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Frères musulmans à la conquête du monde
Égypte Iran Irak Liban, Hezbollah Libye Syrie Turquie
Mali, Sahel, Opération Barkhane
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L'Irak annonce que Mossoul est "libérée" de l'État islamique (09.07.2017)
Deux journalistes irakiens tués par l’EI près de Mossoul (08.07.2017)
Éric Zemmour : «L'État islamique, hydre cauchemardesque des Occidentaux» (07.07.2017)Attentat de Londres : "N'ayons pas peur de nommer l'islamisme radical" (Goldnagel)
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L’armée libanaise annonce le début de l’offensive pour chasser l’EI de l’est du pays (19.08.2017)
À la reconquête de Raqqa, avec la Brigade de la liberté (28.07.2017)
Turquie : 26 membres présumés de l'EI arrêtés (27.07.2017)
L'EI chassé de la moitié de Raqqa (26.07.2017)
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Syrie en 2016
L’armée libanaise annonce le début de l’offensive pour
chasser l’EI de l’est du pays (19.08.2017)
L’assaut vise les positions de l’organisation djihadiste à
la frontière libano-syrienne.
LE MONDE | 19.08.2017 à 05h59 • Mis à jour
le 19.08.2017 à 12h28
L’armée libanaise a annoncé, samedi
19 août au matin, le début de son offensive pour chasser l’organisation
djihadiste Etat islamique (EI) de l’est du pays, près de la
frontière syrienne, où elle avait pris pied depuis plusieurs années.
« Au nom du Liban, au nom des soldats
libanais kidnappés, au nom des martyrs de l’armée, j’annonce que
l’opération “L’Aube du Jouroud” a commencé », a
annoncé le chef de l’armée, le général Joseph Aoun.
L’armée vise les positions de l’EI près de la ville de Ras
Baalbek à l’aide de roquettes, de pièces d’artillerie et d’hélicoptères,
selon une source proche des services de sécurité libanais à l’agence de presse
Reuters.
Annonces quasi simultanées
Cette enclave est la dernière poche occupée par des
combattants hostiles au président syrien Bachar Al-Assad à la frontière
libano-syrienne.
Le Hezbollah a, pour sa part, annoncé le lancement d’une
offensive conjointe avec l’armée syrienne contre l’enclave de l’EI dans cette
zone frontalière, a rapporté Al-Manar, la chaîne de télévision du mouvement
chiite libanais. Cet assaut du Hezbollah et de l’armée syrienne est conduit en
territoire syrien.
Lire aussi : Dans l’est du Liban, les villages frontaliers de la
Syrie se préparent à un assaut contre l’EI
Malgré ces annonces quasi simultanées, l’armée libanaise a
souligné qu’elle ne coordonnait pas ses opérations militaires avec son
homologue syrienne.
À la reconquête de Raqqa, avec
la Brigade de la liberté (28.07.2017)
Par Matthieu
Delmas
Mis à jour le 28/07/2017 à 10h47 | Publié le 28/07/2017 à 08h59
REPORTAGE - La bataille de
Mossoul achevée, une autre se poursuit pour reprendre la ville de Raqqa,
capitale autoproclamée du groupe Etat islamique en Syrie. Nos reporters ont
suivi les hommes de la Brigade de la liberté qui, dans une coalition arabo-kurde,
ont fait le serment de venger leurs frères tués par les djihadistes.
Ses camarades le surnomment le
«Libyen». Avec ses cheveux longs lissés, son visage brûlé par le soleil, il a
des allures de Ben Harper. C'est pourtant une mitrailleuse de dix ans son aînée,
un modèle serbe de l'année 1981 qui lui sert d'instrument. Après deux années
passées au pays de Mouammar Kadhafi à suer sur les chantiers, il a fui le chaos
du printemps arabe en 2011. Et troqué sa truelle pour une kalachnikov.
Originaire de Deir ez-Zor, la cité la plus importante de la région pétrolifère
du sud-est syrien, il est retourné chez les siens, une famille de fermiers qui
survivent grâce à leur unique richesse, «quelques moutons et quelques poulets»,
explique-t-il. De cette période passée au Maghreb, lui reste ce surnom, le
«Libyen», qui ne le quittera plus.
Comme le «Libyen», 10.000 Arabes
ont décidé de prendre les armes pour en finir avec Daech. - Crédits photo
: Chris Huby/Le Pictorium
En Syrie, c'est une autre révolution qui l'attend. Les
premières manifestations contre le régime de Bachar al-Assad débutent trois
mois après son retour. Il participe au soulèvement. Il a 20 ans, des rêves
plein la tête et une soif sans limite de liberté. Six années de guerre plus
tard, c'est adossé au mur crasseux d'une maison bourgeoise ravagée par les
combats que le jeune homme de 25 ans transmet ses ordres à ses plus
proches combattants. Depuis cette base située dans le
quartier d'Hawi al-Hawa, dans les faubourgs ouest de Raqqa,
il scrute son unité, affine sa stratégie et organise sa prochaine mission. Avec
ses yeux noirs perçants, il dirige avec une autorité naturelle une trentaine de
combattants, la vingtaine à peine entamée.
«La ville de Deir ez-Zor est assiégée
depuis trois ans par l'EI. Nous sommes ici pour en finir.»
Depuis un mois, le «Libyen» et
ses hommes combattent à Raqqa, la capitale syrienne de l'autoproclamé Etat
islamique, coincée sur la rive septentrionale de l'Euphrate, entre les plaines
agricoles du nord du pays et l'immensité du désert au sud. C'est depuis ce
bastion, occupé depuis juin 2014 par les hommes de l'EI, que les attentats
du 13 novembre 2015 de Paris furent organisés. Plusieurs dizaines de
djihadistes étrangers, notamment français, se trouveraient toujours en ville.
Les forces spéciales françaises, présentes au sol aux côtés des combattants
kurdes, s'assurent de leur élimination physique.
Ces jeunes Arabes sont
originaires de Deir ez-Zor. «J'ai participé à la bataille de Kobané,
à celle de Tell Abyad, et à présent, nous sommes ici pour en finir.» La ville
de Deir ez-Zor est assiégée depuis trois ans par l'EI. La survie de ses
habitants dépend d'un pont aérien mis en place par le régime de Damas, tandis
que l'ensemble des campagnes environnantes sont tombées sous leur contrôle.
C'est le cas de son village, al-Masrab, une bourgade de quelques centaines
d'habitants, agriculteurs pour la plupart, située à une trentaine de kilomètres
à l'ouest de Deir ez-Zor.
«Nous ne sommes pas des
barbares»
«Je n'ai aucune nouvelle de ma
famille depuis trois ans. Je ne sais pas s'ils sont morts ou vivants. J'ai peur
de les contacter car les communications sont surveillées par la Hisbah (ndlr: la
police islamique). Si Daech se rend compte que leur fils combat aux côtés des
Kurdes, ils les tueront pour collusion avec l'ennemi», assure notre homme d'une
voix grave, le visage solennel. Du haut de son mètre quatre-vingt-dix, vêtu
d'un marcel noir dégoulinant de transpiration, il suscite l'admiration des
membres de son unité qui boivent ses paroles comme l'eau d'une oasis. «Nous
sommes musulmans, nous aussi. Nous prions chaque jour pour nos familles, nos
camarades, et la Syrie tout entière. Daech, ce n'est pas l'islam. Qui sont ces
gens qui sont venus détruire notre pays ? s'interroge-t-il. Nous
combattons pour la liberté, nous ne sommes pas des barbares. Il y a dix jours,
une quinzaine de combattants chinois se sont échappés avec leurs familles. Nous
les avons capturés, nourris, puis remis aux autorités. Si leur gouvernement
souhaite les récupérer, nous les renverrons dans leur pays.»
Leur unité appartient à Liwa
al-Tharir (ndlr: la brigade de la liberté), une brigade de combattants arabes
qui a décidé d'en découdre avec les fanatiques de l'EI. Abou Bakr est l'un
d'entre eux. A 26 ans, le jeune homme traîne trois années de guerre
derrière lui : «Notre principal ennemi est Daech. Mes parents sont toujours à
Deir ez-Zor, témoigne-t-il avant d'ajouter : Je fais partie de la tribu des
Bou Saraya, une des plus importantes de la région. Nous avons tenté d'engager
des négociations avec Daech, mais cela n'a pas fonctionné. Plus de
100 membres de notre tribu ont été exécutés par ces terroristes. Si je
n'avais pas fui pour m'engager, j'aurais été tué moi aussi.»
Le soutien de la coalition
internationale
Sur leurs uniformes, les hommes
portent l'écusson des Unités de protection du peuple (YPG), la milice armée
d'obédience marxiste-léniniste, qui n'est autre que l'émanation syrienne du
Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), considérée comme organisation
terroriste par l'Union Européenne et les Etats-Unis.
Liwa al-Tharir appartient à une
coalition de 40.000 combattants, qui rassemble tout ce que la Syrie compte de
peuples, d'ethnies et de religions. Cette force armée arabo-kurde, soutenue par
la coalition internationale et baptisée «Forces démocratiques syriennes», a été
fondée en octobre 2015 sur l'impulsion des Etats-Unis. Dominées par les
combattants kurdes issus de YPG, les FDS accueillent dans leurs rangs des
combattants arabes, chammars, yézidis, mais aussi syriaques. Considérés comme
les meilleurs alliés de l'Occident dans la lutte contre l'EI, ils bénéficient
d'un soutien financier et matériel des pays membres de la coalition
internationale contre l'EI. Les combattants arabes jouent un rôle crucial et
avant tout symbolique dans le cadre de cette opération baptisée «Colère de
l'Euphrate». Le «Libyen» l'assure : «Avant, les Kurdes combattaient pour un
Kurdistan, mais ils combattent à présent pour la libération de l'ensemble des
Syriens. Notre groupe est issu de l'armée libre. Une fois Daech vaincu à Raqqa,
nous libérerons notre ville.»
« Les FDS représentaient
les Kurdes. Elles sont aujourd'hui composées de tous les peuples, notamment des
Arabes. Le sang versé est celui de la fraternité entre les peuples. »
De profondes divisions ont
pourtant émergé entre Liwa al-Tahrir et les FDS dès septembre 2016,
prenant la forme d'affrontements armés dans plusieurs villages arabes de la
région de Tell Abyad, à la frontière turque, la brigade accusant les YPG de
s'être rendus coupables de campagnes de «nettoyage ethnique». Le
2 septembre, la brigade annonce sa défection des FDS, «en raison de la
politique autoritaire et hégémonique menée par les Kurdes», selon ses
responsables qui exigent un rôle de premier plan dans la reconquête de Raqqa.
Le conflit atteint son paroxysme le lendemain de cette déclaration lorsque les
YPG attaquent les positions de Liwa al-Tahrir. Suite à ces affrontements, une
cinquantaine de combattants de la brigade rejoignent les forces armées
soutenues par la Turquie dans la ville frontalière de Jarablus.
C'est pourtant cette alliance
entre forces arabes et kurdes qui a permis de légitimer l'offensive contre des
villes situées en dehors du territoire kurde, notamment Manbij, Tell Abyad et
Raqqa. Dans un discours-fleuve prononcé lors des funérailles de 17 combattants
arabes, Salih Muslim, le leader kurde du Parti de l'union démocratique (PYD),
dont les YPG sont la force armée, vante cette alliance: «Les FDS représentaient
les Kurdes. Elles sont aujourd'hui composées de tous les peuples, notamment des
Arabes. Le sang versé est celui de la fraternité entre les peuples.»
Soif de vengeance
Pour Aboul Mougira, comme pour le
reste de l'unité, c'est avant tout une soif de vengeance qui l'anime. Aboul a
22 ans et des comptes à régler avec ce qu'il appelle les «terroristes de
Daech». Assis en tailleur dans un salon enfumé, les combattants ont la mine
grave. Le silence règne. Aboul fait partie de la tribu des Bou Saraya, il a une
femme et quatre enfants. «Ils ont tué mon père, lance-t-il avec un regard
déterminé.J'ai été emprisonné à Deir ez-Zor pendant plus d'un an. On m'a accusé
d'appartenir à l'armée syrienne libre (ASL). Mon père a tenté de me rendre
visite pendant mon incarcération, alors Daech l'a torturé pendant deux jours.
Il est mort de ses blessures quelques jours plus tard. C'était l'été dernier.
Lorsque j'ai été libéré, j'ai décidé de fuir vers Azaz afin de combattre aux
côtés des forces de l'ASL soutenues par la Turquie. J'ai participé à la
reconquête d'al-Bab contre l'EI.»
Aboul représente a lui seul la
complexité de cette guerre civile: «Lors de l'avancée du régime en direction
d'al-Bab, je me suis retrouvé dans un conflit entre l'ASL et les troupes
loyalistes, mais je souhaite avant tout me battre contre Daech car ce sont les
assassins de mon père. C'est pour cette raison que j'ai décidé de rejoindre les
FDS à Raqqa.» Quelques jours après son arrivée, Aboul saute sur une mine, sa
jambe gauche est criblée de cicatrices, et il a perdu l'audition à l'oreille
gauche. «Vous savez, Daech a tué beaucoup de mes amis dans mon village. Soit je
fuyais, soit je prenais les armes, je n'ai pas eu le choix.»
«Daech ne possède pas
d'aviation, mais utilise des drones pour larguer des explosifs sur nos
positions »
Le «Lybien»
Les maisons sont fouillées une à
une. Les snipers de Daech sont capables de se cacher plusieurs jours dans les
ruines. La plupart sont équipés de ceintures explosives qu'ils n'hésitent pas à
déclencher à l'approche de leurs ennemis. - Crédits photo : Chris Huby/Le
Pictorium
A Raqqa, la menace vient du ciel,
d'un véhicule piégé lancé à toute allure ou des engins explosifs improvisés
dissimulés massivement dans les décombres par les djihadistes avant de se
retirer des zones perdues. «Daech ne possède pas d'aviation, mais utilise des
drones de fabrication turque afin de larguer des explosifs sur nos positions»,
explique le «Libyen». Cette menace venue du ciel est nouvelle. «Lors de la
bataille de Manbij, Daech n'utilisait pas ce type d'armement», précise-t-il.
L'avancée dans les faubourgs de Raqqa se fait pourtant à une vitesse
fulgurante. Mardi 4 juillet, les FDS appuyées par les forces spéciales
occidentales présentes massivement au sol avaient déjà pénétré dans la vieille
ville.
«Nous n'avons pas peur de
Daech ! Si Dieu le veut, nous libérerons le pays !»
Aujourd'hui, le «Libyen» et son
unité déplacent leur base en direction du centre-ville de Raqqa à quelques
centaines de mètres de la nouvelle ligne de front. La trentaine de jeunes
Arabes aux cheveux longs s'entassent à l'arrière d'une camionnette, les armes
pointées vers le ciel en chantant: «Nous allons au combat et nous n'avons pas
peur de Daech! Si Dieu le veut, nous libérerons le pays!» C'est devant une
belle demeure vidée de ses habitants que le convoi s'arrête. Accroché sur le
mur de ce qu'il reste d'un salon, un calendrier affiche la date du 8 juin
2017, rappelant qu'ici la vie s'est arrêtée un mois auparavant. Des vestes sont
pendues au porte manteau, et les habitants ont fui, emportant ce qu'ils
pouvaient avec eux. Les jeunes Arabes organisent leur nouveau quartier général.
Le «Libyen» dirige la manœuvre. «Nous déplaçons notre base dans le quartier
d'al-Romaniya conquis la nuit dernière, précise-t-il. Nous avançons pas à pas
vers la vieille ville. Bientôt il ne restera plus un homme de Daech dans la
vallée de l'Euphrate, c'est notre objectif.»
Dans la nuit du 4 au
5 juillet, Hout a été tué d'une balle dans la tête à Raqqa. Il avait
22 ans. Selon ses amis, il avait des comptes à régler avec Daech. «Ils lui
avaient pris tout son argent et deux voitures», explique Ismail, son compagnon
de combat et son cousin. - Crédits photo : Chris Huby/Le Pictorium
Le lendemain matin, les jeunes
combattants ont le visage fermé. L'unité a perdu l'un de ses plus valeureux
guerriers, la nuit précédente, lors d'une attaque pour la reprise du quartier
d'al-Nahdah, à l'ouest de la ville. Il s'appelait Hout, il avait 22 ans.
Salman, son ami, raconte son histoire. Avec son visage juvénile, un débardeur
noir, une coupe au carré, il se souvient de son camarade tombé au combat:
«C'était dans la nuit du 4 au 5 juillet, nous avons aperçu plusieurs djihadistes
qui entraient dans un tunnel. Nous avons tenté de les encercler, mais ils ont
riposté. Hout a reçu la balle d'un sniper en plein cœur. Il a été tué sur le
coup.» Hout avait une petite fille, «comme nous, il avait des comptes à régler.
Daech lui avait volé tout son argent et deux voitures. Nous étions plus qu'une
famille. Hout était notre frère».
«Cette satanée guerre a divisé
notre famille»
Salman appartient à la tribu des
Marmari. «J'ai rejoint Liwa al-Tharir car Daech a tué plusieurs membres de ma
communauté. Ils sont venus dans ma famille et ont exécuté mon frère devant
nous. C'était un simple civil. Il s'appelait Aboud et travaillait dans la
construction. Je suis venu combattre pour le venger». Le «Libyen», Salman et
Ismaïl se rendent ce jour-là à Tell Abyad afin d'enterrer Hout, leur compagnon
d'armes. Ismaïl a perdu son cousin dans cette attaque. Sur ses doigts, sont
tatoués les noms de sa sœur et de son frère : Fatma et Retag. «Je ne les ai pas
vus depuis quatre ans maintenant. Ils travaillent en Turquie.» Dans une modeste
maison aux murs gris, Ismaïl retrouve son père, qui est aussi l'oncle de Hout.
Sur le meuble télévision du salon, quelques bibelots font l'unique décoration
de la pièce. Une peluche trône sur l'étagère avec, dans ses mains, la photo du
défunt. Ismaïl raconte à son père les circonstances de la mort de son cousin :
«J'étais à côté de lui quand il a été tué. Il est mort sur le coup. Au début,
je n'arrivais pas à comprendre qu'il n'était plus.»
A Tell-Abyad, la cérémonie attire
une grande partie de la ville. Citoyens, militaires, politiques, à la fois
kurdes et arabes s'y cottoient pour enterrer trois combattants. - Crédits
photo : Chris Huby/Le Pictorium
Le père d'Ismaïl tient à partager
les derniers messages vocaux reçus par Hout via la messagerie Whatsapp avant sa
mort. Dans ses mains, le téléphone du défunt. On y entend une voix grave,
sévère et déterminée. Il s'agit du cousin de Hout originaire lui aussi de Deir
ez-Zor. «C'est un message laissé par son cousin Zoubir», explique le père. Zoubir
a choisi un camp différent, celui de l'armée loyaliste. Il s'agit de menaces de
mort. «Je te tuerai à Deir ez-Zor. Je te ferai baiser le portrait de Bachar
al-Assad», lance le jeune homme de 28 ans à son cousin. «Cette satanée
guerre a divisé notre famille. Hout disait souvent à Zoubir de déserter l'armée
loyaliste et de rejoindre les FDS contre Daech. Il lui répondait toujours qu'il
allait le tuer», explique le père de famille.
A présent, Ismaïl, sa famille et
ses compagnons de combat se rendent au carré des martyrs du cimetière de Tell
Abyad. Tandis que l'immense foule venue enterrer trois autres combattants
scande en chœur «Les martyrs ne meurent jamais! Leur sang sera vengé!», les
jeunes hommes recouvrent de terre leurs tombes. Un régiment de combattants rend
un ultime hommage aux martyrs par des salves de tirs vers le ciel.
Le «Libyen» et ses hommes
retournent sur le front, le cœur gros. De nouvelles batailles les attendent.
«Aujourd'hui, nous avons perdu un frère et un ami, mais nous continuerons la
lutte en mémoire de lui.»
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ez-Zor, enjeu vital pour Bachar el-Assad
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les enjeux de la difficile bataille de Raqqa contre Daech
Turquie : 26 membres présumés de l'EI arrêtés (27.07.2017)
Mis à jour le 27/07/2017 à 16h21 | Publié le 27/07/2017 à 16h13
Des unités de la police
antiterroriste d'Istanbul ont interpellé aujourd'hui 26 personnes soupçonnées
d'appartenir au groupe Etat islamique (EI) et de s'être rendues à plusieurs
reprises en Syrie, a rapporté l'agence de presse progouvernementale Anadolu.
Parmi les suspects, arrêtés à
l'aube au cours d'opérations menées simultanément dans neuf quartiers
d'Istanbul, 17 sont des ressortissants étrangers, a précisé Anadolu, sans
donner leur nationalité.
Les personnes interpellées sont
soupçonnées d'avoir effectué plusieurs déplacements dans des zones de guerre en
Syrie, a expliqué Anadolu, ajoutant que des appareils électroniques et des
documents avaient été saisis.
Longtemps accusées de fermer les
yeux sur les activités djihadistes à la frontière avec la Syrie, les autorités
turques multiplient depuis deux ans les démantèlements de cellules de cette
mouvance à travers la Turquie. La police turque a ainsi procédé il y a deux
semaines à un vaste coup de filet contre l'EI à l'échelle nationale, arrêtant
plus de 200 personnes et tuant cinq suspects.
Membre de la coalition anti
djihadistes, Ankara a par ailleurs déclenché le 24 août 2016 une offensive
terrestre dans le nord de la Syrie contre l'EI, mais aussi les milices kurdes.
LIRE AUSSI :
L'EI chassé de la moitié de
Raqqa (26.07.2017)
http://lefigaro.fr/flash-actu/2017/07/26/97001-20170726FILWWW00364-l-ei-chasse-de-la-moitie-de-raqqa.php
Mis à jour le 26/07/2017 à 22h14 | Publié le 26/07/2017 à 21h42
L'alliance de combattants kurdes
et arabes soutenue par les Etats-Unis a réussi à chasser les djihadistes du
groupe Etat islamique (EI) de la moitié de leur bastion syrien de Raqa, moins
de deux mois après être entrée dans la ville, selon une ONG. "Les Forces
démocratiques syriennes (FDS) contrôlent maintenant 50% de la ville de Raqa
malgré la farouche résistance de l'EI", a affirmé le directeur de
l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.
Les FDS mènent depuis huit mois
une offensive en vue de s'emparer de Raqa où elles ont pénétré le 6 juin, pris
le contrôle de plusieurs quartiers et se rapprochent du centre-ville.
L'opération des FDS est appuyée par des frappes aériennes de la coalition
internationale antijihadistes menée par les Etats-Unis. Des membres des forces
spéciales américaines leur apportent aussi leur aide dans la ville.
Mais les jihadistes opposent une
farouche résistance aux FDS, en ayant recours notamment à des bombes, des
engins piégés et des drones munis de charges explosives. Les djihadistes s'en
prennent également aux civils pris au piège des combats, menaçant ceux qui
tentent de fuir la cité.L'EI s'était emparé de Raqa en 2014 et contrôle une
bonne partie de la province du même nom.
» Lire aussi - Syrie : à Raqqa, les hommes de Daech cernés de
toutes parts
Une agence de presse turque dévoile l’emplacement de forces spéciales américaines et françaises en Syrie (20.07.2017)
La divulgation de ces informations confidentielles expose
les forces de la coalition et ravive les tensions entre Ankara et Washington au
sujet de la question kurde.
Le Monde.fr avec AFP | 20.07.2017 à 01h49 • Mis à jour le
20.07.2017 à 06h33
Des troupes américaines dans une base militaire temporaire à
Oreij (Irak), le 22 février.
L’agence de presse pro-gouvernementale turque Anadolu a
révélé, lundi 17 juillet, la localisation de forces spéciales américaines et
françaises au nord de la Syrie, provoquant ainsi la colère des Etats-Unis, qui
craignent pour la sécurité de leurs soldats.
Anadolu a donné l’emplacement de dix installations
militaires américaines, allant même jusqu’à révéler parfois le nombre de
soldats des forces spéciales s’y trouvant.
75 forces spéciales françaises
Selon Anadolu, 200 militaires américains et 75 soldats des
forces spéciales françaises se trouveraient ainsi dans un avant-poste à une
trentaine de kilomètres au nord de Rakka, la capitale autoproclamée de
l’organisation Etat Islamique (EI).
La divulgation de ces informations confidentielles expose
les forces de la coalition à des « risques inutiles », selon le porte-parole du
Pentagone, Adrian Rankine-Galloway.
« Nous serions très inquiets si des responsables d’un allié
de l’OTAN mettaient volontairement en danger nos troupes en divulguant des
informations confidentielles », a-t-il précisé. « Nous avons fait part de nos
inquiétudes au gouvernement turc », a-t-il ajouté, en refusant de commenter
l’exactitude des localisations dévoilées par Anadolu.
Dix bases militaires en soutien des Kurdes
Ces dix bases militaires (deux aérodromes et huit
avant-postes) sont utilisées pour apporter un soutien au Parti de l’union
démocratique kurde (PYD), et à sa branche armée, les Unités de protection du
peuple kurde (YPG), qu’Ankara considère comme liée au Parti des travailleurs du
Kurdistan (PKK).
Lire aussi : Endépit de la Turquie, les Etats-Unis ont livré des armes aux combattants kurdesen Syrie
La Turquie considère les séparatistes kurdes du PKK comme
une organisation « terroriste », alors que le conflit kurde en Turquie a coûté
la vie à plus de 40 000 personnes depuis son déclenchement en 1984.
La relation entre les Etats-Unis et la Turquie, pourtant
alliés au sein de l’OTAN, s’est refroidie depuis l’intervention en Syrie de la
coalition mise en place par Washington pour défaire l’EI.
Les Etats-Unis comptent en effet sur le YPG et d’autres
groupes kurdes pour combattre l’EI au sol. Pour cela, ils ont envoyé des armes
aux Kurdes, et cela inquiète Ankara qui craint que ces équipements finissent
aux mains du PKK.
Les yazidies à Raqqa pour libérer leurs sœurs esclaves de
Daech (20.07.2017)
Par Guillaume
Perrier Publié le 20/07/2017 à 17:24
Une jeune militaire yasidie dans le quartier d'al-Sinaa, le
6 juillet.
REPORTAGE - Environ 2000 combattantes yazidies participent à
la reconquête de la ville syrienne et souhaitent sauver leurs consœurs
kidnappées par l'État Islamique.
Raqqa
Sautant au bas de leurs pick-up d'un pas léger, une
vingtaine de combattantes en treillis, foulards fleuris noués autour du cou ou
de la tête, sacs sur le dos et kalachnikov en bandoulière, débarquent
joyeusement dans la fournaise de Raqqa. Avec leurs stocks de munitions et de
nourriture, elles s'installent dans une petite mosquée et dans la maison
adjacente, abandonnée par son imam à cause des violents combats qui se sont
déroulés les jours précédents dans les rues alentour. Ces jeunes guerrières
âgées d'une vingtaine d'années et qui établissent leur camp de base à proximité
de la ligne de front orientale de la ville de Raqqa, sont arrivées en renfort,
début juillet, pour participer, aux côtés des Forces démocratiques syriennes
(FDS), la coalition arabo-kurde soutenue par les ...
La CIA met fin à son soutien aux
rebelles syriens (20.07.2017)
Donald Trump a décidé de cet
arrêt il y a près d’un mois. Ce programme de soutien, lancé il y a quatre ans,
n’a eu qu’un impact limité, estiment des responsables américains.
