Le premier ministre israélien en visite à Paris pour le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’ (06.07.2017)
Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme (04.07.2017)
Lutte contre l'antisémitisme : ce que certains intellectuels
français refusent d'admettre (14.07.2017)
Publié le 14/07/2017 à 11:00
25 signataires contre l'antisémitisme
Le droit des Palestiniens à vivre dans un Etat démocratique
ainsi que la lutte contre l'occupation sont trop souvent l'instrument d'un
racisme antijuif.
Une tribune parue dans Libération le 4 juillet met en garde
contre « l'instrumentalisation de la lutte contre l'antisémitisme ». Ce qui
dérange ses auteurs, c'est que, mettant fin à un trop long déni, le Parlement
européen a enfin souligné le lien intime entre l'antisémitisme et la
diabolisation d'Israël, la remise en cause de sa légitimité à exister. Ce déni,
les signataires auraient dû être les premiers à le dénoncer, précisément parce
qu'ainsi ils le soulignent, la lutte contre l'antisémitisme « doit s'inscrire
dans le combat, essentiel et universel, contre toutes les formes de racisme et
de discrimination » . En cause, le vote, le 1er juin dernier, d'une résolution
qui reprend largement une « définition de travail » de l'antisémitisme adoptée
en janvier 2016 par l'International Holocaust Remembrance Alliance (Ihra),
organisation interétatique dont la France est membre. Un texte qui, à en croire
les signataires de cette tribune, « s'écarte de son objet en multipliant les
références à l'Etat d'Israël ».
En effet, la lutte contre l'antisémitisme n'empêche pas de
critiquer librement la politique du gouvernement israélien. Mais est-ce
vraiment de cela qu'il s'agit ? En réalité, ce n'est pas l'antisémitisme qui
est instrumentalisé mais bien la cause de la défense du droit des Palestiniens
à un Etat démocratique, celle de la lutte contre l'occupation, qui est trop
souvent l'instrument d'un racisme antijuif.
La résolution se borne à citer parmi les formes
d'antisémitisme la diabolisation d'Israël, le fait de présenter cet Etat comme
une « entreprise raciste », de l'accuser d'inventer ou d'exagérer la Shoah, ou
encore de remettre en cause son existence comme « collectivité juive » . Or qui
peut sérieusement contester que l'antisémitisme aujourd'hui emprunte de tels
chemins rhétoriques, et cible Israël pour mieux viser le Juif ?
C'est cette réalité, objet d'un trop long déni que la
définition de l'Ihra a le mérite de souligner avec esprit de mesure. Les
auteurs de la tribune en conviennent d'ailleurs à demi-mot lorsqu'ils citent le
texte : « Une critique d'Israël similaire à celle menée contre n'importe quel
autre pays ne peut être vue comme de l'antisémitisme. »
Tendancieuse, la définition de l'Ihra ? C'est si vrai
qu'après avoir été adoptée par ses 31 pays membres, dont certains comme le
Royaume-Uni l'ont traduite en droit interne, elle a également été validée par
56 des 57 pays membres de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe (OSCE), seule la Russie ayant manifesté des réticences. Rappelons que
parmi les pays membres de l'OSCE figurent, outre la quasi-totalité des Etats
européens et nord-américains, la Turquie, l'Azerbaïdjan et le Turkménistan. Les
auteurs de la tribune soupçonneraient-ils ces Etats de complaisance envers le
gouvernement israélien ? Cœur de la démocratie européenne, et parce que, comme
le soulignait Elie Wiesel, la Shoah n'a pas commencé avec les chambres à gaz
mais avec des mots, le Parlement est parfaitement dans son rôle en définissant
l'antisémitisme contemporain pour mieux le combattre.
Au final, où est l'instrumentalisation ? Certainement pas
dans un texte qui s'appuie sur des recherches sérieuses sur les mécanismes
universels de haine et de déshumanisation et qui décrit avec discernement
toutes les formes de l'antisémitisme.
Aussi bien celles, toujours à l'œuvre, utilisées par
l'extrême droite, que celles qui, sous couvert de défendre la cause
palestinienne, remettent en cause l'existence d'Israël en tant qu'Etat juif,
cautionnent des écrits négationnistes et se réjouissent publiquement des attentats
perpétrés contre des civils, présentés comme des « actes de résistance ».
Ce n'est pas aux Palestiniens, ni aux partisans de la paix
côté israélien, que l'on rend service en taisant cette réalité. Une fois
encore, en publiant une tribune qui rend compte de manière partielle et
partiale de l'initiative du Parlement européen, des intellectuels «
progressistes » préfèrent la voie du déni à celle de la lucidité.
