mardi 18 juillet 2017

L'accueil des immigrants et l'intégration des populations issues de l'immigration (Rapport, 2004)



De la gestion des flux migratoires aux actions d'accueil des immigrants et d'intégration des populations issues de l'immigration en passant par la lutte contre les discriminations, la Cour des comptes analyse les différentes politiques d'immigration mises en oeuvre depuis trente ans. Après avoir expliqué la genèse et décrit les modalités des actions publiques qui ont pu être conduites jusqu'ici pour répondre aux défis de l'accueil et de l'intégration, le rapport tente de dresser leur bilan en examinant la situation des populations concernées. Il cherche aussi à apprécier les conditions de la réussite des réformes en cours ou annoncées récemment à la lumière des évolutions observées dans les mouvements migratoires, des modifications intervenues dans le déroulement des séjours et des exigences nouvelles qui annoncent les besoins prévisibles du marché européen du travail. La Cour formule de nombreuses recommandations qui lui paraissent de nature à conforter la démarche engagée.





COUR DES COMPTES 

Conférence de presse du mardi 23 novembre 2004 

Présentation du rapport public particulier sur l’accueil des immigrants et l’intégration des populations issues de l’immigration

Intervention M. Philippe SÉGUIN, Premier président 

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, 

Je vous souhaite la bienvenue à la Cour et je vous remercie d’avoir bien voulu répondre à notre invitation. 

Cette rencontre a pour objet la présentation du rapport public particulier que la Cour vient de consacrer au problème de l’accueil des immigrants et de l’intégration des populations issues de l’immigration. 

Je me dois de rappeler que cette enquête a été lancée dès le dernier trimestre 2002 sur l’initiative du Président Jean Marmot, alors président de la 5ème chambre. Je le précise, en ces instants, aux fins de saluer sa mémoire, le Président Marmot étant décédé il y a quelques mois au terme d’une cruelle maladie. 

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Je souhaite encore indiquer que les travaux dont il va vous être rendu compte ont été conduits par la 5ème chambre de la Cour avec le soutien des 3ème et 4ème. 

Ce qui explique que se retrouvent à mes côtés pour cette conférence de presse, M. Jean-François Carrez, président de la 5ème chambre, ainsi que Mme Bazy-Malaurie, rapporteur général du Comité du rapport public et des programmes, et que nous accompagnent également - il est devant moi - M. Georges Capdeboscq, président de section, M. Jean-François Bayle, conseiller maître, responsable de secteur, ainsi que M. Jean-Yves Audouin, préfet, conseiller maître en service extraordinaire et quelques-uns encore des nombreux rapporteurs qui ont participé à ce travail. 

Je laisserai le soin, dans un instant, à M. Carrez de présenter ce rapport et de répondre à vos questions, avec le concours de ces magistrats. 

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Mais vous me permettrez de faire précéder leurs remarques de quelques observations liminaires. 

L’immigration, chacun en conviendra, est une question-clé pour la collectivité nationale. Elle recouvre diverses dimensions parmi lesquelles la maîtrise des flux migratoires occupe généralement une place prépondérante, au point d’occulter parfois le problème des modalités de l’intégration des populations concernées. 

C’est à ce problème que la Cour a souhaité s’intéresser. 

Il est vrai qu’il s’agit là d’une question aussi importante que complexe. Le terme lui-même d’intégration a ainsi pu faire l’objet de débat et d’aucuns l’ont contesté, lui préférant celui d’insertion, ou encore parfois celui d’assimilation. 

L’attitude de certains pays d’origine a encore compliqué les choses dans la mesure où ils affectaient parfois de ne considérer l’éloignement de leurs ressortissants que comme un phénomène provisoire...

On perçoit ainsi, d’emblée, la nature des difficultés rencontrées par les pouvoirs publics : ces difficultés ne se limitent pas aux moyens à mettre en oeuvre ; elles embrassent aussi les objectifs à définir ; elles concernent enfin le périmètre même des populations à prendre en charge. 