Le Monde.fr avec AFP | 20.07.2017
à 08h19
La décision a été prise par
Donald Trump il y a un mois. La CIA a mis fin à son programme de soutien aux
rebelles syriens qui combattent le président syrien, Bachar Al-Assad, ont
annoncé, mercredi 19 juillet, le Washington Post et le New York Times.
Ce programme de soutien lancé il
y a quatre ans n’a eu qu’un impact limité, particulièrement depuis l’entrée
dans le conflit des forces armées russes aux côtés de Bachar Al-Assad en 2015,
ont confié des responsables américains au Washington Post, sous le couvert de
l’anonymat.
Le locataire de la Maison Blanche
a pris cette décision il y a près d’un mois, après un entretien avec le patron
de la CIA, Mike Pompeo, et le conseiller à la sécurité nationale, le général H.
R. McMaster, ajoute le Washington Post. Pour l’heure, la Maison Blanche et la
CIA se sont refusées à tout commentaire.
Derrière cette décision,
l’intérêt pour la Russie
Le Washington Post estime que
l’arrêt de ce programme de soutien aux rebelles syriens reflète l’intérêt du
président américain « pour trouver des moyens de travailler avec la Russie »
ainsi qu’une « reconnaissance des limites de l’influence de Washington et de la
volonté de chasser Assad du pouvoir ».
Cette décision intervient alors
que les Etats-Unis et la Russie ont négocié un cessez-le-feu dans le sud-ouest
de la Syrie, couvrant une partie de la zone où les rebelles opèrent.
Le cessez-le-feu a été annoncé le
7 juillet lors du sommet du G20 à Hambourg, en Allemagne, où Donald Trump et le
président russe, Vladimir Poutine, se sont rencontrés pour la première fois.
Milliers de rebelles formés et
armés
L’ancien président Barack Obama
avait approuvé ce programme d’aide en 2013 au moment où divers groupes rebelles
cherchaient un soutien extérieur dans le cadre d’un soulèvement général contre
le régime. Des milliers de combattants rebelles ont ainsi été formés et armés.
Mais l’engagement des Etats-Unis
est resté ambigu en raison des doutes à Washington sur la capacité des rebelles
à renverser Bachar Al-Assad et de la priorité donnée au combat contre
l’organisation djihadiste Etat islamique.
Lire aussi :
Syrie : la rébellion s’effondre à Alep
L’intérêt pour ce programme s’est
encore érodé l’année dernière après la perte par les rebelles des zones qu’ils
contrôlaient dans la ville d’Alep, à la suite d’une vaste offensive de l’armée
syrienne, soutenue par la Russie.
L'Ei tombe «très vite», affirme Trump (20.07.2017)
Par Le
Figaro.fr avec AFP Mis à jour le 20/07/2017 à 17:57 Publié le
20/07/2017 à 17:45
Lors d'un déplacement au
Pentagone pour participer à une réunion de stratégie militaire, Donald Trump a
dit: "Nous faisons très bien contre l'EI. L'EI tombe vite, très
vite". Entré à la Maison Blanche il y a exactement six mois, il avait fait
d'une victoire rapide contre le groupe jihadiste l'une de ses principales
promesses de campagne.
La stratégie américaine pour
venir à bout de l'EI n'a pas changé de manière importante par rapport à celle
de l'administration précédente de Barack Obama, même si le président Trump a
donné davantage de pouvoirs aux chefs militaires pour décider notamment en
matière de frappes aériennes.
» Lire aussi - À Mossoul, la fin sanglante du dernier carré de
Daech
Le groupe jihadiste a cumulé une
série de revers depuis deux ans, en particulier un coup dur avec la reprise de
son fief irakien de Mossoul début juillet. Mais la destruction importante de
cette ville et les opérations pour reprendre Raqqa, bastion des jihadistes en
Syrie, ont soulevé des critiques contre l'administration Trump accusée de ne
pas prendre de précautions pour épargner les civils.
» Lire aussi - Syrie : à Raqqa, les hommes de Daech cernés de
toutes parts
Le président a également été
interrogé aujourd'hui sur l'envoi éventuel de renforts militaires en
Afghanistan, où les Etats-Unis opèrent depuis fin 2001. "Nous
verrons", a-t-il répondu.
Selon des responsables du
Pentagone, le ministre de la Défense Jim Mattis envisage d'envoyer 4.000
soldats supplémentaires pour "former et conseiller" les forces
locales. A l'heure actuelle, 8.400 Américains participent à l'opération de
l'Otan en Afghanistan, Resolute Support (RS), qui compte plus de 13.000 militaires
au total.
Un village repris par les forces irakiennes (20.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec ReutersMis à jour le 20/07/2017 à
10:28 Publié le 20/07/2017 à 10:20
Les forces irakiennes ont repris aujourd'hui le contrôle
d'Imam Gharbi, un village situé au sud de Mossoul, aux combattants du groupe
l'Etat islamique, a annoncé la police.
Cette opération s'inscrit dans la vaste campagne menée par
Bagdad avec le soutien de la coalition conduite par les Etats-Unis pour chasser
l'EI d'Irak.
» Lire aussi - L'Irak annonce que Mossoul est «libérée» de
l'État islamique
Selon le colonel de police Karim Aboud, les forces
gouvernementales ont repris Imam Gharbi à l'aube. Elles y ont découvert les
corps de deux journalistes irakiens, a-t-il ajouté.
Le premier ministre irakien, Haïdar al Abadi, a proclamé la
victoire des forces irakiennes à Mossoul le 10 juillet après un siège qui aura
duré neuf mois. (Ghazwan Hassan, Nicolas Delame pour le service français)
Baghdadi est vivant selon un chef du renseignement kurde (17.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec ReutersMis à jour le 17/07/2017 à
12:12 Publié le 17/07/2017 à 12:08
Le chef des services de lutte antiterroriste du Kurdistan
irakien est pratiquement sûr qu'Abou Bakr al Baghdadi, "calife"
autoproclamé de l'Etat islamique, est encore en vie et qu'il se trouve au sud
de Rakka, en Syrie.
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH),
organisation proche de l'opposition qui dresse un bilan quotidien du conflit à
l'aide d'un réseau d'informateurs, a annoncé la semaine dernière avoir obtenu
confirmation de sa mort.
"Il ne fait aucun doute que Baghdadi est vivant. Nous
en sommes sûrs à 99%", a déclaré Lahour Talabani. "N'oublier pas
qu'il est issu d'Al Qaïda en Irak. Il a échappé aux services de sécurité. Il
sait ce qu'il fait", a-t-il poursuivi.
Le mouvement djihadiste, qui vient de perdre Mossoul, dans le
nord de l'Irak, après trois ans d'occupation et tente de résister à Rakka, est
selon lui en train de changer de stratégie pour se muer en une sorte d'"Al
Qaïda sous stéroïdes". Son éradication prendra encore trois ou quatre ans,
a-t-il prédit.
LIRE AUSSI:
Nicolas Baverez : «L'État islamique n'est pas mort, il mute» (16.07.2017)
Par Nicolas
Baverez Publié le 16/07/2017 à 16:58
CHRONIQUE - Dans tout le monde développé, l'État islamique
se restructure sous la forme d'un réseau social cherchant à radicaliser et
enrégimenter la jeunesse.
Mossoul a été reconquise au terme de neuf mois de combats
acharnés par 20.000 hommes des forces irakiennes - dont plus de 1000 ont été
tués - qui affrontaient quelque 5000 djihadistes. La chute de Raqqa, où se
trouvent encerclés 3000 combattants au milieu de 100.000 civils, est programmée.
Enfin, Abou Bakr al-Baghdadi, qui avait proclamé le califat le 29 juin 2014, a
vraisemblablement été tué par une frappe aérienne.
Tout cela a conduit le premier ministre irakien, Haïdar
al-Abadi, à l'occasion de la libération de Mossoul, à proclamer la fin de
l'État islamique. Cette annonce est tout aussi prématurée et aventureuse que la
proclamation par George W. Bush, le 1er mai 2003, de la victoire et de l'arrêt
des combats en Irak.
La libération de Mossoul est très loin d'enterrer
l'idéologie du djihad mondialisé
La reprise de Mossoul et celle, à venir, de Raqqa marquent
un incontestable tournant dans la guerre contre l'État islamique. Ces victoires
actent la ...
L’Etat islamique restera en embuscade (13.07.2017)
Analyse. Pour le journaliste du « Monde » Madjid Zerrouky,
il fait peu de doute que l’EI poursuivra ses efforts visant à saper les
fondements d’Etats défaillants, et à approfondir les crises et fractures
sociales dans les pays musulmans.
Le Monde | 13.07.2017 à 11h49 | Par Madjid Zerrouky
« Il est trop tôt pour savoir si Mossoul et Rakka
supplanteront dans l’imaginaire djihadiste le 11-Septembre d’Oussama Ben Laden
»(Photo: Mossoul, le 29 mai).
« Dawlati baqiya » (« Mon Etat restera »). Le dernier « nashîd
», un de ces chants religieux qui accompagnent la propagande de l’organisation
Etat islamique (EI), conjure les revers militaires du « califat » d’Abou Bakr
Al-Baghdadi. « Baqiya » : « rester ». Il est rare qu’un terme aussi anodin soit
autant associé à un groupe armé.
L’EI en a pourtant fait sa signature, sonore ou écrite. Il
remonte à l’EII, l’Etat islamique d’Irak d’avant les années 2010, dirigé alors
par Abou Omar Al-Baghdadi, le prédécesseur de l’actuel Baghdadi. Il opposait la
résilience du groupe à la campagne anti-insurrectionnelle américaine qui,
s’appuyant sur des milices sunnites, l’avait alors mis à terre : l’Etat
islamique ne disparaîtrait pas, quel que soit le revers qu’il subirait.
A défaut de disparaître, c’est le « califat » qui, aujourd’hui,
s’effondre. La reprise de Mossoul acte l’impasse d’une entreprise djihadiste
inédite, la tentative d’administrer de vastes territoires. Cette tentative
était vouée à l’échec, l’EI s’est bâti sur une dualité intenable : construire
un Etat tout en menant une guerre totale au reste du monde. Mais au cours de
ses trois dernières années d’existence, le califat d’Al-Baghdadi a
paradoxalement assumé cette dualité, en anticipant et préparant sa défaite.
1 500 attaques dans 16 villes d’Irak et de Syrie
Il est trop tôt pour savoir si Mossoul et Rakka
supplanteront dans l’imaginaire djihadiste le 11-Septembre d’Oussama Ben Laden.
Mais si Al-Qaida a pu frapper, et durement, pendant quelques heures son «
ennemi lointain » à partir de montagnes que l’on peine aujourd’hui à localiser
sur une carte, l’EI a, lui, imposé sa loi des mois durant à ses voisins, en
direct et en multimédia. Et cette irruption spectaculaire en Irak et en Syrie
ainsi que l’état de stupeur dans lequel l’Etat islamique a pu plonger ses adversaires
semblent se suffire à eux-mêmes.
La reprise de Mossoul acte l’impasse d’une entreprise
djihadiste...
En savoir plus sur
http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/07/13/l-etat-islamique-restera-en-embuscade_5160003_3232.html
L'EI revendique les attaques ratées de juin (13.07.2017)
Mis à jour le 13/07/2017 à 19:58
Le groupe Etat islamique (EI) a indiqué aujourd'hui que deux
de ses membres étaient responsables de deux attentats manqués en juin à Paris
et Bruxelles, qui n'avaient pas fait de victimes et qu'il n'avait pas
revendiqués jusqu'alors.
Dans la dernière édition de son magazine Rumiyah, publié en
plusieurs langues sur ses médias de propagande, l'EI identifie les deux
assaillants comme des "soldats du Califat", dans une liste d'attaques
menées durant le ramadan, mois sacré pour les musulmans.
Le 19 juin, un homme de 31 ans, fiché par la police pour
radicalisation, avait foncé avec sa voiture chargée de deux bonbonnes de gaz et
d'armes sur un fourgon de gendarmes sur l'avenue des Champs-Elysées à Paris,
sans faire de victime. Il est décédé sur les lieux.
Dans "une lettre testament" expédiée à des
proches, Adam Djaziri avait déclaré "avoir voulu rejoindre la Syrie"
mais "en avoir été empêché +par des apostats contre l'Etat
islamique+".
» Lire aussi - L'auteur de l'attentat manqué de Bruxellesavait des «sympathies» pour l'État islamique
Le lendemain, un Marocain de 36 ans avait été tué par un
militaire en gare de Bruxelles-Central après avoir fait exploser son bagage.
Les premiers éléments de l'enquête avaient dévoilé qu'il avait des
"sympathies" pour l'EI.
Le groupe extrémiste sunnite, responsable d'atrocités dans
les zones qu'il contrôle en Syrie et en Irak et d'attentats meurtriers à
travers le monde, appelle chaque année ses soutiens à mener des attaques
pendant le mois du ramadan.
LIRE AUSSI :
Frédéric Pichon : « L'État islamique renaîtra, sous une
forme ou une autre » (13.07.2017)
Par Vianney Passot Mis à jour le 13/07/2017 à 15:26 Publié
le 13/07/2017 à 12:37
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Pour Frédéric Pichon, avec la mort
d'Al Baghdadi et la perte de Mossoul, « l'année 2017 sera celle de la fin de
l'État Islamique ». Mais pour lui, l'islamisme et le terrorisme survivront à
cette disparition.
Frédéric Pichon est géopolitologue, spécialiste du
Moyen-Orient. Auteur d'une thèse de doctorat sur la Syrie, il est l'auteur de
Syrie, une guerre pour rien (éd. du Cerf, 2017)
FIGAROVOX.- Mossoul, la «capitale» de l'État islamique, a
été reprise à l'EI par les forces irakiennes soutenues par la coalition
internationale. En Syrie, Raqqa est en passe d'être reprise par les Kurdes.
Est-ce la fin de l'État islamique ?
Frédéric PICHON.- L'année 2017 sera celle de la fin de l'État
Islamique. Né en Irak, il mourra en Irak... et renaîtra en Irak. Mais tandis
que les efforts militaires se concentrent sur son cœur mésopotamien, la
recomposition de la région qui est en cours annonce des années de soubresauts
violents.
Une chose est sûre : la question syrienne, le nationalisme
kurde, le bourbier irakien et l'influence de l'Iran sont là pour des décennies.
On se souvient que Mossoul fut prise en moins de quatre jours durant le mois de
juin 2014 par une organisation qui disposait de nombreux soutiens au sein même
de la ville. L'armée irakienne, peu aguerrie et surtout prisonnière des choix
politiques désastreux du gouvernement al Maliki, apparaît comme une armée
d'occupation face à des sunnites, qui depuis 2003, furent non seulement les grands
perdants des décisions américaines mais aussi les victimes du sectarisme des
nouveaux dirigeants irakiens, désireux de se venger de près de soixante-dix ans
d'humiliations et de massacres à l'encontre de la majorité chiite.
Même les forces sunnites-baptisées Sahwa- au nombre de 90 000
combattants, qui avaient été associées dès 2006 par les Américains à la lutte
contre les djihadistes, furent neutralisées par le gouvernement central chiite
qui n'a jamais eu confiance en leur loyauté. Il faut bien comprendre que les
tribus sunnites ont gravité durant toutes ces années par opportunisme entre Al
Qaida, l'État Islamique et le gouvernement central au gré de leurs intérêts à
court terme, en particulier financiers.
À Mossoul, l'État Islamique n'a pas eu besoin d'instaurer
une dictature obscurantiste comme on se plaît par sensationnalisme à l'imaginer
depuis l'Occident, à grand renfort d'informations spectaculaires. Certes, les
exécutions publiques furent légion, la police de la charia existait bien, mais
le véritable ordre était assuré par la notabilité préexistante des clans
sunnites, à condition de se conformer a minima aux règles austères de Daech. Je
ne dis pas que les populations y trouvaient entièrement leur compte mais au
moins la relative probité de ceux qui étaient chargés de faire régner cet ordre
tranche furieusement avec la situation précédente de corruption généralisée.
Bien entendu, pour cela, encore faut-il être sunnite :
l'exode forcé des chrétiens de Mossoul et des autres minorités fut la
résultante tragique de cette prise de contrôle de Mossoul. On peut ainsi
invoquer l'injustice faite aux «sunnites» dans leur globalité, en expliquant
que l'État Islamique est venu leur redonner leur dignité. Mais ce discours
simplifie à outrance les alternatives dont disposerait la minorité sunnite
d'Irak. Certes la volatilité de la loyauté des clans sunnites, leur situation
qu'il faut considérer à l'aune de la longue histoire, où ils se comportèrent
souvent en bourreaux à l'égard de leurs maîtres d'aujourd'hui, ne méritent pas
la marginalisation dont ils font l'objet. Mais ces facteurs ne peuvent être
négligés à l'heure où la compassion victimaire les fait passer de façon binaire
comme des opprimés.
Ce qui est sûr c'est que les retours de balanciers tragiques
sont le fruit de l'histoire et de la complexité d'une région où les États n'ont
toujours été considérés que comme des structures oppressives, la longue
expérience ottomane ayant laissé des traces. Mais imaginer reconstruire un État
irakien sur des bases légitimes et représentatives relève de la gageure. Ce
qu'il faut à l'Irak, c'est peut-être déjà un État tout court, qui assure ses
missions régaliennes a minima. Le problème de l'État Islamique en Irak est
qu'il est en quelque sorte chez lui et que sa présence est vue comme légitime
par nombre d'Arabes sunnites. Il renaîtra sous une forme ou une autre à n'en
pas douter.
Que va changer la mort d'Al-Baghdadi, le chef de l'EI ?
Rien ou presque. D'abord cela sera vu comme un honneur et un
appel à le remplacer ou du moins à continuer le combat y compris sur un mode
encore plus apocalyptique. L'État islamique est né dans un moment
eschatologique pour ses partisans, il disparaîtra (provisoirement) de manière
apocalyptique.
Ensuite, un chef se remplace. Ni la mort de Zarqaoui, ni
celle de Ben Laden n'ont entraîné la disparition de leurs organisations
respectives (EIIL/ Al Qaida). Mais je voudrais insister sur une dimension que
nous avons du mal à prendre en compte en Occident. S'il y eut bien un calife
(turc) jusqu'en 1924, en réalité la fonction avait été largement vidée de son
sens dès le Moyen-Âge, sous l'action des différences culturelles et
linguistiques présentes au sein du monde musulman. Du coup, la proclamation
d'Al Baghdadi comme Calife nous est apparue comme désuète, mais constitua en
fait une formidable bouffée d'utopie, d'autant que les terres convoitées par ce
proto-État ont une résonance eschatologique dans les textes de l'Islam, Coran
et Hadiths inclus.
Cette dimension a un effet d'entraînement sur les
populations musulmanes sunnites locales mais aussi pour cette jeunesse
française qui ne se reconnaît pas dans le modèle culturel français : pour ces
derniers, le djihad est aussi le moyen d'une forme de «régénération» par les
lieux. La géographie joue ici un rôle majeur : il n'est que de consulter la
littérature jihadiste pour constater combien notamment les références au
«Shâm», à l' «Irak» sont prépondérantes: elles furent celles précisément des
premiers déchirements de l'Islam (Hussein, fils d'Ali, fut vaincu et tué à
Kerbala en Irak) et seront celles du combat final contre Shaytan à la fin des
temps (Damas ou Shâm).
L'attractivité de l'État Islamique s'appuie sur un triptyque
récurrent : régénération, émotion, renonciation. Régénération par le retour sur
des terres historiques et apocalyptiques, émotion religieuse et effusions entre
ces jeunes hommes qui reconstituent une Oumma concrète et enfin renonciation au
style de vie occidental, souvent jugé corrompu et permissif. Les jeunes
djihadistes, qui se sentent en opposition avec la société, avec leur famille,
marquent leur différence en s'engageant dans un mouvement religieux extrême,
critiqué et rejeté par la grande majorité des gens, très médiatisé et très
spectaculaire qui les arrache de façon radicale et extrêmement contraignante à
leur milieu et à leur mode de vie.
De ce point de vue, ils participent sans le savoir de la
mondialisation de l'offre religieuse, horizontale, sans magistère, nomade et
déculturée, épousant ainsi les formes de la globalisation de l'information
permise par les réseaux sociaux et que l'on retrouve, toutes choses égales
d'ailleurs, dans le mouvement évangélique né aux États-Unis et le phénomène des
«born again christians». Le succès de ce néo-fondamentalisme réside dans le
fait que ce dernier fait l'apologie paradoxale de la déculturation qui permet
de penser une «pure «religion indépendamment de toutes ses variations et
influences culturelles.
La disparition ou l'affaiblissement de l'État islamique dans
cette région du globe signifierait-elle la fin provisoire du terrorisme
islamiste? Où et sous quelle forme pourrait-on le voir revenir?
Le problème se pose de la même façon pour les voisins de la
Syrie et même l'Europe. La priorité est à l'éradication de l'État Islamique
certes, alors que se profilent des batailles sanglantes dans la vallée de
l'Euphrate. Mais que faire de tous ces combattants étrangers? Les pays
émetteurs comme la France, la Tunisie ou l'Arabie Saoudite devront alors
s'attendre à une vague de retour qu'il sera extrêmement difficile de contrôler.
Plus sûrement, l'essaim des djihadistes se déplacera sur un
autre sanctuaire, probablement africain dont la Libye et le Sinaï offrent déjà
les garanties en termes d'impunité et de réseaux. Au niveau local, pour
certains combattants et les civils qui soutiennent la politique de l'État
Islamique, il faudra en passer par une politique de main tendue, avec
attributions de places politiques ou économiques en échange de leur inclusion
dans le nouveau système. Une fois de plus, le clientélisme vient en renfort du
politique. Tout cela aura un coût financier évidemment et politique assurément.
Mais le problème est aussi géopolitique : comment penser que
le salafisme wahhabite, qui a connu un déploiement conceptuel massif grâce à
l'argent des pétrodollars et la constitution d'un réseau mondial de relais
sous-forme d'ONG, d'écoles et de mosquées, présentes en Afrique, dans les
Balkans, en Asie et en Europe pourra cesser d'influencer l'islam global sans
une remise en cause théologique et politique de la part de ces mêmes États qui
l'ont instrumentalisé et qui commencent à en subir les effets «Frankenstein» ?
C'est en premier lieu vers l'Arabie Saoudite que se portent les regards critiques.
Mais la Turquie elle-même devra être confrontée au même questionnement étant
donné son rôle actif dans l'instrumentalisation du salafisme en Syrie face au
nationalisme kurde.
Donald Trump est reçu en France cette semaine par Emmanuel
Macron. Peut-on s'attendre à ce que ce sujet soit au cœur de leurs discussions?
En tous les cas, Emmanuel Macron a préparé le terrain, avec
ses déclarations sur la Syrie et le rôle de la Russie : maintien à moyen terme
d'Assad, spectre d'un État failli, coopération avec la Russie sur le dossier
terroriste. Il a d'ailleurs semé le trouble parmi certains de ses soutiens qui
se sont sentis visés par sa pique sur le «néoconservatisme». En s'exprimant de
la sorte, c'est vraisemblablement la ligne d'Hubert Védrine qui a été
privilégiée. Le choix des priorités, la crainte d'un énième État failli dans la
région auraient dû être privilégiées dès le début. Pour autant, je ne crois pas
qu'il y aura d'alignement sur Moscou. Traiter correctement la Russie, c'est
s'assurer de pouvoir aussi négocier durement avec elle. Cela s'appelle de la
diplomatie et il est inutile de parler de Realpolitik.
La rédaction vous conseille
À Mossoul, les derniers combattants de Daech s'abritent
derrière les civils (11.07.2017)
La 9e division de l'armée irakienne face au dernier bastion
de Daech, mardi, dans la Vieille Ville de Mossoul.
Par Adrien Jaulmes
Mis à jour le 12/07/2017 à 07h08 | Publié le 11/07/2017 à
20h36
VIDÉO - Retranchés dans leur dernier réduit, les djihadistes
de l'État islamique instrumentalisent la population pour prolonger les combats
dans la Vieille Ville.
Envoyé spécial à Mossoul
La bataille de Mossoul est officiellement terminée, mais
plusieurs centaines de djihadistes refusent d'admettre leur défaite. Dans la
rue Sherouan, une rue étroite du quartier de Midan qui court parallèlement au
Tigre tout proche, les derniers combattants de Daech continuent de se battre
avec acharnement contre les forces irakiennes qui les encerclent.
Juste au nord de cette poche de résistance d'environ 100 m
sur 30 m se trouve la 9e division de l'armée irakienne, adossée au Cinquième
Pont qui traverse le fleuve. Sur les autres côtés, à l'ouest et au sud, dans les décombres de la Vieille Ville, les Forces anti-terroristes irakiennes de la
division d'or tiennent fermement le terrain. De l'autre côté du fleuve, large
de quelques centaines de mètres, l'armée irakienne ouvre le feu sur les
djihadistes qui s'en approcheraient. Dans le ciel, les hélicoptères irakiens
tirent à la mitrailleuse lourde sur les combattants qui se montrent. De temps
en temps, des Hercule américains déchirent l'air de leurs canons automatiques
qui tirent avec un grincement étrange. Et des bombes larguées d'avions
soulèvent à intervalles réguliers des champignons de poussière grise. Pris sous
ce déluge de feu, les djihadistes survivants continuent pourtant le combat. On
sait depuis la bataille de Monte-Cassino en 1944 que les ruines forment un
excellent terrain à des défenseurs déterminés ; l'État islamique vient de
nouveau de le démontrer à Mossoul. Mais le problème n'est pas seulement
militaire.
«Chercher la mort en tuant le plus de gens possible»
Pour les forces irakiennes, qui viennent de reconquérir pendant neuf mois d'opérations ininterrompues la quasi-totalité de Mossoul,
cette dernière enclave présente un problème supplémentaire, du fait de la
présence de nombreux civils parmi les djihadistes : habitants du quartier,
familles et enfants de membres de Daech, mais aussi soldats irakiens
prisonniers et retenus en otage par l'EI. «Nous avons été obligés de ralentir
nos opérations à cause d'eux», dit le major-général Sami al-Aradi, de la Division
d'or. «On pourrait en finir en moins de deux heures sinon, mais ce serait au
prix de lourdes pertes civiles : 95% des civils sont des familles de Daech, mais
ils n'en restent pas moins des femmes et des enfants. Certaines épouses de
djihadistes ont été enlevées et mariées de force, comme les yazidis. Et les
enfants n'ont pas à payer pour les crimes de leurs parents.»
Ironiquement, les derniers moments de la bataille de Mossoul
voient les combattants de l'État islamique revenir à leurs origines : après avoir
tenté de créer un État, le dernier carré des djihadistes renoue avec des pratiques terroristes en prenant des civils en otages et en se faisant exploser au moment de l'assaut des forces de sécurité. Presque de façon mimétique, la
Division d'or redevient une unité de forces spéciales, après s'être transformée
en infanterie de choc pour reconquérir Mossoul et les autres villes sunnites
d'Irak. «Daech ne mène pas une guerre de soldats», dit le major-général
al-Aradi. «Ils ont recours à des méthodes qui relèvent plus du droit commun que
de la guerre.»
«Pour essayer de limiter les pertes au minimum, nous tentons
de passer un accord avec eux pour qu'ils laissent sortir les femmes et les
enfants de leur périmètre», continue-t-il. «On communique via des épouses de
djihadistes sorties de la Vieille Ville qui parlent avec celles qui sont
restées là-bas. Parfois, nos lignes sont suffisamment proches pour que l'on
puisse parler avec eux à la voix. Mais leur mentalité est de chercher la mort
en tuant le plus de gens possible.»
