mardi 11 juillet 2017

Relations internationales : Russie et Etats-Unis

Poutine réduit de 755 le nombre d’employés de l’ambassade américaine en Russie (30.07.2017)
Syrie: Washington prêt à travailler avec Moscou (06.07.2017)
Bruno Tertrais : «Tous les étages de l’édifice international sont ébranlés» (30.06.2017)

Poutine réduit de 755 le nombre d’employés de l’ambassade américaine en Russie (30.07.2017)


Le président russe a réagi aux nouvelles sanctions américaines contre Moscou, estimant que des changements positifs dans les relations entre les deux pays ne sont « pas pour bientôt ».

Le Monde.fr avec AFP | 30.07.2017 à 20h19 • Mis à jour le 31.07.2017 à 11h37 | Par Intérim

Moscou va réduire de 755 personnes, soit plus des deux tiers, les effectifs travaillant pour le corps diplomatique américain en Russie, diplomates ou employés locaux. « Plus d’un millier d’employés – diplomates et techniciens – ont travaillé et travaillent toujours en Russie : 755 d’entre eux devront cesser leurs activités », a déclaré Vladimir Poutine le 30 juillet au soir. Dans un entretien dont des extraits ont été diffusés sur la chaîne publique Rossiya 1, l’homme fort du Kremlin a précisé que ces derniers seraient priés de quitter le territoire d’ici au 1er septembre.

« Voilà longtemps que nous attendons, a déclaré le président russe. Il y a toujours un espoir que la situation changera. Mais, visiblement, si elle change, ce n’est pas pour bientôt. (…) Nous devons, je pense, montrer que nous non plus, nous ne resterons pas sans répondre. » Cette sévère « réponse » revient à réduire à 455 agents le personnel diplomatique américain en Russie, soit exactement autant que les diplomates russes tolérés aux Etats-Unis. La « parité diplomatique est rétablie », peut-on lire dans la presse russe.

« C’est un acte regrettable et injustifié, a réagi le département d’Etat américain dans un communiqué. Nous évaluons l’impact d’une telle limitation et la manière dont nous allons y répondre. »

Question très « sensible »

Le président russe a rappelé que la présence du corps diplomatique américain en Russie est une question très « sensible ». Selon M. Poutine, la vraie question est de « savoir s’il faut faire plus que ce qui vient d’être défini ». Le président russe a rappelé que le volume des relations commerciales et économiques de la Russie avec les Etats-Unis est à l’heure actuelle très modeste : « Rien de comparable avec le volume commercial de la Russie avec la Chine, l’Union européenne ou de nombreux autres pays à travers le monde. » La sécurité constitue en revanche un domaine très important de coopération, selon le président russe, avec « la régulation des armes de destruction massive, la lutte contre le terrorisme » ou encore « la cybersécurité ».

Alors que les Etats-Unis soupçonnent la Russie d’avoir interféré dans l’élection présidentielle américaine, Vladimir Poutine a insisté sur sa main tendue à Washington pour lutter ensemble contre la cybercriminalité. Mais « au lieu de commencer à travailler de manière constructive, nous entendons ces accusations infondées d’ingérence dans les affaires intérieures des Etats-Unis », a reproché le président russe, avant d’esquisser une liste des domaines dans lesquels il serait souhaitable que la Russie collabore, ou continue de collaborer, avec les Etats-Unis.

En attendant, si les « tentatives de pression sur la Russie » augmentent, « nous pouvons examiner d’autres variantes de ripostes. Mais j’espère que nous n’aurons pas à le faire », a mis en garde Vladimir Poutine.

Nouvelles sanctions américaines

Ces sanctions interviennent en représailles à des mesures similaires décidées par Barack Obama, qui avait ordonné l’expulsion de 35 Russes en décembre 2016, et trois jours après le vote par le Sénat américain – à 98 voix contre 2 – de nouvelles mesures anti-russes, un projet de loi dénoncé par Moscou mais aussi critiqué dans l’UE parce qu’il risque d’affecter les entreprises européennes, et à long terme ses approvisionnements en gaz russe.