Ces hésitations « conceptuelles » ont, en leur temps, justifié des choix ou des attitudes qui aujourd’hui pèsent encore. D’autant qu’il faut le rappeler, aider les immigrés n’a pas toujours été ressenti spontanément comme un devoir de la collectivité nationale.

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Ces constats la Cour les avait déjà faits. Ils ne datent pas d’hier. 

Depuis plusieurs décennies, en effet, elle a eu à connaître de nombreux aspects de la politique de l’immigration. 

Par ses contrôles réguliers de l’Office des migrations internationales, elle a pu longuement examiner l’organisation de l’immigration de main d’œuvre et de celle du regroupement familial. 

Par ses contrôles de la Sonacotra, elle a pu analyser diverses dimensions de la politique du logement. 

En contrôlant périodiquement le Fonds d’action sociale, pour les immigrés le FAS, devenu le Fasild, elle s’est penchée sur les interventions sociales réalisées au bénéfice des populations migrantes. 

La Cour a ainsi pu estimer en 2002 que le moment était venu pour elle de remettre en perspective ses constats de naguère, de les compléter et d’envisager la publication d’un rapport public particulier sur l’un des aspects majeurs de la problématique de l’immigration : les conditions d’accueil et d’intégration. 

Du fait de l’expérience qu’elle avait accumulée en la matière, la Cour était probablement celui des organes de contrôles qui possédait la légitimité la plus grande pour mener cette première approche globale. Ce travail paraissait d’ailleurs d’autant plus indispensable que s’élaboraient les éléments d’une nouvelle politique publique en matière d’immigration, politique que la Cour s’est donc attachée à suivre et à analyser, pour définir les conditions de sa possible réussite. 

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Il faut dire d’abord que dans un domaine où l’histoire compte, les principes d’intervention pour l’accueil et l’intégration des populations migrantes n’auront été posés et précisés par les pouvoirs publics que très progressivement. 

Il est vrai que l’idée selon laquelle les immigrants n’étaient qu’une population de passage a longtemps prévalu. Dès lors, l’essentiel des premiers efforts déployés au cours des années 50 et 60 ne visait en rien à traiter les problèmes de l’ensemble des immigrants. Et si le FAS ou la Sonacotra ont été créés dans cette période, c’était exclusivement à destination des musulmans d’Algérie se trouvant en métropole - et encore, dans le contexte très particulier de la guerre d’Algérie. 

Or, force est de considérer que les opérateurs intervenant aujourd’hui encore dans le domaine de l’immigration ont longtemps été profondément marqués par cette approche, qui avait imprégné leur création, alors même que la nature de l’immigration a profondément évolué, l’immigration de peuplement, familiale, originaire souvent du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne remplaçant une immigration de main d’œuvre qui avait été d’abord notamment européenne. Ces évolutions ont d’ailleurs suscité des craintes quant à la capacité d’intégration des populations concernées. 

De ces premiers éléments, un constat se sera rapidement imposé : la réponse publique adressée aux immigrants a été longtemps fractionnée, sans que les choix affichés ne puissent, jusqu’à ces dernières années, être considérés comme les éléments constitutifs d’une politique publique cohérente. 

Au terme de ses investigations la Cour estime donc que si la difficulté de définir des principes d’action stables et incontestables en matière d’immigration est réelle, il est nécessaire de prendre enfin la mesure des évolutions intervenues notamment dans la nature et l’origine des mouvements migratoires. 

S’agissant des principes de l’accueil et de l’intégration, la réponse apportée à une question centrale lui paraît pourtant demeurer ambiguë. Or cette question est incontournable : les immigrants, et plus largement les populations issues de l’immigration, doivent-ils être distingués des autres publics en difficultés et bénéficier d’un traitement et de prestations spécifiques, ou doivent- ils être fondus dans ce public, c’est à dire se voir appliquer des règles de droit commun ? 

