jeudi 13 juillet 2017

Pologne

Pologne : le président Duda oppose son veto à deux réformes judiciaires controversées (24.07.2017)
Pologne : le parlement vote la loi sur la Cour suprême (20.07.2017)
Inquiète, la Commission européenne menace explicitement la Pologne (19.07.2017)
Pologne : des réformes dans le viseur de Bruxelles (19.07.2017)
Le président polonais fait de la résistance (19.07.2017)
La Hongrie et la Pologne à nouveau mises en cause à propos des libertés à Bruxelles (13.07.2017)
A Varsovie, Donald Trump conforte le gouvernement polonais contre l’UE (07.07.2017)

Pologne : le président Duda oppose son veto à deux réformes judiciaires controversées (24.07.2017)

Par Aude Massiot, Envoyée spéciale à Varsovie (Pologne) — 24 juillet 2017 à 12:50

L'opposition polonaise a manifesté en masse pour réclamer une opposition présidentielle contre une initiative qualifiée d'atteinte à l'équilibre des pouvoirs.

Personne ne s’y attendait. Lors de sa conférence de presse organisée lundi matin, avant sa rencontre avec la présidente de la Cour suprême, Malgorzata Gersdorf, le président polonais, Andrzej Duda, a annoncé qu’il mettait son veto contre deux des trois lois controversées sur le système judiciaire, adoptées ces deux dernières semaines par le Parlement. «J’ai décidé que je les renverrai devant le Sejm [la chambre basse du parlement, ndlr], ce qui signifie que j’opposerai mon veto au texte sur la Cour suprême ainsi qu’à celui sur le Conseil national de la justice», a déclaré Duda.

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L’annonce a surpris de tous bords. Du côté de l’opposition, la veille encore, on pariait que le président s’en remettrait au tribunal constitutionnel, déjà vidé de sa substance par une réforme, passée peu après les dernières élections législatives, en 2015. La députée Kamila Gasiuk Pihowicz, du parti Nowoczesna, salue, sur Twitter, la décision d’Andrzej Duda et y voit le résultat des manifestations massives organisées depuis une semaine, dans plusieurs villes du pays.

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#Varsovie L'hymne national repris par la foule de protestataires devant le palais présidentiel #Pologne @libe
8:57 PM - 23 Jul 2017
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Un affront à son ancien parti

Les plus surpris sont sûrement les membres de l’ancien parti du président, le PiS (Droit et justice), qui a initié ces lois et les a fait passer grâce à sa majorité au Parlement. C’est la première fois depuis son élection en 2015 que Duda s’oppose à la politique de l’ultraconservateur Jaroslaw Kaczynski, chef de file du PiS. Kaczynski, qui n’occupe aucune fonction officielle, est considéré comme le véritable dirigeant du pays. Avec son annonce, Duda semble lui montrer le contraire.

Le Parlement polonais a voté, ces deux dernières semaines, trois lois de réforme du système judiciaire. La première modifie le statut du Conseil national de la justice et prévoit la révocation immédiate de tous les membres de l’instance, alors remplacés par de nouveaux magistrats désignés par le Parlement, où le PiS est majoritaire. La deuxième, votée dans la nuit de vendredi à samedi, lors de la dernière session parlementaire de l’été, prévoit une refonte de la Cour suprême, en réduit les effectifs de 87 à 43 juges, et la met sous le contrôle du ministre de la Justice, qui occupe déjà la position de procureur général.

«Le président devrait aller plus loin»

Ce sont ces deux lois, considérées par l’opposition comme un «coup d’Etat» car elles suppriment la séparation des pouvoirs, contre lesquelles le président Duda a annoncé s’opposer. La dernière loi sur laquelle il ne s’est pas engagé, serait aussi lourde de conséquences. Elle modifie le régime des tribunaux de droit commun dont les présidents pourront être aussi nommés par le ministre de la Justice.

«Le président devrait aller plus loin et répondre aux demandes des manifestants en opposant son veto sur les trois lois», regrette Draginja Nadazdin, directrice d’Amnesty international Pologne.

