dimanche 26 novembre 2017

La notion de "culture du viol" (24.11.2017)

Peggy Sastre : «La notion de “culture du viol” n'est absolument pas démontrée»
Les sites réservés aux adultes difficiles à interdire aux mineurs (24.11.2017)
«Le porno véhicule une image désastreuse des rapports hommes-femmes» (24.11.2017)
La jeunesse exposée à la violence de la pornographie (24.11.2017)

Peggy Sastre : «La notion de “culture du viol” n'est absolument pas démontrée»
Par Eugénie Bastié
Mis à jour le 24/11/2017 à 17h56 | Publié le 24/11/2017 à 17h56
FIGAROVOX/ENTRETIEN - En disciple de Darwin, la journaliste scientifique développe une lecture biologique des questions sexuelles. Elle s'érige contre un féminisme militant qui méprise les faits et tord les chiffres à des fins idéologiques.
LE FIGARO. - Certaines féministes militantes, et la ministre Marlène Schiappa elle-même, dénoncent une «culture du viol» à grand renfort de statistiques. Que pensez-vous de cette idée selon laquelle notre société organiserait et ferait la promotion du viol?

Peggy SASTRE. -Cette notion de «culture du viol» est extrêmement problématique, pour reprendre un vocable à la mode, et elle n'est absolument pas «démontrée». Nous vivrions dans une société qui tolérerait, excuserait, voire approuverait le viol? Est-ce que la hausse exponentielle des condamnations pour violences sexuelles que l'on observe notamment en France ces cinquante dernières années en fait partie? La charge réputationnelle qui pèse sur les auteurs de délits et de crimes sexuels une fois qu'ils ont purgé leur peine? Le fait qu'il s'agisse à la fois d'individus présentant parmi les plus faibles taux de récidive et qui sont confrontés aux plus grandes difficultés de réinsertion? Ou encore qu'il n'y a pas mieux pour détruire la vie de quelqu'un que de l'accuser à tort d'avoir commis ce genre de violences? Il m'est souvent arrivé d'avancer ces arguments en milieu militant pour qu'on me réponde un charabia infalsifiable. Qu'on me dise que la stigmatisation des violeurs est la preuve que le viol exerce une fascination et donc qu'il est banalisé, et donc que la «culture du viol» existe. Je crains que beaucoup de féministes contemporaines soient hermétiques à la logique la plus basique. À un moment donné, je pense qu'il faudrait aussi réfléchir à la valeur «représentative» que l'on assigne à des personnalités qui peuvent incarner le «paradoxe féministe» observé dans beaucoup de pays occidentaux. En gros, les trois quarts de la population adhèrent aux bases du féminisme - une égalité politique, économique et sociale des femmes et des hommes -, mais refuse l'étiquette féministe. C'est encore plus saillant chez les plus jeunes générations, où seuls 8 à 10 % des individus s'identifient comme féministes. Des femmes parfaitement féministes comme Abnousse Shalmani ou Helen Pluckrose ont décidé de faire leur coming out «extra-féministe» - c'est un symptôme qu'on ne peut ignorer. Là encore, la justification «militante» classique, c'est la grande théorie du complot parano où «les médias» ne laisseraient la parole qu'aux féministes les plus caricaturales, et dégoûteraient ainsi les «gens normaux». Sauf qu'à l'ère des réseaux sociaux, un tel discours n'est plus tenable. À moins de considérer que les fanatiques de Facebook ou de Twitter sont des marionnettes agitées par des «réactionnaires masqués», il faut se rendre à l'évidence: la dérive sectaire du féminisme ne cesse de devenir son propre épouvantail.

Derrière l'incroyable impact médiatique de l'affaire Weinstein, voyez-vous le signe d'un «néo-puritanisme»?