Les pouvoirs publics ont, peu à peu, choisi d’assimiler les populations issues de l’immigration aux autres populations connaissant des difficultés, tout en ouvrant des exceptions ponctuelles à ce principe. 

Les initiatives publiques lancées en 2003 combinent d’ailleurs un accueil spécifique des immigrants, plus ambitieux que par le passé, et des dispositifs d’intégration essentiellement fondés sur le droit commun ; elles tentent par ailleurs de créer des liens entre ces deux phases de la vie de l’immigrant. 

Pour produire des résultats tangibles, cette architecture devra toutefois inclure, selon la Cour, des mesures d’accompagnement adaptées afin que la réforme ne soit pas qu’administrative et emporte du sens, concrètement, pour les personnes concernées. Elle doit également prendre en compte les populations déjà résidentes sur le territoire, qui n’auront pas bénéficié de ce nouvel accueil. L’extension de certaines prestations du nouvel accueil à l’ensemble des populations en cause, sous la forme d’un contrat « de rattrapage », permettrait de dissiper un risque évident et éviter que ne se crée un clivage entre immigrants, potentiellement dommageable à l’économie de l’ensemble du dispositif. 

La Cour a bien noté que parmi les mesures nouvelles destinées à assurer la réussite de l’intégration et de justifier le recours au droit commun figure la relance de la lutte contre les discriminations. Nombre d’entités interviennent déjà sur ce thème d’action, avec des approches diverses, sans que les résultats de ces interventions ne soient toujours concrètement perceptibles ni que la lisibilité du paysage ainsi créé soit évidente. La Cour considère que la décision de donner un élan nouveau à la lutte contre les discriminations pourrait susciter de réels effets pour les populations visées, à la condition que les discriminations prises en compte ne le soient plus seulement au niveau individuel, de façon forcément cosmétique, mais au niveau collectif. C’est seulement à ce niveau, en effet, qu’il est possible et pertinent de vérifier que les immigrants ne sont pas, pris ensemble, victimes de comportements qui contrarieraient ou empêcheraient leur intégration. 

S’agissant des moyens et des procédures utilisés pour appréhender les phénomènes migratoires, les structures existantes ont appelé toute l’attention de la Juridiction. Une meilleure adaptation au nouveau contexte migratoire est indispensable. Il n’est pourtant pas certain que les évolutions engagées depuis l’an dernier soient suffisamment ambitieuses pour constituer un schéma organisationnel adapté et totalement rationalisé. 

Le suivi statistique demeure lui-même une difficulté, tant sont nombreuses, partielles et parfois contradictoires les sources existantes. Le choix de l’intégration par le droit commun complique évidemment les choses, en ne différenciant pas le suivi de populations migrantes lorsque cela serait bien utile pour vérifier l’efficacité des dispositifs publics. 

L’évaluation des actions menées, qui s’impose pour la politique de l’immigration comme pour l’ensemble des politiques publiques, pourrait ainsi se heurter dans sa mise en œuvre à ces insuffisances. C’est donc dès le lancement de cette politique que ces insuffisances doivent être prises en compte. 

La Cour estime par ailleurs que deux préalables, fruits des errements du passé, doivent absolument être traités pour permettre à l’effort d’intégration d’être réellement efficace ; à défaut, les effets attendus de toute la politique d’intégration seraient menacés : 

La concentration de l’habitat d’abord, très forte pour certaines des populations concernées, complique le processus d’intégration et doit recevoir un traitement adapté. 

Par ailleurs, les effets pervers induits par l’existence trop souvent administrativement tolérée d’une forte population étrangère en situation irrégulière et dotée d’un quasi-statut doivent être soulignés. L’objectif de résorption totale de cette catégorie d’immigrés doit, selon la Cour, être recherché. 