Radoslaw Markowski va plus loin et voit dans l’action du président Duda une manipulation de l’opinion publique. «Il a simplement eu peur de l’ampleur des manifestations et a décidé, en accord avec Jaroslaw Kaczynski, de faire diversion, assure le directeur du centre d’études sur la démocratie à l’Ecole des sciences sociales de Varsovie. Je pense que, dans quelques semaines, Duda recevra plus ou moins les mêmes lois, à quelques virgules près. Ils espèrent pouvoir les passer ainsi, une fois la pression populaire retombée.»

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La Commission européenne a menacé, la semaine dernière, la Pologne de sanctions et lui avait donné une semaine pour renoncer à la réforme de la Cour suprême, instance qui se prononce notamment sur la validité des élections. Mercredi, Bruxelles devrait donner au gouvernement polonais jusqu’au prochain Conseil européen des ministres sur les affaires courantes, soit le 25 septembre, pour répondre des accusations de menaces sur l’état de droit. Ce délai donne le temps à la Commission européenne de préparer un possible déclenchement de l’article 7 du traité sur l’Union Européenne, une sanction encore jamais utilisée qui suspend le droit de vote du pays visé au Conseil des ministres. Bruxelles pourrait décider de faire une procédure incluant la Pologne et la Hongrie, pour que ces deux pays alliés ne puissent pas se protéger l’un l’autre avec un veto.


Aude Massiot Envoyée spéciale à Varsovie (Pologne)

Pologne : le parlement vote la loi sur la Cour suprême (20.07.2017)


Par Le Figaro.fr avec AFP Mis à jour le 20/07/2017 à 15:51 Publié le 20/07/2017 à 15:39

Les conservateurs au pouvoir en Pologne ont défié jeudi la Commission européenne en votant une loi controversée sur la Cour suprême, dénoncée par l'opposition comme un "coup d'Etat" réduisant l'indépendance de la justice.

Donnant à l'exécutif une forte influence sur la Cour suprême, le parlement polonais a ignoré la mise en garde de la Commission européenne qui avait sommé hier Varsovie de "mettre en suspens" ses réformes du système judiciaire, agitant la menace de sanctions sans précédent. Ces réformes visent à accroître le contrôle du pouvoir exécutif sur le système judiciaire et à en renouveler le personnel.


La chambre basse, où le parti Droit et Justice (PiS) est majoritaire, a voté la proposition de loi par 235 voix pour, 192 contre et 23 abstentions. Aussitôt connu, le vote a été dénoncé par des manifestants groupés devant le siège du Parlement. Une manifestation plus importante était prévue dans la soirée devant le palais présidentiel.

"Nous sommes désormais très proches de déclencher l'article 7 du traité de l'UE", synonyme de possibles sanctions comme la suspension des droits de vote de la Pologne au sein de l'Union, a averti le vice-président de la Commission, Frans Timmermans.

Aujourd'hui, le président conservateur Andrzej Duda a fait savoir qu'il refusait une rencontre avec le chef du Conseil européen Donald Tusk, préoccupé par cette situation.

Le parti Droit et Justice (PiS), majoritaire dans les deux chambres et toujours nettement en tête des sondages d'opinion, présente ses réformes comme indispensables pour rationaliser le système judiciaire et combattre la corruption. L'opposition y voit un affaiblissement de la séparation des pouvoirs et une tentative de faciliter aux conservateurs le contrôle de l'ensemble de la vie sociale.

La loi sur la Cour suprême doit être encore approuvée par le Sénat et signée par le président pour entrer en vigueur. Mais leur approbation semble acquise.

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Inquiète, la Commission européenne menace explicitement la Pologne (19.07.2017)


Après s’être attaqués à la justice constitutionnelle, les conservateurs au pouvoir à Varsovie ont lancé une réforme de l’ensemble du système judiciaire.

Le Monde.fr avec AFP | 19.07.2017 à 13h36 • Mis à jour le 20.07.2017 à 09h23 |

Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen) et Cécile Ducourtieux (Bruxelles, bureau européen)

« Ces lois auront un impact négatif très important sur l’indépendance de la magistrature », estime Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission européenne.

Elle n’avait sans doute plus le choix, au vu des derniers développements survenus en Pologne : la Commission européenne a frappé très fort, mercredi 19 juillet. Pour la première fois, elle a menacé explicitement de déclencher l’article 7 des traités de l’Union européenne (UE). Cette procédure, visant à « garantir que tous les pays de l’UE respectent les valeurs communes de celle-ci, y compris l’Etat de droit », peut conduire, en cas de « violation grave et persistante », à priver le pays en question de ses droits de vote au Conseil – la réunion des pays membres. Une véritable « bombe nucléaire institutionnelle », jamais activée, conduisant de fait à une mise au ban de l’UE.