Je pense surtout que le puritanisme n'est jamais parti bien loin. Pour paraphraser l'un de mes mentors (mentores?), Catherine Robbe-Grillet, l'histoire des mœurs fonctionne par cycles pendulaires. Depuis plusieurs années déjà, nous sortons d'un cycle de relative libéralisation et assistons à un retour de carcans aussi vieux que la lignée des hominidés. À l'époque romaine, on grattait les stèles pour faire disparaître des «indésirables» de l'histoire. Aujourd'hui, on supprime un acteur, Kevin Spacey, d'un film quitte à retourner des scènes un mois avant sa sortie ou on efface le nom d'un professeur de psychologie, Todd Heatherton, d'un manuel de référence. Sans procès, sans jugement, juste sur la base d'accusations et d'une panique morale planétaire. Je n'ai vraiment pas un tempérament pessimiste, mais il m'est de plus en plus difficile de pas me dire que 700 ans de Renaissance, de Réforme ou de Lumières vont être dézinguées par dix petites années de réseaux sociaux, engrais d'un tribalisme qu'on pensait à tort vaincu par la Raison, dont on croyait la marche «naturelle» et inexorable.

De la parité à l'Assemblée nationale jusqu'à la demande d'une étude paritaire des écrivains femmes et hommes au bac de français, l'objectif du fifty-fifty gagne tous les domaines. Que pensez-vous de l'utilisation des chiffres à des fins militantes dans le mouvement féministe?
Je n'en penserais pas du mal s'ils n'étaient pas souvent complètement faux. Lorsque Marlène Schiappa se fait taper sur les doigts par les gynécologues qui lui disent que son chiffre «75 % d'épisiotomies» est bidon et qu'elle répond que ce n'est pas «au gouvernement de donner la réalité des chiffres», je trouve cela extrêmement grave à une époque de fake news, d'illibéralisme galopant et de «mort de l'expertise», pour citer Tom Nichols. De la même manière lorsqu'on avance 25 à 30 % de différences de salaire entre hommes et femmes qui sont calculés sur des moyennes de rémunération alors que les femmes s'orientent vers des professions moins rémunératrices que celles que privilégient les hommes. Ce n'est évidemment pas grave de se tromper, si on se corrige lorsqu'on accède à de meilleures données. Par contre, faire primer son idéologie ou ses affiliations communautaires sur l'honnêteté intellectuelle, c'est se façonner un bon gros boomerang qui finira tôt ou tard par vous revenir en pleine face. Et les adversaires du féminisme n'attendent que cela.

Dans La domination masculine n'existe pas, vous affirmez en bonne darwiniste le fondement biologique de la différence des sexes. Vous ne pensez pas comme Françoise Héritier que si les femmes sont plus fragiles que les hommes, c'est parce que depuis les grottes préhistoriques, ils confisquaient la viande et nous nourrissaient de bouillies?