SIGNATAIRES
Keren Ann – Artiste
Aurore Bergé – Députée de la 10ème circonscription des
Yvelines.
Laurent Bouvet - professeur de science politique à
l’Université Paris-Saclay
Pascal Bruckner – Romancier, essayiste
Gilles Clavreul, ancien délégué à la lutte contre le
racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT
Benjamin Djiane, adjoint au maire du 3ème arrondissement de
Paris
Jean Paul Fitoussi _ Professeur Emerite Sciences Po Et
Professeur d’économie à la LUISS Rome
Emilie Frèche – Ecrivain, scénariste
Medhi Ghouigarte - Maître de conférences à l'Université de
Bordeaux III-Michel de Montaigne
Jerome Guedj – Conseiller Départemental de l’Essonne, ancien
parlementaire
François Heilbronn - Professeur associé à SciencesPo
Patrick Kessel, journaliste, essayiste
Patrick Klugman - Avocat – Adjoint au Maire de Paris
Marc Knobel – Historien et directeur des études du CRIF
Joël Kotek, professeur de science politique à l’Université
Libre de Bruxelles (ULB)
Marceline Loridan-Ivens, réalisatrice, ancienne déportée
Sylvain Maillard - Député de la 1ʳᵉ circonscription de Paris
Radu Mihaeleanu – Réalisateur
Denis Peschanski - Directeur de recherche au CNRS
Rudy Reischstadt – Politologue
Simone Rodan – Directrice AJC Europe / AJC Paris
Iannis Roder – Professeur d’histoire Géographie
Dominique Reynie - Directeur général de la Fondation pour
l'innovation politique
Dominique Schnapper – Sociologue, membre honoraire du
Conseil constitutionnel et présidente du musée d’Art et d’histoire du judaïsme
et de l’Institut d’études politiques de Paris
Brigitte Stora - Sociologue et journaliste
Manuel Valls – Ancien Premier Ministre – Député de l’Essonne
Le premier ministre israélien en visite à Paris pour le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’ (06.07.2017)
A l’occasion de cette visite en France, la première de Benyamin Nétanyahou depuis l’élection d’Emmanuel Macron, un entretien de travail aura lieu.
Le Monde.fr avec AFP | 06.07.2017 à 21h59 • Mis à jour le 07.07.2017 à 00h38
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/07/06/le-premier-ministre-israelien-en-visite-a-paris-pour-le-75e-anniversaire-de-la-rafle-du-vel-d-hiv_5156974_3218.html
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/07/06/le-premier-ministre-israelien-en-visite-a-paris-pour-le-75e-anniversaire-de-la-rafle-du-vel-d-hiv_5156974_3218.html
Emmanuel Macron et Benyamin Nétanyahou à la cérémonie d’hommage d’Helmut Kohl, le 1er juillet au Parlement de Strasbourg.
Ce sera sa première visite en France depuis l’élection du nouveau chef de l’Etat. Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou se rendra dimanche 16 juillet à Paris pour célébrer le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’, les 16 et 17 juillet 1942.
« L’Elysée confirme la venue de Benyamin Nétanyahou, premier ministre d’Israël, le dimanche 16 juillet, pour la commémoration de la rafle du Vel’d’hiv », a annoncé l’Elysée. « A cette occasion, un entretien de travail aura lieu » entre le président de la République, Emmanuel Macron, et le premier ministre israélien.
La France avait organisé en janvier 2017 une conférence internationale sur le Proche-Orient pour réitérer le soutien de la communauté internationale à la solution à deux Etats, israélien et palestinien. M. Netanyahu n’était pas venu, qualifiant l’événement « d’imposture ».
La dernière visite du premier ministre israélien remonte à janvier 2015 quand il avait défilé à Paris aux côtés du président François Hollande pour exprimer sa solidarité après une série d’attaques djihadistes ayant visé Charlie Hebdo, des policiers et des juifs.
Une polémique lors de la campagne présidentielle
Les 16 et 17 juillet 1942, 13 152 hommes, femmes et enfants juifs furent arrêtés à la demande des nazis et sur ordre du pouvoir français en place pendant l’Occupation.
Retenus dans des conditions inhumaines, pendant quatre jours, 1 129 hommes, 2 916 femmes et 4 115 enfants furent entassés dans les gradins du Vélodrome d’hiver (démoli en 1959), voué aux courses cyclistes, avant d’être emmenés dans les camps de Beaune-la Rolande et de Pithiviers (Loiret).