« Les quatre mesures envisagées par le gouvernement polonais concernant sa réforme du système judiciaire accroissent considérablement les menaces sur l’Etat de droit car elles vont supprimer l’indépendance du système judiciaire du pays », a déclaré Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission chargé des droits fondamentaux et donc de la « question polonaise ».

L’ex-ministre néerlandais des affaires étrangères faisait notamment allusion au projet de loi, en cours d’examen, accordant au ministre polonais de la justice une influence déterminante sur la Cour suprême du pays. Deux autres textes ont déjà été adoptés, la semaine précédente, par le Parlement polonais : l’un porte sur le Conseil national de la magistrature et prévoit que ses membres seront choisis par le Parlement, à la majorité simple ; l’autre modifie le régime des tribunaux de droit commun, dont les présidents seront nommés par le ministre de la justice.


La Commission européenne semblait jusque-là beaucoup hésiter quant au ton à adopter vis-à-vis du parti ultraconservateur au pouvoir, Droit et justice (PiS), alors qu’elle a initié, début 2016, une première procédure inédite de « préservation de l’Etat de droit », consistant essentiellement en un dialogue suivi avec Varsovie. Il n’a pas infléchi les velléités du PiS.


Certains évoquaient toutefois, mardi, les hésitations du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, soucieux de ne pas creuser le fossé entre l’Est et l’Ouest de l’UE. Mais le PiS refuse tout dialogue. Et si M. Timmermans, ciblé par de virulentes critiques depuis des mois en Pologne, a lancé, mercredi, une nouvelle invitation aux ministres polonais de la justice et des affaires étrangères, il paraît considérer que la négociation a peu de chances d’aboutir.

La Commission craint que la Pologne, avec ses 38 millions d’habitants et son statut de chef de file des Etats d’Europe centrale et orientale, ne bascule vers une forme de régime non démocratique. «L’Etat de droit est une des valeurs qui définissent notre Union. Ce qui se passe aujourd’hui en Pologne nous touche tous », a martelé M. Timmermans.

« Bombe nucléaire »

Evoquer l’article 7 semblait jusqu’ici tabou. Cette disposition complexe pourrait-elle préfigurer une sortie de la Pologne de l’UE ? « Non », répond le premier vice-président. Il affirme qu’il fera tout pour amener la Pologne à respecter les règles de l’Etat de droit. Pour cela, souligne-t-il, il dispose de larges soutiens, y compris au sein de la société polonaise.

La procédure de l’article 7 peut être lancée à tout moment. Elle nécessite cependant, dans un premier temps – avant une discussion au niveau du Conseil –, une majorité des quatre cinquièmes des pays membres. « Je vais demander le soutien d’une majorité d’entre eux », a indiqué M. Timmermans mercredi. « La Commission adoptera sa décision sur l’article 7 en septembre », ajoute un diplomate.

Lors d’un premier débat, à la mi-mai, au sein du conseil des affaires générales, la plupart des ministres (avec une mention spéciale pour le Français et le Belge) s’étaient émus des dérives polonaises. Au sein du Conseil, le doute persiste cependant sur l’efficacité de la « bombe nucléaire » : le passage aux sanctions (la levée des droits de vote) apparaît hautement improbable, puisqu’il requiert l’unanimité des pays membres. Or, il est vraisemblable que la Hongrie de Viktor Orban volerait au secours de Varsovie.

Beaucoup dépendra donc, dans les semaines qui viennent, de l’attitude des Allemands, qui préfèrent rester prudents à l’égard de la Pologne. Et du président français : Emmanuel Macron a affirmé à plusieurs reprises qu’il ne transigerait pas avec les principes européens de l’Etat de droit. « Les évolutions des derniers jours ne sont pas de nature à le faire changer d’avis », affirme un autre diplomate.