Le texte a été soumis à Donald Trump, qui a désormais le choix de le signer en l’état ou de le bloquer. Vendredi, la Maison Blanche a annoncé que le président le validerait, lui donnant ainsi force de loi, alors même qu’il tente depuis son élection d’améliorer les relations avec Moscou, au grand dam de nombre d’élus de son parti.

A l’annonce de ces mesures, le ministère russe des affaires étrangères avait estimé que ces sanctions étaient contraires au droit international et confirmaient « l’extrême agressivité des Etats-Unis dans les affaires internationales ». Le ministère a également prévenu que Moscou répliquerait en cas de nouvelle expulsion de diplomates russes par les Etats-Unis.

 Lire aussi :   Moscou réplique aux sanctions prises par les Etats-Unis


Les employés du corps diplomatique américain appelés à quitter le pays sont rattachés à l’ambassade américaine à Moscou ou à ses consulats de Saint-Pétersbourg, Ekaterinbourg (Oural) ou Vladivostok (Extrême-Orient). Les sanctions comprennent également la fin de la mise à disposition d’une résidence de loisirs en périphérie de Moscou ainsi que d’entrepôts rattachés jusqu’alors à l’ambassade.

Syrie: Washington prêt à travailler avec Moscou (06.07.2017)
Par Le Figaro.fr avec AFPMis à jour le 06/07/2017 à 07:35 Publié le 06/07/2017 à 07:20

Les Etats-Unis se sont dits prêts hier à travailler avec la Russie en Syrie a annoncé le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson avant une rencontre demain entre les présidents russe et américain.

"Les Etats-Unis sont prêts à explorer la possibilité d'établir avec la Russie des mécanismes communs assurant la stabilité (en Syrie), y compris des zones d'exclusion aérienne, des observateurs du cessez-le-feu, et une livraison coordonnée de l'aide humanitaire", a écrit le chef de la diplomatie.


"Si nos deux pays travaillent ensemble pour établir la stabilité sur le terrain, cela posera des fondations pour une avancée vers un accord sur l'avenir politique de la Syrie", a-t-il ajouté, alors que les relations entre Washington et Moscou se sont récemment tendues sur la Syrie.


Il souligne la "responsabilité particulière" de la Russie, alliée du régime de Damas, pour "parvenir à la stabilité" en Syrie, et estime que la Russie a "l'obligation d'empêcher toute utilisation d'armes chimiques par le régime d'Assad".

Washington a menacé le régime syrien de riposter s'il lançait une nouvelle attaque à l'arme chimique."Si nous ne parvenons pas à la stabilité en Syrie, nos progrès pour vaincre le groupe Etat islamique seraient annulés", fait valoir le ministre.

Les Etats-Unis sont officiellement présents en Syrie pour conseiller et pour armer les Forces démocratiques syriennes (FDS) qui luttent contre le groupe Etat islamique.

Mais les relations se sont tendues entre le régime de Damas et les forces soutenues sur place par Washington, qui a abattu le 18 juin un avion syrien en expliquant que l'appareil menaçait des FDS.

Ces tensions ont par ricochet détérioré les relations avec la Russie, qui avait dénoncé comme un "acte d'agression" la destruction de l'avion syrien, reprochant à Washington de ne pas l'avoir prévenue.
M. Tillerson a qualifié hier ces incidents de "mineurs" et s'est félicité de la coopération entre Washington et Moscou en matière de communication militaire, pour notamment définir en Syrie des zones dites de "deconfliction" visant à éviter les incidents aériens.

Les Etats-Unis et la Russie "ont encore certainement des différends sur un certain nombre de sujets, mais nous avons le potentiel pour nous coordonner de manière appropriée en Syrie afin de parvenir à la stabilité", a-t-il ajouté.

La Syrie sera au menu du tête-à-tête vendredi entre le président américain Donald Trump et son homologue russe Vladimir Poutine, en marge du G20 à Hambourg, en Allemagne.

LIRE AUSSI :

» Le nouvel interventionnisme de Trump à l'épreuve des Russes


Bruno Tertrais : «Tous les étages de l’édifice international sont ébranlés» (30.06.2017)
Par Alexandra Schwartzbrod — 30 juin 2017 à 17:46

Illustration Simon Bailly pour Libération 
Selon l’expert en relations internationales, l’idéologie de l’Etat islamique et le nationalisme prennent leur source dans la nostalgie d’une prétendue grandeur passée. De quoi cristalliser à nouveau le monde en deux blocs, avec toujours les mêmes leaders, les Etats-Unis de Trump d’un côté et la Russie de Poutine de l’autre.

