lundi 17 juillet 2017

Réformer l'Islam

Omero Marongiu-Perria, Ouvrir l’islam contemporain pour lutter contre le djihadisme (01/07/2017
Saïd Djabelkhir : « L’islam est une spiritualité séculière » (13/06/2017)




VIDÉOS - Marche "des musulmans contre le terrorisme" (08.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 08/07/2017 à 17:37 Publié le 08/07/2017 à 13:50

Des imams français, mais aussi venus d'autres pays européens, ont lancé samedi à Paris une "marche contre le terrorisme" qui doit les mener en Allemagne et en Belgique, appelant à "ne pas associer les musulmans aux crimes commis au nom de l'islam".

Ils ne sont qu'une trentaine au départ des Champs-Elysées, "symbole de l'union nationale" et théâtre d'un récent attentat jihadiste, mais espèrent "lancer un mouvement d'ampleur en Europe", ont-il expliqué à la presse.

"Notre message est clair: on ne peut pas associer l'islam à ces barbares et ces assassins" qui tuent au nom d'Allah, a déclaré l'imam Hassen Chalghoumi, à l'initiative de cette marche, soutenue par l'intellectuel Marek Halter.

Entouré qu'une trentaines d'imams venus de différentes régions de France mais aussi d'Italie, du Portugal ou de Belgique, il a appelé "la société civile à la mobilisation" alors que les attentats jihadistes ont fait ces dernières années des centaines de victimes en Europe et que "7.000 jeunes sont partis en Irak ou en Syrie".

Connu pour ses prises de position contre l'islam intégriste et ses rapports d'amitié avec la communauté juive, qui lui valent critiques etmenaces, l'ancien imam de Drancy (banlieue nord de Paris) est largement rejeté par les responsables musulmans.

Interrogé sur l'absence de fidèles au lancement de cette "marche des musulmans" et sur le rejet de son initiative par le Conseil français du culte musulman (CFCM, organe représentatif et premier interlocuteur du gouvernement), M. Chalghoumi a "refusé d'entrer dans une polémique", relevant qu'il fallait interroger les motivations de ceux qui "critiquent l'initiative d'une marche contre les barbares".

L'imam de Lisbonne, David Munir, a lui salué "une initiative historique en Europe": "Certains personnes commettent des crimes au nom de l'islam, nous sommes ici pour dire 'pas en notre nom'. Pas pour dire que l'islam est une religion de paix, ce que vous savez, mais pour dire que nous cherchons ici notre identité, une identité européenne".


Cette "marche" débute et s'achèvera (le 14 juillet) en France, où vit la plus importante communauté musulmane d'Europe avec plus 3,5 millions de membres. La délégation d'imams se rendra en car dans différents lieux marqués par des attentats: Berlin, Bruxelles, Saint-Etienne-du Rouvray, Toulouse et Nice.

Omero Marongiu-Perria, Ouvrir l’islam contemporain pour lutter contre le djihadisme (01/07/2017
Pour opposer un contre-discours religieux à l’organisation Etat islamique, une lecture critique de la tradition coranique est nécessaire, affirme le sociologue Omero Marongiu-Perria.

LE MONDE | 01.07.2017 à 13h00 • Mis à jour le 01.07.2017 à 14h49 | Propos recueillis par Cécile Chambraud

Des musulmans indonésiens prient à l’occasion de la fin du ramadan, à Surabaya, sur l’île de Java, dimanche 25 juin.
Des musulmans indonésiens prient à l’occasion de la fin du ramadan, à Surabaya, sur l’île de Java, dimanche 25 juin.

L’élan djihadiste né de la crise syrienne a ouvert un débat sur ses causes et ses implications pour l’islam. Certains ­récusent la dimension religieuse du phénomène au profit d’explications (géo) politiques ou sociales ­tandis que d’autres exhortent les communautés musulmanes à faire davantage pour lutter contre le djihadisme. Dans un livre incisif et engagé (Rouvrir les portes de l’islam, Atlande, 150 pages, 15 euros), le sociologue Omero Marongiu-Perria affirme que ­l’islam contemporain ne pourra répondre à ce défi qu’en sortant des conceptions religieuses forgées au Moyen Age qu’il a en partage avec les fondamentalistes. Sa parole porte d’autant plus que, musulman lui-même, et passé naguère par la mouvance des Frères musulmans, il travaille de longue date au sein d’une communauté dont il est l’un des meilleurs connaisseurs et l’un des acteurs.

Vous défendez l’idée que les autorités et les prescripteurs de l’islam ne sont pas en mesure d’opposer un contre-discours religieux à Daech (acronyme arabe de l’organisation Etat islamique) car ils partagent une même ­orthodoxie, une même vision du monde et de l’islam. En quoi consiste-t-elle ?

