, les Chinois s'implantent, comme Cosco, qui contrôle le port du Pirée et lorgne sur des chantiers navals. À Paris, on parle «d'échec européen» et de «problème de souveraineté» à ce sujet. Que répondez-vous?
La nature a horreur du vide. Je m'explique: ces dernières années, l'Europe a eu comme priorité d'imposer aux Grecs une punition, par l'austérité. Il n'était pas question d'investir. Pour d'autres, la Grèce était très attirante, et les Chinois ont saisi cette occasion pour investir. Comme on le sait, celui qui prend des risques peut réussir.
Après sept années de crise, les investisseurs européens, et français, doivent saisir l'occasion de revenir en Grèce. Les perspectives sont très positives, nous avons entrepris des réformes très importantes en un temps extrêmement serré. Aucun autre pays du continent n'en a fait autant.
Nous avons des avantages comparatifs, nous sommes au carrefour de trois continents, nous avons des atouts pour développer l'énergie, les infrastructures, la logistique, les communications, les nouvelles technologies avec du personnel dynamique et extrêmement formé. Et bien sûr, nous avons un climat excellent pour le tourisme. Si les Européens ne comprennent pas que la Grèce est une opportunité, d'autres le comprennent. L'Europe doit combler ce vide qu'elle a laissé.
Si les Européens ne comprennent pas que la Grèce est une opportunité, d'autres le comprennent. L'Europe doit combler ce vide qu'elle a laissé
Certains investisseurs se plaignent de freins, notamment bureaucratiques…
La Grèce est un État de droit, qui respecte aussi la législation européenne. Nous sommes déterminés à lever tous les obstacles bureaucratiques qui empêchent notre économie de progresser. C'est, entre autres, à ce titre que nous avons créé une task force pour les investissements. Nous devons combattre les conflits d'intérêts, les obstacles que chaque investisseur rencontrait quand il était obligé de donner des dessous-de-table. Nous avons entrepris des efforts importants pour faire face à ces problèmes.
Je suis persuadé que les investissements étrangers vont continuer de revenir. Ils ont progressé de 160 % en 2016, et de 170 % au premier semestre de 2017. Nous faisons tout cela pour éradiquer ce mal qu'est le chômage, mon premier combat.
Rencontrez-vous des investisseurs, pendant votre séjour à Paris? Qui, par exemple?
Je rencontre toute une série d'investisseurs, comme j'en rencontre à Athènes et dans toutes les villes où je me déplace. Ce sont des investisseurs avec un intérêt réel et fort pour la Grèce. Nous avons déjà beaucoup travaillé et nous devrions rapidement être en mesure de vous communiquer les investissements, fruits de ces rencontres et créateurs d'emplois en Grèce.
Le nombre de réfugiés et de migrants arrivant en Grèce depuis la Turquie augmente de nouveau, selon les chiffres officiels. Comment votre pays affronte-t-il cette situation?
Nos îles ont porté un fardeau pour toute l'Europe. Cette crise des réfugiés a été la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale. L'accord entre l'Union européenne et la Turquie est difficile mais nécessaire, il a permis d'arrêter l'horreur qu'étaient ces morts quotidiennes dans la mer Égée. Aujourd'hui, nous accueillons plus de 60.000 réfugiés en Grèce continentale, qui vivent dans de bonnes conditions, avec accès aux soins et à l'école. J'en suis fier. La situation dans les îles reste difficile. Il y a un trop grand nombre de migrants et de réfugiés, or les procédures de demande d'asile sont longues.
Quelles mesures particulières avez-vous pris pour l'hiver?
Nous avons financé la location de logements pour abriter ces gens, actuellement dans des conditions extrêmement difficiles. Le problème des réfugiés et des migrants est une question que nous ne pourrons pas résoudre seuls.

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Zimbabwe : qui est Emmerson Mnangagwa, successeur de Robert Mugabe ? (22.11.2017)
Par Alexis Feertchak et AFP, Reuters AgencesMis à jour le 24/11/2017 à 06h59 | Publié le 22/11/2017 à 17h03
PORTRAIT - L'ancien vice-président, limogé il y a quelques semaines par Robert Mugabe, a gagné son bras de fer avec la première dame, qui souhaitait succéder à son mari. Celui que l'on surnomme le «crocodile» accède ce vendredi à la présidence. C'est un cacique du régime, associé à toutes ses politiques répressives depuis 1980.
Au «vieux lion» de 93 ans va succéder le «crocodile» de presque vingt ans son cadet. Alors que Robert Mugabe déclarait «être diplômé en violence», Emmerson Mnangagwa estime que la guérilla lui a appris à «détruire et tuer». Autant de métaphores et de qualificatifs qui témoignent de la nature de la transition politique en cours au Zimbabwe.
L'ancien vice-président Emmerson Mnangagwa est revenu mercredi dans la capitale, Harare, pour être investi président par intérim, dès vendredi, après la démission, mardi, du despote de 93 ans. À 75 ans, le «crocodile», surnommé ainsi pour son caractère impitoyable, avait déjà été désigné, dimanche, président du parti au pouvoir, la Zanu-PF, et candidat pour la présidentielle de 2018. Le Figaro dresse le portrait d'un cacique du régime, qui fut un acteur clé de toutes les répressions depuis l'indépendance du pays en 1980.