Cette histoire est une malheureuse illustration de la «loi du bullshit» - pour réfuter une ineptie, il faut consacrer dix fois plus d'énergie qu'il aura été nécessaire pour la pondre. Mais je vais être concise, d'autant plus que je prépare un long article sur le sujet: cette hypothèse est en totale contradiction avec près de 150 ans de recherches sur le dimorphisme sexuel, que l'on sait aujourd'hui attribuable à la compétition intrasexuelle et au différentiel d'investissement parental minimal issu de l'anisogamie, selon le paradigme dit de Darwin-Bateman. Quasiment tous les primates ont un dimorphisme sexuel similaire au nôtre et les «rôles genrés darwiniens» se retrouvent dans l'ensemble du règne animal, comme le confirme une récente étude publiée dans la revue Science Advances. Ce qui fait du propos d'Héritier - qu'elle reprend d'une de ses élèves, Priscille Touraille, qui dans le livre tiré de sa thèse écrit noir sur blanc qu'elle n'a pas de valeur scientifique - un propos néocréationniste.
Vous avez qualifié la volonté de mettre en œuvre l'écriture inclusive de «terrorisme intellectuel». N'exagérez-vous pas?
Je qualifie surtout de terrorisme intellectuel la méthode employée par bon nombre d'apôtres de l'écriture inclusive, qui croient (ou font croire) que le clivage pour-contre suit des lignes partisanes claires et qui au lieu d'avancer des faits - par exemple, est-ce que les inégalités hommes-femmes sont ou non favorisées par une sexuation de la langue? Est-ce que le déterminisme linguistique voulant que le langage façonne les visions du monde est une réalité? - optent pour une argumentation morale: le camp du bien contre celui du mal, les progressistes contre les réactionnaires, les féministes contre les phallocrates, la bonne marche de l'histoire contre la mauvaise, etc. Ce qui indique une grande faiblesse factuelle et une tentative de compenser en faisant de gros yeux vertueux. Sauf que lorsque vous pensez que «tout est politique», c'est tout simplement que vous avez un mode de penser totalitaire.
*Elle a publié «La domination masculine n'existe pas» (Anne Carrière, 2015)
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Les sites réservés aux adultes difficiles à interdire aux mineurs (24.11.2017)
Par Lucie Ronfaut
Mis à jour le 24/11/2017 à 20h37 | Publié le 24/11/2017 à 19h45
VIDÉO - De nombreuses solutions existent pour bloquer l'accès à la pornographie aux plus jeunes, mais toutes ne sont pas efficaces.
Couvrez ce sein que les enfants ne sauraient voir. Il est plus facile de parler de contrôle de la pornographie en ligne que de l'appliquer. En Grande-Bretagne, dès 2018, on devra prouver son âge avant d'accéder à un site pornographique. Pour ce faire, les internautes seront obligés à rentrer leurs données de carte bancaire. Les sites refusant d'appliquer cette mesure risqueront une amende de 250.000 livres (environ 280.000 euros) et seront susceptibles d'être bloqués par les fournisseurs d'accès à Internet.
Cette loi, votée début 2017, a été très critiquée par les défenseurs des libertés en ligne, inquiets de la collecte forcée des données bancaires des internautes anglais, ainsi que d'une censure partielle du Web. D'autres pays bloquent carrément l'accès aux principaux sites pornographiques, comme l'Indonésie ou Singapour. En France, il est en théorie interdit de rendre accessible la pornographie à un mineur. Beaucoup de sites s'accommodent de cette loi en demandant à leurs visiteurs de vérifier leur âge. Une mesure purement déclarative, et donc contournable.
Bloquer est-il protéger?
Le principal problème du contrôle de la pornographie en ligne est qu'elle n'est pas cantonnée à des sites spécialisés. On retrouve des contenus sexuels sur des réseaux sociaux, dans des publicités, sur des plateformes de téléchargement illégal, etc. La pornographie est partout sur le Web, même s'il est difficile d'en mesurer l'importance. La plupart des gros sites du secteur ne communiquent pas de mesures d'audience. Impossible par ailleurs de ranger dans la catégorie «pornographie» les sites qui proposent des contenus sexuels, mais parmi d'autres choses.
«Bloquer n'est pas protéger. On ne doit pas prendre les enfants pour des imbéciles et les laisser accéder à des sites qui parlent bien de sexualité»
Gregory Veret, cofondateur et président de Xooloo
Il existe de nombreuses solutions pour bloquer l'accès à la pornographie aux plus jeunes, proposées par les fournisseurs d'accès à Internet, les opérateurs télécoms ou par d'autres entreprises, sous forme de logiciel ou d'application à installer sur le smartphone. Celles-ci fonctionnent généralement par liste noire de sites, ou en détectant des mots-clés.
«Cette méthode n'est pas forcément efficace, car elle présente un Internet aseptisé à l'enfant. On ne peut pas bloquer entièrement YouTube parce qu'on y a trouvé une vidéo pornographique», estime Gregory Veret, cofondateur et président de Xooloo, une entreprise française spécialisée dans le contrôle de la vie numérique des enfants. «Bloquer n'est pas protéger. On ne doit pas prendre les enfants pour des imbéciles et les laisser accéder à des sites qui parlent bien de sexualité.» Xooloo propose de son côté un «blocage chirurgical», en masquant les contenus inappropriés mais sans bloquer le site entier. L'entreprise collabore déjà avec plusieurs opérateurs télécoms français, dont SFR et Bouygues Telecom.