Il ne revient évidemment pas à la Cour de préconiser particulièrement l’une des deux voies possibles pour sortir de cette impasse, c'est-à-dire la régularisation ou, à l’inverse, la reconduite à la frontière ; cette responsabilité incombe évidemment au politique. En revanche, l’urgence de l’objectif demeure. 

Beaucoup reste donc à faire avant que les conditions d’accueil et d’intégration des immigrants puissent être considérées comme satisfaisantes et viennent constituer de véritables facteurs de cohésion sociale. 

Toujours est-il que cette réorientation est d’autant plus nécessaire que se réduit la marge de manœuvre des pouvoirs publics nationaux. Le régime de l’asile, mais aussi l’admission au séjour, dépendent désormais ainsi largement du niveau européen ; s’agissant de la maîtrise des flux, seule la décision de régulariser les irréguliers demeure une compétence exclusivement nationale, de même que les actions d’intégration. 

D’autres phénomènes, comme par exemple les perspectives de migrations dressées par l’ONU et l’OCDE, ou l’accroissement du nombre des binationaux, compliquent encore les conditions de réalisation de l’action publique. Elles imposent en tout cas de sortir de la contradiction qui existe entre des perspectives de recours accrues à l’immigration et le droit au développement des pays d’origine. 

C’est au terme de ce propos introductif que je vais passer la parole à M. Jean-François Carrez, président de la cinquième chambre et, à ce titre, responsable de la réalisation de travaux dont je tiens à souligner l’ampleur. Par le niveau des effectifs engagés dans ce projet, par le respect essentiel du caractère de collégialité qui a marqué l’adoption de ce rapport, la Cour a conjugué des atouts qui font la force de notre Institution. 


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Immigration et intégration

Dossier mis à jour le 12.04.2016
Article mis à jour le 7.03.2012
L’émergence d’une politique d’intégration des personnes étrangères ou immigrées est récente. Pendant les Trente glorieuses (1945-1973), les étrangers, souvent célibataires, sont perçus comme une main d’œuvre n’ayant pas vocation à s’installer en France. Si des mesures sont prises pour leur insertion, elles concernent souvent le logement et l’accès à l’emploi. A compter de 1974 et en réponse à la crise économique, l’arrêt de l’immigration de travail entraîne une baisse des entrées d’étrangers. Mais les personnes étrangères présentes sur le territoire français peuvent faire venir leur famille au nom du droit à "vivre en famille". L’immigrén’est plus seulement une force de travail, il devient un habitant de la cité. De nouvelles actions sont mises en place pour répondre aux besoins de cette population qui choisit de rester en France. D’abord traitée sous l’angle social et culturel, la politique d’intégration est consacrée par la création du Haut conseil à l’Intégration en 1990. Au milieu des années 2000, avec la mise en place puis la généralisation du contrat d’accueil et d’intégration, cette politique semble devenir un élément de la politique du contrôle des flux migratoires.