● Vainqueur du bras de fer avec la première dame
Longtemps considéré comme le dauphin naturel du plus vieux chef d'État de la planète, il avait été évincé de la vice-présidence, le 6 novembre, au terme d'un bras de fer avec l'épouse du chef de l'État, Grace Mugabe. Désireuse de succéder à son mari nonagénaire, elle avait obtenu le limogeage de son principal rival. Emmerson Mnangagwa avait alors trouvé refuge dans un pays encore inconnu. Ce qui n'a pas empêché son nom de résonner dans tout Harare au cours des dernières semaines. L'armée, hostile à l'ascension de la première dame, est intervenue dans la nuit de 14 au 15 novembre, prenant le contrôle du pays et écartant de facto le couple Mugabe du pouvoir. En accédant à la présidence, Emmerson Mnangagwa est en passe d'atteindre son but, après avoir longtemps attendu son heure. Mais il s'est fait discret pour ne pas apparaître comme le cerveau de l'intervention militaire. Comme celui qui aurait tué le père.

Le 22 novembre, le président sud-africain, Jacob Zuma (à droite), serre la main du «crocodile», alors en exil après son limogeage par Robert Mugabe. - Crédits photo : HANDOUT/REUTERS
● Un ancien de la guérilla indépendantiste
Né le 15 septembre 1942 dans le district de Zvishavana, dans le sud-ouest d'un Zimbabwe qui faisait alors partie de la Rhodésie britannique, le jeune Emmerson a grandi en Zambie. Fils d'un militant anticolonialiste, il rejoint dès le début des années 1960 les rangs de la guérilla indépendantiste contre le pouvoir de la minorité blanche. Avec des membres de l'Armée de libération nationale africaine du Zimbabwe (Zanla), la branche armée de la Zanu, le parti que dirige déjà Robert Mugabe, il est envoyé en 1964 en Chine pour se former d'abord au marxisme à l'université de Pékin, puis au combat et au renseignement. De retour en Rhodésie, il est arrêté en 1965 et échappe à la peine capitale. Comme Robert Mugabe, il purge dix ans de prison et garde de ces années de lutte des liens très étroits avec les militaires du pays. Takavafira Zhou, analyste politique à l'université d'État de Masvingo (sud), décrit Emmerson Mnangagwa comme un «jusqu'au-boutiste par essence».
● Au cœur des répressions du régime de Mugabe
Le «crocodile» ne verse guère de larmes et n'est connu que pour sa dureté. Dès l'indépendance du Zimbabwe en 1980, Robert Mugabe met Emmerson Mnangagwa sur orbite en lui confiant d'importants postes ministériels, notamment celui de la Sécurité de l'État jusqu'en 1988. En 1983, il dirige la division Gukurajundi, un groupe militaire formé en Corée du Nord, qui mène une répression brutale dans les provinces dissidentes du Matabeleland (ouest) et des Midlands (centre). Son bilan n'a jamais été confirmé, mais elle aurait fait environ 20.000 morts.
Il sera ensuite ministre de la Justice puis des Finances, avant de devenir président du Parlement de 2000 à 2005. En 2008, il est chargé des élections auprès du président et dirige les fraudes et les violences qui permettent à Robert Mugabe de conserver le pouvoir malgré sa défaite au premier tour. Son zèle lui vaudra des sanctions américaines et européennes. Mais aussi en 2009 le poste stratégique de ministre de la Défense qui lui permet de commander l'ensemble de l'appareil sécuritaire.
● Un bras droit ambitieux
En 2004, il est victime une première fois de son ambition. Accusé d'intriguer pour le poste de vice-président, il est rétrogradé dans la hiérarchie de la Zanu-PF. Et sa rivale Joice Mujuru remporte la course. Il n'accède finalement qu'en 2014 à la vice-présidence, lorsque Joice Mujuru est victime d'une campagne de dénigrement orchestrée, déjà, par Grace Mugabe.
Il serait aussi l'un des hommes les plus riches d'un régime critiqué pour sa corruption, avec des intérêts dans les mines d'or. Un câble diplomatique américain datant de 2008, révélé par WikiLeaks, évoquait «un patrimoine extraordinaire», en partie amassé lorsqu'il a aidé le président Laurent Kabila à combattre les rebelles en République démocratique du Congo (RDC).

L'ancien président Robert Mugabe (à droite) aux côtés de celui qui était alors son vice-président, le 21 février 2017. - Crédits photo : Philimon Bulawayo/REUTERS
● Le président change, plus que le régime
Si l'annonce du départ de Robert Mugabe a donné lieu à des scènes de liesse à Harare, où certains habitants brandissaient des photos d'Emmerson Mnangagwa et du chef d'état-major de l'armée, Constantino Chiwenga, reste que l'état de grâce pourrait ne pas durer longtemps pour l'ancien vice-président qui fait figure de continuateur du régime. «Personne ne veut d'une transition qui verrait un tyran non élu remplacé par un autre», résumait déjà la semaine dernière le ministre des Affaires étrangères britannique Boris Johnson.
«Ce passé sombre ne va pas disparaître. Cela va le poursuivre comme un chewing-gum collé sous une semelle», prévient Piers Pigou, consultant d'International Crisis Group en Afrique australe. «S'il veut être jugé positivement, il va devoir mener des politiques qui ébranlent les structures de pouvoir de la Zanu-PF, en introduisant un vrai pluralisme politique et en séparant le parti et l'État», souligne-t-il. Pour susciter l'adhésion des Zimbabwéens et attirer les investissements étrangers, le futur chef de l'État a appelé à l'unité et promis de relancer une économie à l'agonie.