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«Le porno véhicule une image désastreuse des rapports hommes-femmes» (24.11.2017)
Par Agnès Leclair
Mis à jour le 24/11/2017 à 18h52 | Publié le 24/11/2017 à 18h32
INTERVIEW - Le professeur Israël Nisand est gynécologue obstétricien à Strasbourg. Depuis plus de vingt-cinq ans, il rencontre des collégiens et des lycéens dans leurs établissements pour répondre à leurs questions sur la sexualité.
LE FIGARO. - Une prévention contre la pornographie dans les collèges peut-elle aider à lutter contre le harcèlement et les violences sexuelles?
«Rien n'est fait pour éduquer les enfants sur la question de la sexualité dans les écoles. Aujourd'hui, c'est le porno qui s'en charge.»
Pr Israël NISAND. - Bien sûr! Aujourd'hui, je rencontre des collégiens massivement confrontés à ces vidéos et qui estiment qu'une fille qui dit «non» pense «oui». Ou encore que celles qui ne consentent pas changent d'avis au cours de l'acte sexuel. Dans ce contexte, comment peut-on s'étonner de l'ampleur des violences sexuelles dans notre société et de leur augmentation? Le porno influence la manière dont les jeunes garçons voient les femmes. Si personne ne leur a appris ce qu'est le consentement, ils ne peuvent pas l'inventer. Quant aux filles, confrontées à des images dégradantes des femmes, elles s'imaginent que c'est normal de se plier à toutes les pratiques, de tout accepter. Rien n'est fait pour éduquer les enfants sur la question de la sexualité dans les écoles. Aujourd'hui, c'est le porno qui s'en charge. Je suis content que le président s'empare du sujet, car, jusqu'à présent, personne n'a eu le courage politique de le faire.
L'éducation à la sexualité reste un sujet sensible. Pensez-vous que les parents peuvent se montrer réticents à ces actions éducatives? La volonté du gouvernement de les associer à la prévention peut-elle être efficace?
«On a pris conscience que ces enfants ne sont pas protégés au moment où ils ont le plus besoin de l'être et qu'ils n'ont personne à qui en parler.»
Les mentalités ont évolué. Il me semble que ces réticences ne sont pas d'actualité. Les parents ne savent plus comment protéger leur enfant de ces images en libre accès sur les smartphones dans la cour de récréation. Les enfants n'osent pas dire qu'ils ne veulent pas regarder ces vidéos de crainte de se faire exclure du groupe. On a pris conscience que ces enfants ne sont pas protégés au moment où ils ont le plus besoin de l'être et qu'ils n'ont personne à qui en parler. Le gouvernement a raison de vouloir faire une campagne d'information pour les parents, de les associer. Mais il faudrait aussi bloquer l'accès au porno en ligne pour les mineurs, en demandant un numéro carte bleue pour y accéder par exemple, et d'instaurer des sanctions financières lourdes pour les fournisseurs d'accès qui ne respectent pas la loi sur la protection des mineurs.
D'autres actions devraient-elles être menées dans l'enceinte scolaire pour lutter contre le sexisme à l'école?
Bien sûr, des clichés sur la domination masculine ou le besoin de séduction féminine circulent à l'école comme dans le reste de la société. Mais ces idées reçues sont très longues à faire évoluer. D'autres actions éducatives peuvent bien sûr être menées. Mais cela semble accessoire par rapport à la lutte contre la pornographie qui véhicule une image désastreuse des rapports entre les femmes et les hommes, tout particulièrement pour les enfants qui n'ont pas de modèle parental qui puisse leur servir d'exemple.
«Des clichés sur la domination masculine ou le besoin de séduction féminine circulent à l'école comme dans le reste de la société.»
Qui doit aborder ce sujet à l'école: les enseignants, des associations?
Ce n'est ni aux professeurs ni aux parents de le faire, car l'information à la sexualité doit s'effectuer sur le mode de la complicité. Elle ne doit pas venir de quelqu'un qui est en position de juger l'enfant ou l'adolescent. Les pays qui ont réussi à mettre en place cette éducation ont confié cette mission à des professionnels de santé.