J’ai résumé cette vision du monde par une expression : le « paradigme hégémonique ». 
Cette notion contient cinq éléments : 
- la vision d’un dieu dominateur sur le monde qui est essentiellement préoccupé par le comptage des actions humaines ; 
- le rapport de soumission à ce dieu qui se traduit par un système de contrainte sur le musulman parfois très violent ; 
- la nécessité de dominer les non-musulmans et le ­fameux statut de dhimmi ou « protégé » de l’Etat musulman ; 
- le rapport de domination sur la femme ; 
- enfin, le contrôle strict de la vie privée et publique par un système de contrainte assez élaboré. 

Ces cinq éléments du paradigme hégémonique forment, ­selon moi, un système cohérent qui continue à structurer la façon dont les leaders religieux musulmans pensent la « société musulmane...




Saïd Djabelkhir : « L’islam est une spiritualité séculière » (13/06/2017)
Publié le 13 juin 2017 à 19h35

À rebours d’une religion des origines fantasmée, dépassant le cadre légaliste, la foi musulmane peut redevenir un vecteur de progrès et de libération, selon ce chercheur, partisan d’une lecture moderniste.

Détourner de l’idéologie mortifère qui a plongé le pays dans la destruction, proposer une autre voie que celle d’une foi rigide et conservatrice, une direction aussi nouvelle que fidèle à l’islam et qui réponde aux attentes d’une jeunesse anxieuse, voilà des chantiers aussi nécessaires qu’ambitieux.  À rebours d’un islam des origines fantasmé par les salafistes, dépassant le cadre légaliste, la foi musulmane peut-elle redevenir le vecteur de progrès et de libération qu’elle a su être au cours de l’Histoire ? Islamologue, chercheur en soufisme, Saïd Djabelkhir, qui a fondé le Cercle des Lumières pour la pensée libre, nous éclaire sur cet islam humaniste et progressiste encore trop mal connu.

Jeune Afrique : Contre les doctrines importées et radicales, l’effort de promotion de l’islam dit du « juste milieu » par l’administration fonctionne-t-il ?

Saïd Djabelkhir : Le discours religieux officiel n’a plus d’audience. Il est révolu et ne fonctionne plus. Le pouvoir doit revoir de fond en comble tous les programmes scolaires et surtout la formation des cadres religieux, trop traditionnels et en rupture totale avec la modernité, avec les questionnements et les besoins des générations actuelles. Que penser d’un imam qui ne connaît rien à la philosophie, à l’histoire des idées, à l’informatique et aux techniques de communication ?

Cette formation rénovée peut-elle diffuser un islam progressiste ?

Il y a de nouvelles lectures de l’islam qui se propagent, comme la lecture coraniste et la lecture moderniste séculaire, pour ne pas dire laïque. Celle dite coraniste considère que le Coran est le seul texte sacré et refuse cette qualité aux hadiths. Et elle développe une interprétation du texte qui récuse par exemple le jihad armé et les châtiments corporels.

La lecture moderniste, qui est la mienne, considère que l’islam est, à l’origine, une spiritualité séculière. Elle se fonde sur l’historicité du texte coranique et a été explorée en profondeur par l’islamologue algérien Mohamed Arkoun. Les lois coraniques, qui ont vu le jour et ont évolué dans l’Histoire, ne peuvent être lues sans tenir compte de ce contexte. Considéré à l’aune de cette historicité, l’islam n’a rien à voir avec l’État ni avec la politique.

Le Prophète n’a fait que communiquer un message spirituel. Mais cet islam originel a été détourné juste après sa mort au profit d’un projet politico-religieux que l’on a appelé le califat. L’islam spirituel originel a été marginalisé et persécuté par les pouvoirs en place et les fuqaha (docteurs de la jurisprudence), qui ont légitimé un islam politique officiel et exclusif.

En en faisant un message immuable, ce sunnisme politique n’a-t-il pas fermé la porte aux lectures progressistes ?

La clé est dans le Coran lui-même, qui nous enseigne que les lois religieuses changent et évoluent dans l’Histoire. Jésus a ainsi changé certaines lois qui existaient avant lui : « Je confirme ce qu’il y a dans la Torah, révélée avant moi, et je vous rends licite une partie de ce qui vous était interdit » (Coran, III, 50). Même le texte coranique a changé selon le contexte : « Si Nous abrogeons un verset quelconque ou que Nous le fassions oublier, Nous en apportons un meilleur, ou un semblable » (Coran, II, 106). Ce « meilleur » évolue avec le temps, les contextes socioculturels et les besoins de la société humaine.