En 1980 déjà, Robert Mugabe, jeune premier ministre, avait fait le pari de l'union nationale, associant dans son gouvernement des membres des différentes communautés du pays, même des «Rhodésiens blancs». Une politique d'ouverture qui n'avait pas duré longtemps. En 1983, la répression commençait, avec l'implication directe d'Emmerson Mnangagwa.

L'Afrique se libère-t-elle progressivement de ses vieux dirigeants ? (24.11.2017)
Par Esther Paolini
Publié le 24/11/2017 à 07h33
INTERVIEW - Avec le Zimbabwe, trois pays en 2017 ont dit adieu à des présidents en poste depuis plus de vingt ans. Mariane Séverin, politologue, revient sur cette progressive tendance vers l'alternance politique, qu'il convient de prendre avec des pincettes.
Et de trois. Après José Eduardo dos Santos qui a renoncé au pouvoir en Angola après 38 années de pouvoir en août dernier et Yahya Jammeh, dirigeant de la Gambie pendant 23 ans, Robert Mugabe est le troisième «vieux lion africain» à dire adieu au pouvoir en 2017. Dans chacun des cas, leur départ ne s'est pas effectué dans les mêmes conditions: intervention de l'armée ou non, répression de la population... Ils témoignent néanmoins d'une usure du pouvoir visible lorsque les dirigeants sont en poste depuis des décennies. Interrogée par Le Figaro, Mariane Séverin, chercheuse associée au laboratoire Les Afriques dans le Monde à Science Po Bordeaux, analyse cette progressive tendance vers l'alternance démocratique. Mais la politologue rappelle que la présence d'institutions stables et d'une société civile active est loin d'être un acquis dans la majorité des pays africains.
LE FIGARO - Peut-on faire un lien entre la chute de Mugabe, celle de dos Santos et celle de Jammeh?
Mariane SEVERIN - Le départ de Mugabe est avant tout le résultat d'un concours de circonstances. Il y avait des différends entre les dirigeants du parti au pouvoir, des personnes complètement corrompues. Le taux de chômage du pays dépasse les 90% et Mugabe cumulait plus de richesses que son propre pays. L'importance de l'armée a aussi été primordiale puisque les généraux avaient assez de légitimité pour pouvoir passer à l'action.
En Angola, le président a lui-même renoncé à se présenter. Tandis qu'en Gambie, Yahya Jammeh a contesté sa défaite, instauré un état d'urgence débouchant sur une intervention de l'armée sénégalaise. Les situations ne sont donc pas forcément comparables et il est utile de prendre en considération le facteur humain, la réaction des dirigeants eux-mêmes.
Est-ce une bonne nouvelle pour l'alternance démocratique dans le pays, et plus généralement en Afrique?
C'est un frémissement, un signal encourageant qui indique que les choses sont en train de changer. Mais il faut être prudent et attendre une véritable transition démocratique avant de crier victoire. Emmerson Mnangagwa, qui prend la succession de Mugabe, était très proche de lui. C'est en partie lui qui l'a poussé à rester autant d'années! Et éloigner un homme de 93 ans du pouvoir pour installer quelqu'un de 75 ans, qui pourrait rester au moins 20 ans, ce n'est pas forcément une bonne nouvelle. Il est utile de regarder maintenant ce qu'il va se passer dans le pays. Va-t-il y avoir un renouvellement de l'élite au pouvoir? Un changement du système politique?
La chute de Mugabe a-t-elle été bien accueillie dans le reste du continent?
Depuis le début de la crise au Zimbabwe, j'observe ce qui se dit sur les réseaux sociaux. J'ai été particulièrement étonnée de la virulence d'une partie de l'Afrique francophone pour qui Robert Mugabe était un père de la nation, un révolutionnaire. Ces gens-là voient d'un mauvais œil ce départ. Ils ont aussi, évidemment, en tête l'exemple de la Libye et ce qu'il se passe depuis la chute de Kadhafi. Il faut avoir conscience que dans certains pays c'est la peur de l'inconnu qui domine.
Au Cameroun par exemple, où Paul Biya est au pouvoir depuis 35 ans, le sentiment de la population est partagé entre fatalisme et peur. Une peur suscitée par le terrorisme de Boko Haram, qui fait préférer la stabilité sans démocratie plutôt que la terreur des djihadistes.
Mais à l'inverse, les exemples de la Tunisie, du Burkina Faso ou du Bénin sont encourageants…
Oui, il y a un mouvement de fond de démocratisation du continent, c'est évident. Mais cela prend du temps. Au Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré est arrivé en 2015, après le soulèvement de la population contre le président Blaise Compaoré, à la tête du pays pendant 27 ans. Il y a eu de la violence, des affrontements, mais le pays avance. La chute de Mugabe est un vrai élan d'espoir pour beaucoup d'Africains qui se trouvent dans la même situation. Je pense notamment au Togo, où depuis plusieurs semaines des manifestants se mobilisentcontre le président Faure Gnassingbé Eyadema, au pouvoir depuis 12 ans. Les choses évoluent mais il ne faut pas oublier d'observer les événements sur le long cours. Tout ne se fera pas en quelques années, comme en France, après la Révolution Française.
Avec onze dirigeants africains au pouvoir depuis plus de 15 ans, la chute de Mugabe pourrait avoir un effet domino. Quels autres pays faut-il surveiller ces prochains mois?