Négocier avec l'État islamique ressemble à un jeu de poker
menteur. Lundi, des civils sortis de la poche de l'EI font savoir aux soldats
de la Division d'or que d'autres personnes sont prêtes à se rendre, mais
veulent pouvoir le faire ensemble. «Ils disaient qu'il y avait 200 personnes
qui voulaient sortir ensemble», dit le général al-Aradi. «On a pensé que
c'était un piège et on a refusé. Mais le même stratagème a fonctionné avec
l'armée irakienne.» Lundi après-midi, à la sortie nord de la poche, un drone
filme un groupe compact d'une centaine de personnes : des femmes et des enfants,
des prisonniers irakiens menottés et les yeux bandés, et des combattants de
Daech. Arrivés à proximité du Cinquième Pont, les djihadistes protégés par la foule ouvrent le feu sur les soldats. Les quelques civils qui sont parvenus,
hagards, jusqu'aux lignes irakiennes, parlaient de corps qui jonchaient les
rues.
Cette résistance folle ne semble pas avoir pour but de
protéger des personnalités importantes, encore moins de couvrir une retraite.
«On pense que la majorité des combattants sont des Irakiens. Mais il y a aussi
des étrangers avec eux», continue le général de l'ICTS. «En revanche, il n'y a
pas de grands chefs, juste des commandants militaires». «En 40 ans de carrière,
j'ai fait toutes les guerres de l'Irak, mais je n'ai jamais vu quelque chose de
comparable à la bataille de la Vieille Ville de Mossoul», dit le major-général
al-Aradi. Pour les généraux irakiens, la tentation est grande d'oblitérer cette
poche de résistance par des bombardements massifs, ne serait-ce que pour
limiter les pertes de leurs propres soldats, dont plusieurs ont été tués ces
dernières 24 heures. Mais cette option ne semble pas encore avoir été choisie.
La Vieille Ville, un monde à part
En attendant que cette dernière poche de résistance soit
réduite, la ville de Mossoul est à présent curieusement divisée entre la paix
et la guerre. À l'Est, sur la rive orientale du Tigre où se prélassent des
troupeaux de buffles au milieu des roseaux, une vie presque normale a largement
repris. Les rues sont pleines de voitures, les ponts détruits sont contournés
par des radiers improvisés et les magasins presque tous ouverts. À l'Ouest, les traces de la bataille restent beaucoup plus présentes. Il faut contourner
presque à chaque intersection les énormes cratères creusés par les bombes de la
coalition pour compliquer la circulation de Daech. Et beaucoup de rues restent
fermées par les barrages construits pendant leur progression par les soldats
irakiens contre les voitures-suicides. La circulation qui reprend sur les
grands axes reste gardée par des points de contrôle militaire.
Mais le périmètre de la Vieille Ville reste un monde à part.
Ce vaste champ de décombres vide d'habitants semble être venu s'ajouter aux
ruines d'autres civilisations disparues : celles de Ninive, Nimrod ou Khorsabad,
qui foisonnent dans les environs. La reconstruction ne pourra commencer que
lorsqu'aura cessé la dernière résistance de Daech.
La rédaction vous conseille :
Mossoul : Amnesty International réclame une commission sur
les crimes contre les civils (11.07.2017)
Depuis le début de la bataille de Mossoul, plus d'un million
de personnes ont été déplacées.
Actualité
International
Par AFP, Reuters Agences et Pauline Dumonteil
Mis à jour le 11/07/2017 à 20h19 | Publié le 11/07/2017 à
19h32
Face à l'immense traumatisme que les populations ont vécu
pendant la bataille de Mossoul, des ONG s'inquiètent pour l'après.
Pendant neuf mois, les populations civiles de Mossoul ont
vécu l'enfer. Alors que le premier ministre irakien, Haïdar al Abadi, a annoncé
lundi la «victoire» sur les djihadistes du groupe État islamique, Amnesty
International et Handicap International s'inquiètent du traumatisme qu'ont vécu
les civils.
Car la victoire a été obtenue au prix de milliers de morts et de
blessés. Selon Handicap International, plus de 15.000 civils ont été blessés -
personnes référencées à l'hôpital - depuis le début de l'offensive en octobre
2016 et plus d'un million de personnes ont été déplacées. Mardi, Amnesty
International a réclamé la création d'une commission indépendante sur les
crimes commis contre les civils à Mossoul.
Une commission indépendante pour enquêter sur les crimes
Amnesty International a réclamé ce mardi la création d'une
commission indépendante sur les crimes qui ont pu être commis contre les
civils, tant par le groupe État islamique que par les forces irakiennes et la
coalition anti-djihadiste. «Une commission indépendante doit être immédiatement
mise en place, avec pour mission de faire en sorte que pour tous les cas où il
existe des preuves crédibles de violation du droit international, des enquêtes
soient menées, et leurs conclusions rendues publiques», insiste Lynn Maalouf,
directrice de recherche pour Amnesty International.
L'organisation de défense des droits de l'Homme reproche à
l'EI, en plus d'avoir utilisé des civils comme boucliers humains, d'avoir «tué
sommairement des centaines, si ce n'est des milliers, d'hommes, de femmes et
d'enfants qui tentaient de fuir» les violences. Elle dénonce également des
attaques «illégales» et une utilisation parfois inadaptée de la force, comme
pour la bavure du 17 mars lors de laquelle 105 civils ont été tués par un
bombardement américain. L'organisation de défense des droits de l'Homme dénonce
l'usage d'armes non conventionnelles. Une coalition d'environ 100.000 hommes,
composée de soldats irakiens, combattants kurdes et miliciens chiites, a mené
depuis janvier plusieurs attaques contre la partie occidentale de Mossoul,
utilisant des armes confectionnées à partir de bonbonnes de gaz, et provoquant
de nombreux dégâts en raison de leur manque de précision. Si la bataille de
Mossoul est aujourd'hui terminée, les autorités irakiennes sont désormais
confrontées à la tâche titanesque de la reconstruction de la ville et au sort
d'un million de réfugiés.
Traumatismes physiques et mentaux
Lors du dernier assaut sur la Vieille ville il y a deux
semaines, des centaines de milliers de civils étaient encore pris au piège.
«Plusieurs rapports font état de milliers de personnes utilisées comme
boucliers humains. Des centaines d'autres se sont fait tirer dessus
lorsqu'elles essayaient de fuir le conflit», explique Élisa Fourt, chef de
projet de Handicap International en Irak. L'ONG intervient dans les hôpitaux où
des blessés arrivent encore chaque jour mais également des camps où 800.000
personnes sont réfugiées. «Un certain nombre de civils qui ont réussi à fuir la
ville souffrent également de malnutrition et sont dans un état de fatigue
extrême. Nos équipes interviennent auprès de beaucoup de personnes qui sont en
état de détresse psychosociale face à ce qu'elles ont vécu au cours des
derniers mois. Certaines ont été témoins de scènes de torture, de crimes et ont
survécu dans des conditions extrêmement difficiles», ajoute Élisa Fourt.
Handicap International a déployé des psychologues sur le terrain car de
nombreux civils ont perdu leur maison et sont si traumatisés qu'ils
n'envisagent pas de retour.
Pour Lynn Maalouf, directrice de recherche pour le
Moyen-Orient au sein de l'organisation Amnesty International, il est temps de
réagir. «Les horreurs dont les gens de Mossoul ont été témoins et le mépris
pour la vie humaine de la part de toutes les parties du conflit ne doivent pas
rester impunis», déclare-t-elle dans un communiqué. Depuis le début de
l'offensive, plus de 200.000 civils sont déjà repartis dans leur zone
d'origine. «Nous les sensibilisons aux dangers des restes explosifs de guerre
et engins explosifs improvisés, pour qu'ils puissent les identifier et s'en
protéger, une fois de retour à Mossoul et ses environs», explique Élisa Fourt.
Ce mouvement devrait très largement s'intensifier dans les semaines à venir.
La rédaction vous conseille :
Selon l'OSDH, le chef de Daech, Abou Bakr al-Baghdadi,
serait mort (11.07.2017)
Le Pentagone a déclaré qu'il ne pouvait pas confirmer sa
disparition.
Actualité
International
Par Alexis Feertchak et AFP, Reuters Agences
Mis à jour le 11/07/2017 à 17h19 | Publié le 11/07/2017 à
14h58
VIDÉO - L'ONG syrienne a affirmé mardi détenir des
informations de hauts responsables du groupe djihadiste confirmant la mort de
leur chef. Des médias russes et iraniens avaient déjà évoqué ces dernières
semaines la disparition de celui qui avait proclamé le «Califat islamique» à
Mossoul en 2014.
L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), une des
principales ONG syrienne de défense des droits de l'homme (comm : un seul homme dans un bureau à Londres), a affirmé ce mardi
détenir des informations de hauts responsables du groupe djihadiste État
islamique (EI) confirmant la mort de leur chef, Abou Bakr al-Baghdadi.
«De hauts responsables de l'EI présents dans la province
(syrienne) de Deir Ezzor ont confirmé à l'OSDH la mort d'Abou Bakr al-Baghdadi,
émir de l'EI», a déclaré à l'AFP le directeur de l'ONG, Rami Abdel Rahmane.
«Nous l'avons appris aujourd'hui mais nous ignorons quand ou comment il est
mort».
De son côté, le Pentagone n'a pas confirmé l'information. Un
porte-parole du ministère de la Défense américain a expliqué que les États-Unis
ne disposaient pas d'informations permettant de corroborer la mort d'Abou Bakr
al-Baghdadi.
Si elle était confirmée, la mort du leader de l'EI porterait
un nouveau coup dur au groupe extrémiste sunnite. Ce dernier vient d'être
chassé de Mossoul, son dernier grand bastion urbain en Irak, et fait l'objet
d'une offensive des Forces démocratiques syriennes, une alliance arabo-kurde
soutenue par la Coalition internationale, dans son principal fief syrien de
Raqqa.
Ces derniers mois, al-Baghdadi «était présent dans l'est de
la province de Deir Ezzor», au sud de Raqqa, a ajouté Abdel Rahmane, qui a
toutefois souligné qu'il n'était pas clair s'il avait été tué dans cette
région, qui est contrôlée en grande partie par Daech, mais où l'organisation
terroriste perd du terrain tant face aux Forces démocratiques syriennes que
face à l'Armée syrienne fidèle au régime de Damas.
Des rumeurs sur la disparition d'al-Baghdadi depuis
plusieurs semaines
Avant la «confirmation» de l'OSDH, l'agence de presse russe
Tass avait déjà fait part dans la matinée de cette information, citant la
chaîne de télévision Al Sumaria. Selon ce média irakien, des militants de
l'État islamique auraient annoncé la mort de leur leader, ainsi que le nom de
son remplaçant.
Le sort de l'«émir» de l'État islamique fait l'objet de
nombreuses spéculations depuis plusieurs semaines. Le 22 juin, la Russie affirmait
avoir tué al-Baghdadi «selon une forte probabilité» lors d'une frappe aérienne
menée à la fin du mois de mai autour de Raqqa, la capitale syrienne de l'État
islamique, depuis encerclée par les Forces démocratiques syriennes. Fin juin,
la chaîne de télévision iranienne IRIB avait même publié deux photos
représentant supposément le corps sans vie du chef de Daech.
Le 3 juillet 2014, à Mossoul, dans la grande ville du nord
de l'Irak, qui a été reprise il y a quelques jours à l'Etat islamique par
l'Armée irakienne, Abou Bakr al-Baghdadi avait proclamé le «Califat islamique»
et ordonné aux musulmans de lui «obéir» dans ce qui fut sa seule apparition
publique. Né en 1971, il avait succédé en 2010 à Abou Omar al-Baghdadi à la
tête de l'État islamique d'Irak, un groupe terroriste djihadiste, devenu l'Etat
islamique en Irak et au Levant en 2013 avant de rompre en 2014 avec al-Qaïda
pour devenir l'État islamique. Il n'avait plus donné signe de vie depuis un
enregistrement audio diffusé en novembre, peu après le lancement de l'offensive
sur Mossoul, dans lequel il exhortait ses hommes à lutter jusqu'au martyre. Il
aurait quitté la ville en début d'année, probablement pour la frontière
irako-syrienne.
La rédaction vous conseille :
La guerre contre l’organisation Etat islamique continue (10.07.2017)
Editorial. Malgré la reprise de Mossoul par les forces
armées irakiennes, l’EI reste en mesure de déstabiliser les pays de la région.
LE MONDE | 10.07.2017 à 10h40 • Mis à jour le 10.07.2017 à
11h30
Les hommes des forces spéciales irakiennes, à Mossoul, le 9
juillet.
Editorial du « Monde ». Après neuf de mois d’une bataille
urbaine acharnée, le premier ministre irakien, Haïder Al-Abadi, a proclamé
dimanche 9 juillet la victoire de son armée dans Mossoul «libérée», mettant
un terme à trois ans d’occupation de la deuxième ville du pays par les
djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI), qui subissent là un revers
majeur. La France, qui est engagée dans la coalition internationale, a salué la
reprise de la ville. « Mossoul libérée de Daech : hommage de la France à tous
ceux, avec nos troupes, qui ont contribué à cette victoire », a écrit le
président de la République, Emmanuel Macron.
L’émergence de l’EI, sous l’égide de son « calife »
autoproclamé, Abou Bakr Al-Baghdadi, a marqué un tournant dans l’histoire du
djihadisme. Le groupe a voulu contrôler un territoire et établir un Etat, le
gérer, et accaparer les richesses qui en découlaient. Ce processus, qui a duré
trois ans, s’achève à Mossoul au milieu des cendres et des ruines.
C’est dans la célèbre mosquée Al-Nouri de cette ville que le
chef de l’EI avait fait son unique apparition publique en juillet 2014.
Aujourd’hui, l’édifice a été détruit, pulvérisé par les djihadistes en déroute.
Des milliers d’habitants ont été tués, des centaines de milliers de personnes,
qui ont fui les combats, ne rentreront pas chez elles avant longtemps.
Mais la perte de cet ancrage territorial ne signifie pas la
disparition du groupe djihadiste, qui contrôle toujours une vaste bande
territoriale le long de la vallée de l’Euphrate, à cheval entre l’Irak et la
Syrie, et qui, en muant d’une forme de proto-Etat à une guérilla ou à un réseau
terroriste, reste en mesure de déstabiliser les pays de la région et au-delà.
La dispersion de plusieurs dizaines, voire de centaines de ses combattants
étrangers, jusqu’ici occupés quasi exclusivement à la défense de son
territoire, pose plus que jamais la question de leur retour dans leurs pays
d’origine et le danger qu’ils y font peser.
Sentiment d’humiliation
L’EI militairement aux abois, il reste à le défaire
idéologiquement. Une bataille qui ne peut être menée sans une réelle
reconstruction de ces pays et une participation politique de populations
marginalisées depuis des années par les pouvoirs en place. En Irak, la montée
en puissance de l’EI, né sur les cendres d’Al-Qaida, qu’on avait déclaré
défaite dans les années 2000, est le fruit de la marginalisation des
populations sunnites ; des populations étouffées et réprimées par un
gouvernement central, revanchard, dominé par la majorité chiite.
En Syrie, l’implosion du pays et la guerre totale menée par
Bachar Al-Assad et ses alliés contre les régions insurgées avait là aussi
ouvert un boulevard aux radicaux, EI en tête, après deux ans de révolte
populaire. La présence massive de forces iraniennes et de milices chiites
soutenues par Téhéran dans ces deux pays alimente un clivage chiites-sunnites
et ne peut qu’attiser un sentiment d’humiliation dans ces régions.
Si le terrain sur lequel a prospéré l’EI reste inchangé, le
terreau sur lequel prospère le radicalisme islamiste au prétexte de la défense
des sunnites laisse planer le risque, à terme, d’une « renaissance » djihadiste
dans des régions plus « pacifiées » que libérées. Contre le djihadisme, la
solution ne peut venir d’un régime qui se voudrait centralisé et dominateur.
L’Etat irakien doit désormais assurer aux populations arabes sunnites une pleine
citoyenneté.
Irak : neuf mois de combats pour la reprise de Mossoul cartographiés jour par jour (10.07.2017)
Depuis le début de la bataille, le 17 octobre, « Le Monde » retrace les positions des camps en présence autour de la deuxième plus grande ville d’Irak.
LE MONDE | 20.10.2016 à 15h39 • Mis à jour le 10.07.2017 à 12h20 | Par Pierre Breteau
Mossoul, le 30 juin 2017. Des habitants fuient la vieille ville de Mossoul récemment libérée de la présence des combattants de Daech.
Il aura fallu près de neuf mois aux forces de sécurité irakiennes pour reprendre la deuxième ville du pays. Lancée le 17 octobre 2016, la bataille de Mossoul aura duré au moins deux cent soixante-cinq jours, de l’attaque par l’ouest via le Kurdistan irakien à l’annonce de la « victoire » par le premier ministre le 9 juillet, alors que les forces armées tentaient de venir à bout des dernières poches de résistance dans la vieille ville. Une bataille acharnée, menée en deux phases : la reprise de la rive gauche du Tigre et de la partie ouest de la ville, terminée le 24 janvier, puis l’offensive sur la partie est, la plus peuplée, le 19 février.
Durant toute la période de la bataille de Mossoul, les civils ont payé un lourd tribut : si nous ne disposons pas de bilan fiable du nombre de victimes, nous savons d’ores et déjà que, selon les Nations unies, 920 000 personnes ont fui la ville en neuf mois, dont 700 000 étaient encore déplacées le 9 juillet. Entre les bombardements de la coalition et les exécutions sommaires par l’organisation Etat islamique – au moins 231 pour le seul mois de mai – mais aussi par les forces de sécurité irakiennes, les civils ont été les premières victimes de l’occupation et de la reprise de la ville.
La reprise de Mossoul
Les zones « pleines » sont celles effectivement contrôlées, les zones hachurées au sud-ouest de Mossoul sont essentiellement désertiques. Au centre de la ville, sur la berge ouest du Tigre, se trouve la vieille ville – dernière zone que tenaient encore les djihadistes jusqu'au début du mois de juillet.
Prise presque sans combat en juin 2014, Mossoul était devenue le symbole de la progression de l’organisation Etat islamique et de l’effondrement du régime irakien. C’est dans cette ville qu’Abou Bakr Al-Baghdadi avait proclamé le « califat » dans les territoires conquis en Irak et en Syrie.
L'Irak annonce que Mossoul est "libérée" de l'État islamique (09.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec ReutersMis à jour le 09/07/2017 à 14:54 Publié le 09/07/2017 à 14:32
Le premier ministre irakien, Haïdar al Abadi, a annoncé dimanche la "victoire" sur les djihadistes du groupe Etat islamique à Mossoul.
"Le commandant en chef des forces armées (le premier ministre) Haïdar al Abadi est arrivé dans la ville libérée de Mossoul et a félicité les combattants héroïques et le peuple irakien pour cette grande victoire", lit-on dans un communiqué des services du chef du gouvernement.
Les troupes irakiennes avaient atteint dimanche, quelques heures plus tôt, les berges du Tigre dans la partie ouest de Mossoul, où se déroulaient les derniers combats contre l'EI.
L'EI s'était emparé de Mossoul en juin 2014 à la faveur d'une offensive éclair qui lui avait permis de contrôler de vastes territoires du nord et de l'ouest de l'Irak, mais aussi de Syrie voisine. C'est du haut du pupitre de la grande mosquée Al Nouri, dans la vieille ville de Mossoul, que peu après, le chef de l'EI, Abou Bakr al Baghdadi, avait proclamé l'établissement d'un "califat" s'étendant à cheval sur l'Irak et la Syrie.
Deux journalistes irakiens tués par l’EI près de Mossoul (08.07.2017)
Un groupe de journalistes était parti avec des policiers irakiens pour rendre compte d’une opération qui visait à déloger des djihadistes d’un village.
Le Monde.fr avec AFP | 08.07.2017 à 00h14 • Mis à jour le 08.07.2017 à 13h40
Une équipe d’intervention d’urgence en position lors des affrontements entre police irakienne et combattants de l’Etat islamique, le 7 juillet à Mossoul. AHMED SAAD / REUTERS
Des djihadistes du groupe Etat islamique (EI) ont tué deux journalistes irakiens dans un village au sud de Mossoul, dans le nord du pays, a annoncé vendredi 7 juillet la chaîne de télévision qui les employait. En revanche, un troisième journaliste qui était resté bloqué dans le village a été secouru par les forces de sécurité.
La chaîne Houna Salaheddine (« Ici Salaheddine ») n’a pas précisé la date de l’attaque. Mais des combattants de l’EI se sont infiltrés dans le village d’Imam Gharbi plus tôt cette semaine, kidnappant des civils, et les forces irakiennes s’efforcent de les en chasser, selon des responsables militaires.
« Notre collègue Harb Hazza Al-Douleimi, correspondant de la chaîne Houna Salaheddine, et Soudad Al-Douri, le caméraman, sont tombés en martyrs » à Imam Gharbi, a écrit la télévision dans un communiqué.
« Pris au piège »
Un autre correspondant de la chaîne irakienne, Mustafa Wahadi, s’était, lui, retrouvé pris au piège dans le village avec des policiers. « La situation est très dangereuse autour de moi » et l’EI « est tout proche », avait-il écrit sur sa page Facebook.
Dans la soirée, le général de brigade Saad Maan, porte-parole du ministère de l’intérieur, a annoncé qu’il avait été secouru. « Les forces de sécurité ont pu libérer les journalistes pris au piège dans le village et les policiers qui étaient avec eux », a-t-il dit, sans plus de précisions.
En 2016, l’Irak a fait partie des trois pays les plus meurtriers pour les journalistes pour la quatrième année d’affilée, selon le Comité pour la protection des journalistes. Deux journalistes français et leur fixeur irakien ont été tués dans l’explosion d’une mine le mois dernier à Mossoul, où les forces irakiennes sont engagées dans la dernière étape de la bataille contre l’EI.
Assaut prévu
Le village d’Imam Gharbi se trouve à 60 km au sud de Mossoul, près du Tigre. Non loin, sur l’autre rive du fleuve, dans la province de Salaheddine, se trouve une zone encore tenue par l’EI, que les forces irakiennes n’ont pas attaquée lors de leur offensive sur Mossoul, lancée en octobre. « Nous cernons le village et nous le prendrons d’assaut d’ici quelques heures », a déclaré le général Najmeddine Al-Joubouri, responsable de la sécurité pour toute la province de Ninive.
Selon un officier de l’armée, qui a souhaité conserver l’anonymat, des combattants de l’EI ont traversé le fleuve et se sont infiltrés dans Imam Gharbi. « Plus de dix familles ont été kidnappées par des membres de Daech [acronyme arabe de l’EI], dont des femmes et des enfants », a-t-il précisé.
Selon le cheikh Marwan Jabara, porte-parole des tribus de la province voisine de Salaheddine, les journalistes étaient partis jeudi avec des forces de police pour rendre compte des opérations visant à déloger du village les quarante à cinquante djihadistes infiltrés.
Éric Zemmour : «L'État islamique, hydre cauchemardesque des Occidentaux» (07.07.2017)
«Le sort de Daech est anecdotique. Peu importe la structure, les fondamentaux de l'Islam demeurent», estime Éric Zemmour.
Publié le 07/07/2017 à 09h00
CHRONIQUE - Le Moyen-Orient connaît aujourd'hui une situation qui ressemble à celle de l'Europe du XVIIe siècle, lorsque la querelle religieuse entre catholiques et protestants s'est transformée en une guerre totale.
C'est le début de la fin. À Mossoul (Irak) comme à Raqqa (Syrie), les défenseurs de Daech croulent sous l'assaut de leurs assaillants. L'État islamique s'était installé dans ces deux villes pour montrer qu'il ignorait la frontière entre l'Irak et la Syrie, délimitée par le fameux accord Sykes-Picot d'il y a un siècle. Une façon symbolique d'effacer la colonisation franco-anglaise et sa prétention à imposer partout la forme européenne de l'État-nation. Le combat de Daech est d'abord une prétention au califat, la forme impériale qu'a prise l'Islam dans l'Histoire. Cette ambition de s'inscrire sur un territoire est la grande différence avec l'action déterritorialisée et mondialisée d'al-Qaida.
La défaite de Daech dans ces deux villes sonnera le glas de son ambition politique. Elle ne mettra nullement un terme à son combat ni au désordre sanglant dans la région. Ses vainqueurs sont trop nombreux. La coalition occidentale et celle formée par l'Iran et la Russie n'ont pas les mêmes objectifs. À Mossoul comme à Raqqa, ce sont les troupes kurdes d'élite, aidées des conseillers américains, qui font le plus mal aux combattants du califat. La Turquie ne peut tolérer l'édification d'un Kurdistan indépendant par les armes. Erdogan est prêt à intervenir militairement en Syrie pour arrêter les Kurdes. Que feront les Américains, alliés de ces deux ennemis mortels? La Turquie sait qu'elle est regardée de travers par ses partenaires de l'Otan. Pour ne pas ouvrir trop de fronts à la fois, Erdogan a embrassé la babouche de Poutine et renoncé à renverser Assad. Mais l'Arabie saoudite n'a pas renoncé à combattre le dictateur syrien. Assad et son clan sont pour elle le symbole de l'insupportable présence de l'Iran. L'Arabie saoudite ne peut tolérer cet arc chiite Bagdad-Damas-Beyrouth qui s'est imposé peu à peu, profitant des folles interventions militaires américaines et de la puissance de feu des milices du Hezbollah. Cet affrontement entre l'Arabie saoudite et l'Iran va structurer encore longtemps la région. Il explique le soudain blocus du Qatar (ami de l'Iran!) et les bombardements de l'aviation saoudienne sur le Yémen.
Le Moyen-Orient connaît aujourd'hui une situation qui ressemble à celle de l'Europe du XVIIe siècle, lorsque la querelle religieuse entre catholiques et protestants s'est transformée en une guerre totale où toutes les puissances ont fini par intervenir, y compris la France de Richelieu. Cette guerre dura trente ans. Elle ravagea l'Europe, et l'Allemagne y perdit le tiers de sa population.
Le Moyen-Orient connaît sa guerre de Trente Ans. Tout le monde surveille tout le monde. Trump soutient l'Arabie saoudite. La Russie ne lâche pas l'Iran. Les ennemis de mes ennemis deviennent mes amis : Israël, par crainte de l'Iran et du Hezbollah à ses frontières, est en train de devenir le meilleur allié de l'Arabie saoudite. Tant pis pour les Palestiniens !
Dans ce grand jeu, le sort de Daech est anecdotique. Peu importe la structure, les fondamentaux de l'Islam demeurent. L'Arabie saoudite continuera de financer dans le monde les mosquées salafistes et l'islam le plus rigoriste de se répandre dans nos banlieues. Le califat est mort, vive le califat !
La rédaction vous conseille :
L'Etat islamique est "moribond" à Mossoul (07.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 07/07/2017 à 06:57 Publié le 07/07/2017 à 06:55
La défaite du groupe Etat islamique est proche dans son ancien bastion de Mossoul, deuxième ville d'Irak, dont les djihadistes devraient être totalement expulsés d'ici la semaine prochaine, a affirmé jeudi un général de brigade canadien de la coalition internationale.
Selon Dave Anderson, qui supervise la formation des troupes locales dans le cadre de l'intervention dirigée par les Etats-Unis, les forces de sécurité irakiennes ont repoussé les djihadistes dans leurs derniers retranchements, dans une petite poche de la vieille ville près du fleuve Tigre.