La lecture moderniste de l’islam fait-elle des adeptes en Algérie ?

Elle se propage progressivement parmi les nouvelles générations. Peu d’islamologues la soutiennent, et ceux qui le font n’ont pas les moyens dont disposent les discours religieux officiel ou intégristes. J’ai créé le CLPL pour ouvrir le débat sur nombre de sujets tabous, mais aussi pour essayer de pousser la pensée religieuse vers plus de relativisme et d’esprit critique.




L'imam de Drancy se dit menacé de mort (26.01.2010)

Par M.B. (Lefigaro.fr) avec AFPMis à jour le 26/01/2010 à 16:20 Publié le 26/01/2010 à 16:19

Hassen Chalghoumi avait fait parler de lui en se prononçant en faveur d'une loi pour interdire la burqa. Il entend porter plainte après l'irruption d'islamistes dans sa mosquée.

La polémique sur le port de la burqa dans les services publics n'arrête pas de faire des remous. Quelque 80 personnes ont fait irruption lundi soir dans la mosquée de Drancy, en Seine-Saint-Denis, pour proférer des menaces à l'encontre de son imam, Hassen Chalghoumi, un proche de la communauté juive qui s'est récemment prononcé pour l'interdiction de la burqa.

«Un commando de quatre-vingts personnes, le visage non masqué, a fait irruption dans la mosquée où se trouvaient quelque 200 fidèles», a raconté mardi matin un conseiller de la conférence des imams. Un collectif présidé par Hassen Chalghoumi qui promeut un «dialogue interreligieux et la promotion d'un islam ouvert.»

«Ils ont forcé le passage et se sont emparés du micro après une bousculade. Ils ont alors adressé des menaces et des anathèmes à l'adresse de l'imam, le traitant de ‘mécréant', d''apostat' et affirmant : ‘on va liquider son cas, à cet imam des juifs'», a poursuivi le conseiller. «Il n'y a pas besoin de faire bac +5 pour comprendre que les termes employés équivalent à une fatwa», a-t-il souligné. Et d'ajouter : «Certains ne lui pardonnent pas d'avoir accueilli dans sa mosquée, chaussures enlevées, le président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives, NDLR), Richard Prasquier.»

«Ils souhaitent ma mort»

Le conseiller a notamment mis en cause les Frères musulmans, affirmant que le commando appartenait à «un groupuscule nommé ‘Cheikh Yassine' (du nom du fondateur du Hamas tué en 2004 dans un raid israélien, NDLR), sous obédience des Frères musulmans, manipulé par l'Union des organisations islamiques de France (UOIF).» Fouad Alaoui, président de l'UOIF, a démenti toute implication, tout en condamnant l'agression dont a été victime l'imam.
Hassen Chalghoumi a de son côté annoncé mardi sur Radio Orient sa décision de déposer plainte. «Ils souhaitent ma mort, quelqu'un peut me liquider», a-t-il ajouté, tout en affirmant ne pas craindre les menaces. L'imam a également appelé au soutien des «fidèles» et des «concitoyens» car, a-t-il argué, «c'est notre avenir qui est en jeu».Evoquant les auteurs de l'intrusion, il a expliqué qu'ils voulaient «l'extrémisme et la haine par rapport à mon point de vue sur la burqa et mon rapprochement avec les communautés juive ou chrétienne.»

Son domicile avait été saccagé en mai 2006

Hassen Chalghoumi s'est déclaré favorable à une loi interdisant le voile intégral vendredi dernier, dans un entretien au Parisien. «Mais elle doit être assortie d'un travail pédagogique comme ce qui s'est fait pour le voile à l'école en 2004», a affirmé l'imam, comparant la burqa à «une prison pour les femmes, un outil de domination sexiste et d'embrigadement islamiste.»
Ce n'est pas la première fois qu'Hassen Chalghoumi fait l'objet de menaces. En mai 2006, son domicile avait été saccagé après son appel aux musulmans du monde entier à respecter la mémoire juive, au mémorial de Drancy. Ville où étaient rassemblés les juifs avant d'être déportés vers les camps nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. En janvier 2009, c'était au tour de sa voiture d'être vandalisée. Fin décembre, lors des débuts de l'offensive israélienne dans la bande de Gaza, il s'était notamment inquiété de voir les actes antisémites se multiplier. «Les citoyens français juifs doivent pouvoir vivre en paix», avait-il affirmé, suscitant de nombreuses critiques au sein de sa communauté.
Mardi, une mission parlementaire a préconisé l'interdiction par la loi du voile intégral. Elle recommande que la France prenne des mesures pour la bannir des administrations, des hôpitaux et des transports publics.

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