Tous les pays entrant en période préélectorale! L'Afrique du Sud élira en 2019 un nouveau président et la campagne pour diriger les partis débute dès maintenant. Nkosazana Dlamini-Zuma, la femme du président Jacob Zuma tente de s'imposer à la tête de l'ANC (African National Congress), parti majoritaire. Au Zimbabwe, la chute du président est également due aux ambitions de sa femme, Grâce Mugabe, qui s'immisçait de plus en plus en politique. La présence de l'épouse de Jacob Zuma pourrait donc faire monter la grogne. En octobre 2018, le Cameroun procédera également a des élections présidentielles sous tension.
À l'image de l'Afrique du Sud, il faut également avoir à l'œil les pays où la société civile se mobilise contre les abus de l'État ou du secteur privé. Par exemple au Kenya, où le pays est sous tension depuis plusieurs semaines après la réélection contestée d'Uhuru Kenyatta.
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Le Zimbabwe rêve d'une nouvelle ère (22.11.2017)

Par Tanguy Berthemet
Mis à jour le 22/11/2017 à 18h32 | Publié le 22/11/2017 à 18h17
VIDÉO - Après la chute de Robert Mugabe, le pays s'interroge sur la volonté de réforme du nouveau pouvoir.
Le Zimbabwe attend sa nouvelle ère. Mercredi, Emmerson Mnangagwa, nouveau leader, est revenu quelques heures après la démission formelle de l'inusable Robert Mugabe. Le vieux président, après des jours d'atermoiements et d'évitements, a fini par comprendre, mardi soir, que son temps était venu de quitter la scène. Dans sa lettre, il prend bien soin de dire que sa décision est «volontaire», dédouanant ainsi l'armée de toute implication brutale, et donc le nouvel homme fort de toute illégitimité.
Parti en exil en catimini le 6 novembre, dans la foulée de son limogeage de la vice-présidence, Mnangagwa réapparaît en vainqueur tranquille de ces deux semaines de duel à distance. «Le camarade Emmerson Dambudzo Mnangagwa a été nommé candidat de la Zanu-PF (le parti au pouvoir) pour occuper la fonction de président de la République», a expliqué Jacob Mudenda, le président de l'Assemblée nationale, retrouvant les accents marxistes, matrice du parti-État qui contrôle le pays depuis près de quarante ans.
«Cette chute est plus le résultat d'une longue lutte interne à la Zanu-PF, une lutte pour survivre et accéder aux prébendes, qu'autre chose »
Piers Pigou, analyste sur l'Afrique australe à International Crisis Group
La passation de pouvoir doit se tenir vendredi, dans l'ordre et le calme. Le calme est aussi revenu à Harare, la capitale qui, après une nuit de fête, est retournée à sa routine et à ses questions. Car si le pouvoir change de visage, il ne change pas de mains ni forcément de méthodes. Le nouveau président Mnangagwa n'a pas l'image d'un réformateur, encore moins d'un opposant. Il est au mieux un baron de la Zanu-PF, membre de tous les gouvernements depuis 1980, au pire un ultraconservateur, figure de l'aile dure du parti. Son principal allié dans le coup de force, le général Chiwenga, le chef des armées qui a coordonné l'entrée des chars dans Harare, n'est pas non plus un dissident. «Cette chute est plus le résultat d'une longue lutte interne à la Zanu-PF, une lutte pour survivre et accéder aux prébendes, qu'autre chose», rappelle Piers Pigou, analyste sur l'Afrique australe à International Crisis Group, un centre de recherche.
Les observateurs comme les Zimbab-wéens s'apprêtent à scruter de près les premiers pas d'Emmerson Mnangagwa. Le néo-président n'ignore pas que sa popularité actuelle est largement factice et que, pour s'imposer, il lui faudra faire des concessions. La communauté internationale le met déjà sous pression, Londres appelant à une «ouverture» tandis que l'Afrique du Sud, le puissant parrain, semble vouloir profiter de l'occasion pour pacifier les choses chez son turbulent voisin. Avant de rentrer, Emmerson Mnangagwa a eu un long entretien avec son désormais homologue sud-africain, Jacob Zuma.
90 % de la population est au chômage
La priorité est sans aucun doute de relancer, en l'ouvrant, une économie exsangue alors que le Zimbabwe s'enfonce depuis dix ans dans la pauvreté et que 90 % de la population est au chômage. «Remettre en marche l'économie va demander un peu de temps. Il y a d'autres mesures rapides et très symboliques à prendre », estime Dewa Mavhinga, responsable local de l'ONG Human Rights Watch (HRW). Il souligne, en premier, l'instauration de la liberté de presse, martyrisée depuis des lustres au Zimbabwe. Mercredi, le quotidien d'opposition Newsday a pu titrer « Bye Bob», une irrévérence impensable il y a quelques jours. «Cela doit continuer. Le plus important est quand même de lancer les réformes nécessaires pour instaurer la démocratie et assurer des élections libres et sans violences», continue-t-il. Il cite l'établissement d'une liste électorale fiable et la mise en place d'une commission électorale véritablement indépendante avant le scrutin prévu en 2018. «Ce serait idéal mais je n'y crois pas trop», insiste Dewa Mavhinga.
Rinaldo Depagne, spécialiste de l'Afrique de l'Ouest pour ICG, se montre aussi prudent: «Dans un cas un peu similaire, au Burkina Faso, il y a aujourd'hui un peu de déception. On sent une volonté du pouvoir de faire évoluer les choses mais on sent aussi que les mauvaises habitudes du passé ont la vie dure.»