"Les forces irakiennes ont le fleuve Tigre en vue depuis l'ouest, et affrontent un ennemi qui est totalement moribond", a indiqué le général Anderson à des journalistes lors d'une vidéoconférence depuis Bagdad. Interrogé sur le nombre de combattants djihadistes restant à Mossoul, il a indiqué l'ignorer mais a assuré n'avoir "aucun doute" sur le fait qu'il n'y en aurait plus d'ici la semaine prochaine.
Le Canadien a précisé que la coalition avait commencé à dépêcher des équipements sur place pour aider la police irakienne à maintenir sa présence à Mossoul et pour tenir la ville après sa libération. Il s'agit notamment de matériels de patrouille, des réservoirs d'eau, des ordinateurs portables, des téléphones, des dispositifs pour installer des postes de contrôle, des véhicules, etc.
Plus de huit mois après le début de l'offensive pour reprendre Mossoul, les autorités militaires et politiques du pays ont affirmé jeudi que la "victoire" était désormais très proche face à l'EI, en passe de subir son plus important revers depuis 2014.
Irak: 20.000 civils pris au piège à Mossoul (06.07.2017)
Mis à jour le 06/07/2017 à 09:19 Publié le 06/07/2017 à 09:16
Il y a environ 20.000 civils toujours pris au piège des combats à Mossoul, selon l'ONU.
Plus d'informations à venir.
LIRE AUSSI :
L’aviation française a effectué 600 frappes lors de la bataille de Mossoul (05.07.2017)
Depuis le début de leur engagement contre l’EI en septembre 2014, les Français ont procédé à 1 307 frappes aériennes en Irak et Syrie.
Le Monde.fr avec AFP | 05.07.2017 à 21h30
L’aviation de chasse française a contribué à hauteur de 600 frappes à la bataille pour la reprise de Mossoul, dans le nord de l’Irak, où l’organisation djihadiste Etat islamique (EI) ne détient plus qu’un mince réduit, a annoncé mercredi 5 juillet le porte-parole des armées françaises.
Depuis le début de leur engagement contre l’EI, en septembre 2014, les Français ont procédé à 1 307 frappes aériennes en Irak et Syrie. La coalition conduite par les Etats-Unis en a effectué plus de 22 670 en Irak et 9 675 en Syrie, selon le Pentagone.
« Il y a d’abord eu la préparation de la bataille de Mossoul pour accompagner les forces de sécurité irakiennes, encercler la ville afin de couper tout renfort possible de l’extérieur : 300 frappes françaises ont accompagné ce premier succès », a déclaré le colonel français Patrik Steiger lors d’un point de presse. Et d’ajouter :
« Lors d’une seconde phase (...), qui permet aujourd’hui d’évoquer de façon sereine la libération de la ville, [il y a eu] 300 autres frappes et 1 200 missions de tirs d’artillerie. »
Lire aussi : A Mossoul, les forces anti-EI relancent labataille
Pas d’annonces prématurées
Outre ses avions de chasse en Jordanie et aux Emirats, ses canons Caesar autour de la ville de Mossoul, la France a engagé son porte-avions Charles de Gaulle en Méditerranée orientale, de septembre à décembre 2016.
Entre le 28 juin et le 4 juillet, les avions français ont encore effectué quatre frappes dans le secteur de Mossoul et quatre dans celui de Raqqa, fief de l’EI en Syrie.
Le colonel Steiger a cependant mis en garde contre des annonces prématurées de libération de Mossoul. « Il reste un kilomètre carré mais c’est ce qui restait à Syrte et à Benghazi (en Libye) et il a fallu des mois pour les prendre », a-t-il souligné. « La question n’est pas de savoir si Mossoul va tomber mais quand », a-t-il dit.
Une fois que la ville aura été reprise, « tout ou presque a été piégé et donc de longues opérations de déminage et de sécurisation vont devoir neutraliser les dernières cellules dormantes et les pièges dont Daech [acronyme arabe de l’EI] a saturé la ville », a-t-il dit.
A Mossoul, l’interminable traque des derniers combattants de l’EI (05.07.2017)
Les forces de la coalition n’ont plus que 300 mètres à reconquérir pour achever la bataille de plus de huit mois dans la métropole du nord de l’Irak.
LE MONDE | 05.07.2017 à 15h56 | Par Hélène Sallon
A Mossoul, le 29 juin.
Les hommes de la 1re Division des forces antiterroristes irakiennes se sont positionnés, mardi 4 juillet à l’aube, au bord de la rue Nabi Jorjis, dans la vieille ville de Mossoul. Face à eux se trouve le quartier d’Al-Midan, et seulement 300 mètres à conquérir jusqu’à la rive du Tigre, leur ultime objectif pour achever une bataille harassante de plus de huit mois dans la métropole du nord de l’Irak. Des femmes et des enfants, épuisés et apeurés, arrivent déjà en direction des soldats d’élite, par petits groupes.
Le lieutenant-colonel Salam Jassem Hussein a trouvé une nouvelle maison au plus près de la ligne de front pour installer sa caméra orientable. A l’extérieur, les détonations pétaradent dans une cacophonie assourdissante. Un important stock de munitions, laissées derrière eux par les combattants de l’organisation Etat islamique (EI), a pris feu dans un immeuble touché par une bombe.
La caméra balaie le quartier d’Al-Midan. Sur l’écran, quelques hommes bien charpentés, à la barbe fournie et vêtus de chemisettes et de pantacourts, attirent l’attention des soldats. Ils rentrent dans une maison qui donne sur une petite place ombragée par un arbre. « Ce sont des Russes », croient discerner les soldats. Le terme, dans leur bouche, désigne les combattants originaires de Russie, des républiques indépendantes soviétiques comme la Tchétchénie, et du Caucase.
Les hommes ressortent et, d’un pas nonchalant, marchent vers une autre maison. A intervalles réguliers, des groupes de deux à trois hommes arrivent, allant d’une maison à une autre. Un premier homme est repéré avec une kalachnikov sur le dos. « On a la preuve que ce sont bien des combattants. Filmez, filmez, qu’on ait tout sur la vidéo », intime le lieutenant-colonel Salam à ses hommes.
Selon les informations recueillies auprès des civils qui ont fui la vieille ville, beaucoup de combattants étrangers...
À Mossoul, la chute dantesque de l'État islamique (05.07.2017)
Par Adrien Jaulmes Mis à jour le 05/07/2017 à 08:07 Publié le 04/07/2017 à 20:15
Dans la vieille ville de Mossoul, un membre de l'armée irakienne libère mardi une famille pris au piège des combats depuis des semaines.
VIDÉO - Acculés à une bande de terre de 400 mètres de large le long du Tigre, les djihadistes laissent une ville en ruines.
De notre envoyé spécial à Mossoul
Seul un triple portique aux grilles tordues indique encore l'entrée de ce qui fut la grande mosquée al-Nouri de Mossoul. Derrière ce portail, une coupole vert pâle criblée d'éclats et quelques colonnes tiennent encore debout, à côté d'une carcasse de voiture arrivée là on ne sait comment. Le reste de l'ancien édifice du XIIe siècle n'est plus qu'un énorme amoncellement de gravats. Du célèbre minaret ‘al-Hadba', penché comme la tour de ...
Syrie : des brèches ouvertes dans le mur qui entoure la vieille ville de Rakka (04.07.2017)
Depuis le 6 juin, les Forces démocratiques syriennes rencontrent une forte résistance des combattants de l’EI. Mardi, les forces de la coalition ont soutenu leur avancée.
Le Monde.fr avec AFP et Reuters | 04.07.2017 à 06h43 • Mis à jour le 04.07.2017 à 08h32
Nouvelle percée pour les Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les Etats-Unis, qui tentent de reprendre la ville syrienne de Rakka aux djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI).
« Des forces de la coalition ont soutenu l’avancée des FDS dans la partie la plus lourdement fortifiée de Rakka en ouvrant deux brèches dans le mur de Rafiqah qui entoure la vieille ville », a annoncé lundi 3 juillet dans un communiqué le commandement des forces américaines au Moyen-Orient (Centcom).
Lire aussi : L’Etat islamique acculé à Rakka et Mossoul
Entrées le 6 juin dans Rakka, bastion de l’EI en Syrie, les FDS se sont ensuite emparées de plusieurs quartiers dans l’est et l’ouest de la ville mais se sont heurtées à une farouche résistance des djihadistes au fur et à mesure de leur progression vers le centre. Elles sont entrées pour la première fois par le sud dimanche, traversant l’Euphrate pour pénétrer dans une nouvelle partie de la ville.
Des frappes ciblées sur le mur
Dans les combats à proximité du mur historique datant du VIIIe siècle qui entoure la vieille ville de Rakka, les FDS ont rencontré une forte résistance des combattants de l’EI qui ont utilisé ce mur comme position de défense et ont posé à proximité des mines et d’autres engins explosifs, a rapporté le Centcom.
« Des frappes ciblées sur deux petites portions du mur ont permis aux forces de la coalition et aux forces associées de pénétrer dans la vieille ville aux endroits où elles l’avaient décidé. »
Ces frappes limitées ont notamment permis de « protéger les vies des FDS et des civils » et de « préserver l’intégrité de la plus grande partie du mur », précise le communiqué américain. « Les portions visées étaient des sections de 25 m, ce qui permettra de préserver le reste du mur qui est long en tout de 2 500 m. »
Selon la coalition, quelque 2 500 djihadistes de l’EI défendent Rakka, dans le nord de la Syrie.
A Mossoul, la menace croissante des femmes de l’organisation Etat islamique (03.07.2017)
Quatre attentats suicides ont été perpétrés, samedi 1er juillet, contre des positions militaires aux abords de la mosquée Al-Nouri par des femmes kamikazes.
LE MONDE | 03.07.2017 à 12h11 • Mis à jour le 04.07.2017 à 06h41 | Par Hélène Sallon (Mossoul, envoyée spéciale)
Dans la vieille ville de Mossoul, le 2 juillet. FADEL SENNA / AFP
Les visages accablés de douleur et marqués par la peur de dizaines de femmes et d’enfants apparaissent au bout d’une venelle qui court depuis le cœur de la vieille ville de Mossoul jusqu’au pied du minaret d’Al-Hadba, dimanche 2 juillet, en milieu de journée. Les soldats de la première division des forces antiterroristes irakiennes (ISOF-1) postés dans la ruelle se hâtent de trouver refuge à l’intérieur des vieilles bâtisses. Resté sur le pas-de-porte d’une mosquée à moitié détruite dans les combats, le général Abdelwahab Al-Saedi est prié par ses hommes de se mettre à l’abri.
Il n’est plus question pour les soldats d’élite de prendre le risque de venir au-devant des civils en fuite, qui arrivent par centaines. La fouille des hommes à distance ne suffit plus. Samedi 1er juillet, quatre attentats-suicides ont été perpétrés contre des positions militaires aux abords de la mosquée Al-Nouri par des femmes kamikazes qui s’étaient glissées dans le flot de réfugiés, faisant plusieurs morts et des blessés parmi les civils et les militaires. Lundi 3, ce sont deux nouvelles attaques de femmes qui ont eu lieu, dont une avait la nationalité tunisienne selon les forces antiterroristes.
« On a été chassé de notre maison par un enfant combattant pas plus haut que cela. Il avait l’air d’être russe »
Le recours par l’organisation Etat islamique (EI) aux femmes et aux enfants dans les combats, redouté depuis le début de l’offensive sur Mossoul en octobre 2016, s’est systématisé dans les dernières semaines de la bataille. Dans le quartier de Zinjili, au nord de la vieille ville, en mai et juin, les hommes d’ISOF-1 ont trouvé face à eux sept femmes combattantes armées de mitraillettes, qui se sont battues jusqu’à la mort.
Dans le viseur des tireurs d’élite, pointé en direction du quartier Midan, où se sont retranchés les combattants de l’EI sur les bords du Tigre, apparaissent de plus en plus souvent des enfants soldats, harnachés...
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/moyen-orient-irak/article/2017/07/03/a-mossoul-la-menace-croissante-des-femmes-de-l-organisation-etat-islamique_5154840_1667109.html
À Mossoul, Daech lance ses kamikazes pour freiner l'armée (03.07.2017)
Par lefigaro.fr Mis à jour le 03/07/2017 à 21:03 Publié le 03/07/2017 à 20:19
Des femmes en abaya noire fuient au milieu des ruines de la vieille ville de Mossoul avec leurs enfants dans les bras.
Un homme évacue un proche blessé à bord d'une remorque de fortune dans la vieille ville de Mossoul.
Des civils fuyant les combats emportent quelque affaires à travers les ruelles étroites et en partie détruites de la vieille ville de Mossoul.
Un jeune homme arbore un large sourire et une cage à oiseaux alors qu'il évacue avec d'autres civils la vieille ville de Mossoul.
Une femme porte une petite fille blessée dans ses bras alors que les soldats des forces irakiennes poursuivent leur avancée dans les ruelles de la vieille ville de Mossoul.
Omar, qui a perdu sa famille dans les combats qui font rage entre les derniers combattants de l'Etat islamique et l'armée irakienne, en compagnie des hommes du contre-terrorisme.
Des familles fuyant l'Etat islamique attendent d'être fouillées à un check point de Mossoul. L'armée irakienne craint la présence de kamikazes parmi eux
Des policiers irakiens font le V de la victoire durant les combats dans la vieille ville, qu'ils espèrent reprendre à l'Etat islamique d'ici la fin de la semaine.
Les forces irakiennes peinaient lundi à avancer dans la vieille ville de Mossoul face à la multiplication des attentats-suicides menés par les djihadistes qui luttent pour leur survie dans leur dernier grand bastion urbain en Irak.
Il s'agit de l'ultime phase de la bataille de Mossoul, lancée il y a plus de huit mois pour chasser le groupe État islamique (EI) de la deuxième ville du pays. L'EI n'y contrôle plus qu'un petit secteur de la vieille ville dans l'ouest de la cité septentrionale. Acculés sur la rive ouest du Tigre, et encerclés de l'autre côté par l'armée et la police, les djihadistes n'ont cessé de reculer depuis le début de l'assaut sur la vieille ville, le 18 juin. Selon une carte publiée par l'état-major, ils ne tenaient plus que quelques rues, dans un rectangle de 500 mètres de long et 300 mètres de large. De plusieurs milliers au début de l'opération , ils ne seraient plus que quelques centaines, dont une majorité d'étrangers, estime le lieutenant Sami al-Aridhi, un commandant des forces du contre-terrorisme (CTS). Mais à mesure qu'ils perdent du terrain, les djihadistes opposent une résistance de plus en plus féroce, au milieu de civils pris au piège.
À une centaine de mètres du site à moitié détruit de l'emblématique mosquée al-Nouri, repris jeudi dernier aux jihadistes, les belligérants retranchés dans deux immeubles se tirent dessus alors que des raids aériens frappent des bâtiments proches. Le front reste donc en partie proche de la mosquée, suggérant que l'avancée des forces gouvernementales reste lente. Un blindé irakien rentre du front avec assis à l'avant un homme barbu, torse nu et mains ligotées, à côté d'un soldat armé qui le pointe du doigt en criant: «Daech»! - acronyme en arabe de l'EI.
Des kamikazes de 12 et 14 ans
«Dans certains quartiers, l'ennemi a recours depuis trois jours à des kamikazes, notamment des femmes», précise le lieutenant Sami al-Aridhi pour expliquer la lente progression. «Auparavant, l'EI utilisait davantage de snipers et de bombes». Ces derniers jours, des adolescentes de 12 et 14 ans ont commis des attentats suicide tuant trois soldats irakiens, ont témoigné des militaires. Par crainte de ces attentats suicide, soldats et policiers postés à la sortie de la vieille ville demandaient lundi à chaque civil homme qui en sortait de soulever sa chemise ou son T-shirt pour montrer qu'il ne portait pas de ceinture explosive. Ne pouvant fouiller les femmes, faute de collègues féminines en nombre suffisant, ils leur demandaient d'ôter leur niqab et les isolaient le temps de contrôler leur identité.
Les forces irakiennes sont aussi gênées par la physionomie des lieux, un secteur aux rues étroites et densément peuplées qui rend «les combats chaque jour plus difficiles», a expliqué le général Abdel Ghani al-Assadi, commandant au CTS. Le commandant Aridhi croit malgré tout que la fin de la bataille devrait intervenir dans les prochains jours. Le Premier ministre Haïdar al Abadi est attendu prochainement à Mossoul pour annoncer formellement la victoire. Une semaine de célébrations nationales est prévue dans le pays.
L'EI a perdu 60% de son territoire
En attendant, des dizaines de civils, tout juste libérés par les troupes irakiennes après des mois bloqués dans la vieille ville, continuaient lundi d'affluer par petits groupes comprenant de nombreux enfants, y compris des bébés. Tous ont les traits tirés, sont pâles de fatigue ou rougis par l'émotion d'être enfin sortis de cette «prison» où ils manquaient de nourriture et d'eau potable, et risquaient chaque jour d'être tués. Parmi eux, Faten, une femme de 34 ans accompagnée de son fils de 13 ans, tremble dans son abaya noire. Elle raconte avoir été libérée par l'armée de la maison où elle était retenue depuis quatre mois par des djihadistes qui menaçaient de les tuer s'ils tentaient de fuir. «Je ne peux pas croire que je suis sortie vivante, je suis tellement contente»! lance-t-elle en pleurant de joie et de soulagement.
À quelques mètres de là, la frêle Fatima, 15 ans, abaya noire et cheveux couverts d'un foulard orange et noir, tient dans ses bras son fils d'un an et demi qu'elle a eu avec son mari, un djihadiste qui les retenait depuis un an. Elle n'a plus de nouvelles de lui, et ne veut pas en avoir. «Je ne veux plus jamais le voir car il nous affamait». Les civils sortant de la vieille ville sont pris en charge dans un centre médical improvisé. «Ils fuient la mort, la faim et la peur», dit Nazar Saleh, un médecin.
L'État islamique s'était emparé en 2014 de vastes pans de territoire en Irak, avant de perdre beaucoup de terrain face aux offensives des forces irakiennes appuyées par des frappes de la coalition antijihadistes dirigée par les Etats-Unis. Toutefois, une perte de Mossoul ne marquera pas la fin de la guerre contre l'EI, qui contrôle toujours plusieurs zones en Irak et en Syrie voisine. Bien qu'il ait perdu 60% de son territoire et 80% de ses revenus en trois ans, selon une étude du cabinet d'analyse IHS Markit publiée la semaine dernière, l'EI parvient toujours à commettre des attentats sanglants dans ces deux pays.
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Mossoul : L'EI lance des kamikazes sur les forces irakiennes (03.07.2017)
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Les forces irakiennes peinaient à avancer dans la vieille ville de Mossoul face à la multiplication des attentats suicide menés par les jihadistes qui luttent pour leur survie dans leur dernier grand bastion urbain en Irak.
Il s'agit de l'ultime phase de la bataille de Mossoul lancée il y a plus de huit mois par l'armée pour chasser le groupe Etat islamique (EI) de la deuxième ville du pays. L'EI n'y contrôle plus qu'un petit secteur de la vieille ville dans l'ouest de la cité septentrionale.
Mais à mesure qu'ils perdent du terrain, les jihadistes opposent une résistance de plus en plus féroce, au milieu de civils pris au piège des combats. "Dans certains quartiers, l'ennemi a recours depuis trois jours à des kamikazes, notamment des femmes", a déclaré le lieutenant Sami al-Aridhi, un commandant des forces du contre-terrorisme (CTS). "Avant cela, l'EI utilisait davantage de snipers et de bombes".
Il reste quelques centaines de jihadistes dans leur dernier carré de Mossoul, dont une majorité
d'étrangers, a-t-il précisé. Acculés sur la rive ouest du Tigre, et encerclés de l'autre côté par l'armée et la police, les jihadistes n'ont cessé de reculer depuis le début le 18 juin de l'assaut sur la vieille ville. Selon M. Aridhi, la fin de la bataille devrait intervenir "d'ici cinq jours à une semaine".
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Qui sont les auteurs d'attaques terroristes en Occident ? (30/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 30/06/2017 à 19:08 Publié le 30/06/2017 à 18:42
Les auteurs d'attaques terroristes en Europe et aux Etats-Unis étaient dans leur grande majorité des hommes jeunes et connus des autorités, selon une étude universitaire ayant passé au peigne fin les 51 attentats perpétrés en Occident depuis trois ans.
Depuis la proclamation du "califat" de l'Etat islamique le 29 juin 2014, il y a juste trois ans, 51 attentats ont été menés en Occident, dans un nombre limité de pays (8). La France a été le pays le plus touché, avec 17 attaques, suivie des Etats-Unis (16) et de l'Allemagne (7).
Ces attaques qui ont fait 395 morts et au moins 1.549 blessés, ont été perpétrées par 65 assaillants. Quarante-trois ont perdu la vie, 21 ont été arrêtés, 1 est en fuite.
L'âge moyen des auteurs s'élève ainsi à 27,3 ans. Le plus jeune avait 15 ans, le plus âgé 52. Sur les 65 assaillants, 63 étaient des hommes, soit 97% d'entre eux.
73% étaient citoyens du pays où ils ont mené l'attaque. 14% résidaient légalement dans le pays ou étaient en visite légalement depuis des pays proches, 5% étaient des réfugiés ou des demandeurs d'asile, tandis que 6% étaient présents illégalement sur le territoire ou attendaient d'être expulsés. 17% étaient des personnes qui se sont converties à l'islam.
82% étaient déjà connus d'une façon ou d'une autre des autorités avant l'attaque. 57% avaient un passé criminel et 18% avaient déjà effectué un séjour en prison. En revanche, seuls 18% d'entre eux s'étaient rendus à l'étranger pour combattre sur un terrain de guerre.
Concernant les attaques proprement dites, dans 8% des cas, l'ordre venait directement de dirigeants de l'Etat islamique. Dans 26%, les assaillants n'avaient pas de connexion avec l'EI ou d'autres groupes djihadistes, mais ont été inspirés par leur message. Enfin, dans 66% des cas, les auteurs avaient une forme de connexion avec l'EI ou d'autres groupes, mais ont agi de manière autonome.
Ce rapport baptisé "Djihadiste de la porte d'à côté. Radicalisation et attaques djihadistes en Occident" est le fruit d'une recherche approfondie conduite par Lorenzo Vidino, Francesco Marone et Eva Entenmann, dans le cadre du Programme sur l'extrémisme de l'Université George Washington, situé dans la capitale américaine, de l'Ispi (Institut pour les études de politique internationale) de Milan et de l'ICCT (centre international pour le contre-terrorisme) de La Haye. Ils ont étudié les 21 attentats perpétrés en Occident depuis 3 ans.
L'EI reprend un quartier de Raqqa (30/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 30/06/2017 à 14:01 Publié le 30/06/2017 à 13:51
Le groupe État islamique (EI) a repris aujourd'hui un quartier du sud-est de la ville de Raqqa, son bastion en Syrie, près de trois semaines après l'avoir perdu, a affirmé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"L'EI a totalement repris al-Senaa, le quartier le plus important dont s'était emparées les Forces démocratiques syriennes (FDS) le 12 juin", a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire, en référence à l'alliance kurdo-arabe appuyée par une coalition internationale menée par les Etats-Unis.
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"En utilisant des tunnels, les jihadistes ont attaqué les FDS en utilisant des kamikazes ainsi que des drones transportant des charges explosives", a-t-il précisé. Al-Senaa, un quartier densément peuplé, se trouve à proximité de la vieille ville de Raqa.
Hier, une quarantaine de membres de l'EI, vêtus de l'uniforme des FDS pour tromper la vigilance de leurs adversaires, avaient attaqué al-Senaa et Mechleb, deux quartiers du sud-est. Ils avaient mené trois attaques suicide à la voiture piégées, actionné des drones avec des charges explosives, pour s'emparer de six positions tenues par les FDS.
Après l'attaque d'aujourd'hui , les FDS ont dû se replier sur le quartier adjacent de Mechleb "où elles renforcent leurs positions", a dit M. Abdel Rahmane. Après la perte d'al-Senaa, les FDS contrôlent toujours Mechleb à l'est et deux autres quartiers à l'ouest.
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L'EI totalement retiré de la province d'Alep (30/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 30/06/2017 à 14:26 Publié le 30/06/2017 à 14:02
Le groupe jihadiste Etat Islamique (EI) s'est totalement retiré d'Alep, mettant fin à une présence de quatre ans de la province septentrionale de Syrie, a affirmé à l'AFP l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
"Daech s'est complétement retiré de la province d'Alep face à l'avance des forces du régime", a dit le chef de l'ONG, Rami Abdel Rahmane, en utilisant un acronyme en arabe de l'EI. Ce retrait d'Alep a été confirmé de source militaire syrienne.
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Mossoul : dans les ruines laissées par Daech (29/06/2017)
Par Luc Mathieu, Envoyé spécial à Mossoul Photos William Daniels — 29 juin 2017 à 20:26
Dans le vieux Mossoul, dimanche. Photo William Daniels pour Libération
Si la reprise de la mosquée Al-Nouri marque un tournant symbolique du conflit, les combats se poursuivent entre des jihadistes aux abois et une armée épuisée.
Mossoul : dans les ruines laissées par Daech
Quand le vent se lève, la vieille ville de Mossoul disparaît. Le ciel gris et brûlant, les murs sales des maisons ravagées, la poussière des gravats, plus rien ne se distingue, tout se mêle. Seule ressort parfois la puanteur de cadavres oubliés. Les forces irakiennes ont avancé jeudi et dévoilé un paysage post-apocalyptique. Elles ont gagné quelques centaines de mètres sur l’Etat islamique. Cela paraît peu. Mais dans des venelles d’un mètre et demi de large où chaque pas risque de déclencher une mine artisanale, où chaque porte peut receler un piège, c’est beaucoup. L’avancée est aussi symbolique. Les forces spéciales se sont emparé de ce qu’il reste de la mosquée Al-Nouri et d’Al-Hadba, son minaret penché recouvert de mosaïques, le «bossu» comme le surnomment les Mossouliotes. Les jihadistes l’ont dynamité le 21 juin. Ils ne voulaient pas que les soldats puissent parader et faire des selfies devant le minbar où Abou Bakr Al-Baghdadi, le calife autodésigné, a fait sa seule apparition publique. C’était le 3 juillet 2014, l’Etat islamique était au faîte de sa puissance. Jeudi, l’armée irakienne a commencé à déminer les ruines de l’édifice. «D’ici quatre à cinq jours, nous aurons atteint le Tigre. La victoire est une question de jours. Daech n’est plus qu’un pain de glace qui fond sous le soleil», souffle le général Sami al-Arthy, à la tête de deux divisions des forces spéciales irakiennes.
Dans la poussière de la vieille ville, à côté de son blindé noir frappé d’une tête de mort, Nasser, 23 ans, soldat dans les forces spéciales, ne dit pas autre chose. «Dans dix jours, deux semaines peut-être, c’est réglé. On sent que les hommes de l’Etat islamique n’ont plus le moral, qu’ils ne pensent plus qu’à s’échapper. Ils ne savent plus se battre alors qu’il y a encore trois semaines, ils étaient des combattants redoutables.» La bataille a anéanti le vieux Mossoul. Pas une maison ne semble avoir été épargnée. Des toits se sont écroulés, laissant des blocs de béton pendre comme des guirlandes, seulement retenus par leurs armatures métalliques. Des voitures calcinées aux carcasses tordues disparaissent sous la chaussée. Des cratères creusés par des frappes aériennes ont aspiré camionnettes et bulldozers. Quand les avions de la coalition ne bombardent pas et que les combats cessent, un silence profond se répand, imperméable aux bruits de la vie qui a repris dans les autres quartiers.