Insertion économique, sociale et culturelle des immigrés

L’arrêt de l’immigration de travail change le regard sur la population immigrée, appelée à s’installer durablement en France. Sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981), la valorisation des langues et cultures d’origine se concrétise par la création de l’Office national pour la promotion des cultures immigrées (ONPCI), rebaptisé ensuite Information Culture Et Immigration (ICEI), et par l’émission de télévision « Mosaïque ». Cependant, ces dispositifs semblent plutôt être mis au service d’un encouragement au retour dans le pays d’origine et coïncident d’ailleurs avec la mise en place d’une politique d’aide au retour (le « million Stoléru », du nom du ministre proposant cette somme aux immigrés décidant de se réinstaller dans leur pays d’origine). Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, une nouvelle politique semble se dessiner. Le rapport de la députée Françoise Gaspard « L’Information et l’expression culturelle des communautés immigrées en France » propose la mise en œuvre d’une véritable politique d’insertion des immigrés et la prise en compte de la dimension interculturelle de la société. Ainsi est créée, en 1982, l’Agence pour le développement des Relations Interculturelles (ADRI) qui a pour but de favoriser par tous les moyens l’échange et le dialogue interculturels en vue de l’insertion sociale et professionnelle des populations étrangères et d’origine étrangère dans la société française. En 1984, la création d’un titre unique de séjour et de travail, sans restriction géographique ou professionnelle, a pour objectif d’assurer la sécurité des migrants au regard du séjour et ainsi de faciliter la liberté d’installation et la mobilité notamment pour chercher un emploi et trouver un logement.
Le début des années 1980 est aussi le moment où les jeunes « issus de l’immigration » se rendent plus visibles dans le paysage de la ville et revendiquent leur appartenance à la société française et la reconnaissance de leurs droits de citoyens. Des grandes marches sont organisées : « la Marche pour l’égalité des droits et contre le racisme » (la « Marche des beurs ») en 1983 et « Convergence pour l’égalité » en 1984. La politique d’insertion des communautés immigrées en France, selon la formule du secrétaire d’Etat aux immigrés, François Autain passe alors par le développement d’une politique de la ville même si elle inclut aussi parfois des mesures ciblées sur la population immigrée. Il en est ainsi de la mise en place des zones d’éducation prioritaires (ZEP) destinées à lutter contre l’échec scolaire grâce à des moyens supplémentaires accordées aux établissements accueillant une proportion importante d’élèves d’origine étrangère. C’est aussi la politique de développement social des quartiers (DSQ) qui vise à lutter contre l’exclusion et la ghettoïsation des quartiers défavorisés. Cette politique s’interrompt pendant la période de cohabitation (1986-1988) mais reprend sous forme de contrats d’agglomération passés entre l’Etat et les villes petites et moyennes. La circulaire du 10 avril 1991 relative aux contrats d’agglomération rappelle la volonté du gouvernement de faire de l’intégration des populations étrangères un élément important de la politique de la ville (accueil des populations étrangères dans les services publics, expression des populations immigrées au sein de commissions extra-municipales, mais pas d’octroi de droit de vote aux élections locales)
La politique d’insertion sociale des pouvoirs publics se traduit aussi par l’action du Fonds d’action sociale (FAS). Créé en 1958, sous l’appellation de Fonds d’action sanitaire et sociale (FASS), il est alors consacré à l’amélioration des logements des travailleurs étrangers mais bénéficie en fait à l’ensemble du parc de logements sociaux. Investi d’une mission de politique sociale dès 1966, il subit une lente évolution jusqu’en 1983, date à laquelle il est déconcentré. Tout au long de la période, l’action sociale du FAS est très diversifiée. Son budget concourt au développement de la vie associative par l’octroi des subventions accordées à de nombreuses associations œuvrant dans le champ de l’immigration (formation des immigrés, soutien scolaire, animation culturelle, médiation, aide à l’accès au droit).