Maintes fois accusée de n’avoir pas eu la main assez lourde avec la Hongrie de M. Orban, la Commission européenne devrait prendre dès mercredi prochain des mesures concrètes à l’encontre de Varsovie. Elle étudie ainsi le lancement d’une procédure d’infraction au droit de l’UE car l’un des textes polonais concernant la limite d’âge des juges créerait une discrimination entre les hommes et les femmes, ces dernières étant contraintes de partir à la retraite plus tôt. La Commission étudie aussi une mise en cause de Varsovie au motif qu’un juge polonais peut être considéré comme un juge européen et qu’à ce titre, il doit pouvoir bénéficier du principe de l’indépendance de la justice.

Risque d’isolement

Les menaces européennes vont-elles pousser le PiS à reculer, à se diviser, comme le laisse entrevoir l’intervention du président Duda dans le débat ? Ou, au contraire, comme le craignent certains, à alimenter son discours victimaire ? La Commission de Bruxelles parie sur le fait que la société civile polonaise, profondément européenne, ne suivra pas son gouvernement et refusera de courir le risque d’un isolement total.

Une partie de cette opinion a mal vécu la campagne ratée du pouvoir visant à priver l’actuel président polonais du Conseil, le libéral Donald Tusk, d’un renouvellement de son mandat. Jaroslaw Kaczynski, le président du PiS, considère depuis longtemps l’ancien premier ministre libéral comme un ennemi politique et le juge coresponsable – avec le Kremlin – de la mort de son frère Lech, dans la catastrophe aérienne de Smolensk, en Russie, en 2010.

Intervenant dans un débat houleux sur la réforme de la justice, dans la nuit de mardi à mercredi, M. Kaczynski n’a pas supporté que des membres de l’opposition évoquent le nom de son jumeau, présenté comme plus tolérant que lui. « N’essuyez pas vos gueules de traîtres avec le nom de mon frère de sainte mémoire ! Vous l’avez détruit, assassiné ! Vous êtes des canailles ! », a-t-il lancé. Cet épisode a encouragé la Commission européenne à tracer, mercredi, une ligne rouge. Rouge vif.

Pologne: des réformes dans le viseur de Bruxelles (19.07.2017)

Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 19/07/2017 à 10:09 Publié le 19/07/2017 à 09:30


La Commission européenne doit livrer aujourd'hui une "évaluation de la situation" en Pologne, où de nouvelles réformes du système judiciaire, contestées par l'opposition et critiquées à Bruxelles, ravivent les craintes d'une dérive anti-démocratique.



Après s'être attaqués à la justice constitutionnelle, les conservateurs au pouvoir à Varsovie ont lancé une réforme de l'ensemble du système judiciaire, dénoncée par l'opposition comme un "coup d'Etat rampant".

Plusieurs milliers de personnes ont protesté dimanche et mardi dans le pays pour dénoncer ces nouvelles initiatives du parti Droit et Justice (PiS) de Jaroslaw Kaczynski.

Pour les présidents de la plupart des groupes politiques du Parlement européen, ces réformes mettent en péril "la survie de la démocratie et de l'Etat de droit" et "ne sont pas compatibles avec les traités européens et l'adhésion" à l'UE.

"Nous pressons la Commission d'agir maintenant et clairement", ont-ils exhorté dans un texte cosigné lundi par les chefs des eurodéputés conservateurs, sociaux-démocrates, libéraux, écologistes et de la gauche radicale.


Ces inquiétudes font écho à celles exprimées par le Conseil de l'Europe, l'organisation paneuropéenne de défense des droits de l'Homme et de la démocratie, basée à Strasbourg.

Le président polonais fait de la résistance (19.07.2017)

http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/07/19/le-president-polonais-fait-de-la-resistance_5162344_3214.html

Andrzej Duda menace de mettre son veto aux lois controversées sur la justice votées par le PiS, son propre parti.

LE MONDE | 19.07.2017 à 10h40 | Par Jakub Iwaniuk (Varsovie, correspondance)

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Manifestation devantla Cour suprême, à Varsovie, le 16  juillet.


Les débats sur l’adoption de la loi très controversée sur la Cour suprême polonaise, unanimement décriée par les juristes comme un nouveau coup porté à la Constitution du pays, ont connu, mardi 18 juillet au soir, un rebondissement inespéré. En plein milieu de débats houleux à la Diète, la Chambre basse du Parlement, le président Andrzej Duda a menacé d’apporter son veto au texte, posant au passage un ultimatum à la majorité ultraconservatrice du PiS (Droit et justice), dont il est issu.