Tréteaux de fer
Jeudi, comme à chaque progression de l’armée irakienne, des habitants sont apparus au détour des ruelles. Exténués, sales, regards tristes ou joyeux de croiser des militaires. Ils n’ont que quelques sacs et sont entourés d’enfants. Une vieille femme a les yeux dans le vague. Seuls ses deux fils qui la soutiennent l’empêchent de s’écrouler. Devant une maison écrasée par un bombardement il y a dix jours, un homme reste à côté de deux sacs de plastique noir d’où s’écoule une odeur de mort. «Ce sont les restes de mes parents, on vient de les sortir», dit-il calmement. Un autre attend à ses côtés que les secouristes de la Défense civile extraient le cadavre de son père. Il reste une douzaine de corps sous les décombres.
La bataille de Mossoul n’est pas finie, mais les soldats sont épuisés. Ils marchent lentement, s’accroupissent dès qu’ils le peuvent à l’ombre d’un mur éboulé ou d’un blindé. Ceux des forces spéciales n’ont en réalité jamais cessé de combattre depuis 2014. Ils ont mené les assauts à Samarra, Tikrit, Ramadi, Fallouja, Hit, Baji et désormais Mossoul. Le califat irakien est presque annihilé, mais l’enchaînement des combats les a usés.
Dans la cour d’une maison de la vieille ville au toit à moitié arraché, Ahmed, 29 ans, s’est avachi dans un vieux canapé. Il est 15 heures et la chaleur pèse comme un sac de ciment sur les épaules. Il fait près de 50 degrés. «Le plus dur n’est pas tellement la fatigue physique, mais celle liée à la perte d’amis au combat, dit-il. Si je ne compte que depuis le début de l’offensive dans l’ouest de Mossoul, j’en ai perdu quatorze. Mon frère aussi est mort durant un combat.» Il sort son smartphone et montre les photos où il pose en riant avec chacun d’eux. «Au fond, ma vie se résume à la guerre.» Comme la plupart des autres soldats, Ahmed porte les cicatrices de ces offensives qui n’en finissent pas. Il est sorti il y a un mois de l’hôpital après l’explosion d’un mortier qui l’a blessé aux deux jambes et à un bras. Dans la cour de la maison, l’un de ses copains montre son bras, transpercé par cinq balles qui ont laissé des cercles sombres sur la peau et une longue cicatrice. «J’ai aussi été touché au ventre par un éclat», dit le jeune soldat.
Depuis le début de la bataille de Mossoul, les blessés sont rapidement soignés dans de petits centres d’urgence qui se déplacent au gré de la ligne de front. Ils sont ensuite transférés dans des hôpitaux. Cette semaine, l’un des plus avancés est installé à côté de la mosquée Abou Zyan, à environ 500 mètres de la vieille ville, dans deux anciens ateliers. Il n’y a ni porte ni fenêtre et des machines-outils sont encore installées au fond, trop lourdes sans doute pour être pillées.
Les infirmiers ont installé cinq brancards sur des tréteaux de fer. Les cartons de compresses, seringues et perfusions s’entassent le long des murs. Des grappes de mouches bourdonnent autour de petites flaques de sang. Chaque jour, les blessés se succèdent, emmenés par de vieilles ambulances aux suspensions défoncées qui pilent devant les anciens ateliers. «Les blessures les plus courantes sont dues à des éclats de mortiers, de mines artisanales et de grenades. Il y a aussi des blessures par balle, mais c’est moins fréquent», explique un infirmier. Les cadavres sont enveloppés dans une couverture puis déposés dans des sacs mortuaires. La guerre contre l’Etat islamique a décimé les rangs de l’armée irakienne. Les forces spéciales ont perdu 40 % de leurs effectifs, blessés ou tués, depuis le début des combats, selon le Pentagone.
«Seul Dieu a des yeux»
La guerre ne sera pas pour autant terminée avec la fin de la bataille de Mossoul. Avant même le début des derniers assauts contre la vieille ville, l’Etat islamique a répliqué à sa manière, brutale et rapide. Dans la nuit de dimanche à lundi, une soixantaine de jihadistes ont attaqué deux quartiers de l’ouest de Mossoul, libérés il y a quelques mois, Tanak et Yarmouk. Ils ont investi le premier, avancé vers le second. Les habitants ont fui en quelques heures. Les autorités irakiennes ont d’abord blâmé des «cellules dormantes». La réalité est plus inquiétante. Les jihadistes n’attendaient pas cachés à Mossoul dans des caves ou des maisons abandonnées. Ils venaient de beaucoup plus loin, de Tall Afar, à la frontière syrienne, l’une des dernières villes irakiennes qu’ils contrôlent encore. «Ils ont marché durant une partie du trajet et ont réussi à passer nos lignes. Ils avaient des informateurs qui leur ont dit comment éviter les check-points et parvenir jusqu’à Mossoul. Tout était prêt pour eux quand ils sont arrivés», explique le général Haider Fadhel des forces spéciales. Au moins un soldat a été tué lors de l’assaut. Aucun civil n’aurait perdu la vie, selon l’armée irakienne.
Un jihadiste a été capturé. Il a 11 ans. Les autres ont tous été tués, selon le général. «La plupart avaient des vestes explosives. Nous en avons abattu quelques-uns», affirme-t-il. Le cadavre poussiéreux de l’un d’eux, barbe et cheveux longs, pantalon court, était accroché tête en bas lundi matin au poteau cassé d’un feu tricolore. «Ce sont les habitants qui l’ont mis là, pas nous», expliquait un soldat en faction. Quelques heures plus tard, le corps avait été décroché. Il gisait juste à côté sur un terre-plein. Des enfants lui jetaient des cailloux, lui défonçant le crâne. Des adolescents criaient : «C’est un Pakistanais ! Non, un Afghan !» «C’est un Tadjik», hurlait un autre. Un homme d’une quarantaine d’années répétait : «Seul Dieu a des yeux et sait ce qui s’est passé.»
Le jour même, l’armée s’est déployée dans plusieurs quartiers de l’ouest de Mossoul, à plusieurs kilomètres de la vieille ville et de ses combats. En milieu d’après-midi, une vingtaine de soldats ont investi le quartier de Tal Ruman. Ils frappent aux portes métalliques des maisons. La plupart s’ouvrent. Ils pénètrent dans la cour, le salon, jettent un œil dans la cuisine, montent vers les chambres, observent les portes à l’arrière. «Regardez ce que vous voulez, et partout», dit un propriétaire bedonnant en offrant des graines de tournesol. Les inspections ne durent que quelques minutes. Au coin d’une rue, deux blindés sont arrêtés. Des soldats ouvrent le coffre d’un Humvee noir. Un homme pieds nus en tee-shirt blanc est allongé. Il a une vingtaine d’années et l’air terrifié. Un militaire lui met une claque et le sort en le tirant par une oreille. Le jeune est poussé jusqu’à un commandant qui joue avec une petite barre de fer. «Je n’ai rien fait, je n’ai rien fait», répète l’homme en gardant la tête baissée. «Quoi que tu aies fait, quoi que tu fasses, si jamais c’est pour Daech, tu es mort», crie le commandant. Un peu à l’écart, un soldat aux yeux bleus dit : «On le pousse un peu mais c’est pour lui faire peur. On veut qu’il travaille pour nous.» L’homme est ramené au Humvee où il récupère son sac. Il est libre. Il s’éloigne aussi vite qu’il le peut.
Luc Mathieu Envoyé spécial à Mossoul Photos William Daniels
L'EI subit deux revers en Irak et Syrie (29/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 29/06/2017 à 20:31 Publié le 29/06/2017 à 20:12
Les djihadistes du groupe Etat islamique (EI) ont enregistré aujourd'hui deux importants revers en Syrie et en Irak:En Irak, les forces gouvernementales ont repris le site de la mosquée emblématique d'Al-Nouri, dans la vieille ville de Mossoul où elles traquent les derniers jihadistes.
» Lire aussi - Le crépuscule de l'État islamique à Mossoul
C'est dans cette mosquée qu'Abou Bakr al-Baghdadi avait fait en juillet 2014 son unique apparition publique connue en tant que chef de l'EI, peu après que les jihadistes s'étaient emparés de la deuxième ville d'Irak. Il avait appelé dans un prêche les musulmans à lui obéir.
La mosquée Al-Nouri et le minaret penché, connu sous le nom d'"Al-Hadba" ("la bossue") et surnommé "la tour de Pise irakienne", avaient été détruits le 21 juin par les jihadistes qui les ont fait exploser alors que les forces irakiennes progressaient en direction de ce site. Le "califat", proclamé par l'EI il y a trois ans jour pour jour, touche à sa fin, a affirmé le Premier ministre irakien Haider al-Abadi.
Les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont "pris le contrôle d'une région au sud de l'Euphrate, coupant ainsi la dernière route que l'EI pouvait utiliser pour se retirer de Raqqa", a expliqué à Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. "Les FDS ont pu maintenant encercler complètement Raqa" a-t-il dit.
Quelque 2.500 jihadistes combattent dans la ville, selon le général britannique Rupert Jones, commandant en second de la coalition internationale. L'ONU a estimé mercredi que près de 100.000 civils étaient "pris au piège" à Raqqa, alors que des dizaines de milliers de civils seraient aussi bloqués dans la vieille ville de Mossoul.
Daech a perdu 60% de son territoire et 80% de ses revenus (étude) - 29/06/2017
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 29/06/2017 à 16:44 Publié le 29/06/2017 à 16:43
Le groupe Etat islamique (EI) a perdu en trois ans 60% du territoire qu'il a occupé en Irak et en Syrie et 80% de ses revenus, selon une étude du cabinet d'analyse IHS Markit publiée jeudi. Le territoire du "califat" autoproclamé en juin 2014 à cheval sur ces deux pays est passé de 90.000 km² en janvier 2015 à 36.200 km² en juin 2017, explique cette firme basée à Londres. Une coalition internationale conduite par les Etats-Unis mène des frappes aériennes contre les jihadistes depuis l'été 2014.
Au sol, la bataille est engagée en Irak par l'armée et en Syrie principalement par les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance de combattants kurdes et arabes anti-EI. "La montée et la chute de l'EI se caractérisent par une expansion rapide suivie d'un déclin continu. Trois ans après sa proclamation, il est évident que le projet de gouvernance du califat a échoué"', note Columb Strack, un expert du Moyen-Orient à IHS Markit. "Le reste du +califat+ devrait se désintégrer avant la fin de l'année et son projet sera réduit à une série de zones urbaines isolées qui devrait être reprise au cours de 2018", a-t-il ajouté.
Par ailleurs, les finances de l'EI se sont aussi effondrées. Les revenus mensuels sont passés de 81 millions de dollars au deuxième trimestre 2015 à 16 millions de dollars au second semestre 2017, soit une baisse de 80%. "Cela s'explique par un déclin continu de toutes les sources de financement, que ce soit la production de pétrole, les taxes et les confiscations ainsi que les autres activités illicites", note un autre expert d'IHS Ludovico Carlino. Ainsi les revenus générés par le pétrole sont tombés de 88% et les taxes et confiscations de 79% entre 2015 et 2017. Pour lui, "la perte de territoires est le principal facteur ayant entrainé les pertes de revenus".
"La perte de contrôle de régions peuplées comme Mossoul (en Irak) et de zones pétrolières dans les provinces de Raqa et Homs en Syrie ont eu un impact significatif sur la capacité du groupe à générer des revenus", a-t-il expliqué.
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EI/Philippines: la Chine promet d'aider (29/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 29/06/2017 à 15:10 Publié le 29/06/2017 à 14:42
La Chine a promis aujourd'hui de continuer à fournir aux Philippines "l'aide nécessaire", au lendemain de la livraison par Pékin de milliers d'armes à Manille pour affronter des djihadistes qui occupent une ville de l'archipel.
Le 23 mai, des centaines de combattants brandissant le drapeau noir du groupe Etat islamique (EI) ont pris le contrôle de quartiers de Marawi, une localité de la région de Mindanao, dans le sud du pays. L'armée philippine mène actuellement une campagne de bombardements et de combats au sol mais n'a pas réussi à déloger les assaillants des poches où ils se sont retranchés.
"Hier, le premier lot d'aide d'urgence a été livré aux Philippines", a déclaré aujourd'hui le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi lors d'une conférence de presse à Pékin.
"A l'avenir, conformément aux besoins des Philippines, nous continuerons à fournir l'assistance et l'aide nécessaires", a-t-il souligné aux côtés de son homologue philippin Alan Peter Cayetano, actuellement en visite en Chine. M. Wang a également promis le soutien chinois dans les opérations de reconstruction de Marawi.
Une cargaison chinoise de fusils d'assaut, fusils de sniper et de munitions est arrivée hier aux Philippines. C'est la première aide militaire de Pékin depuis que le président philippin Rodrigo Duterte a annoncé fin 2016 sa "séparation" d'avec les Etats-Unis - son allié militaire traditionnel - au profit de la Chine.
Cette livraison d'armes, d'une valeur de 50 millions de yuans (6,5 millions d'euros), "reflète l'avènement d'une nouvelle ère dans les relations philippino-chinoises", s'est réjouit M. Duterte.
L'ambassadeur chinois aux Philippines, Zhao Jianhua, a assuré qu'un "deuxième lot" d'armes chinoises sera bientôt livré.
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Roumanie: un arrestation en lien avec l'EI (29/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 29/06/2017 à 15:11 Publié le 29/06/2017 à 13:13
Un Roumain de 39 ans soupçonné d'avoir collecté des données militaires au profit du groupe Etat islamique (EI) a été interpellé aujourd'hui, une première dans ce pays de l'Union européenne, ont indiqué les autorités roumaines.
Le suspect est accusé d'avoir effectué des repérages "au printemps 2015 à proximité d'une installation militaire du territoire roumain, observant attentivement les voies d'accès et les clôtures", a précisé le parquet chargé de combattre le crime organisé et le terrorisme (DIICOT) dans un communiqué.
Son "but déclaré était de contribuer à l'organisation d'un attentat terroriste contre cette base", a ajouté le Service roumain des renseignements, selon lequel l'homme avait déclaré son "adhésion" au groupe jihadiste EI.
Il voulait transmettre les informations collectées à "une cellule salafiste et pro-jihadiste d'un état de l'Union européenne", a ajouté le parquet. Selon ce dernier, cette cellule était en lien avec des auteurs des attentats terroristes du 13 novembre 2015 à Paris.
Les autorités ont organisé ce matin trois perquisitions dans le département d'Arges (sud) où habitait le suspect. Il est également poursuivi pour "propagande" en ligne en faveur du groupe EI et a été placé en garde à vue.
Surveillé depuis 2015, l'homme se serait radicalisé après avoir vécu plusieurs années à l'étranger, dans un pays de l'Union européenne où il était en lien avec des groupes jihadistes, a précisé le service des renseignements.
Mossoul: les forces irakiennes annoncent avoir repris la mosquée Al-Nouri (29/06/2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 29/06/2017 à 11:40 Publié le 29/06/2017 à 11:30
Les forces irakiennes ont annoncé aujourd'hui avoir pris le contrôle de la mosquée Al-Nouri où Abou Bakr al-Baghdadi avait donné en juillet 2014 son premier prêche en tant que chef du groupe Etat islamique (EI). Sa dernière apparition publique connue à ce jour.
Des membres de l'EI avaient fait exploser cette grande mosquée, minaret emblématique de la ville irakienne, le 21 juin dernier.
L'armée irakienne a fait savoir que les Forces spéciales avaient pris la mosquée aux jihadistes. Un commandant des Forces spéciales a lui indiqué que le site n'avait pas encore été repris mais que ses forces étaient sur le point de le faire.
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L'interminable reconquête de Mossoul, la «capitale» irakienne de Daech (28.06.2017)
Par Adrien Jaulmes Mis à jour le 28/06/2017 à 21:32 Publié le 28/06/2017 à 19:50
VIDÉO - Après neuf mois de bataille, les forces irakiennes avancent sur le dernier refuge des combattants de Daech. Une ultime offensive qui s'oppose à la défense ingénieuse, retorse et acharnée des djihadistes.
La longue reconquête de Mossoul sur l'État islamique touche à sa fin. Acculés dans les ruines de la vieille ville, dans les décombres de ce qui fut le cœur de leur sinistre expérience étatique, les combattants djihadistes livrent leur dernier combat. L'issue de la bataille ne fait désormais plus aucun doute, mais les soldats irakiens devront néanmoins la livrer jusqu'au bout.
Il leur a fallu neuf mois de durs combats pour arriver jusqu'aux ruelles autour de la grande mosquée où fut proclamé le califat, en juillet 2014. Neuf mois au cours desquels les combattants fanatiques de l'EI ont reculé pied à pied, se battant maison par maison. Neuf mois pendant lesquels des ...
A Mossoul, les forces spéciales irakiennes se préparent à reprendre le dernier carré de l’EI (27.06.2017)
Les forces antiterroristes s’apprêtent à donner l’assaut sur le secteur de la mosquée Al-Nouri, détruite à l’explosif par les djihadistes.
LE MONDE | 27.06.2017 à 12h12 • Mis à jour le 27.06.2017 à 14h52 |
Par Hélène Sallon (Mossoul (Irak), envoyée spéciale)
Dans le quartier de Mouchahada, à Mossoul, le 26 juin. Les forces spéciales irakiennes font une reconnaissance par drone de la zone de la mosquée Al-Nouri, qu'ils s'apprêtent à attaquer.
Le socle d’Al-Hadba, reconnaissable à ses motifs géométriques, apparaît à plusieurs dizaines de mètres dans le trou que les snipers des forces antiterroristes irakiennes ont creusé dans un mur. C’est tout ce qu’il reste de « la Bossue », ce minaret penché du XIIe siècle emblématique de Mossoul, après que l’organisation Etat islamique (EI) a fait exploser le complexe de la mosquée Al-Nouri, le 21 juin au soir. La destruction de la mosquée, dont seul trône encore le dôme vert, a ôté un peu de sa saveur à l’offensive qui s’annonce contre le dernier carré de l’EI à Mossoul.
Chefs militaires et politiques irakiens s’imaginaient déjà prier là où le « calife » autoproclamé Abou Bakr Al-Baghdadi, a fait sa seule apparition publique en juillet 2014. Les soldats placés en première ligne pensaient immortaliser leur victoire d’un selfie après une bataille longue et meurtrière, débutée en octobre. Mais la mission reste inchangée : il leur reste à reconquérir à pied chaque immeuble qui les sépare encore de la rive droite du Tigre. Ils ont peut-être échappé au pire. « Quand nos troupes sont arrivées face à la mosquée, Daech a cru, peut-être à cause de la désorganisation dans ses rangs, qu’on y était entrés. A leur radio, on les a entendus dire : “Les rafidin [terme péjoratif désignant les chiites] sont entrés dans la mosquée, faites-la exploser” », raconte le lieutenant-colonel Salam Jassem Hussein, de la première division des forces antiterroristes.
Bataille qui ne veut plus finir
Rentré d’une formation aux Etats-Unis, un grade en plus à l’épaulette, le charismatique officier a retrouvé son bataillon à temps pour participer à l’offensive sur la vieille ville. Après avoir enfoncé les premières défenses ennemies en cinq jours, les troupes d’élite marquent une pause, le temps que l’armée et la police fédérale avancent à la même hauteur sur leurs flancs. Le lieutenant-colonel Salam profite de ce répit pour faire le tour des postes avancés. Après six mois d’absence, il retrouve des compagnons d’armes, le visage marqué par une bataille qui ne veut plus finir. Il constate l’absence de ceux qui, nombreux, ont été tués ou blessés dans les combats et découvre les visages des nouvelles recrues venues les relever.
Dans le quartier de Mouchahada, à Mossoul, le 26 juin. Les forces spéciales irakiennes en observation du secteur de la mosquée Al-Nouri qu'ils s'apprêtent à attaquer.
Dans le patio d’une vieille bâtisse ottomane à portée des snipers et des obus de l’EI, de jeunes soldats, les traits fatigués et tendus, l’accueillent, admiratifs. On échange sur le front, puis l’un d’eux prend la parole pour formuler une requête au nom de tous. « Notre position est l’une des plus dangereuses. On a encore perdu deux hommes. On a des soldats expérimentés mais aussi des jeunes recrues qui n’ont eu que six mois de formation et ne savent pas tous bien se servir des armes. Certains sont soutiens de famille ou ont un frère tombé en martyr. On voudrait être postés plus loin du front », demande le soldat.
« Si j’avais assez d’hommes, je ferais davantage tourner les effectifs pour desserrer la pression sur chacun d’entre vous, mais ce n’est plus le cas. C’est une guerre sans commune mesure qui appelle des mesures exceptionnelles. Nous sommes confrontés à une nouvelle forme de bataille. (…) Nous apprenons beaucoup de cette bataille. Même les Américains, les Français, les Italiens viennent ici pour apprendre. Vous devez rester soudés comme une famille », répond le lieutenant-colonel Salam pour remonter le moral des troupes.
L’officier et ses hommes se remettent en chemin. Dans les venelles à angle droit, ils tendent l’oreille à chaque pas qu’ils entendent. Un obus de mortier s’écrase à quelques mètres d’eux. Ils s’engouffrent dans la maison d’une autre compagnie. De jeunes soldats les attendent dans un confort spartiate. Des matelas sont posés à même le sol. Les boîtes en polystyrène des rations de nourriture gisent dans la cour. Il leur manque des ventilateurs et de l’eau fraîche. Ils doivent ramener, à pied, de la base arrière les packs d’eau et les blocs de glace. On leur promet qu’une voie d’approvisionnement sera bientôt ouverte pour les Humvees, les Jeeps blindées.
Décor lunaire
En lisière de la vieille ville, un bulldozer s’affaire déjà à ouvrir la route. De sa lame, il écarte les carcasses de voiture et les éboulis des maisons bombardées qui bloquent les ruelles. Le lieutenant-colonel Salam a laissé là son véhicule blindé noir pour s’enfoncer à pied dans le dédale de ruelles, escaladant des monticules de débris dans l’odeur putride des corps décomposés de combattants de l’EI et de civils, ou s’engouffrant dans les passages frayés entre les murs des maisons aux patios arborés et aux murs pastel. Dans un décor lunaire de maisons éventrées, d’anciens palaces et édifices religieux se dressent presque intacts.
Des balles sifflent au-dessus des têtes. Une frappe aérienne s’abat non loin dans un fracas. Les hommes rejoignent le sous-sol d’une maison, où un écran retransmet les images en noir et blanc d’un drone. L’engin évolue autour du complexe de la mosquée Al-Nouri. Quinze combattants djihadistes ont été repérés près de la rue Farouk. L’œil de la caméra glisse sur les toits plats de la vieille ville. Le pilonnage pendant trois mois de ces strates superposées d’édifices anciens et de constructions plus récentes, en parpaings grossiers, se voit nettement à l’image.
Des silhouettes apparaissent furtivement, à pied ou à mobylette, avant de disparaître derrière des habitations ou des bâches tirées au-dessus des ruelles. Une frappe est ordonnée. L’image se sature d’un nuage de fumée. « Il n’y a plus de civils dans cette zone et les combattants sont vraiment en petit nombre, dit le lieutenant-colonel Salam, tentant d’imaginer ce qu’il ferait à leur place. Ils n’attaquent pas. Ils attendent qu’on le fasse, ce qui veut dire que c’est fini. Certains attendent même la mort. »
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/moyen-orient-irak/article/2017/06/27/a-mossoul-les-forces-speciales-irakiennes-se-preparent-a-reprendre-le-dernier-carre-de-l-ei_5151782_1667109.html
Offensive à Raqqa : « l'État Islamique n'existe plus » (09/06/2017)
Par Eloi Thiboud Publié le 09/06/2017 à 12:33
FIGAROVOX/ENTRETIEN - Le 6 juin les Forces Démocratiques Syriennes soutenues par la coalition américaine, sont entrées dans Raqqa défendue par Daech. Spécialiste des questions internationales, Hadrien DESUIN décrypte le déclin de l'État islamique à Raqqa.
Spécialiste des questions internationales et de défense, Hadrien Desuin est essayiste. Il vient de publier La France atlantiste ou le naufrage de la diplomatie (éd. du Cerf, 2017).
FIGAROVOX. - Les forces arabes et kurdes, soutenues par les Américains, ont engagé l'offensive contre l'EI à Raqqa et sont entrées dans l'est de la ville le 6 juin. Que représente Raqqa pour l'EI aujourd'hui? La reconquête de Raqqa signifie-t-elle la chute de l'État Islamique?
D'un point de vue strictement territorial, «l'État islamique » n'existe plus.
Hadrien DESUIN. - Raqqa ne représente pas grand-chose dans la symbolique du Califat. Une ville comme Mossoul est plus intéressante car elle frappe l'imaginaire de la mythologie islamique. Tout comme Damas d'où est partie la reconquête de Saladin pour chasser les croisés de Jérusalem. Raqqa a toutefois été la plus grosse ville syrienne sous occupation de l'État islamique. Elle était donc la capitale économique de Daech en Syrie. Elle était très bien située quand l'organisation djihadiste était au faîte de sa puissance en 2014- 2015. 300 000 habitants, à très grande majorité arabes sunnites, ont donné de la substance à l'État islamique. Désormais encerclée, l'issue militaire de Raqqa ne fait pas de doute. Le siège sera long mais ce n'est qu'une question de temps. Les assaillants vont sans doute prendre le temps de laisser s'affaiblir les assiégés en coupant leur ravitaillement. En attendant, ils pourraient bien conforter leurs positions dans toute la province de Raqqa.
D'un point de vue strictement territorial, «l'État islamique» n'existe plus. Les liaisons sont très compliquées entre la Syrie et l'Irak. Il ne reste que des grosses poches de résistances, incapables de se coordonner entre elles. Plus aucune zone n'est sûre. Ces dernières vont persister encore longtemps car elles sont tenues par des fanatiques prêts à mourir plutôt que de se rendre. Dans certains quartiers très urbanisés, les petites équipes de snipers ou de tireur RPG peuvent considérablement ralentir la progression d'une troupe entraînée. Il faut 10 assaillants pour un défenseur à moins de raser la ville. Il s'agit toutefois d'un combat d'arrière-garde. Depuis que les contre-offensives des coalitions américaines et russes ont commencé, l'EI est revenu au modèle plus classique d'Al Qaïda : internationalisation du terrorisme et guérillas franchisées dans tout le monde musulman. N'oublions pas que Daech n'est au départ qu'une dissidence d'Al Qaïda en Irak et au Levant.
L'idéologie de Daech, et du djihadisme en général, ne peut pas vivre en dehors de la conquête. Dès qu'elle fut arrêtée aux portes de Bagdad, à Palmyre et dans Kobané, Daech a dû se réinventer pour survivre et maintenir sa folle cavalcade meurtrière.
Quels sont les intérêts des États-Unis à Raqqa ?
Les États-Unis ont voulu prendre Raqqa avant les Russes, les Iraniens et l'armée syrienne. Quitte à se fâcher avec les Turcs qui redoutent par-dessus tout l'extension du Kurdistan syrien. La prise de Raqqa marquera symboliquement la défaite de Daech en Syrie et donc la victoire de la coalition américaine. Pour Donald Trump, l'enjeu est d'importance après des années d'extrême prudence de la part de Barack Obama sur ce dossier. D'un point de vue géopolitique, la coalition irano-russe serait contrainte de laisser la vallée de l'Euphrate aux alliés des Américains. Il s'agit de confiner le plus possible la Russie et l'Iran qui sont toujours vus à Washington comme les principaux adversaires de l'Amérique à l'échelle du monde.