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La jeunesse exposée à la violence de la pornographie (24.11.2017)
Par Caroline Beyer
Mis à jour le 24/11/2017 à 20h39 | Publié le 24/11/2017 à 20h01
La lutte contre l'exposition des enfants au porno est l'un des axes majeurs du plan dévoilé samedi par Emmanuel Macron pour lutter contre les violences faites aux femmes.
Le «porno», ce fléau chez les adolescents. Pour combattre «les stéréotypes et les rapports dominants», le président Macron a choisi d'élever la lutte contre la pornographie au rang de «priorité». Dans les collèges, une campagne de sensibilisation sera menée auprès des élèves, mais aussi auprès des parents à qui rendez-vous est donné dès septembre prochain. Une opération inscrite dans le plan de lutte des violences faites aux femmes que l'Élysée détaille ce 25 novembre. Cela suffira-t-il?
Domination, humiliation, violence. Dans l'ombre de la Toile, c'est une image dégradée de la femme que les sites pornographiques véhiculent. À l'opposé de ce que tentent de promouvoir les campagnes institutionnelles pour l'égalité entre les sexes. Mais en 2017, c'est bien sûr Internet que les adolescents, biberonnés à ces vidéos X gratuites, accessibles via leur smartphone, font leur éducation sexuelle. Dans le silence coupable des adultes. Quinze ans après l'arrivée de Youporn, un tiers des 13-14 ans a déjà vu une vidéo pornographique, selon une étude de l'Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique (Open). Plus d'un garçon sur deux et plus d'une fille sur trois estiment que ces vidéos ont participé à l'apprentissage de leur sexualité. Avec des conséquences évidentes sur les relations amoureuses et les violences faites aux femmes. «Génération porno» ou la «fabrique du porc», estime Thérèse Hargot, sexologue intervenant au groupe scolaire Stanislas et qui tire la sonnette d'alarme depuis des années.
Des stéréotypes plus virulents sur Internet
Le 13 novembre, c'est une campagne baptisée «Tu m'aimes, tu me respectes», à destination des 15-18 ans, qu'a lancée le centre Hubertine Auclert, associé à la région Ile-de-France. Objectif: prévenir les violences sexistes et sexuelles dans les premières relations amoureuses, à travers les messages «Non c'est non», «je m'habille comme je veux», ou encore autour de la jalousie masculine que 71 % des jeunes filles jugent valorisante. «Il ne faut pas seulement sensibiliser les filles comme nous le faisons en ce moment, estime Valérie Pécresse, présidente (LR) de la Région Ile-de-France. Il faut aussi éduquer les garçons dès l'adolescence».
Car, sur Internet toujours, ce grand lieu de sociabilité des adolescents, les stéréotypes sont plus virulents que dans le monde réel. Sur les réseaux sociaux, les garçons exposent leur virilité, tandis que les filles doivent se montrer sexy, mais pas trop. Le cyberharcèlement, à travers ces phénomènes de «Revenge porn», «sexting», «slutshaming» (Porno vengeur, textos pornographiques, honte aux salopes), les touche davantage que les garçons. Et globalement, revient le constat d'une inconscience et d'une banalisation des actes sexuels chez une population de jeunes, voire très jeunes adolescents, qui n'ont précisément aucune maturité sexuelle.
«Il ne faut pas seulement sensibiliser les filles comme nous le faisons en ce moment. Il faut aussi éduquer les garçons dès l'adolescence»
Valérie Pécresse, présidente (LR) de la Région Ile-de-France
«J'ai le droit de refuser une fellation? Je peux envoyer des photos de moi nue?»… Questions d'élèves de 6e lors d'une séance d'éducation à la sexualité. «C'est dans le cadre de ces séances, où les élèves s'expriment librement, que la question des violences faites aux femmes apparaît spontanément», explique Valérie Sipahimalani, professeur de SVT et secrétaire générale adjointe du Snes.
Des enseignants peu à l'aise avec ces questions intimes
Depuis 14 ans, une circulaire de l'Éducation nationale fixe les conditions de cette éducation à la sexualité. Elle comporte notamment trois séances annuelles, encadrées par des enseignants ou des intervenants extérieurs, de l'école primaire au lycée. Mais dans les faits, on est loin du compte. Un quart des établissements ne met aucune action en place, selon l'enquête du Haut conseil à l'égalité entre les hommes et les femmes, publiée en 2016 et rappelée cette semaine par le Défenseur des droits.
Les enseignants ne sont pas forcément à l'aise avec ces questions intimes et taboues. Comment développer cette éducation à l'école? Quel est le rôle des parents? Autant de questions qui demeurent au fil des années. Pourtant, le constat, lui, fait l'unanimité: il y a urgence à parler de sexualité, de relation à l'autre. «Comment ça marche?», «le point G c'est où?», «la sodomie ça fait mal?». Mais aussi: «Peut-on pardonner l'infidélité?», «la différence d'âge, c'est grave?»… «Les adolescents ont des questions à la fois techniques et très existentielles», explique Maëlle Challan-Belval, qui a monté une structure d'accompagnement à «l'Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle» intervenant dans les établissements scolaires. Elle décrit à la fois «le grand besoin des adolescents» sur le sujet et «le grand délaissement des adultes».

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