Le président a en effet usé de son droit d’initiative pour déposer un amendement à une autre loi, votée mercredi 12 juillet sur le statut du Conseil national de la magistrature. M. Duda exige désormais que les membres de cette institution-clé, qui a un pouvoir décisif sur la nomination des juges, soient élus à une majorité qualifiée des trois cinquièmes de la Diète, et non plus à la majorité simple, comme le prévoyait le texte initial.

« Ce projet doit empêcher que l’on puisse dire que le Conseil national de la magistrature est une structure appropriée par un parti politique, et que, par conséquent, elle agit sous un diktat politique. On ne peut pas laisser cette impression dans la société polonaise, a affirmé le président dans une allocution solennelle. Je ne signerai pas la loi sur la Cour suprême, même si elle est adoptée par le Parlement, si ma proposition de réforme n’est pas adoptée et ne devient pas partie intégrante du système juridique polonais. »

« Notaire »

Le président a pris de court les membres de la majorité, car il n’a pas prévenu le gouvernement et la direction du parti. « C’est son initiative, à laquelle il a le droit, a admis la porte-parole du PiS, Beata Mazurek. Nous ne disons pas non mais, pour que cette proposition soit effective, le président doit signer la loi sur le Conseil national de la magistrature, et quand il l’aura signée, nous allons procéder à l’amendement qu’il a évoqué. » Quelques heures plus tard, le chef de cabinet du président Duda, Krzysztof Szczerski, a salué un « accord important » à l’issue d’une réunion avec les présidents de la Diète : « Les amendements réclamés par le président seront intégrés. »

Cet échange témoigne d’un bras de fer engagé entre le président de la République et l’homme fort de la majorité, Jaroslaw Kaczynski. Andrzej Duda avait jusque-là fait preuve de peu d’autonomie vis-à-vis de son parti, au point de se voir qualifier par les médias de « simple notaire » de Jaroslaw Kaczynski, à qui il doit son ascension politique. Si la proposition du président venait à être adoptée, elle compliquerait considérablement la tâche de la majorité pour la nomination des juges, car le PiS devrait entrer dans des tractations complexes avec les partis d’opposition.

Lire aussi :   En Pologne, le gouvernement ultraconservateur harcèle les journalistes

En réponse à l’initiative présidentielle, la majorité a décidé d’accélérer les travaux sur le texte, le renvoyant en deuxième lecture sans passer par l’étape de Commission parlementaire. La séance nocturne a rapidement pris des tournures hystériques. Jaroslaw Kaczynski, dans un excès de colère, a violemment accusé l’opposition, qui venait de citer son frère, Lech, l’ex-président mort en 2010 dans la catastrophe de Smolensk : « N’essuyez pas vos gueules de traître avec le nom de mon frère de sainte mémoire ! Vous l’avez détruit, assassiné ! Vous êtes des canailles ! » L’opposition a déposé plus de 1 300 amendements en seconde lecture, et la séance a été levée jusqu’à mercredi matin.
Jusque tard dans la nuit, une foule très dense de plusieurs milliers de personnes était rassemblée autour du palais présidentiel et du Parlement, des bâtiments encadrés par des barrières et par un important dispositif policier. « Les tribunaux doivent être libres, nous exigeons un veto ! », scandaient les manifestants, brandissant bougies et roses blanches, et lisant des extraits de la Constitution. Plusieurs milliers de manifestants se sont également rassemblés dans d’autres villes du pays.

Les organisations de juges, de leur côté, restent prudentes quant à l’initiative du président. « Globalement, c’est un pas dans la bonne direction. La majorité qualifiée est toujours une meilleure garantie que la majorité simple pour élire des juges compétents, confie au Monde Dariusz Zawistowski, président du Conseil national de la magistrature et membre de la Cour suprême. Mais ce geste ne change pas le fond du problème : cette loi, même avec cet amendement, reste inconstitutionnelle et ne respecte pas les standards européens. »

Procédure accélérée « douteuse »

Un des principaux objets d’inquiétude est la division du Conseil en deux chambres, une composée de juges, l’autre de responsables politiques, où ces derniers auraient un droit de veto sur les décisions des juges. « La loi sur la Cour suprême, elle aussi, reste inconstitutionnelle sur de nombreux points, car elle remet en cause le principe d’inamovibilité des juges inscrit dans la Constitution », ajoute M.Zawistowski.