Les Forces Démocratiques Syriennes (FDS) soignent malgré tout leurs relations avec les Russes et donc avec le régime syrien car ils doivent se coordonner avec eux dans la poche d'Afrin, coupée du cœur du Rojava qui va de Kobané à Hassaké. En prenant Raqqa, les Américains veulent aussi rassurer l'Arabie Saoudite, le grand allié de Donald Trump : la Syrie de l'Est ne tombera pas dans l'escarcelle chiite. Cette vision saoudienne et confessionnelle est quelque peu caricaturale car le régime de Bachar a toujours su composer avec les populations sunnites dans le passé. En faire une secte arc-boutée sur un clan alaouite est très simpliste. La Syrie des années 2000 savait aussi jouer des rivalités entre l'Iran et l'Arabie Saoudite.
Qui tiendra la ville après le départ des djihadistes ?
Les membres arabes de l'alliance FDS sont en première ligne mais les Kurdes auront une place incontournable. Toutefois, ils devront s'appuyer impérativement sur les grandes familles de la ville qui ont subi l'oppression de l'État islamique pendant plus de cinq ans. Les Kurdes pourront réoccuper les quartiers dont ils ont été expulsés mais doivent rester en dehors des quartiers arabes s'ils veulent gagner la paix. Dans l'idéal, il faudrait qu'une municipalité sous l'égide des notables de Raqqa prenne les affaires socio-économiques en main, laissant aux FDS la défense militaire de la ville.
Pourquoi la coalition russe ne participe-t-elle pas à cet assaut ?
Parce que les Américains et les Russes ne sont jamais parvenus à se mettre d'accord sur le périmètre d'une éventuelle coalition commune. Les Russes sont alliés aux Iraniens, au Hezbollah et à l'armée de Bachar Al-Assad. Ni le Pentagone, ni la CIA ne peuvent accepter de combattre avec les alliés de la Russie. Ils soutiennent des rebelles sunnites qui se battent justement contre l'armée syrienne dans le sud du pays. Faute de s'entendre sur un partage des zones d'influence, la partition de la Syrie se fait par les armes. Chaque camp tente de prendre le maximum de terrain sur les décombres de Daech, un peu comme ce qui s'était passé à Manbij et Al-Bab.
Dans l'idéal, il faudrait qu'une municipalité sous l'égide des notables de Raqqa prenne les affaires socio-économiques en main, laissant aux FDS la défense militaire de la ville.
Pour la bataille de Raqqa, les forces soutenues par la Russie sont encore à 100km de la ville. Laquelle est déjà ceinturée par les FDS. Il est donc trop tard pour les troupes de Damas de participer à la prise de la ville. L'objectif est de consolider les territoires gagnés à l'est d'Alep et dans le centre du pays, autour de Palmyre. Il y a aussi les quartiers de Der Ez Zor à défendre, l'autre grande ville sur l'Euphrate. L'enclave qui résiste depuis des années à Daech est de nouveau sous l'intense pression des djihadistes.
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Daech veut créer un califat aux Philippines (29.05.2017)
Par Camille Bouscasse Mis à jour le 29/05/2017 à 12:42 Publié le 26/05/2017 à 18:39
VIDÉO - L'État islamique contrôle toujours la ville de Marawi sur l'île de Mindanao avec l'appui de djihadistes venus de pays asiatiques. Le président philippin Rodrigo Duterte évoque «une invasion».
La percée de groupuscules islamistes rattachés à l'État Islamique (EI) plonge l'île de Mindanao aux Philippines dans le chaos. Les islamistes philippins ont pris le contrôle de la ville de Marawi, un bastion musulman au sein d'un pays à majorité catholique.
«L'État Islamique a radicalisé un grand nombre de jeunes philippins musulmans»
José Calida, le solliciteur général des Philippines
Depuis le début des violences, et notamment depuis que le chef de police de Malabang s'est fait décapiter à un poste de contrôle des rebelles, les autorités philippines ont déployé les forces spéciales ainsi que plusieurs hélicoptères de combat. Après avoir instauré la loi martiale dans la région mardi dernier, le président philippin Rodrigo Duterte a insisté sur sa volonté de se montrer sévère et ferme envers les terroristes des groupes Maute et Abou Sayyaf.
Maute est une branche de Daech qui opère dans la région de Lanao du Sud sur l'île de Mindanao et qui s'est rendue célèbre en septembre 2016 lors d'une attaque à la bombe meurtrière à Davao, la plus grande ville de l'île de Mindanao.
Quant à Abou Sayyaf, le groupe islamiste qui sévit depuis plus de vingt ans a récemment étendu son influence à toutes les îles du Sud des Philippines et est responsable d'une multitude d'attaques terroristes dans la région. Selon les autorités philippines, des combattants indonésiens et malaisiens, entre autres, seraient venus soutenir et renforcer les islamistes philippins. Pour Manille, la présence de ces forces étrangères dans les rangs des insurgés est due à un appel de ralliement lancé par Daech.
L'apport des combattants indonésiens et malaisiens révèle le nouveau mode opératoire de l'État Islamique (EI). Pour la première fois en Asie de l'Est des branches locales de Daech déploient leurs forces sur des territoires autres que les leurs. Cette capacité de mobilisation et de déplacement de terroristes étrangers visent à internationaliser le terrorisme en s'appuyant sur les sous-groupes lui ayant prêté allégeance. Daech qui veut instaurer un califat sur l'île de Mindanao cherche à territorialiser son influence.
Pendant les derniers jours, l'État Islamique a engagé une succession d'offensives, à l'instar du double attentat-suicide de Jakarta. L'ouverture de ces nombreux fronts inquiète d'autant plus les autorités philippines que, selon José Calida, le solliciteur général des Philippines, l'État Islamique «a radicalisé un grand nombre de jeunes philippins musulmans.» Qualifiés de «très déterminés» par l'armée, les djihadistes ont provoqué la fuite de nombre des 200.000 habitants de Marawi et la mort de 46 personnes.
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A Mossoul, les forces anti-EI relancent la bataille (05.05.2017)
L’armée irakienne ouvre un second front pour encercler la vieille ville, où les djihadistes sont retranchés.
LE MONDE | 05.05.2017 à 10h38 | Par Hélène Sallon (Mossoul (Irak), envoyée spéciale)
Armées de nouveaux plans de bataille, les forces irakiennes ont lancé, jeudi 4 mai, l’assaut sur les derniers quartiers tenus par l’organisation Etat islamique (EI) dans le nord-ouest de Mossoul. L’objectif affiché est d’achever la reconquête du fief djihadiste avant le début du ramadan, fin mai. La bataille devrait être terminée « au maximum dans trois semaines », a déclaré dimanche le chef d’état-major irakien, le lieutenant-général Othman Al-Ghanmi, à la presse. Les militaires misent sur une nouvelle stratégie pour sceller cette bataille débutée mi-octobre 2016 : harceler les combattants de l’EI sur plusieurs fronts pour anéantir leurs défenses et finir d’encercler la vieille ville, avant de s’attaquer à son dédale de ruelles étroites, où les djihadistes sont retranchés avec des dizaines de milliers de civils.
« Nous avons ouvert un nouveau front depuis le Nord, en plus du front Sud, pour exercer une pression sur les combattants de l’Etat islamique sur plusieurs axes », indique le chef du centre des opérations conjointes de Ninive, le général Najim Al-Joubouri. La 9e division armée, la 73e brigade de la 15e division armée, la police fédérale et la division de réaction d’urgence (ERD), une unité d’élite du ministère de l’intérieur, ont entamé leur progression depuis le Nord en direction de quartiers connus pour être des bastions djihadistes. « Une fois que ces forces auront avancé, les forces antiterroristes [CTS] reprendront leur progression depuis le Sud et d’Ouest en Est, avec la police fédérale », poursuit-il. Ces forces devraient se rejoindre en lisière nord de la vieille ville, sur les bords du Tigre. Cette nouvelle stratégie vise à sortir l’offensive, lancée sur Mossoul-Ouest le 19 février, de l’enlisement autour de la vieille ville.
Importantes pertes et destructions
Depuis qu’elles ont achevé fin mars l’encerclement de la cité historique sur ses flancs sud et ouest,...
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/moyen-orient-irak/article/2017/05/05/a-mossoul-les-forces-anti-ei-relancent-la-bataille_5122665_1667109.html
Mossoul : des civils piégés et exécutés par l'État islamique (25.04.2017)
Mis à jour le 28/04/2017 à 15h10 | Publié le 25/04/2017 à
19h03
Se faisant passer pour des soldats des forces
gouvernementales, les djihadistes ont semé la terreur dans la vieille ville,
tuant les habitants qui manifestaient de la joie en les apercevant.
Des membres du groupe État islamique (EI) se faisant passer
pour des forces de sécurité irakiennes ont «exécuté» au moins 15 civils qui les
accueillaient en libérateurs dans le centre de Mossoul, ont indiqué mardi des
responsables. Vêtus d'uniformes de la police, les djihadistes sont entrés lundi
dans des secteurs de la vieille ville et, prétendant être des forces fédérales,
ils ont commencé à semer la terreur au sein de la population en constatant leur
réaction de joie, ont déclaré le Commandement conjoint des opérations et un
responsable local.
Lancée le 17 octobre, la bataille de Mossoul a permis aux
troupes gouvernementales de chasser fin janvier les djihadistes de la partie
orientale de la deuxième ville d'Irak coupée en deux par le fleuve Tigre.
Depuis février, elles tentent avec le soutien d'une coalition internationale
dirigée par les États-Unis de s'emparer de la partie occidentale où elles ont réalisé
d'importantes avancées. Mais la progression dans la vieille ville, un entrelacs
de ruelles étroites densément peuplées, s'avère ardue et lente.
500.000 civils aux mains de l'EI
L'ONU estime à 500.000 le nombre de civils toujours présents
dans les zones contrôlées par l'État islamique à Mossoul, et a exprimé son
inquiétude à leur égard. Quelque 400.000 d'entre seraient dans la vieille
ville.
La perte de Mossoul constituerait un coup très dur à l'EI,
qui s'était emparée de la ville en juin 2014 lors d'une offensive éclair lui
ayant permis de contrôler de vastes territoires en Syrie et en Irak. Il a
depuis perdu une grande partie de ces zones et ne contrôlent plus que 7% de
l'Irak, selon un porte-parole militaire. Les deux autres villes importantes qui
restent sous contrôle de l'EI sont Hawija, à 180 km au sud-est de Mossoul, et
Tal Afar, à l'ouest de Mossoul. Les djihadistes occupent également des régions
isolées de la province occidentale d'Al-Anbar près de la frontière syrienne.
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À Mossoul, les civils tentent de fuir d'un quartier à l'autre Daech et la guerre
Les habitants de Mossoul racontent le cauchemar de la vie
sous Daech (14.04.2017)
Signe encore visible de la présence de l'État islamique, des
têtes de personnages de dessins animés peints sur les murs d‘une crèche du
quartier de Mouthanna sont toujours recouvertes par des carrés de peinture noire.
- Crédits photo : Lucien Lung
International | Mis à jour le 14/04/2017 à 17h11
REPORTAGE - Pendant deux ans et demi, les islamistes de
Daech ont gouverné Mossoul, la plus grande ville jamais tombée sous la coupe
d'une organisation terroriste. Les habitants se souviennent de leur règne,
mélange de puritanisme exacerbé et de machiavélisme policier hérité des
services secrets de Saddam Hussein.
Sur la rive droite du Tigre, la grande bataille de Mossoul continue. Dans le centre historique de la ville, l'armée irakienne affronte
sans relâche les djihadistes de l'État islamique dans des combats de rue
féroces. Jour et nuit, les tirs d'artillerie résonnent, les hélicoptères tirent
des rafales de canon automatique, et des voitures suicides explosent, soulevant
de grands panaches de fumée grise entre les maisons.
Sur la rive gauche, de l'autre côté du fleuve aux ponts
coupés, les tirs se sont tus. Reprise fin janvier après des mois de durs
combats, Mossoul-Est se réveille du cauchemar long de deux ans et demi que fut
le règne de l'État islamique. Dans les rues dévastées par les violents combats
qui se sont livrés jusqu'aux rives du fleuve, les travaux de réparation ont
commencé.
On comble les cratères au milieu des carrefours,
systématiquement bombardés par la coalition pour gêner les mouvements des
voitures piégées de Daech. Sur la rivière al-Khoser, un affluent du Tigre aux
eaux boueuses qui traverse les quartiers orientaux, un radier improvisé
au-dessus de gros tuyaux de ciment permet aux autos de traverser. On manque
d'eau et d'électricité. Presque à chaque carrefour un camion de forage perce un
puits artésien pour les habitants, et des stands improvisés vendent de
l'essence en bidon pour les générateurs. Des antennes relais de téléphone sur
des remorques ont rétabli les réseaux de téléphonie mobile.
Les magasins d'alimentation ont rouvert. Les seuls signes visibles
de la présence de l'État islamique sont les visages des femmes recouverts à la
peinture sur les enseignes des magasins de vêtements, l'islam rigoriste de
Daech interdisant la reproduction d'êtres vivants. Sur les murs d'une crèche
pour enfants dans le quartier de Mouthanna, cette règle s'applique même aux
personnages de dessins animés, Mickey, Donald, Winnie l'Ourson et Bob l'Éponge,
dont les têtes ont été cachées par des carrés de peinture noire.
Mais les dégâts les plus profonds sont ceux laissés dans les
esprits. Plus sophistiqués que les talibans, parfois même plus cruels, les
islamistes de Daech ont gouverné cette grande ville de près de deux millions
d'habitants à leur manière: efficace et brutale. Avec un mélange de cynisme et
d'idéologie, de puritanisme exacerbé et de machiavélisme policier hérité des
services secrets de Saddam Hussein, dont beaucoup de leurs membres sont issus,
l'État islamique a imposé sa loi sans ménagement.
La question de la collaboration d'une partie des habitants
de Mossoul avec l'organisation ne sera sans doute jamais vraiment établie : les
témoignages sont difficiles à recueillir et les mémoires sélectives. Tout le
monde ou presque s'accorde sur le fait que cette grande ville du nord de
l'Irak, à forte majorité sunnite, et dans laquelle le parti Baas recrutait ses
élites, n'a pas accueilli sans sympathie sa conquête surprise par
l'organisation, qui s'appelle encore en juin 2014 État islamique en Irak et au
Levant. Peu de gens contestent que le régime de terreur de Daech a vite
refroidi l'enthousiasme de beaucoup.
Dans le quartier de Mouthanna, Salam a rouvert son café dans
un petit centre commercial plein de boutiques vides. Assis avec ses amis Daoud
et Leith devant un narguilé, ils racontent leur vie sous le joug de l'État
islamique. Ces jeunes gens ont fondé une association baptisée «Rendons-la plus
belle», qui a entrepris de nettoyer et de réparer les dégâts subis par leur
ville. Après avoir déblayé des rues et remis en état des hôpitaux, les jeunes
gens admettent qu'il reste du travail de réparation à faire, «surtout dans les
esprits».
«Au début, Daech a été plutôt bien accueilli, dit Daoud. Ils
disaient qu'ils étaient là pour nous débarrasser du gouvernement de Maliki
(premier ministre chiite de l'Irak entre et 2006 et 2014), et c'était plutôt
bien perçu. Mais ils ont vite commencé à éliminer des gens, surtout les classes
intellectuelles. Les médecins, les ingénieurs, les gens qui travaillaient dans
la communication et les enseignants qui refusaient d'enseigner leur cursus. La
vie est vite devenue un cauchemar. On pouvait être tué sous le moindre
prétexte, posséder un téléphone portable ou même une carte SIM pouvait vous
faire considérer comme un espion.»
Collaboration et dénonciations
Tous ont été arrêtés à un moment ou à un autre par l'État
islamique pour des motifs divers. «Comme je suis photographe, j'étais surveillé
par Daech depuis le début, dit Leith. J'ai été détenu pendant trois jours, sans
raison. J'ai découvert que j'avais été dénoncé par un voisin, un dénommé Abou
Anas. Il était originaire des environs de Mossoul. On a découvert qu'il était
avec Daech depuis le début. Il était l'un des juges de la Hesba, la police
religieuse. On le surnommait le “Cadi du Sang”, car il avait droit de vie et de
mort sur les gens. Les cadres de Daech étaient soit originaires des villages
voisins de Mossoul, soit des habitants qui avaient été d'abord avec al-Qaida
puis ont rejoint Daech.»
Anas est étudiant en chimie. Avec ses lunettes aux montures
épaisses et son tee-shirt moulant, il passerait inaperçu dans n'importe quelle
grande ville occidentale. «À leur arrivée à Mossoul, les gens de Daech ne
s'occupaient pas vraiment de la population, dit-il. Ils disaient qu'ils étaient
là pour lutter contre la corruption et la criminalité. Après l'armée irakienne
qui se comportait très mal en ville, ils apportaient un changement. Mais quand
al-Baghdadi a proclamé l'État islamique, les gens ont compris qu'il y avait un
problème… Au bout de quelques mois, ils ont commencé à arrêter les gens, à
rendre obligatoire le port du voile intégral, la barbe. On était comme en
prison, on restait à la maison, on mangeait chez soi et on ne sortait plus.»
Au bout d'un an, Anas décide de quitter Mossoul. Il prend
contact avec un passeur, qui accepte pour 1000 dollars de l'emmener en taxi
jusqu'à Raqqa, et, de là, jusqu'à la frontière turque. «C'était le voyage en
taxi le plus cher de ma vie : on n'est pas allés plus loin que la sortie de la
ville», dit-il. Le taxi le conduit directement auprès d'un groupe d'hommes
armés. «Ils m'ont braqué une arme sur la tempe et m'ont arrêté. Le passeur
était en fait un complice de Daech. J'ai reconnu leur chef: il s'appelait Ali
Nathom al-Sarraj. Il possédait un magasin de vêtements féminins dans mon
quartier, mais il était aussi l'un des responsables de Daech. Il m'a demandé :
où pensais-tu aller? En fait, ils savaient tout de mon projet. J'ai été tabassé
pendant cinq heures. Al-Sarraj chargeait son pistolet devant moi et me disait:
“Je vais t'exécuter.” Puis les coups reprenaient. Il me disait ensuite: “Tu as
une jolie gorge, je vais te l'ouvrir.” Puis il me disait qu'il allait me jeter
du haut d'un immeuble. J'ai cru que j'allais mourir.»
Anas est gardé en prison une dizaine de jours mais échappe
pourtant au pire. Il doit payer 1000 dollars supplémentaires d'amende. D'autres
n'ont pas autant de chance que lui. «Je connaissais cinq jeunes gens, des
ouvriers du bâtiment, dit-il. Ils aimaient se rassembler pour boire un peu
d'alcool. Ils ont été dénoncés par quelqu'un qui a apporté à Daech une vidéo où
on voyait l'une de leurs réunions. Ils ont été arrêtés et, dix jours plus tard,
ils ont été amenés devant la mosquée Sadiq Rashan. On voyait qu'ils avaient été
torturés. Les hommes de Daech ont ramené les gens du quartier, ils ont même
fait sortir de la mosquée les gens qui priaient. Un homme en noir est arrivé
avec une grosse épée et les a décapités les uns après les autres. L'épée
faisait des étincelles sur le sol. La mère de l'un des jeunes gens a perdu la
raison, et ne l'a pas retrouvée depuis.»
La folie de Daech augmente avec le début des bombardements
de la coalition. «Ils sont devenus comme encore plus paranoïaques», dit Abdel
Halek el-Ghasso, un représentant de la bourgeoisie aisée de Mossoul. Lui et sa
famille se sont terrés dans leur cave, dans leur villa de la Corniche, un
quartier de la rive ouest libéré le mois dernier par l'armée irakienne. «On
vivait à plusieurs familles au sous-sol. À l'étage, des combattants de Daech
venaient parfois se reposer», dit M. el-Ghasso. Depuis la libération de la
ville, cet homme d'affaires, qui possède plusieurs immeubles et garages
automobiles sur les deux rives du Tigre, a rasé sa barbe pour se laisser
pousser une moustache. Il a remis son costume à rayures tennis à la place des
pantacourts flottants et de la chemise longue rendus obligatoires par la police
religieuse de Daech. Son épouse et ses filles ont quitté le niqab pour un voile
simple. «On ne pouvait pas marcher avec ce truc-là», dit l'une d'elles. Au fond
de la cave, derrière un rideau, elle montre le téléviseur branché sur batteries
que la famille regardait de temps en temps, «15 minutes pas plus, pour avoir
les infos». Compte tenu du nombre de gens possédant une télévision et un
téléphone portable, il semble que l'interdiction de Daech ait été surtout
destinée à racketter les habitants en les condamnant à des amendes. Madame
el-Ghasso s'emporte contre les djihadistes mais aussi contre les
collaborateurs. «Il y avait des gens qui étaient très contents de la présence
de Daech, dit-elle, et notamment tous les commerçants qui se sont enrichis
grâce à eux.»
Beaucoup de gens continuent de tenir leur langue. Malgré la
présence de policiers irakiens aux carrefours, la peur de voir revenir les
djihadistes demeure. «Il y a des cellules dormantes de Daech en ville, dit
el-Ghasso. Nos problèmes ne sont pas finis à Mossoul. On n'a pas de bonnes
relations avec le gouvernement de Bagdad. Et on a aussi des gens un peu
extrémistes. Il n'est pas impossible que Daech revienne, peut-être sous une
autre forme.»
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Syrie : six mois pour libérer Raqqa de l'État islamique (10/02/2017)
Par Fabrice Balanche Publié le 10/02/2017 à 12:01
Les FDS, dominées par les Kurdes et soutenues par les Etats-Unis, sont lancées dans la bataille de Raqqa, capitale syrienne de Daech.
FIGAROVOX/ANALYSE - Les Forces démocratiques syriennes, en majorité kurdes, soutenues par Washington, ont lancé une nouvelle phase dans la reconquête de la capitale syrienne de Daech. Fabrice Balanche analyse les enjeux de cette bataille stratégique, y compris pour Donald Trump.
Agrégé et docteur en Géographie, Fabrice Balanche est maître de conférences à l'Université Lyon-2 et chercheur invité au Washington Institute. Spécialiste du Moyen-Orient, il a publié notamment La région alaouite et le pouvoir syrien (éd. Karthala, 2006) et Atlas du Proche-Orient arabe (éd. RFI & PUPS, 2010).
Samedi 4 février, les Forces démocratique syriennes (FDS), en majorité kurdes, ont annoncé le lancement d'une nouvelle phase dans la reconquête de Raqqa, capitale régionale de l'Etat islamique en Syrie. Il s'agit désormais de couper les communications entre Deir ez-Zor et Raqqa, tout en continuant à progresser depuis le Nord et surtout l'Ouest, puisque le barrage Thaoura demeure toujours entre les mains de l'Etat Islamique.
La déclaration des FDS est en phase avec la volonté du nouveau président américain d'accélérer la guerre contre l'Etat Islamique et en particulier de s'emparer rapidement de Raqqa. Donald Trump a laissé le mois de février au Pentagone pour lui présenter un plan d'action contre l'Etat Islamique, dont les FDS semblent être la force motrice en Syrie au grand dam de la Turquie.
Source: Washington Institute
La nouvelle offensive va complètement isoler Raqqa
La nouvelle offensive ne fera pas que couper les relations entre Raqqa et Deir ez-Zor, mais elle devrait également isoler complètement Raqqa du reste du territoire de l'Etat Islamique, car Raqqa se trouve sur la rive nord de l'Euphrate. En septembre 2016, une série de raids aériens de la coalition internationale ont détruit tous les ponts sur l'Euphrate, depuis la frontière irakienne jusqu'à l'est de Raqqa. Les deux ponts qui relient Raqqa à la rive sud de l'Euphrate furent détruits le 3 février dernier, la veille du déclenchement de la nouvelle offensive des FDS. Lorsque ces derniers auront atteint la rive nord de l'Euphrate à l'Est de Raqqa, cette dernière sera cernée. Certes, les combattants de l'Etat Islamique peuvent traverser le fleuve avec des barques, mais ils deviennent ainsi des cibles faciles pour l'aviation américaine et ne peuvent pas transporter du matériel lourd. En revanche, les FDS disposent de barges pour véhicules blindés et les Etats-Unis mettent à leur disposition des hélicoptères de transport qui leur permettent de lancer des opérations sur la rive sud.
C'est sans doute par ce moyen que les FDS pourront s'emparer du barrage de Thaoura (Révolution), dont la partie sud est toujours entre les mains de l'Etat Islamique et du second barrage (Kadiran), 10 km en aval, qui sert de régulateur au débit de l'Euphrate. Le contrôle de ces deux barrages sur l'Euphrate est un préalable à un assaut sur Raqqa. Sans quoi, Raqqa libérée serait sous la menace de leur destruction par l'Etat Islamique. Sur un plan plus pratique, le barrage Thaoura fournit l'eau d'irrigation et l'électricité pour toute la province de Raqqa et même au-delà. Or, une fois Raqqa libérée, les nouvelles autorités auront besoin d'assurer le fonctionnement normal de la vie civile, si elles ne veulent pas que le chaos économique ne retourne la population contre elles. Enfin, sur un plan strictement militaire, le barrage Thaoura est désormais le dernier pont qui demeure sur l'Euphrate à proximité de Raqqa.
Les FDS ont des atouts militaires
Pour cette nouvelle offensive, les FDS bénéficient de plusieurs atouts stratégiques. Tout d'abord le fait que les troupes de l'Etat Islamique sont mobilisées sur plusieurs fronts de Mossoul à al-Bab en passant par Palmyre et Deir ez-Zor. Tous les acteurs du conflit en Syrie et en Irak semblent désormais unis contre lui. La Russie, la Turquie, l'Iran, les Etats-Unis et leurs alliés locaux n'ont pas créé une chambre d'opération commune pour coordonner leurs actions contre l'Etat Islamique, mais il semble que chacun ait trouvé son terrain d'action et gelé ses disputes : Manbij pour la Turquie et les FDS, les territoires disputés en Irak entre Baghdad et Erbil.
Le second avantage des FDS aujourd'hui est le succès de leur offensive à l'ouest de Raqqa. En moins d'un mois, les FDS se sont emparés de toute la rive droite du lac Assad, s'approchant à moins de 30 km de Raqqa. Les FDS ont encore une fois prouvé leur efficacité alors que l'armée turque et ses alliés de l'Armée Syrienne Libre piétinent devant al-Bab depuis mi-novembre. Cette différence a achevé de convaincre les Etats-Unis que seuls les FDS pouvaient prendre Raqqa, malgré les dénégations du président turc. Cela explique sans doute les premières livraisons de véhicules blindés aux FDS par les Etats-Unis le 31 janvier dernier.
Le recul de l'Etat Islamique, les récentes victoires et le surcroit d'aide militaire américaine encouragent les tribus arabes à intégrer les FDS. Selon le Colonel Dorrian, lors de sa conférence de Presse du 8 décembre 2016 à Baghdad, les FDS comptent 45 000 combattants dont 13,000 Arabes. Cela indique une sérieuse augmentation de la part des Arabes au sein des FDS depuis leur création en octobre 2015 où ils n'étaient que 5 000 (selon le New York Times du 3 novembre 2015) sur environ 30 000 combattants.