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Zimbabwe : Mnangagwa prend officiellement la suite de Mugabe (24.11.2017)
Par Le figaro.fr et AFP agenceMis à jour le 24/11/2017 à 13h05 | Publié le 24/11/2017 à 12h02
VIDÉO - Le nouveau président du Zimbabwe a prêté serment vendredi devant plusieurs milliers de personnes réunies dans un stade à Harare. Il succède à Robert Mugabe, 92 ans, qui a démissionné après 37 ans de règne sans partage.
«Moi, Emmerson Dambudzo Mnangagwa, jure qu'en tant que président de la République du Zimbabwe, je serai loyal à la République du Zimbabwe et obéirai, soutiendrai et défendrai la Constitution et les lois du Zimbabwe», a déclaré vendredi matin le nouveau président dans un stade plein à craquer de la banlieue de Harare. Des dizaines de milliers de Zimbabwéens pleins d'espoir étaient réunies vendredi pour assister à l'investiture du nouveau président du pays Emmerson Mnangagwa, et tourner la page des trente-sept ans du règne sans partage de Robert Mugabe.
À 75 ans, Emmerson Mnangagwa prend les rênes d'un pays ruiné, trois jours après la démission historique du plus vieux dirigeant en exercice de la planète, 93 ans, poussé vers la sortie par son armée, son parti et la rue. Dès l'aube, les habitants de la capitale se sont bousculés aux portes du National Sports Stadium pour acclamer leur nouveau chef de l'État.
Robert Mugabe poussé vers la sortie par l'armée
«Nous sommes très enthousiastes et nous attendons beaucoup de Mnangagwa», a confié à l'AFP une spectatrice, Sharon Mauyakufa, 23 ans, «nous vivons dans une dictature depuis très longtemps». Sur des bannières déployées dans le stade, on pouvait lire «Merci à nos soldats», «le peuple a parlé». Robert Mugabe a été poussé vers la sortie par un coup de force de l'armée, qui a pris le contrôle du pays dans la nuit du 14 au 15 novembre après le limogeage d'Emmerson Mnangagwa.
Cacique du régime depuis l'indépendance du Zimbabwe en 1980, celui qu'on surnomme le «Crocodile» a été remercié sur ordre de la Première dame Grace Mugabe, qui lui disputait la succession de son mari, à la santé de plus en plus fragile. Après avoir résisté plusieurs jours aux pressions des militaires, de son parti, la Zanu-PF, et de la rue, le «camarade Bob» a fini par capituler mardi en présentant sa démission, sous la menace d'une procédure de destitution devant le Parlement.

Les Zimbabwéens célèbrent avec l'armée la démission du président Robert Mugabe, le 21 novembre à Harare. - Crédits photo : MARCO LONGARI/AFP
À la veille de son entrée en fonction, Emmerson Mnangagwa s'est entretenu jeudi avec son prédécesseur, à qui il a promis, ainsi qu'à sa famille, les «conditions de sécurité et de bien-être maximales», a rapporté le quotidien gouvernemental The Herald. Trois jours après la chute du régime, le sort, notamment judiciaire, réservé au couple présidentiel restait mystérieux. «Je ne sais pas ce qui a été négocié mais je peux vous dire qu'aucun Zimbabwéen ne souhaite que Mugabe soit poursuivi en justice ou pendu ou lynché», a déclaré à l'AFP un de ses ministres, Supa Mandiwanzira, «les gens veulent tourner la page».
Le porte-parole de l'ex-président, George Charamba, a pour sa part catégoriquement démenti que l'immunité lui avait été accordée, ainsi que l'ont rapporté plusieurs médias. «Il n'y a aucune raison de lui accorder l'immunité, il n'en a jamais été question pendant les discussions», a-t-il assuré à l'AFP. Un temps annoncé à la cérémonie d'investiture de son successeur, Robert Mugabe ne devait finalement pas y apparaître. «Il n'est pas en état d'y venir», a déclaré George Charamba.
90% de chômage
De retour mercredi du bref exil sud-africain qui a suivi son limogeage, Emmerson Mnangagwa a affirmé qu'il ferait du redressement de l'économie sa priorité absolue. «Nous voulons des emplois», a-t-il promis. Robert Mugabe a laissé derrière lui une économie ruinée par des réformes dévastatrices. L'activité y tourne au ralenti, l'argent manque et le spectre de l'hyperinflation rôde.
Avec un taux de chômage estimé à 90%, les Zimbabwéens vivent de petits boulots dans l'économie informelle. D'autres ont émigré, souvent chez le géant sud-africain voisin. Les attentes de la population du Zimbabwe, sortie épuisée de l'ère Mugabe, sont énormes. «Nous voulons que notre économie se redresse, nous voulons retrouver de l'argent dans les banques, on ne peut pas continuer à faire les poubelles», s'est exclamée Alice Mwanjeya, une mère de six enfants âgée de 57 ans venue assister à l'investiture.