Là, quelque 3 000 enfants en bas âge furent brutalement séparés de leurs parents, déportés les premiers vers Auschwitz via Drancy. Cette rafle représente à elle seule plus du quart des 42 000 juifs envoyés de France à Auschwitz en 1942, dont seuls 811 reviendront chez eux après la fin de la guerre.
Moins d’une centaine des seuls « raflés » du Vel’d’Hiv’ survécurent aux camps nazis, et parmi eux aucun enfant. Cet épisode tragique de la seconde guerre mondiale a fait polémique pendant la dernière campagne présidentielle, Marine Le Pen ayant été vivement critiquée pour avoir affirmé que la France n’était « pas responsable du Vel’d’Hiv’» (position de de Gaulle, Mitterrand, etc. : la France légitime était à Londres), alors même que le président Jacques Chirac avait reconnu la responsabilité française en juillet 1995.
Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme (04.07.2017)
Au Parlement de Strasbourg. Photo Pascal Bastien pour Libération
Le Parlement européen vient d’adopter une résolution de lutte contre l’antisémitisme qui vise aussi les critiques contre la politique israélienne.
Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme
Le 1er juin, le Parlement européen a adopté une résolution sur une cause essentielle et qui mérite un traitement sérieux : la lutte contre l’antisémitisme. Or, cette résolution, qui reprend l’une des deux propositions déposées, celle des groupes conservateurs (PPE), libéraux (Alde) et socialistes (S&D), pose de sérieux problèmes. Elle s’appuie, en effet, sur la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, l’International Holocaust Remembrance Alliance (Ihra), dont le grave défaut est de s’écarter de son objet en multipliant les références à l’Etat d’Israël.
Ce n’est pas à un Parlement de définir des notions qui font l’objet d’un vaste débat historiographique et de centaines de travaux critiques. Et le texte de l’Ihra est loin d’être une référence indiscutable. Il affirme d’emblée que : «Les manifestations de l’antisémitisme peuvent inclure le ciblage de l’Etat d’Israël» et mentionne à neuf reprises cet Etat ; même si ses auteurs se voient contraints d’ajouter : «Cependant, une critique d’Israël similaire à celle menée contre n’importe quel autre pays ne peut être vue comme antisémite.» Quand il donne ensuite des «exemples contemporains d’antisémitisme dans la vie publique, les médias, l’école, le monde du travail ou la sphère religieuse», il met sur le même plan quatre exemples de propos haineux, stéréotypés, fantasmés ou négationnistes relevant incontestablement de l’antisémitisme, et sept autres portant sur l’Etat d’Israël, sa «politique actuelle» et ses «actions».
C’est cette définition de l’antisémitisme par l’Ihra que la résolution votée par le Parlement européen invite les Etats membres, les institutions et les agences de l’Union à adopter et à appliquer.
Or, si l’on peut considérer qu’il existe dans certaines attaques formulées contre Israël des dérives antisémites, les critiques de la politique des gouvernements israéliens ne peuvent en aucun cas être assimilées à de l’antisémitisme sans nuire tout à la fois au combat contre l’antisémitisme et contre le racisme, et à la liberté d’opinion nécessaire au fonctionnement de nos démocraties.
C’est ce qu’ont exprimé au Parlement européen les députés de gauche et écologistes (GUE - NGL et Verts - ALE) qui refusent cette instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme et souhaitent inscrire celle-ci dans le combat, essentiel et universel, contre toutes les formes de racisme et de discriminations. Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme et défendre les droits des Palestiniens. Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme tout en condamnant la politique de colonisation du gouvernement israélien.
La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations ne se divise pas.
Parmi les signataires :
Bertrand Badie, Etienne Balibar, Fethi Benslama, Sophie Bessis, Rony Brauman, Alice Cherki, Suzanne Citron, Sonia Dayan-Herzbrun, Michel Dreyfus, Ivar Ekeland, Jeanne Favret-Saada, Marcel-Francis Kahn, Catherine Lévy, Gilles Manceron, Gustave Massiah, Elise Marienstras, Fabienne Messica, Véronique Nahoum-Grappe, Emmanuel Naquet, Jacques Rancière, Bernard Ravenel, Carole Reynaud-Paligot, Michel Rotfus, Elisabeth Roudinesco, Shlomo Sand, Michel Tubiana, Dominique Vidal…