L'Etat Islamique est désormais rejeté par la population
Le troisième avantage pour les FDS réside dans le rejet avéré aujourd'hui de l'Etat islamique par la population locale. En 2013-2014, l'Etat islamique représentait le retour d'une certaine sécurité (limitée à ceux qui respectaient la charia). Il avait vidé les silos de blé pour fournir du pain bon marché à la population et imposé un contrôle des prix sur les produits de première nécessité. Mais après trois années, la situation s'est nettement dégradée. L'Etat islamique s'est montré incapable de remplir les silos qu'il avait vidés et les prix sont repartis à la hausse. Quant à ses membres, ils se sont révélés tout aussi corrompus que ceux des factions rebelles qu'il avait remplacées lors de la guerre de l'hiver 2014. Les finances de l'Etat islamique s'assèchent et par conséquent ceux qui lui ont prêté une allégeance pécuniaire se détournent de lui. En termes de contre-insurrection, la situation est donc mûre pour reprendre le terrain. Cependant, il ne faut pas s'attendre à un soulèvement général contre l'Etat Islamique, le régime de terreur qu'il a instauré est toujours dissuasif. Mais les tribus arabes sauront se rallier au plus fort le moment venu.
La libération de Raqqa : un pas de plus vers une Syrie fédérale ?
A la différence de l'Irak, la population arabe sunnite de la partie syrienne de la vallée de l'Euphrate ne craint pas l'arrivée de milices chiites ou même d'une armée nationale composée de chiites. L'armée syrienne compte plus de soldats sunnites que d'alaouites. Les milices chiites irakiennes et le Hezbollah sont utilisés sur des fronts bien précis à Alep et autour de Damas et non dans le but de quadriller une région sunnite rurale, car cela serait contre-productif.
La crainte des habitants de la vallée de l'Euphrate viendrait plutôt de l'installation durable des milices kurdes dans la région. Cependant le PYD n'a aucune raison de vouloir annexer cette région au Rojava puisqu'elle est peuplée à 99% par des non-Kurdes. Par conséquent les tribus arabes, même si elles n'ont aucune sympathie pour le PYD et les Kurdes en général, savent que le pouvoir finira par leur revenir une fois l'Etat Islamique vaincu. Et c'est sans doute là que réside le principal intérêt des Kurdes pour Raqqa. En permettant aux tribus arabes de se libérer « par elles-mêmes » de l'État Islamique, ils leur donnent le goût de l'indépendance politique et les associent à sa revendication d'une Syrie fédérale. L'objectif est d'empêcher le retour de l'armée syrienne dans cette région même si Bachar al-Assad et ses alliés n'ont pas perdu espoir de la reconquérir. Le fait qu'un important chef tribal de la vallée de l'Euphrate, Nawaf al-Bachir, soit revenu à Damas depuis la Turquie, prouve que le régime de Damas prépare lui aussi une force locale capable de reconquérir la région. Mais il devrait être pris de vitesse par les SDF soutenus par les Etats-Unis.
L'armée syrienne est en difficulté à Deir ez-Zor, où la partie gouvernementale de la ville subit une violente offensive de la part de l'Etat islamique depuis la mi-janvier 2017. L'aéroport est désormais coupé de la ville. Ni l'envoi du Hezbollah et de troupes d'élite héliportées ni les bombardements de l'aviation russe n'ont encore permis de rétablir la situation. Mais si cet assaut est repoussé, qu'en sera-t-il du prochain ? La chute de Deir ez-Zor serait une catastrophe pour le régime de Bachar al-Assad. La garnison serait massacrée, quant à la population civile, estimée à 93 000 par l'ONU, elle subirait également des représailles sanglantes. Bachar al-Assad et ses alliés n'ont donc d'autre choix que d'approuver tacitement l'offensive contre Raqqa menée par les FDS et soutenue par les États-Unis. Cela soulagera mécaniquement la garnison de Deir ez Zor.
Les civils de Raqqa constituent le principal problème pour sa libération
La gestion des 300 000 civils de Raqqa est le principal problème des FDS et de la coalition internationale. L'État islamique se sert des civils comme boucliers humains pour éviter les bombardements aériens et empêcher un siège rigoureux. A Manbij, l'Etat islamique a empêché les civils de quitter leurs maisons, les rues étaient minées et tous ceux qui tentaient de fuir étaient abattus. Les FDS durent prendre la ville maison par maison au prix de lourdes pertes. A la fin, ils durent consentir de laisser partir les combattants de l'Etat islamique qui se sont abrités avec un cortège de plusieurs milliers de civils.
La bataille urbaine sera longue et il faudra sans doute négocier comme à Manbij l'exfiltration des combattants de l'Etat islamique pour éviter le massacre et hâter la libération de Raqqa.
Une des priorités à Raqqa est donc de favoriser le départ des civils. Cela exige pour les FDS d'atteindre rapidement les périphéries de la ville et de sécuriser des corridors humanitaires, par lesquels les civils pourront s'échapper en profitant des phases de désorganisation créées par les combats. C'est ainsi que les civils ont pu fuir à Mossoul Est et à Manbij. Cela implique de construire des camps pour les futurs déplacés dans la campagne environnant Raqqa pour éviter une crise humanitaire qui conduirait les civils à rejeter les libérateurs.
Les règles d'engagement occidentales sont plus contraignantes vis-à-vis des civils que celles de la Russie. Il n'est pas question de bombarder la ville aveuglément, ni de couper l'eau et l'électricité pour contraindre les civils à la fuite. Par conséquent, la bataille urbaine sera longue et il faudra sans doute négocier comme à Manbij l'exfiltration des combattants de l'Etat islamique pour éviter le massacre et hâter la libération de Raqqa. Car l'objectif annoncé de la Maison-Blanche est de libérer Raqqa et Mossoul de l'État Islamique dans les six prochains mois.
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Les Kurdes acceptent de payer le prix du sang pour triompherde l'islamisme en Syrie
David Thomson: «Les djihadistes qui reviennent ne sont pas repentis» (01.12.2016)
Par Alexandre Devecchio Mis à jour le 04/07/2017 à 15:00 Publié le 01/12/2016 à 12:57
INTERVIEW - Ils s'appellent Bilel, Yassin, Zoubeir, Lena... Leur point commun ? Ils ont été djihadistes, membres de l'État islamique et sont de retour en France. Le journaliste David Thomson raconte leur destin dans Les Revenants (Seuil, « Les Jours »), qui lui a valu le prix Albert-Londres 2017 du Livre. Un document exceptionnel qui plonge le lecteur dans la tête des Français soldats de Daech.
David Thomson est le seul journaliste français à avoir approché les djihadistes d'aussi près. Alors que la plupart des spécialistes travaillent à partir de sources secondaires et de témoignages indirects, ce grand reporter, qui a couvert les printemps arabes et la guerre en Libye pour RFI, est allé à leur rencontre, a su gagner leur confiance, nouer des liens. Il les suit maintenant depuis plusieurs années. En 2014, avec Les Français jihadistes, il dressait leur portrait à la veille de leur départ, peignait leurs premiers pas au sein de l'Etat islamique et tirait la sonnette d'alarme quant au risque d'attentat en France.
Aujourd'hui, dans un document terrifiant qui mêle ...
Renaud Girard : après Daech, comment sauver le Moyen-Orient ?
(28.10.2016)
FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - Dans
un entretien fleuve, Renaud Girard décrypte les stratégies d'influence des
Etats-Unis, de la Russie et des acteurs régionaux au Levant. Pour le Grand
reporter, seul un réalisme assumé peut amener à ne pas répéter les erreurs
passées en Irak et en Syrie.
Renaud Girard est
géopoliticien, grand reporter et correspondant de guerre. Chroniqueur
international du Figaro, journal pour lequel il a couvert les principaux
conflits de la planète depuis 1984, il est également professeur de Stratégie à
Sciences Po Paris. Il a notamment publié Retour à Peshawar(éd. Grasset, 2010) et
dernièrement Le Monde en guerre (éd. Montparnasse, 2016).
FIGAROVOX. - La bataille de
Mossoul a commencé. Peut-on dire qu'il s'agit du début de la fin pour l'État
islamique?
Renaud GIRARD. - Il s'agit
du début de la fin pour l'État islamique en tant qu'État, de la fin de cette
espèce de Sunnistan qui a essayé de vivre de manière indépendante. En revanche
ce n'est pas la fin de l'organisation terroriste «État islamique». Il faut bien
faire la différence. On a trop souvent dit que l'État islamique n'était pas un
État. La BBC dit toujours «te so called Islamic State» («le soi-disant État
Islamique»). Pourtant, Daech contrôle un territoire, qui, certes, se réduit. Il
dispose d'une administration et de tribunaux, qui nous paraissent certes
barbares. Il y a aussi une hiérarchie civile avec le Calife Abou Bakr
al-Baghdadi et militaire avec les anciens généraux de l'armée de Saddam
Hussein. Enfin, l'État islamique prélève l'impôt. Daech a donc bien les
éléments constitutifs d'un État. L'État islamique va donc disparaître comme
État, mais pas comme organisation terroriste. Sur le terrain militaire à
Mossoul, à l'image de toutes les guerres asymétriques, les militants islamistes
sont passés maîtres dans l'art de l'esquive. Ils ne vont pas avoir la sottise
de se prêter à un combat frontal. Ils vont reculer, s'évaporer, laissant des
milliers de pièges et de mines derrière eux. Ils vont donc préférer la
dissimulation pour ressurgir ailleurs. On peut par exemple penser au désert
libyen. De plus, la fin prochaine de Daech en tant qu'État contrôlant un
territoire (ni même son éventuelle disparition en tant qu'organisation
terroriste, ce qui n'est pas à l'ordre du jour) n'implique la fin des attentats
islamistes en Occident. Il y a eu des attentats avant Daech, il y en aura
après, ils seront juste commis sous le drapeau d'autres organisations.
Il y a encore près d'un
million et demi de civils à Mossoul. Alors que les opinions occidentales se
sont émues de la situation à Alep, à quoi peut-on s'attendre sur un plan
humanitaire pour cette bataille urbaine qui s'engage?
Pour l'instant, la situation à
Mossoul est très dure pour les civils, principalement parce que Daech enlève
des habitants pour s'en servir comme boucliers humains. Les Américains et la
coalition internationale arriveront-ils à Mossoul à un résultat plus rapide,
plus efficace que l'Armée syrienne à Alep, laquelle obtient des résultats très
mauvais et utilise la torture, l'emprisonnement politique à vaste échelle? Cela
reste à voir. On ose imaginer que cela a été pensé et qu'on ne va pas rééditer
les erreurs passées de l'Irak. La bonne idée serait de faire en sorte que ce
soient les tribus sunnites qui, elles-mêmes, se débarrassent des djihadistes de
Daech. Si ça fonctionne, ça serait un très grand succès. L'Histoire est
imprévisible, attendons de voir.
La plupart des observateurs
parlent de crimes de guerre à Alep. La Russie s'est empressée de faire savoir
qu'elle constatait aussi des crimes de guerre à Mossoul. Qu'en pensez-vous?
Quand il y a une guerre, il y a
toujours des crimes de guerre! La guerre n'est pas belle. Pendant la Seconde
Guerre mondiale, les Japonais en ont commis. Ils ont ensuite été sanctionnés
lors du procès de Tokyo. Mais qu'en est-il du bombardement américain de Tokyo
par bombes incendiaires en 1944 qui a fait plusieurs centaines de milliers de
morts civiles? N'était-ce pas aussi des crimes de guerre? Le bombardement
aérien n'est pas nouveau, il n'a pas commencé à Alep. En 1944, quand les
Américains veulent mettre pied sur le continent européen, la ville de Saint-Lô
est entièrement rasée la nuit du 6 au 7 juin 1944 parce que les Américains
pensaient qu'il y avait des Allemands dans la gare. Il se trouve qu'il n'y en
avait pas… mais il aurait pu y en avoir. Pourtant, cela ne donne pas raison aux
nazis pour autant! Croire que dans la guerre, il n'y a que des militaires qui
meurent, c'est une vision naïve de l'histoire. Ceci a pu correspondre à
certaines guerres pendant une période relativement courte de l'histoire, disons
de la bataille de Fontenoy en 1744 - «Messieurs les Anglais, tirez les
premiers» - jusqu'à la Guerre de 14. Mais dès la Première Guerre mondiale, il y
a eu beaucoup de civils tués et des atrocités commises.
Quand il y a une guerre, il y
a toujours des crimes de guerre !
Ce qui est immoral, c'est la
guerre! C'est pour ça que je combats dans mes écrits depuis trente ans le
néoconservatisme et tous les acteurs politiques qui pensent, à la suite du
sénateur Jackson aux États-Unis et dans une mauvaise interprétation du
philosophe Leo Strauss, que leur idée de la justice, de la démocratie et des
droits de l'Homme est plus importante que la paix et peut s'imposer par la
force. En défenseur du réalisme politique, c'est-à-dire en Metternichien ou en
Kissingerien, je pense que la paix est le bien le plus précieux.
Contrairement à ce que l'on pense
parfois, la position réaliste n'a rien de cynique. Les réalistes ne sont pas
des désabusés qui entre la paix et la démocratie choisiraient la paix. Au
contraire, je pense que ce choix est illusoire, car il ne peut pas y avoir de
démocratie s'il n'y a pas la paix. Comme la paix est la condition de la
démocratie, vouloir imposer la démocratie par la force, comme le souhaitent les
néoconservateurs, est un contresens. C'est ce que prouve l'exemple irakien:
l'invasion de l'Irak a non seulement plongé le pays dans le chaos et nourri le
terrorisme islamiste, mais en plus l'Irak n'a pas progressé d'un pouce vers la
démocratie. Les Irakiens ont perdu la paix, mais n'ont pas gagné la liberté.
Quel est votre regard sur la
situation à Alep?
La souffrance des populations
civiles à Alep est intolérable. Si notre compassion était réelle, nous ne
resterions pas là, les bras ballants, nous contentant d'une indignation
médiatique de bon aloi. Nous passerions à l'action. Mais pour agir, il faut
tenir compte des réalités, car, par définition, la réalité exerce un pouvoir de
contrainte. Comme disait Lacan, «le réel, c'est quand on se cogne.» Or, ici, la
réalité, c'est que des exactions sont commises des deux côtés et que nous ne
pouvons pas intervenir militairement contre Bachar, ne serait-ce que parce
qu'il est protégé par la Russie et que nous n'avons personne à mettre à sa
place. Il faut donc prendre les réalités telles qu'elles sont et parler avec
Bachar.
C'est le réalisme seul qui
pourra sauver Alep.
D'ailleurs, c'est le réalisme
seul qui pourra sauver Alep. C'est justement parce que cette guerre est
horrible qu'il faut parler avec Bachar. Bachar appartient à un clan qui est au
pouvoir depuis 46 ans. Il est soutenu par les Russes et l'Iran, représente
l'appareil d'État, est puissant militairement et a le soutien d'une partie
importante de la population (toutes les minorités, mais aussi une partie des
sunnites), c'est donc un acteur incontournable. Et, puisqu'on ne fait de la
politique que sur des réalités il faut lui parler (comme il faut aussi parler
aux rebelles salafistes), même si c'est désagréable. Si la guerre est si longue
et sanglante, c'est parce que Bachar et les rebelles représentent tous deux
l'une des faces de la société syrienne, qui est très polarisée: il n'y aura
donc pas de sortie de crise si on refuse de parler aux rebelles ou à Bachar. Si
on ne parle pas à Bachar, nous n'aurons jamais la paix et le bain de sang
continuera. N'oublions pas qu'il a fallu parler aux Serbes pour faire les
accords de Dayton et en finir avec la guerre de Bosnie. Si on avait parlé à
Bachar et si on avait proposé/imposé une médiation, il n'y aurait pas
aujourd'hui le massacre d'Alep. En rompant avec lui, nous nous sommes donc
privés de tout moyen de négociation avec lui, ce qui l'a incité à durcir sa
répression. Nous avons donc une part de responsabilité dans les massacres par
notre refus de parler à Bachar. La vraie morale (qui est d'aider les habitants
d'Alep) se moque de nos indignations.
Si notre compassion pour Alep est
sincère, alors nous devons surmonter notre répugnance instinctive (et légitime)
et accepter de parler avec Bachar pour sauver ce qui peut encore l'être.
Pour Alep, je propose la solution
suivante: ne pas attendre un grand règlement global de la question syrienne,
mais conclure une paix locale. Pour cela, les rebelles doivent déposer les
armes et en appeler à l'ONU, aux États-Unis, à la Russie (qui, en tant que
soutien de Damas, peut contrôler le régime syrien) et à la Turquie (qui est le
protecteur des rebelles) pour garantir leur sécurité et s'assurer que le régime
syrien ne commettra pas d'exactions contre eux.
Ne faudrait-il pas en plus
venir en aide aux rebelles à Alep?
Non. À Alep, il y a deux
catégories de gens: les rebelles et les civils, qui sont utilisés comme
boucliers par les rebelles. Ce sont les civils qu'il faut aider (par la
diplomatie et l'action humanitaire), pas les rebelles. Les rebelles sont des
militants islamistes, qui se livrent à de nombreuses exactions.
Méditons les leçons du passé. Ne
commettons pas la même erreur qu'en Afghanistan où pour lutter contre les
Soviétiques, nous avons nourri un serpent dans notre sein en soutenant Ben
Laden ou le fanatique Gulbuddin Hekmatyar (responsable de la mort de 10 soldats
français en 2008). Ne commettons pas la même erreur qu'en Irak où le
renversement d'un dictateur laïc et inoffensif pour l'Occident a déstabilisé
toute la région et mené au chaos, à la persécution des chrétiens et à Daech.
Méditons les leçons du passé.
Ne commettons pas la même erreur qu'en Afghanistan où pour lutter contre les
Soviétiques, nous avons nourri un serpent dans notre sein en soutenant Ben
Laden.
N'oublions pas que, comme le
décrivait déjà Michel Seurat, Alep est une ville où l'implantation islamiste
est très ancienne. En 1973, Hafez el-Assad propose une constitution laïque,
mais des émeutes islamistes éclatent à Hama, Oms et surtout à Alep (qui est la
deuxième ville du pays, le poumon économique). Il accepte de faire une
concession en faisant inscrire dans la Constitution que le Président doit être
musulman.
Le principal groupe rebelle à
Alep est le Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al Qaeda. Pour des raisons
médiatiques. En reprenant le nom antique de «Cham» pour désigner la Syrie, il
montre son mépris pour la réalité nationale moderne de la Syrie. Or, ce groupe
a commis de nombreuses exactions. Le 9 septembre 2013, la ville historique
chrétienne de Maaloula, au nord de Damas, est attaquée par le front Al-Nosra.
Dans la ville, les djihadistes saccagent alors les églises, occupent les
monastères et tuent au moins 20 civils et en enlèvent 15 autres. Le 11 décembre
2013, Al-Nosra a infiltré la ville industrielle d'Adra (au nord-est de Damas):
au moins 32 civils alaouites, chrétiens, druzes et ismaélites ont été
massacrés. Certaines personnes ont été décapitées.
À cause de son idéologie et de
ces exactions, Al-Nosra n'a pas bonne presse auprès de l'opinion syrienne.
D'après un sondage mené en juillet 2015 en Syrie par l'institut international
ORB, 63% des Syriens ont une mauvaise image d'Al-Nosra (22 plutôt négative et
41 très négative). En mars 2016, des centaines d'habitants sunnites de la ville
de Ma'arrat al-Numan (nord-ouest) ont manifesté dans les rues, au péril de leur
vie, pour demander le départ du Front al-Nosra.
À Alep, il reste encore beaucoup
de civils. Pourquoi les rebelles n'ont-ils pas pris le contrôle de toute la
ville? Parce que beaucoup d'habitants d'Alep leur sont hostiles. La principale
division entre rebelles et factions progouvernementales n'est pas fondée sur
une opposition confessionnelle, car tout le monde est sunnite - à l'exception
de la minorité chrétienne, favorable au régime - mais principalement sur des
divisions sociales et sur un clivage historique et géographique entre les
populations qui sont urbaines depuis longtemps (à l'ouest), qui forment les
classes commerçantes et qui sont hostiles à Al-Nosra et les populations
d'origine rurale, plus pauvres et beaucoup plus islamistes (à l'est).
Si les rebelles gagnaient, il y
aurait de grands massacres à Alep et ils formeraient un émirat islamique, à la
fois imitation et rival de Daech, d'où des attentats seraient lancés contre
Israël et contre l'Occident (notamment pour pouvoir rivaliser médiatiquement
avec les attentats de Daech). Souvenons-nous que les attentats du 11 septembre
2001 (les plus meurtriers de l'histoire du terrorisme), ceux de Madrid en 2004,
ceux de Londres en 2005 et ceux de Charlie Hebdo (les frères Kouachi se
revendiquant de Al-Qaeda dans la Péninsule Arabique) sont l'œuvre d'Al-Qaeda.
De même que l'assassinat du consul américain en Libye en septembre 2012.
Souvenons-nous aussi que Merah se réclamait d'Al Qaeda. D'ailleurs, juste après
les attentats de novembre 2015 à Paris, Al-Nosra, bien que rivale de Daech, a
émis un communiqué pour dire qu'elle approuvait les attentats et félicitait
Daech. En outre, il serait vraiment étrange de combattre Al-Qaeda au Mali comme
nous le faisons, en engageant pour cela la vie de nos soldats et l'argent du
contribuable, et en même temps de soutenir Al-Qaeda en Syrie.
On ne saurait mettre Bachar et
Al-Nosra sur le même plan, car Al-Nosra est allergique à la liberté religieuse,
dont Bachar est le garant.
On ne saurait donc mettre Bachar
et Al-Nosra sur le même plan, car Al-Nosra est allergique à la liberté
religieuse, dont Bachar est le garant. De plus, Al-Nosra, qu'Assad combat à
Alep, appartient à une organisation (Al-Qaeda) qui, comme Daech, commet des
attentats contre nous, tue nos enfants dans nos rues, ce que ne fait absolument
pas Bachar. Souvenons de l'histoire. Staline était un dictateur sanguinaire,
mais la France a fait une grave erreur en refusant de nous allier avec lui en
en 1935. Heureusement que les Alliés l'ont soutenu à partir de 1941, sinon le
nazisme aurait triomphé. La différence entre Hitler et Staline est que Staline
ne voulait pas attaquer la France et n'était donc pas notre ennemi principal.
Aujourd'hui, c'est le djihadisme sunnite qui est notre ennemi principal. Pas
Bachar.
Pour autant, je ne pense pas que
les puissances occidentales doivent renoncer aux opérations militaires.
Seulement, elles doivent selon moi respecter trois conditions avant toute
intervention. En plus de l'indispensable respect du droit international, elles
doivent s'assurer qu'elles ont un interlocuteur crédible pour remplacer le
dirigeant qu'elles vont renverser, que l'intervention va améliorer le sort
concret des populations locales et que cette intervention, très coûteuse et
payée par le contribuable, servira aussi leurs propres intérêts. Or, aucune de
ces conditions ne serait respectée par une attaque contre Bachar. Le veto russe
à l'ONU nous mettrait en violation du droit international. Nous n'avons
personne à mettre à la place de Bachar. Son renversement plongerait encore un peu
plus la Syrie dans le chaos. Et cette intervention, non seulement ne nous
rapporterait rien, mais en plus nous mettrions en danger en renforçant nos
ennemis islamistes. Dans ce contexte, il faut donc préférer la diplomatie à la
guerre.
Qu'en est-il de la situation
des civils dans les guerres modernes?
Dans les guerres contemporaines,
asymétriques, ce sont les civils qui meurent. Lorsque les Américains ont pris
l'Irak ou lorsqu'ils ont fait la guerre en Afghanistan, ils ont bombardé
massivement des rassemblements de population. Il y a eu beaucoup de bavures. Il
se trouve que j'ai couvert ces deux conflits. En Afghanistan il y a eu le
bombardement d'un mariage. 140 civils sont morts. Pourquoi ces bombardements?
Parce que l'armée américaine avait décidé d'aider le gouvernement afghan de
Hamid Karzai à reconquérir le territoire afghan contre des militants
islamistes. Aujourd'hui, de la même façon, la Russie a décidé de prêter main-forte
au régime de Bachar al-Assad pour l'aider à contrôler son territoire contre des
rebelles islamistes. Les Occidentaux n'ont donc aucune leçon à donner. Il y a
eu deux phases dans l'intervention russe. D'abord en septembre 2015 la phase de
sauvetage du régime parce que Damas allait tomber. Il faut bien comprendre que
si ça avait été le cas, on aurait eu un génocide des alaouites et des druzes
et, avec de la chance, tous les Chrétiens auraient été expulsés vers le Liban
et toutes les églises de Damas brûlées (voire purement et simplement
massacrés). Un fait est révélateur des projets des rebelles. Le Front Al-Nosra
a baptisé son opération de conquête d'Alep «Opération Ibrahim Youssef», en
hommage au terroriste Ibrahim Youssef qui a massacré 83 cadets alaouites dans
l'école militaire d'artillerie d'Alep en 1979. Ensuite, dans un second temps,
les Russes - et l'on peut bien sûr critiquer cette option - ont décidé
d'appuyer la tentative de Bachar al-Assad de reconquérir par la force le
territoire perdu aux mains des rebelles. La façon dont l'Armée syrienne (dont
les officiers ont été formés par les Soviétiques) reprend ou tente de reprendre
Alep ressemble à celle des Russes quand ils ont repris Grozny en Tchétchénie
avec des bombardements considérables sur la ville. Les Russes ne connaissent
pas et ne maîtrisent pas vraiment les frappes dites chirurgicales. Finalement,
c'est déjà la manière dont les Soviétiques ont pris Berlin en 1945.
La Turquie a annoncé qu'elle
pourrait intervenir dans la bataille de Mossoul. Après l'opération turque
«Bouclier de l'Euphrate» en Syrie, peut-on s'attendre à une opération «Bouclier
du Tigre» en Irak?
La Turquie considère comme un
atout - et c'en est un! - le fait que son armée est sunnite. C'est aussi une
très bonne armée qui n'est pas si loin de la zone du conflit. Il y a un
néanmoins un problème majeur. Erdogan a choisi une ligne politique
néo-ottomane. Il considère que les anciennes provinces ottomanes sont les
vassaux de la Turquie. On se demande si, sous le prétexte de combattre l'Etat
islamique, qu'ils ont longtemps aidé, armé et financé avant que Frankenstein ne
se retourne contre eux, et les Kurdes du PKK, qui sont toujours leur première priorité,
les Turcs ne veulent pas en profiter pour étendre leur domination régionale de
sorte à créer une sorte d'Empire turc. Ceci risque d'être très compliqué car il
y a un gouvernement irakien qui est soutenu par la France, les USA, la Russie,
l'Iran, la Chine, bref par la communauté internationale. Bagdad a déjà prévenu
les Turcs: vous n'êtes pas les bienvenus! Maintenant, il est évident
diplomatiquement que la lutte contre l'Etat islamique ne se fera pas contre la
Turquie, mais avec elle.
En Irak, les populations
sunnites ont-elles raison de craindre des représailles chiites?
La guerre d'invasion
anglo-saxonne de 2003 en Irak a provoqué une guerre civile entre les chiites et
les sunnites, qui n'existait pas avant. Rappelons que la Première guerre du Golfe
a eu lieu entre l'Irak et l'Iran de 1980 à 1998. Les soldats de l'Armée
irakienne, majoritairement chiites, se sont battus contre les chiites iraniens.