Le porte-parole du Parlement Jacob Mudenda reçoit le document dans lequel le président Mugabe annonce sa démission, le 21 novembre 2017. - Crédits photo : MARCO LONGARI/AFP
«J'espère des changements», a renchéri Archiford Gwandiziva, un chômeur de 21 ans. «J'espère que nous allons retrouver la liberté de parole que nous avions perdue sous Mugabe, où nous étions arrêtés à la moindre critique du gouvernement». Le profil et la personnalité du nouveau maître du Zimbabwe suscitent pourtant quelques inquiétudes. Fidèle parmi les fidèles du régime, Emmerson Mnangagwa, proche de la hiérarchie sécuritaire, plusieurs fois ministre, traîne derrière lui une réputation d'exécuteur des basses œuvres répressives de l'ex-président Mugabe.
Plusieurs ONG ont rappelé le lourd bilan du régime: «des dizaines de milliers de personnes ont été torturées, ont disparu ou ont été tuées», selon Amnesty International. Soucieux de rassurer, Emmerson Mnangagwa s'est présenté en «serviteur» du pays et a déjà appelé à plusieurs reprises «tous les patriotes zimbabwéens à travailler ensemble». Le principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), plaide pour un gouvernement d'union nationale jusqu'aux élections prévues en 2018.
«J'espère que le président Mnangagwa va démontrer que la nation a changé de direction», a déclaré jeudi à l'AFP le chef du MDC Morgan Tsvangirai. «J'espère qu'il évitera de tomber dans la tentation de garder seul le pouvoir».
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Procès Dekhar : 25 ans de prison requis contre le tireur de Libération et de BMFTV (24.11.2017)
Par Le figaro.fr et AFP, Reuters AgencesPublié le 24/11/2017 à 12h59
L'homme de 52 ans est jugé aux assises pour son périple armé à Paris en novembre 2013. Il avait notamment blessé gravement un photographe au siège du quotidien Libération.
Jugé devant la Cour d'assises de Paris depuis le 17 novembre, Abdelhakim Dekhar, devrait connaître sa condamnation vendredi soir. L'homme de 52 ans est accusé d'avoir, le 15 novembre 2013, menacé des journalistes et un agent de sécurité de BFM TV avec un fusil à pompe, blessé grièvement trois jours plus tard un photographe dans le hall du quotidien Libération. Il avait également tiré, le même jour, sur les locaux de la Société générale à la Défense, près de Paris.
Une peine de 25 ans de réclusion criminelle a été requise ce vendredi à l'encontre de d'Abdelhakim Dekhar, jugé pour «tentatives d'assassinat» et «séquestration». L'avocat général a demandé que cette peine soit assortie d'une période de sûreté des deux tiers.
Son parcours avait démarré à BFMTV le 15 novembre 2013, où il avait menacé avec un fusil à pompe M. Antoine. Il aurait alors dit: «La prochaine fois, je ne vous raterai pas», avant de prendre la fuite en laissant deux cartouches à terre. Trois jours après, il avait grièvement blessé par balle César Sébastien dans le hall d'accueil de Libération. Il s'était ensuite rendu dans le quartier d'affaires de la Défense, où il avait tiré sur une porte d'entrée de l'immeuble de la Société générale, non loin de deux salariées. Il avait enfin pris un automobiliste en otage. Pendant cinq jours, la police avait traqué cet homme, qualifié alors d'«ennemi public numéro 1».
Il n'avait été arrêté que le 20 novembre 2013, sur dénonciation d'un ami. Sébastien Simonian-Lemoine, qui avait hébergé Abdelhakim Dekhar, avait mené les policiers jusqu'à un parking de Bois-Colombes dans les Hauts-de-Seine. Ils l'avaient retrouvé à l'intérieur de la voiture de sa sœur dans un semi-coma médicamenteux.
Il cherchait une «mort romantique»
«Le principal mobile, c'est tuer par dépit social», a déclaré l'avocat général, Bernard Farret, dans son réquisitoire. «BFMTV, Libération, la Société Générale sont des symboles qui correspondent bien au mobile politique», a-t-il poursuivi. «Il n'est pas dans le remord. Il est resté dans la revendication, la rancœur», a mis en avant le magistrat, en s'appuyant sur la conclusion d'une psychologue.
Décrit par des enquêteurs comme un «affabulateur» et un «menteur pathologique» capable de violences, Abdelhakim Dekhar se présente pour sa part comme un militant politique. Jeudi, il a affirmé qu'il voulait «intimider» ses cibles mais ne blesser personne. Selon lui, son véritable objectif était de se suicider de manière théâtrale. «J'étais dans un projet de suicide par intermédiaire: je voulais que la police me tue». Il s'est rendu d'abord à BFMTV parce que «la couverture H24 aurait démultiplié (son) scénario». Il voulait une mort «romantique», pour ne pas être perçu «comme un loser» par ses enfants qui avaient alors 5 et 7 ans. Il ne les voit plus depuis sa séparation avec leur mère suite à des violences.
L'homme a déjà été condamné, comme complice, en 1998, à quatre ans de prison pour «association de malfaiteurs» dans le procès des amants «tueurs de flics», Florence Rey et Adry Maupin. Au cours de cette fusillade, trois policiers, un chauffeur de taxi et Adry Maupin avaient été tués.
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Le prince héritier saoudien qualifie le leader iranien de «nouvel Hitler» (24.11.2017)

Par Le figaro.fr et agence ReutersMis à jour le 24/11/2017 à 13h04 | Publié le 24/11/2017 à 10h34
Mohammed Ben Salman a estimé que Riyad devait répondre à l'Iran. Il explique notamment que, comme en Europe entre 1939 et 1945, «l'apaisement ne marche pas».