  Bruno Tertrais : «Tous les étages de l’édifice international sont ébranlés»
A l’ère du retour de la nation et du jihad global, le passé est aujourd’hui partout, avec toutes les passions qu’il charrie, écrit Bruno Tertrais dans son dernier ouvrage, la Revanche de l’histoire (Odile Jacob). Pour cet expert en géopolitique directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, il est donc plus utile que jamais de «regarder le passé avec les yeux de la raison».

Mise au ban du Qatar, changement de tête en Arabie Saoudite, regain de l’Iran, partition de la Syrie… Le Moyen-Orient tremble sur ses bases. Est-ce un énième retour de l’histoire ?

Ces événements vont dans le sens d’une clarification du jeu. Sous la pression de Donald Trump, l’Amérique est revenue à ce qui est sa position «par défaut» dans le Golfe depuis la fin des années 70 : pro-saoudienne, anti-iranienne. Du coup, la cristallisation en deux blocs se renforce. D’un côté, l’alliance Syrie-Hezbollah-Iran, avec la Russie en soutien actif, Moscou cherchant à damer le pion aux Occidentaux et à préserver ses intérêts - davantage qu’à lutter contre Daech. De l’autre, le camp des monarchies du Golfe, soutenu par les Etats-Unis, avec ses alliés, l’Egypte notamment. Le «vilain petit Qatar» est une exception qui déplaît à ses voisins : il s’est fait connaître avec la chaîne Al-Jezira, très novatrice lors de sa création ; il soutient la mouvance islamiste des Frères musulmans et il prétend avoir des relations normales avec l’Iran. Forts du soutien américain, les Saoudiens veulent le faire rentrer dans le rang, via le blocus, et Doha va devoir choisir son camp. Quant à la Syrie, elle est en train de se diviser en deux : l’Ouest sous contrôle syro-iranien, avec l’appui de la Russie ; l’Est dans lequel Daech a été combattu efficacement par les Kurdes et les Occidentaux, qui reprendront bientôt Mossoul et Raqqa, les deux bastions de l’Etat islamique. Le «califat» proclamé en 2014 est en train de se réduire comme peau de chagrin…

Les plus grands perdants, ce sont les démocrates et les libéraux, soutenus par personne ou presque. Face à cette complexité, l’histoire est convoquée comme métaphore ou explication. La métaphore usuelle est celle de la «guerre de Trente Ans». Elle «dit» quelque chose sur la durée, la violence et l’importance de ce qui se passe. Mais l’analogie a ses limites. Une multitude d’idéologies s’affrontent au Moyen-Orient : wahhabisme d’Etat, islamisme politique des Frères musulmans, salafisme radical jihadiste, chiisme révolutionnaire, autoritarisme laïc, démocratie libérale… Et il ne faut pas s’attendre à une «paix de Westphalie», un grand règlement politique d’ensemble. Ou alors en ayant à l’esprit ce que disait l’ex-ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier : «Ce que la paix de Westphalie nous a appris, c’est qu’on ne pouvait pas avoir à la fois la vérité complète, la clarté et la justice.»

Pourquoi parlez-vous de «revanche» de l’histoire, au Moyen-Orient notamment ?

Au Moyen-Orient, c’est flagrant. La confessionnalisation des rivalités politiques sert de légitimation aux combattants sunnites ou chiites en Syrie. Des deux côtés du Golfe, on rejoue la bataille de Kerbala (1). Daech établit un «califat» et procède à un «nettoyage culturel» des espaces qu’il contrôle. Ce retour du religieux, qui conteste les idéologies progressistes, est la phase ultime d’un processus commencé à la fin des années 70. L’autre manifestation symbolique majeure de Daech, c’est d’avoir «effacé la ligne Sykes-Picot» (2). En fait, Abou Bakr Al-Baghdadi, «le briseur de frontières», s’est contenté de faire aplanir quelques marqueurs de la frontière irako-syrienne… Mais c’était un acte d’une forte portée symbolique.

