À Fleury-Mérogis, le détenu Abdeslam est surveillé de près (04.05.2016)
À Fleury-Mérogis, le détenu Abdeslam est surveillé de près (04.05.2016)
Les heures de promenade de Salah Abdeslam sont décalées par
rapport aux autres détenus (photo d'illustration).
Par Paule Gonzalès
Mis à jour le 04/05/2016 à 16h07 | Publié le 03/05/2016 à
19h24
Dans sa cellule filmée 24h/24, le terroriste présumé a le
droit de lire et de rencontrer l'imam. Il restera probablement à l'isolement
plusieurs années.
La banalité du mal. «Salah Abdeslam est un détenu lambda
surveillé 24 heures sur 24, dans des conditions exceptionnelles. Il faudra
qu'il retourne très vite à l'oubli et au mépris d'où il n'aurait jamais dû
sortir.» Ainsi le rappelle Guillaume Larrivé. Le député LR de l'Yonne a fait
valoir mardi son droit de visite de parlementaire pour se rendre à
Fleury-Mérogis, où est incarcéré le seul terroriste vivant des attentats du 13
novembre. Nadine Piquet, la directrice de la plus grande maison d'arrêt
d'Europe, opine du chef. C'est sur ses épaules que pèsent les contraintes d'une
détention sous haute pression médiatique. «Il faut en effet qu'il soit un peu
oublié», soupire celle qui dirige cette maison d'arrêt de 4500 détenus. Aux
abords du bâtiment D3, le passage du député et du petit groupe de journalistes
qui l'accompagne est salué par des cris et les traditionnelles insultes qui
émaillent l'arrivée de toute personnalité étrangère au monde de la détention.
«Salah Abdeslam!» hurlent des voix sans visages derrière les barreaux obscurs.
«Il est arrivé, vous venez pour lui, il est là… Nous aussi, on veut la télé.»
Des longs rubans de tissu et de plastique qui servent à passer des objets en
tout genre d'une cellule à l'autre, flottent comme des haubans le long du
bâtiment. Ce dernier abrite les condamnés pour courtes peines, mais aussi le
quartier d'isolement et les deux fameuses unités dédiées aux détenus radicaux
et aux détenus particulièrement surveillés. À cet étage, 32 agents se relaient.
Parmi eux, 24 ont été formés à la problématique des détenus islamistes.
Avec le temps, Salah Abdeslam devrait avoir le droit de
faire du sport. Contrairement à ce qui a été dit, il n'est pas équipé d'un kit
anti-suicide
Au sein du quartier d'isolement, seules une dizaine de
cellules sur une trentaine sont occupées. Salah Abdeslam n'a pas de voisin
direct, ni à côté ni en face de sa cellule. Tout a été fait pour empêcher toute
proximité avec d'autres détenus. Et ses heures de promenade solitaire sont
décalées par rapport aux autres détenus. «Un classique. De toute façon, je ne
suis pas certaine qu'il ne lui arriverait rien s'il se retrouvait dans une cour
de promenade classique», souligne Nadine Piquet, qui entend bien faire entrer
Salah Abdeslam dans le droit commun de la détention. Le temps sera de son côté.
Il est fort probable, en effet, qu'aucun procès n'ait lieu avant quatre ans. Il
est aussi fort probable que, durant toutes ces années, Salah Abdeslam reste à
l'isolement. Cela ne l'empêchera pas d'avoir accès aux mêmes droits que les
autres détenus. Des livres lui ont déjà été proposés. Un seul orne la table
scellée de sa cellule: le Coran. Comme le droit pénitentiaire l'y autorise, il
a déjà demandé à rencontrer l'imam. Ce qui lui a été accordé. Avec le temps, il
devrait avoir le droit de faire du sport.
Le député LR de l'Yonne, Guillaume Larrivé (accompagné de la
directrice de l'établissement Nadine Piquet) a fait valoir son droit de visite
de parlementaire pour se rendre à la prison de Fleury-Mérogis.
Le député LR de l'Yonne, Guillaume Larrivé (accompagné de la
directrice de l'établissement Nadine Piquet) a fait valoir son droit de visite
de parlementaire pour se rendre à la prison de Fleury-Mérogis. - Crédits photo
: FRANCOIS BOUCHON
Contrairement à ce qui a été dit, Salah Abdeslam n'est pas
équipé d'un kit anti-suicide. La seule particularité est la vidéosurveillance
24 heures sur 24 qui, pour l'instant, permet de constater que le détenu est
calme et mange de bon appétit. «Il est important pour les victimes comme pour
le prévenu que le procès se tienne et qu'il ait droit à un procès équitable»,
continue Nadine Piquet. Pour Guillaume Larrivé, «la problématique demeure la
mise hors d'état de nuire de cet individu. Il est essentiel d'assurer la
transformation sécuritaire de la pénitentiaire au même titre que la police ou
la gendarmerie», affirme le député qui n'hésite plus à se prononcer «en faveur
d'un rattachement de l'Administration pénitentiaire au ministère de
l'Intérieur». Et de considérer que «l'Administration pénitentiaire a trop
longtemps été la grande oubliée du gouvernement. Il faut assumer le financement
de grandes missions régaliennes quitte à renoncer à d'autres missions de
service public», affirme celui qui, responsable du budget de la pénitentiaire à
l'Assemblée nationale, s'apprête par ailleurs à défendre le retour des fouilles
intégrales en prison.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
04/05/2016. Accédez à sa version PDF en cliquant ici
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