«Nous ne voulons pas que le nouvel Hitler de l'Iran refasse au Moyen-Orient ce qui s'est passé en Europe». Cette déclaration choc du prince saoudien Mohammed Ben Salman, tirée d'une discussion avec un journaliste du New York Times , n'apaisera sûrement pas les tensions entre l'Arabie sunnite et l'Iran chiite. Selon le prince héritier, qui est également ministre de la Défense, les visées expansionnistes de l'Iran, dont il accuse Khamenei d'être le promoteur, doivent faire l'objet d'une réponse. Dans ses propos rapportés par le journal américain, il ajoute en effet: «Nous avons appris de l'Europe que l'apaisement ne marche pas».
Les deux pays s'affrontent indirectement dans les conflits en Syrie et au Yémen. Dernière preuve de cette lutte d'influence, la crise politique ouverte par le premier ministre libanais Saad Hariri qui a annoncé, à la surprise générale, sa démission depuis Riyad, la capitale saoudienne, le 4 novembre.
En novembre, un tir de missile interprété comme un acte de guerre
Saad Hariri affirmait craindre pour sa vie et mettait en cause le Hezbollah, milice chiite libanaise liée à Téhéran, et le régime iranien, les accusant de semer le chaos dans le monde arabe. Le Hezbollah a estimé que cette annonce constituait un acte de guerre orchestré par les Saoudiens, ce que ces derniers ont démenti. Depuis, Hariri est revenu sur sa décision.
Autre point de crispation, L'Arabie saoudite a pris il y a deux ans et demi la tête d'une coalition militaire engagée dans la guerre civile au Yémen où elle a mené plusieurs milliers de raids aériens. Le régime de Riyad est en lutte contre les milices chiites houthies alignées sur l'Iran qui ont, un temps, contrôlé la majeure partie du pays. Dans son entretien au New York Times, le prince Salman affirme que ce conflit est entré dans une phase favorable à son pays et à ses alliés qui maîtrisent 85% du territoire yéménite. Les Houthis conservent toutefois le contrôle des grandes agglomérations dans ce conflit qui a fait quelque 10.000 morts. La milice avait tiré le 4 novembre un missile visant l'aéroport de Riyad, une agression que les autorités saoudiennes ont interprété comme un acte de guerre de la part de l'Iran.
Le prince Salman avait déclaré en mai que son pays s'assurerait que tout nouveau contentieux avec Téhéran «se déroule en Iran».
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Prières de rue : entre Clichy et les musulmans, quinze ans de jeu de dupes (24.11.2017)
Par Edouard de Mareschal
Mis à jour le 24/11/2017 à 12h21 | Publié le 24/11/2017 à 09h25
ENQUÊTE - Le conflit entre la mairie et les associations musulmanes trouve racine dans l'incapacité des musulmans de Clichy à s'entendre et se fédérer, mais aussi dans de multiples promesses électoralistes non tenues.
Il ne devrait pas y avoir de nouvelles prières de rue, ce vendredi, devant le parvis de l'Hôtel de Ville de Clichy-la-Garenne. Le préfet des Hauts-de-Seine les a interdites la semaine dernière, à la suite d'une contre-manifestation d'une soixantaine d'élus mobilisés par le maire LR de la ville, Rémi Muzeau. Mais le conflit est loin d'être réglé ; il est même au point mort. L'Union des associations musulmanes de Clichy (UAMC), qui organisait chaque vendredi les prières de rue depuis huit mois, ne veut toujours pas entendre parler de la salle de prière ouverte rue des Trois-Pavillons par la mairie. De son côté, l'association cultuelle et culturelle de Clichy (ACCC), qui gère cette nouvelle salle, n'est pas non plus disposée à intégrer l'UAMC. La mairie, enfin, estime que ce n'est pas à elle de régler ce qu'elle considère désormais comme une querelle de chapelle.
La crise durait depuis mars dernier, lorsque la police a évacué de force la salle de prière de la rue d'Estienne-d'Orves occupée illégalement par des fidèles. Mais ses racines, bien plus anciennes, sont symptomatiques de l'incapacité de l'islam de France à organiser son culte, et à résister aux sirènes des promesses électoralistes de certains pouvoirs locaux qui veulent s'assurer le vote musulman. Jusqu'au début des années 2000, les musulmans de Clichy priaient dans une petite salle rue Madame-de-Sanzillon, et dans deux salles du foyer Sonacotra de la rue Victor-Hugo. Le parking sous-terrain, qui leur fait face, était régulièrement investi par les fidèles qui bloquaient la circulation.
«Islam des caves et des garages»
L'encadrement du foyer fermait les yeux, jusqu'à ce que la situation devienne intenable au point qu'on leur en interdit l'accès en 2004. C'est l'époque où Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, veut mettre fin à «l'islam des caves et des garages». Les musulmans, désormais sans salle, lancent les premières prières de rue devant l'hôtel de ville. «On demandait la réalisation d'une promesse déjà faite trois ans plus tôt», explique Hamid Kazed, le président de l'UAMC.
«Nous avons déposé sept permis de construire, à chaque fois rejetés par la mairie.»