Au-delà, une conjonction de phénomènes remet le passé des nations au cœur de l’actualité internationale. L’échec du socialisme et la critique du libéralisme, le vertige du progrès et de la mondialisation ont conduit au succès du populisme et du nationalisme. Deux idées qui s’appuient sur le «passé rayonnant» plutôt que sur «l’avenir radieux». Avec des conséquences différentes pour les uns et les autres : en Occident, la tendance est au grand enfermement ; en Russie, en Turquie, en Chine, c’est l’inverse, on souhaiterait repousser les frontières, c’est une forme de néo-impérialisme. Et partout c’est la nostalgie de la grandeur passée. On voit se développer une rhétorique un tantinet excessive sur «la fin de l’ordre libéral». On avait déjà dit ça dans les années 2002-2003, sous Bush…

Comment qualifier les bouleversements planétaires que nous vivons ?

Nous vivons un «âge de la disruption», pour employer un terme à la mode, car tous nos repères - non seulement géopolitiques, mais aussi économiques, culturels, technologiques… - sont en mouvement. Mais on surestime toujours la prévisibilité de l’ordre ancien. J’appelle cela «l’illusion rétrospective de la stabilité». Ce n’est pas ce qu’on avait l’impression de vivre pendant la guerre froide ! Ce qui est vrai, c’est que tous les étages de l’édifice international sont simultanément ébranlés : le multilatéralisme de 1945 et les alliances occidentales des années 50 ; les principes d’inviolabilité des frontières et de non-annexion de territoires par la force, consolidés par le droit et la pratique au milieu des années 70 ; la libéralisation du commerce international et la mondialisation, que l’on peut situer dans les années 90 ; l’interventionnisme libéral, en soutien du droit international, qui a connu son apogée dans la décennie qui a suivi.

Dans ce chaos, sur quels points de stabilité peut-on compter ?

Toutes les grandes institutions restent debout : L’ONU, le FMI, la Banque mondiale, l’OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe], l’Otan, l’UE. Tous les grands accords multilatéraux tiennent : aucun accord commercial en vigueur n’a été déchiré, tous les grands instruments destinés à contrôler les armes les plus dangereuses, notamment nucléaires, sont encore là. Il me semble plus juste de parler de «pause» dans le développement et le renforcement du multilatéralisme et de la mondialisation. Sur le plan de la compétition des puissances, les Etats-Unis demeurent au sommet. Aucun pays n’a une telle capacité de projection de puissance militaire, un tel réseau de bases permanentes, autant d’alliés.

La Russie et la Chine progressent, mais ce sont des nains dont la capacité d’action se limite à leur environnement. Aucun pays n’a à la fois les ressources naturelles, la capacité d’innover et l’aptitude à intégrer cette innovation dans l’appareil productif. Aucun pays n’a la même force d’attractivité culturelle ou migratoire. Le tout avec une situation géographique privilégiée. Ce qui n’enlève rien à l’immense révolution économique qu’a constitué le transfert en Chine de la production d’une grande partie des biens de consommation. Ni à la montée en puissance de l’Inde ou au décollage d’une partie de l’Afrique. Mais il ne faut pas voir la géopolitique en termes de jeu à somme nulle : ceux qui arrivent ne chassent pas nécessairement ceux qui sont présents. Le monde n’est ni un jeu de go ni un grand échiquier. Bien sûr, l’Amérique est dans une phase de repli. Elle a, pour quelque temps, un visage moins attractif ! Mais on ne peut pas dire qu’elle est devenue «isolationniste». Elle intervient militairement davantage que sous Obama…

Est-ce que l’on ne surestime pas la puissance de la Russie ?

La Russie est un village Potemkine. Elle a deux atouts : son statut de membre permanent du Conseil de sécurité et ses armes nucléaires - c’est même le premier arsenal mondial. Mais sa puissance militaire n’est plus que l’ombre de ce qu’était celle de l’URSS. Et surtout, Vladimir Poutine, au pouvoir depuis plus de quinze ans, s’est montré incapable ou non désireux de pallier deux grandes faiblesses du pays : une économie dépendante de l’exportation d’hydrocarbures et une population déclinante, en mauvais état de santé.

Avec la crise grecque et le Brexit, on a cru l’Europe à terre. Peut-elle se redresser ?