Le juge qualifie également de « douteuse » la procédure d’adoption accélérée de cette loi de nature organique, qui s’est déroulée sans aucune consultation avec les milieux juridiques. « Le Conseil national de la magistrature n’a même pas eu le temps d’émettre un avis formel avant la première lecture au Parlement. »

Les travaux sur ce texte ont provoqué de nombreuses réactions internationales, mardi. Le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, ainsi que le président du Parlement européen, Antonio Tajani, ont notamment exprimé leurs vives inquiétudes. « Ce projet de loi (…) peut aller à l’encontre des principes fondamentaux des traités européens », a estimé M. Tajani, dans une lettre ouverte au président Duda.



La Hongrie et la Pologne à nouveau mises en cause à propos des libertés à Bruxelles (13.07.2017)


La Commission européenne a ouvert une « procédure d’infraction » contre la Hongrie au sujet d’une loi sur les ONG et s’inquiète de deux projets concernant le contrôle du système judiciaire en Pologne.


Le Monde | 13.07.2017 à 18h47 • Mis à jour le 13.07.2017 à 19h17 |
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
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Beata Szydlo, la première ministre polonaise, aux côtés de Victor Orban (à droite), son homologue hongrois, le 19 juin 2017.

Loi sur les ONG (Hongrie)

La Commission européenne continue de durcir le ton par rapport à la Hongrie. Jeudi 13 juillet, elle a ouvert une « procédure d’infraction » contre cet Etat au sujet d’une loi qui entend imposer des obligations spécifiques à certaines catégories d’ONG bénéficiant de capitaux étrangers. Pour Bruxelles, le texte n’est pas conforme au droit de l’Union sur la liberté d’association, la libre circulation des capitaux et la protection de la vie privée et des données personnelles. D’après Bruxelles, la loi menace l’activité des organisations, en limitant leurs possibilités de collecter des fonds.

Frans Timmermans, le premier vice-président de la Commission, avait déjà évoqué, en avril, des «restrictions injustifiées», suscitant de «vives préoccupations». La loi impose à des ONG recevant annuellement plus de 24 000 euros de financements étrangers de s’enregistrer en tant qu’«organisations bénéficiant d’un soutien de l’étranger» et de se présenter comme telles sur leur site Web, dans leurs communiqués, leurs brochures, etc. Elles doivent également livrer une série d’informations précises aux autorités.


Bruxelles a adressé une lettre de « mise en demeure » à la Hongrie, qui dispose d’un mois pour y répondre. Il s’agit de la première étape de la procédure d’infraction. Si la réponse est jugée incomplète ou insatisfaisante, la Commission pourra alors adresser un « avis motivé » à Budapest avant une saisine éventuelle de la Cour de justice européenne, à Luxembourg.

Loi hongroise sur l'enseignement supérieur (Hongrie)

Le même jour, la Commission a lancé la deuxième étape de la procédure d’infraction contre la loi hongroise sur l’enseignement supérieur, qui vise principalement l’Université d’Europe centrale de George Soros, le milliardaire américain d’origine hongroise, qui est la cible de campagnes incessantes du gouvernement de Victor Orban.

Polémique sur l’accueil des réfugiés (Pologne, Hongrie, République Tchèque)

Ce conflit s’ajoute à la polémique sur l’accueil des réfugiés, pour laquelle la Commission avait ouvert contre la Hongrie (mais aussi contre la Pologne et la République tchèque) une procédure d’infraction, le 13 juin. Ces trois pays refusent de participer au programme européen de répartition des demandeurs d’asile depuis l’Italie et la Grèce. Le dispositif a été adopté à la fin de 2015 et s’impose à tous les pays membres. En réaction, le premier ministre, Victor Orban, avait dénoncé le « chantage de Bruxelles ».


Le contrôle du système judiciaire (Pologne)

A Bruxelles, un autre sujet délicat, polonais celui-là, pointe et promet d’engendrer des polémiques. Le parlement de Varsovie a voté, mercredi 12 juillet, deux projets concernant le contrôle du système judiciaire. Selon l’opposition au gouvernement ultra-conservateur, cette réforme va réduire la séparation des pouvoirs et mettre à mal l’indépendance des juges.