Intégration et lutte contre les discriminations

Sous le gouvernement de Michel Rocard en 1988, le terme d’intégration, à propos de l’immigration sédentarisée, s’impose. En 1989, un Secrétaire général à l’intégration est nommé. Il propose avec le FAS un programme "Actions dans les quartiers, 60 sites pour l’intégration. Est également créé un Comité interministériel à l’intégration créé ainsi qu’un Haut Conseil à l’intégration qui a pour mission de formuler des avis et faire des propositions "sur l’ensemble des questions relatives à l’intégration des résidents étrangers ou d’origine étrangère". Entre 1991 et 1997, il y aura plusieurs fois soit un ministre soit un secrétaire d’Etat chargé de l’intégration et un ministre chargé de la ville et de l’intégration.
C’est aussi la période du débat sur le foulard islamique, qui aboutit à la publication de textes sur l’interdiction du port de signes religieux à l’école, porté par le ministre de l’éducation nationale de l’époque, Lionel Jospin. Il est alors question d’intégration dans la République et du respect de ses valeurs (laïcité…).
La politique d’intégration est ensuite complétée par un volet consacré à la lutte contre les discriminations. En 1998, le rapport du Haut Conseil à l’intégration de 1998 « Lutter contre les discriminations : faire respecter le principe d’égalité » met l’accent sur les discriminations fondées non seulement sur la nationalité mais aussi sur l’origine. Il met en évidence la nécessité d’une politique d’intégration ne visant plus exclusivement la population d’origine étrangère mais aussi les immigrés des deuxième et troisième générations. Sont alors mis en place les commissions départementales d’accès à la citoyenneté (CODAC) et le Groupe d’étude sur les discriminations (GED). Cette mobilisation aboutit à la loi du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations et la création de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE), tandis que le FAS est rebaptisé Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD).
Mais, depuis dix ans, les rapports critiques sur la politique d’intégration des pouvoirs publics se succèdent. Des rapports du Haut Conseil à l’intégration (les parcours d’intégration en 2002 et le contrat et l’intégration en 2004) constatent que l’intégration n’est plus au centre des priorités nationales et plaident pour la mise en place d’un véritable service public de l’accueil. Le rapport de la Cour des comptes de novembre 2004 sur « l’accueil des immigrants et l’intégration des populations issues de l’immigration » estime que la machine à intégrer est en panne depuis des années, et de façon durable. La réduction de la dotation budgétaire de l’Etat au Fasild confirme pour certains un désengagement de l’Etat.
Le récent bilan fait, en 2011, par le Haut Conseil à l’intégration sur 20 ans de politique d’intégration rappelle « l’ardente obligation d’une politique d’intégration » : il revient aux pouvoirs publics de faire preuve d’une plus grande détermination dans la mise en œuvre des politiques d’intégration. Certes, poursuit le rapport, « beaucoup a été fait en vingt ans grâce à l’accueil et le contrat d’intégration, la lutte contre les discriminations, l’égalité des chances dans l’éducation, la prise en compte de la diversité dans les médias, ou encore une Cité nationale de l’histoire de l’immigration qui révèle notre histoire commune. Il est indispensable de continuer, avec résolution, à faciliter l’accompagnement des immigrés et de leurs enfants vers le droit commun. Il en va de notre cohésion sociale et nationale ». Il préconise la création d’un Agence chargée de l’intégration.

Accueil, intégration et contrôle des flux migratoires

Au milieu des années 2000, la politique de l’accueil des nouveaux arrivants devient le pilier de la politique d’intégration. Ainsi en avril 2003, le Comité interministériel à l’intégration propose un programme de 55 mesures avec une mesure phare, le contrat d’intégration proposé aux primo-arrivants. Créée en avril 2005, l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), qui remplace l’Office des migrations internationales (OMI) et le Service sociale d’aide aux émigrants (SSAE), devient l’organisme de référence pour l’accueil des nouveaux arrivants. Parallèlement, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé) remplace le Fasild dont elle est censée garder les missions d’intégration des immigrés de plus longue date. La loi du 24 juillet 2006 rend la signature du contrat d’accueil et d’intégration obligatoire à partir du 1er janvier 2007 pour tout nouvel arrivant. Il impose une formation civique portant sur les institutions françaises et les « valeurs de la République » (laïcité et égalité homme-femme, notamment), une formation linguistique ainsi qu’un bilan des compétences professionnelles. La loi de novembre 2007 crée un « contrat d’accueil et d’intégration pour la famille » obligeant notamment les parents à veiller à la bonne intégration de leurs enfants nouvellement arrivés en France. En cas de non respect, le juge des enfants peut être saisi et le paiement des allocations familiales suspendu.
Pour un certain nombre d’associations, les mesures concernant le contrat d’accueil et d’intégration, sous prétexte de favoriser l’intégration, cherchent surtout à limiter le nombre des installations régulières en les rendant plus difficiles, la capacité à s’intégrer devenant un critère de tri dans la mise en œuvre d’une politique d’immigration choisie.
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