Le problème du rapport de l’Europe à l’histoire s’est posé ces dernières années d’une double manière. D’abord, elle se voulait une avant-garde post-historique, mais elle a appris à ses dépens que l’histoire n’était pas finie. Ensuite, elle a pu craindre de «sortir de l’histoire» au moment où la conjonction de la crise de l’euro, des migrants et du terrorisme l’a fait vaciller. Mais sa réaction a été assez formidable. On sous-estime d’ailleurs la résilience de ce projet et sa force politique. J’ai gagné beaucoup de paris au plus fort de la crise grecque auprès d’amis britanniques et américains persuadés que l’euro n’allait pas s’en sortir… Comme toujours, l’Europe avance par les crises. Aujourd’hui, elle fait face à un nouveau défi : celui qui résulte du Brexit et de Trump. Je crois que cela va être une opportunité d’avancer. A condition de ne pas répéter les erreurs du passé - mettre en place des projets formidables sans aller jusqu’au bout de leur logique : l’euro sans convergence des politiques économiques, Schengen sans véritable contrôle des frontières extérieures…

On a beaucoup parlé du retour de la guerre froide, est-ce vraiment pertinent ?

Je me suis longtemps refusé à utiliser cette métaphore. Désormais, elle me paraît moins impertinente. La Russie de Poutine est engagée dans un projet revanchiste, qui vise à restaurer sa gloire passée au détriment de l’Occident. Elle cherche à influencer et à diviser l’Europe par tous les moyens. Et elle a une idéologie à proposer : un alliage d’autoritarisme politique et de régression sociale qui prétend être basé sur les «vraies valeurs» de l’Europe. C’est donc pour elle un combat «total», même si l’on peut encore coopérer ponctuellement face à des menaces communes. A certains égards, la Russie de Poutine est même plus dangereuse que l’URSS, qui était une puissance du statu quo défendant ses «acquis» et s’abstenant de toute provocation majeure. Quand on voit la manière dont les forces russes se comportent aux marches de l’Europe, on peut craindre un incident sérieux…

Une autre référence historique peut nous aider à mieux comprendre le présent : celle du «retour à la normale». Le monde en reviendrait à ce qu’il était jusqu’en 1945 : une compétition géopolitique classique. Une vision intellectuellement séduisante. Elle signifierait que la période 1945-1990 aurait été un accident historique. C’est celle que portent certains responsables américains.

L’histoire étant un éternel recommencement, peut-on prédire l’état du monde dans vingt ans ?

J’imagine mal un réalignement des puissances. Il n’y aura pas d’alliance entre la Russie et la Chine au-delà d’une coopération tactique : trop de choses les opposent ou les conduisent à se méfier l’une de l’autre. Seul un grand conflit ou un bouleversement politique majeur à Moscou ou à Pékin pourrait changer la donne.

Si l’on se réfère au dernier rapport de prospective du National Intelligence Council américain, dont j’ai préfacé l’édition française, on peut envisager trois grands «méta-scénarios». Le premier, «un monde d’archipels», que j’appelle «le monde de Trump», celui du repli sur soi ; le second, «un monde de sphères d’influence», qu’on peut appeler «le monde de Poutine», qui est celui de la compétition géopolitique décrite plus haut ; et enfin un scénario plus original, «un monde de communautés», celui de l’effacement des Etats au bénéfice des villes, des entreprises, des réseaux… «le monde de Bill Gates». Je prédis que le monde de 2030 sera un mélange des trois.

(1) En 680, Hussein, petit-fils du Prophète, est massacré par les troupes du calife de Damas. Ainsi s’inscrit dans le sang le schisme entre sunnites et chiites. Les chiites sont les partisans de la famille du prophète Mahomet ; les sunnites sont ceux qui par opportunisme, peur ou embrigadement, soutiennent le calife. Les chiites ne suivent que le Coran, les sunnites y ajoutent les hadiths (dits, actes et jugements du prophète) de la Sunna. 

(2) Partage du Proche-Orient fixé par des accords conclus en 1916 entre la France et le Royaume-Uni.

Alexandra Schwartzbrod

LA REVANCHE DE L’HISTOIRE de BRUNO TERTRAIS Odile Jacob, 144pp., 18,90€.


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