« Les projets de lois sur le fonctionnement des tribunaux ordinaires, du Conseil national de la magistrature et de la Cour suprême, qui modifient de facto la Constitution, conduiront à abolir l’indépendance et l’autonomie des juridictions polonaises par rapport aux autorités politiques », dénoncent cinq anciens présidents du Tribunal constitutionnel.
  
En 2015, le parti Droit et Justice (PiS) au pouvoir avait pris le contrôle du Tribunal constitutionnel, suscitant de nombreuses manifestations. Il tente désormais de contrôler l’ensemble du système judiciaire. Interrogé jeudi, à Bruxelles, un porte-parole de la Commission a livré des réponses évasives et a refusé de se prononcer sur ces lois, affirmant qu’elles n’étaient pas définitivement adoptées (le Sénat doit les avaliser) et qu’elles devaient faire l’objet d’un examen.

Le groupe du Parti populaire européen (conservateur) au Parlement s’est montré beaucoup plus ferme. Manfred Weber, le président allemand du groupe, et Esteban Gonzalez Pons, vice-président espagnol, ont estimé que le PiS avait « franchi la ligne rouge ». Dénonçant « le vote en urgence, qui constitue un tournant pour la Pologne », les deux élus estiment que le parti au pouvoir a désormais « mis fin à l’Etat de droit et à la démocratie et quitté la communauté européenne de valeurs partagées ».

MM. Weber et Gonzalez Pons demandent l’abandon du projet de réforme et réclament des mesures contre le gouvernement de Varsovie. La Commission de Jean-Claude Juncker, mis sous pression par le parti de son président, va devoir délaisser la prudence qu’elle affichait jeudi.


A Varsovie, Donald Trump conforte le gouvernement polonais contre l’UE (07.07.2017)
En Pologne, le président américain a défendu le parti ultraconservateur au pouvoir, alors que le pays est en conflit avec l’UE, notamment sur la question de l’Etat de droit.


LE MONDE | 06.07.2017 à 19h26 • Mis à jour le 07.07.2017 à 10h48 | Par Jakub Iwaniuk (Varsovie, correspondance)

La foule brandit des photos du président américain Donald Trump et de son homologue polonais Andrzeg Duda, à Varsovie le 6 juillet.

En faisant un crochet par la Pologne sur la route du G20 de Hambourg (Allemagne), jeudi 6 juillet, Donald Trump a obtenu ce qu’il était venu chercher : un accueil chaleureux devant un public clairsemé mais fervent de partisans du parti ultraconservateur Droit et justice (PiS) au pouvoir.
A la veille de sa première rencontre officielle avec son homologue russe, le président américain a adressé un message ferme au Kremlin. « Nous demandons instamment à la Russie de cesser ses activités déstabilisantes en Ukraine (…), ainsi que son soutien aux régimes syrien et iranien », a-t-il martelé. Il a également suggéré, dans une formule ambiguë, que Moscou s’était « immiscé » dans l’élection présidentielle américaine de 2016 : « Je pense que c’était la Russie, et je pense que cela pouvait être aussi d’autres personnes dans d’autres pays. »

Alors que la Pologne est depuis un an et demi sous le coup d’une procédure de « sauvegarde de l’Etat de droit » enclenchée par l’UE, et en conflit avec Bruxelles sur la question de l’accueil des réfugiés, le président américain a apporté un soutien remarqué à Varsovie. « Je suis ici aujourd’hui non seulement pour rendre visite à un vieil allié, mais à un vieil allié qui est un exemple pour d’autres de succès et de liberté (…), et qui a le courage de défendre notre civilisation », a-t-il déclaré. Le PiS de Jaroslaw Kaczynski a ainsi gagné la bénédiction de la première puissance mondiale pour développer sa « démocratie non libérale », un concept théorisé par le premier ministre hongrois, Viktor Orban, et mis en œuvre depuis deux ans en Pologne.

Le président des Etats-Unis s’est exprimé devant le monument commémorant l’insurrection de Varsovie durant la seconde guerre mondiale. M. Trump a vanté à de multiples reprises « l’héroïsme des Polonais » à travers l’Histoire. « Dans le peuple polonais, nous voyons l’âme de l’Europe »,..


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