Mohamed Bechari, président de la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF)
Maire socialiste à l'époque, Gilles Catoire tente alors de désamorcer la crise en faisant appel à Mohamed Bechari, président de la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF). Rouage important du Conseil français du culte musulman (CFCM), réputé proche de Martine Aubry, il est adoubé par le maire pour représenter la communauté musulmane clichoise. «On convient ensemble d'ouvrir une salle de prière transitoire, en attendant de concrétiser un projet de mosquée», se souvient Mohamed Bechari. Un bâtiment provisoire, situé rue Foucault, est prêté aux musulmans par la signature d'un bail précaire en 2006. Un premier terrain est envisagé rue Victor-Hugo, avant d'être abandonné. La mairie rachète finalement un autre terrain de 1000 mètres carrés rue Valiton en 2008.
Personne n'assume la responsabilité du fiasco
Pour cette future mosquée, on voit grand, très grand. Le cabinet d'architecte Ausia imagine un ensemble immobilier avec une salle de prière pour 600 fidèles, adossé à un pôle culturel avec bibliothèque, médiathèque, salles d'informatique, de cours, de conférences... Le financement du projet, estimé à 4,7 millions d'euros, doit se faire par une collecte auprès des fidèles, mais aussi par l'intervention de financements étrangers - notamment du Qatar. Quant à la partie culturelle, elle sera financée grâce à des subventions de la ville, du département et de la région, voire de l'Europe. Mais les années passent, le projet s'enlise... et la mosquée de Clichy-la-Garenne ne verra jamais le jour.
«Monsieur Bechari a joué au poker menteur avec nous en ce qui concerne le financement.»
Gilles Catoire, ancien maire socialiste de Clichy-la-Garenne
Aujourd'hui, personne n'assume la responsabilité de ce fiasco. «Nous avons déposé sept permis de construire, à chaque fois rejetés par la mairie. On peut se tromper deux ou trois fois, mais sept fois... Ça montre bien la mauvaise volonté de la mairie qui n'a jamais eu l'intention de voir ce projet concrétisé», estime Mohamed Bechari, le président de la FNMF. Pour Gilles Catoire, l'échec est plutôt dû à l'incapacité des musulmans à réunir l'argent nécessaire au projet. «Monsieur Bechari a joué au poker menteur avec nous en ce qui concerne le financement», écrit l'ancien maire sur son blog. L'ex-élu explique qu'il avait fait intervenir un commissaire aux comptes pour vérifier la réalité des fonds annoncés. «On lui a offert un couscous, mais il n'a jamais pu accéder aux comptes et aux comptes bancaire pour vérifier le sérieux des financements annoncés», assure-t-il, s'interrogeant sur ce que sont devenus ces fonds récoltés.
Trente ans de règne ininterrompu
Les règlements de compte entre la mairie et la communauté musulmane se placent aussi sur le terrain électoral. «Monsieur Catoire, c'est toujours le vote musulman qui l'a fait gagner», estime Noureddine Bahri, aujourd'hui vice-président de la salle de prière des Trois-Pavillons. «Avant chaque élection, il venait nous demander de l'aide. Il nous emmenait avec lui faire du porte-à-porte auprès des électeurs musulmans. Puis ses promesses partaient en l'air.» Début 2010, le divorce est consommé entre Gilles Catoire et Mohamed Béchari. En décembre 2013, la municipalité lance une procédure d'expulsion de la salle de prière de la rue Foucault qui leur avait été allouée provisoirement huit ans plus tôt. Mais les fidèles refusent de quitter les lieux, malgré plusieurs décision de justice en faveur de la municipalité.
Entre-temps, Gilles Catoire s'est tourné vers une autre association musulmane, l'UAMC, qui devient sont interlocuteur principal. Le maire met à leur disposition une salle de prière rue d'Estienne-d'Orves à l'aide d'un bail précaire, avec la promesse qu'ils pourront la racheter pour la transformer en mosquée. Mais en 2015, sa réélection est annulée par le Conseil d'État et il décide de ne pas se représenter. Son principal opposant, Rémi Muzeau (LR), lui succède après trente ans de règne ininterrompu.
«On veut construire la mosquée qu'on nous a toujours promis»
Rémi Muzeau parvient à récupérer le terrain de la rue Foucault sur lequel il veut ouvrir une école. Il leur attribue un ancien bâtiment administratif rue des Trois-Pavillons par la signature d'un bail emphytéotique de 99 ans avec l'association cultuelle et culturelle de Clichy. Mais lorsqu'il demande à récupérer aussi l'immeuble de la rue d'Estienne-d'Orves, qu'il veut transformer en médiathèque, l'UAMC refuse catégoriquement de quitter les lieux. Le bras de fer se termine en mars 2017, lorsque la police vient déloger les fidèles par la force après confirmation de l'ordonnance d'expulsion par le Conseil d'État.
Pour protester, les musulmans organisent alors des prières de rue chaque vendredi devant la mairie. «Rémi Muzeau nous avait promis que nous pourrions construire notre mosquée rue d'Estiennes-d'Orves», fulmine aujourd'hui le président de l'UAMC, Hamid Kazed. L'interdiction des prières de rue par la préfecture n'a pas pour autant éteint l'incendie. «Aujourd'hui, la seule solution qu'on nous propose, c'est de rejoindre l'autre mosquée de la rue des Trois-Pavillons. Mais nous on veut un terrain, on veut construire la mosquée qu'on nous a toujours promis.» Les différentes réunions de conciliation ne les ont pas fait changer de position. Quinze ans après la première prière devant le parvis de l'hôtel de ville, les relations ne sont toujours pas apaisées entre une frange des musulmans déterminés à obtenir leur propre salle et la mairie qui se montre aujourd'hui inflexible.
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