C'est donc un phénomène récent qui a été engendré par les secousses de la
guerre d'Irak de 2003.
En géopolitique, le ressenti
des populations est plus important que la réalité vue de loin.
En géopolitique, le ressenti des
populations est plus important que la réalité vue de loin. Après l'invasion
américaine, les chiites furent mis au pouvoir par les Américains. Depuis les
populations sunnites témoignent d'une très grande méfiance envers eux. C'est la
raison pour laquelle de nombreuses tribus sunnites se sont ralliées à l'Etat
islamique qui, de leur point de vue, les protégeait contre un Etat qu'elles considéraient
comme persécuteur et ce, même si cette persécution n'était pas toujours
flagrante. Aujourd'hui, il y a un réel effort de l'Armée irakienne pour mettre
sur pied des unités sunnites. Il a été dit d'ailleurs que les unités qui
rentreront à Mossoul ne seraient ni chiites, ni kurdes, mais seront des arabes
sunnites.
Prenez Bagdad, les quartiers de
la capitale se sont transformés en zones ethniquement pures. Il va falloir
beaucoup de finesse pour apaiser ces tensions communautaires. Il y a eu dans le
passé des représailles chiites, mais je pense que là, tout est en place pour
éviter de telles exactions. C'est d'ailleurs une guerre qui se fait au milieu
de centaines d'observateurs. Il y a notamment beaucoup de journalistes.
Massacrer des civils ne serait pas si facile.
Vous parliez des velléités
néo-ottomanes de la Turquie. Est-ce qu'il n'y a pas aussi des velléités
néo-perses de l'Iran?
Sans le vouloir, les Américains
ont donné l'Irak aux Iraniens. Pour Téhéran, c'était une surprise
providentielle. On peut dire que l'ambassadeur d'Iran à Bagdad est au moins
aussi important que son homologue américain. Cependant, il y a des différences
idéologiques et religieuses. Les chiites irakiens respectent un marjah. C'est
l'ayatollah Ali al-Sistani et non les ayatollahs d'Iran. L'ayatollah Sistani
condamne le système politique iranien du Velayat-e Faghih, c'est-à-dire le
«gouvernement des clercs». A Téhéran, le gouvernement doit appartenir à ceux
qui sont savants en religion. C'est pour ça que c'est un religieux, le Guide
suprême, qui est tout en haut du système politique iranien. Les chiites
irakiens, tout proches qu'ils soient des Iraniens, n'ont pas installé chez eux
un Velayat-e Faghih. De plus, l'Irak est arabe alors que l'Iran est perse et au
moins 20% de la population est sunnite (à quoi il faut ajouter 15% de Kurdes,
très majoritairement sunnites). L'Iran entretient des relations extrêmement
étroites avec l'Irak, mais ça n'en fait pas une colonie iranienne.
François Hollande a déclaré
qu'il fallait penser à l'après-Mossoul. Sur les ruines de l'État islamique,
pourrait-on reconstruire un État unitaire irakien ou s'achemine-t-on vers une
généralisation du modèle fédéral, notamment à l'égard des sunnites, sur le
principe du Kurdistan irakien d'Erbil largement autonome de Bagdad?
Comme le disait le Général de
Gaulle, il faut prendre les réalités telles qu'elles sont. On ne reviendra pas
sur l'autonomie du Kurdistan irakien inscrite dans la Constitution irakienne de
2003. Au-delà du cas kurde, personne ne veut un redécoupage des États. On
s'aperçoit que cela fonctionne mal. On a essayé sous la pression des Américains
au début des années 2000 en Afrique. On a créé de toutes pièces un État qui
s'appelle le Sud-Soudan. C'est très chaotique. Il y a une guerre entre les deux
principales tribus qui a fait déjà plus de 50 000 morts. Personne ne veut donc
casser la carte du Moyen-Orient. Il va falloir constituer des provinces autonomes.
La province sunnite, qui n'aura peut-être pas autant d'autonomie que la
province kurde, aura pour capitale Mossoul avec ses propres milices sunnites
pour maintenir l'ordre et combattre les djihadistes. Il y aura aussi une grande
province chiite qui montera quasiment jusqu'à Bagdad. La capitale Bagdad
deviendra une sorte de Bruxelles, d'Islamabad ou de Washington, une zone où
Sunnites, Chiites et Kurdes vivront ensemble, mais de façon séparée.
À Alep en Syrie, la trêve
humanitaire n'a pas tenu plus de trois jours. Quelles conséquences pourrait
avoir une reprise d'Alep pour le régime de Bachar al-Assad?
Si l'Armée syrienne avance à Alep
depuis son offensive du 22 septembre, c'est que 5000 combattants rebelles ont
quitté Alep pour aller se battre avec l'Armée turque dans l'opération «Bouclier
de l'Euphrate» contre l'Etat islamique et les Kurdes à la frontière avec la
Turquie et la Syrie. C'est ce qui a permis à l'Armée syrienne d'avancer car elle
ne s'est pas montrée extrêmement brillante sur le terrain. Elle a besoin des
Russes, du Hezbollah libanais, des milices chiites et des forces spéciales
iraniennes. Si Bachar arrive à récupérer Alep, ce sera un symbole très fort.
Alep était la capitale économique, je le dis à l'imparfait car les industries
sont dévastées. Dans cette hypothèse, Bachar al-Assad tiendra la frontière avec
le Liban, tiendra bien Damas, tiendra le littoral alaouite (Lattaquié, Tartous)
et tiendra enfin Alep.
Pourrait-il aller au-delà pour
reconquérir l'ensemble de la Syrie?
Je ne le pense pas. D'abord parce
que les Russes n'ont pas les mêmes intérêts que Damas: les Russes demeurent
sensibles et écoutent leurs interlocuteurs occidentaux. Les discussions au
format Normandie ont été houleuses à Berlin mais elles ont eu lieu. Après avoir
parlé de la crise ukrainienne et une fois que le président Petro Porochenko est
parti, Vladimir Poutine s'est retrouvé avec Angela Merkel et François Hollande.
C'est dans ce cadre que les Russes ont décidé de s'abstenir de bombarder Alep
pendant une semaine. Je ne suis donc pas sûr que les Russes, une fois qu'ils
auront sauvé la Syrie utile et les Chrétiens, souhaitent s'engager plus avant.
Quant à Bachar al-Assad, comme je vous le disais, son armée est assez faible.
Depuis le début du conflit, elle compte déjà 80 000 morts, la plupart
alaouites. Le régime de Damas ne pourra militairement ni reconquérir les zones
kurdes - les forces combattantes YPG du parti kurde PYD ont montré qu'ils
savaient très bien se battre -, ni reprendre la région d'Idleb où les rebelles
sont soutenus par les Turcs, ni s'étendre dans le désert sunnite. Surtout, il
va y avoir un phénomène de lassitude du Hezbollah qui a perdu beaucoup d'hommes
et qui est très critiqué sur ce point au Liban. La solution pour la Syrie est
donc la même que pour l'Irak, c'est-à-dire des zones autonomes kurde, sunnite
et alaouite, la zone alaouite rassemblant par ailleurs la plupart des minorités
et une partie de la bourgeoisie sunnite, proche du parti Baas de Bachar
al-Assad.
On parle moins dans la presse
aujourd'hui de l'emprise des pays du Golfe, notamment de l'Arabie Saoudite, en
Syrie ou en Irak. Sont-ce les perdants provisoires de cette nouvelle donne?
L'Arabie Saoudite est
triplement affaiblie.
L'Arabie Saoudite est triplement
affaiblie. D'abord par la baisse du prix du pétrole. Ensuite par son échec
patent au Yémen: on voit que son instrument militaire est extrêmement faible.
Riyad n'est pas capable de faire face aux rebelles houthistes qui représentent
au Yémen un certain type de chiisme. Enfin par le fait que les Occidentaux
commencent à se rendre compte que l'Arabie Saoudite est la matrice des
mouvements djihadistes. En 1979, après l'attaque de La Mecque, il y a eu un
pacte secret qui a été établi. Les dirigeants du pays ont expliqué à leur
jeunesse islamiste: vous faites ce que vous voulez à l'étranger, vous pouvez
lever tous les fonds privés que vous voulez, mais vous ne remettez pas en cause
la dynastie des Saoud. Ce pacte très dangereux a eu les conséquences que l'on
connaît sur le développement mondial du djihadisme et il est aujourd'hui très
affaibli, ce qui explique le risque d'instabilité interne en Arabie Saoudite.
Il en va de même du pacte du Quincy, qui porte le nom du croiseur américain où
il a été scellé en février 1945 entre Franklin Roosevelt et le roi Ibn Saoud et
qui a été renouvelé par George W. Bush en 2005.
Quand ce pacte entre
Washington et Riyad a été scellé en 1945, l'Iran était un allié des Etats-Unis.
La politique américaine était alors sur deux jambes au Moyen-Orient. À partir
de la révolution iranienne en 1979, les Américains ont perdu Téhéran. Cela
n'a-t-il pas produit un grand déséquilibre?
Effectivement, le fait que les
Américains aient perdu l'Iran en 1979 a bouleversé leur équilibre au
Moyen-Orient. Il faut dire d'ailleurs qu'ils n'ont pas fait preuve d'un grand
sang-froid… Quand le Shah est tombé, Washington a choisi de prendre des
demi-mesures, ce qui n'est jamais bon en géopolitique. Soit ils choisissaient
la manière forte, renversaient le Schah comme ils avaient renversé Mohammad
Mossadegh en 1953 et mettaient un militaire à la place pour maintenir un régime
pro-américain. Soit, à l'inverse, ils acceptaient la révolution islamique. On
aurait pu penser que Washington allait peu à peu renouer ses relations
diplomatiques avec l'Iran au cours des années 1990. Ça n'a pas été le cas par
une sorte d'obstination et de rigidité intellectuelles dans la pensée
géopolitique américaine. De ce point de vue là, même si c'est arrivé trop tard,
l'Iran (et Cuba) sont les grands succès de Barack Obama.
Comme vous le dîtes, une
politique américaine sensée doit effectivement reposer sur deux jambes, la
jambe sunnite d'une part et la jambe chiite d'autre part. Mais on pourrait même
dire qu'elle devrait reposer sur plus de deux jambes car l'Egypte devrait être
plus importante que l'Arabie Saoudite. L'université Al-Azhar devrait compter
davantage que les cheiks wahhabites! Or, aujourd'hui, l'Arabie Saoudite est
aussi affaiblie parce que, aux Etats-Unis, l'opinion commence à se poser des
questions… On n'a pas pu résister aux demandes d'enquête sur les
responsabilités de l'Etat saoudien dans le 11 septembre. Et ce n'est qu'au
début.
Au-delà du cas saoudien, les
Etats du Golfe sont affaiblis au Moyen-Orient?
Il y a des divisions fortes entre
eux. Les Etats du Golfe sont unis quand il s'agit d'intervenir contre des
adversaires non-sunnites comme au Yémen ou au Bahreïn. C'est d'ailleurs assez
ironique de voir Al-Jazzera donner des leçons de morale pour la Syrie et
oublier ce qui s'est passé au Bahreïn. Dans ce petit Etat, il y avait une
majorité chiite qui voulait une monarchie constitutionnelle promise par le
Royaume-Uni après son retrait en 1971. L'Arabie saoudite a envoyé les chars...
Mais, sur d'autres plans, les Etats du Golfe ne sont pas unies. Ainsi, le Qatar
soutient les frères musulmans. En revanche, les Emirats Arabes Unies, qui sont
un allié de la France, sont farouchement opposés aux frères musulmans et plus
largement à l'islam politique. Les EAU sont d'autant plus intéressants qu'ils
ont réussi économiquement à l'image de Dubaï ou d'Abou Dhabi. Avant la guerre,
c'était Beyrouth qui était la capitale financière du Moyen-Orient, aujourd'hui,
c'est Dubaï qui n'est pas fondé sur l'argent du pétrole, mais sur celui du
commerce.
Les Américains ont-ils perdu
la main au Levant?
Que les Américains aient perdu la
main au Levant, c'est évident. Il suffit d'une rapide comparaison historique
pour s'en rendre compte. En 1991, après avoir libéré le Koweït, les Américains
étaient la référence. Véritable hyperpuissance, ils ont habilement gagné la
guerre contre l'Irak en s'alliant par exemple avec la Syrie d'Hafez al-Assad à
laquelle ils ont donné le Liban en vassalité à la conférence de Taëf en octobre
1989. On a tendance à l'oublier mais le moralisme n'a pas toujours imprégné la
classe politique américaine… Aujourd'hui, ils n'ont plus la main en Syrie, au
Liban, en Irak, en Turquie ou en Egypte. Il leur reste la Jordanie. Quant à la
Libye, qui a la main? On ne le sait pas encore, mais certainement pas
Washington. Les Etats-Unis sont incapables d'empêcher le retour en fanfare de la
Russie dans la région. Mais le souhaitent-ils vraiment? Washington s'en porte
assez bien depuis qu'Obama a décidé qu'il allait «rule from behind» (gérer
depuis l'arrière) les affaires du Moyen-Orient.
Où est passée la voix de la
France? A-t-elle définitivement disparu?
La France a malheureusement
complètement disparu du Moyen-Orient alors qu'elle avait un rôle très important
à jouer. Nous ne sommes même plus invités aux grandes conférences sur la Syrie
alors que nous sommes l'ancienne puissance mandataire. Notre pays a commis
l'erreur de devenir le caniche des Etats-Unis sans s'apercevoir qu'un caniche
ne sert à rien. Bien sûr, je suis favorable à l'alliance avec les Etats-Unis,
mais être allié ne signifie pas aligné. En Syrie, entre le défilé de Bachar
al-Assad en 2008 et aujourd'hui, nous avons eu une diplomatie en zigzag. La
diplomatie se joue d'abord à moyen et long terme. Elle ne peut pas être fondée
sur les émotions, mais doit l'être sur le calcul de nos propres intérêts
nationaux. Nous avions en Syrie et en Iran l'opportunité de jouer le rôle
d'honest broker (= «intermédiaire honnête») entre ces deux pays et les
Etats-Unis. Nous avons renoncé à jouer ce rôle historique pour lequel notre
tradition d'indépendance nous donnait l'avantage. Si nous sommes un allié
exigeant de Washington, Washington nous respectera.
Deux axes doivent structurer
notre politique moyen-orientale: d'une part, la lutte contre le terrorisme
islamiste (et cette lutte doit se faire aussi sur notre sol!). D'autre part,
une politique de médiations. La France n'apparait plus comme une puissance
prédatrice au Moyen-Orient. Mais sa voix compte encore, notamment à cause de la
politique arabe des Présidents de Gaulle et Pompidou puis de son opposition à
la Guerre en Irak en 2003. Elle est alliée aux monarchies sunnites du Golfe,
mais est respectée par l'Iran. Elle parle à la fois aux Israéliens et aux
Palestiniens. Notre pays pourrait proposer quatre grandes médiations pour favoriser
une détente globale dans la région: une médiation pour la Syrie, une médiation
pour réconcilier l'Iran chiite et les pétromonarchies sunnites, une médiation
Israël/Palestine et une médiation Israël/Iran. C'est seulement avec une
politique réaliste que nous pourrons retrouver notre influence au Moyen-Orient.
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Islamisme : voulons-nous vraiment gagner la guerre de 30 ans qui commence ? (18.08.2016)
Par Gilles Platret
Mis à jour le 18/08/2016 à 13h33 | Publié le 17/08/2016 à 12h50
FIGAROVOX/ANALYSE - Pour faire la guerre, encore faut-il vouloir la gagner, remarque Gilles Platret. Pour l'élu local, cette guerre qui est celle d'une génération nécessite de réapprendre la vertu du patriotisme, loin des atermoiements de l'actuelle majorité socialiste.
Gilles Platret est maire de Chalon-sur-Saône.
La France en guerre impose de puissantes obligations à l'ensemble du peuple français. L'état de guerre n'a rien d'anodin. Il est, selon le mot de Clausewitz, «un acte de violence dont l'objet est de contraindre l'adversaire à se plier à notre volonté». Les islamistes l'ont compris de longue date. Et nos gouvernants?
A voir les atermoiements du gouvernement, une question ne cesse en effet de nous tarauder: nous donnons-nous les moyens de gagner cette guerre? On peut en douter pour deux bonnes raisons. D'abord parce que le pouvoir en place semble avoir peur lui-même de la guerre. Ensuite parce qu'une fraction - minoritaire mais influente - des élites françaises feint de ne pas avoir compris que la guerre qui vient d'éclater sera l'affaire de toute une génération.
Toute chance de succès dans une guerre repose sur un postulat absolu : l'envie furieuse de la gagner. A la guerre, le hasard a naturellement sa place. Mais il ne peut remplacer ni le courage ni le patriotisme. La Nation tout entière doit donc se constituer en tant que telle. La guerre contre l'islamisme n'est pas l'affaire des seuls soldats de l'opération Sentinelle, si valeureux et revêtus de la confiance collective qu'ils soient. La guerre contre l'islamisme est l'affaire de chaque Français car c'est la France, en tant que République libre, qui est ciblée par les attentats djihadistes. C'est la République française, comme perpétuelle déclaration de guerre à l'obscurantisme, qui est directement visée par les terroristes.
Or, c'est au moment où il faudrait galvaniser le peuple français, le fortifier par tous moyens, faire à nouveau de lui ce peuple de citoyens-soldats qui détrôna les puissants, que le président de la République et le gouvernement s'acharnent à tout faire pour affaiblir la population. Ils ne semblent obsédés que par une seule chose : préparer l'opinion à leurs revers futurs. Entendez : aux prochains attentats qu'ils n'auront pas su déjouer. Voix tremblante et larme à l'œil, on les voit répétant à l'envi: «il y aura de nouveaux morts!» Mais ce n'est pas aux Français qu'il faut promettre la mort, c'est à l'islamisme!
Comment avec un pareil gouvernement imaginer gagner une pareille guerre ? Ses atermoiements sont légion. L'indivisibilité de la République doit-elle être mise en avant ? La majorité socialiste se montre incapable de prononcer même la déchéance de nationalité. La situation dicte-t-elle des mesures de salut public ? On fait un procès au chef de l'opposition lorsqu'il propose d'adapter notre législation aux dramatiques circonstances présentes. L'unité de la Nation doit-elle être confortée ? Le pouvoir persiste à manier l'islam comme un ferment de division.
Car c'est là l'un des plus graves reproches qu'il faut adresser à nos gouvernants. Le retour de la question de l'organisation de l'islam dans le débat public est le triste signe que les priorités n'ont pas été saisies. Ou plutôt qu'elles ont parfaitement été saisies sur le plan électoral. Le pas de deux de MM. Hollande et Valls sur la thématique «comment aider l'islam à financer de nouvelles mosquées» masque mal la manœuvre électoraliste.
Franchement, l'heure n'appelle-t-elle pas davantage à la fermeture de certaines mosquées qu'à l'ouverture de nouvelles? Malgré les gesticulations du ministre de l'Intérieur, le gouvernement se montre incapable de fermer administrativement un grand nombre de salles de prières dont il sait pertinemment qu'elles sont mitées par des salafistes recrutant des profils djihadistes. Les estimations sont de 100 mosquées salafistes qu'il conviendrait de fermer d'urgence. Le gouvernement le sait et il ne fait rien.
Au lieu de cela, sentant approcher les échéances de 2017, et avec elles le spectre de sa fin probable, il tente de recoller les morceaux du vote musulman en agitant le chiffon vert du financement des mosquées nouvelles. Tantôt on annonce qu'on va tordre le cou à la loi sur la laïcité de 1905 par un concordat, tantôt qu'on va se mêler de réactiver la Fondation pour l'islam de France dont le pouvoir se propose, n'ayant peur de rien, de désigner lui-même le président.
Au-delà des gesticulations politiciennes, ce que le gouvernement refuse de comprendre, c'est qu'il est urgent que l'Etat retrouve le chemin de la neutralité religieuse, que le rôle de la puissance publique n'est pas d'aider, de près ou de loin, les musulmans à financer leur culte car c'est à eux seuls de le faire. Président et Premier ministre devraient méditer cette sentence de George Washington, qui estimait à juste titre qu' «il y a tyrannie et crime à forcer un homme de payer des impôts pour l'entretien et la propagation d'une foi qui n'est pas la sienne».
Le rôle de l'Etat, c'est de contrôler que l'exercice de la foi ne dépasse pas les bornes de la loi. Et c'est loin d'être gagné d'avance dans un pays où 73% des musulmans considèrent que la charia devrait s'imposer à la loi républicaine (1). Ce n'est donc en rien à la République de faire ses preuves vis-à-vis de l'islam. C'est à l'islam de faire ses preuves vis-à-vis de la République. Cette dernière ne doit pas organiser l'islam, elle doit en contrôler les excès.
L'erreur fondamentale du gouvernement - et, hélas, d'une partie de ses opposants - tient à l'oubli de ceci: nous ne gagnerons la guerre que si nous reformons l'unité du peuple. Traiter aujourd'hui le problème musulman en tant que tel, c'est une fois de plus désagréger le peuple. Laissons la religion dans la sphère privée, veillons sévèrement à ce qu'elle respecte nos lois, mais ne l'attirons jamais dans la sphère publique. Ce n'est pas l'Etat qui a couvert la Chrétienté d'un «blanc manteau d'églises», selon la belle expression de l'an mil. Il n'y eut ni impôts étatiques ni fondation pour édifier les églises de France, c'est l'initiative privée qui a dressé jusqu'au ciel la quasi-totalité des clochers français.
Plus nous traiterons les musulmans et leur culte différemment des autres croyants et des autres religions, plus nous nous éloignerons de la solution. Et c'est là le défi majeur : nous parviendrons à éliminer les djihadistes du sol national, mais il nous restera à éradiquer les ferments de la division que quatre décennies de politique communautariste ont obstinément nourris. La multiplication des accommodements ayant le culot de se dire «raisonnables», la discrimination ayant le culot de se dire «positive», la relégation honteuse des symboles nationaux, tout ceci, sous le couvert des bons sentiments, en nous éloignant de la solution, nous a précipités dans un abyme de problèmes.
Nous avons cédé aux pressions des communautés par faiblesse ou par électoralisme - l'autre nom de la faiblesse en politique. Et l'on a vu des maires aménager le menu des cantines en fonction des interdits religieux, d'autres financer des salles pudiquement appelées «culturelles» dans les mosquées, d'autres enfin accepter des horaires différents selon les sexes dans certains services publics. La liste est longue de nos renoncements.
C'est pourquoi cette guerre qui s'est révélée à l'opinion sous les balles de Charlie Hebdo ne sera pas tranchée en quelques mois. C'est la guerre d'une génération. Si nous voulons la gagner, il nous faut retisser le peuple français et travailler à son unité, là où il a été sciemment fragmenté. Hormis une minorité agissante, c'est ce à quoi aspirent les Français dans leur ensemble.
Dans sa magnifique chanson «Les Loups sont entrés dans Paris», Serge Reggiani disait vrai: «Les hommes avaient perdu le goût de vivre et se foutaient de tout». Voilà pourquoi la bête a fini par regarder vers Paris… Le terreau de la guerre, c'est notre aveuglement passé. La condition de la victoire, c'est de retrouver le chemin de l'unité nationale. En commençant par l'apprentissage de l'amour de la France à tous les écoliers de notre pays.
La haine de la France, que des décennies de renoncement ont encouragée, n'est pas une fatalité. Elle peut être éradiquée. Il faut pour cela une seule chose, qu'il appartient à chacun de cultiver et de répandre : le courage du patriotisme.
(1) «Religious fundamentalism and out-group hostility among muslims and christians in Western Europe», étude publiée en décembre 2013 par le professeur Ruud Koopmans du Social Science Center de Berlin. A noter que, dans cette même étude, seuls 7,5% des Chrétiens français considèrent que l'Evangile doit primer sur les lois de la République.
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Laïcité : «Les maires financent déjà des mosquées et des écoles coraniques»
Irak : les djihadistes s'emparent de Mossoul et de sa
province (10.06.2014)
Par Georges Malbrunot
Mis à jour le 10/06/2014 à 14h39 | Publié le 10/06/2014 à
12h49
VIDÉO - C'est la première fois que les insurgés sunnites
prennent le contrôle d'une province entière. Après Mossoul, deuxième ville du
pays, l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) se dirige vers la région
limitrophe de Salaheddine.
Les rebelles irakiens, dominés par les djihadistes, ont
accéléré leur conquête du «pays sunnite», en s'emparant en quelques heures de
Mossoul, la deuxième ville d'Irak, à 350 km au nord de Bagdad, puis de
l'ensemble de la province de Ninive, dont Mossoul est le chef-lieu. C'est la
première fois que des insurgés prennent le contrôle de toute une province de
l'Irak.
Dans la nuit de lundi à mardi, des centaines d'hommes armés
ont commencé par lancer un assaut contre Mossoul. Après des combats acharnés
avec l'armée et la police, les rebelles conduits par les djihadistes de l'État
islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont réussi à s'emparer du siège du
gouverneur, des prisons et des télévisions. Puis, ils ont pris le contrôle de
l'intégralité de la grande ville sunnite du nord du pays.
Aussitôt, les insurgés ont diffusé des messages via
haut-parleurs affirmant qu'ils «combattraient seulement ceux qui les
attaqueraient». Auparavant, les forces de sécurité avaient abandonné leurs
véhicules, soulignant la faiblesse de celles-ci, alors que les postes de police
étaient incendiés. Quelques heures après, c'est l'ensemble de la province de
Ninive qui tombait aux mains des insurgés, annonçait le chef du parlement
Oussama Noujeifi, dont le frère est gouverneur de Mossoul.
Coup majeur
C'est un coup majeur porté à l'autorité du premier ministre
chiite Nouri al-Maliki, dont la liste vient de remporter les élections
législatives. Les rebelles, aidés par des tribus hostiles à Maliki, tiennent
déjà Faloudja, à 60 km à l'ouest de Bagdad, et des quartiers de Ramadi, à 80 km
plus au nord. Depuis des mois, l'EIIL cherche à étendre son contrôle sur «le
pays sunnite», afin de faire la jonction avec l'ouest de la Syrie, où d'autres
djihadistes sont regroupés.
En Irak, ils bénéficient du soutien d'une partie de la
population, écœurée par la politique anti-sunnite de Nouri al-Maliki depuis un
an. En face, l'armée et les services de sécurité sont incapables de leur faire
face. Ces derniers mois, des désertions ont été constatées parmi les soldats,
contraignant Maliki à faire appel aux miliciens chiites de la force Badr par
exemple, ou à d'autres rentrés de Syrie où ils combattaient aux côtés des
forces loyales à Bachar el-Assad. Dans les régions sunnites, les rebelles
tiennent déjà des portions d'autoroute, entravant ainsi les déplacements de
l'armée régulière.
Jusqu'à maintenant, les ultra de l'EIIL s'étaient contentés
de racketter l'administration de Mossoul pour financer leurs basses besognes.
Mais depuis quelques semaines, la pression était montée. Un jeune français
originaire des Antilles et venu de Syrie s'était fait exploser dans un attentat-suicide contre un poste de police de Mossoul, il y a trois semaines, révélait
peu après Le Figaro. D'autres déplacements de djihadistes étrangers de Syrie
vers l'Irak avaient été alors repérés. Ils s'expliquent par les combats qui
depuis une semaine avaient commencé à Mossoul. En fin de matinée, les
djihadistes se dirigeaient vers la province limitrophe de Salaheddine.
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